Héritage français à la magnificence de Lucknow et

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Tourisme
Lucknow
Héritage français à la magnificence
de Lucknow et de l'Inde !
Alain Verdier est parti à Lucknow sur les traces de Claude Martin, cet aventurier téméraire qui a su
saisir la chance du destin pour devenir un des grands de ce monde. Ce que l'Inde lui a donné, il le lui
a laissé en héritage, un héritage dont de nombreuses générations vont encore profiter dans le
futur : l'accès au savoir… N'est-ce pas là une fabuleuse destinée ?
Lucknow la Magnifique
« Il n'y a pas de ville plus belle que Lucknow », écrivait Rudyard Kipling qui y fut
correspondant du journal La Pionnier. «
Les rois l'ont décorée de bâtiments fantastiques, dotée de dons somptueux et trempé
dans le sang. Elle est le centre de la plus
grande oisiveté, du plus grand luxe et de
toutes les intrigues. »
Lucknow, la Ville d'Or, a gardé même de
nos jours tout son charme d'antan. La capitale de l'état de l'Uttar Pradesh reflète une
Uttar Pradesh
culture riche et sophistiquée combinant les
civilisations musulmanes et hindoues qui
ont vécu ici côte à côte, partageant les mêmes
intérêts et une langue commune, l'urdu.
Toute cette splendeur fut l'oeuvre des
puissants nababs de l'Audh et tout particulièrement du quatrième nabab, Asaf-UdDaula, qui transforma la cour de Lucknow
en un lieu de magnificence. Le nabab
érigea de nombreux palais, mosquées et
jardins qui jouèrent un rôle important
dans l'histoire de l'architecture indo-sarracénique. Aujourd'hui encore, le nom de
Lucknow est synonyme de beauté architecturale, de parfums exotiques, de mangues
sucrées et de musique sophistiquée.
L'homme qui voulait être roi
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Un des romans les plus célèbres de
Kipling, «L'homme qui voulait être roi »,
raconte l'histoire de deux aventuriers qui
partirent en Inde pour devenir rois du
Kafiristan. Kipling s'est inspiré de la vie de
l'aventurier et général américain Josiah
Harlan (1799-1871), un Quaker de Pensylvanie qui voyagea au Punjab et en
Afghanistan avec l'intention d'y être
couronné. Il s'immisça dans la politique locale et participa à des actions militaires
opposant différents seigneurs de la guerre.
Ses services lui permirent d'obtenir à perpétuité le titre de Prince de Ghor, titre
transmissible à ses descendants. Son héri-
tier direct actuel, Scott Reiniger, curieusement, joue dans des films hollywoodiens
mais ne semble pas très pressé de revendiquer son titre en Afghanistan.
Quoiqu'il en soit, peu d'histoires sont
aussi fascinantes que celle de Claude Martin, un aventurier d'origine française qui
connut sur le sous-continent indien un destin encore plus extraordinaire que Josiah
Harlan. C'est à Lucknow que Claude Martin
arriva en 1774, alors âgé de 39 ans. Fils d'un
tonnelier de Lyon, il y est né le 4 janvier
1735. Sa mère mourut alors qu'il n'avait que
huit mois. Plutôt que de poursuivre le
métier de son père, il décida de s'engager
dans l'armée des Indes, comme simple soldat, à l'âge de 16 ans. Il s'embarqua pour
Pondichéry avec quelques sous en poche. La
France se battait alors pour le contrôle du
sous-continent contre l'Angleterre. Prisonnier des anglais après douze longues années
de batailles perdues, Claude Martin se
joignit à ces soldats de fortune qui, comme
René Madec ou Michel Raymond, allaient se
couvrir de gloire et d'honneur sur les
champs de bataille. Mettant à profit ses
bonnes connaissances mathématiques et
son don pour le commerce, il devint Intendant de l'arsenal du grand nabab Asaf-UdDaula. Son destin fut alors tracé. Courtier et
marchand d'indigo, il allait bientôt être
promu Major Général par le nabab et acquérir une fabuleuse fortune.
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Un génie et un humaniste
Claude Martin fut un véritable homme
de lumières à l'esprit universel. Architecte,
ingénieur, homme d'affaires, industriel,
soldat, diplomate et géographe, il excella
en tout. Ses distractions préférées furent
même la construction de montgolfières et
de théâtres de marionnettes. Et pour poursuivre l'anecdote, sa générosité envers ses
sept maîtresses, ainsi que les maîtresses
abandonnées par ses amis, fut proverbiale.
Il fit ériger, à l'est de Lucknow, en souvenir de son premier amour qu'il laissa à
Lyon, Constance, l'incroyable palais Constancia. Claude Martin y passa ses
dernières années et y reposa ensuite. Cette
folie baroque, dessinée par lui, sert aujourd'hui de décor fantastique au Collège de la
Martinière, en accord avec le souhait qu'il
a formulé avant sa mort qu'il soit transformé en école. Deux autres Collèges de la
Martinière furent créés plus tard à Calcutta
et dans sa ville natale de Lyon.
Triste fin
d'un rêve
et
accomplissement
Près d'un demi siècle après la mort du
Major Général Claude Martin le 13 septembre 1800, Lucknow devint le terrain d'affrontements très violents lors du
soulèvement de 1857. Comme Martin
l'avait voulu dans son testament, Constancia était devenue une école, mais dans
laquelle seuls les européens et les angloindiens étaient admis. Alors que les soldats
indiens avaient commencé à attaquer les
anglais et à brûler leur quartier au nord de
Lucknow, les élèves et les professeurs de la
Martinière se réfugièrent dans la Résidence, siège du pouvoir colonial. Ils y rejoignirent d'autres européens et des
indiens restés fidèles à la Compagnie. Ils y
furent assiégés pendant six mois.
A partir du milieu de 1857 et jusqu'à
mars de l'année suivante, Constancia fut
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occupée par les troupes indiennes. Durant
cette période, la tombe de Claude Martin
fut ouverte et son corps, préservé dans de
l'alcool et du sel, fut jeté dans la rivière voisine. Une des raisons invoquées pour expliquer cette action est le ressentiment envers
une école qui n'acceptait pas à l'époque les
étudiants indiens. Ce qui ne fut certainement pas l'idée du Major Général qui indiqua clairement dans son testament que les
professeurs pouvaient être des musulmans, des hindous ou des chrétiens. Il est
cependant possible que la véritable raison
pour laquelle la tombe de Claude Martin a
été profanée soit l'avidité. Martin avait été
l'un des plus riches européens de l'Inde et
les auteurs de cette profanation pensaient
peut être trouver de l'or et des bijoux dans
sa tombe…
Lorsque le colonel Abbot et ses troupes
reprirent Lucknow, ce dernier ordonna
que le tombeau de Claude Martin soit
immédiatement restauré. Si bien qu'aujourd'hui encore peut-on se recueillir sur sa
tombe…
Selon le voeux qu'aurait probablement
été celui de leur mécène, les élèves de la
Martinière se sont battus pour l'Indépendance de l'Inde et ils continuent de participer aujourd'hui à toutes les activités de
la vie nationale. Le Collège de la Martinière
est encore et toujours un pionnier de l'éducation et une des meilleures institutions
de l'Inde. Ses trois facultés - Lettres, Commerce et Sciences, reçoivent plus de 1700
étudiants chaque année. De quoi apporter
quelque fierté a feu celui qui en fut à
l'origine…
Claude Martin était parti vers l'Inde
immémoriale en quête d'une vie nouvelle.
C'est dans ce fabuleux pays surgi du fonds
des âges qu'il réalisa son rêve, au-delà de
ses espérances. Son nom restera à jamais
gravé sur les pages dorées de l'histoire de
cette terre de démesures ! ■
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