Fleurs et soie à Lyon
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Fleurs et soie à Lyon
Fleurs et soie à Lyon Des fleurs de nénuphar stylisées représentées sur les étoffes chinoises aux bouquets de rose des soyeux lyonnais, les fleurs inspirent depuis longtemps les dessinateurs textiles. On les retrouve fréquemment aussi bien au centre de la composition que comme simple ornement, leur représentation évoluant au fil du temps et des styles comme autant de témoignages d’une époque. La variété et la richesse de leurs couleurs, de leurs formes, mais aussi de leur symbolisme fournissent un inépuisable répertoire de motifs. La fleur a ainsi longtemps constitué la base du décor de la Fabrique lyonnaise. Mise en carte du velours fond prune chiné nuée à branches de fleurs et feuilles de laurier pour la Salle des Ambassadeurs au Palais de Saint-Cloud, Jean-François Bony, 1802-1805, Lyon, MT 40478 Lyon et la fleur A Lyon, fleurs, peinture et soie sont intimement liées. Le motif floral est en effet très prisé et présent dans les étoffes de la Fabrique. Dès la deuxième moitié du XVIIe siècle, la fleur est mise à l’honneur dans les soieries lyonnaises et elle s’imposera comme un élément dominant à partir du XVIIIe siècle, notamment grâce aux compositions de Philippe de Lasalle. L’École royale de dessin, créée en 1756, puis en 1807 pour succéder à cette dernière, l’École des Beaux-Arts de Lyon voit le jour. Toutes deux, proposent à leurs élèves une « classe de la Fleur » dont la vocation est de former aussi bien des peintres que des dessinateurs pour l’industrie de la soie. Ainsi, alors qu’une école lyonnaise spécialisée dans la peinture de fleurs se développe au XIXe siècle, bon nombre de dessinateurs restés anonymes pour la plupart mais aussi de peintres parfois de renom, dont Antoine Berjon, produisent pour la Portrait d'Antoine Berjon, Jules Reybaud, Lyon, 1854, MT 7910 Fabrique des dessins qui seront ensuite mis en carte. La « frontière » entre peintres et dessinateurs s’avère ainsi floue. En tout cas, les progrès techniques accomplis dans le domaine du tissage mais aussi de la teinture permettent de révéler tout le talent de ces artistes, en offrant à leurs compositions un rendu plein de nuance et de précision. L’essor de la botanique et de l’horticulture au XIXe siècle dans la région lyonnaise accompagne et enrichit encore cette prédilection constante pour les fleurs. Les élèves de la classe de la Fleur pouvaient d’ailleurs se rendre librement au Jardin des Plantes situé sur les pentes de la Croix-Rousse – avant son transfert au Parc de la Tête d’Or - pour réaliser des études d’après nature de roses, de pivoines, d’hortensias... Ainsi, si dès le XVIIIe siècle la fleur s’épanouit dans les tissus, le XIXe siècle est donc à plus d’un titre le siècle d’or de la fleur à Lyon. La rose « J’ai un faible, je l’avoue, pour la rose ; elle a une sorte d’ascendant sur mon pinceau, sa forme me séduit, son coloris m’impose et, comme la reine des fleurs, elle me captive ». Antoine-Nicolas Joubert de l’Hiberderie, Le Dessinateur pour les Fabriques d’Etoffes, d’Or, d’Argent et de Soie, 1765 Qu’il s’agisse de soieries ou d’horticulture, la rose est souvent considérée comme la reine des fleurs. À Lyon aussi, elle occupe une place de choix. Quels que soient les styles et les modes, du classicisme à l’Art Déco, de Louis XIV à Napoléon Ier, seules ou associées à d’autres espèces, en boutons ou épanouies, représentées avec un souci de réalisme ou au contraire très stylisées, les roses tissées ou brodées ont connu un succès qui ne s’est jamais démenti. Satin blanc, or et soie nuée, à couronnes de marguerites, bouquets de roses, rosaces et fleurs impériales commandé pour la Chambre à coucher de l'appartement de l'Impératrice Marie-Louise au Palais de Versailles, Jean-François Bony, Lyon, 1815, MT 36456.1 Représentations de la fleur Les représentations des fleurs dans les textiles, oscillant entre stylisation et réalisme, évoluent au gré des styles et des époques et de la valeur symbolique qu’on leur attribue. Elles se font le reflet d’une époque. Le choix même d’une espèce s’avère significatif. Sous le règne de Louis XIV, en accord avec l’esthétique qui sera mise en œuvre à Versailles, les fleurs se font imposantes. Elles sont fréquemment stylisées, plus grandes que nature et encadrées de rinceaux et de feuillages. Ces motifs floraux, jouant cependant souvent sur la symétrie, sont représentatifs du style baroque. L’impression de relief est en général produite par une simple bichromie et des effets de tissage. Laize de brocatelle à décor de fleurs, fruits et feuilles stylisés, e e 2 moitié du XVII siècle, MT 22051 e Motifs floraux entre deux bordures de tiges sinueuses, premier quart au XVIII siècle, MT 31684 Au début du XVIIIe siècle, avec les avancées techniques et notamment les recherches de Jean Revel, surnommé le Raphaël de la Fabrique, la représentation des fleurs devient plus naturaliste. Les fleurs sont modelées en relief et trouvent aisément leur place dans le style rocaille. Garniture de dossier de siège, Philippe de Lasalle, vers 1770, Lyon, MT 2868 Sous Louis XV, les fleurs se font plus petites et sont souvent associées à des plumes et des rubans. Ces tendances se confirment sous Louis XVI : les bouquets se miniaturisent alors que les fleurs se marient élégamment aux fruits, aux rubans, aux perles, à des instruments de musique ou des attributs bucoliques, apparaissant fréquemment sur un fond de lignes verticales. Tiges sinueuses fleuries sur fond rayé, époque Louis XVI, France, MT 3114 Laize du meuble d'été de la Chambre de Marie-Antoinette au château de Versailles, en gros de Tours blanc broché, dessin de fleurs nuées, rubans et plumes de paon, dit « Grand broché de la Reine », dessin de Jean-François Bony, Lyon, retissé entre 1900 et 1905, MT 27696 Sous l’Empire : avec le changement de régime, les fleurs restent à la mode mais le choix des espèces connaît un certain renouveau. À côté des roses et des œillets classiques, on trouve sur les étoffes de nouvelles espèces : des fritillaires (surnommées couronnes impériales), des violettes, des hortensias notamment, mais aussi des palmiers et des fleurs de lotus, témoignages d’un goût pour l’exotisme et bien sûr évocations des campagnes d’Egypte. La mode est aux fleurettes, mais également aux bouquets souvent représentés dans des vases antiques, caractéristiques de l’esthétique néoclassique. Tenture et bordure destinées à la Sala dei Principi du Palais royal de Milan, Lyon, 1811-1813, Maison Chuard et Cie, MT 26958 Après le retour en vogue du lys, emblème royal, sous la Restauration, le Second Empire a tendance à mélanger les styles et à présenter des motifs ou des compositions s’inspirant des décors à la Bérain du XVIIe siècle ou du style rocaille du XVIIIe siècle. Des motifs d’inspiration asiatique sont également représentés : la mode est donc à l’éclectisme. Laize à bouquets et ruban ondulant, Godemard et Meynier, Lyon, Second Empire, MT 12166 Dessin pour une tenture "à la Bérain", Arthur Martin, Paris, 1873, MT 46525 « En plus des fleurs nobles, traditionnellement brochées sur les étoffes, comme la rose ou le lys, on trouve des fleurs exotiques, fleurs de cactus, orchidées, ou des fleurs communes, magnifiées par la soie, liserons, pavots, bouillons blancs, phlox, mimosas... Les compositions, également, sont entièrement repensées en jonchées, semis, buissons... Les pétales tombés de la fleur, les feuilles mortes, les branches dépouillées ou enneigées constituent des sujets. Les éléments du règne végétal sont aussi stylisés pour accentuer leur majesté, agencés de manière fantaisiste pour former des papillons, dispersés pour créer de nouveaux réseaux sur une laize. Le trompe-l’œil, enfin, fait son apparition, transcrivant le velouté d’une fleur, le satiné d’un ruban en relief, la légèreté d’une plume » (extrait du catalogue en ligne « Le Génie de la Fabrique ») Satin broché sur fond noir Les Chrysanthèmes, Bachelard et Cie, Lyon, 1894, MT.25823 Soleil imprimé sur fond satin noir, Ogier, Duplan et Cie, Maison, Lyon, 1894, MT 25829 Rangées de fleurs stylisées, Raoul Dufy, Lyon, 1925-1930, MT.636.1.16652.2 Le renouveau du Modern Style : les années 1920 marquent un renouvellement profond dans la représentation des fleurs. Les tissus dessinés par Raoul Dufy ou Paul Iribe exhibent des fleurs stylisées : roses, pivoines, arum ou anémones se parent de formes plus géométriques et de couleurs vives, tranchées. Le motif floral révèle lui aussi l’émergence du Modern Style. Coupes de roses, Paul Iribe, Lyon, 1914, MT 31608 Retrouvez nos fiches Activités et Ressources pour prolonger le parcours autour des fleurs.