Télécharger le pdf - La Jaune et la Rouge
Transcription
Télécharger le pdf - La Jaune et la Rouge
P.88 Arts et Lettres 28/09/10 12:54 Page 88 ARTS, LETTRES ET SCIENCES MUSIQUE EN IMAGES GALA AU METROPOLITAN OPERA 1991 Pavarotti, Domingo, Freni Direction James Levine ■ Le Metropolitan Opera de New York est une des scènes d’opéra les plus célèbres et la qualité de ses productions est très élevée, même si des esprits chagrins les trouvent trop « classiques ». Pour célébrer l’anniversaire des vingt-cinq ans de son déménagement au Lincoln Center, on organisa en 1991 ce gala exceptionnel, avec sur scène une pléiade proprement inégalable de stars. Le besoin de retransmission à la télévision de l’événement (les places dans la salle se vendirent jusqu’à 2 500 dollars) nous a permis d’en conserver le témoignage, édité il y a quelques semaines sur un double DVD Deutsche Grammophon. Après un Stars & Stripes chanté par toute la salle debout, l’acte final de Rigoletto réunit le duc de Mantoue de Pavarotti, le bouffon de Leo Nucci, le Sparafucile de Nicolaï Ghiaurov et la Gilda de Cheryl Studer. Dans cet acte tragique, les airs (notamment 88 LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 Gaston Méjane (62) 1) ÉNONCÉS Ce mois-ci une donne de la division nationale 2 par paires. Vous êtes rouge contre vert. Votre main en Nord. ♠ ♥ ♦ ♣ 2 DVD DG 073 4582 Trois heures de musique, témoignages des heures glorieuses du Met, à une époque où beaucoup de salles européennes se damnaient pour avoir une seule de ces vedettes sur la scène. Un acte de Rigoletto, un de Othello, et l’acte central de La Chauve-Souris, prolongés par un récital festif forment un programme équilibré. Les productions dont ces actes d’opéra sont extraits sont très caractéristiques du Met, avec ses décors dignes du cinéma et ses costumes riches, adaptés à la taille de la salle, représentations à mille lieues des mises en scène et décors modernes, « recherchés » et minimalistes que l’on voit sur nos scènes d’aujourd’hui. BRIDGE V 9 3 2 V 10 9 8 3 R 10 6 5 LES ENCHÈRES O N E S 1♥ – – 3♠ – ? 3♦ 4♦ x – 3♦ est une enchère non forcing. Votre partenaire a fait un contre d'appel rouge contre vert en sandwich donc il a une très bonne main. Que faites-vous sur 4♦ ? Solutions page 90 La Donna è mobile, «Souvent femme varie, bien fol qui s’y fie », pilier des récitals de ténors) et ensembles (le célèbre quatuor) se succèdent jusqu’à la tragédie finale. Nous avons là un Pavarotti brillantissime. D’ailleurs, contrairement à ce qu’on a beaucoup dit, il est visuellement tout à fait crédible, encore jeune et habillé en aristocrate. Conscient du côté exceptionnel de la soirée, Pavarotti en fait beaucoup dans son célèbre air, tenant plusieurs secondes de plus le do final, à la grande joie des spectateurs. Dans l’esprit d’une soirée de gala, la réalisation vidéo privilégie les gros plans sur les chanteurs. Dans Othello , c’est l’autre ténor vedette du Met, Placido Domingo, qui joue le Maure de Venise. Il met en cause l’honneur pourtant irréprochable de la Desdémone de Mirella Freni, admirable de sensibilité et de souffrance. Magnifique également. Après Verdi, le rideau s’ouvre sur le second acte de La Chauve-Souris de Johann Strauss, où l’intrigue, au milieu d’airs et d’ensembles sur des valses viennoises, donne le prétexte à un récital des plus grands chanteurs du moment et des gloires du Met. Présentés par la jeune AnneSofie von Otter se succèdent, excusez du peu, Hermann Prey, June Anderson, Frederica von Stade, Kathleen Battle, Thomas Hampson, Samuel Ramey, Mirella Freni. Le bouquet final étant un duo de La Bohème par Pavarotti et Domingo, exceptionnel car c’était la première fois que ces deux monstres sacrés chantaient ensemble (bien avant les célèbres «concerts des trois ténors»), et parce que Domingo y chante la partie de baryton. Le véritable architecte de cette soirée, c’est son chef d’orchestre James Levine. Exemple de fidélité, Levine est encore aujourd’hui le directeur musical du Met, où il a désormais dirigé plus de 2 500 fois. ■ Marc Darmon (83) P.88 Arts et Lettres 29/09/10 9:20 Page 89 RÉCRÉATIONS SCIENTIFIQUES HORS DES SENTIERS BATTUS Les sentiers les moins fréquentés sont toujours les plus pénibles et ne sont pas toujours les plus glorieux. LOUIS DUMUR, Petits aphorismes ■ Lorsqu’une époque se termine après avoir atteint son apogée – comme le Romantisme avec Brahms – deux voies s’offrent aux créateurs, en musique comme dans les autres domaines : rompre avec le passé et chercher à inventer un langage nouveau, comme l’a fait l’École de Vienne, ou tenter la synthèse de tout ce qui précède en faisant mieux, comme l’a entrepris Bach. La seconde est évidemment la plus difficile, et il n’y a eu qu’un Bach. Trois contemporains des années 1900 André Caplet, Jean Cras et Vaughan Williams, nés dans les années 1870, ont en commun d’avoir cherché de nouvelles voies non en réaction contre les musiques classique et romantique mais en capitalisant sur leurs acquis, par des harmonies toujours tonales mais plus complexes et subtiles que leurs prédécesseurs, par des associations de timbres nouvelles. Et, ce faisant, ils se distinguent nettement des néoromantiques comme Richard Strauss et Rachmaninov, au profit de qui la postérité les a quelque peu oubliés, injustement. Les Mélodies avec orchestre de Jean Cras que vient de publier Timpani avec Ingrid Perruche, soprano, Philippe Do, ténor, Lionel Peintre, baryton, et l’Orchestre de Bretagne dirigé par Claude Schnitzler 1, sont un petit trésor de raffinement. Élégies avec orchestre sur des poèmes d’Albert Samain, Trois mélodies avec quatuor à cordes sur des textes du décadent Rodenbach, L’Offrande lyrique, sur des textes de Tagore traduits par Gide et quelques autres pièces constituent bien plus que le témoignage d’une époque : la preuve que l’on peut, sans refaire les lieder de Schubert, Schumann, Brahms, Wolf, sans plagier les mélodies de Duparc, Chausson, Debussy, Fauré, mais dans la continuité de ces grands prédécesseurs, écrire une œuvre originale et jubilatoire. Le Miroir de Jésus d’André Caplet, cantate pour soprano, chœur de femmes, chœur d’enfants, harpe et quintette à cordes, est une œuvre austère, proche à la fois du chant grégorien et de Messiaen, que viennent d’enregistrer Béatrice Gaucet, le Chœur Britten, la Maîtrise de ND de Paris et un ensemble de chambre, dirigés par Nicole Corti 2. Ici encore, pas de novation majeure dans le langage mais des recherches de timbres et une inspiration mystique évidente qui appelle à la sérénité. Vaughan Williams est, avec Elgar, l’un de ceux qui font mentir l’adage selon lequel il n’y aurait eu que trois compositeurs britanniques : Haendel, Purcell et Britten. Un enregistrement récent présente un florilège de sa musique, par divers solistes et orchestres : Fantaisie sur Greensleeves, The Lark Ascending (avec Sarah Chang), Flos Campi, Norfolk Rhapsody n° 1, Silent Noon, Songs of Travel, 1) RECTANGLES EXCLUS Sur un échiquier (8 x 8 cases), on marque n cases, en évitant que les centres de 4 des cases marquées ne forment un rectangle à côtés parallèles aux côtés de l'échiquier. Quelle est la plus grande valeur possible pour n ? Même question pour un damier (10 x 10 cases). 2) SOMMES DE CHIFFRES À chaque entier n je fais correspondre s(n), somme de ses chiffres en écriture décimale. Si N = 44444444, que vaut s(s(s(N))) ? (à faire de préférence de tête, et en tout cas sans ordinateur ni calculette). Solutions page 93 Serenade to Music, On Wenlock Edge que Ravel, paraît-il, admirait, etc. 3 Les thèmes et les harmonies ne sont pas d’une excessive originalité, mais les orchestrations sont très travaillées : au total, une musique très agréable, tout à fait en situation dans les Promenade Concerts d’été à l’Albert Hall. Bach, Rameau, Marais L’enregistrement des Nouvelles Suites de pièces de clavecin (1728) de Rameau par Joël Pontet 4 se distingue tout d’abord par une prise de son exceptionnelle qui, au contraire de certains enregistrements anciens qui conféraient au clavecin un son grêle et fade, restitue sans déformation l’extraordinaire complexité des harmoniques. On connaît certaines pièces de ce recueil, comme La Poule, ou Les Sauvages, repris des Indes galantes. On connaît moins les sept variations de la Gavotte, et L’Enharmonique, aux modulations chromatiques d’une audace stupéfiante. Mais aucune innovation gratuite de forme : Rameau se conforme strictement aux canons édictés par ses aînés, dont François Couperin. Mais il bâtit sur ces acquis une musique d’une totale modernité. Les Pièces en trio pour les flûtes, violon et dessus de viole de Marin Marais sont antérieures de près de trente ans aux Suites de pièces de LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 ARTS, LETTRES ET SCIENCES DISCOGRAPHIE Jean Moreau de Saint-Martin (56) [email protected] ➤ 89 P.88 Arts et Lettres 29/09/10 9:20 Page 90 ARTS, LETTRES ET SCIENCES ➤ Rameau. Elles ont été enregistrées en 2009 par l’ensemble Aux Pieds du Roy, dirigé par Dirk Börner et Michael Form 5, résultat d’une recherche musicologique approfondie portant sur les tempi, l’ornementation, l’instrumentation, l’usage de l’archet, la pratique de la basse continue, et l’influence de la danse (plusieurs de ces pièces étaient destinées à être dansées). Une musique jaillissante, d’une grande richesse polyphonique, qui donne une bonne idée de ce que fut le Grand Siècle français. Et, pour terminer, un enregistrement de trois œuvres de Bach qui est une merveille absolue, à écouter toutes affaires cessantes : Missa Brevis en fa majeur et en sol majeur, bien moins LIVRES ÉCHELLES MUSICALES ET PROXIMITÉ DES HARMONIQUES Max Yribarren (59) Éditions Aug. Zurfluh 1 – 2009 Voilà un livre qui va tout à la fois intéresser les mélomanes et les férus de science physique, l’une des qualités n’étant au demeurant pas exclusive de l’autre. Notre camarade Yribarren s’est en effet posé la question de savoir pourquoi la gamme chromatique également tempérée s’est imposée comme l’alphabet dans lequel s’écrivent, sans exception, toutes les musiques d’aujourd’hui, dans le monde entier. Constatant que la structuration du continuum sonore se pose depuis la nuit des temps, il rappelle que Pythagore s’était déjà demandé si les sons émis par des 90 LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 connues que la Messe en si et les cantates, et, sur le même disque, le motet O Jesu Christ, mein lebens Licht, par Eugénie Warnier, soprano, Terry Wey, alto, Emiliano GonzalezToro, ténor, Chistian Immler, basse, et l’ensemble Pygmalion dirigé par Raphaël Pichon 6. On ne commente pas cette musique ineffable, faite pour Dieu – ou pour les dieux, selon l’auditeur – mais en tout état de cause très loin au-dessus de nos « misérables petits tas de secrets », et pourtant si humaine. ■ Jean Salmona (56) 1. 1 CD Timpani – 2. 1 CD Saphir – 3. 2 CD EMI – 4. 1 CD SAPHIR – 5. 1 CD AMBRONAY – 6. 1 CD ALPHA. instruments aussi simples que la flûte ou le monocorde obéissaient à une logique accessible à notre intelligence. La première étape consiste à étudier la nature du son, phénomène périodique dont nous savons depuis Fourier qu’il peut se décomposer en une série de fonctions sinusoïdales de fréquences multiples entiers de la fréquence de base. Et ces fréquences sont celles des harmoniques qui constituent le signal perçu par notre oreille et analysé par notre cerveau. D’où l’idée d’utiliser ces harmoniques pour établir un découpage du continuum sonore. C’est le choix empirique qu’ont fait les civilisations qui nous ont précédés en choisissant comme premier intervalle l’octave, la fréquence des deux sons correspondants étant dans le rapport 2/1, puis comme deuxième intervalle la quinte correspondant au rapport 3/2. Ainsi est né le « cycle des quintes » – partant de do, par exemple, on monte de quinte en quinte, sol, ré, la, mi, etc. – qui permet de couvrir, à peu de chose près, une octave. Le « à peu de chose près » a constitué la pierre d’achoppement de tous les théoriciens et facteurs d’instruments, pendant près de deux mille ans, jusqu’à ce que, à partir du XVIe siècle, on accepte de s’écarter de ce cycle en raccourcissant certains SOLUTIONS DU BRIDGE Dites 4♠ ! Vous les gagnez si l'adversaire redit 5♦ vous marquez 2 de chute contrés : 300 dans les deux cas vous scorez plus de 80 % ; à 4♦ –1 : 40 %. Main du partenaire : ♠ ♥ ♦ ♣ A R 8 4 2 7 5 2 A R V 8 3 Post-scriptum : J'ai joué cette donne contre notre espoir Grosset qui a jeté la dame de Trèfle sur mon as avec T : D 4 et je n'ai pas encaissé le roi de Trèfle, d'où 4♦ = pour un score de 5 %. intervalles pour uniformiser l’octave. Et ce faisant, on se rapprochait, d’une certaine façon, des harmoniques de la note de base. La difficulté à laquelle ont été alors confrontés les musiciens tient à l’impossibilité de concilier deux inconciliables : diviser l’octave en intervalles égaux – la recherche de l’équipartition – et faire coïncider ces intervalles avec les harmoniques de la fréquence de base. Ce à quoi s’emploie alors l’auteur, c’est de montrer que les efforts continus des musiciens au cours des siècles ont consisté à concevoir une gamme qui définisse des intervalles aussi égaux que possible, tout en assurant la meilleure «proximité» avec les harmoniques de la fréquence de base (principalement quinte et tierce). Pour définir mathématiquement cette proximité, et se remémorant les cours de statistiques que nous avons reçus dans nos bonnes écoles, il recourt à la notion d’écart quadratique moyen en comparant les deux séries que représentent les degrés d’une échelle musicale d’une part, les harmoniques d’autre part. Cet outil, appliqué aux différentes gammes que répertorie l’histoire de la musique, lui permet de démontrer que leur évolution chronologique au fil des siècles a coïncidé avec une diminution régulière de cet écart quadratique moyen, aboutissant au P.88 Arts et Lettres 29/09/10 9:20 Page 91 Daniel Fischer (59) 1. 13, avenue du Lycée Lakanal, 92340 Bourgla-Reine. Tél. : 01.46.60.50.28. L’AÉRODYNAMIQUE DE L’AVION SUBSONIQUE EXPLIQUÉE AUX OISEAUX Jean-Paul Vaunois (66) Volez ! Éditions 2 – 2009 Qui n’a pas été fasciné par le vol et la possibilité de s’affranchir de la force de gravité terrestre qui nous « cloue » au sol au quotidien ? Si les astres constituèrent le premier sujet d’intérêt des pionniers de la Science, lesquels les percevaient comme des éléments divins dont ils voulaient percer le secret, les oiseaux et leurs aptitudes à évoluer librement dans l’air furent aussi très tôt une source d’inspiration de l’Homme. Dans la mythologie grecque, Icare s’équipa d’ailes fixées à la cire pour échapper à Minos, mais tenta l’envol sans succès. Beaucoup plus tard, le vol des oiseaux fascine Léonard de Vinci qui analyse toutes les phases du vol, du décollage à l’atterrissage, il voulut concevoir une machine volante à leur image. Il aura mis en évidence l’importance du centre de gravité, du centre de poussée, et de l’effet de la courbure de l’aile sur la vitesse d’écoulement de l’air le long du profil. À peine plus d’un siècle écoulé depuis les premières expériences fructueuses en planeur commencées par Otto Lilienthal et les vols motorisés de Clément Ader et des frères Wright, plusieurs millions de pilotes s’envoient en l’air aujourd’hui à bord de machines volantes de toutes sortes. Pourquoi? La maîtrise de la 3e dimension donne un sentiment de domination sur les éléments et procure des sensations nouvelles auxquelles le terrien n’est pas habitué : voir de haut et de loin, évoluer sans contrainte, contrôler une machine complexe, réussir le challenge gestuel du décollage et de l’atterrissage et le défi intellectuel de la navigation. Tout pilote se souvient de son premier « lâcher » et de ses premières « navigations ». Cet ouvrage établit une excellente référence, facile à lire, de ce que le pilote curieux et amoureux du vol à moteur aimera comprendre pour faire que son avion devienne son meilleur ami. Ce document éveillera la curiosité des aviateurs. Il présente les éléments essentiels de l’aérodynamique et de l’architecture des avions. Un avion, selon Clément Ader, est un moyen plus lourd que l’air capable d’évoluer dans l’atmosphère avec un moteur. Cet ouvrage est limité au cas des avions, dont la vitesse ne dépasse pas 500 km/h. Ce sont les avions les plus utilisés pour l’école des débuts, pour l’entraînement aérien, les vols sportifs, de loisirs, cela pour des raisons économiques. Ce livre d’aérodynamique a été écrit par un pilote pour les pilotes en langage aussi simple que possible. Cependant pour transmettre des expériences aérodynamiques connues de peu de monde sur la planète, il a été aussi conduit à écrire des textes très complexes qui vont intéresser le spécialiste en aérodynamique, en particulier sur la traînée, les hélices et les profils. Jean-François Clervoy (78) 2. 38, rue Thiers, BP 12, 94731 Nogent-sur-Marne Cedex. Livre en vente à la boutique www.volez.com ou par téléphone au 01.49.74.69.62. LA SAGESSE DE LA PANTHÈRE Nouvelles Jacques Peter (89) Paris – L’Harmattan – 2009 Neuf titres déroutants pour des nouvelles d’une élégante originalité. Étonnant ce que l’on peut apprendre sur les mégalithes, le Roman de Renart ou les mystères des glyphes de Cahuachi ! N’ayez crainte cependant, ces récits, à la documentation passionnante, sont à mille lieues d’une érudition académique. L’un est un journal mélancolique, destiné à l’amie absente. Le narrateur, devant la beauté d’une civilisation disparue, relate la dispute ridicule de deux vieux savants, dont l’un saisit le fémur d’un lama millénaire, pour attaquer l’autre qui tient le tibia du squelette qu’il vient de découvrir. Un autre évoque, en des scènes pétillantes de malice, les conséquences d’une note sérieuse émanant de l’Éducation nationale. Qu’en fera le professeur consciencieux, passionné par les histoires d’ADN ? Il inventera le ballet La danse du ribosome. Problèmes de mise en scène, difficulté de trouver l’élève digne de jouer « la peptidyl transférase», mais au final succès assuré, et même, rêves d’avenir pour l’Opéra Bastille avec une tragédie en trois actes qui pourrait s’intituler Les pèlerinages de la sérotonine. Ironie et humour, enquêtes en tout genre, sont les constantes de ces récits. L’auteur ne cesse de jouer avec sa culture et nous ravit. Tous ses personnages ont la passion d’apprendre. Certains en deviennent sages (la panthère du conte), d’autres délicieusement surannés (Valentin Aubeffroi dans son costume taillé sous Gambetta), d’autres encore nagent dans le bonheur des dates et des noms gravés pour toujours dans leur mémoire (Ingrid Schwandenberg et ses peintres-orfèvres de Florence). LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 ARTS, LETTRES ET SCIENCES tempérament égal qui s’avère finalement l’échelle la plus proche, en moyenne statistique, des harmoniques de sa note de base. Et Max Yribarren en conclut que cette remarquable propriété est sans doute la principale raison de son adoption universelle. Tel est le thème de ce petit livre dont la démonstration rigoureuse est enrichie de graphiques et de notes qui en rendent aisée la lecture. ➤ 91 P.88 Arts et Lettres 29/09/10 9:20 Page 92 ARTS, LETTRES ET SCIENCES ➤ La poésie est aussi présente. Ainsi celle de cette mamie, éprise de Rembrandt, qui, pour consoler sa petite-fille de son premier chagrin d’amour, relit toute sa vie dans les tableaux de son peintre bien-aimé. Les esprits curieux se réjouiront d’une onomastique très adaptée… (Un conseil : essayez les anagrammes !) Tout est brillant, libre et de grande qualité. Jugez par vous-mêmes ! Janine Kohler, professeur de lettres, présidente de l’Association Les Amis de Milosz SOUFFLES COUPLÉS Gérald Tenenbaum (72) Éditions Héloïse d’Ormesson 3 – 2010 Souffles couplés, c’est bien de cela qu’il s’agit. Barman depuis des années à Grenoble, au café des Deux Mondes, Alex a quitté sa montagne et l’école à l’âge de onze ans, à la suite d’un drame. Il ne sait plus lire, mais il est doté d’une mémoire prodigieuse : il «gobe» tout, retient tout ce qu’il voit ou entend. Maggy, capitaine de police, fait à l’occasion appel à ses dons, alors que Sandra, professeur de psycholinguistique, cherche, dans son laboratoire du Département des sciences cognitives, à l’aider à réapprendre à lire et à apaiser sa mémoire tyrannique. L’ a ss a ss i n a t d’un jeune, proche du milieu, qui s’entraînait à la boxe dans le club de Fulvio, un ancien brigadiste italien ami de Sandra, sera l’événement déclencheur qui, au rythme d’un polar, accouplera et désaccouplera les destins des personnages de ce roman si singulier. L’intrigue dote le livre de Gérald Tenenbaum de certains attributs propres au roman policier, où chaque scène, et presque chaque mot, apporte 92 LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 un indice. Cependant, bien qu’il n’y ait ni unité de lieu ni unité de temps, l’univers de la tragédie grecque est proche. Inexorablement, les personnages suivent, puis acceptent, des destins conçus et mis en scène par un chef d’orchestre qui maîtrise chaque partition. La parole et l’action épousent la courbe de l’essentiel, se limitant parfois à seulement la suggérer. Respirations couplées, donc, mais aussi temps couplés, puisque, dans ce roman, passé et présent conspirent, en alternance, pour tisser la toile de la destinée. Écrit dans un très beau style, avec un vocabulaire précis permettant des analyses très fines, rapides, mais suffisantes pour comprendre et aimer les personnages, le cinquième roman de notre camarade, professeur de mathématiques à l’université HenriPoincaré de Nancy, nous fait entrer dans une belle poésie de la logique. Jean-François Sorro (72) 3. 87, bd Saint-Michel, 75005 Paris. www.editions-heloisedormesson.com LETTRES À HÉLÈNE Robert Chapuis (38) Édition réalisée en décembre 2009 4 Notre camarade Robert Chapuis (38) a publié une sélection des lettres écrites à sa femme Hélène au cours de ses nombreux voyages et les dessins qu’il a exécutés, croquis pris sur le vif de personnages et de paysages. Fonctionnaire international à l’UIT (Union internationale des télécommunications), il a participé à toutes les conférences internationales dans ce domaine de 1950 à sa retraite. C’est l’expérience de ses relations avec ses collègues étrangers et les pays visités qu’il nous conte : Lisbonne, Scheveningen, Saragosse, New York, Philadelphie, Toronto, Tucson, San Francisco, Tokyo, Damas, Recife, Melbourne, Canton, Pékin, Shanghai, on ne peut les citer tous. Ce qui frappe est que, malgré la courte durée de ses séjours (le temps d’une conférence), il a bien saisi la civili- sation des pays visités, sensible au pittoresque des monuments et des paysages et à la vie difficile des habitants des pays en développement. Sa foi catholique lui permet de rencontrer des prêtres ayant vécu souvent plusieurs années les vies de leurs paroissiens et connaissant bien leurs difficultés d’existence. Mais il rencontre aussi des ingénieurs, des directeurs de sociétés comptant quelquefois plusieurs milliers de salariés qui ont, eux, des problèmes fiscaux sur lesquels il n’insiste pas. À Genève, il fait la connaissance du peintre Christo qui fera le portrait de ses enfants et de son épouse, celui figurant en couverture de son livre. Ses souvenirs n’excluent pas un humour s’exprimant quelquefois aux dépens des habitants des pays visités et même de nos compatriotes touristes, retraités, énarques montrant une arrogance et « une ségrégation de caste inconnue aux USA ». Ses réflexions concernent surtout les arts mais peu la littérature de ces pays. Il est vrai qu’il n’est pas nécessaire d’aller dans un pays pour la connaître, quoique, à mon avis, il est difficile de bien comprendre Cervantès ou Lorca, par exemple, si on n’est jamais allé en Espagne. Sculpture, peinture, artisanat qu’il n’apprécie pas toujours sont ses sujets favoris, la musique aussi (souvenirs des tambours de Salvador de Bahia), la chorégraphie (les danses balinaises), le cinéma chinois « auquel il ne comprend pas grand-chose ». Il compare quelquefois ces traditions à celles de sa région d’origine : Vienne et l’Isère. D’autres remarques portent également sur l’organisation des sociétés (plus ou moins démocratiques, plutôt moins), la monnaie, les fêtes traditionnelles et religieuses, des activités inattendues (une fête des vendanges près de Tokyo, des manifestations folkloriques en Californie), P.88 Arts et Lettres 28/09/10 12:55 Page 93 SOLUTIONS DES RÉCRÉATIONS SCIENTIFIQUES 2) SOMMES DE CHIFFRES Ajouter les chiffres d'un nombre entier revient à remplacer, dans une écriture de ce nombre distinguant unités, dizaines, centaines, etc., toutes les puissances de 10 par 1 ; ce remplacement modifie le nombre d'un multiple de 9 ; ainsi la fonction s(n) a même reste modulo 9 que n. D'autre part, on sait qu'une égalité traduisant une addition, une soustraction ou une multiplication de nombres entiers reste vraie à un multiple de 9 près quand on remplace les nombres par la somme de leurs chiffres : c'est la traditionnelle « preuve par 9 ». Ainsi, s(N), s(s(N)), s(s(s(N))) ont même reste modulo 9 que N et que 74444 puisque 4 444 a 16 pour somme des chiffres et 7 pour reste modulo 9. Comme 73 = 343 a 1 pour reste modulo 9, 74444 = 7.(73)1481 a 7 pour reste modulo 9. Le nombre à déterminer vaut donc 7 à un multiple de 9 près. Mais 4 444 < 104, donc N < 1017776 et s(N) ≤ 9 x 17 776 = 159 984. Cela entraîne s(s(N)) ≤ s(159 899) = 41, puis s(s(s(N))) ≤ s(39) = 12. D'où la conclusion s(s(s(N))) = 7. le dépaysement dans les contrées où l’écriture n’est pas celle de l’Occident, les problèmes que connaissent tous les voyageurs pour téléphoner, obtenir une place sur un vol saturé, récupérer ses bagages… En faisant connaître à son épouse, dont il regrette parfois l’absence, ses activités, il tente d’effacer les distances qui l’en séparent et plante des jalons pour de futurs voyages avec elle. Paul Bassole (38) 4. Livre disponible sur demande auprès de l’auteur, 11, rue de Gex, 01210 Ferney-Voltaire. AUX ORIGINES DU DIEU UNIQUE Quatre tomes Jean Soler Paris – Éditions de Fallois 5 J’invite nos chers camarades – toutes confessions confondues – à lire (et à faire lire) l’enquête menée pendant une trentaine d’années, notamment en Israël, par Jean Soler, le frère aîné de Joseph Soler (56) : une trilogie publiée par les éditions de Fallois, Aux origines du Dieu unique, qui comprend L’invention du monothéisme (2002), La Loi de Moïse (2003), Vie et mort dans la Bible (2004). On la trouve aujourd'hui en livre de poche, chez Hachette, dans la collection Pluriel. Michel Onfray, dans l’essai qui l’a rendu célèbre, Traité d’athéologie, parle du premier volume comme d’un « livre important, très fouillé, aux conclusions étonnantes », écrit dans la langue limpide d’un « excellent briseur de mythes ». On apprend dans cette œuvre que si les Hébreux sont passés tardivement un millénaire après Moïse, du polythéisme à l’affirmation qu’il n’y a qu’un Dieu, c’est pour sauvegarder, malgré des désastres, leur identité, en la fondant sur un Livre. Jean Soler, en historien critique et constructif, a analysé des années durant la Bible et d’autres textes parvenus jusqu’à nous, pour mettre en pleine lumière les origines des trois religions monothéistes et détricoter, entre faits historiques, héritages culturels et inventions mythiques, le processus qui a conduit au dogme du Dieu unique. L’invention du monothéisme a été saluée à sa parution par des personnalités qui se sont illustrées dans des disciplines diverses : Edgar Morin, philosophe et anthropologue, CNRS ; Claude Simon, prix Nobel de littérature ; Ilya Prigogine, prix Nobel de chimie; Paul Veyne, historien, Collège de France ; Christian Goudineau, archéologue et historien, Collège de France. Leurs jugements figurent au verso du tome suivant La Loi de Moïse. Le prix Nobel scientifique, par exemple, a écrit : «Je n’ai jamais vu de livre qui explique les différentes étapes qui ont conduit au monothéisme d’une manière aussi originale et aussi bien documentée. » Récemment, Jean Soler a fait paraître un quatrième ouvrage, La violence monothéiste (éd. de Fallois, 2008) qui se conclut par l’éloge de la laïcité et un appel à la tolérance destiné à toutes les personnes de bonne foi. ARTS, LETTRES ET SCIENCES 1) RECTANGLES EXCLUS Considérons un tableau de c x c cases, avec n cases marquées. Celles-ci se répartissent en n1 en colonne 1 du tableau, n2 en colonne 2, ..., nc en colonne c. Avec les nj cases marquées en colonne j, on peut former nj (nj – 1)/2 paires de cases ou de lignes ; aucune de ces paires de lignes ne doit se reproduire dans une autre colonne, sous peine de former un des rectangles prohibés par l'énoncé. Or avec c lignes on ne peut former que c(c – 1)/2 paires distinctes. Une condition de possibilité est donc Σj nj (nj - 1)/2 ≤ c(c – 1)/2. Avec la condition Σj nj = n, on a Σj (nj) 2 ≥ n2/c, d'où n2 – nc + c2 ≤ c3 (l'égalité exigeant nj = n/c pour tout j). Pour c = 8, cela donne la limite n ≤ 25 ; avec nj = 3 pour tout j sauf n1 = 4 on a n = 25 et en tout 27 < C 28 paires, mais cette disposition n'est pas effectivement réalisable ; on ne peut marquer que 24 cases au plus. Avec la notation habituelle aux échecs, les cases marquées peuvent être : a5, a6, a7, b3, b7, b8, ç2, ç6, ç8, d4, d5, d8, é1, é4, é6, f1, f3, f5, g1, g2, g7, h2, h3, h4. Pour c = 10, la limite n ≤ 35 obtenue par la méthode ci-dessus n'est pas non plus réalisable ; mais on peut marquer 34 cases sans former de rectangle. Pierre Bazan (55) 5. 22, rue La Boétie, 75008 Paris. Tél. : 01.42.66.91.95. On trouvera des informations complémentaires sur la carrière et les œuvres de Jean Soler dans l’encyclopédie en ligne Wikipédia. LA JAUNE ET LA ROUGE • OCTOBRE 2010 93