Les avatars de l`artiste dans Mélusine de Franz Hellens

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Les avatars de l`artiste dans Mélusine de Franz Hellens
Aurora Bagiag
Les avatars de l’artiste
dans Mélusine de Franz Hellens
Placé sous le signe du rêve, Mélusine (1920) de Franz Hellens est un roman qui se
revendique en même temps du mythe et de la modernité, voire des mouvements d’avantgarde. Apparemment dépourvue de cohésion, sinon par le biais des personnages qui assurent
la transition d’un événement à l’autre, surprise en pleine anamorphose, cette œuvre célèbre le
mouvement, exalte la vitesse, l’instantané, « la ligne droite » et le « style en éclair ».
Notre étude essaiera de dégager, à travers l’insertion du mythe dans le texte, une
interrogation sur la problématique de l’écrivain moderne dans son rapport au roman. Une
question récurrente : « de quelles matière elle était faite ? », s’attachant aux êtres mythiques,
ainsi qu’à la cathédrale, métaphore de l’écriture, parvient à une mise en question de la
tradition ainsi que de la modernité. Dans un premier temps nous nous attarderons sur le rôle
du mythe dans la poétique de Franz Hellens, rôle qui dépasse nettement l’aspect de quête
initiatique, et qui se rattache plutôt à la nature plurielle de la femme, réunissant différents
attributs de la Déesse-Mère et représentant le moteur de l’univers. Nous tenterons ensuite une
modélisation du corps de Mélusine, voire une lecture de la section de son corps en deux
parties divergentes en tant que maquette de l’univers social contemporain. La métamorphose
de la fée pendant son bain sabbatique, qui fait que le haut du corps garde l’apparence
humaine, tandis que le bas se métamorphose en queue de serpent, impose un schéma vertical
qui valorise la partie supérieure en tant que représentante de l’âme, de la spiritualité, des
attributs maternels, et qui rattache la partie inférieure à la nature tellurique, à la sexualité, à la
femme-amante. Nous parviendrons à interpréter la révélation finale du narrateur comme une
multiple découverte : de la nature féminine, du couple primordial Mélusine – Merlin et surtout
du mystère de la cathédrale – création. Nous verrons dans l’angoisse du narrateur qui assiste à
l’émiettement de l’édifice translucide une hypostase de l’écrivain moderne vis-à-vis de la
construction d’un roman qui se défait, qui échappe à son créateur. Ses doutes seront
interprétés comme la prise de conscience de sa propre impuissance face aux exigences
supposées par la littérature contemporaine, mais aussi comme la mise en œuvre d’un d’art
poétique visant les éléments nécessaires à la construction d’un roman moderne.
1
Aventure et retour du mythe
La façon dont le mythe fournit les items autours desquels le roman d’Hellens
s’organise détache celui-ci du contexte des œuvres littéraires puisant dans la légende de la fée
Mélusine. La plupart de ces dernières en retiennent le schéma suivant : la fée épouse un
mortel et lui interdit de la regarder lors de la métamorphose du bas de son corps en queue de
serpent. Il faut rappeler ainsi la Mélusine de Jehan d’Arras1, composée vers la fin du XIVe
siècle, Le Roman de Mélusine de Coudrette2 ainsi que le conte fantastique de Goethe, La
Nouvelle Mélusine3. Quant à Mélusine ou la Robe de saphir de Franz Hellens, elle opère la
transfiguration du mythe en fonction de l’intertexte culturel du début du XXe siècle, proposant
la greffe du roman policier sur le schéma du conte mélusinien et du « fantastique du monde
moderne » sur le « merveilleux médiéval »4. Le rôle du mythe dans ce roman a été souvent
réduit par la critique à l’aspect de quête, de « voyage de formation », d’aventure
épistémologique, dans laquelle le narrateur, « petit bourgeois balourd » est entraîné par son
initiatrice aux dons surnaturels. L’objet de la quête semble être la prise de contact avec la
civilisation moderne dont les faits déterminants, tels « le machinisme, le commerce, les
affaires, la presse, la mode ou la vitesse, les conquêtes de la technique, représentent autant
d’étapes et en même temps d’obstacles sur le trajet initiatique »5 du personnage. Quant à la
part du mythe dans le traitement de la figure de Mélusine, une opinion s’est généralisée : elle
garde « les attributs de la femme serpent, mi-ailé, mi-aquatique » qu’elle transforme en
légèreté, en apesanteur, en extraordinaire aisance de mouvement6.
Néanmoins s’il y a aventure dans ce roman, celle-ci dépasse les cadres de la simple
fable et se rattache plutôt au concept d’aventure tel qu’il est promu par la Nouvelle Revue
Française dans une série d’articles signés Jacques Rivière et parus en 1913. Ce débat, qui
oppose en France poètes et prosateurs, a comme point de départ une interrogation sur ce que
l’aventure peut signifier pour le roman moderne. Si le roman « d’aventures » traditionnel,
1
Jehan d'ARRAS, La noble Hystoire de Luzignen (en prose), vers 1392 - Dijon et Paris : L. Stouff, 1932 - Le
Roman de Mélusine ou l'Histoire des Lusignan, trad. Michèle Perret, Paris : Stock, 1979 - Flammarion, 1997.
2
COUDRETTE, Le Roman de Mélusine (en vers), vers 1401 - Mellusine, Niort : Fr. Michel, 1854 - Le Roman
de Mélusine ou Histoire de Lusignan par Coudrette, édition critique de Eléanor Roach, Paris : Klincksieck, 1992
- avec introduction de Laurence Harf-Lancner, Paris : Flammarion, 1993.
3
Johann Wolfgang von GOETHE, Le Serpent vert. Trois contes symboliques, Paris : Eole, 1992.
Paul GORCEIX, « Mélusine de Franz Hellens. Rêve, fantastique et surréalité », in Sourour Ben Ali (sous la
direction de), Les Ecritures poétiques de Franz Hellens, Clermont-Ferrand : Presses Universitaires Blaise Pascal,
2003, p. 147-157.
5
Ibid., p. 152.
6
Ibid., p. 150.
4
2
celui qui raconte un ensemble de péripéties, d’événements, composant ainsi une histoire, est
considéré suranné, l’aventure, elle, se doit d’être réintroduite dans le roman à condition
qu’elle devienne intérieure. Elle se fait une donnée intrinsèque de l’écriture puisque le roman
ne se développe pas dorénavant selon un plan préétabli, mais avance de découverte en
découverte, au hasard. « Aventure » devient ainsi synonyme de mouvement, d’avancement,
d’invention. Franz Hellens ne reste pas étranger à ce débat dont les échos se feront entendre
dans la revue qu’il dirige, Le Disque vert. Apparaissant sous le titre Signaux de France et de
Belgique (1921-1922), pour se transformer ensuite en Disque Vert (1922 – 1925), en Ecrits du
Nord et en Nord (1929 – 1930), cette revue procède à l’investigation permanente de la
littérature de son temps. Il n’est pas alors étonnant de retrouver dans Signaux de France et de
Belgique un article d’Hellens intitulé « Le salut par l’aventure ». Ce bref essai, presque un
manifeste, fait de l’aventure un remède aux « lettres françaises » qui « se meur[ent] de
sécheresse » :
Entendons-nous. Il ne suffit pas de s’inscrire flibustier. Notre aventure est de sortir de
sécheresse, sans sortir pour cela de chez nous. Assez de vent, le champ a besoin d’eau. Nous
nous mettons en route, dans notre domaine, bien décidés cependant à ne pas nous laisser
commander par l’imprévu, mais à le conduire, à le canaliser comme l’eau ou l’électricité.
Décidés même à provoquer les événements, à les faire « débucher ». Savoir que l’aventure est
là, et l’admettre, et la guetter, et la tenir en joue, quelle source de souplesse et de
renouvellement ! Après cela, que l’on soit pendu, cela n’appartient plus à l’œuvre.1
Que le débat n’est pas abandonné, tout au plus approfondi et nuancé par Hellens, le
sous-titre de « roman d’aventures », qu’il donne à Mélusine dans l’édition définitive de 1952,
le prouve. Cet attribut tardif ne vise évidemment pas la prolifération des événements, mais,
renouant avec l’ancienne polémique, traduit une réconciliation - au nom du principe
d’« aventure » - de l’histoire (des exploits, des « prodiges » et « merveilles ») et de l’écriture
extrêmement moderne.
Entre les deux pôles, relevant d’une certaine symétrie chrono- et topologique, que
constituent la situation initiale – l’escalade de la cathédrale et le chapitre final – la
désintégration de l’aérolite translucide, Mélusine révèle un parcours sinueux, chaotique
même, agglomérant des épisodes, multipliant les variations d’une même situation, éludant les
transitions nécessaires. Cependant plusieurs éléments responsables d’une construction
1
Franz HELLENS, « Le Salut par l’aventure », réédité en volume Le Disque Vert. Revue mensuelle de
littérature, Tome I, « Signaux de France et de Belgique », Bruxelles : Editions Jacques Antoine, 1970, p. 50.
3
musicale, tels la répétition, la symétrie, le contrepoint, apparaissent, comme pour
« commander » et « canaliser » l’imprévu : les situations se répondent et s’anticipent, tandis
que les personnages revendiquent des doublets caricaturaux.
En effet trois scènes répétitives, se fondant sur les mêmes isotopies dominantes, voire
eau vs pierre, lumière vs ténèbres, laissent transparaître non seulement la dialectique entre le
masculin et le féminin, mais aussi la récupération du mythe par le roman moderne. Ainsi la
scène de la baigneuse en ciment (chapitre « Suite au parc artificiel »), suivie de celle du bain
de Mélusine (chapitre « Conversation avec Mélusine dans la salle de bain d’un hôtel ») et de
celle qui évoque l’absorption de Mélusine dans la lumière bleue du saphir de Nilrem/Merlin
(chapitre final « La cathédrale dans le désert ») se fondent sur un traitement sémantique
similaire. Ce qui les détache et ce qui permet de saisir une certaine évolution ce sont les
proportions accordées à l’élément liquide en collaboration avec la pierre et avec la lumière.
Reprenons le premier épisode qui revendique une figure de la réclusion, une « NotreDame de Sous-Terre ». Visitant le « Parc Artificiel » souterrain, les trois protagonistes,
Nilrem, Mélusine et le narrateur, pénètrent dans un sous-sol obscur, où les objets sont
victimes d’un étrange processus de pétrification. Une cuisine munie d’un « grand poêle noir »,
chargé d’une marmite, et d’une fontaine dont l’eau se transforme en mercure, est gouvernée
par une servante pétrifiée dans son tablier d’ardoise. La pétrification de l’antichambre est
relative car surprise en plein processus : le jet d’eau, avant de se transformer sous l’emprise
du froid en métal blanc, garde les propriétés du liquide, « jaillit ». Celle-ci prépare la
transition vers la solidification définitive et complète de la pièce couleur de mortier. A la
dureté de la matière qui s’insinue dans tous les objets présents, voire le verre, le cristal, la
terre cuite, le béton, le fer forgé, le plomb, s’ajoute leur figement dans des formes
géométriques précises : « de cônes, de cercles et d’ovales ». Le tout converge vers la figure de
la baigneuse, dont l’évocation est tributaire aux expériences de l’art moderne, notamment à la
géométrisation et à la déconstruction cubistes :
A terre, dans un tub à bord roulé, une femme prenait son bain. Son corps jaune et luisant était
composé de pièces cimentées. Sur les épaules rondes et trapues la tête était figurée par un simple
ovale incliné, dont l’équilibre, doublé par celui de l’image réfléchie dans le bassin, semblait
tenir à cet appareil de forces symétriques. Au nid de l’aisselle du bras qu’elle tenait replié, le
sein était marqué par un cône souligné d’un trait noir ; l’autre bras, relevé, soutenait le casque
d’une pesante chevelure où la main semblait prise. Comme la baigneuse posait un genou dans
4
l’eau, le ventre bombait entre le torse et la cuisse son hémisphère, où l’œil creux du nombril
semblait rêver1.
La figure aux « grands yeux en amande », « absents du visage », et aux « rondeurs
puissantes », rappelant les baigneuses de Modigliani, fait l’objet d’une interrogation
récurrente de la part du narrateur, s’adressant à la fois à la baigneuse pétrifiée, à Mélusine et à
la cathédrale : « de quelle matière elle était faite » ? De plus cette baigneuse composée de
« pièces cimentées » ne baigne pas dans le liquide, mais dans une eau devenue « pierre »,
« éclats de verre », « inertie », « pesanteur » et basculant ainsi dans un imaginaire masculin.
Le deuxième épisode surprend Mélusine même au bain, enfermée elle aussi dans « un
paradis en cube, isolé du monde, cadenassé de volupté » (p. 193). A la différence de son
avatar en ciment, Mélusine se revendique d’un double régime, pierreux et aquatique à la fois.
Elle renoue ainsi avec son ancêtre mythique qui, pendant son bain sabbatique, voyait le bas de
son corps se transformer en serpent. La Mélusine de F. Hellens montre aussi un corps divisé
en « deux fractions divergentes » (p. 193), dont la partie supérieure a la consistance et la
forme définie du solide tandis que la partie inférieure se soumet à la dissolution, à
l’évanouissement propre à la liquidité insaisissable :
La salle s’enfermait dans une intimité étroite. Un paradis en cube, isolé du monde, cadenassé
de volupté. Le nu y régnait comme un marbre portant des fruits mûrs. Je regardais les seins
mouillés de Mélusine, ses épaules émergeant des cheveux répandus, les courbes tendres de ses
bras. A hauteur de ceinture, la surface de l’eau partageait son corps blanc. On l’eût dit tranché
par une fine lame de verre séparant deux fractions divergentes ; car, si le haut du corps
s’affirmait en masses définies et sûres, les jambes et le ventre au contraire avaient l’air de
s’évanouir, entraînées par l’eau vague.
Au plafond, les gouttes durcies ressemblaient à des clous de cristal. Le torse de Mélusine
pivotait sur sa base instable, on pouvait toucher la chair, mais les cuisses et le ventre
demeuraient la part du liquide. Seules s’animaient les mains librement et commandaient à l’eau2.
Un équilibre s’installe entre les deux éléments, la pierre et l’eau, qui tentent cependant
de s’interpénétrer. Ainsi, « le nu [qui règne] comme un marbre » entraîne une pétrification de
l’eau : les vapeurs fixés au plafond deviennent des « gouttes de cristal », des « clous », des
« stalactites », l’éponge gonflée d’eau est « l’horrible chose lourde », l’eau même est
1
2
Franz HELLENS, Mélusine ou la Robe de saphir, Bruxelles: Les Eperonniers, 1987, p. 53-54.
Ibid., p. 193.
5
« glacée », ou au moins « alourdie de savonnée ». Au pôle opposé, Mélusine entraîne dans la
dissolution de son « ventre » et de ses « cuisses » son compagnon, qui constate : « Un
morceau de moi-même semblait se dissoudre » (p. 193).
A la différence de la légende médiévale, la scène du bain ne fait pas l’objet d’un
interdit, car, au lieu de se cacher et de punir l’impiété de son compagnon, Mélusine le convie
non seulement à assister, mais à participer à cette immersion, révélatrice de sa véritable
nature. Ce n’est pourtant pas l’indice de la transformation radicale, avant-gardiste d’un
élément essentiel du mythe, ni même d’une réinterprétation du statut de son compagnon qui
regroupe plus d’attributs enfantins, que virils. Ce n’est que l’amorce de la véritable punition,
la disparition des êtres féeriques, qui s’accomplit dans le troisième épisode.
Ce dernier s’organise autour d’une triple sublimation, presque simultanée, de Mélusine
résorbée dans la lumière bleue du saphir, de l’aérolite émietté dans des particules lumineuses
et de Merlin transformé en un « jet de lumière bleue ». Evoquant l’origine pierreuse, minérale
de Mélusine – née du saphir perdu au bord de la mer par Merlin -, cette résorption magique
prolonge le geste de Nilrem qui dissimule la robe de Mélusine dans le chaton de sa bague. Si
la « robe légère » est roulée et pétrie dans ses mains, la femme ne se pétrifie plus, mais, à
l’instar de la cathédrale, elle se laisse envelopper dans l’émanation lumineuse du saphir
comme dans « un voile transparent » (p. 261). La pierre, liquéfiée dans un premier temps par
l’interpénétration avec l’eau, se volatilise définitivement dans la lumière.
La quête de la femme. « Savoir de quelle matière elle était faite »
Il convient d’insister sur la révélation que procure ce chapitre final : l’étrange matière
dont le narrateur n’a cessé de chercher le secret, matière de laquelle se revendiquent en même
temps la femme et la cathédrale. Ainsi les pierres des mûrs translucides sont d’« une dureté
poreuse et chaude » (p. 259), imprégnées par la même lumière qui transperce le corps de
Mélusine et dont le créateur s’avère être Merlin. L’identité structurale cathédrale-femme n’oublions pas que la Mélusine mythique était bâtisseuse de forteresses et d’églises - ainsi que
la révélation simultanée de leur mystère, engendré et révélé par Merlin, font de ce dernier
épisode, non seulement la fin nécessaire de l’aventure – « il faut une fin à toutes les
histoires… » (p. 262) – mais l’accomplissement de la quête initiatique. Si l’épisode du bain de
Mélusine n’entraîne chez Hellens aucune blessure pour le mortel, ni la disparition de l’être
féerique à cause de la transgression de l’interdit, c’est que cette fonction a été canalisée vers la
révélation finale. D’ailleurs le choix de Hellens se superpose parfaitement au schéma de la
6
légende de Mélusine telle qu’elle a été consignée par Jehan d’Arras et Coudrette. Selon eux la
transgression s’opère en deux épisodes distincts : le premier concerne la découverte que fait le
comte Raimondin de la nudité et de l’état surnaturel de sa femme, moitié être humain et
moitié serpent, et le deuxième est relatif à la trahison de ce secret, appartenant au couple,
devant les autres – Raimondin traite en public sa femme d’infâme serpente. Si à la première
transgression Mélusine ne disparaît pas, car l’époux n’est pas effrayé par sa monstruosité, la
deuxième transgression ne supporte aucune dérogation : l’homme a dévoilé un secret qui lui
était destiné et a marqué ainsi publiquement le rejet de sa femme1. Jean Markale fournit une
possible interprétation de ce deuxième interdit, conformément auquel «en dehors de l’époux,
ou de l’amant, l’état féerique ou surnaturel de la femme ne doit être connu par aucun être
humain »2 : la femme de l’Autre Monde a choisi, parmi d’autres hommes, celui qu’elle juge
capable « d’assumer les risques de cette sorte de “mésalliance” »3. En transgressant déjà un
interdit majeur, le mariage avec un mortel, la fée défend que sa nature réelle soit connue par
les autres. Si son époux Raimondin l’accepte telle qu’elle est, s’en construisant une image
propre, façonnée par l’amour qu’il lui porte, les autres risquent de ne pas avoir accès à la
même réalité et de s’en créer une image à partir du syntagme « infâme serpente », en d’autres
mots de la concevoir comme un être monstrueux. Or le compagnon de la Mélusine
hellensienne est soumis aux mêmes épreuves, même si elles ne se revendiquent pas d’un
système prohibitif. Fasciné par l’image divisée du corps de Mélusine, à moitié immergé, il
devient dans un premier temps réticent à l’égard de sa nudité exposée le long de leur périple
dans des lieux publiques. Cependant il met ensuite en publicité l’image de Mélusine,
s’efforçant de réunir un comité censé découvrir le voleur de sa robe. Parallèlement, dans
l’épisode final, il trahit l’intention de faire publique le secret de la matière singulière de la
cathédrale :
- Est-il vraiment nécessaire que le secret de cette cathédrale soit connu ? demanda-t-il
[Nilrem] ?
- J’avais fait le vœu de l’arracher à ces pierres, répondis-je. Je l’aurais livré à la science4.
1
Voir Jean MARKALE, « La Transgression », in Mélusine, Paris : Albin Michel, 1993, p. 73-80.
Ibid., p. 76.
3
Ibid., p. 77.
4
Franz HELLENS, op. cit., p. 262.
2
7
C’est Mélusine qui dissoudra le comité de la cathédrale et c’est Nilrem/Merlin qui
infligera au mortel la punition de voire disparaître la femme aimée et la cathédrale à cause de
sa curiosité inassouvie :
- Homme de peu de foi ! Sachez que cette cathédrale, élevée par moi dans le désert, devait
disparaître le jour où quelqu’un en connaîtrait le secret. […] Maintenant que vous connaissez
mon histoire, adieu ! Je disparais. J’emmène avec moi Mélusine, car elle est inséparable de sa
robe de saphir, comme le mouvement de la vie1.
Le jeu combinatoire des isotopies dominantes telles la pierre (et ses corollaires : la
pesanteur, l’inertie, la dureté, ainsi que le désir des hommes de figer le mouvement de
Mélusine, de pétrir sa présence insaisissable), l’eau (et ses pouvoirs de fluidisation et de
dissolution) et la lumière (l’évaporation et la sublimation du solide et du liquide) permet de
suivre, au niveau sémantique et symbolique, l’évolution de Mélusine de l’hypostase
tellurique, chtonienne (dans le mythe elle appartient à la terre par sa queue de serpent, tandis
que chez Hellens elle s’y rattache par la consubstantialité avec la pierre), vers l’hypostase
aquatique (le bain régénérateur) et vers l’hypostase ouranienne (elle s’envole quand son
compagnon découvre sa nature ou disparaît dans la lumière chez Hellens). La pierre, se
liquéfiant sous l’influence de l’eau ou se sublimant en atomes diaphanes sous l’emprise de la
lumière, renvoie à une certaine prédominance de l’élément féminin. Puisque, si l’eau
appartient incontestablement à la femme, la lumière, qui pourrait convenir à un imaginaire
masculin, précisément par le fait d’être « bleue », se revendique plutôt de la nuit, de la clarté
lunaire, que du soleil, et donc d’une symbolique féminine. Acceptant la prémisse que les
noms des dieux contiennent des indices précis relatifs à leurs attributs et fonctions, plusieurs
hypothèses étymologiques peuvent confirmer l’attachement de Mélusine à la lumière, à la
lune et à l’eau en même temps. Ainsi, pour Henri Dontenville, elle serait une Mère Luisant,
une parèdre du dieu gaulois Lug, ancienne divinité solaire2. Mais Mélusine est aussi une Mala
Lucina, qui est certes un dérivé de lux, « lumière », mais qui accompagné de mala fait d’elle
non une Lucine solaire, mais une Lucine « nocturne, inquiétant[e], secr[ète»3, un Soleil Noir.
Quant à l’appartenance aquatique, sa figure est rapprochée de celle de Laudine, la Dame de la
Fontaine, dont le nom contient « la déformation d’un nom gallois contenant Ileuad, lune, ou
bien un ancien awd, rivage, grève (bret. arm. aod ou aud en vannetais) muni de l’article
1
Ibid., p. 263 et 264.
Voir Jean MARKALE, Mélusine, op. cit., p. 151.
3
Ibid., p. 167.
2
8
français, ou encore la mauvaise transcription d’un ondine, traduisant un mot celtique»1. Henri
Dontenville voit en Mélusine une fée des eaux analogues aux mary-morgan de Bretagne, à la
mermaid anglaise ou aux merewîp du Nibelungenlied.2 Jean Markale considère que si
Mélusine est une marfeye, les préfixes mar et mer sont issus du latin mare, « mer » dans le
sens général d’étendue liquide.3 Une hypothèse étymologique qui convient à l’image de la
Mélusine d’Hellens est proposée par G. Godin : s’appuyant sur un récit irlandais,
L’Innondation du Lough Neagh, le critique lie la figure de Mélusine à celle de la femme qui
vit sous les eaux et dont les noms, Libane (Lib) et Muirgen donneraient Meurlusine, « la fée
qui sort ruisselante de la mer »4.
Ambivalence de Mélusine et modélisation du corps social
Cependant, à y regarder de plus près, tout en se rattachant à un imaginaire féminin qui
inclut l’eau, la lune, la lumière bleue, Mélusine incarne aussi une série d’attributs masculins :
elle est l’eau, mais l’élément liquide se situe souvent à la proximité de la pierre, du métal ou
de la glace ; elle est surtout la lumière et le mouvement, alors que c’est aux ingénieurs, ces
sorciers modernes, de s’efforcer de maîtriser, de dompter l’électricité et les machines.
N’oublions pas que si Mélusine est souvent associée à la lune – on l’appelle « le joyau de la
Lune » -, elle est fascinée également par le soleil. Or chez les celtes, créateurs de son mythe,
le soleil est féminin, alors que la lune est masculine. Dans le roman d’Hellens, c’est Mélusine
qui entraîne son compagnon (le narrateur) dans une série d’aventures enfilées selon un rythme
haletant, c’est elle qui initie et détient le pouvoir. Ainsi rejoint-elle la Mélusine légendaire, la
femme-soleil qui anime de ses rayons l’homme-lune. Si Mélusine représente la condition sine
qua non de cette aventure, le rôle du narrateur auprès de la fée reste ambigu. Leur dernière
conversation apporte un éclairage final, synthétique, du rapport des forces qui règne dans leur
couple :
-
Mélusine ! appelais-je.
Je l’aperçus devant moi. Ses yeux étincelaient. La lumière du saphir l’enveloppait comme d’un
voile transparent.
-
Que voulez-vous ? demanda-t-elle.
1
Jean MARKALE, La Femme celte. Mythe et sociologie, Paris : Payot, 1992, p. 147.
Voir Jean MARKALE, Mélusine, op. cit., p. 161.
3
Ibid., p. 162.
4
Ibid., p. 163-164.
2
9
-
Ne t’aperçois-tu pas que c’est ta robe qu’on t’a volée ?
Elle répondit :
-
Je n’ai plus besoin de robe.
-
Ni de moi, je le sens !
-
Vous avez été très bon pour moi, mais me suis-je jamais appuyée sur vous ? Est-ce vous
qui m’avez conduite à travers tout jusqu’à cette cathédrale ?
-
Certes, sans toi je ne serais jamais parvenu ici. Mais, hélas, je crains bien que ce voyage
soit inutile.
-
Inutile ? dit Mélusine. Etes-vous aveugle ?
-
Sommes-nous bien dans le désert ? Existe-t-il une cathédrale ?1
Cette dépendance alliée à la façon infantile dont le narrateur se rapporte au couple que
Mélusine forme avec Nilrem, rattachent Mélusine à la figure de la Déesse-Mère, au statut de
fondatrice et de protectrice de la lignée des Lusignan, Merlusine, la Mère Lusine, la Mère des
Lusignan.
Mais chez Hellens, Mélusine est tributaire plutôt à un autre aspect de la divinité
féminine celte, celui de Vierge, dans l’acception que Jean Markale donne à ce concept, c’està-dire de femme qui n’est pas en puissance d’époux, « sous l’autorité d’un homme », de
« Femme libre, toujours disponible, toujours neuve, toujours possible, symbole éclatant du
renouvellement, de la jeunesse, et aussi, corollairement, de la liberté sexuelle »2.
Cette dernière facette est mise en œuvre dans l’épisode de Libremontville, endroit qui
révèle aux protagonistes une société célébrant l’amour en dehors de tout engagement, placé
sous le signe d’une « Happy liberty ». Charmée par cette ambiance qui proclame la rupture
1
2
Franz HELLENS, op. cit., p. 261-262.
« Et ces Pucelles sont incontestablement « vierges » au sens le plus large du mot, c’est-à-dire qu’elles ne sont
pas en puissance d’époux, qu’elles ne sont pas sous l’autorité d’un homme : car finalement, dans la tradition
celtique comme dans toutes les traditions méditerranéennes pré-chrétiennes, la Virginité n’est pas physique, elle
est purement morale et ne concerne que l’indépendance de la Femme vis-à-vis de l’homme. La Vierge, c’est la
Femme libre, toujours disponible, toujours neuve, toujours possible, symbole éclatant du renouvellement, de la
jeunesse, et aussi, corollairement, de la liberté sexuelle. Car la Vierge est aussi la Prostituée. N’oublions pas
qu’étymologiquement, elle représente la Force : or la force abandonne les uns pour aller vers les autres […]. La
Vierge, dans les définitions qu’en donnent toutes les traditions non-chrétiennes, c’est la Putain Royale, toujours
libre d’elle-même, et dont les hommes se disputent les faveurs, car ses faveurs sont le gage de la force et de
l’autorité souveraine qu’elle détient, biologiquement, par son pouvoir de donner la vie ». Jean MARKALE, La
Femme celte, Paris : Payot, 1992, p. 176.
10
avec le passé monogame et exalte l’immixtion dans une vie de plaisirs, Mélusine se montre
elle-même sous l’apparence d’une prostituée, attirant les hommes comme un aimant :
Je voulus entraîner Mélusine hors de ce guêpier. Mais elle s’y était jetée d’un tel galop, qu’elle
se trouva bientôt confondue avec la foule et que je la perdis de vue un instant. Je la retrouvai en
tête d’une troupe de mâles haletants qui la suivaient avec des regards curieux, intrigués par sa
toilette élémentaire et le dédain de son silence. Je l’appelai, mais ma voix ne fit qu’exciter la
meute, et le nom de Mélusine vola de bouche en bouche. Les hommes courraient, les bras
tendus. Au moment où l’un d’eux allait s’emparer d’elle, elle fit un bond et prit assez d’avance
pour disparaître au tournant d’une rue1.
Dans ce même épisode Mélusine apparaît entourée de femmes dont la vocation de
remplir « la solitude des hommes » est évoquée en étroite liaison avec des allusions aux
oiseaux et au serpent, c’est-à-dire aux attributs de son ancêtre mythique :
Nous passâmes dans une rue où des femmes de toutes sortes s’offraient à la solitude des
hommes. Les trottoirs en étaient encombrés. Leurs visages maquillés scintillaient, et elles
parlaient toutes à la fois avec des faussets, des sifflements, des murmures et des roucoulements
qui faisaient ressembler la rue à une immense volière pleine d’oiseaux des îles. Quelques-unes
glissaient et rampaient comme des serpents. Toutes proclamaient hautement leurs charmes. On
en voyait qui vantaient des raretés alléchantes qu’elles laissaient entrevoir et permettaient de
tâter, comme dans une foire. Les hommes passaient et des couples se formaient. Les marchés
étaient conclus la monnaie en main2.
L’assemblée féerique des prostituées peut renvoyer aux oiseaux merveilleux de la
déesse Rhiannon, qui « font perdre non seulement le sens du temps, mais aussi les souvenirs
et les moments douloureux »3. Il convient de rappeler aussi que Jean Markale rapprochait la
déesse Rhiannon de Brunissen (La Reine Brune), personnage des romans arthuriens, et de là,
par l’intermédiaire de la symbolique commune du « Soleil Noir » de la « Mauvaise Lucine »
devenue Mélusine. Or à Libremontville aussi la temporalité bénéficie d’un double régime :
d’une part l’obsession de l’heure, « l’œil fixé sur les horloges », la fascination de la vitesse
qui fait avancer uniquement en ligne droite, n’admettant « aucune perte ni de temps ni
d’espace » ; de l’autre part la perte du passé - « on ne parle pas du passé à Libremontville» (p.
1
Franz HELLENS, op. cit., p. 209.
Franz HELLENS, op. cit., p. 208-209.
3
Voir Jean MARKALE, La Femme celte, op. cit., p. 144.
2
11
206), le rythme trépidant de la vie citadine qui ne permet l’accumulation d’aucun souvenir.
Pour autant la division la plus importante, définitoire pour le mécanisme social, est instaurée
par le midi, le milieu du jour :
[…] à Libremontville, midi est le signal de la liberté. Tout le monde est libre après midi.
Avant midi, chacun travaille ; c’est le temps des affaires. Jusqu’à midi, aucun homme ne regarde
une femme, aucune femme ne jette les yeux sur un homme. Défense de se tutoyer. A partir de
midi, chacun fait ce qu’il veut1.
Cette étrange bipartition qui sépare la vie responsable, productrice et la vie de luxure
se fait l’écho de la segmentation du corps de la fée, moitié femme, moitié serpent, du corps de
Mélusine dans la baignoire, moitié marbre (pierre), moitié eau, et non dernièrement de
l’ambivalence de cette figure mythique au statut complexe, de Déesse-Mère, de Vierge et de
Prostitué. Le mécanisme de la séparation du tout en deux parties divergentes, qui restent
cependant attachées l’une à l’autre pour fonder ensemble l’unité de l’être, s’instaure
également dans la société matriarcale de Libremontville :
A Libremontville […] hommes et machines vont du même train. Les femmes se divisent en
deux sortes : les utiles et les inutiles. Celles qui produisent et celles qui absorbent. Celles qui
travaillent et celles qui ne font rien. Les fécondes et les stériles. Les Robes noires et les Robes de
couleur2.
Cette répartition rend compte de la nature inquiétante de la femme qui attire autant
qu’elle effraie. La femme-mère et la femme-amante, celle qui inspire le regressus ad uterum
et celle qui menace d’engloutissement, la femme phallique, castratrice, absorbante, coexistent
dans la même collectivité et par extension dans le même individu. Mélusine en est
emblématique, car elle exerce son pouvoir destructeur sur les hommes en deux temps : d’une
part, grâce à sa nature aquatique, métaphore de sa sexualité (qui se dissolve d’ailleurs dans
l’eau), elle les menace de dissolution, et de l’autre part, elle prélève et s’approprie des
caractéristiques généralement connotées comme masculines, en l’occurrence le rôle de moteur
cosmique, de principe qui met le monde en mouvement et qui incite à l’action. De là jusqu’à
l’hypothèse d’une Mélusine androgyne, dont la queue de serpent serais une enseigne
phallique, proposée par Jean Markale, n’est qu’un pas.
1
2
Franz HELLENS, op. cit., p. 201.
Franz HELLENS, op. cit., p. 202.
12
L’androgyne vs le couple primordial
Pour autant la Mélusine d’Hellens ne règne pas seule et implacable en Déesse-Mère. Le
rapport à son compagnon (le narrateur) est érotique et filial à la fois. Ce dernier statut est
mieux envisageable avec la collaboration de la figure de Merlin qui, lui, représente
indubitablement le père, le principe d’autorité, le Maître de l’univers. Son rôle est de
« remettre les choses à leur place » (p. 71), de rétablir l’équilibre (p. 159), d’arranger les fils
menus de la destinée des hommes (p. 97-98). Plutôt que de faire de Mélusine une figure
parfaite de l’androgyne, qui se suffit à elle-même, le roman de Hellens propose l’image du
couple primordial, formé par Mélusine et Nilrem.
La véritable révélation est celle de la cathédrale qui se désagrège et dispense sa
lumière parmi les hommes, mais aussi celle de la consubstantialité de Mélusine et de Merlin.
En effet ils sont deux présences complémentaires : si Mélusine tombe « à ses pieds pareille à
une alouette fascinée » (p. 160), si elle ressemble « à un fil de soie bleue sur un métier en
mouvement » alors que c’est Nilrem qui manœuvre le réseau des fils invisibles marquant la
destinée du monde, inversement Mélusine et son saphir représentent pour Nilrem « force et
subtilité » ; leur perte lui enlève ses qualités surnaturelles et le réduit à l’humble condition
d’ingénieur, « d’homme ordinaire » (p. 264). Deux épisodes légendaires analogues, l’un
récupérant la figure de Merlin et l’autre celle de Mélusine, font de l’immobilisation de
l’homme par la femme une image de la castration. Ainsi Viviane, la compagne légendaire de
Merlin, évoquée d’ailleurs brièvement dans le dernier chapitre de Mélusine de Hellens,
enchaîne le magicien amoureux, lui prélevant le savoir, le dérobe au monde réel et l’enferme
dans un château invisible. L’autre légende présente Mélusine se révoltant contre son père, le
roi Elinas, et l’enfermant dans la « montagne magique de Northumberland nommée
Brumborenlion »1. Cette réclusion est le sujet d’une double interprétation : « Elinas est
enfermé dans une forteresse, dans une prison souterraine, ou bien […] il est franchement
encastré dans un rocher »2. Jean Markale rapproche ce geste de celui de Viviane qui, dans
certaines versions insulaires de la légende, piège sous une grosse roche Merlin : « Niniane –
1
Jehan d’ARRAS, Le Roman de Mélusine ou l'Histoire des Lusignan, trad. Michèle Perret, Paris : Stock, 1979,
p. 25.
2
Jean MARKALE, Mélusine, op. cit., p. 37.
13
Viviane, par son jeune âge, joue le rôle de la fille, et Merlin celui du père. La fille, s’étant
emparée de tous les secrets du père, n’a plus besoin de celui-ci et le neutralise »1. La même
symbolique psychanalytique qui interprète l’emprisonnement de l’homme comme une figure
de la castration, ferait de la perte du saphir détenteur de force, que Merlin recherche sans
cesse, une image analogue. Pourtant dans le roman d’Hellens, Mélusine représente plutôt une
figure de la délivrance pour Nilrem/Merlin. Enfermé par Viviane « dans un cercle magique »
(p. 264), il apprend que le saphir perdu et à la recherche duquel il erre « comme le vieillard en
quête de la jeunesse disparue » (p. 263), sera roulé sur le sable par les vagues et engendrera
une femme : Mélusine. L’ayant retrouvée, il rentre en la possession de ses pouvoirs magiques.
Mélusine représente alors pour Merlin une fille et une maîtresse ou bien son double féminin.
Leurs forces réunies s’affirment dans la scène représentative de la danse, qui les présente en
tant que couple:
Le danseur avait accroché Mélusine et l’entraînait dans les laves d’un galop volcanique. Les
violons semblaient multipliés, les cuivres jetaient des flammes. Et le couple tournait seul au
milieu des hommes en casquette et des Robes de couleur. Mélusine ployait dans le bras du
danseur, tournait sur elle-même, et disparaissait par moments comme au fond d’un abîme,
lorsque la vaste silhouette de son partenaire la couvrait. Il l’enlevait de terre, la courbait à ses
pieds, la lâchait, la reprenait, lui communiquait son élan. Pendant quelques secondes, les deux
corps basculèrent. Puis il y eut un arrêt ; les yeux joints, comme brasés au même feu, brillèrent
et s’obscurcirent. Deux regards soudés l’un à l’autre imprimèrent à la salle entière une étrange
fixité. La musique tournait seule, comme le vent autour des statues2.
Les gestes du danseur relèvent d’une symbolique de l’appropriation et de
l’incorporation : il enlève Mélusine de la terre, lui communique son élan, la couvre de son
ombre, tandis que la femme ne fait qu’esquisser son abandon : elle ploie dans ses bras et se
laisse disparaître, résorber par son partenaire. Cette dialectique est équilibrée par la fusion
finale de leurs regards, qui « brill[ent] et s’obscurci[ssent] » en même temps. Le masculin et
le féminin, la lumière et l’obscurité se fondent l’un dans l’autre sous l’action du « même feu »
et du mouvement, « dans le galop volcanique », refaisant ainsi, ensemble, la figure
primordiale de l’androgyne.
La révélation « cruelle » du dernier chapitre peut être alors celle d’une scène primaire à
laquelle l’enfant n’est pas convié. Le père qui maîtrise l’électricité, les machines et Mélusine
1
2
Ibid., p. 37.
Franz HELLENS, op. cit., p. 214-215.
14
même, représente une figure rassurante, mais aussi un principe autoritaire, inspirant en même
temps « confiance » et une « obscure jalousie ». Par ailleurs le roman multiplie les indices qui
suggèrent une entente secrète entre Merlin et Mélusine : ils sont les seuls à comprendre des
gestes et des paroles qui demeurent étrangères au compagnon de la fée. Ressentant la
supériorité de l’ingénieur comme un élément inhibitoire – « Nilrem grandissait dans l’ombre »
(p. 82), « Il me parut plus grand que tout à l’heure » (p. 45), « L’ingénieur avait disparu, mais
sa grande ombre, barrant le lac, demeurait présente entre nous. » (p. 79) – le narrateur éprouve
constamment la tentation de s’en débarrasser ou du moins d’en diminuer le prestige, de
démythifier sa figure :
Dans la lumière, l’ingénieur semblait maintenant raccourci. Ses épaules accusaient des formes
trapues. Je fus surpris en apercevant un visage ordinaire, d’une saine régularité, et où je
cherchais vainement les signes spirituels qui m’avaient frappé tout à l’heure dans l’ombre1.
Le tout converge vers la confrontation finale que le narrateur provoque :
- Misérable ! m’écriai-je, c’est vous, je n’en doute plus, qui avez volé la robe de Mélusine, un
jour que nous tentions fortune au jeu. Aucun saphir ne possède un pareil éclat. Depuis, non
content de nous avoir ruinés, vous vous êtes glissé partout sur notre route sous d’habiles
déguisements, dans l’espoir de séduire Mélusine et de me l’enlever. Vous m’avez échappé une
fois, par la faute d’un stupide détective qui se laissa berner pas une femme. A présent, je vous
tiens. Ma ruse vous a démasqué. Rendez sa robe à Mélusine ou vous aurez affaire à moi. Je ne
suis peut-être pas le plus fort, mais je m’en soucie peu. Je n’attends plus rien, Mélusine
commence à se détacher de moi et je n’espère plus, faute d’instruments, pénétrer le secret de
cette cathédrale. A nous deux, maintenant !2
Pourtant ce n’est pas l’explosion de la simple rivalité entre deux hommes qui se
disputent la main de la précieuse dame, ni l’inégalité des forces, ni la victoire apparente de
l’un sur l’autre qui s’affirme en premier plan. C’est la capacité illusoire de celui qui n’est
« peut-être pas le plus fort » de s’en sortir de cet enchevêtrement d’intrigues, de qui pro quo,
de multiplications et démultiplications des situations et des personnes, de saisir une certaine
logique et surtout de tout transformer en récit. Puisque ce débordement de jalousie n’est que
le résumé, la rétrospective de la fable du roman. C’est alors la figure de l’écrivain qui
1
2
Ibid., p. 45.
Ibid., p. 261.
15
s’affirme dans son impuissance de mettre fin au récit et qui sollicite « une fin à toutes les
histoires… »1.
Les avatars de l’artiste
D’ailleurs le roman foisonne de figures assimilables à des avatars de l’artiste. Tous les
personnages ont des dons artistiques, sauf… le narrateur. Ainsi Charlot revendique le rôle de
comédien et des velléités sculpturales à la fois. Se plaçant dans la descendance de Phidias, il
est le créateur de l’homme-machine où « tout se répète, tout est prévu, réglé, déterminé ».
Torpied-Mada est lui aussi un artiste, d’abord musicien, chanteur d’opéra, homme de théâtre,
personnage de pantomime (pierrot) et ensuite marchand d’art nègre. Le détective Œil-deDieu, au lieu d’élucider le cas qu’on lui propose, se découvre la vocation de conteur,
accordant plus d’attention au récit qu’il compose qu’aux faits qu’il relate. Celui-ci explique au
narrateur : « Homme de peu de foi, ne comprenez-vous pas que le récit de nos aventures
importe plus que leur issue ? »2
Quant au Merlin/Nilrem, qui trace des signes sur le sable avec le bout de sa canne,
celui-ci se rattache, certes, à la figure du démiurge, d’autant plus qu’il étale son rôle de
« mettre un peu d’ordre et de justice dans les destinées » (p. 97), mais il est proche surtout de
la figure de l’écrivain qui maîtrise les fils des destinées de ses personnages :
L’homme remua le gravier avec sa canne et attira à lui une sorte de fil d’araignée, presque
invisible, qui courait le long du chemin. Alors nous nous aperçûmes que le sol de ce jardin était
couvert d’un réseau de linéaments de la couleur du gravier et dont on ne distinguait pas les
bouts. Quelques-uns suivaient les contours des allées, d’autres traversaient les pelouses, séparés
par les troncs, comme les fils des dentellières maintenus par des épingles sur les coussins. Ils
s’accouplaient ou se croisaient, formaient des nœuds, et les hommes qui marchaient, le visage
penché vers le sol, les entraînaient en avançant ou accrochaient les pieds dans leurs méandres,
comme de vivants fuseaux accomplissant un travail impondérable mais nécessaire3.
Le tissu narratif, évoluant de façon aléatoire et en dehors de toute maîtrise de la part de
son créateur, est assimilable à la métaphore de la toile d’araignée. Pourtant de cet
enchevêtrement d’intrigues, des « méandres » du parcours aventureux, le « vivant fuseau » du
créateur détache des situations qui se répondent, s’anticipent, se reprennent, se développent
1
Ibid., p. 262.
Ibid., p. 187.
3
Ibid., p. 97-98.
2
16
pour approfondir la même signification fondamentale. Ainsi à la descente dans le monde
souterrain (chapitre Conseils aux enrhumés), qui suppose la plongée dans un puit lumineux
dont les flammèches « semblaient sortir du sol et montaient tout droit vers la voûte » (p. 39) et
dont « les lucioles bleues montaient toujours comme une tranquille fermentation » (p. 39)
répondra parfaitement la descente verticale dans le cylindre phosphorescent, aux parois
translucides, qui forme l’intérieur de la cathédrale (le dernier chapitre, La cathédrale dans le
désert). Selon la même logique, les flammes bleues, dégagées par les corps des morts, qui se
propagent parmi les vivants en les ressourçant, se retrouvent dans les atomes lumineux
résultés de l’effritement de la cathédrale.
Non seulement les situations se développent selon des schémas similaires, mais les
personnages eux-mêmes sont les victimes de ce processus de duplication, qui fait de l’un le
sosie parfois caricatural de l’autre. Ainsi Adélaïde est le doublet de Mélusine, lui empruntant
certains attributs définitoires, dont la robe bleue et le statut d’objet de convoitise pour les
hommes. Si Mélusine est intimement liée à Nilrem, le sorcier devenu ingénieur moderne,
Adélaïde est elle aussi la compagne d’un créateur de monde artificiel, Voltourne. Cependant
une dialectique entre l’authentique et la copie différencie les protagonistes et leurs exploits,
tels le faux saphir volé par Adélaïde, cette fausse Mélusine qui déclare son amour faux pour le
détective d’opéra, « un faux détective, un Œil-de-Dieu en toc, un imposteur, un faquin, un
romantique »1.
L’art moderne est ainsi projeté non seulement dans un univers de la multiplicité, mais
aussi de la dérision. L’évolution de Locharlochi, projection fictionnelle de Charlot, proclame
la démythisation du rapport à l’artistique. Figure emblématique de l’artiste contemporain,
celui-ci expose son art poétique en termes d’aventure présentée sous une apparence
« grotesque et malhabile » :
- La raison de mon habillement et de certains gestes qui vous font rire est fort simple. Pour
enseigner mes contemporains, je me suis fait comédien. Notre époque réclame des prouesses,
elle exige de l’adresse sous une apparence grotesque et malhabile. Le music-hall a remplacé le
cirque, la drôlerie le sérieux. Je parais. Tout le monde rit. On me croit gauche et maladroit, je me
heurte aux objets, je trébuche, me relève. A travers le rire, l’étonnement commence à percer. On
me suit, je déploie mes souplesses. Chaque passe est applaudie. Je produis en même temps la
vitesse et le rire. En vingt secondes, j’ai parcouru tout le chemin et propagé une multiple gaieté.
On ne sait plus si l’on a ri d’avantage ou admiré. Mais le rire que j’éveille est aussi éloigné de
1
Ibid., p. 191.
17
celui des Dieux d’Homère que l’auto de Pierpont Morgan diffère du char d’Hector. C’est le rire
bref, sec, amer, saccadé et détonnant d’une époque affairée, le trépignement d’une humanité
positive et désabusée1.
Les « prouesses » ainsi que la gaucherie et la maladresse du comédien, qui constitue
en quelque sorte une mise en abîme du parcours du personnage narrateur et par extension du
roman hellensien, se transforment en questionnement du roman moderne.
L’art d’écrire, tel qu’il se présente au début du XXe siècle, voire en pleine négation
avant-gardiste du passé littéraire, mais aussi remodelant des acquis de la tradition (mythique
ou légendaire) est mis en scène par le biais du cinéma, qui s’impose déjà comme art de masse.
Ainsi, lors de leur périple dans le Parc Artificiel, les protagonistes contemplent un énorme
écran sur lequel se projètent des signes de ponctuation en perpétuelle agitation – expression
d’une attitude plutôt que d’un message quelconque-, qui laissent ensuite la place à des images
cristallisant des figures mythiques :
Tout au fond, comme on voit au-dessous d’un autel une toile dans un cadre doré, se montrait un
écran lumineux où s’accomplissait un jeu de formes et de couleurs en constante évolution. On ne
distinguait d’abord que quelques lignes droites ou recourbées qui semblaient jetées au hasard ou
des masses de couleurs formées de tous les tons du prisme, fondus l’un dans l’autre. Peu à peu
les tons et les lignes s’affermissaient et se séparaient, déferlant comme les vagues, et l’œil y
découvrait des formes qui nageaient, plongeaient, remontaient à des surfaces imaginaires, ou
planaient dans un ciel mouillé de vapeurs, traversé de brises souples comme des branches. Des
figures écaillées ou couvertes de plumes apparaissaient dans le flux et le reflux : têtes de
poissons, ailes de perroquets, queues d’oiseaux du paradis. Des paupières de saphir sans
prunelles se levaient et s’abaissaient, on voyait courir des virgules, des accents circonflexes, des
trémas, des points d’exclamation et d’interrogation, toute une étrange ponctuation sans texte,
minuscule, agrandie comme les bacilles dans le champ du microscope, et qui s’élevai t soudain à
la hauteur de comètes et de phosphorescentes galaxies. Et l’énorme culture céleste se
transformait sans cesse à l’oculaire du projecteur tandis que les assistants poussaient des cris ou
des soupirs traduisant les émotions successives2.
Dans un siècle où Dieu est mort, l’autel est peuplé d’une autre « culture céleste », les
fidèles remplacent la communion par le catharsis et l’épiphanie c’est une nouvelle
1
2
Ibid., p. 70.
Ibid., p. 55.
18
cosmogonie. Les formes et les couleurs non - différenciées n’y font qu’un tourbillon duquel se
détachent progressivement les éléments primordiaux, l’eau et le ciel, ainsi que les figures
archétypales telles le poisson et l’oiseau. Précédée par le surgissement de ses éléments
définitoires, Mélusine même prend contour ferme grâce au mouvement – plongée ou envol –
mais aussi à l’apparition du saphir et aux yeux sans prunelles qui rappellent son avatar en
ciment. Ainsi l’avènement du monde moderne se confond avec la composition du roman. Son
parcours est jalonné par les mêmes étapes que le roman entier et s’achève par la sublimation
de toute matière dans la lumière. Mélusine ainsi que de l’édifice dont elle est la métonymie
s’envolent, s’élèvent, se transformant en de « comètes et de phosphorescentes galaxies ».
L’image de la cathédrale émiettée, sur laquelle clôt le roman, reprend et décompose les
principaux enjeux de l’œuvre d’Hellens. L’aérolite translucide, phosphorescent, dont les
parois sont faites d’une lumière « tiède comme un feu d’ouate imbibée d’alcool » sortant « de
partout et de nulle part » et dont les « voûtes en ogives ne [sont] soutenues par aucun pilier »
renvoie sans doute au château légendaire de Viviane. N’oublions pas que ce dernier
remplaçait la muraille extérieure par un rang de colonnes légères, se courbant pour s’unir par
leurs sommets, tandis que l’édifice était fait de « pierre blanche éclatante percée de mille
portes et fenêtres ». La cathédrale dont le toucher se transforme en enfoncement « les mains
tendues, dans le vide » et dont « les lueurs se cristalis[ent] [aux] doigts » du narrateur (p. 259),
rappelle également la Montagne de Verre, première représentation d’Avalon. En effet cette
terre des initiés, île des prêtres où se dressent monastères et couvents, est entourée des brumes
qui s’épaississent pour se dissiper ensuite complètement sous les yeux de celui qui
accomplitvles gestes rituels.
La cathédrale de Mélusine possède aussi une forte dimension allégorique, projetant une
prise de position vis-à-vis du symbolisme. Si le Parc Artificiel de Nilrem garde sans doute des
éléments empruntés à L’Eve future (1886) de Villiers de L’Isle Adam, dont le héros est aussi
un ingénieur et un magicien, « le sorcier de Menlo Park », le final de deux œuvres présente
aussi des similitudes intéressantes. Tout comme le récit de L’Isle Adam, qui, après avoir
tenter d’expliquer minutieusement la fonctionnement mécanique de l’Andréide, débouche sur
l’inconnu et l’occulte, l’édifice de Mélusine se refuse à tout propos scientifique. Cependant la
cathédrale, figure privilégiée de l’imaginaire symboliste, peut renvoyer par sa désagrégation,
au diagnostique de l’épuisement du symbolisme, dont Jacques Rivière et ensuite Hellens se
font les promoteurs.
L’image finale de Mélusine, dénouement inattendu d’une aventure psychologique,
mythique, esthétique, dans laquelle rien ne laisse apparaître un parcours figé, rejoint les visées
19
de Rivière portant sur le roman d’aventure, lequel affirme la volonté de faire sentir
l’imminence et le mouvement des moindres événements. La cathédrale est certes un modèle
de l’œuvre d’art total, et particulièrement une métaphore du roman dont le sens est orienté par
le dialogue final de Merlin et du narrateur:
- Homme de peu de foi ! Sachez que cette cathédrale, élevée par moi dans le désert
devait disparaître le jour où quelqu’un en connaîtrait le secret.
- J’entends. Mais à quoi aura-t-elle servi dans cet isolement, si les hommes ne
possèdent même pas la preuve de sa réalité ?
- Soyez sans inquiétude. Vos souhaits et vos efforts n’auront pas été inutiles. Cette cathédrale
était faite de forces et de lumières. En s’écroulant elle a dispersé sa force et sa lumière parmi les
hommes1.
Si le narrateur se voit amené à assister non seulement à l’envol des êtres féeriques mais
aussi à la dispersion de l’aérolithe final, c’est que le romancier moderne se confronte en
même temps avec la disparition du mythe et la provocation de l’écriture-cathédrale, qui lui
échappe complètement. Néanmoins l’œuvre a atteint sa finalité, elle a touché au public, elle a
laissé une trace valable auprès du lecteur.
***
S’appuyant sur la légende de la fée Mélusine, la moulant dans un système poétique qui
se fonde sur quelques isotopies dominantes, telles l’eau vs pierre, lumière vs ténèbres, féminin
vs masculin, Franz Hellens crée un roman moderne, qui articule les nombreux mouvements
littéraires du début du XXe siècle. Le futurisme, le surréalisme, le dadaïsme ainsi que les
grands vecteurs de l’actualité, le cinéma, l’art nègre, le machinisme, la civilisation moderne y
seront convoqués.
Le mythe emprunte alors un parcours emblématique, allant d’une restitution figée de
certains épisodes majeurs, à la fluidisation de sa lecture dans un contexte moderne et
finalement à sa sublimation en tant que mise en abîme de la création littéraire. Tout comme la
pierre qui, liquéfiée dans un premier temps par l’interpénétration avec l’eau, se volatilise
définitivement dans la lumière, Mélusine traverse les étapes analogue d’une triple
métamorphose qui fait d’elle l’objet d’une perpétuelle quête initiatique. S’identifiant
1
Ibid., p. 263.
20
structurellement avec la cathédrale et révélant simultanément son mystère, le corps
translucide de la femme (et de l’aérolite) figure la construction même du roman.
Placé sous le signe de « l’aventure », celui-ci reprend et illustre le modèle du roman à
venir, celui dont le créateur « ne sait pas où il va », qui « n’a pas sans cesse devant les yeux le
sens de l’histoire qu’il raconte »1, qui, s’orientant vers l’avenir et s’ouvrant aux choses
inconnues, ne maîtrise plus « ce qui advient ».
Bibliographie
Corpus
Hellens, Franz, Mélusine. Roman, Paris-Bruxelles : Ed. de La Voile rouge, Emile-Paul
frères, 1920.
Hellens, Franz, Mélusine ou La Robe de saphir. Roman d’aventures, Paris : Gallimard,
1952.
Hellens, Franz, Mélusine ou La Robe de saphir, Bruxelles : Les Eperonniers, 1987.
Etudes critiques
Aron, Paul, « Mélusine: lecture d'une légende surréaliste » in Vic Nachtergaele, Franz
Hellens entre mythe et réalité, Leuven : Leuven University Press, 1990, p. 145-154.
Gorceix, Paul, « Rêve, Fantastique et Surréalité » in Ben Ali, Sourour, éd., Les écritures
poétiques de Franz Hellens, Clermont-Ferrand : Presses Universitaires Blaise Pascal,
2003, p. 147-157.
Klatte, Gerlinde, « Feu, brume, soleil – l’imaginaire de la lumière dans l’œuvre de Franz
Hellens » in Ben Ali, Sourour, éd., Les écritures poétiques de Franz Hellens, ClermontFerrand : Presses Universitaires Blaise Pascal, 2003, p.117-138.
1
Jacques RIVIERE, Le Roman d’aventure. Essai, Paris, Editions des Syrthes, 2000, p. 57-58.
21
Lysoe, Eric, « Mélusine et le futurisme : plaidoyer pour une relecture » in Courrant
d’ombres, no 3 : « Franz Hellens », printemps 1996, p. 51-66.
Etudes mythologiques :
Blacher, E., Essai sur la légende de Mélusine. Etude de philologie et de mythologie
comparées, Paris : Parent, 1872.
Clier – Colombani, Françoise, La Fée Mélusine au Moyen-Age, Images, mythes et
symboles, Paris : Le Léopard d'or, 1991.
Desaivre, Léo, Le Mythe de la mère Lusine, Saint-Maixent, 1883.
Dontenville, Henri, La Mythologie française, Paris : Payot, 1948.
Gaignebet, Claude ; Lajoux, Jean-Dominique, Art profane et religion populaire au
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Harf-Lancner, Laurence, Les Fées au Moyen-Age, Morgane et Mélusine ou la naissance
des fées, Paris : Librairie Honoré Champion, 1984.
Lecouteux, Claude, Mélusine et le chevalier au cygne, Paris : Payot, 1982 - Réed. Paris :
Imago, 1997.
Lecouteux, Claude, La Mélusine de Thuring de Ringoltingen et autres récits, Paris :
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