Réintroduire le gypaète - Parc Naturel Régional du Vercors

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Réintroduire le gypaète - Parc Naturel Régional du Vercors
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REINTRODUIRE LE GYPAETE
GYPAETUS BARBATUS
DANS LES PREALPES
OCCIDENTALES
Jean-Pierre Choisy
Photo ASTERS site <www.gypaete-barbu.com>
PERTINENCE STRATEGIQUE A L’ECHELLE DES ALPES ET DU
CONTINENT, connexion avec Pyrénées et Massif Central
FAISABILITE DE L’OPERATION
CHOIX DU BIOTOPE ET DU SITE DE LACHER
LE PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS,
CADRE ET AGENT DE REALISATION
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales: pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy (2010)
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Pendant des siècles, le Gypaète des Alpes a été
le dragon malfaisant dont une haine imbécile glorifiait
la destruction.
Paul Géroudet (1965)
Chose étrange, alors que
les Suisses, peuple calme et pondéré,
ont raconté du gypaète les faits les
plus invraisemblables, des peuples
chez qui le gypaète vit en aussi
grand nombre : les Espagnols, les
Catalans et même les Andalous,
qu’on pourrait croire plus portés à
l’exagération et à l’emphase, ont
conservé en face de lui un calme et
une indifférence complète.
Louis Lavauden (1911)
Vers 1920 déjà…Carl Stemmler voulut
réintroduire le gypaète en Suisse, mais il fut éconduit.
Presque en même temps, Oskar Heinroth plaida cette
cause-là en Allemagne…
Robert Hainard…entre bien d’autres réflexions
prophétiques, s’est fait l’avocat des réintroductions
animales…Le gypaète…n’a pas manqué de le fasciner.
En Gilbert Amigues, ingénieur des eaux et forêts…en
Haute-Savoie, l’idée trouva l’écho providentiel…
En 1972…il sut dissiper mes réticences helvétiques….
Il semblait que nous avions échoué. Le nouveau départ
décidé en 1978… fut un projet de grande envergure
associant l’UICN, le WWF-International et la Société
zoologique de Francfort. L’adhésion de l’Autriche fut
inestimable…le zoo d’Innsbruck ayant obtenu la
reproduction de l’espèce, un plan d’élevage était mis
en œuvre à Vienne…
Il a fallu attendre 1986 pour que les premiers jeunes
prennent leur envol dans le Rauristal…la création
d’une population alpine viable à long terme exigera
encore beaucoup…
Notre utopie était de rendre aux montagnes le vol
silencieux des grands oiseaux…et j’ai le plaisir
exceptionnel de voir mon rêve se réaliser. A tous ceux
et celles qui…ont relevé le défi, j’exprime
reconnaissance du fond du cœur.
Paul Géroudet in J.-F. Terrasse (2001).
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pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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Remerciements
Ce travail n’aurait pas été entrepris si Michel Terrasse n’avait visité la zone d’étude,
notamment à l’occasion de la réintroduction du Vautour fauve et n’avait su communiquer, tant à
l’auteur qu’à la Fondation pour la Conservation du Gypaète, sa conviction de la pertinence de
réintroduire l’espèce dans le sud-est du Parc Naturel Régional du Vercors.
Sa réalisation doit beaucoup à des conversations et à des échanges de courriels avec les
spécialistes de l’espèce que sont, du Pays Basque à l’Autriche, Martine Razin, Marie Zimmerman,
Julien Heuret, Raphaël Arlettaz et Richard Zink. Ce dernier m’a également fourni les cartes actuelles
du Gypaète en Europe et dans les Alpes.
Cette étude n’aurait pu s’appuyer sur des bases statistiques sans les comptages de bouquetins
organisés conjointement par la Réserve Naturelle des Hauts du Plateaux du Vercors et le groupe
drômois du Centre Ornithologique Rhône Alpes– Groupe Drômois d’Etudes et de Recherches sur les
Vertébrés (CORA26 – GDERV), sans les informations fournies sur les autres Ongulés sauvages et
domestiques par les Directions Départementales du Territoire de la Drôme et de l’Isère, sur les trois
autres Vautours par Christian Tessier de l’association Vautours en Baronnies, et sur l’Aigle royal par
Roger Mathieu, de l’Observatoire de la Faune Drômoise CORA26 – GDERV-FRAPNA1. Des
discussions et échanges de courriels avec les deux derniers ainsi qu’avec Jean-Louis Traversier, de
l’Office National des Forêts, naguère à la D.D.A.F. de la Drôme puis à la Direction Régionale de
l’Environnement ont également été précieux.
Les observateurs, tous cités, qui ont transmis les données de Gypaète dans la zone d’étude
ont également apporté une contribution qui ne saurait être sous-estimée.
Les nombreuses photographies de biotopes et de faune dans la zone d’étude ne sont pas un
simple ornement : elles constituent une part essentielle de l’information. Toutes m’ont été envoyées
par des membres du réseau d’observateurs, bénévoles2 ou professionnels3 que je coordonne pour le
suivi des vautours à distance des populations. Leurs auteurs sont mentionnés sous chacune d’elles.
Parmi mes collègues du Parc Naturel Régional du Vercors, j’ai mis à contribution pour la
fourniture de cartes et de données statistiques sur le territoire, Michaël Bachet, Lina Silvini et, pour
tout ce qui touche à l’informatique, Yann Buthion.
Que tous trouvent ici l’expression de ma gratitude, ainsi que ceux dont les noms
n’apparaissent pas mais qui ont accumulé tant de données sur les espèces citées, de même que ceux
qui m’ont envoyé des photos que je n’ai pas intégrées à ce document mais qui ont leur utilité.
Jean-Pierre Choisy, PNRV
Chamaloc 2007, révision achevée en janvier 2010
< [email protected]>
L’évolution, depuis 2007, des connaissances comme de la situation exigeait une refonte totale de la première partie ainsi
que quelques corrections des deux autres.
1
Fédération Rhône-Alpes de Protection de la Nature.
2
Naturalistes, associatifs ou non, divers autres observateurs dont des Accompagnateurs de Moyenne
Montagne ainsi qu’un éleveur, auteur des photos d’une curée à trois espèces de vautours (cf. infra), qui n’est
pas le moins enthousiaste,
3
Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors, Parc Naturel Régional de Chartreuse, Parc
National des Ecrins.
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Sommaire
RESUME ____________________________________________________________________ 7
Figures ___________________________________________________________________________ 12
Tableaux _________________________________________________________________________ 12
Photos ___________________________________________________________________________ 13
INTRODUCTION ________________________________________________________ 14
I.
UNE CONTRIBUTION ELEVEE A LA BIODIVERSITE ______________________ 14
II.
SITUATION ACTUELLE ________________________________________________ 14
A. – HORS D’EUROPE _____________________________________________________________ 14
B. – EN EUROPE __________________________________________________________________ 14
1. EXTERMINATION RECENTE, TOTALE OU PRESQUE ___________________________ 15
2. SITUATION TRES FRAGILE : CORSE __________________________________________ 15
3. RENAISSANCE SPECTACULAIRE : PYRENEES _________________________________ 15
4. REINTRODUCTION EN COURS _______________________________________________ 15
III.
METHODE DE LACHER________________________________________________ 16
IV.
LE PRESENT TRAVAIL ________________________________________________ 16
A. – ORIGINE _____________________________________________________________________ 16
B. - REFERENCES _________________________________________________________________ 16
C. - A QUI S’ADRESSE-T-IL ? _______________________________________________________ 17
D. – CONTENU ___________________________________________________________________ 17
V.
CONCEPTS ET TERMINOLOGIE ________________________________________ 17
A. - LACHER _____________________________________________________________________ 17
B. – REINTRODUIRE UNE ESPECE, LACHER DES INDIVIDUS __________________________ 18
C. – RETOMBEES _________________________________________________________________ 18
D. - HIERARCHIE ET ECHELLE D’ANALYSE ET D’ACTION ____________________________ 18
1. NIVEAU TACTIQUE (Partiellement traité dans la troisième partie) _____________________ 19
2. NIVEAU OPERATIONEL _____________________________________________________ 19
3. NIVEAU STRATEGIQUE _____________________________________________________ 19
4. NIVEAU POLITIQUE (Non développé mais rappel nécessaire) ________________________ 20
5. NIVEAU DES VALEURS (Non développé mais rappel nécessaire)_____________________ 20
AVANT-PROPOS : CRITERES A PRENDRE EN COMPTE POUR LA
REINTRODUCTION DU GYPAETE ________________________________________ 21
PREMIERE PARTIE : LA REINTRODUCTION DU GYPAETE Gypaetus barbatus A
L’EXTREME OUEST DES ALPES ET DANS LE SUD DU MASSIF CENTRAL DANS
LES STRATEGIES DE CONSERVATION ET RESTAURATION EN EUROPE_____ 23
I. ALPES ET MASSIFS CONNEXES DANS LES STRATEGIES DE RESTAURATION
DU GYPAETE ET AUTRES VAUTOURS _______________________________________ 24
A. - PRIORITES SPATIALES ________________________________________________________ 24
1. REGION SUD-EST ou BALKANIQUE __________________________________________ 24
2. REGION SUD ou THYRENIENNE = Corse + Italie insulaire et péninsulaire _____________ 24
3. REGION SUD-OUEST ou PYRENEO-IBERIQUE, plus brièvement, IBERIQUE S. L. = sensu
lato = Pyrénées françaises incluses. __________________________________________________ 24
4. REGION CENTRALE ou ALPINE ou, plus brièvement, ALPINE S.L. ____________________ 25
B. – PRIORITE TEMPORELLE_______________________________________________________ 25
II.
DEUX STRATEGIES COMPLEMENTAIRES _______________________________ 26
A. - CONSERVATION ET RENOUVEAU ______________________________________________ 26
B. – REINTRODUCTION ___________________________________________________________ 27
C. – COMPLEMENT SYNECOLOGIQUE AUX DEUX STRATEGIES _______________________ 27
III.
ETAT ACTUEL DE LA REINTRODUCTION DANS LES ALPES _____________ 27
A. – FAUT-IL CONTINUER A LACHER ? _____________________________________________ 27
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1. Dans un contexte humain dangereux ajourner des.opérations, même géographiquement
prioritaires ______________________________________________________________________ 28
2. Le modèle n’est pas applique a l’objet pertinent _____________________________________ 28
3. La présence du gypaète dans les alpes reste très fragile _______________________________ 28
B. - DEUX GROUPES D’OPERATIONS _______________________________________________ 29
1. Succès loin d’être atteint, sans reproduction encore réussie ____________________________ 29
2. Succès encore fragiles _________________________________________________________ 29
C. – ANALYSE ____________________________________________________________________ 30
1. HOHE TAUERN (Autriche), ALPES S-O (Mercantour, F et Alpi Marritime, I) ____________ 30
2. STELVIO-ENGADIN et ALPES N-O (Vanoise, F, Haute-Savoie, F et Valais, CH)_________ 31
IV.
PERSPECTIVES _______________________________________________________ 33
A.- DES MOYENS EN FORTE CROISSANCE __________________________________________ 33
B. - AMELIORER L’EFFICACITE STRATEGIQUE ______________________________________ 33
1. Lâcher des gypaètes subadultes ? ________________________________________________ 34
2. Concentration des lâchers dans le temps ___________________________________________ 34
3. Rapport des sexes ____________________________________________________________ 35
4. Lignées ____________________________________________________________________ 35
5. Quand arrêter de lâcher ?_______________________________________________________ 35
a. – À l’echelle d’une operation locale ______________________________________________ 35
b. – À l’echelle strategique_______________________________________________________ 36
6. Nouvelles localisations de lâchers________________________________________________ 37
D. - CONNEXION INTRA-ALPINE : ALPES LEPONTINES S. L. __________________________ 38
E. – CONNEXION ALPES - PYRENEES : PREALPES DU SUD-OUEST _____________________ 39
F. – UNE OPERATION DANS LE SUD DU MASSIF CENTRAL ? __________________________ 42
1. Un précieux complément stratégique _____________________________________________ 42
2. Une faute stratégique grave à exclure _____________________________________________ 43
DEUXIEME PARTIE : UNE OPERATION DE REINTRODUCTION DU CASSEUR
D’OS Gypaetus barbatus DANS LES PREALPES DU DAUPHINE MERIDIONAL
FAISABILITE, POTENTIALITES __________________________________________ 46
I.
FACTEURS ECO-ETHOLOGIQUES _______________________________________ 48
A. - BIOTOPE _____________________________________________________________________ 48
1. Les critères de sélection _______________________________________________________ 48
2. Un vaste ensemble géomorphologiquement optimal__________________________________ 50
3. Taux de boisement ___________________________________________________________ 59
B. - RESSOURCES ALIMENTAIRES__________________________________________________ 62
1. Le bouquetin CAPRA IBEX, en plein développement n’est qu’au début de son retour dans la zone
d’étude. ________________________________________________________________________ 63
2. Le chamois ; Rupicapra rupicapra _______________________________________________ 64
3. Le mouton ; Ovis gmelini f. aries ________________________________________________ 68
4. Autres ongulés Ungalata _______________________________________________________ 69
5. Loup ; Canis lupus , Lynx ; Lynx lynx_____________________________________________ 70
6. Charniers à vautours __________________________________________________________ 72
C. – CLIMAT _____________________________________________________________________ 72
II.
IMPACT DES ACTIVITES HUMAINES____________________________________ 74
A. – DESTRUCTIONS DIRECTES ____________________________________________________ 74
B. - PERTURBATIONS _____________________________________________________________ 74
1. Nature et mode d’action des perturbations _________________________________________ 75
2. Évaluer l’impact des perturbations par les activités humaines a l’échelle de la zone d’étude dans
son ensemble____________________________________________________________________ 76
3. Gestion des perturbations éventuelles dans des sites précis de la zone d’étude _____________ 78
III. POTENTIALITES DE LA ZONE D’ETUDE POUR UNE POPULATION
NICHEUSE DE GYPAETES __________________________________________________ 78
A. – LA GEOMORPHOLOGIE, FACTEUR ESSENTIEL POUR L’INSTALLATION DU GYPAETE
_________________________________________________________________________________ 78
B. - L’ALTITUDE EXCLUT-ELLE L’INSTALLATION DU GYPAETE DANS UNE PARTIE DE LA
ZONE D’ETUDE ? _________________________________________________________________ 79
1. La zone d’étude et les critères d’altitude de Hirzel et al. ______________________________ 79
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2. Facteurs écologiques et humains corrélés avec l’altitude ______________________________ 79
C. – ESTIMATION DU NOMBRE DE COUPLES POTENTIELS ____________________________ 81
TROISIEME PARTIE : REALISATION DE L’OPERATION OU ? QUI ?__________ 83
I. BIOTOPES MAXIMILISANT LA PROBABILITE DE REUSSITE DE LACHERS DE
GYPAETES_________________________________________________________________ 84
A – CONDITIONS ECOLOGIQUES ___________________________________________________ 84
B – LOCALISATION DES OBSERVATIONS DE GYPAETE ______________________________ 84
II.
LE MEILLEUR BIOTOPE POUR INSTALLER UN TAQUET _________________ 94
A – RESSOURCES ALIMENTAIRES __________________________________________________ 94
1. Bouquetin : l’espèce la plus favorable_____________________________________________ 94
2. Chamois, mouton / les deux autres espèces très favorables ____________________________ 97
III. REINTRODUCTION DU GYPAETE AU TAQUET EN PRESENCE DU VAUTOUR
FAUVE : ENSEIGNEMENTS DU SUIVI PAR LE PARC NATIONAL DU
MERCANTOUR____________________________________________________________ 100
A. – EN PHASE D'ACQUISITION DE LA MAITRISE DU VOL ___________________________ 100
B. – APRES ACQUISITION DE LA MAITRISE DU VOL ________________________________ 101
1. Territorialisme à distance du taquet _____________________________________________ 101
2. Grégarisme à distance du taquet ________________________________________________ 101
3. Découverte de carcasses ______________________________________________________ 101
4. Moindre dispersion, conséquences probables ______________________________________ 101
IV. LE PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS : CADRE et AGENT DE
REALISATION ____________________________________________________________ 107
A. - UN CONTEXTE GENERAL DE RETOUR LA GRANDE FAUNE ______________________ 107
1. Retours spontanés ___________________________________________________________ 107
2. Réintroductions _____________________________________________________________ 108
3. Processus mixtes ____________________________________________________________ 108
B. - A LA CONVERGENCE DE GRANDS AXES POLITIQUES DU .PARC NATUREL REGIONAL
DU VERCORS ___________________________________________________________________ 109
1. Une politique ferme, ancienne, persévérante de conservation et restauration de la biodiversité 109
2. Retombées pour d’autres politiques _____________________________________________ 109
3. Réintroductions : des compétences et des moyens __________________________________ 111
CONCLUSION _________________________________________________________ 115
OUVRAGES ET TRAVAUX CITES OU UTILISES ___________________________ 117
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RESUME
INTRODUCTION
Par son originalité taxonomique et écologique le Casseur d’os Gypaetus gypaetus contribue
hautement à la biodiversité : beaucoup plus qu’en lui ajoutant simplement une espèce.
Sa situation mondiale actuelle est préoccupante, le plus souvent catastrophique, à quelques
exceptions près dont les plus notables sont l’Asie centrale et, plus modestement, les
Pyrénées - restauration bien avancée- et les Alpes : réintroduction en cours.
Le présent travail est présenté : origine, destinataires, contenu.
Divers termes et concepts sont définis, explicités, précisés.
Première partie
S T R A T E G I E.
PERTINENCE DE L’OPERATION LOCALE
DANS LE CONTEXTE ALPIN ET CONTINENTAL
Une opération de réintroduction a un objectif démographique : fonder un noyau de
population viable et en développement.
La stratégie de réintroduction c’est la distribution des opérations :
- dans l’espace, ajoutant à la démographie une composante biogéographique.
- dans le temps intégrant des contraintes majeures : contraintes techniques (moyens
limités à court terme) et/ou contraintes humaines faisant reporter ou interrompre des
opérations sinon prioritaires.
La place accordée ici à la stratégie, bien plus grande que celles des autres parties, a deux
raisons :
- le lecteur qui souhaite une information détaillée sur l’opération elle-même, mais non pas
sur la stratégie, pourra trouver ici, dans le résumé, une information suffisante pour, au
niveau de l’étude détaillée, sauter la première partie, qui la détaille beaucoup plus ;
- il est essentiel que même ce lecteur aux motivations locales comprenne bien que c’est à
cause de sa signification stratégique que l’opération projetée dans le Parc Naturel Régional
du Vercors est prioritaire par rapport à d’autres, intrinsèquement tout aussi faisables et
localement justifiées.
Les opérations de réintroduction du Gypaète dans les Alpes ont fondé quatre noyaux de
population, qu’on peut regrouper quant au rendement de lâcher (i.e. le rapport du nombre
d’oiseaux en couples à celui des oiseaux lâchés) en deux ensembles aux résultats contrastés.
AUTRICHE ET MERCANTOUR-ARGENTERA : QUASI-ECHEC
Avec en 2009 seulement trois couples au total, dont aucun encore réussi à se reproduire,
le rendement de lâcher est 4,5 fois plus faible que dans les deux autres noyaux de
populations. Ceci ne peut s’expliquer que par une anormale mortalité due à l’Homme,
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essentiellement ou uniquement par tir.
ALPES CENTRALES ET NORD-OCCIDENTALES : RESULTATS ENCOURAGEANTS MAIS MODESTES
Avec respectivement et six et huit couples, le rendement de lâcher atteint ici près de 50%,
avec des succès de reproduction depuis 1997 (Haute-Savoie) et 1998 (Stelvio).
Il reste près de trois fois inférieur à celui des lâchers de Vautour fauve dans les Alpes
françaises et notablement inférieur à celui que le taux de survie du Gypaète permettrait
d’espérer. Cette dépression démographique doit être attribuée, essentiellement et sans doute
exclusivement, à l’extrême dilution des oiseaux lâchés : en moyenne 2 par an et par
opération, ce qui maximalise pour un gypaète atteignant la maturité sexuelle la difficulté à
trouver un partenaire et traduit l’âge tardif de la première reproduction réussie (8,3 ans).
QUAND UNE OPERATION EST-ELLE ACHEVEE ? PRECONISATIONS
Neuf couples installés assurent une probabilité très élevée de pérennité (Schaub et al.).
L’opération de Haute-Savoie a été considérée comme achevée avec seulement sept couples.
Le noyau de population qui en est issu a, depuis, atteint huit couples. Il n’y a pas
contradiction car le modèle de Schaub et al. concerne une population isolée. Or, en dépit
d’une réelle individualisation démographique les noyaux de populations des Alpes ne sont
pas totalement isolés. Un certain transit entre eux doit abaisser le seul d’une ou deux unités
(Schaub et al).
Dans l’état actuel des connaissances, une opération peut donc être considérée comme
achevée lorsque, selon le niveau de sécurité visé, sept à neuf couples seront installés.
Le rendement des opérations réussies permet de prévoir qu’il soit nécessaire de lâcher trente
à trente-six gypaètes. Compte tenu de la rareté et du coût des gypaètes à lâcher, un
rendement de lâcher très inférieur à 50% révèle une mortalité anormale et exige de
suspendre l’opération jusqu’à ce que la cause en soit identifiée et, surtout, maîtrisée. Son
éventuelle reprise doit être subordonnée à la réalisation d’un effort en faveur de l’espèce,
intense, durable, bien plus large que les massifs de lâcher, s’inspirant de ce qui a été réalisé
sur les deux versants des Pyrénées.
QUAND LA REINTRODUCTION DANS LES ALPES SERA-T-ELLE ACHEVEE
? PRECONISATIONS
Le seuil de pérennité ci-dessus (8±1 couples) suppose que la mortalité n’augmente pas de
! 50% (Schaub et al.). Sa valeur actuelle étant très faible (12% des effectifs la première
année, 4% ensuite) et les effectifs globaux modestes, il suffirait de quelques individus tués
en plus chaque année pour que s’amorce une nouvelle extermination du Gypaète dans les
Alpes.
Le seuil de pérennité de 8±1 couples (cf. § précédent) n’est pertinent qu’à l’échelle de temps
d’une opération (" 10 ans après achèvement) : le risque d’une telle augmentation de
mortalité est faible.
Mais à l’échelle de temps stratégique, qui se compte en décennies et non plus en
années, il est totalement impossible de prévoir ce que sera l’évolution de la mortalité, du fait
de l’Homme, directe (ex. : retour du poison, induit par retour du Loup) ou indirecte (ex. :
prolifération d’éoliennes). La pérennité du Gypaète restera donc, dans les Alpes, très
incertaine, tant que les effectifs totaux n’y seront pas beaucoup plus élevés. Seul un
développement démographique soutenu peut permettre d’atteindre cet objectif stratégique de
restauration et conservation. L’expérience acquise avec d’autres grandes espèces à taux de
survie et reproduction analogue (Vautour fauve Gyps fulvus aussi bien que Bouquetin Capra ibex
et autres) montre que le seuil de décollement démographique n’est pas atteint avant que la
production n’atteigne au moins quelques dizaines de jeunes par an.
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Compte-tenu du nombre moyen de jeunes par couple nicheur (Schaub et al.),
la réintroduction du Gypaète dans les Alpes ne peut donc être considérée comme achevée
qu’avec, au moins, 33 à 50 couples nicheurs dans l’ensemble de la chaîne. Ceci constitue
l’objectif stratégique de réintroduction à l’échelle de cette vaste région.
CORRIGER LA STRATEGIE EN FONCTION DES CONNAISSANCES ET MOYENS ACTUELS
La situation des Vautours en général montre que le poison n’est pas un facteur limitant
significatif dans les Alpes lato sensu ( i.e., au sud de la zone sans montagne d’Europe moyenne,
l’espace entre Pyrénées, Balkans, péninsule italienne).
Ailleurs en Europe on ne doit pas accorder un seul individu de Gypaète4 à des opérations de
réintroduction avant que la restauration du Vautour fauve, avec ou sans réintroduction, ait
prouvé que le poison ne constitue pas actuellement un danger majeur. La seule exception est
l’opération en cours en Andalousie : la vigueur et l’originalité des moyens de lutte lui
donnent une haute valeur expérimentale pour la maîtrise de ce fléau.
La stratégie de dilution des moyens (cf. supra) a eu, naguère, une justification politique,
désormais dépassée. Situation et connaissances actuelles doivent la faire corriger : une
concentration beaucoup plus grande des lâchers est désormais une exigence éthique,
technique et financière. On en a désormais les moyens :
• achèvement d’opérations, objectif atteint : déjà en Haute-Savoie, très prochainement
en Stelvio-Engadine ;
• fort accroissement de la production en captivité de gypaètes à lâcher.
Le saupoudrage excessif actuel doit être abandonné. Une réalisation en une ou deux années
reste un idéal démographique techniquement et financièrement inaccessible. Cinq ou six
oiseaux par an et par opération est un compromis à la fois accessible et démographiquement
acceptable. C’est ce qui a été fait en 2009 en Andalousie. La première année, on peut
accepter un effectif plus modeste pour faciliter l’acquisition d’une expérience technique par
l’équipe locale.
Un rapport des sexes aussi équilibré que possible et le choix des lignées reproductrices en
fonction des localisations sont des compléments très souhaitables.
PRIORITES STRATEGIQUES ACTUELLES EN EUROPE
Deux régions sont stratégiquement prioritaires pour la conservation et la restauration du
Gypaète en Europe5 :
Pyrénées : bastion démographique actuel, avec environ 140 couples, 500 individus. Hors
sujet car la réintroduction n’est pas la stratégie ici pertinente ;
Alpes lato sensu : à l’échelle des déplacements du Gypaète et des autres Vautours région-clé
par la géographie, reliant les trois péninsules du sud de l’Europe. Démographiquement
nécessaire, la poursuite des lâchers doit se faire par de nouvelles opérations. Deux sont
actuellement prioritaires par leur localisation géographique favorisant les transits :
Alpes centrales : connexion en une même population du noyau reproducteur du Stelvio
et du noyau Valais - Haute-Savoie – Vanoise. La réflexion stratégique a récemment reconnu
la pertinence du projet mais au niveau opérationnel l’étude de faisabilité reste encore à
réaliser ;
Préalpes du sud du Dauphiné6 : la recolonisation des Alpes françaises en sera
4
Idem pour Percnoptère Neophron percnopterus ou Vautour moine Aegypius monachus.
La sauvegarde des derniers couples de Crète et celle, près de l’Europe, de ceux du Maghreb sont des
urgences. Mais des lâchers sont exclus tant que les causes de mort persistent.
5
6
Une opération dans les gorges des Causses constituerait :
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
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dynamisée et un noyau de population ici, à l’extrême ouest de l’arc alpin maximalisera la
probabilité de transit entre Alpes et Pyrénées. Toutes autres choses étant égales par ailleurs,
la probabilité qu’un individu erratique quittant un noyau de population en atteigne un autre
varie comme l’inverse du carré de la distance entre noyaux de population. Donc la
probabilité de transit d’immatures entre les territoires des couples les plus proches des deux
chaînes serait presque doublée par un noyau de population à l’extrême ouest des Alpes. Le
transit actuel de vautours fauves et v. moines de l’Espagne aux Alpes occidentales via les
Pyrénées et le Massif Central, montrant qu’il ne s’agit pas d’une spéculation purement
théorique. La faisabilité de l’opération est l’objet des deux autres parties du présent travail.
Chaque connexion augmentera fortement les effectifs à prendre en compte, le dynamisme
démographique, la diversité génétique et la probabilité de pérennité à long terme de
l’ensemble comme de chacune de ses composantes.
Deuxième partie
FAISABILITE DE L’OPERATION, POTENTIALITES LOCALES
La zone d’étude correspond aux quatre massifs qu’exploite à la belle saison la population de
Vautour fauve nichant des Baronnies aux confins du Diois et du Vercors. Outre ces massifs,
elle s’étend au Dévoluy, transition vers les Alpes internes. Le climat du Vercors, de type
Préalpes de nord frais et humide7, s’oppose au à celui de la majeure partie de la zone
d’étude, sous influences méditerranéennes marquées. L’étage méditerranéen proprement dit
est même bien représenté dans le massif le plus méridional, celui des Baronnies. La zone
d’étude offre les conditions les plus favorables à l’installation du Gypaète :
- géomorphologie : quelque 700 km de falaises, abondance d’éboulis, plus de 6000 km2
de massif calcaires, s’abaissant de l’est vers l’ouest (Dévoluy 2759 m) et du nord au
sud (Vercors 2341 m, Diois 2051, Baronnies (1545 m) ;
- source de cadavres : Bouquetin (environ cinq cents, en développement rapide. Encore
localisé), Chamois (cinq à six mille, dans les quatre massifs et à toutes altitudes) et
Mouton (plus de soixante mille, augmentée de transhumants en été).
D’autres espèces offrent des ressources alimentaires complémentaires dont l’ensemble
dépasse les effectifs du seul Mouton8. Bien que le Gypaète ait déjà fourni vingt-neuf
données, on ne l’a encore jamais observé sur les charniers à vautours, ce qui montre qu’il
trouve assez à se nourrir ailleurs.
A son extrémité nord-ouest, proche de l’agglomération grenobloise, la densité humaine est
inférieure à 10 hab./km2, dont la majeure partie est concentrée en quelques agglomérations.
La prospérité de l’Aigle royal (cinquante à soixante couples) et du Vautour fauve (en
augmentation rapide depuis sa réintroduction, cent vingt couples en 2009) la réintroduction
du Vautour moine (en cours, déjà quatre couples) et le retour spontané du Percnoptère
montrent que ni les activités humaines ni le taux de boisement (élevé) ne sont un obstacle à
la restauration actuelle des grands Rapaces rupestres et que les Vautours peuvent s’y nourrir.
- une optimisation stratégique si elle était réalisée en complément de la précédente. Élargir la zone prise en
compte aux autres grands sites rupestres du Massif Central, avec réintroduction du Chamois et du
Bouquetin, maximaliserait encore la viabilité d’une population locale de Gypaète ainsi que la probabilité de
transit entre elle et celles des deux chaînes encadrantes.
- une faute stratégique grave si l’opération était réalisée avant la précédente : risque élevé de constituer un
isolat démographique non viable ou même de gaspiller les oiseaux lâchés.
7
Sauf celui du sud-ouest du massif, analogue au climat du Diois.
8
Plus de quarante mille têtes des autres bétails et, approximativement, vingt mille autres Ongulés
sauvages (pour l’essentiel Sanglier et Chevreuil. Egalement Cerf : autour de 15%).
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Comme on l’a établi dans le Parc National du Mercantour, la présence du Vautour fauve
sera ici hautement favorable à l’adaptation à la liberté des juvéniles de gypaètes lâchés au
taquet.
Les potentialités actuelles sont estimées d’une douzaine à une vingtaine de couples. En
augmentation, elles pourraient, à long terme, atteindre jusqu’à une trentaine.
Troisième partie
REALISATION DE L’OPERATION
OU ? QUI ?
Si le Chamois et, en été, le Mouton sont largement répandus dans la zone d’étude,
actuellement seuls deux biotopes hébergent plusieurs centaines de Bouquetin Capra ibex, en
rapide développement démographique : les falaises orientales du Vercors et celles de la
bordure méridionale de ses hauts plateaux, aux confins du Diois.
Des trente données de Gypaète dans la zone d’étude 59% sont localisées à, au plus, huit
kilomètres des principales.populations actuelles de.bouquetins, 38% dans ces biotopes euxmêmes.
Pour maximaliser la probabilité d’installation des gypaètes lâchés c’est donc ici qu’ils
devront être mis au taquet.
Le second des deux biotopes, Glandasse et du cirque d’Archiane, ou ses très proches
environs doit être préféré au premier du fait de facteurs qui y sont, tous, plus favorables :
effectifs des bouquetins, chamois et, en estive, moutons, leur concentration spatiale, la
géomorphologie, la position géographique au sein de la zone d’étude, l’orientation,
l’exposition, la tranquillité.
Divers sites potentiels pour l’installation de taquet(s) ont été sélectionnés en fonction des
critères des spécialistes de la réintroduction du Gypaète dans les Alpes.
Mais le choix définitif se fera après expertise de terrain par eux.
CONCLUSION
Outre les retombées locales extrêmement positives, participer à la réintroduction du Gypaète
offre au Parc Naturel Régional du Vercors, dans le cadre de sa politique persévérante de
restauration de la biodiversité de son territoire, un rôle de premier plan à jouer, à la hauteur
d’une responsabilité aux échelles alpine et continentale.
Il n’y faut qu’intelligence stratégique et persistance de la volonté politique.
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FIGURES
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11
Figure 1. - Répartition et effectifs du Gypaète en Europe en 2006 (carte).
Figure 2. - Philopatrie du Gypaète Gypaetus barbatus dans les Alpes (carte).
25
Figure 3. - Gypaètes lâchés dans les Alpes + bilan 2009 de reproduction en captivité.
29
Figure 4. - Achèvement d’une réintroduction et développement d’une population.
33
Figure 5. –La priorité stratégique intra-alpine actuelle : Alpes lépontines (carte).
34
Figure 6. - La priorité stratégique inter-chaînes actuelle : Préalpes occidentales (carte).
36
Figure 7. – Recolonisation prévisible des Alpes occidentales par le Gypaète (carte).
37
Figure 8. - Conditions de transit Gypaète avec opérations en Vercors ET Causses (carte).
38
Figure 9. – Idem avec opération dans les Causses seuls (carte).
36
Figure 10. - Délimitation de la zone d’étude, à l’extrémité occidentale des Alpes (carte). 45
Figure 11. - Bouquetins Capra ibex dans le Vercors : croissance des effectifs
60
Figure 12. - Distribution spatiale des observations de Gypaète
et des populations de Bouquetin dans la zone d’étude.
84
Figure 13. – Distribution temporelle des observations de Gypaète dans la zone d’étude.
89
Figure 14. –Vercors et du nord du Diois : principales populations de Bouquetin (carte).
91
Figure 15 – Une des zones les plus favorables à l’installation d’un taquet (carte).
101
TABLEAUX
Tableau I. - Noyaux de population de Gypaète Gypaetus barbatus dans les Alpes : nombres
de couples en 2009 et d’oiseaux lâchés avant 2004.
26
Tableau II. - Comparaisons : distances entre les noyaux de population de Gypaète Gypaetus
barbatus des Alpes, la population des Pyrénées et les territoires des deux
projets d’opération, Préalpes occidentales ou Causses.
41
Tableau III. - Augmentation de la probabilité de franchissement de chaque hiatus du fait de
.nouveaux noyaux de population.
Tableau IV. - Taux de boisement.
56
Tableau V. - Cheptels domestiques non transhumant.
66
Tableau VI. - Temps de vol cumulé des juvéniles de Gypaète depuis le développement de
l’estivage du Vautour fauve Gyps fulvus au Mercantour.
70
Tableau VII. - Distribution spatiale des effectifs du Bouquetin Capra ibex entre les deux biotopes
…de l’est du Vercors à la fin de 2005.
92
Tableau VIII. - Application à trois des sites de la zone d’étude des critères de sélection
…d’emplacement de taquet de Heuret 1999.
98
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1. – Synécologie : Chamois et Bouquetin : très favorables au retour du Casseur d’os
2. - Géomorphologie très favorable : falaises calcaires et éboulis.
3. – Quelle que soit la géomorphologie…
4. - Sud de la zone d’étude : Baronnies, Saint May.
5. - Sud de la zone d’étude : Baronnies, gorges de Trente Pas.
6. - Sud de la zone d’étude : Baronnies,
7. - Centre de la zone d’étude : Diois, vue vers le nord sur le Vercors à l’arrière plan.
8. - Centre de la zone d’étude : Diois, vue vers l’ouest sur Couspeau et le massif de Saou.
9. - Centre ouest de la zone d’étude : Diois, bassin de la Roanne.
10. - Ouest de la zone d’étude : Diois.
11. - Centre de la zone d’étude, confins Vercors - Diois, vus de la vallée du Quint.
12. - Nord-ouest de la zone d’étude, bordure nord-ouest du Vercors.
13. - Nord-est de la zone d’étude, nord du Vercors, Montagne de Lans.
14. - Est de la zone d’étude, bordure orientale du Vercors, vue du nord - nord-est.
15. - Est de la zone d’étude.Vue sur le Dévoluy à partir du Vercors oriental. Mont Aiguille.
16. - Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy, du refuge de Rochassac.
17. - Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy, hauteurs du Riou froid, Lus-la-Croix-Haute.
18. - Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy. Petites Charances, Rougnou, Grand Ferrand
19a, b, – Curée à trois espèce de vautours en zone semi-boisée dans le Diois central.
19,c, d. – Curée à trois espèce de vautours en zone semi-boisée dans le Diois central.
20. - Gypaète et forêt dans la vallée du Rhône helvétique.
21. - Bouquetin Capra ibex dans la zone d’étude en début de rut, 26 octobre 2005.
22. - Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra dans la zone d’étude : en altitude.
23. - Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra dans la zone d’étude : moyenne montagne.
24. - Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra : basse montagne.
25. - Curée de vautours fauves Gyps fulvus sur cadavre de brebis à grande distance des charniers.
26. - Cerf bramant dans le sud de la zone d’étude, Baronnies.
27 . - Curée sur brebis en estive tuées par loups : vautours fauves G. fulvus et v. moines A. monachus.
28. - Chamois R. rupicapra installé à proximité de l’Homme.
29. - Le Bouquetin Capra ibex est présent aussi à basse altitude et près de l’Homme.
30. - Vautour fauve G. fulvus colonie nicheuse installée dans les falaises dominant Rémuzat.
31. – Gypaète aux confins du Vercors et du Diois : adret du col du Rousset 2008
32. – Gypaète aux confins du Vercors et du Diois : cirque d’Archiane 2009
33. – Aux confins du Vercors et du Diois : gypaète le plus âgé observé dans la zone d’étude
34.- Argentera le 12 février 1994 dans l’ouest de la zone d’étude lâché dans le P. N. du Mercantour.
35. – Ibidem Juvénile le 13 août 2009
36. - Biotope à Bouquetin Capra ibex des falaises orientales du Vercors.
37. – Biotope à Bouquetin Capra ibex des falaises méridionales des Hauts Plateaux du Vercors.
38. - Bouquetins mâles au cirque d’Archiane.
39. - Squelette de Bouquetin femelle nettoyé par les vautours, cirque d’Archiane.
40. - Troupeau de transhumants.
41. – Les charognes de transhumants in natura dans le PNRV sont déjà exploitées par les vautours.
42. - Carcasse nettoyée par d’autres charognards, prête pour le Casseur d’os.
43. - Le taquet du Parc National du Mercantour et son environnement.
44. - Falaise au fond du vallon de Pédane et restes de bouquetin.
45. – Site potentiel pour le taquet : Pédane et Tête du Jardin.
46. - Au Cirque d’Archiane autre site potentiel pour l’installation du taquet.
47. - Versant occidental du Glandasse.
48. - Le dessus du Glandasse vu de la pointe sud.
49. - Nord du versant ouest du Glandasse à sa jonction avec la bordure méridionale du Vercors.
50. - L’est de la bordure méridionale du Vercors un peu à l’ouest de sa jonction avec le Glandasse.
51. - Le sud des Hauts des Plateaux du Vercors : paysage typique et détail de petits sites escarpés.
52. - Le sud des Hauts Plateaux du Vercors : sites escarpés moins modestes.
53. - Bordure méridionale du Vercors : falaises du Quint.
54. - La Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors, vue aérienne.
55. - Toutes les conditions sont réunies pour retour du Gypaète dans la zone d’étude.
56. - Couple de Gypaète Gypaetus barbatus dans les Pyrénées espagnoles
16
46
46
47
48
49
50
50
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pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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INTRODUCTION
I. UNE CONTRIBUTION ELEVEE
A LA BIODIVERSITE
« Conservation et restauration de la situation du Gypaète constituent un objectif des
politiques européennes et nationales en faveur de la biodiversité. Il n’est pas superflu de
préciser que c’en est un objectif majeur, car la biodiversité ne se réduit pas au nombre
d’espèces : chacune ne lui apporte pas la même contribution. Il faut notamment prendre en
compte :
- l’originalité taxonomique : à l’échelle mondiale la disparition totale du Vautour fauve
serait la perte de 1/7 des espèces du genre Gyps. La disparition du Casseur d’os, elle,
correspondrait à 100% du genre Gypaetus ;
- l’originalité écologique : si un Vautour du genre Gyps disparaissait, le type écologique
« Grand rapace charognard mangeur des parties molles de moyens et grands
Mammifères » subsisterait à l’échelle mondiale. À long terme, il est très probable que
l’aire de l’espèce disparue soit colonisée par une ou plusieurs des autres espèces du
genre, vicariantes géographiques de l’espèce disparue. Mais, si le Gypaète disparaissait,
il n’y aurait plus au monde aucun grand Rapace mangeur d’os.» Choisy 2006. Pour
analyse plus détaillée de ces contributions fort inégales des diverses espèces à la biodiversité cf.
Choisy 2003.
C’est pourquoi la restauration des effectifs et de l’aire biogéographique du Gypaète
constitue un des objectifs majeurs des politiques européennes, nationales et locales
pour la conservation et la restauration de la biodiversité.
II. SITUATION ACTUELLE
A. – HORS D’EUROPE
Largement répandue initialement sur les reliefs paléarctiques jusque vers le 50° degré de
latitude nord, aux altitudes les plus diverses, la sous-espèce Gypaetus barbatus barbatus
a subi une régression générale du fait de l’Homme : extermination quasi-totale hors l’Asie
centrale, l’Himalaya et quelques populations relictuelles locales.
Dans le Paléarctique occidental (= autour de la Méditerranée) l’extermination totale
menace les rares derniers couples, sauf en Anatolie où les effectifs, en régression, semblent
encore importants, mais où la situation reste très mal connue. La situation de la sous-espèce
Gypaetus barbatus meridionalis qui habite les reliefs de l’est au sud de l’Afrique n’est pas
meilleure.
B. – EN EUROPE9
La situation du Gypaète reste globalement très préoccupante : extermination totale dans la
plupart de son aire, dans les Alpes elle a été achevée au plus tard en 1935, souvent plus
ancienne encore ailleurs. Elle est fort variable selon les contrées où subsiste l’espèce ou est
réintroduite.
9
Effectifs : M. Razin in litt., M. Terrasse comm. or., M. Zimmermann in litt., R. Zink in litt.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
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1. EXTERMINATION RECENTE, TOTALE OU PRESQUE
-
Péninsule et îles italiennes : extermination achevée en Sardaigne vers 1970 (Schenk in
Cramp et al.) ;
-
Péninsule ibérique au sud des Pyrénées : les derniers couples ont été éliminés par le
poison visant les Carnivores, en en Andalousie (Garzon 1977 in Cramp et al.) ;
-
Balkans : naguère hébergeant le second bastion de l’espèce en Europe, avec trente à
quarante couples en Grèce, peut-être cinquante (Bijleveld 1974 in Cramp et al.).
De nos jours, l’espèce a été éradiquée sur le continent : une vieille femelle esseulée
en Macédoine, de rarissimes autres observations ici ou là. En Crète, en 2006,
survivaient six couples, dont trois seulement se reproduisent... Cause de cet
effondrement : la généralisation de l’usage du poison contre Carnivores et Sanglier.
En Crète s’y ajoute la persistance d’un archaïsme : le tir pour taxidermisation…
2. SITUATION TRES FRAGILE : CORSE
Huit ou neuf couples autour du Mont Cinto, un trio à Bavella. Petite population, au mieux
stable, mais fragile : isolée et taux de reproduction faible, probablement faute de
disponibilités alimentaires.
Figure 1. – Répartition et effectifs du Gypaète en Europe en 2006.
Source : R. Zink, IBM.
3. RENAISSANCE SPECTACULAIRE : PYRENEES
Réduite à une quarantaine de couples il y a une trentaine d’année (Cramp et al.), cette population a
connu un spectaculaire renouveau du fait d’un remarquable effort de PROTECTION et d’une
amélioration des disponibilités alimentaires. En 2006, cent dix-huit couples certains,
probablement cent trente, répartis approximativement au pro rata des surfaces : un en Andorre,
vingt-cinq (vingt-sept ?) en France et quatre-vingt-douze (cent deux ?) en Espagne. En 2009
probablement cent quarante couples et au, total, autour de cinq cents individus.
4. REINTRODUCTION EN COURS
-
ANDALOUSIE : commencée en 2006, trop récente pour que des couples soient formés ;
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pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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-
ALPES : commencée en 198610 la réintroduction se poursuit. La chaîne héberge en
2009 au moins une centaine d’individus (probablement cent vingt) avec dix-sept
couples territoriaux dont onze reproducteurs. Le nombre d’individus immatures permet
d’espérer une prochaine augmentation du nombre de couples et des reproductions
réussies.
III. METHODE DE LACHER
Des jeunes nés en captivité achèvent leur croissance dans une aire artificielle en falaise, dite
« taquet », d’où ils s’envolent spontanément. Leurs contacts avec les humains se réduisent à
leur marquage, leur baguage, éventuellement leur équipement pour suivi par satellite et
l’installation sur le taquet.
L’effectif disponible chaque année étant très réduit, une réintroduction locale s’étale donc
sur de nombreuses années. Cet étalement dans le temps d’effectifs annuels réduits constitue
une contrainte démographique forte. Toutefois, pour le Gypaète, dont les adultes sont
territoriaux, il ne constitue pas une contre-indication éthologique majeure, comme il le serait
pour une espèce aussi grégaire que le Vautour fauve.
IV. LE PRESENT TRAVAIL
A. – ORIGINE
Des spécialistes en visite de travail relative aux autres Vautours dans les Préalpes
occidentales ont été frappés par l’adéquation de certains grands sites aux exigences écoéthologiques du Gypaète, notamment aux confins orientaux du Vercors et du Diois.
La qualité et l’étendue des biotopes permettaient donc un pronostic favorable à opération
locale de réintroduction, dont le succès semble assuré.
Toutefois, si l’observation naturaliste reste la source irremplaçable de données, la décision
de réaliser l’opération doit nécessairement se fonder sur une approche plus étayée qu’une
impression globale, même émise par les meilleurs connaisseurs de l’espèce.
La FOUNDATION FOR THE CONSERVATION OF THE BEARDED VULTURE (FCBV) a donc
demandé au Parc Naturel Régional du Vercors de réaliser une étude de faisabilité, demande
à laquelle ce présent travail répond, scientifiquement et techniquement.
B. - REFERENCES
Parmi l’abondante bibliographie consacrée au Casseur d’os, quelques publications ont été
des outils intellectuels majeurs :
Le Gypaète barbu, Terrasse J.-F. (2001) : pour les aspects les plus divers de la biologie ;
Ecological requirements of reintroduced species and the implications for release policy:
the case of the bearded vulture, Hirzel, Posse, Oggier, Crettenand, Glenz & Arlettaz (2004)
pour les facteurs écologiques ;
Effect of human activities on bearded vulture behaviour and breeding success in the French
Pyrenees, Arroyo & Razin (2006) ;
When to end releases in reintroduction programmes : demographic rates and population
viability analysis of bearded vultures in the Alps. Schaub, Zink, Beissmann, Sarrazin. &
Arlettaz (2009) pour la démographie.
10
Après une première tentative dans les années 1970 (cf. infra in CONCLUSION).
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Opérations et stratégie de reintroduction. Exemple du Gypaete Gypaetus barbatus en
Europe, référencé en Choisy*, à paraître prochainement, a fourni la matière d’une totale
refonte de l’Introduction et de la Première partie du présent document de travail.
C. - A QUI S’ADRESSE-T-IL ?
Quiconque s’intéresse au Casseur d’os pourra trouver quelques profits à la lecture des pages
qui suivent. Toutefois ce travail a été rédigé d’abord pour deux catégories de lecteurs :
- les spécialistes de l’espèce et de sa réintroduction : la FCBV et ses collaborateurs
nationaux ou locaux : scientifiques comme associations, telles que LPO et ASTERS pour
la France, etc.
- les décideurs politiques et administratifs concernés par la réalisation : Parc Naturel
Régional du Vercors, Ministère de l’Environnement, sa Direction régionale, Conseils
Généraux, Région Rhône-Alpes, etc. ainsi que leurs partenaires associatifs concernés,
notamment LPO, CORA, Vautours-en-Baronnies.
Le lecteur pour qui telle ou telle analyse ou précision serait superflue devra donc
garder à l’esprit qu’elle est sans doute nécessaire à d’autres.
D. – CONTENU
Première partie
Localement, bien d’autres massifs méritent autant que la zone d’étude qu’on leur attribue les
rares gypaètes disponibles. Il était donc nécessaire de mettre en évidence la pertinence
stratégique singulière de la création d’un noyau de population à l’extrême ouest des
Alpes, dans le cadre de la stratégie de restauration de la situation de l’espèce dans la chaîne
et même en Europe de l’Ouest. Celle d’un complément dans le sud du Massif Central est
aussi analysée.
Deuxième partie
C’est l’étude de faisabilité sensu stricto de l’opération de réintroduction qui vise à créer un
noyau de population dans l’ensemble Vercors, Diois, Baronnies, Dévoluy.
Troisième partie
Le niveau tactique, celui de la réalisation concrète, n’a été traité que très partiellement, pour
montrer l’existence de sites favorables à l’installation d’un point de lâcher et un contexte
humain très favorable : moyens, volonté politique, réintroductions précédentes, espaces
protégés et leurs personnels, opinion publique locale, etc. Mais le passage à l’acte nécessite
aussi un volet administratif et financier, ainsi que l’organisation de l’information, de la
concertation avec les responsables politiques et administratifs concernés comme avec les
usagers du milieu naturel et leurs représentants associatifs. Ils n’ont pas été traités ici car ils
sont hors du champ de compétence propre du biologiste et naturaliste. En outre, lors de la
première version de ce travail, avant que la faisabilité biologique et la pertinence stratégique
de l’opération ait été reconnues, c’eût été prématuré.
V. CONCEPTS ET TERMINOLOGIE
A. - LACHER
Le terme général « lâcher » sera employé ici dans le sens particulier de « lâcher par mise au
taquet ». Abréviation sans ambiguïté dans le présent travail.
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B. – REINTRODUIRE UNE ESPECE, LACHER DES INDIVIDUS
On réintroduit une espèce, mais non pas des individus, lesquels sont lâchés.
Une population, elle, sera dite « issue de lâchers », ou « issue d’une (opération de)
réintroduction ». C’est s’exprimer de manière à la fois formellement inélégante et, pire,
factuellement fausse, que de parler d’individus11 réintroduits. Elle reste trop courante…
C. – RETOMBEES
Il serait irréaliste de négliger, le succès d’une opération de réintroduction, de la perception
du retour des Vautours en général, du Gypaète en particulier, par les locaux et autres usagers
de la nature, même par ceux les moins motivés par la nature et la biodiversité :
s
-
l’intérêt touristique du retour de espèces spectaculaires est très bien perçu par les
professionnels du tourisme rural ;
-
le service d’équarrissage naturel (service rendu aux éleveurs), surtout par le Vautour
fauve, l’est au moindre coût pour la collectivité et au bénéfice de l’environnement
(réduction des émissions de CO2 et autres polluants atmosphériques12). Dans la zone
d’étude, les vautours épargnent déjà le transport à plus de deux cents kilomètres d’au
moins trois mille cadavres de bétail par an.
Un projet de réintroduction des Vautours de toutes espèces pourrait donc aussi avoir sa place
parmi les objectifs de politiques locales ou régionales agricoles, de tourisme de nature,
d’économie d’énergie et de réduction des pollutions, notamment de gaz à effet de serre.
Mais pour qu’il s’agisse d’objectifs, il faudrait que les organismes responsables de ces
politiques apportent à la réalisation d’un projet une contribution significative, notamment
financière, au minimum un soutien politique ferme et constant. Il ne semble pas que cela ait
jamais été le cas.
Donc, pour ces deux secteurs d’activités, il s’agit donc de simples retombées, profitables,
certes mais non pas d’objectifs, assumés en tant que tels. Dans le cas du présent projet,
comme des réintroductions en général (Choisy 2004 a, in ANNEXE II) cette distinction est
un impératif intellectuel, à la fois éthique mais aussi pratique : pour une clarté maximale,
pour minimiser tout risque d’amalgame, source de malentendus.
D. - HIERARCHIE ET ECHELLE D’ANALYSE ET D’ACTION
« Opération, stratégie, etc. » sont des termes, plus couramment utilisés que ne sont
réellement compris, et surtout distingués, les concepts qu’ils désignent13. Distincts par leurs
11
Et de populations réintroduites dès que sont présents d’autres individus que ceux qui ont été lâchés :
naissance en liberté, installation de visiteurs spontanément immigrés.
12
Dans la Drôme (PNR du Vercors + Vautours-en-Baronnies) les charniers épargnent le transport à
plus de 200 km de quelque trois mille cadavres de bétail chaque année, sans compter ceux consommés en
alpage.
13
La distinction des niveaux politique, stratégique, opérationnel, tactique, leur hiérarchisation
fonctionnelle, pratiquée empiriquement depuis l’Antiquité, n’a commencé à être clairement pensée et exprimée
qu’à partir du XVIII° siècle. Au fil des générations, la réflexion sur les concepts s’est approfondie, les termes
ont été définis avec précision, le domaine d’application s’est généralisé bien au-delà de celui d’origine,
politico-militaire.
Pour l’analyse précédant la prise de décisions, puis l’organisation de projets, enfin leur réalisation, la
poursuite d’objectifs propres à chacun des niveaux, c’est l’outil intellectuel adéquat, efficace et nécessaire s’il
n’était trop souvent mal compris, y compris par une large fraction de ceux-là mêmes dont la fonction exigerait
qu’ils le maîtrisassent. Une fréquente familiarité avec ses termes, donnant aux locuteurs et auditeurs une
illusion de claire compréhension, ajoute souvent à la confusion, donc à l’inefficacité. D’où les présentes
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échelles d’espace et de temps comme par leurs niveaux hiérarchiques fonctionnels, ils sont
trop souvent confondus ce qui est fort préjudiciable au travail intellectuel comme à l’action,
une source de malentendus pouvant induire des conflits. Il n’est donc pas superflu de les
définir et expliciter. On l’a fait en usant d’exemples concernant l’objet du présent travail.
1. NIVEAU TACTIQUE (Partiellement traité dans la troisième partie)
C’est celui de la réalisation concrète. Elle repose sur la mise en œuvre de techniques,
administratives, de financement, de communication, de baguage, marquage, transport,
installation au taquet, nourrissage des jeunes gypaètes, de suivi avant et après envol, etc.
Décisive pour le succès d’une réintroduction, la prise en compte du contexte humain se situe
également à ce niveau tactique. Dans le cadre d’une politique de restauration de la
biodiversité, c’est en termes de contraintes et/ou ressources éventuelles qu’on doit
l’analyser.
Aussi nécessaires et, éventuellement, élaborées que soient les techniques mises en œuvre à
ce niveau, elles ne sont que des moyens : atteindre un objectif tactique n’a d’importance
que dans la mesure où il contribue à la poursuite de l’objectif opérationnel, ici fonder un
noyau de population. Une étude de faisabilité n’est pas le lieu de détailler les modalités
techniques de mise en œuvre de ces moyens. On s’est donc borné à évoquer l’existence de
ces derniers, ainsi que l’existence de sites favorables à l’installation de taquet, faute de
l’opération aurait été impossible et l’étude de faisabilité sans objet.
2. NIVEAU OPERATIONEL
Ce niveau, de l’unité élémentaire de la stratégie de réintroduction, est celui de l’échelle
de faisabilité proprement dite, fondée sur l’analyse des facteurs écologiques et des
facteurs humains : occupation de l’espace, activités, perception de l’espèce concernée, etc.
Objectif opérationnel : de nature démographique = fonder un noyau de population,
pérenne à l’échelle de temps de la décennie après achèvement de l’opération.
Échelle spatiale : locale. Ce dernier terme doit s’entendre en fonction des rapports avec
l’espace de l’espèce considérée : domaines vitaux, processus de recolonisation spontanée,
etc. L’espace pris en compte est le grand biotope où les animaux sont lâchés, pour le
Gypaète au moins un grand massif, ici plusieurs, quelques-uns, contigus : quelques milliers
de kilomètres carrés.
3. NIVEAU STRATEGIQUE
Toute nouvelle opération de réintroduction réussie constitue ipso facto une contribution à la
restauration démographique d’une espèce. Mais à effectifs lâchés identiques les effets de
restauration peuvent fortement varier en fonction de la pertinence de la stratégie adoptée.
Or les moyens disponibles pour la restauration la situation d’une espèce sont globalement
presque toujours beaucoup plus limités que ce qui serait souhaitable. On doit donc
maximaliser l’efficacité de la contribution de chacune des opérations locales à la stratégie
globale. Sur quels critères réintroduire maintenant ici plutôt que dans un autre des
territoires de potentialités démographiques locales et probabilités de réussite
analogues ? Toutes autres choses étant analogues par ailleurs une stratégie de
réintroduction c’est donc d’abord la distribution dans l’espace des diverses opérations
locales, éventuellement la modulation dans le temps de leur réalisation et/ou leur
succession en fonction de contraintes majeures amenant à surseoir, parfois longtemps, à la
réalisation d’opération(s) sinon prioritaire(s).
précisions des concepts et de la terminologie : pour ne pas renoncer à l’outil tout en tâchant d’en prévenir un
usage fautif.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
20/197
Objectif stratégique : maximaliser l’efficacité de la reconstitution plus ou moins
partielle de l’aire potentielle naturelle et celle de la restauration démographique à
l’échelle d’une vaste aire biogéographique, maximaliser la probabilité de pérennité de
la population à long terme.
Échelle spatiale: de régionale à continentale.
Dans le cas du Casseur d’os la faiblesse des effectifs disponibles pour des lâchers14 et le coût
des oiseaux15 réduisent à très peu le nombre d’opérations réalisables simultanément dans les
Alpes et même dans toute l’Europe. L’exigence éthique, pratique et financière, d’efficacité
stratégique de chaque opération en est d’autant plus impérieuse.
Compte tenu de la situation actuelle Gypaète en Europe et des contextes humains locaux,
c’est leur situation géographique qui rend les massifs les plus occidentaux des Préalpes
actuellement prioritaires dans la stratégie de réintroduction de l’espèce, à DEUX ECHELLES :
-
: la réussite de l’opération sera particulièrement favorable à la
recolonisation de l’ensemble des Alpes occidentales ;
- INTERCHAINEs : la réussite de l’opération maximalisera la probabilité d’établissement
d’un flux d’individus entre les populations des Alpes et des Pyrénées.
INTRACHAINE
4. NIVEAU POLITIQUE (Non développé mais rappel nécessaire)
Le terme doit s’entendre latu senso : une association, elle aussi, peut avoir une politique.
Par leur nature même, les objectifs de la réintroduction du Gypaète se situent
A LA CONVERGENCE
DE LA BIODIVERSITE
DE
POLITIQUES
DE
CONSERVATION
ET
RESTAURATION
à deux échelles :
- continentale, au bénéfice du Gypaète sous l’égide de la FCBV ;
- locale, concernant la faune et la flore dans leur ensemble, tout particulièrement dans le
PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS. Ceci indirectement par la gestion des biotopes,
directement pour une minorité d’espèces, réintroduites ou non, dont déjà trois Vautours.
Pour la place du renouveau du Gypaète et des autres Vautours dans les politiques de
tourisme de nature, agricoles (équarrissage naturel) et d’environnement cf supra § 3. –
RETOMBEES.
5.
NIVEAU DES VALEURS (Non développé mais rappel nécessaire)
Pour être efficace stratégiquement une politique en faveur de la biodiversité doit
nécessairement tenir compte des connaissances scientifiques disponibles. Elle ne doit pas se
laisser déborder par l’activisme stratégique ou opérationnel de techniciens ou/et militants,
pleins de zèle pour fonder une population sans se soucier de pertinence biogéographique :
les consternantes introductions volontaires d’espèces exotiques, telle que celle du Mouflon
dans la zone d’étude, doivent désormais être prohibées. Toutefois, ni les connaissances
scientifiques ni le savoir faire technique ne sauraient fournir une motivation.
Une politique en faveur de la biodiversité n’exige nullement des convictions identiques de
tous ceux qui la promeuvent et/ou la mettent en oeuvre : il suffit qu’elles soient relativement
compatibles. La restauration de la situation des vautours en Europe peut rallier aussi bien
ceux qui ne résignent pas à ce que l’action d’Homo sapiens sur la grande faune se réduise à
l’extermination de celle-ci que ceux qui en espèrent des retombées pour le tourisme de
14
Contrairement à la réintroduction du Vautour fauve Gyps fulvus qui, elle, bénéficie de l’énorme
réservoir des quelque vingt mille couples d’Espagne.
15
Produits en captivité.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
21/197
nature et/ou leur contribution à un équarrissage naturel donc à la qualité de l’environnement.
Sans que ce soit ici le lieu de développer davantage, il convenait néanmoins que de rappeler
que toute politique repose, au moins implicitement, sur des valeurs16, au sens philosophique
du terme. Le méconnaître sous prétexte d’objectivité scientifique ou de sérieux technique est
une confusion des niveaux d’analyse, de décision, d’action, dans une carence de pensée
politique proprement dite. D’où une trop fréquente prédominance quasi-exclusive des
préoccupations tactiques : faute d’une hauteur de réflexion sur les fins, les moyens
usurpent le niveau de celles-ci. Dérive trop fréquente…
AVANT-PROPOS : CRITERES A PRENDRE EN
COMPTE POUR LA REINTRODUCTION DU
GYPAETE
C’est un préalable nécessaire d’examiner dans quelle mesure le projet dans les Préalpes
occidentales satisfait aux critères dont Jean-François Terrasse dresse la liste dans une page
de son ouvrage de référence sur le Casseur d’os
ENQUETE SUR LA PRESENCE PASSEE DE L’ESPECE
La question est celle de la pertinence biogéographique de la stratégie dans laquelle se situe
l’opération. La zone d’étude étant une partie des Alpes, la réponse, positive, a déjà été
apportée ipso facto, quoique à une toute autre échelle : celle de l’ensemble de la chaîne, et ce
dès les premiers projets de réintroduction. La première partie évoque également la
pertinence biogéographique du projet dans le Massif Central.
ÉTUDE DES POTENTIALITES DU MILIEU
Les potentialités, élevées, avaient déjà été perçues lors des visites informelles de spécialistes
de l’espèce, notamment Michel Terrasse. Le présent travail les a mises en évidence et
quantifiées sur une base documentée, analytique et statistique. Ernesto Alvarez et Mario
Alvarez-Keller spécialistes des Vautours, visitant le cirque d’Archiane à la fin de 2008, ont
souligné sa similitude écologique avec le meilleur site à Gypaète du versant espagnol des
Pyrénées, chaîne qui héberge la principale population actuelle d’Europe.
Son analyse détaillée est l’objet de la deuxième partie.
GARANTIES RELATIVES A LA GESTION DU TERRITOIRE CONSIDERE
À l’échelle de l’ensemble des 6000 km2 de la zone d’étude :
- certes, il ne saurait être question d’envisager un statut spécial couvrant son ensemble ;
- mais, outre la réglementation générale, l’une des meilleures garanties est la faible densité
humaine : globalement < 10 hab./ km2, beaucoup moins dans la plus grande partie de la
zone d’étude, quelques agglomérations concentrant une grande partie de la population ;
- enfin la réintroduction réussie du Vautour fauve, celle en cours du Vautour moine,
le retour spontané du Percnoptère sont des indicateurs biologiques d’une situation
globalement favorable au retour des grands charognards.
16
Les politiques les plus inhumaines elles-mêmes ne peuvent se passer de ce fondement. Que les
valeurs sur lesquelles elles reposent soient des plus contestables est un tout autre problème.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
22/197
Localement, des garanties réglementaires et des moyens de gestion suffisants sont offerts
par divers espaces bénéficiant de statuts de protections particuliers. Au Parc Naturel
Régional du Vercors, soit un quart de la zone d’étude et, en son sein, la Réserve Naturelle
des Hauts Plateaux du Vercors, prolongée dans le cirque d’Archiane par une Réserve
Biologique Forestière ; il faut ajouter des ZNIEFF, des zones NATURA 2000, des sites
classés. Dans le sud de la zone d’étude, le projet de Parc Naturel Régional des Baronnies
progresse. Sauf ce dernier, ces points sont développés dans le dernier chapitre de la
troisième partie.
DISPONIBILITE EN INDIVIDUS DE L’ESPECE EN VUE DE SA REINTRODUCTION
Du fait du développement considérable de la reproduction en captivité et de l’achèvement,
objectif atteint, de l’opération en Haute-Savoie, des gypaètes seront disponibles
prochainement cf. infra in Première partie.
SUIVI DE LA POPULATION REINTRODUITE
Depuis 1989, sept années ont vu des lâchers de Bouquetin ou de Vautour fauve par le Parc
Naturel Régional du Vercors, chaque fois avec un suivi intense pendant les mois
d’adaptation à la liberté ou/et d’installation, avec des techniques d’identification
individuelles, visuelles et hertziennes.
Animé par le Parc Naturel Régional du Vercors, un réseau de collecte et rediffusion de
données relatives au suivi du Vautour fauve, du Vautour moine et du Percnoptère, est déjà
opérationnel dans la zone d’étude mais aussi bien au-delà de ses limites. Il a aussi fourni des
observations de Gypaète. Outre son efficacité, son existence démontre la volonté du Parc
Naturel Régional du Vercors de poursuivre les suivis après réintroduction bien au-delà dans
le temps17 de préoccupations médiatiques à court terme.
Réalisation et suivi devraient faire l’objet d’un protocole entre le PNRV et ASTERS, inspiré
de celui de l’opération dans le Parc National du Mercantour.
Informations complémentaires dans la troisième partie.
ACTION DE SENSIBILISATION ET D’INFORMATION
Le Parc Naturel Régional du Vercors, lors des réintroductions du Bouquetin et du Vautour
fauve, a acquis une solide expérience en la matière. Il peut, en outre, s’appuyer sur un
Centre Permanent d'Initiatives pour l'Environnement (CPIE), notamment auprès des
scolaires.
VALIDATION
La présente étude sera soumise aux autorités compétentes et aux spécialistes de l’espèce, et
d’abord à la Fondation pour la Conservation du Gypaète, dont une demande au Parc Naturel
Régional du Vercors est à l’origine du présent travail.
Depuis sa première rédaction, des présentations orales étayées d’extraits ont déjà recueilli
l’adhésion de la Fondation à la haute pertinence du projet dans la stratégie de réintroduction
de l’espèce.
+
+
+
+
17
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
23/197
PREMIERE PARTIE : LA REINTRODUCTION DU
GYPAETE Gypaetus barbatus A L’EXTREME
OUEST DES ALPES ET DANS LE SUD DU MASSIF
CENTRAL DANS LES STRATEGIES DE
CONSERVATION ET RESTAURATION EN EUROPE
La pensée stratégique combine des actions variées pour atteindre un objectif global…
S’élever à la stratégie, c’est faire un acte de foi dans la rationalité et l’intelligibilité de
l’action et de l’histoire…
Il est bien possible que notre temps se caractérise par…une virtuosité tactique,
diversifiée et accélérée par le progrès des sciences et des techniques, et une pensée
stratégique, souvent dépourvue d’une originalité et d’une richesse égale...
Saint-Sernin in Encyclopedia Universalis
Le lecteur qui souhaite une information détaillée sur l’opération elle-même mais non pas sur
son contexte stratégique, alpin et européen, trouvera dans le Résumé un exposé
suffisamment développé à ce niveau pour, ici, passer directement à la deuxième partie.
La nécessaire actualisation de stratégie de réintroduction a été abordée lors du séminaire
annuel de la FCBV en 2009 à Bormio. L’urgence d’achever la présente refonte n’a pas
permis d’atteindre ici la concision souhaitable. Ce sera le cas dans un article (Choisy*) qui
sera prochainement publié, qui bénéficiera aussi d’une amélioration des calculs, au moins
dans leur présentation.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
24/197
I. ALPES ET MASSIFS CONNEXES DANS LES
STRATEGIES DE RESTAURATION DU GYPAETE
ET AUTRES VAUTOURS
A. - PRIORITES SPATIALES
Qu’elle soit de nos jours atteinte ou que l’Homme l’ait artificiellement ramenée bien plus au
sud, la limite de nidification des Vautours de toutes espèces en Eurasie passe
approximativement par le 50° de latitude nord, soit la latitude du Luxembourg. Au-delà,
quand commence la reproduction, dès la fin de l’automne et en hiver, commence la
reproduction les journées sont trop brèves18. En Europe, cette limite climatique est corrélée
avec une disparition des sites rupestres nécessaires à la nidification de toutes les espèces
autres que le Vautour moine. Les vastes contrées plus au nord ne sont donc pour les
Vautours qu’une région d’erratisme occasionnel, tout au plus d’estivage potentiel de non
nicheurs dans sa partie méridionale. Plus au sud, l’aire de nidification est subdivisée par la
géographie en quatre régions.
1. REGION SUD-EST ou BALKANIQUE
Le poison a, dans un passé récent, réduit le second bastion à vautours du continent à de
pauvres restes : une vingtaine de couples de Vautour moine et quatre cents couples de
Vautour fauve Gyps fulvus, localisés dans quelques espaces protégés. Cent à cent-vingt
couples de Percnoptère. Neophron percnopterus. Quant au Gypaète Gypaetus barbatus ne
survivent plus que quelques couples en Crète et, sur le continent, de très rares oiseaux isolés.
2. REGION SUD ou THYRENIENNE = Corse + Italie insulaire et péninsulaire
Globalement, situation encore pire et depuis bien plus longtemps, sauf pour le Gypaète : une
petite dizaine de couples, en Corse. Le Vautour moine a été entièrement exterminé.
Quelques couples de Percnoptère survivent dans le sud de la péninsule Italienne. En
Sardaigne, le Vautour fauve fluctue en fonction des épisodes d’empoisonnement autour de
vingt-cinq couples, soit à 2% des effectifs de la première moitié du XX° siècle. Quelques
points positifs : réintroduction du Vautour fauve, réussie dans les Abruzzes (environ trentecinq couples), amorcée dans le sud de la Péninsule et en Sicile, renforcement de la
population relictuelle de Percnoptère amorcée par lâcher.
3. REGION SUD-OUEST ou PYRENEO-IBERIQUE, plus brièvement, IBERIQUE S. L.
= sensu lato = Pyrénées françaises incluses.
Autour de vingt mille couples de Vautour fauve, environ quinze cent de Vautour moine,
autant de Percnoptère et cent quarante de Gypaète, ce dernier ne nichant plus actuellement
que dans les Pyrénées. Modestes dans l’absolu, ces derniers effectifs ont une grande valeur
relative :
- dans l’espace : de nos jours la plus importante population d’Europe ;
18
Donc incompatibles avec les longues prospections alimentaires et ce d’autant plus qu’alors les rares
heures de jours sont loin d’offrir toutes des conditions aérologiques favorables, particulièrement dans les
contrées sans reliefs marqués. Le froid, lui, n’est pas déterminant : les grands vautours nichent en aussi en
altitude.
Le Percnoptère Neophron percnopterus, migrateur, échappe à cette contrainte forte. Mais
sous les hautes latitudes, la belle saison est trop brève pour la reproduction de cette espèce surtout tropicale. En
outre, cette espèce est essentiellement un suiveur de grands vautours, dont il consomme les restes.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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25/197
- dans le temps : naguère réduite à environ une quarantaine de couple, cette population
bénéficie, grâce à des efforts franco-espagnols intenses, déjà anciens, toujours poursuivis,
d’un renouveau spectaculaire, loin d’être achevé.
Le suivi par satellite de la réintroduction en cours en Andalousie montre des mouvements
d’immatures dans toute la péninsule (Ruiz et al. séminaire FCBV 2009, Bormio).
Illégal, le regain d’usage du poison, quoique préoccupant, n’est pas encore tel qu’il ait inclus
un déclin de trois grandes espèces de Vautours. Celui du Percnoptère lui est-il attribuable ?
PAR L’HISTOIRE : LE BASTION DEMOGRAPHIQUE ACTUEL de toute espèce de Vautours en
Europe, donc LA PRIORITE STRATEGIQUE DE CONSERVATION.
4. REGION CENTRALE ou ALPINE ou, plus brièvement, ALPINE S.L.
Casseur d’os Gypaetus barbatus : dix-sept couples dans les Alpes, massifs internes surtout.
Vautour moine Aegypius monachus : vingt-et-un à vingt-quatre couples, tous en France,
dont quatre dans les Préalpes (réintroduction en cours), les autres dans les Causses, Massif Central,
(réintroduction achevée).
Percnoptère Neophron percnopterus : près de vingt couples, tous en France.
Lente restauration à partir de la population méditerranéenne naguère seule survivante.
Actuellement 50% en Provence, la distribution des autres couples, périphériques, fluctuant
quelque peu : 15-20 % dans les Préalpes, 10 à 20 % dans le Massif Central (Causses et Ardèche),
12 à 15 % en Languedoc.
Vautour fauve Gyps fulvus : quatre cent quinze couples environ, dont 4,8% en Italie,
Préalpes orientales (restauration commencée) et 95,2% en France19 (beaucoup plus avancée).
UNE POSITION-CLE PAR LA GEOGRAPHIE
Pour le transit des vautours en Europe, les échanges démographiques et génétiques entre
leurs populations actuelles ou à restaurer, la géographie donne à la région alpine et périalpine un rôle-clé : relier les trois grandes péninsules méridionales, d’où une
PRIORITE STRATEGIQUE DE REINTRODUCTION. De l’Espagne aux Alpes occidentales via le
Massif Central cette fonction a déjà été restaurée par des réintroductions, d’abord pour le
Vautour fauve Gyps fulvus, massivement, puis, indirectement, pour le Percnoptère Neophron
percnopterus20, enfin, processus amorcé, pour le Vautour moine Aegypius monachus.
Des Alpes occidentales aux Alpes orientales, et de là, aux Balkans, la restauration du
transit du Vautour fauve est amorcée entre les populations issues des réintroductions en
France et en Italie (Frioul). Le Vautour moine commence à suivre, au moins jusqu’aux
Alpes orientales.
Pour le Gypaète cette fonction de transit, potentielle, reste à restaurer cf. supra figure 1.
B. – PRIORITE TEMPORELLE
Des quatre régions où peuvent nicher des Vautours en Europe
LA REGION ALPINE ET PERIALPINE EST ACTUELLEMENT LA SEULE REGION OU NE SOIENT PAS LARGEMENT REPANDUES
DES MENACES GRAVES METTANT EN DANGER LA SURVIE DE GYPAETES LACHES.
Or, ne pas gaspiller des gypaètes rares et chers est une exigence stratégique, éthique et
financière.
19
Se distribuant entre Préalpes occidentales : 37,5% et Causses (Massif Central) : 57,7%.
20
Dans les quatre massifs de France où le Vautour fauve a été réintroduit, sa présence a induit le retour
spontané du Percnoptère.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
26/197
Des menaces graves doivent faire ajourner des opérations sinon géographiquement
prioritaires.
La plus générale est le poison qui, dans un passé récent a éliminé le Gypaète des Balkans et
d’Andalousie.
C’est le poison qui, en 2008, peu après leur envol, a tué les trois individus lâchés en
Sardaigne, entraînant la cessation de l’opération à peine commencée.
TEST DU VAUTOUR FAUVE GYPS FULVUS
Au sud et l’est des Alpes on n’entreprendra aucune opération de réintroduction Gypaète
Gypaetus barbatus, Percnoptère Neophron percnopterus ou Vautour moine Aegypius
monachus avant que la restauration locale d’une population de Vautour fauve produisant au
moins une trentaine de jeunes par an, ait prouvé que le poison n’est plus un facteur limitant
majeur. Ceci avec réintroduction si l’espèce est actuellement absente.
Le nord des Alpes aurait, sans doute, été hors de l’optimum climatique du Vautour fauve.
Mais le problème est désormais sans objet, au moins dans les Alpes occidentales. Plus au
sud, dans la partie de l’aire de l’espèce encore à restaurer entre Alpes et Sahara le test du
Vautour fauve est, à la fois partout, nécessaire et partout possible :
-
les biotopes écologiquement favorables au Gypaète le sont aussi au Vautour fauve,
quelqu’y en soit la situation actuelle de ce dernier;
-
l’énorme réservoir espagnol de Vautour fauve21 permet de tester le risque de poison
avec cette espèce, au contraire des trois autres.
En outre, comme on verra plus loin, la présence de vautours fauves facilite l’adaptation à la
liberté des gypaètes lâchés (Coirié).
Même si d’autres destructions par l’Homme, tir par exemple, peuvent avoir des effets
ravageurs, éliminer ou ramener à un niveau très faible, démographiquement supportable, est
un préalable indispensable à tout lâcher de Gypaète.
II. DEUX STRATEGIES COMPLEMENTAIRES
A. - CONSERVATION ET RENOUVEAU
Augmentation des effectifs d’une population relictuelle et comportement territorial suffisent
à induire la reconquête territoriale d’une vaste région. Comme celle de toutes les espèces
vivant longtemps, la pérennité des populations de Gypaète est extrêmement sensible à
toute atteinte au taux de survie annuelle, alors qu’elle dépend beaucoup moins du taux de
recrutement (Schaub et al. ; Lebreton & Clobert in Schaub et al.). La stratégie consiste donc
d’abord à lutter contre la mortalité induite par l’Homme ou la prévenir, qu’il s’agisse de
tir, poison, piège, câbles aériens, disette, ou autre. Quoique seconde, la prévention des
perturbations, sur les sites de nidification (Arroyo & Razin 2006), reste néanmoins une
priorité stratégique. La restauration de disponibilité alimentaire a une action positive sur les
taux de survie et de reproduction.
Dans les Pyrénées, une stratégie de conservation a suffi à assurer un renouveau lent mais
21
A l’est et au sud de son aire biogéographique, l’espèce vicariante locale du genre Gyps jouera le
même rôle de test, sauf si elle est elle-même même en danger.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
27/197
continu. En Corse, elle n’a réussi plus qu’à contrer la poursuite du déclin de la population
relictuelle, sans que la réintroduction paraisse la stratégie pertinente. Dans les Balkans, il est
trop tard pour s’en passer (quelques couples) et trop tôt (poison) pour y avoir recours.
Cette stratégie ne serait pas davantage développée ici. Soulignons cependant qu’elle partout
nécessaire, y compris dans les populations issues de réintroduction.
B. – REINTRODUCTION
Lorsqu’une opération est achevée avec succès, le développement du noyau de population
fondée relève du paragraphe ci-dessus. La stratégie se poursuit avec d’autres opérations dans
la même grande région, Alpes et alentours par exemple.
C. – COMPLEMENT SYNECOLOGIQUE AUX DEUX STRATEGIES
En Suisse (Hirzel et al.) on a montré statistiquement que Chamois et Bouquetin étaient les
Ongulés les plus favorables au retour du Casseur d’os : présence tout l’année, contrairement
au bétail, habitats beaucoup plus rupestres que les autres espèces sauvages, maximalisant la
probabilité de détection de cadavres. Observé en France mais sans étude aussi poussée.
Photo 1. – Synécologie : renouveau du
Chamois R. rupicapra et
réintroduction du Bouquetin Capra ibex
dans le Parc Naturel Régional du Vercors :
deux facteurs très favorables au retour
du Casseur d’os Gypaetus barbatus
Photo : P. Masset
III. ETAT ACTUEL DE LA REINTRODUCTION DANS
LES ALPES
A. – FAUT-IL CONTINUER A LACHER ?
Pour la première fois on dispose, en 2009, d’un modèle démographique fondé sur les
données de terrain du Gypaète dans les Alpes : Schaub, Zink, Beissmann, Sarrazin &
Arlettaz, 2009. Il montre qu’AVEC NEUF COUPLES REPRODUCTEURS « only if mortality
increased by ! 50% would the population start to decline » cette information très
précieuse, essentielle à l’échelle d’un noyau de population, au niveau opérationnel donc.
Il est accompagné de préconisations stratégiques : « from a purely demographic viewpoint,
WE THEREFORE RECOMMEND ENDING RELEASES IN THE ALPS and redirecting reintroduction
efforts towards other areas where the species is now extinct (e.g. Sardinia, Balkans) ».
La restriction les introduisant est très fondée. Car ne prendre en compte que la
démographie serait une faute stratégique majeure cf. § 1 ci-dessous. En outre,
ces préconisations sont erronées aussi du point de vue démographique (cf. §§ 2 et 3).
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
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1. Dans un contexte humain dangereux ajourner des.opérations, même
géographiquement prioritaires
Le risque du poison est totalement méconnu dans les deux régions préconisées par Schaub et
al. Le retour brutal au « principe de réalité » subi en Sardaigne en 2009 dispense de
commenter davantage (cf. supra B. – PRIORITE TEMPORELLE in I).
2. Le modèle n’est pas applique a l’objet pertinent
Les couples de Gypaète actuellement présent dans les Alpes ne constituent nullement une
même population mais, du fait de la philopatrie de l’espèce, quatre noyaux de population
distincts (carte ci-dessous), d’effectifs fort divers (cf. infra tableau I).
Figure 2. – Philopatrie : concentration des données de Gypaète Gypaetus barbatus dans les Alpes.
La lecture des bagues montre que, en dépit d’un erratisme initial fréquent, parfois à longue
distance, au moins la moitié des gypaètes s’installe à maturité dans la grande région des
Alpes où ils se sont envolés pour la première fois d’un taquet ou de l’aire d’un couple
nichant en liberté. En 2009 aucun des quatre noyaux de population n’atteint le nombre
de couples nicheurs correspondant au seuil de pérennité de Schaub et al.
3. La présence du gypaète dans les alpes reste très fragile
Selon Schaub et. al. le déclin du Gypaète dans les Alpes ne commencerait que si la mortalité
augmentait d’au moins 50%. Mais celle-ci, à partir de la seconde année, n’est que de 4%.
Il suffirait donc que le nombre d’individus mourant chaque année augmente du fait de
l’Homme de 2% des effectifs pour que le Gypaète recommence à disparaître des Alpes.
Appliqué aux seuls individus actuellement en couples (17 x 2 = 34) ce taux correspond à
une moyenne de 0,68/an : approximativement tous les trois ans.
Si on l’appliquait à l’ensemble de la population, même en tenant compte d’une mortalité
supérieure la première année, il suffirait d’une augmentation de mortalité de deux ou trois
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
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individus par an. Une augmentation absolue aussi minime est très possible ; aux tirs et
câbles aériens peuvent s’ajouter la prolifération des éoliennes ou/et même, du fait du retour
du Loup, le poison. Schaub et al. envisagent d’ailleurs que le seuil fatal soit franchi pour ces
raisons.
Au contraire ce franchissement sera d’autant plus improbable que les effectifs seront élevés
Il convient donc de les augmenter au plus vite en poursuivant et accentuant l’effort de
réintroduction.
LES LACHERS DE GYPAETE DOIVENT SE POURSUIVRE DANS LES ALPES
NB
Ce n’est que la simple application d’un principe essentiel de stratégie générale,
condition du succès : exploiter avec détermination des succès initiaux. Ces derniers
seraient, au contraire, gravement compromis par un relâchement prématuré des efforts22.
B. - DEUX GROUPES D’OPERATIONS
Pour deux opérations, le nombre de gypaètes en couples atteint près de la moitié de ceux qui
ont été lâchés sur place et d’un âge assez avancé, alors que pour les deux autres ce
rendement de lâchers est quatre à cinq fois plus faible.
Noyau de population
Lieux de lâchers
Couples
Effectifs lâchés
sud-occidental
nord-occidental
central
oriental
Mercantour Alpi Marritime
Haute-Savoie
Stelvio Engadin
Hohe Tauern
1
22
8
34
6
26
2
34
11 m,. 10 f.1 ?
14 m.,17 f., 3 ?
13 m., 13 f.
13 m., 21 f.
9,1%
47,1%
46,2%
11,8%
TABLEAU I. – Noyaux de population de Gypaète Gypaetus barbatus dans les Alpes : nombres de
couples en 2009 et d’oiseaux lâchés avant 2004. Le rendement des lâchers est le
rapport du nombre d’oiseaux en couple à celui des oiseaux lâchés avant 2004 : les autres
Rendement des lâchers
sont trop jeunes. Ceux qui sont morts avant envol ou qui dont dû être repris peu après ne sont pas
pris en compte. A = Autriche, CH = Suisse, F = France, I = Italie, m. = mâles, f. = femelles.
D’après Choisy*, fondé sur les données du FCBV Annual Report 2004 et de Zink (2009).
1. Succès loin d’être atteint, sans reproduction encore réussie
a. - ALPES SUD-OCCIDENTALES (Mercantour, F et Alpi Marritime, I)
La faiblesse du rendement des lâchers (au sens du tableau I), en dépit d’un rapport des sexes
quasi-équilibré, conduit à l’hypothèse d’une mortalité anormale du fait de l’Homme.
b. – HOHE TAUERN (Autriche)
Même hypothèse. Certes, le rapport des sexes est ici beaucoup plus déséquilibré que partout
ailleurs chez les oiseaux lâchés (0,52 mâle par femelle), plus encore si on défalque les
individus morts ou disparus avant d’avoir atteint la maturité sexuelle (0,37 mâle par
femelle). Mais cette explication ne peut être que très partielle : les mâles en couples ne
représentent que 15,4% de ceux qui ont été lâchés, 22,2% si on ne tient pas compte de ceux
qui ont disparu prématurément.
2. Succès encore fragiles
a. - ALPES NORD-OCCIDENTALES (Vanoise, F, Haute-Savoie, F et Valais, CH)
L’objectif opérationnel est atteint, l’opération achevée. Ceci en dépit d’une mortalité par
collision avec lignes électriques particulièrement élevée chez les oiseaux lâchés : six des
mâles et trois des femelles la première année, une quatrième en septième année. Deux
22
Maintes défaites n’eurent pas eu d’autre cause.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
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Jean-Pierre Choisy 2010
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oiseaux sont morts de tirs dans la zone concernée, un en Suisse, l’autre en France, non loin
du site de lâcher.
b. - STELVIO-ENGADIN (Italie et Suisse)
Le taux de production de jeunes, à l’envol plus élevé que partout ailleurs, ne s’explique pas
par l’équilibre des sexes, total au lâcher, car deux mâles ont disparu prématurément23. Il est
quasi-certain que le nombre d’oiseaux lâchés et nés après 2004 permettra d’atteindre le
même effectif dans très peu d’années. L’opération peut être considérée comme quasiment
achevée, avec succès.
C. – ANALYSE
(Choisy*)
1. HOHE TAUERN (Autriche), ALPES S-O (Mercantour, F et Alpi Marritime, I)
Le nombre de gypaètes en couples n’atteint, pour l’ensemble des opérations aux deux
extrémités de la chaîne, que 10,7% de ceux qui ont été lâchés sur place et d’âge actuel le
permettant. Aucune donnée n’étaye l’hypothèse que les oiseaux disparus aient survécu en
proportion normale et se soient simplement installés ailleurs dans les Alpes. Un rendement
des lâchers qui, globalement, est quatre fois et demie plus faible de celui des deux autres
opérations ne peut être attribué au hasard : p < 0,001 et ne peut s’expliquer que par une
mortalité anormale du fait de l’Homme . Quelles peuvent en être les causes ?
Câbles aériens ?
Leur densité dans les Alpes du nord françaises est particulièrement élevée : transport
d’électricité mais davantage encore du fait des sports d’hiver. Plusieurs cas de mortalité ont
été constatés. Mais si cela a certainement diminué le rendement de lâcher de l’opération de
Haute-Savoie, il reste élevé. Et si cela a freiné le développement du noyau de population
nord-occidental, cela n’a pas suffit à l’empêcher.
Saturnisme ?
Dans les Alpes comme dans les Pyrénées on en connaît quelques cas chez le Gypaète, du
fait projectiles de chasse dans des Ongulés sauvages. D’autres passent probablement
inaperçus. Mais rien ne permet de supposer que ce soit avec une fréquence à ce point
supérieure aux deux extrémités de l’arc alpin ;
Poison ?
On connaît de rares cas d’usage illégal du poison, essentiellement lié au retour du Loup.
C’est improbable hors de la saison de présence de bétail en alpage. A la belle saison il est
n’est guère possible que cela ait été une cause de surmortalité majeure du Gypaète car on
aurait trouvé de nombreux cadavre de Vautour fauve, qui estive régulièrement aux
extrémités des Alpes en effectifs très supérieurs : jusqu’à 163 ensemble dans le PN du
Mercantour (Coirié XY) ;
Tir ?
Unique ou largement dominante, c’est la seule cause qui résiste à l’analyse. Ceci que le
Gypaète soit visé per se ou confondu avec un Aigle Aquila chrysaetos. Au Mercantour des
individus commençant à s’installer disparaissent régulièrement (Ormea, Parc National du
Mercantour, comm. or. pers.) sans que ces oiseaux soient identifiés nulle part ailleurs dans
les Alpes. Des observations analogues sont faites en Autriche XY. Compte-tenu du modèle
de Schaub et al.,
Que les lois nationales protégeant tous les Rapaces soient moins respectées que dans le reste
23
Dont l’un tué (tir) aux confins de l’Italie et de l’Autriche.
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des Alpes franco-italienne est une hypothèse vraisemblable dans les hauts massifs du sudouest de la chaîne.
En Autriche des tirs de gypaètes ont été constatés avec une fréquence très supérieure à celle
dans le reste des Alpes. L’hostilité des chasseurs à l’égard des Rapaces, qui a suscité ces
dernières années deux pétitions internationales sur Internet, y est réellement étonnante pour
l’Europe au XXI°siècle. Cet archaïsme mental et comportemental est conforté par celui des
textes : aucune loi générale ne protège ces oiseaux en Autriche (Frey H., comme or. pers. et
in litt., Zink R. idem).
La rareté et le coût des gypaètes donne une importance stratégique à la distribution du
contingent annuel à lâcher entre les diverses opérations.
Ces deux opérations doivent être suspendues. Elles ne devront être reprises qu’après
qu’une action énergique d’information et répression ait remédié à ce grave état de fait.
Ce qui se fait dans les Pyrénées et, contre le poison, en Andalousie, fournit des modèles.
2. STELVIO-ENGADIN et ALPES N-O (Vanoise, F, Haute-Savoie, F et Valais,
CH)
COMPARAISON AVEC LA REINTRODUCTION DU VAUTOUR FAUVE GYPS FULVUS
Les effectifs d’oiseaux en couples représentent globalement pour l’ensemble des deux
noyaux de population centraux (de la Vanoise au Stelvio-Engadin) 46,7% des effectifs
lâchés24. Ce rendement est, certes, beaucoup moins insatisfaisant qu’aux deux extrémités de
la chaîne. Mais il reste modeste si on le compare à celui de la réintroduction du Vautour
fauve dans les Alpes françaises, qui est trois fois plus élevé.
Cette différence des rendements de lâchers ne peut s’expliquer par celle des :
-
productions de jeunes à l’envol du Gypaète (0,6/couple/an, Schaub et al.) est quasiidentique à celui du Vautour fauve dans des populations loin de la capacité
d’accueil ;
-
taux de survie qui, au contraire, avantagent actuellement le Gypaète
(0,88 la première année, puis 0,96 les autres) par rapport au Vautour fauve.
Ce dernier ne rattrape son retard initial qu’après douze années dans une population
d’effectifs faibles25, soixante dans une population d’effectifs élevés26, la situation
dans les Alpes françaises pouvant être considérée comme intermédiaire ; l’attribuer
aux charniers dont le Vautour fauve dispose toute l’année serait redondant car un
effet éventuel agirait au niveau de l’un et/ou l’autre des deux paramètres ci-dessus.
-
âgés au lâcher. Certes les gypaètes lâchés au taquet doivent mûrir en surmontant les
dangers de la vie en liberté alors que les vautours fauves sont lâchés adultes et
subadultes. Mais on a montré que leur mortalité les deux années après lâcher est la
même que celle d’oiseaux nés en liberté leur deux premières années de vie. Donc,
alors que la probabilité d’atteindre six ans est, pour un gypaète lâché au taquet de
0,72 (72%) elle n’est que de 0,61 (61%) pour un vautour fauve lâché à l’âge de trois
ans, 0,63 (63%) si c’est à l’âge de quatre ans ;
24
Fractions quasi-identiques pour les deux opérations (cf. supra tableau I).
Taux de survie : 0,858 les trois premières années, 0,987 ensuite, Sarrazin in litt.
26
Successivement 0,618, 0,843, 0,918 les trois premières années, puis 0,969, Gault, thèse, in litt. de
Sarrazin.
25
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-
maturités sexuelles : celle plus tardive du Gypaète (six ans au lieu de quatre chez le
Vautour fauve) ne saurait expliquer cette différence car elle est actuellement
compensée largement par les dates de naissance des premiers oiseaux lâchés : 1986
pour les gypaètes des Alpes ; 1993 chez les vautours fauves de l’ouest de la chaîne.
Une immigration spontanée, dont on n’a aucun indice chez le Gypaète, joue en faveur du
Vautour fauve : des visiteurs des Causses, des Pyrénées, d’Espagne et même, pour l’un, de
Croatie s’installent et nichent dans les Alpes françaises. Mais ils sauraient représenter, tout
au plus, que 10 à 15% des effectifs qui y sont en couples actuellement.
Une seule hypothèse expliquant la modicité du rendement démographique des lâchers par
rapport à ceux de Vautour résiste à la confrontation avec les faits : l’extrême dilution dans
les temps des effectifs lâchés avec une moyenne de 2,00 par an par opération27 chez une
espèce philopatrique a maximalisé le risque qu’un individu donné reste des années sans
trouver de conjoint (Choisy, comm. or. séminaire FCBV, Bormio 2009).
Au contraire, les opérations de réintroduction du Vautour fauve réalisées, avec une moyenne
de 75 oiseaux chacune, l’ont été avec chaque fois presque toujours plus de dix oiseaux
lâchés par an et parfois plus de vingt : énorme différence.
DEBUT TARDIF DE LA REPRODUCTION DES GYPAETES DANS LES ALPES
Le Gypaète atteint la maturité sexuelle à six ans en moyenne. Mais la reproduction ne réussit
guère « avant 7 ans au moins », ceci dans des populations étoffées où « les couples sont tous
constitués d’oiseaux adultes » J.-F. Terrasse. Le même rapporte des cas d’appariement
d’un(e) adultes avec un(e) subadulte, voire un(e) immature, dont un cas de reproduction
réussie dans des populations de faibles effectifs. Opposition bien connue chez les Rapaces
en général. Compte tenu de la très faible densité de la population des Alpes, on devrait donc
s’attendre à un début de reproduction précoce. Or, il n’en est rien :
- Stelvio Engadin : première reproduction réussie en 1998 sept ans après le premier lâcher
sur place ; à l’âge habituel dans les populations étoffées ;
- Haute-Savoie : la première reproduction réussie depuis le début de la réintroduction dans
les Alpes, en 1997, s’est fait attendre dix ans après le premier lâcher sur place.
- moyenne de la première reproduction réussie dans les Alpes : 8,3 ans, Hegglin, comm.
or. séminaire FCBV, Bormio 2009.
Ce retard du début de la reproduction dans les Alpes alors que la situation ferait attendre
un début précoce, s’explique par la difficulté à trouver un conjoint.
EFFECTIFS INFERIEURS A CEUX PREDITS PAR LE MODELE
Le modèle de Schaub et al. prédit pour 2009 plus de 24 gypaètes adultes issus des lâchers et
de la reproduction sur place dans le noyau central et autant dans le noyau nord-occcidental.
Certes un sexe ratio de 1/1 serait loin d’être certain : n = 24, P1/1 = 0,16 (0,13) 28. Mais que
ces deux noyaux de population n’hébergent pas plus que, respectivement, six et huit couples
(tableau I) ne peut pas être attribué au fait que l’un des sexes ne comptant que le même
nombre d’individus soit le facteur limitant. Cet événement serait peu probable pour chacun
d’eux et leur réunion est hautement improbable : P < 0,001 (< 0,012)29. L’écart entre ce
qu’on pourrait espérer et la réalité mesure la dépression démographique qui résulte de la
dilution entre quatre opérations d’une production de gypaètes en captivité faible jusqu’en
27
Pendant dix-sept années en Haute-Savoie, en cours depuis treize ans en Stelvio-Engadin.
Calculs faits sous l’hypothèse d’un rapport des sexes équilibrés et, entre parenthèses, sous celle d’un
rapport des sexes des survivants identiques à celui des oiseaux lâchés (cf. Schaub et al.).
29
Cf. note précédente.
28
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1984 (cf. figure 3 page suivante). Compte tenu de la maturité sexuelle tardive et des
paramètres de survie (Schaub et al.), Un recrutement local aussi faible ne fournit à un
gypaète cantonné qu’environ un partenaire potentiel tous les trois ans, sans tenir compte de
l’éventuelle concurrence.
La seule hypothèse compatible avec l’analyse précédente est donc :
L’EXTREME DILUTION DANS LE TEMPS DES GYPAETES LACHES LORS DE CHACUNE DES
OPERATIONS DE REINTRODUCTION DANS LES ALPES, MAXIMALISANT LE RISQUE DE
RESTER LONGUEMENT SANS PARTENAIRE SEXUEL, MINIMISE LEUR EFFICACITE
DEMOGRAPHIQUE, TANT LOCALEMENT QU’AU NIVEAU, STRATEGIQUE, D’ENSEMBLE.
NB Cette analyse ne constitue nullement une critique de la stratégie initiale car alors :
- produire pendant longtemps très peu de gypaètes à lâcher fut non pas un choix mais
le résultat d’une somme de contraintes et de problèmes techniques et autres ;
- la philopatrie du Gypaète n’était pas encore établie : chez une espèce aux telles
aptitudes de vol et, au contraire du Vautour fauve et du Vautour moine, ne nichant pas en
colonies, il n’était nullement exclu a priori que les oiseaux lâchés forment une unique
population, la recherche d’un partenaire l’emportant totalement sur l’attachement à la
région d’origine ;
- impliquer dans la réintroduction du Gypaète l’ensemble des principaux pays alpins
a été extrêmement pertinent. Cette exigence politique avait le pas sur la stratégie de
réintroduction. Faute de quoi, cette restauration aurait été considérée, comme une affaire
purement autrichienne, ou française, ou helvétique ou italienne.
IV. PERSPECTIVES
A.- DES MOYENS EN FORTE CROISSANCE
18
16
14
12
10
8
6
4
2
0
1996 1997 1998 1999 2000
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009
Figure 3. - Gypaètes Gypaetus barbatus lâchés dans les Alpes. D’après Choisy*, sources : FCBV
Annual Report 2004, Zink 2009) + pour 2009, .bilan la reproduction en captivité (Frey in
IBM News 24/4/9).
B. - AMELIORER L’EFFICACITE STRATEGIQUE
Même là où le succès des opérations de réintroduction ne se heurte pas à des facteurs
humains majeurs, leur réalisation actuelle est loin de l’efficacité stratégique rendue possible
par les connaissances et les moyens désormais disponibles comme par la situation actuelle
du Gypaète. S’en approcher le plus possible est une exigence éthique, technique et, compte
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tenu du coût actuel des précieux oiseaux, financière.
1. Lâcher des gypaètes subadultes ?
Les taux de survie sont plus élevés en captivité qu’en liberté : 0,92 la première année, 0,99
les cinq années suivantes (Bustamante 1996 in Schaub et al.). Le taux de survie à six ans des
gypaètes, de 72% chez des oiseaux ayant atteint cet âge en liberté, serait de 78% chez des
individus nés en captivité et lâchés à cinq ans révolus.
Une augmentation de 8% de la valeur initiale du taux de survie à six ans ne semble pas
suffisante pour justifier ni l’entretien des oiseaux cinq années en volière, ni la prise de
risque d’un changement de méthode.
2. Concentration des lâchers dans le temps
L’augmentation globale du nombre de la production de gypaètes en captivité (cf. page
précédente) et ce d’autant plus que l’achèvement de l’opération de Haute-Savoie permet de
disposer du contingent qui lui était naguère alloué, permettra d’augmenter très notablement
le nombre d’individus lâchés une même année dans une même contrée.
a. – PRINCIPE
PLUS EST ELEVE LE NOMBRE DE GYPAETES LACHES CHAQUE ANNEE DANS LE CADRE D’UNE
MEME OPERATION, MOINS LEURS AGES DIFFERERONT EN FIN D’ OPERATION, DONC PLUS
AUGMENTERA LA PROBABILITE POUR CHACUN DE TROUVER VITE UN CONJOINT.
DONC MOINS IL FAUDRA LACHER D’ OISEAUX AU TOTAL POUR ATTEINDRE LE SEUIL DE
VIABILITE DEMOGRAPHIQUE.
b. – Limite de l'amélioration quasi-certaine
Toutes autres choses étant égales par ailleurs, une réalisation successive des diverses
opérations, chacune en une seule année, des taux de survie conforme au modèle de Schaub
permettraient au nombre d’oiseaux en couples d’atteindre, à l’âge de six ans jusqu’à 72% de
ceux lâchés et à l’âge de huit ans encore 66%, soit trois cinquième et la moitié de plus que
les pourcentages actuels des opérations de Haute-Savoie et de Stelvio Engadin à condition
que le rapport des sexes des survivants soit strictement équilibré. Même si l’équilibre total
des sexes permettant d’atteindre ces maxima n’a guère qu’une chance sur six d’être atteint,
l’amélioration du rendement démographique des lâchers est néanmoins une quasi-certitude
cf. supra EFFECTIFS INFERIEURS A CEUX PREDIT etc in 2.-STELVIO-ENGADIN et ALPES N-O.
c. – NECESSITE D’UN COMPROMIS
En dépit de la notable augmentation de la reproduction en captivité, elle ne permettrait pas
encore de réaliser une opération de réintroduction en moins de deux ou trois ans.
Cet objectif lui-même se heurterait à des obstacles difficiles à surmonter :
- techniques : lâcher au taquet douze à vingt gypaètes une même année dans un même
massif ou un groupe de massifs contigus, même sur différents taquets, sans être
impossible, serait certainement très lourd ;
- financiers : le coût global par couple installé serait certainement plus faible en fin
d opération, du fait de l’augmentation du rendement des lâchers. Mais il paraît
difficile d’arriver à financer le coût d’autant de gypaètes chaque année de lâcher.
Pour arriver à une telle concentration des lâchers, il aurait fallu un financement
unique à l’échelle de la stratégie de réintroduction dans l’ensemble des Alpes et non
pas localement de chacune des opérations.
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Néanmoins :
ENTRE L’ACTUELLE EXCESSIVE DILUTION SPATIALE ET TEMPORELLE DES GYPAETES
LACHES JUSQU'A MAINTENANT ET LA CONCENTRATION MAXIMALE DE TOUS LES OISEAUX
LACHES UNE MEME ANNEE AU PROFIT D’ UNE SEULE OPERATION, C’EST DESORMAIS UNE
EXIGENCE STRATEGIQUE DE TROUVER UN COMPROMIS ACCESSIBLE, TEL QUE CINQ, SIX
OISEAUX PAR AN PAR OPERATION, ce qui a été fait en 2009 en Andalousie.
La distribution des jeunes nés en captivité entre les diverses opérations est une décision
essentielle pour très notablement améliorer l’efficacité de la stratégie de réintroduction.
3. Rapport des sexes
On devra viser un rapport des sexes aussi équilibré que possible des oiseaux à maturité
sexuelle, s’il le faut en corrigeant au fil des lâchers d’éventuels déséquilibres de mortalité.
Ceci a été fait en 2009 en Andalousie : les cinq oiseaux lâchés sont des femelles.
4. Lignées
Les lignées génétiques issues des divers couples parents des oiseaux nés en captivité sont
très inégalement réparties dans les noyaux de populations actuelles. Elles semblent aussi de
fécondité différente. Hegglin (FCNV, séminaire 2009, Bormio) préconise à très juste titre,
pour les futurs lâchers, de privilégier dans la mesure du possible :
- les lignées les plus fécondes pour des lâchers visant la connexion Alpes-Pyrénées ;
- les lignées actuellement les moins bien représentées pour les lâchers visant les
connexions intra-alpines ou/et à achever des opérations en cours en 2009.
5. Quand arrêter de lâcher ?
a. – À l’echelle d’une operation locale
Le seuil de pérennité à moyen terme, à l’échelle de temps opérationnel, de l’ordre de la
dizaine d’année suivant l’achèvement d’une opération, est vraisemblablement inférieur
d’une ou deux unités aux neuf couples du modèle théorique de Schaub. En effet, si la
philopatrie est statistiquement bien réelle, elle est loin d’être absolue. Donc, l’effectif
nicheur à prendre en compte, inconnu, est nécessairement intermédiaire entre celui du noyau
de population considéré, local, et l’ensemble des couples des Alpes.
OBJECTIF OPERATIONNEL : INSTALLER SEPT A NEUF COUPLES
COMBIEN FAUT-IL LACHER D’OISEAUX POUR FONDER UN NOYAU DE POPULATION VIABLE ?
Des calculs fondés sur les paramètres de survie et de reproduction du modèle de Schaub et
al. permettraient la simulation de situations variées, peut-être nécessaire dans un article
purement scientifique.
Le présent travail, outre qu’il exige une rédaction plus rapide, dispose d’une information
empirique de poids : le rendement démographique des lâchers du tableau I (cf. supra) dans
les deux principaux noyaux de population actuels des Alpes : le nombre de gypaètes en
couples atteint près de la moitié (46.7 %) du nombre de ceux qui ont été lâchés sur place et
d’âge actuel le permettant. Autrement dit :
BESOINS OPERATIONNELS POUR P ! 0,95 D’ATTEINDRE L’ OBJECTIF
PREVOIR DE LACHER DE 34 ± 9 A 43 ± 12 GYPAETES
:
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NB
La concentration des moyens, préconisée plus haut, devrait permettre un meilleur
rendement. Si tel était bien le cas, on en tirerait le bénéfice démographique d’un
développement plus rapide que partout ailleurs avec, en outre, une confirmation
expérimentale de la pertinence de cette nouvelle stratégie. Mais, en attendant, il serait
irresponsable de prévoir moins d’oiseaux à lâcher par opération.
Si, au contraire, on obtenait un nombre de couple notablement inférieurs alors que la
région offrait des conditions naturelles favorables, il faudrait nécessairement en conclure à
une mortalité anormale du fait de l’Homme, dont on devrait activement rechercher les
causes.
b. – À l’echelle strategique
Tant que les effectifs nicheurs y restent aussi réduits, une augmentation minime de la
mortalité pourrait remettre en cause la survie de la population de Gypaète dans les Alpes cf.
supra 3. - LA PRESENCE DU GYPAETE DANS LES ALPES RESTE TRES FRAGILE in III. –A.
Négligeable à l’échelle de temps de la réalisation d’une opération avec les moyens accrus
actuellement disponibles, ce risque doit être pris en compte à l’échelle de temps
stratégiquement pertinente : le long terme, de nombreuses décennies. Schaub et al
évoquent la possibilité, à long terme, d’augmentation des causes de mortalité. Seul, un
nombre de couples nicheurs considérablement plus élevé peut augmenter la probabilité de
pérennité du Gypaète dans les Alpes. Avec les taux de survie actuels et des effectifs égaux à
ceux des Pyrénées en 2009, il faudrait :
OBJECTIF STRATEGIQUE
: DES EFFECTIFS ASSURANT LA PERENNITE DU GYPAETE DANS LES ALPES
Une population fondée par un faible nombre d’individus (ou réduit à ce niveau) connaît une
phase d’accroissement annuel absolu très faible (cf. fig. 4 ci-dessous). Certes, un
développement démographique régulier, conforme au modèle logistique, finissant par
atteindre une phase de croissance soutenue, en dépit d’un faible nombre de fondateurs est
possible…avec beaucoup de chance ! Car avec un nombre réduit de fondateurs (de couples
dans le cas du Gypaète), le risque d’écarts aléatoires au modèle théorique (rapport des sexes
déséquilibré, perte par mortalité ou émigration, pertes d’allèles, etc.) est très élevé.
La conséquence la plus ordinaire à en redouter est une interminable stagnation
démographique à bas niveau, avec persistance d’un risque élevé d’extinction.
Cette situation, celle du Gypaète en Corse, ne saurait constituer un objectif stratégique de la
réintroduction à l’échelle des Alpes : leur aire est dix fois celle des Pyrénées, où nichent
actuellement cent quarante couples, avec des ressources alimentaires probablement
meilleures (Bouquetin).
C’EST
L’ENTREE DANS LA PHASE DE CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE SOUTENUE DU
MODELE LOGISTIQUE, GARANTE D’ATTEINDRE ASSEZ PROCHAINEMENT UN EFFECTIF
ELEVE, QUI PERMETTRA DE CONSIDERER LA REINTRODUCTION DU GYPAETE DANS LES
ALPES COMME ACHEVEE.
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N
Achèvements prématurés pertinents
T
Figure 4. – Achèvement d’une réintroduction et modèle logistique du développement d’une
population. Dans le cas du Gypaète, Schaub et al. soulignent avec raison que l’effectif à
prendre en compte N est celui des nicheurs, même s’ils ne le sont pas chaque année, et non
pas celui de l’ensemble des adultes présents.
Les expériences concrètes antérieures montrent que, chez les grandes espèces (Vautour
fauve, Bouquetin, etc.), le seuil de décollage démographique est atteint lorsque
l’accroissement est de quelques dizaines par an. Alors, le risque d’écarts aléatoires au
modèle diminue : intervalle de confiance variant comme l’inverse de la racine carré des
effectifs. On y arrive généralement en relâchant en quelques années un nombre suffisant
d’animaux adultes ou subadultes pour atteindre, d’emblée ou presque, le début de cette
phase. Inaccessible pour le Gypaète aux échelles temporelle et spatiale d’une opération
locale, un tel objectif doit être poursuivi à celles, stratégiques, de la chaîne des Alpes et de la
décennie.
6. Nouvelles localisations de lâchers
Au-delà de l’achèvement d’opération(s) en cours, l’objectif démographique assurant la
pérennité à long terme doit être poursuivi par :
DE NOUVELLES OPERATIONS DE REINTRODUCTION DU GYPAETE
:
EN POSITIONS GEOGRAPHIQUES FAVORABLE AU TRANSIT
- INTRA-CHAINE : constituant en une même population les couples des Alpes ;
- INTRA-CHAINES : connectant en une métapopulation ceux des Alpes et des Pyrénées,
comme c’est déjà le cas, de l’Espagne aux Alpes occidentales, pour les autres espèces de Vautours
CHAQUE
CONNEXION AUGMENTERA FORTEMENT L’EFFECTIF A PRENDRE EN COMPTE,
DONC LE DYNAMISME DEMOGRAPHIQUE, LA DIVERSITE GENETIQUE, LA PROBABILITE DE
PERENNITE A LONG TERME DE L’ENSEMBLE COMME DE SES COMPOSANTES.
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D. - CONNEXION INTRA-ALPINE : ALPES LEPONTINES S. L.
Un nouveau noyau de population entre celui de Stelvio Engadin (six couples) et Valais
Haute-Savoie Vanoise (huit couples) les connecterait en une population dépassant assez
rapidement une vingtaine de couples, assurant bien davantage la pérennité du Gypaète
dans la chaîne que la situation actuelle, avec un dynamisme démographique très accru.
Que l’opération soit réalisée dans les Alpes lépontines s.s. ou à alentour l’abréviation est commode.
Figure
5.
–
La priorité stratégique intra-alpine actuelle : Alpes lépontines
une nouvelle opération de lâcher de Gypaète Gypaetus barbatus (étoile) entre les
deux principaux noyaux actuels les connecterait en une même population
(courbe jaune) au centre de la chaîne.
La haute pertinence stratégique d’une nouvelle opération ici a été soulignée en 2009 lors du
séminaire annuel de la FCBV (Bormio) par la convergence de deux communications,
indépendantes, celle de Choisy et celle de Hegglin.
C’EST ICI QU’EST LA PREMIERE PRIORITE ACTUELLE PRIORITE EN EUROPE
Toutefois, le passage à l’acte ne paraît pas possible à court terme : même l’étude de
faisabilité reste à faire.
Quelles que soient les autres opérations en cours, l’approvisionnement en oiseaux de cette
opération sera assuré : au minimum en y déplaçant le contingent actuellement attribué à
l’opération plus à l’est (Stelvio Engadin), proche de l’achèvement (cf. supra) et sans doute
bien davantage du fait de l’augmentation forte de la reproduction en captivité.
L’opération ci-dessous, de priorité immédiatement suivante et qui, elle, est prête doit donc
commencer.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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E. – CONNEXION ALPES - PYRENEES : PREALPES DU SUD-OUEST
VERCORS DIOIS, BARONNIES ET ALENTOURS
Lorsque le Gypaète était largement répandu sur tous les reliefs d’Europe au sud de la limite
climatique des Vautours, un transit existait nécessairement entre eux.
Chez le Vautour fauve et le Vautour moine des réintroductions dans le sud du Massif
Central (Causses) et le sud des Préalpes occidentales (Dauphiné et Haute-Provence) ont
fondé une chaîne de noyaux de population entre lesquels les hiatus ne sont plus que d’une
centaine à moins de deux cents kilomètres. De l’Espagne aux Alpes occidentales un flux
saisonnier croissant de ces espèces a déjà été reconstitué.
Chez le Gypaète de nos jours, un tel transit est ou bien inexistant ou bien trop réduit pour
avoir été décelé. Le hiatus actuellement persistant est beaucoup plus large que chez les
espèces précédentes : environ quatre cents kilomètres entre les sources de gypaètes
erratiques des Pyrénées orientales30 et celles des Alpes occidentales31, qu’il s’agisse de
reproduction en liberté ou de lâchers au taquet. L’objet de l’étude de faisabilité de la
deuxième partie du présent travail vise, en scindant ce hiatus, à restaurer les conditions de
possibilités d’un tel transit chez cette espèce également.
Toutes autres choses étant égales par ailleurs32, la probabilité que des individus erratiques
issus d’un noyau de population en atteignent un autre varie comme l’inverse du carré
du leur distance cf. infra tableaux II et III, c’est-à-dire comme la surface sur laquelle se
dispersent les oiseaux à partir de leur source.
Actuellement la probabilité qu’un gypaète transite entre Alpes et Pyrénées n’atteint donc pas
le quart de celle pour qu’un individu des trois autres espèces franchisse le plus grand des
hiatus33 entre leurs noyaux de population nicheuses dans le même espace. Un noyau de
population dans les Préalpes du sud du Dauphiné suffirait à presque à la doubler (cf. infra
tableau III).
30note
31
Couples nicheurs ou taquets.
Autrement dit : en ne considérant que le seul rôle de la distance, indépendamment d’autres facteurs,
écologiques par exemple.
33
Inférieur à deux cents kilomètres.
32
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Sources : Razin : Pyrénées, Otto, Greßmann & al. : Alpes occidentales, couples du Valais hors carte.
Figure 6. – Priorité stratégique inter-chaîne. Conditions de transit du Gypaète
Gypaetus barbatus entre Alpes et Pyrénées actuelles et après réintroduction dans les
Préalpes occidentales.
Distances, augmentations de probabilité : cf. infra tableaux II et III.
a) transit actuel : 30 données, en augmentation, cf. infra § I, de B . in 3° partie.
b) transit non décelé actuellement ;
c) transit espéré avec un noyau dans les Préalpes occidentales ;
Couple ayant, en 2006, déjà élevé au moins un jeune jusqu’à l’envol ;
Couple territorial ne l’ayant pas encore fait en 2006.
EFFICACITE STRATEGIQUE : ELEVEE,
PROBABILITE DE TRANSIT PRESQUE DOUBLEE
cf infra tableaux II et III
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Certes, sauf augmentation catastrophique de la mortalité la recolonisation spontanée par le
Gypaète de l’ensemble des Alpes, la reconstitution d’un flux d’individus entre Alpes et
Pyrénées sont quasi-certaines. Mais combien de générations voire de siècles, devrait-on
attendre l’un et l’autre ?
Ce serait une démission de la politique de restauration de la biodiversité, localement,
mais plus encore pour la restauration de la situation dans les Alpes et en Europe d’une
espèce qui constitue un élément majeur de la biodiversité faunistique continentale.
CONSEQUENCES POUR LES ALPES OCCIDENTALES
La localisation actuelle des quatre noyaux de population dans la haute région axiale des
Alpes traduit celle des lâchers chez une espèce philopatrique et non une inféodation à
l’altitude : Jean-François Terrasse (2001) souligne l’indifférence du Gypaète à l’altitude,
ce sur quoi l’on reviendra dans la deuxième partie. En Haute-Savoie, la vigueur verticale de
la chaîne s’accompagne d’un rétrécissement horizontal sa largeur, rapprochant beaucoup les
massifs externes des hauts massifs internes. Rappelons que, non seulement les lâchers, ici,
ont eu lieu dans les Préalpes, mais encore que c’est dans ces Préalpes également que
l’espèce a niché pour la première fois après le début de la réintroduction dans les Alpes.
La création d’un noyau de population dans les
plus occidentaux des massifs des Alpes
françaises inscrirait celles-ci dans un triangle de
présence de l’espèce.
On peut en attendre une recolonisation générale,
notamment celle du vaste espace des Ecrins à
Belledonne, notamment aux Ecrins, beaucoup
plus rapide que par diffusion d’immatures à
partir de leur seule bordure orientale,
actuellement seule source d’individus, lâchés ou
nés en liberté.
Le transit déjà existant montre que le risque de
constituer un isolat démographique est nul. Les
individus s’installant hors des Préalpes du sud
du Dauphiné (la philopatrie n’est pas absolue)
étofferaient les effectifs de l’espèce dans les
Alpes.
Figure 7. – Recolonisation prévisible des Alpes
occidentales par le Gypaète Gypaetus
barbatus à partir :
- des noyaux de population actuels ;.
- d’un noyau de population réintroduit
dans les Préalpes occidentales
(projet P.N.R. du Vercors).
UN
NOYAU DE POPULATION DANS LES PREALPES DU SUD DU DAUPHINE DYNAMISANT LA
RECOLONISATION DES ALPES OCCIDENTALES PAR LE GYPAETE (stratégie intra-chaine)
SUFFIRAIT A JUSTIFIER UNE OPERATION DE REINTRODUCTION MEME SI LE TRANSIT ALPESPYRENEES (stratégie inter-chaines) TARDAIT A S’ETABLIR.
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F. – UNE OPERATION DANS LE SUD DU MASSIF CENTRAL ?
1. Un précieux complément stratégique
Dans la situation actuelle du Gypaète en Europe occidentale, compléter l’opération projetée
dans le Parc Naturel Régional du Vercors par des lâchers dans les gorges des Grands Causses
maximaliserait la probabilité de transit Alpes-Pyrénées.
Sources : Razin : Pyrénées, Otto, Greßmann & al. : Alpes occidentales, couples du Valais hors carte.
Figure 8. – Conditions de transit Gypaète Gypaetus barbatus dans le cas de la réalisation de deux
opérations, dans le Vercors ET dans les Causses, scindant en trois le hiatus actuel.
Distances, augmentations de probabilité : cf. infra tableaux II et III.
Couple ayant, en 2006, déjà élevé au moins un jeune jusqu’à l’envol.
Couple territorial ne l’ayant pas encore fait en 2006.
Transit actuel, 30 données, en augmentation, cf. infra § B in I, 3° partie.
Transit visé par la stratégie.
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COMPTE-TENU
DESOBJECTIFS, PLUS QU’AILLEURS SERAIT PERTINENT D’EQUIPER POUR SUIVI
PAR SATELLITE LES GYPAETES LACHES DANS LE VERCORS OU/ET LES CAUSSES.
ELARGIR LE PROJET
La réintroduction du Chamois R. rupicapra34 et du Bouquetin Capra ibex dans les grands
sites adéquats du Massif Central (gorges de l’Ardèche, cirque de Navacelles, etc.)
augmenteraient à la fois les ressources locales et l’aire potentielle, d’où hiatus beaucoup plus
brefs en direction des Alpes, potentialités démographiques atteignant le seuil de viabilité
(Schaub et al.) ce qui n’est pas le cas du projet actuel, davantage de naissances sur place. La
connexion démographique avec les Alpes serait une certitude. Les trois autres espèce de
Vautours d’Europe transitent déjà couramment via l’Ardèche entre les noyaux de population
des Causses et des Préalpes. On y a identifié le même jour des vautours fauves des deux
provenances sur la même charogne (CORArdèche).
Par leurs habitats maximalisant la probabilité de détection des cadavres Chamois et
Bouquetin, sont les Ongulés sauvages les plus favorables au Gypaète, le dernier plus encore
que la présence de brebis Hirzel et al., comme le confirme, dans la zone du projet PNRV, le §
B. – LOCALISATION DES OBSERVATIONS in Troisième partie, I, B. Il est regrettable que la prise de
conscience de l’intérêt pour le Gypaète d’une telle approche synécologique ait été aussi
tardive, car on ne peut guère en espérant la réalisation puis des effets avant une dizaine
d’années. Mais enfin, c’est fait : avoir commencé à faire sortir la réflexion ad hoc des
discussions informelles entre nous fut le mérite de Bertrand Eliotout, peu avant sa très
prématurée disparition accidentelle en Afrique en 2009.
2. Une faute stratégique grave à exclure
Commencer à lâcher des gypaètes dans les gorges des Causses avant que l’espèce soit
installée dans les Préalpes du sud du Dauphiné (projet du PNRV), avec au moins plusieurs
individus territoriaux :
a)
AURAIT UNE EFFICACITE STRATEGIQUE BEAUCOUP PLUS FAIBLE QU’UNE
REINTRODUCTION DANS CES SEULES PREALPES cf. carte page suivante. Certes le hiatus entre
un noyau de population dans les gorges des Causses et ceux actuels de l’ouest des Alpes serait
analogue à celui entre un noyau de population dans les Préalpes du sud du Dauphiné et les
couples de l’est des Pyrénées. Mais un transit entre ces dernières et les Alpes exigerait de
franchir, en outre, le hiatus entre gorges des Causses et Pyrénées.
b) FERAIT COURIR DEUX RISQUES MAJEURS :
-
GASPILLER POUR LA STRATEGIE DE REINTRODUCTION LES INDIVIDUS QUI QUITTERONT
LE BIOTOPE DE LACHER, car la philopatrie, statistiquement bien réelle, est loin d’être
absolue. Du fait des distances, la probabilité de rejoindre les gypaètes de l’est des Pyrénées
serait 2,25 plus élevée que celle de rejoindre un noyau de population des Alpes
occidentales ;
-
CONSTITUER UN ISOLAT DEMOGRAPHIQUE, D’EFFECTIFS TROP FAIBLES POUR ETRE
VIABLE du fait, à la fois, des dimensions modestes du biotope et de la totale absence des
deux Ongulés sauvages les plus favorables au Gypaète, Chamois et Bouquetin (cf. supra
même page).
34
Réintroduit mais dans le nord du Massif Central et arrivée spontanée d’individus des Préalpes dans l’est
(Ardèche) sans reproduction encore prouvée.
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Au contraire, ces risques sont inexistants dans le cas d’une réintroduction dans les seules
Préalpes du Sud du Dauphiné, du fait du transit déjà existant entre cette zone et les noyaux de
population de Gypaète des Alpes : trente données, en augmentation : chaque année après
2000, vingt quatre individus, presque exclusivement des immatures cf infra B. – LOCALISATION
DES OBSERVATIONS in Troisième partie I, B.
Sources : Razin : Pyrénées, Otto, Greßmann & al. : Alpes occidentales, couples du Valais hors carte.
Figure 9. - Conditions du transit espéré du Gypaète Gypaetus barbatus entre Alpes et Pyrénées
dans le cas d’une opération de réintroduction dans les Causses seuls.
……………………….Distances, augmentations de probabilité : cf. infra tableaux II et III.
d) la distance des Causses aux couples actuels des Alpes égale la distance des
populations des Alpes et des Pyrénées dans le cas d’une réintroduction dans le
Vercors seulement (cf. fig. précédente). Aucun transit actuel.
e)
distance supplémentaire Causses – Pyrénées. Aucun transit actuel.
Couple ayant, en 2006, déjà élevé au moins un jeune jusqu’à l’envol.
Couple territorial ne l’ayant pas encore fait en 2006.
EFFICACITE STRATEGIQUE : DOUTEUSE
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A. - DEUX OPERATIONS DE REINTRODUCTION, Préalpes occidentales et Causses : tous les hiatus entre
Alpes et Pyrénées seront égaux ou inférieurs aux hiatus actuels entre les noyaux de populations
internes aux Alpes.
Alpes
nordouest
Valais,
HauteSavoie
Vanoise
80 km
transit
actuel
Alpes
sudouest
Meranto
ur,
Argente
ra
130 km
Pyrénées
orientales
200
Massif
km
Central
sans
sud
transit
Causses
actuel
400 km
sans transit actue
185 km
sans
transit
actue
Préalpes
occid.
Vercors,
Diois,
Baronnies
, etc.
transit
actuel
112 km
220 km
transit
actuel
centre
Engadin
Stelvio
190 km
transit
actuel
est
Hohe
Tauern
B. - UNE SEULE OPERATION DE REINTRODUCTION : Préalpes occidentales ou Causses
Pyrénées
orientales
près de 300 km
sans transit actue
Pyrénées
orientales
200 km
sans transit actue
Préalpes
occidentales
Vercors, Diois,
Baronnies, etc.
Massif Central
méridional
Causses
112-130 km
transit actuel
Grandes Alpes occidentales
(sud ou nord)
près de 300 km
sans transit
actue
Grandes Alpes occidentales
(sud ou nord)
TABLEAU II. – Comparaisons : DISTANCES ENTRE LES NOYAUX DE POPULATION DE GYPAETE
Gypaetus barbatus DES ALPES, LA POPULATION DES PYRENEES ET LES TERRITOIRES DES DEUX
PROJETS D’OPERATION : PREALPES OCCIDENTALES ET CAUSSES , selon que sont réalisées les deux
ou une seule.
Deux nouveaux noyaux de population dans les Préalpes du Dauphiné et dans les Causses
couperaient les quatre cents kilomètres qui, actuellement, séparent les couples des Alpes de
ceux des Pyrénées, en trois tronçons inférieurs ou égaux à deux des hiatus entre les noyaux de
populations actuels des Alpes.
La probabilité qu’un gypaète franchisse l’un de ces trois hiatus serait environ quatre à dix
fois supérieure à celle de franchir l’unique hiatus actuel de quatre cents kilomètres
(cf. tableau V ci-dessous) entre les deux chaînes. La probabilité qu’un même individu
franchisse les trois hiatus, plus faible, n’empêchera pas une réelle interconnexion générale.
Transit
Pyrénées ! Vanoise ou Mercantour
Pyrénées ! Préalpes du Dauphiné
Pyrénées ! Causses
Causses ! Préalpes du Dauphiné
Préalpes du Dauphiné ! Vanoise
…………………………ou Mercantour
Longueur
400 km
300 km - !
200 km
185 km
Par rapport à Alpes !Pyrénées actuellement
probabilité de franchissement multipliée par :
1,8
4
4,7
130 à 112 km
9,5 à 12,8
TABLEAU III. – AUGMENTATION DE LA PROBABILITE DE FRANCHISSEMENT DE CHAQUE HIATUS
DU FAIT DE NOUVEAUX NOYAUX DE POPULATION par rapport à celle de franchir les
400 km entre les couples de l’est des Pyrénées et ceux de l’ouest des Alpes internes,
distance de référence (première ligne). Toutes autres choses étant égales par ailleurs,
la probabilité varie comme l’inverse du carré de la distance.
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DEUXIEME PARTIE : UNE OPERATION DE
REINTRODUCTION DU CASSEUR D’OS Gypaetus
barbatus DANS LES PREALPES DU DAUPHINE
MERIDIONAL FAISABILITE, POTENTIALITES
La pensée tactique se meut en général dans un registre déterminé…
La pensée stratégique combine des actions variées pour un atteindre un objectif global…
Saint-Sernin in Encyclopedia Universalis
Le niveau opérationnel est, pour ainsi dire, celui d’une « stratégie locale ». En effet il tient de la tactique par
son caractère relativement local, mais de la stratégie par la coordination des moyens les plus divers pour
atteindre un même objectif : c’est le niveau minimal de la stratégie.
Cette démarche et cette échelle sont celles de cette deuxième partie qui analyse, pour l’ensemble de la zone
d’étude, les différents facteurs qui, tous, sont nécessaires pour atteindre l’objectif opérationnel : fonder un noyau
de population viable.
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Figure 10. - Délimitation de la zone d’étude, à l’extrémité occidentale des Alpes : les plus
occidentales des Préalpes et, contigu, le Dévoluy. Zone prospectée à la belle saison (sporadiquement sur sa
bordure nord-ouest) par les populations de Vautour fauve Gyps fulvus et de V. moine Aegypius monachus
des Baronnies (bassins de l’Aygues et de l’Ouvèze) et du Diois (entre Vercors et Baronnies). Leur présence
pérenne, leurs nids et ceux de Percnoptère Neophron percnopterus sont localisés au sud et à l’ouest de la
ligne
verte.
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I. FACTEURS ECO-ETHOLOGIQUES
Ecological requirements of reintroduced species and the implications for release policy: the
case of the bearded vulture de Hirzel, Posse, Oggier, Crettenand, Glenz & Arlettaz (2004)35
a fourni un outil intellectuel particulièrement efficace, par sa démarche générale et ses
fondements statistiques, pour l’analyse du rôle des facteurs écologiques. Cet article a été un
guide pour le diagnostic écologique de la zone d’étude dans son ensemble (cf. carte page
précédente), en fonction des préférences des gypaètes en phase de prospection puis lors de celle
d’installation. On l’a donc inclus in extenso dans les documents in ANNEXES I. Le lecteur y
trouvera également un exposé complet de sa méthode, de ses fondements. Il aurait été
prétentieux et superflu de les paraphraser. D’abondantes citations mettent en évidence les
facteurs écologiques les plus significatifs pour le présent travail.
A. - BIOTOPE
1. Les critères de sélection
« Extrapolated to the whole Alpine range, these findings might explain both the current
distribution of the subadult/adult population and the absence of breeding records for bearded
vultures around release sites in landscapes dominated by silicate substrates. As reintroduced
bearded vultures tend to be philopatric, we suggest that population restoration would be
more efficient if releases were concentrated within large limestone massifs. Restricting
reintroduction efforts to these landscapes would potentially enhance survival rate, by
increasing the attachment of birds to areas with the most suitable habitats, and by reducing
the risks inevitably encountered by immatures during dispersal. » Hirzel et al.
OPTIMUM GEOMORPHOLOGIQUE : LES GRANDS MASSIFS CALCAIRES
La zone d’étude cumule les conditions favorables :
a. - ABONDANCE DE CAVITES EN FALAISE, très favorables à la nidification « in comparison,
marl, metamorphic and crystalline (silicate) landscapes do not offer so many favourable
breeding sites. » Hirzel et al. ;
b. - EBOULIS POUR LE CASSAGE DES OS : « within silicate-stone areas, where screes are
much scarcer and consist mainly of large blocks among which fragments would be difficult
to retrieve; they also retain humidity, making them easily colonized by plants. Margalida
& Bertran (2001) have demonstrated that ossuaries are of importance to the bearded
vulture, especially during the breeding period when parents have to prepare delicate food
items for the growing chick. » Hirzel et al. ;
c. - AEROLOGIE : « limestone topography offers the best thermal conditions for this large
raptor (with a c . 2·70 m wingspan), which seems to be of prime importance to bearded
vultures (Haller 1983) » Hirzel et al.
35
Référence abrégée dans les pages qui suivent : « Hirzel et al. ».
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© Guillaume Laget - http://www.tetras.org/
Photo 2. – Géomorphologie très favorable : falaises calcaires et éboulis ; ici dans le Dévoluy.
Photo C. COTTON, ASTERS site <www.gypaete-barbu.com>
Photo 3. – Quelle que soit la géomorphologie… ce juvénile doit apprendre qu’il ne peut avaler une
homoplate (trop large), ni la briser (rapport surface/masse trop élevé, freinant la chute).
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2. Un vaste ensemble géomorphologiquement optimal
LES MASSIFS LES PLUS OCCIDENTAUX DES PREALPES, Vercors, Diois, Haut-Diois,
Baronnies36 et les reliefs37 du Trièves4 occidental, contigus, constituent un vaste ensemble
calcaire38 de 5300 km2 dont la continuité n’est rompue par nulle grande vallée, cluse, zone à
forte densité humaine, etc. Plus à l’est Dévoluy, Champsaur, Gapençais, Trièves offrent
également des falaises calcaires, surtout urgoniennes dans le Vercors, en majorité tithoniques
dans le Diois et les Baronnies. Seuls les 720 km2 du Dévoluy ont été inclus dans la zone
d’étude, car parois et éboulis y sont moins abondants dans les trois autres (où L’Aigle royal
Aquila chrysaetos niche néanmoins). Quasi-contigu au Diois Préalpes, le Dévoluy, depuis des
années est prospecté régulièrement par la population de Vautour fauve des Préalpes
occidentales à la belle saison39, montrant son étroite connexion fonctionnelle avec elles pour
les grands Rapaces charognards. Sa position géographique en fait un relais privilégié en direction des
massifs internes que les vautours des Préalpes occidentales ont commencé à découvrir en 2006 (Couloumy, Parc
National des Ecrins, in litt.).
LA ZONE D’ETUDE
2
DEPASSE 6000 KM , RICHES DE PLUS DE 700 KM DE FALAISES,
CORRESPOND PARFAITEMENT AUX PRECONISATIONS DE HIRZEL & AL.,
Photo
R.
MATHIEU , Observatoire de
la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 4. – Sud de la zone d’étude : Baronnies, Saint May.
36
Référence : les districts naturels des mêmes noms in Lebreton P. et al. 1976 CORA.
Inclus dans les limites administratives du Parc Naturel Régional du Vercors, de même que le nord du
Diois et une notable fraction du Haut Diois.
38
Dans l’ouest du Diois, une zone à grès explique la présence très locale de végétaux calcifuges,
Châtaignier Castenea sativa inclus.
39
De même que le Vercors. Le reste de l’année, l’aire prospectée est environ deux fois plus réduite :
Diois et Baronnies.
37
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Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 5. – Sud de la zone d’étude : Baronnies, gorges de Trente Pas.
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a
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
b
Photo C.TESSIER, Ass. Vautours en Baronnies
Photos 6. – Sud de la zone d’étude : Baronnies
6a Gorges de Pommerol (en haut)
6b Montagne de Raton (en bas) d’où provient l’une des trente données de Gypaète Gypaetus
barbatus dans la zone d’étude (cf. infra),
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Photo B. DE MENTEN
Photo 7. – Centre de la zone d’étude : Diois, vue vers le nord sur le Vercors à l’arrière-plan.
……………
Confins des Préalpes du sud et du nord.
Photo G. GRASSI
Photo 8. – Centre de la zone d’étude : Diois, vue vers l’ouest sur la Montagne de Couspeau et l’est du
massif de Saou (Trois Becs) cf. détail photo 10. Deux des trente données de Gypaète Gypaetus
barbatus dans la zone d’étude proviennent du versant masqué de ces deux massifs.
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Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 9. – Centre ouest de la zone d’étude : Diois, bassin de la Roanne.
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Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 10. – Ouest de la zone d’étude, versant sud du massif de Saou.
Des trente données de Gypaète Gypaetus barbatus dans la zone d’étude, la seule d’un individu identifié
Argentera (cf. infra photo 33) provient de ce site.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 11. – Centre de la zone d’étude, confins Vercors - Diois,
vus de la vallée du Quint. Voir aussi infra photo 47.
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Photo B. DE MENTEN
Photo 12. – Nord-ouest de la zone d’étude, bordure nord-ouest du Vercors.
Photo 13. – Nord-est de la zone d’étude, nord du Vercors nord,
Photo B. DE MENTEN
Montagne de Lans.
Photo B. DE MENTEN
Photo 14. – Est de la zone d’étude, bordure orientale du Vercors,
vue du nord - nord-est.
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Photo M. DELAMETTE, Parc Naturel Régional de Chartreuse
Photo 15. – Est de la zone d’étude vue à partir du Vercors oriental sur le Mont Aiguille (au premier plan),
butte -témoin des Hauts Plateaux du Vercors.
À l’arrière-plan : le Dévoluy.
Photo O. DAYE
Photo 16. – Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy, du refuge de Rochassac.
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Photo J.-B. STROBEL
Photo 17. – Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy, hauteurs du Riou froid,
Lus-la-Croix-Haute.
© Guillaume Laget - http://www.tetras.org/
Photo 18. – Extrême est de la zone d’étude, Dévoluy. Petites Charances, Rougnou,
Grand Ferrand.
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3. Taux de boisement
Haut-Diois
Diois
Baronnies
Dévoluy
2
3
2
1
2
2
2
3
TABLEAU IV. – Taux de boisement : 0 = absent, 1 = mineur, 2 = moyen, 3 = majeur - Lebreton et al.
Feuillus
Résineux
Vercors
2
3
Trièves
3
2
Le taux de boisement de la zone d’étude est élevé pour l’Europe occidentale : globalement
supérieur à 50%, localement 65% voire plus, mais :
a. - LE GYPAETE PEUT EXPLOITER DES HABITATS A VEGETATIONS FORT DIVERSES
J.-F. Terrasse souligne que, si « toute une littérature associe le gypaète avec les hauts
sommets enneigés et les glaciers », en fait « la végétation rencontrée est (très) variable… :
maquis et garrigues méditerranéens, forêts plus ou moins dégradées de feuillus et de
conifères de l’étage montagnard, landes, pelouses et steppes au-delà ». Dans les Alpes « Our
data show that bearded vultures tended to visit areas at lower altitude and with a higher
forest cover than expected…The non-avoidance of forest at a regional scale might seem
peculiar as bearded vultures tend to prefer open habitats in most of their range. In central
Valais, however, because of the dry climate (Valais is the driest area within the Alps) and
nature of the geological substrate, woodlands consist most often of small scattered trees and
shrubs; they are thus readily accessible to bearded vultures…In central Valais, bearded
vultures are often seen flying over sparse forests covering steep slopes, in search of carcass
remains; they can land among scattered trees and shrub, or on rocky outcrops, walk several
dozens of metres on forest ground to reach a carcass (R. Arlettaz, personal
observations) » Hirzel et al. Les boisements de la majeure partie de la zone d’étude offrent
des conditions analogues et même probablement plus marquées : la concentration d’une
grande partie des précipitations, violentes mais courtes, et de longues périodes sèches
accentue le caractère xérique de la végétation, ce que ne traduit pas leur volume annuel
global40. Celui-ci varie d’autour de 900 mm (Diois, Baronnies) à environ 1000-1100 mm (HautDiois, Dévoluy, majeure partie du Vercors), localement plus 1400 mm (certaines stations du Vercors).
b. - AIGLE
ROYAL ET VAUTOUR FAUVE PROSPERENT DEJA DANS LA ZONE D’ETUDE, LE
RETOUR DU PERCNOPTERE ET DU VAUTOUR MOINE Y EST EN COURS :
Aigle royal Aquila chrysaetos : cinquante à soixante couples ;
Vautour fauve Gyps fulvus : par réintroduction depuis 1996. Lors du maximum de la belle
saison approximativement 400 individus ont séjourné dans la zone d’étude ( " 117 ensemble
mais >130 bagues lues et ! 2/3 d’oiseaux sans bague). En 2006, cinquante-cinq couples ont pondu,
en 2007 64 ou 65, en 2009 : 120 couples. Le 11 octobre 2008, une curée à 225 dans un
alpage du sud du Vercors (Chironne) ;
Percnoptère Neophron percnopterus : retour local spontané à partir de la population
méditerranéenne française induit par la réintroduction de l’espèce précédente :
- 2000 : première reproduction, dans les Baronnies ;
- 2007 : trois couples, deux dans les Baronnies ont élevé chacun un jeune ; le troisième à Chamaloc
(nord du Diois) nicheur très probable, succès inconnu ;
- 2008, 2009 : trois couples, 2 dans les Baronnies, le troisième « déménagé » à 15 km dans le SO
du Vercors, ont élevé chacun un jeune. Jeunes à l’envol : m = 1,00/couple/an, s = 0,378, n = 15
40
C’est la distribution des précipitations qui distingue entre eux les climats tempérés non arides plus que
leur volume annuel : au sud de la zone d’étude, les Baronnies, à végétation et climat méditerranéens, reçoivent
annuellement plus d’eau que les Pays-Bas, à climat océanique.
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Vautour moine Aegypius monachus : estive depuis 2000 à partir de la population
réintroduite dans les Causses, surtout aux confins du Diois et du Vercors, dans une zone
englobant l’emplacement préconisé pour le taquet. Depuis le début de la réintroduction dans
les Préalpes (2004), vu toute l’année dans la zone d’étude :
2006 : première aire commencée en août, dans les Baronnies. Au moins dix-neuf individus provenant
des Baronnies, du Verdon et des Causses.
2007 : deuxième couple, dans les Baronnies 41 ;
2009 : trois couples ont pondu. Un quatrième semble s’installer à Chamaloc (Diois).
Photos P. LOQUINEAU Jonchères 12 mai 2005
Photo19a. – Curée à trois espèce de vautours en zone semi-boisée, Diois central.
Photo 19b. – Percnoptère Neophron percnopterus,
Vautour moine Aegypius monachus (marqué).
41
Idem et ibid.
Comme le premier :mâle lâché dans les Baronnies, femelle née dans les Causses.
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Photo 19c. –Vautour fauve Gyps fulvus.
Idem et ibid.
Photo 19d. - Vautour moine Aegypius monachus,
Idem et ibid.
Vautour fauve Gyps fulvus peu visible.
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Photo J. BRUEZIERE
Photo 20. – Gypaète et forêt dans la vallée du Rhône helvétique,
vers 1000 m d’altitude, Roche, 25-26 décembre 2003.
UN COUVERT FORESTIER QUI N’A EMPECHE NI AIGLE ROYAL NI VAUTOUR
FAUVE DE PROSPERER NE SAURAIT GENER LE GYPAETE,
dont l’aptitude à exploiter boisements clairs et trouées de forêts denses est plus à rapprocher
de celle du Vautour moine que de celle du Vautour fauve.
B. - RESSOURCES ALIMENTAIRES
Dans les Alpes Hirzel & al. ont mis en évidence statistiquement le rôle majeur pour le
retour du Gypaète joué par trois Ongulés, deux sauvages : le Bouquetin Capra ibex, le
Chamois Rupicapra rupicapra et un domestique : le Mouton Ovis gmelini f. aries. On a
donc porté une attention particulière à ces espèces dans la zone d’étude, à leur situation
actuelle et à leur avenir prévisible.
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1. Le bouquetin CAPRA IBEX, en plein développement n’est qu’au début de son
retour dans la zone d’étude.
Le rôle singulier de la présence du Bouquetin pour l’installation du Gypaète a été perçu par
les naturalistes de terrain observant l’espèce. Il explique probablement en grande partie
l’installation spontanée de plusieurs couples de gypaètes en Vanoise, massif où aucun n’a été
lâché mais qui concentre près de la moitié des effectifs français de Capra ibex. En Valais,
cette corrélation a été statistiquement mise en évidence par Hirzel & al. :
« During the prospecting phase (1987–94, mostly immature birds), the most important
variable explaining bearded vulture distribution was ibex biomass. » Prépondérante en
phase de prospection, la présence du Bouquetin en phase d’installation reste active pour
expliquer celle du Gypaète, alors à égalité avec du Mouton domestique (cf. tableau 2 et 3 de Hirzel
et al. in ANNEXES I ).
En dépit de l’abondance de biotopes potentiels dans toute la zone d’étude, qui ont tous fait
l’objet d’études de faisabilité de réintroduction (Choisy 1992, 1995 et, pour le Dévoluy,
Villaret 1987) qui mériteraient une actualisation (envisagée pour le département de la Drôme,
J. Traversier, CORA, comm. or. pers.), seul le Parc Naturel Régional du Vercors est passé à la
réalisation.
350
300
250
200
150
100
50
0
1989 1990
1995 1996 1997
2000
2002 2003 2004 2005
Figure 11. – Bouquetins Capra ibex dans l’est du Vercors : une croissance des effectifs
encore exponentielle. 1989-90 : lâchers, puis comptages de fin d’année = somme des
effectifs des populations des falaises des bordures méridionales et orientales de la Réserve
Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors + le prolongement au nord des secondes. "2 p > 0,05
7 ddl. Le comptage de 2000, échoué, n’est pas pris en compte dans l’ajustement exponentiel (courbe).
Si les deux populations de l’est du Vercors issues des vingt-huit individus lâchés en 1989-90
sont encore d’effectifs modestes (339 comptés en décembre 200542), elles sont en
augmentation soutenue (cf. figure page précédente). Le développement des effectifs est encore
dans la phase exponentielle. Sauf transition prochaine vers le modèle logistique, l’effectif de
cinq cents devrait être atteint actuellement et celui d’un millier entre 2010 et 2015. De vastes
portions de ces deux biotopes restent à peupler. Habituelle une quinzaine d’années après
42
C’est un minimum : les biotopes n’ont pu être couverts dans leur intégralité et l’on n’a pas la prétention
d’avoir été totalement exhaustif dans les zones couvertes.
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lâcher (Nievergelt), la phase de colonisation de nouveaux sites est nette depuis 2006.
Pour le Gypaète, les ressources fournies par le Bouquetin augmentent donc continuellement
au fil des ans : en masse comme en aire de répartition.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 21. – Bouquetin Capra ibex dans la zone d’étude en début de rut, 26 octobre 2005,
alpage en bordure des falaises orientales des Hauts Plateaux du Vercors.
Un troisième noyau de population dans les falaises du Royans, au nord-ouest du Vercors,
(lâchers de 2000-02 par le Parc Naturel Régional du Vercors) en tout début de développement, non pris
en compte dans les potentialités actuelles doit être mentionné pour le long terme.
La protection intégrale du Bouquetin en France, en tous lieux et en tout temps,
maximalise son intérêt pour les Vautours en général, Gypaète en particulier : en effet,
les animaux n’étant pas prélevés, leurs cadavres restent totalement disponibles pour les
grands charognards. IL EST SIGNIFICATIF QUE LE BOUQUETIN, LE MOINS REPANDU DES
ONGULES SAUVAGES DANS LA ZONE D’ETUDE, SOIT CELUI QUI AIT FOURNI LE PLUS DE
DONNEES DE CUREE DE VAUTOURS FAUVES, SUIVI PAR LE CHAMOIS alors que Sanglier et
Chevreuil sont bien plus abondants. LA CORRELATION SPATIALE AVEC LES DONNEES DE
GYPAETE EST MANIFESTE cf infra carte figure 12.
2. Le chamois ; Rupicapra rupicapra
Les observations naturalistes dans les Alpes et les Pyrénées montrent que les Rupicapra sp.
(Chamois ici, Isard là) fournissent une part très notable de l’alimentation du Gypaète pour
des raisons analogues à celles du Bouquetin : habitat rocheux maximalisant la probabilité
de détection des cadavres et facilitant le cassage des os. « During both prospecting and
settling phases bearded vultures preferred areas with a higher density of ibex and sheep,
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although there was no link with the presence of chamois, another important source of food for
bearded vultures in the Alps. However, chamois are abundant ( c. 17 000 individuals) and
widespread in Valais, where they inhabit a broader habitat spectrum and a wider altitudinal
range than ibex ( c. 5000 individuals); it is thus possible that a ‘chamois effect’ could not be
detected because there was little variation in the abundance and distribution of this
ungulate. » Hirzel et al. La sous-estimation statistique du rôle du Chamois pour le Gypaète est
donc un artefact dû à sa distribution bien large dans l’espace montagnard : l’espèce est
beaucoup moins spécialisée que le Bouquetin par rapport à la géomorphologie (cf. Choisy 1990).
Dans la zone d’étude :
- jusqu’aux années 1970, le Chamois était réduit par la chasse à de pauvres restes (moins
de deux cents dans le département de la Drôme, soit les trois quarts de la zone d’étude) survivant dans les sites
les moins accessibles et ceux, rares, où il n’était pas chassé (propriétés domaniales,
départementales ou même privées : massif de Saou).
- actuellement l’espèce est présente des plus hauts reliefs jusqu’aux les plus bas.
Photo O. DAYE
Photo B. BLACHE
Photos 22. – Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra dans la zone d’étude :
en altitude : étages subalpin et localement, alpin, dans l’est.
Les populations de Chamois des pelouses alpines cohabitent avec le Lagopède Lagopus
mutus, celles de moyenne montagne avec des espèces plus répandues, dans des habitats de
couvert ligneux fort divers, mais toujours avec pentes et rochers présents ou proches.
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Nord-est. Eboulis
Photo B. VEILLET, AVENIR Conservatoire des Espaces Naturels de l’Isère
Sud-ouest.
Buissons, arbustes
pente
sur
Photo R. MATHIEU,Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photos 23. – Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra dans la zone
d’étude : moyenne montagne, étage montagnard et haut du collinéen.
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D’autres populations, enfin, se sont reconstituées par recolonisation spontanée jusqu’à l’étage
méditerranéen, parmi les oliviers Olea europaea, chênes verts Quercus ilex, etc., côtoyant
Fauvettes mélanocéphale Sylvia melanocephala, Pitchou S. undata, etc.
Etage collinéen
supraméditerranéen
Chêne blanc
Quercus pubescens,
Buis
Buxus
sempervirens,
Euphorbia
(derrière le
etc.
characias
chamois),
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Etage
méditerranéen
Olivier
Olea europaea ; etc.
Photo C.TESSIER, Ass. Vautours en Baronnies
Photos 24. – Omniprésence actuelle du Chamois R. rupicapra dans la zone d’étude, en
basse montagne jusqu’à l’étage méditerranéen.
Populations installées et non pas individus isolés ni erratiques.
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Le Chamois s’installe et prospère dans la zone d’étude d’au-dessus de 2800 m. (au moins en été)
à aussi bas que cent cinquante mètres d’altitude (toute l’année) partout où il trouve pente et
rocher… si la pression de chasse ne l’interdit pas. Localement, les densités sont extrêmement
variables sans autre cause que des prélèvements cynégétiques nuls, modérés, supportables ou
très excessifs. Ceci en fonction essentiellement des attributions, car l’époque du braconnage
généralisé est révolue. Des disparités locales marquées correspondent à des attributions ici
excessives, là modérées ou…tempérées par les difficultés d’accès.
Globalement, la zone d’étude reste encore largement sous-peuplée : en Valais (Arlettaz R.
1996) plus de quatorze mille chamois, soit environ deux fois et demie plus, vivent sur une aire
trois fois plus petite… Néanmoins, des effectifs de CINQ A SIX MILLE CHAMOIS suffisent
déjà à assurer des ressources conséquentes au Gypaète dans l’ensemble de la zone
d’étude. Que, en dépit d’une remarquable restauration, l’espèce soit encore très loin d’y avoir
réalisée ses potentialités démographiques permet d’espérer que la situation s’améliore encore
beaucoup. Dans les quelques zones où le Chamois n’est pas chassé, les cadavres sont tous
disponibles pour les Vautours, Gypaète inclus.
3. Le mouton ; Ovis gmelini f. aries
« Le pastoralisme (essentiellement ovin) reste une activité dynamique avec un effectif
dépassant largement les cent mille têtes » écrivent Tessier, Henriquet & Eliotout dans l’étude
de faisabilité de la réintroduction du Vautour moine, à propos d’une zone d’étude identique à
l’exception du Dévoluy. Les effectifs présents dans la zone couverte par le présent travail
sont donc encore supérieurs.
L’augmentation des ressources alimentaires estivales lors de la mise en alpage d’une fraction
des cheptels locaux et à l’arrivée des transhumants (plusieurs dizaines de milliers, surtout moutons)
est telle qu’elle induit une baisse notable de fréquentation des charniers par les vautours. Les
charniers restent alors parfois jusqu’à dix jours sans être rechargés.
Photo E. BELLEAU
Photo 25. - Curée de vautours fauves Gyps fulvus sur cadavre de brebis à grande
distance des charniers Col d’Hurtières, près de la Salette, Mateysine (Isère) 18/08/06.
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Disponibilité dans l’espace élevée : dans la nature, contrairement à celles du Sanglier et des
Cervidés, les charognes de brebis (et de bétail en général) gisent en grande majorité dans des
habitats ouverts. Elles sont donc bien plus souvent accessibles au Gypaète.
Disponibilité dans le temps très saisonnière : leur abondance est très fluctuante selon les
saisons, minimale en hiver quand les alpages sont désertés, maximale pendant l’estivage des
transhumants.
4. Autres ongulés Ungalata
« A l’exception du daim, tous les autres ongulés sauvages43…sont présents (sanglier,
mouflon, chevreuil, chamois, cerf et bouquetin) avec des potentialités (d’augmentation) encore
fortes…pour les quatre dernières espèces. La densité de mammifères de taille moyenne peut
être localement importante (lièvres, lapins, renards, marmottes et grands mustélidés…).
Le retour spontané du loup signe la richesse du milieu en proies disponibles dont la taille
correspond à celles figurant dans le régime alimentaire des rapaces nécrophages. » Tessier,
Henriquet & Eliotout.
CERF
Environ trois mille deux cent individus. Tend à coloniser une fraction croissante de la zone
d’étude ;
MOUFLON
Une option gestion, très justifiée pour une espèce exotique malencontreusement introduite, en
a réduit les effectifs actuels à environ trois centaines.
CHEVREUIL, SANGLIER
Les tableaux de chasse annuels de chacune de ces deux espèces sont compris entre cinq et dix
mille animaux. Compte tenu des connaissances générales de la dynamique des populations exploitées de ces
Ongulés, les effectifs peuvent très approximativement être estimés, en ordre de grandeur, sous l’hypothèse d’une
situation approximativement stabilisée (en dépit d’éventuelles fluctuations notable à plus court terme) :
- Sanglier : avant ouverture de la chasse : double de ceux du tableau ; à la fermeture analogues au tableau.
Toutefois ces dernières années ont vu, du fait d’options de gestion de chasse, une baisse très notable des
effectifs sur le seul territoire du PNR du Vercors (Jouanny) : modification d’occupation de l’espace sans
effondrement global ;
- Chevreuil : l’effectif avant et après la saison de chasse est de l’ordre de, respectivement trois ou quatre fois le
tableau de chasse avant ouverture de la chasse, deux ou trois fois après fermeture.
Sanglier et Chevreuil ont des effectifs globaux supérieurs à ceux de Bouquetins, Chamois et Mouflons. Mais
leurs cadavres gisent beaucoup plus souvent sous un couvert ligneux trop dense pour qu’ils soient détectés par
les Vautours, Gypaète inclus. C’est cependant une ressource, qui doit être mentionnée bien qu’on ne puisse
quantifier sa contribution à l’ensemble des ressources potentielles pour le Gypaète.
BETAIL
Outre les importants effectifs transhumants (cf. § MOUTON), la zone d’étude héberge des
cheptels pérennes dont le Mouton constitue près des deux tiers.
Bovins
Equidés
Chèvres
Brebis
Porcins
Total
11 508
2 334
17 731
58 877
409
90 859
TABLEAU V. – Cheptels domestiques non transhumant dans les trois quarts de la zone d’étude :
sa partie située dans le département de la Drôme. RGA de 2000, D.D.A.F. de la Drôme
43
Actuellement présent dans les Alpes, autochtones ou introduits.
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5. Loup ; Canis lupus , Lynx ; Lynx lynx
Les grands prédateurs apportent une contribution importante à la disponibilité de
cadavres d’Ongulés sauvages pour les charognards. Ceci est particulièrement perceptible
lors du retour de grands Carnivores dans des territoires d’où ils avaient été éliminés. Par
exemple :
- Lynx en Suisse : « in several areas such as game reserves, ungulates are numerous in forests in winter; this is
also where lynx L. lynx hunt, providing additional carcasses. » au profit du Gypaète (Hirzel et al.).
- Loup aux USA : Wilmers, Getz et al (2003a, 2003b, 2004, 2005) ont mis évidence le rôle de l’espèce pour les
charognards (Oiseaux et Mammifères), particulièrement en période de ressources minimales en fin d’hiver.
Or, Lynx et Loup ont atteint la zone d’étude, respectivement à partir de la Suisse et de
l’Italie, particulièrement dans le Parc Naturel Régional du Vercors. Ce dernier hébergeant
deux des trois meutes de loups présentes fin 2008 dans la zone d’étude dont la plus ancienne
et la moins réduite dans ses hautes régions. L’étude du régime alimentaire du Loup au
Mercantour (comm. or. lors d’un colloque) montre que le Bouquetin, par son habitat, reste
quasiment hors d’atteinte, alors que le Chamois fournit une part essentielle de ses proies. Le
Loup augmente a fortiori les disponibilités en charognes de Cervidés et Sanglier (très peu
présents au Mercantour), dont les habitats sont encore plus accessibles pour lui que celui du
Chamois. La preuve en est beaucoup plus difficile à apporter que pour les curées de vautours
fauves et vautours moines sur brebis en alpage tuées par loups : quand les vautours ont
nettoyé une carcasse, identifier la cause de la mort est impossible.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 26. – Cerf bramant dans le sud de la zone d’étude, Baronnies.
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La cause de la mort des Ongulés sauvages consommés par les vautours (bouquetins et surtout
chamois) dans la zone d’étude n’a donc pu être déterminée jusqu’à maintenant, sauf un cerf à
Chamaloc (Diois) : par balle44. Car on doit s’abstenir de perturber les curées de vautours, que
ce soit sur animaux sauvages ou domestiques, sauf nécessité absolue. Pour le bétail, s’il y a
suspicion d’attaque par Loup, les nécessités de constat pour éventuelle indemnisation font
examiner la charogne. Cette différence explique que, dans la zone d’étude, on dispose pour le
bétail de preuves de curée de vautours sur proies de loups, alors qu’elles sont encore attendues
pour les Ongulés sauvages.
Photos A. BULTINGAIRE
Photos 27 . – Curée sur brebis en estive tuées par loups : vautours fauves Gyps fulvus et
vautours moines Aegypius monachus à proximité immédiat des sites de lâcher
préconisés pour le Gypaète Gypaetus barbatus, dans le sud de la Réserve Naturelle
des Hauts Plateaux du Vercors, juin 2005 (vers la Croix du Lautaret).
Le Loup vivant essentiellement d’Ongulés sauvages c’est néanmoins une certitude rationnelle
que son retour augmente les disponibilités alimentaires de cette origine pour les
charognards.
44
Des chasseurs ont aussi observé des vautours fauves arrivant sur chamois ou sangliers abattus par eux.
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6. Charniers à vautours
A Rémuzat (nord des Baronnies) et à Chamaloc (nord du Diois en bordure du Vercors) des charniers
sont approvisionnés toute l’année pour Vautour fauve, Vautour moine et Percnoptère. Si
besoin était, ils offriraient pour le Gypaète une « assurance trophique » à la mauvaise saison.
On connaît le rôle joué par la fourniture de telles ressources complémentaires dans la
restauration de la population de Gypaète des Pyrénées.
C. – CLIMAT
« L’altitude importe peu, le gypaète étant présent du niveau de la mer (en Corse, en Crète et
même dans la dépression de la Mer Morte) jusqu’au massif de l’Everest. Il peut supporter un
climat continental froid (en Asie centrale)…la pluviométrie importe peu, bien qu’elle puisse
être un facteur défavorable pendant la reproduction : les montagnes soumises à la mousson
dans l’Himalaya, les Pyrénées occidentales ou le Caucase avec une forte pluviométrie, les
hauts plateaux éthiopiens au taux d’humidité important peuvent être de bons habitats, comme
les montagnes subdésertiques de l’Atlas, du Yémen ou de l’Altaï » (Terrasse). L’importance
des précipitations et de la nébulosité expliquerait au moins en partie la relativement faible
productivité des couples des Pyrénées occidentales, sans suffire néanmoins à empêcher
l’espèce de prospérer dès lors que nourriture et protection lui sont assurées. Dans les Alpes
orientale, un climat particulièrement plus rude en hiver provoque un mouvements saisonniers
des individus non nicheurs vers le versant sud de la chaîne, singularité par rapport aux Alpes
occidentales.
Bioclimatiquement, la zone d’étude appartient surtout aux Alpes occidentales méridionales.
Seuls le Dévoluy, le haut Vercors et le haut Diois, soit bien moins de la moitié de la zone
d’étude, subissent un enneigement relativement important et durable (qui tend à diminuer au fil des
décennies. Caractéristique particulièrement favorable à la prospection alimentaire par toutes les
espèces de vautours, Gypaète inclus, le nombre de jours de brume est, dans la zone d’étude,
beaucoup plus réduit que plus au nord dans les Alpes. Ceci à la seule exception du Vercors
qui, sauf sa frange sud et son coin sud-ouest appartient déjà aux Préalpes du nord. Etages de
végétation et essences dominantes.
Étages représentés dans la zone d’étude, distribution par massifs :
- alpin : en Dévoluy et sur les crêtes les plus hautes de l’est du Vercors ;
- subalpin, à Pin-à-crochet Pinus uncinata. Non représenté dans les Baronnies et, sauf ses
crêtes orientales, le Diois ;
- montagnard à boisements mésophiles de Hêtre Fagus silvatica. Le Sapin Abies pectinata,
répandu dans le Vercors, est très localisé ailleurs ;
- collinéen de la série supra-méditerranéenne du Chêne blanc Quercus pubescens45, avec
nombreuses espèces méditerranéennes46 ;
- méditerranéen : dans les Baronnies, où passe la limite septentrionale de l’Olivier. L’ouest
de ce massif (Nyonsais) est la région la plus ensoleillée de France.
Seul, le Vercors, à l’exception de son sud-ouest et de sa bordure méridionale, a un climat
45
Des pins Pinus dominent souvent localement dans les étages collinéens et montagnards :
P. sylvestris (essence pionnière, durablement présente sur les substrats les plus défavorables ou/et dans les zones
les plus sèches) P. nigra austriaca (largement introduit par les forestiers). Inversement, la série du Rouvre
Quercus petraea (= sessiliflora) est limité à la bordure collinéenne nord et nord-ouest du Vercors.
46
Juniperus phoenicea, Spartium junceum, Genista scorpius, Dorycnium suffruticosum, Catananche
caerulea, Aphyllanthes monspessuliensis, etc. et, plus, localement Pinus halepensis, Quercus ilex, Juniperus
oxycedrus, J. thurifera, etc.
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montagnard arrosé analogue à celui de la Chartreuse et autres Préalpes du nord.
Bien que n’étant pas déterminant pour la présence du Gypaète, LE CLIMAT DE LA ZONE
D’ETUDE EST DONC GLOBALEMENT TRES FAVORABLE : au niveau tant de la survie hivernale
que du taux de réussite de la reproduction. Ceci ne peut qu’être un avantage pour la
dynamique de population locale.
CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse :
Les habitats favorables abondent, notamment falaises et éboulis calcaires.
Les importantes populations d’Ongulés sauvages, présentes toute l’année, resteront
essentielles pour le Gypaète, notamment à la mauvaise saison.
Le retour du Lynx et surtout du Loup augmente certainement la disponibilité en charognes de
Sanglier, Chamois, Mouflon, Cerf et surtout de Chevreuil.
Chamois et surtout Bouquetin, partout particulièrement favorables pour le Gypaète du fait de
leurs habitats rupestres, le seront encore plus dans la zone d’étude du fait de son fort taux de
boisement. Cette prépondérance minimise les conséquences pour le présent travail d’une
estimation moins précise des effectifs de Chevreuil et de Sanglier.
La mise en alpage du bétail local, diversifié et l’arrivée des transhumant, à forte
prépondérance d’ovins, offre à tous les charognards un maximum estival des ressources
alimentaires dans la nature. Dans le cycle annuel de reproduction du Gypaète, il se situera de
la fin de l’élevage au nid à la dispersion des juvéniles. Ce maximum trophique sera donc
extrêmement favorable au succès de l’élevage comme à celui de l’émancipation des jeunes
oiseaux inexpérimentés ainsi qu’à leur taux de survie au cours de cette phase vulnérable.
Ceci qu’ils s’envolent d’une aire ou d’un taquet.
Les charniers fréquentés par Vautour fauve, Vautour moine et Percnoptère offrent une
sécurité supplémentaire en cas de disette temporaire. Ils sont d’ailleurs exploités
occasionnellement par Milan noir Milvus migrans, Milan royal M. milvus et, parfois, Aigle
royal Aquila chrysaetos. On y a déjà vu deux Pygargues Haliaetus pygargus et un…Aigle des
steppes Aquila rapax (Tessier, assoc.Vautours en Baronnies) !
Toutefois, il convient de souligner que, malgré une pression d’observation très élevée, aucune
des trente données de Gypaète dans la zone d’étude, une seule (mai 2008) provient d’un site
de charnier, sans qu’on l’ai vu s’y poser. Ceci tend à confirmer l’importance dans le milieu
naturel de la zone d’étude des disponibilités alimentaires pour le Gypaète.
LA ZONE D’ETUDE OFFRE A LA REINTRODUCTION DU GYPAETE :
- VASTE HABITAT OPTIMAL ;
- SECURITE ALIMENTAIRE : DEJA ASSUREE ET CROISSANTE.
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II. IMPACT DES ACTIVITES HUMAINES
Une densité humaine remarquablement faible47 pour l’Europe occidentale (même lors de
l’augmentation relative lors de la saison touristique estivale concentrée sur les mois de juillet et d’août) est
indiscutablement un contexte favorable au retour de la grande faune.
Ce facteur favorable ne saurait suffire : dans le passé comme de nos jours, les exemples
abondent de grande faune exterminée en dépit d’une densité humaine très faible, qu’il s’agisse
d’excès de prélèvements cynégétiques ou bien de destruction de “nuisibles” ou prétendus
comme tels.
A. – DESTRUCTIONS DIRECTES
Dans la zone d’étude, le maximum de densité humaine se situe au milieu du XIX° siècle. Or,
c’est au cours des cent années suivantes que l’extermination de la grande faune (dont l’Ours et le
Loup) y connaît son paroxysme et ce, en dépit d’un effondrement de la densité humaine.
Jusqu’aux années 1960 incluses, observer un seul Ongulé restait une expérience rare et
mémorable, à l’exception des stations les plus difficiles d’accès ou encore de très rares
territoires hors chasse, parfois au bénéfice d’une seule espèce, généralement le Chamois.
Quelle que soit la densité humaine, le retour général de la grande faune dont a bénéficié la
zone d’étude48 aurait été impossible sans une prise de conscience en faveur de la protection
de la nature, de la conservation et de la restauration de la biodiversité et, pour les espèces
chassées, de la nécessité de gérer les prélèvements. Ceci avec une très réelle amélioration de
la perception de la faune en général, des grands Rapaces en particulier et des
comportements son égard, du respect effectif de la protection légale de ces oiseaux par la
grande majorité, chasseurs ou non. On le doit à l’action persévérante, pendant des décennies,
de minorités, chasseurs ou non-chasseurs, initialement très faibles mais très motivées, donc
très actives. Cette action qui commence à porter ses premiers fruits dans les années 1970,
continue à se développer jusqu’à nos jours. Des photos telles que celles de bouquetins et
chamois, pages précédentes ou page suivante, traduisent une réalité actuelle qui ne pouvait
être qu’un rêve pour les générations précédentes.
L’état des populations d’Aigle royal et plus encore de Vautour fauve, le début de renouveau
du Percnoptère et du Vautour moine, montre que le poison n’est plus un problème dans la
zone d’étude.
Bien entendu, on ne peut totalement exclure le moindre acte délictueux ponctuel.
Mais la situation actuelle de l’Aigle royal, du Vautour moine, du Percnoptère et du
Vautour fauve montre que L’IMPACT DEMOGRAPHIQUE ACTUEL DES DESTRUCTIONS
DIRECTES PAR L’HOMME EST NUL OU NEGLIGEABLE. Il n’y a aucune raison de penser qu’il
en soit autrement pour le Gypaète.
B. - PERTURBATIONS
L’évolution positive de la perception de la Faune, la grande notamment, et des
comportements de l’Homme à son égard induit en retour une tolérance bien plus grande de
celle-ci à la présence et aux activités humaines, sous réserve qu’elles ne détruisent pas, ou
n’altèrent pas excessivement, leurs biotopes.
47
48
A l’exception de l’extrême nord de la zone d’éude proche de l’agglomération grenobloise.
Cf. infra § sur ce thème in quatrième partie.
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Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 28. – Chamois R. rupicapra installé à proximité de l’Homme. Impensable jusqu’aux
années 1970 : un des nombreux indices du changement radical de la perception
de la grande faune sauvage par Homo sapiens et de son comportement à
l’égard de celle-ci dans la zone d’étude. Ici, un noyau de population de vingt-cinq
chamois à 150 m. d’altitude à St Marcel-lès-Sauzet sur la bordure de la vallée du Rhône avec
Chêne vert Quercus ilex et, en bas de versant Peuplier noir Populus nigra, à quelques
centaines de mètres d’une des autoroutes les plus fréquentées d’Europe hors de la zone
d’étude stricto sensu mais en bordure.
Mais ceci n’exclut nullement qu’on puisse nuire involontairement à la grande Faune
en général, aux Rapaces rupestres et notamment au Gypaète en particulier, notamment en
perturbant sa reproduction et en la faisant échouer, d’où impact négatif sur la dynamique des
populations, voire sur leur pérennité.
1. Nature et mode d’action des perturbations
Fondé sur une approche statistique de données de terrain précises dans les Pyrénées, le travail
récent d’Arroyo & Razin (2006) “Effect of human activities on bearded vulture behaviour
and breeding success in the French Pyrenees”, est LA référence actuelle pour identifier les
causes de perturbation pouvant faire échouer la nidification du Gypaète ainsi que
comprendre leur mode d’action.
Sont particulièrement décisifs pour l’impact des activités humaines sur la nidification du
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Gypaète le NIVEAU DE BRUIT des activités, leurs DATES - dans les périodes les plus sensibles
du cycle annuel de reproduction ou hors d’elles - et la DISTANCE au site de nidification à
laquelle elles sont exercées. Sans prétendre rendre compte de la richesse de cette publication,
qu’on trouvera in extenso dans les ANNEXES I quelques citations doivent en souligner des
points majeurs :
“Very noisy activities (such as infrastructure works, motorbikes, forestry or military activities
and helicopters) seemed to be those most strongly affecting bearded vulture behaviour and
breeding success. Noise is particularly transmitted in alpine habitats, as relief provokes
echoes and increases resonance. These activities thus provoked a reaction in bearded
vultures even if far away from the nest (2 km)….These activities should, therefore, be largely
avoided around the nests in order to maximise bearded vulture productivity. where
disturbance was most important in terms of leading to failure. In the Spanish Pyrenees
breeding success was overall related to the failure during the hatching and incubation
periods (Margalida et al., 2003).”
“Breeding success was significantly negatively associated with the frequency of very noisy
activities in a territory during a breeding event, as the probability that nests were left
unattended was higher in those territories… Hunting also strongly affected bearded vulture
behaviour during the pre-laying period, as it was associated with the absence of the pair
from the territory in a significantly high proportion of cases…which may be associated with
the fact that hunting as exercised in the French Pyrenees (with groups of people) is also
potentially noisy as well as having a visual impact during the pre-laying period (October–
December).
« Very noisy activities and hunting most frequently provoked nest unattendance even when
occurring far (>1.5 km) from the nest. People on foot or cars/planes only affected bearded
vulture behaviour if close (<500–700 m) to the nest. ».
2. Évaluer l’impact des perturbations par les activités humaines a l’échelle de la
zone d’étude dans son ensemble
Une application possible des résultats du travail d’Arroyo & Razin aurait été de cartographier
dans l’ensemble de la zone d’étude les activités perturbatrices mises en évidence par elles, de
mesurer leur distance aux falaises et d’établir une carte des zones où les activités humaines ici
excluent, là autorisent le retour du Gypaète…sur la base du modèle pyrénéen.
Mais, si un modèle relatif à la faune peut avoir une haute valeur prédictive au sein de l’aire
biogéographique ayant fourni les bases factuelles de sa construction, son application
mécanique en dehors de celle-ci est plus discutable. Elle peut même induire de graves erreurs
de diagnostic.
Si on a choisi un autre mode d’appréciation globale de l’impact potentiel des perturbation
dans la zone d’étude c’est, d’une part qu’une telle application à l’identique n’était pas
pertinente dans les Alpes (cf. page suivante), d’autre part qu’une autre approche était possible,
à la fois bien plus adaptée aux réalités locales et bien moins coûteuse en temps.
a.- NE PAS TRANSPOSER MECANIQUEMENT LE MODELE PYRENEEN DANS LES ALPES,
en particulier en ce qui concerne la distance de fuite et, lorsque celle-ci est trop fréquemment
atteinte, de la disponibilité en positions de repli :
* DISTANCES DE FUITE
Dans les Pyrénées, la population actuelle est issue de gypaètes ayant survécu à des
générations de persécution, en développant un comportement d’évitement maximum de
l’Homme, comportement loin d’être entièrement surmonté, en ce qui concerne seuil de
tolérance et la distance de fuite.
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Dans les Alpes, la population actuelle est faite de gypaètes lâchés nés en captivité ou issus
de la reproduction de ceux-ci en liberté, dans un contexte de protection des Rapaces déjà
ancienne. Ils montrent, de ce fait, une tolérance beaucoup plus grande à la présence et aux
activités humaines, avec une distance de fuite beaucoup plus courte. Par comparaison avec
ceux des Pyrénées, les gypaètes des Alpes font figure d’oiseaux confiants et peu farouches
(obs. pers. et M.Terrasse comm. or. pers., comm or. lors de colloques).
LES
DISTANCES DE FUITE ETANT BIEN PLUS COURTES DANS LES ALPES (toutes autres choses
étant égales par ailleurs), IL N’ETAIT PAS POSSIBLE DE FONDER UN DIAGNOSTIC SUR CELLES
QU’ARROYO & RAZIN ONT MISES EN EVIDENCE DANS LES PYRENEES.
* POSITIONS DE REPLI
“Since the availability of high quality cliffs is low in the French Pyrenees (Razin,
2003), birds moving territories are likely to occupy lower quality ones in terms of
availability of cavities protected from weather, which may have important consequences for
bearded vulture breeding.” Arroyo & Razin.
Tout au contraire, la zone d’étude est riche en falaises calcaires49 où abondent vires,
surplombs, cavités. L’OFFRE EN SITES DE NIDIFICATION ETANT BIEN SUPERIEURE, LA
PROBABILITE QU’IL Y EN AIT DE NON PERTURBES DANS LE DOMAINE VITAL D’ UN COUPLE
EST BEAUCOUP PLUS ELEVEE DANS LA ZONE D’ETUDE QUE DANS LES PYRENEES
FRANÇAISES.
b. – DES INDICATEURS BIOLOGIQUES PERTINENTS SONT UTILISABLES
* LES NOYAUX DE POPULATION ACTUELS DU GYPAETE DANS LES A LPES
La densité humaine dans la zone d’étude est quasiment partout inférieure à 10 hab./km2 et
n’est que de 3 hab./km2 dans certains cantons, avec même sur les Hauts Plateaux du Vercors
200 km2 sans habitation permanente ni voirie (dont 85% bénéficient d’un statut de réserve naturelle).
Ceci au niveau des moyennes globales. Car en dehors des agglomérations, les densités
humaines en montagne sont encore bien plus faibles encore. La seule exception, très locale,
est l’extrême nord-est de la zone d’étude, proche de Grenoble. Marginale dans la zone
d’étude, elle se situe à une trentaine de kilomètres au nord du site retenu pour réaliser
l’opération. En outre, même elle compte quelques grands sites rupestres peu perturbés. LE
GYPAETE S’EST INSTALLE ET NICHE DANS DES REGIONS DES ALPES A DENSITES HUMAINES
BIEN PLUS ELEVEES QUE CELLES DE LA ZONE D’ETUDE. GLOBALEMENT CELLE- CI EST
DONC BEAUCOUP MOINS EXPOSEE AUX ACTIVITES HUMAINES PERTURBANTES QUE DANS LA
PLUPART DES AUTRES REGIONS DES ALPES OU LE GYPAETE EST ACTUELLEMENT
INSTALLE;
CINQ AUTRES ESPECES DE GRANDS RAPACES DIURNES (A CCIPITRIDAE) DONT TROIS RUPESTRES HABITENT
DEJA LA ZONE D’ETUDE :
Les effectifs actuels atteints dans la zone d’étude par le Jean-le-Blanc Circaetus gallicus
(commun, plusieurs dizaines de couples), l’Aigle royal Aquila chrysaetos (cinquante à soixante couples,
nichant aussi bas pour certains que 400 à 600 m. d’altitude, pour trois en bordure de route, dont une
particulièrement fréquentée) et le Vautour fauve Gyps fulvus (en augmentation rapide. En 2009 cent
vingt couples nicheurs), les retours en cours du Percnoptère Neophron percnopterus (2009 : trois
couples ; tous ayant niché avec succès) et du Vautour moine Aegypius monachus (réintroduction
commencée en 2004, 2009 : quatre couples, trois premières pontes) démontrent que L’HOMME, PAR
SON OCCUPATION DE L’ESPACE, SES ACTIVITES ET SON COMPORTEMENT A LEUR EGARD,
N’EXCLUT NULLEMENT LA PROSPERITE DES POPULATIONS DE GRANDS RAPACES DANS LA
ZONE D’ETUDE, espèces rupestres ou non.
49
Dont une fraction notable inaccessible sans longue marche d’approche.
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3. Gestion des perturbations éventuelles dans des sites précis de la zone d’étude
Que globalement la situation soit actuellement favorable ne signifie nullement que,
très localement, on doive exclure tout risque de voir se développer sur un site où nicherait le
Gypaète des activités perturbantes pouvant faire échouer sa reproduction.
Le cas échéant, on y ferait face en fonction du contexte avec des moyens adaptés, avant tout
de concertation avec les associations d’usagers de l’espace naturel, comme l’ont déjà fait,
dans la zone d’étude, le Parc Naturel Régional du Vercors et l’association Vautours-enBaronnies au bénéfice des trois autres Vautours. Alors, le travail d’Arroyo & Razin
gardera toute sa pertinence pour l’identification des perturbations, de leur mode
d’action, des périodes de sensibilité maximales. Il fournirait la base scientifique
permettant de faire face à ces problèmes en fonctions des besoins propres du Gypaète,
moyennant des adaptations au contexte local, notamment à propos des distances de fuite.
Il serait totalement prématuré de développer davantage l’analyse à propos des
perturbations laquelle, au demeurant, se situerait au niveau tactique. Dans le domaine
opérationnel, on ne saurait actuellement aller plus loin que souligner qu’il importera de rester
vigilant.
Ceci renvoie au suivi après réintroduction, qui doit être expressément prévu, et
durablement.
CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse
Dans la zone d’étude :
- les causes de perturbations potentielles n’y sont pas d’une nature singulière ;
- toutes autres choses étant égales par ailleurs, le Gypaète y sera moins vulnérable que dans
les Pyrénées française, pour des raisons tant historiques que géomorphologiques ;
- l’intensité globale des perturbations potentielles y sera inférieure à ce qu’elle est dans la
plupart des zones où l’espèce est actuellement présente dans les Alpes, peut-être dans
toutes, du fait d’une densité humaine presque partout très faible.
L’ETAT ACTUEL ET LA DYNAMIQUE DES POPULATIONS DE GRANDS
RAPACES DANS LA ZONE D’ETUDE, DONT TROIS VAUTOURS ET QUATRE
NICHEURS RUPESTRES, MONTRANT QUE LES ACTIVITES HUMAINES N’Y
EMPECHENT PAS LEUR PROSPERITE, AUTORISE UN PROGNOSTIC
ANALOGUE POUR LE GYPAETE.
III. POTENTIALITES DE LA ZONE D’ETUDE POUR UNE
POPULATION NICHEUSE DE GYPAETES
A. – LA GEOMORPHOLOGIE, FACTEUR ESSENTIEL POUR L’INSTALLATION
DU GYPAETE
« During the settling phase (1995–2001), the presence of birds (mostly maturing subadults)
correlated essentially with limestone substrates, while food abundance became
secondary…Interestingly, in the expert reports published during the preparation of the
international bearded vulture programme (Müller & Buchli 1982), emphasis for the selection
of suitable release areas in the Alps was put on wild ungulate density. Geology (although
mentioned) was considered as a secondary factor, except possibly regarding the availability
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of cavities for placing captive birds to be released just before fledging…during the settling
phase, the geological environment plays a more important role in habitat selection than the
availability of ungulate carcasses, another essential component of territory selection… As
wild ungulates are now abundant and widespread in the Alps, in contrast with the situation in
the past centuries until the extirpation of the species, they are unlikely to (as yet) represent a
limiting factor for the breeding population, as we are probably at present far below the
species’ trophic carrying capacity. Density-dependent regulation is to be expected in the
future, however. The monitoring of the spreading breeding population will tell us whether
geological constraints will continue to play a major role in the future, or whether food
requirements will further dictate spatial patterns of bearded vulture distribution within the
Alpine range. » (Hirzel et al. pour plus d’information cf. arcticle in ANNEXES I).
L’ENSEMBLE DE
GYPAETE EN
LA ZONE D’ETUDE EST DONC GLOBALEMENT TRES FAVORABLE AU
PHASE
D'INSTALLATION
(cf. supra 2. - UN VASTE ENSEMBLE
GEOMORPHOLOGIQUEMENT OPTIMAL in I. – PREFERENCES ECO-ETHOLOGIQUES).
B. - L’ALTITUDE EXCLUT-ELLE L’INSTALLATION DU GYPAETE DANS UNE
PARTIE DE LA ZONE D’ETUDE ?
1. La zone d’étude et les critères d’altitude de Hirzel et al.
« Extrapolating from our own findings, we speculate that breeding bearded vultures
recolonizing the Alps will initially occupy limestone areas…between 1500 and 2500 m
altitude, that offer adequate cliffs rich in nesting sites and thermals as well as suitable bonebreaking screes reintroduction site » (Hirzel et al.). Diois et Baronnies50, culminant
respectivement à 1 589 et 1 545 m, seraient donc exclus de la zone optimale, laquelle ne
constituerait que 47% de la zone d’étude, soit environ 2800 km2. Si l’on considèrerait
l’altitude comme déterminante, seule la partie orientale du Vercors devrait être prise en
compte, réduisant la zone au relief optimal à 28% de la zone d’étude, soit environ 1700 km2.
Les massifs favorables par leur relief au retour du Gypaète ne seraient donc que le HautVercors, le Haut-Diois51 et le Dévoluy. Cette restriction est-elle fondée ? C’est ce qu’on se
propose de discuter.
2.
Facteurs écologiques et humains corrélés avec l’altitude
« L’altitude importe peu, le gypaète étant présent du niveau de la mer (en Corse, en Crète et
même dans la dépression de la Mer Morte) jusqu’au massif de l’Everest. » souligne J.-F.
Terrasse. Rappel élémentaire : en elle-même, l’altitude, n’est pas un facteur écologique. Les
corrélations observées entre l’altitude et la présence-absence de nombreuses espèces
traduisent une corrélation, positive ou négative, entre l’altitude et de réels facteurs
écologiques dont les plus fréquents sont température (animaux poïkilothermes, végétaux, etc.),
parois rocheuses et densité humaine, notamment pour les grandes espèces, bien plus
intensément chassées, persécutées ou/et perturbées à basse altitude, où se concentre Homo
50
Au sens de l’Atlas Ornithologique Rhône-Alpes CORA 1976.
Avec le recul du temps, il apparaît ornithologiquement plus pertinent lieu de distinguer non pas HautDiois, Diois s.s , Vercors s.l., mais un Diois s.s. et un Vercors s.s. et un ensemble Hauts Diois &Vercors : de
Toussière aux sud jusqu’aux Trois Pucelles, dans le prolongement au nord des Hauts Plateaux du
Vercors.L’auteur se sent d’autant plus autorisé à une telle critique rétrospective, fondée sur l’approfondissement
ultérieur de la connaissance de ces massifs et de leur avifaune, qu’il s’agit très largement d’une autocritique : corédacteur de l’Atlas CORA 1976, il a participé à cette délimitation, ici critiquée.
51
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sapiens.
EN VALAIS (zone de référence de Hirzel & al.) Il faut donc nécessairement que l’altitude
moyenne des gypaètes en phase d’installation (1864 m., écart-type 638 m.) traduise une
corrélation locale de l’altitude avec géomorphologie (rocher moins abondant à basse altitude)
et occupation par l’Homme et ses activités (corrélation négative fréquente tant avec l’altitude
que l’abondance du rocher). Interprétation confirmée par un des auteurs à propos de la limite
inférieure altitudinale suggérée par le modèle :« Je pense que c'est artefactuel…là ou il y a
des rochers (les Gypaètes) descendent aussi, surtout en hiver » Arlettaz (un des auteurs de
Hirzel et al.) in litt.
DANS LA ZONE D’ETUDE, au contraire, jusqu’à basse altitude les falaises calcaires
abondent et la densité humaine est faible52 même pour les Alpes françaises : < 10 hab./km2,
seulement 3 hab./km2 dans certains cantons, avec même 200 km2 sans habitation permanente
ni voirie. Différence majeure avec le Valais : la densité humaine est globalement beaucoup
plus élevée en Suisse qu’en France, surtout dans les régions montagneuses, particulièrement
les plus méridionales.
Comparons la distribution en altitude des aires d’Aigle royal Aquila chrysaetos, nicheur en
Valais comme dans la zone d’étude :
- Valais : « la plupart entre 1200 et 1800 m, avec des extrêmes à 700 et 2300 m » (Arlettaz in
litt.) ;
- Préalpes de la Drôme53 : moyenne à 967 m (s = 242 m, n = 12), l’un des couples nichait à
400 m (Mathieu & Choisy) dès les années 1970, dans une situation très isolée il est vrai.
Dans les deux régions, du fait d’un respect de plus en plus réel de la protection et de
l’augmentation des effectifs, la tendance actuelle à l’occupation de nouveaux sites bas, peutêtre avec abandon de site très haut en Valais : « je connais un nid à 2700 mais il n'est plus
visité : peut-être un vestige de la pression de jadis » (Arlettaz in litt.). Dans la Drôme trois des
nouveaux sites de nidification sont situés entre 550 et 600 m., en bordure de routes
fréquentées, l’un est même au-dessus d’un parking (R. Mathieu comm. pers. in litt.).
L’abondance des effectifs actuels d’Aigle royal (50 à 60 couples), le développement
spectaculaire du Vautour fauve dans le Diois et les Baronnies (120 couples en 2009, nichant entre
400 et 1500 m), le retour en cours du Percnoptère (2009 : trois couples nicheurs, tous avec succès)
rendent invraisemblable que ces massifs soient défavorables pour le Gypaète du fait de leur
altitude, que soit par défaut de falaises ou par excès d’humains et/ou de leurs activités.
C’EST DONC BIEN L’ENSEMBLE DES 6000 KM2 DE LA ZONE D’ETUDE QUI
DOIT ETRE CONSIDEREE COMME FAVORABLE AU RETOUR DU GYPAETE
et non pas seulement sa partie la plus haute. Ceci n’exclut nullement la présence d’enclaves
localement défavorables : boisements denses, plaine alluviale, agglomérations du fond de la vallée de
la Drôme, etc. Mais c’est une analyse à une tout autre échelle, qui concerne plus le mode d’utilisation
de l’espace par certains individus au sein de leur domaine vital.
52
53
A l’exception de l’extrêmité nord (Quatre Montagnes) proche de l’agglomération grenobloise.
Les trois quarts de la zone d’étude.
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Photo L. MORTIER <[email protected]>
Photo 29. – Le Bouquetin Capra ibex est présent aussi à basse altitude et près de
l’Homme : au Mont Baret entre 250 et 800, ici dans le défilé de Pont-en-Royans (Isère)
vers 400 m. en bordure d’agglomération. N-O de la zone d’étude.
Photo L. MORTIER <[email protected]>
Photo 30. – Vautour fauve Gyps fulvus colonie nicheuse installée dans les falaises
dominant le village de Rémuzat (Baronnies), sud de la zone d’étude.
C. – ESTIMATION DU NOMBRE DE COUPLES POTENTIELS
J.-F. Terrasse fait état de domaines vitaux d’un couple de Gypaète variant de 300 à 435 km2
dans les Pyrénées et 500 km2 en Macédoine avant que l’espèce y soit, assez récemment,
exterminée. En Valais, Arlettaz l’estime à 200 km2.
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Compte tenu de ce qu’on sait actuellement de l’importance trophique pour l’espèce des
Ongulés sauvages en général, des Bouquetins Capra sp. en général, les différences dans les
ressources disponibles expliquent, en grande partie ou totalement, ces différences.
Les densités de Gypaète élevées atteintes en Afrique du sud (moyenne = 167,5 km2 pour 200
couples) et en Ethiopie (moyenne = 100 km2 déterminées pour 4 couples) traduisent vraisemblablement
l’abondance des Ongulés sauvages (dont, en Ethiopie, un Bouquetin) et autres Mammifères de
taille comparable.
Une estimation fondée sur les densités pyrénéennes les plus faibles ou, pire encore, celles,
naguère, de Macédoine donne un minimum minimorum d’une douzaine de couples dont dix
ou onze dans la partie Préalpes de la zone d’étude (= Dévoluy non compris). MEME UNE
ESTIMATION AUSSI PESSIMISTE SERAIT COMPATIBLE AVEC LE PROJET.
Inversement, la poursuite du développement démographique du Chamois et le retour du
Bouquetin dans l’ensemble des sites favorables et augmenterait très notablement les
potentialités de la zone d’étude pour le Gypaète :
- pour le Chamois, ce développement dépend quasi-exclusivement de la gestion des
prélèvements ;
- pour le Bouquetin, si à long terme la recolonisation spontanée de biotopes favorables est
une certitude, de nouveaux lâchers feraient gagner de nombreuses décennies, du fait d’un
mode de recolonisation fort différent. La réintroduction de l’espèce a d’ailleurs déjà fait
l’objet d’études de faisabilité dans tous les massifs de la zone d’étude (Villaret 1987,
Choisy 1992, 1995) qui mériteraient une actualisation (projetée pour le département de la
Drôme, J. Traversier, CORA, comm. or. pers.).
Des domaines vitaux de même grandeur qu’en Valais correspondraient à une trentaine de
couples dans la zone d’étude. Mais, un tel avenir ne saurait être davantage qu’évoqué pour
un projet de réintroduction actuel.
L’estimation de la densité potentielle la plus vraisemblable est fondée :
- dans le Haut Vercors sur celle du Valais du fait de la présence simultanée d’effectifs
importants de moutons et chamois ainsi que d’effectifs de bouquetins déjà notables et en
pleine expansion ;
- ailleurs dans la zone d’étude sur celles des Pyrénées là où le Bouquetin est encore
absent, ou au tout début de son développement.
Compte-tenu des superficies, le total est quinze à vingt couples pour l’ensemble de la zone
d’étude, dont treize à dix-sept dans sa partie préalpine (= Dévoluy non compris).
CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse :
POTENTIALITES POUR LE GYPAETE DANS LA ZONE D’ETUDE
- actuelles très pessimistes : minimum minimorum une douzaine de couples ;
- actuelles les plus vraisemblables : QUINZE A VINGT COUPLES ;
- à long terme : peut-être jusqu’à une trentaine de couples ?
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TROISIEME PARTIE : REALISATION DE
L’OPERATION OU ? QUI ?
Il est erroné de croire que la pensée stratégique est supérieure à l’habilité tactique ; sans elle la stratégie n’est
rien, tant il est vrai « qu’il n’y a pas de détail dans l’exécution » (Valéry)
Saint-Sermin in Encyclopedia Universalis
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I. - BIOTOPES MAXIMILISANT LA PROBABILITE
DE REUSSITE DE LACHERS DE GYPAETES
Les habitats naturels terrestres de la zone d’étude autres que les forêts denses peuvent tous
être plus ou moins exploités par le Gypaète, essentiellement ou marginalement.
A une échelle plus locale encore que les quatre massifs qui la constitue, la géomorphologie et
les populations d’Ongulés rupestres permettent d’individualiser des biotopes 1 dont certains
sont beaucoup plus que d’autres favorables à l’installation de gypaètes après lâcher.
A. – CONDITIONS ECOLOGIQUES
Pendant la phase d’installation des gypaètes mûrissant Hirzel et al. soulignent l’importance
des “huge vertical cliffs rich in cavities and ledges (from a stratigraphic viewpoint, these
cliffs belong essentially to late Jurassic and Cretaceous formations).”
Si la hauteur des falaises était le facteur essentiel, alors Vercors et Dévoluy seraient les deux
massifs les plus favorables de la zone d’étude. Dans le Diois et les Baronnies, en dépit de
quelques grand sites aux falaises aussi puissantes, par exemple celles qui bordent le massif de
la Forêt de Saou, prédominent largement les falaises tithoniques plus modestes.
Si le facteur essentiel était l’abondance de cavités et corniches, Diois et des Baronnies
seraient mieux placés qu’une partie des falaises du Vercors et du Dévoluy.
Mais pour choisir dans la zone d’étude le massif de lâcher et même, plus localement, dans ce
massif, le biotope le plus propice à la réussite d’un lâcher de Gypaète C’EST LA PHASE DE
PROSPECTION PAR LES GYPAETES JUVENILES QUI DOIT ETRE PRISE EN COMPTE. Or, “during
the prospecting phase (1987–94, mostly immature birds), the most important variable
explaining bearded vulture distribution was ibex biomass.” Hirzel et al. LA DISTRIBUTION
ACTUELLE DES EFFECTIFS DU BOUQUETIN IMPOSE DONC QUE LE BIOTOPE DE LACHER SOIT
DANS L’EST DU VERCORS, CONFINS AVEC LE DIOIS INCLUS.
B. – LOCALISATION DES OBSERVATIONS DE GYPAETE
Trente données de Gypaète dans la zone d’étude depuis la fin des années 1980.
La philopatrie du Gypaète rend plus probable que la zone d’étude soit atteinte par des
visiteurs dans ses parties les plus proches des régions de lâcher et de reproduction. C’est bien
ce qu’on observe : quatorze des observations sont situées dans le Parc Naturel Régional du
Vercors, en majorité dans l’est. C’est aussi le cas des deux données supplémentaires qui
restent à confirmer. Les trois autres concernent le nord du Dévoluy, le centre ouest du Diois
et le nord des Baronnies. La localisation de la grande majorité des observations (cf. carte page
suivante), faites dans le nord-est de la zone d’étude est corrélée avec :
- celle des bouquetins : grande majorité des effectifs dans le nord-est de la zone d’étude (cf.
figure 8 page suivante) ;
- la direction des sources de juvéniles dans les Alpes: quatre des six taquets et la totalité des
couples nicheurs. Trois seulement plus au sud que la vallée de la Drôme, dont le seul
individu identifié, dans l’est du massif de Saou (Diois occidental) qui avait été lâché au
Mercantour : la seule région qui soit aussi méridionale que la zone d’étude.
1
Distinctions :
- « habitat » : type d’espace aux besoin ou à des besoins d’une espèce ;
- « domaine vital » : espace concret utilisé par un individu particulier ;
- « biotope » : un espace concret utilisé par une population donnée.
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Figure 12. – Distribution dans l’espace :
Observations de Gypaète :
1988 +/- 1.
1997, 1998.
2008 le plus au nord = 2 données.
Zone d’étude
Populations de Bouquetin Capra ibex
2000-2007,
2009.
? à confirmer, même période.
Charniers permanents fréquentés par les trois autres Vautours.
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TRENTE DONNEES, probablement vingt-quatre individus, en vingt-sept journées
Entre parenthèses : nom de la commune et numéro du département.
P ARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS
Inclus les falaises aux confins Diois-Vercors
Vingt-et-une données2
+ deux possibles à confirmer
1988 +/- 2 ans juillet ou août, Montagne de Lans près des crêtes au-dessus du stade de neige
(Lans-en-Vercors 38) volant au sud. L. Jacob (PNR du Vercors, depuis au PNR des Grands
Causses).
1997 Cinq données : probablement pas plus de deux individus
Petite Moucherolle (38 Villard-de-Lans) le 30 mai un immature. N. Vincent-Martin
ornithologue au CEEP.
Cirque d’Archiane versant occidental = Glandasse (26 Treschenu-Creyers) juillet peu avant les
observations suivantes. G. Caullireau garde de la Réserve Nat. des Hts Pltx du Vercors.
Plateau d’Ambel (26 Bouvante) vers les crêtes de sa bordure orientale, B. Begou :
- le 21 juillet vers le Pas de la Ferrière, sur piton rocheux, semble frapper sur un os ;
- le 29 août en vol au-dessus des crêtes d'Ambel ;
- dernière observation de l’été, date non notée.
1998 le 18 mai, au Grand Brizou un adulte volant vers le Grand Veymont (38 Gresse-enVercors) . J. van der Straten & M. Verhagen.
2000 en mai (38 Gresse-en-Vercors) lieu et jour à préciser… N. Pellerin.
2001 début de l’année, un peu à l’est du col du Rousset (26 Chamaloc) : serait à confirmer.
2002, le 10 mai aux Grands Goulets, crêtes juste au nord-est du défilé (26 confins Echevis -St
Martin-en-Vercors). Un immature, probablement d’un an (jumelles x 15 avec stabilisateur
3
d’image) , se dirigeant probablement vers le sud. D. Tissier, CORA Rhône.
2003, le 31 mai falaises orientales, un adulte (ou subadulte ? non décrit) volant de Roche Rousse
au Grand Veymont du nord au sud (38 Gresse-en-Vercors) F. & G. Berthollon, CORA-Isère.
2004, le 14 août, deux données certainement du même individu :
- à 18h15 Cirque d’Archiane (26 Treschenu-Creyers) au-dessus de la bordure sud-est, vers
Tussac un individu volant d’est en ouest, B. Cuerva, garde de la Réserve Naturelle des Hauts
Plateaux du Vercors ;
- environ ! h après, un individu vu au Mont Barral (26 Treschenu-Creyers), à environ 8 km
à l’est de l’observation précédente, M. Prouveur, CORA-Drôme.
2005, le 08 mai à 10 h, au Jocou (38 Lalley) sous les crêtes, un immature volant du nord au sud,
puis direction Trièves. N. et C. Zannoni, CORA-Isère.
2006, le 5 juin vers 11h30, volant de la Tête de Praorzel aux Rochers du Parquet un
immature (38 Chichilianne) B. Veillet. Une autre observation plus au nord le 4 mai reste à
confirmer : information indirecte.
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2008
quatre données, trois du même individu le même jour, même commune
-
le 11 mai : un à la bordure nord du Diois (26 Chamaloc) trois observations du même
individu, en deux lieux : deux à l’adret col du Rousset (en bordure du Vercors) à 13h15-13h30 et vers
17 h : B. Lachat. Entre-temps dans le défilé à 13h45 entre le village et Die, J.-P. Choisy, PNR du
Vercors. Photographié deux jours plus tard dans le Diois occidental (cf. infra).
Photo B. L ACHAT
Photo 31. – Aux confins du Vercors et du Diois : adret du col du Rousset, 11 mai 2008,
..probablement à la fin de sa première année, peut-être de le deuxième.
-
2009
le 9 septembre un individu près du sommet de l’Echelette (26 St Agnan-en-Vercors),
à faible hauteur au-dessus des falaises des confins Vercors-Diois, volant vers
l’ouest, vers 10h environ, G. David, ONF & CORA-Drôme.
quatre données
dont deux du même deux jours consécutifs au même lieu
-
le 30 mai : un immature au Platary, relief thithonique de la bordure Trièves du
PNRV (38 Chichilianne), J.-L. Frémillon, SEOF ;
-
les 3 et 4 juin : un immature Cirque d’Archiane (26 Treschenu-Creyers) S. Blache LPO
Drôme (ex CORA-Drôme), B. Cuerva, garde de la Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors,
D. Leroy, garde vert, Parc Naturel Régional du Vercors ;
Photo D. LEROY
Photo 32. – Aux confins du Vercors et du Diois : cirque d’Archiane 3 juin 2009.
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2009 (suite et fin)
Le 13 août un individu probablement en cinquième année arrive du sud du nord du Diois à
la crête sud du Vercors (col du Rousset, 26 Chamaloc) par vent du nord assez fort, estimé entre 40 et 50
km/h et repart vers le sud-est, Matthieu Dubois.
.
.
© Photos M. Dubois
Photo 33. – Gypaetus barbatus : le plus âgé observé dans la zone d’étude parmi ceux d’âge
déterminé sur photos : très probablement en cinquième année. 13 août 2009, bordure
nord du Diois aux confins du Vercors. Photos dans l’ordre chronologique, à l’arrière-plan
route du col du Rousset et village de Chamaloc.
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DIOIS OCCIDENTAL
Deux données
en lieux très proches à quatorze années d’intervalle
1994, le 12 février, au Pas de Siarra (massif de Saou, vers les Trois Becs), Est des crêtes
méridionales du massif de Saou (26 confins de Saou et de Bézaudun-sur-Bine). Photographié
(cf. page suivante), par G. Grassi, assoc. Lysandra Education Environnement. Identifié sans
ambigüité par ses marques : Argentera né en 1993, lâché la même année dans le Parc
National du Mercantour. Première identification à distance du Parc National. Recueilli
blessé puis relâché guéri en vallée de Suse (Piémont) le 9 février 2008, équipé d’une
bague rose à cette occasion (P. & L. Fasce, FCBV).
Photo G. GRASSI
Photo 34. – Argentera le 12 février 1994 dans l’ouest de la zone d’étude : Pas de Siara, commune de
Bezaudun-sur-Bine (Drôme), adret extérieur du massif de Saou, Diois cf. supra photo 8. Né en
1993, lâché même année dans le PN du Mercantour. Toujours vivant en 2008 : le 9 février relâché guéri
dans le Val de Suse (Piémont), après avoir été recueilli et guéri.
2008,
le 13 mai Adret de la Montagne de Couspeau,
vers le Grand Delmas, à quelques kilomètres du point
précédent, (26 confins des Tonils et de Bézaudun-sur-Bine) Sophie
Damian. Les photos prise montrent qu’il s’agit de
l’individu, probablement né en 2007, peut-être en 2006,
photographié deux jours auparavant à l’adret du col du
Rousset (cf. page précédente) confirmé par Martine Razin
………………..……………….
Photo S. DAMIAN
LPO Mission Rapaces et Richard Zink, IBM.
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Photo 35. – Diois occidental 13 août 2009 dans l’ouest de la zone d’étude à moins de trois
kilomètres de la .photo précédente près de quinze auparavant. Même individu que photo
31 cf. supra.
BARONNIES
Une donnée
1996, le 14 avril, montagne de Raton (26 Cornillac), vers 1500 un immature, marquage par
décoloration (non décrite avec précision, donc non identifiée). A. Aubenas.
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DEVOLUY
Cinq données
2005, le 23 août, à la Sambue (38 Pellafol) : volant vers le nord-ouest. D. Rivière, ONF ;
2006, le 26 mai un” juvénile“ vers 15h, volant haut au-dessus du Rocher Rond (vallon de la
Jarjatte), marqué à l'aile droite, avec 2 taches blanches dans les rémiges primaires et
secondaires” (26 Lus-la-Croix-Hte) C. Houllemare, CORA Drôme.
2007
-
le 5 avril (05 La Cluse) aux crêtes de Chauvet un juvenile, C. Mroczko ;
le 1er septembre (05 Agnières-en-Dévoluy) un au Sommarel ;
le 28 octobre (05-Verynes), un adulte au col de Cuberselles, aux Egarets.
a) Augmentation au fil des ans : chaque année après 2001. 29 données.
1988
1994
1996
Avril
Mai
1998
2000
2002 03 04 05
06 07 08 2009
b) Phénologie :
Février
Juin Juillet
Août
Sept. Octobre
Figure 13. – Distribution temporelle des observations de Gypaète Gypaetus barbatus dans la zone
d’étude. Barres blanches : individus déjà pris en compte par les barres noires de manière
certaine* ou très probable (précisions : cf. texte). Barres noires : nombre de visiteurs,
barres blanches : un séjour plus durable.
* notamment a) années 2008 et 2009.
Le nombre de visiteurs augmente significativement au fil des ans, essentiellement des
immatures dans leur deuxième, troisième ou quatrième année.
En effet compte tenu des dates d’observation et de celle d’émancipation des juvéniles, 92 à
100% de ces oiseaux étaient âgés de plus d’un an. Le plus âgé de ceux dont l’âge a pu être
déterminé sur photo, en août 2009, était un subadulte dans sa cinquième année.
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CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse
SEULES LES FALAISES URGONIENNES ORIENTALES DU VERCORS ET DE LA
BORDURE MÉRIDIONALE DE SES HAUTS PLATEAUX, AUX CONFINS DU
DIOIS, HÉBERGENT ACTUELLEMENT DES EFFECTIFS DE PLUSIEURS
CENTAINES DE BOUQUETIN CAPRA IBEX, EN RAPIDE DÉVELOPPEMENT.
QUOIQUE EGALEMENT ENCORE LOIN D’ATTEINDRE LES POTENTIALITES,
LE CHAMOIS R. RUPICAPRA Y EST DEJA BIEN REPRESENTE,
CES FALAISES JOUXTENT DES ALPAGES OU ABONDENT LES BREBIS
OVIS GMELINI F. ARIES EN ESTIVE.
DES TRENTE DONNEES DE CASSEUR D’OS GYPAETUS BARBATUS DANS LA ZONE
D’ETUDE SONT LOCALISEES :
.
- POUR DIX-HUIT (60%) A ! 10 KM DES PRINCIPALES.POPULATIONS
ACTUELLES DE BOUQUETINS ;
.
- POUR ONZE D’ENTRE ELLES (37%) DANS LES BIOTOPES DE CES
POPULATIONS.
POUR MAXIMALISER LA PROBABILITE D’INSTALLATION DES GYPAÈTES
LACHES C’EST DONC ICI QU’ILS DEVRONT ETRE MIS AU TAQUET.
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Figure 14 . – Situation sur la carte du Vercors et du nord du Diois des biotopes des
deux principales populations actuelles de Bouquetin Capra ibex,
entourés par les courbes bleue et jaune :
- axée sur les falaises orientales du Vercors ;
- aux confins du Diois, le Glandasse, le cirque d’Archiane et le sud
des Hauts-Plateaux, où la réalisation de la réintroduction du
Gypaète Gypaetus barbatus est préconisée.
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II. – LE MEILLEUR BIOTOPE
POUR INSTALLER UN TAQUET
A. – RESSOURCES ALIMENTAIRES
1. – BOUQUETIN : L’ESPECE LA PLUS FAVORABLE
L’abondance de bouquetins est décisive pour les gypaètes immatures en phase de prospection,
(cf. supra et pour analyse statistique Hirzel et al.). Le début de cette phase suivant rapidement
l’envol des jeunes, cette abondance doit donc être un critère décisif de choix du biotope de
lâcher.
De plus dans les deux principaux biotopes de la zone d’étude où le Bouquetin est présent
abondent les falaises calcaires, avec à leur pied de vastes propices au cassage d’os.
Bordure orientale
Glandasse - Archiane
Effectifs
absolus relatifs
124
37%
215
63%
Longueur du biotope
déjà occupé potentiel
21 km
40 km
! 7 km
12,5 km
Densité linéaire
dans le biotope déjà occupé
5,9/km de falaise
30,7/km de falaise
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TABLEAU VII . - Distribution spatiale des effectifs du Bouquetin Capra ibex
entre les deux biotopes de l’est du Vercors à la fin de 2005.
Les deux biotopes ne sont pas également favorables :
a) ABONDANCE : effectifs de Glandasse-Archiane presque doubles de que ceux de la bordure
orientale. Or, “during the prospecting phase (1987–94, mostly immature birds), the most
important variable explaining bearded vulture distribution was ibex biomass.” Hirzel et
al. (cf. tableau page précédente).
b) CONCENTRATION SPATIALE : les corrélations avec les facteurs écologiques et la présence
du Gypaète sont maximales à une échelle intermédiaire :“ bearded vulture distribution was
more sensitive to environmental medium-extent variables (2000-m radius) Hirzel et al.
Elles beaucoup plus faibles dans un rayon de quelques centaines de mètres ou, au
contraire, approchant la dizaine de kilomètres, a fortiori la dépassant. Or, les falaises à
bouquetins, sinueuses tout autour du Glandasse (cf. tableau ci-dessus, supra fig. 8 et photo 33 page
suivante) et du cirque d’Archiane, sont inscrites dans un périmètre compact, concentrant les
ressources. Au contraire, les falaises de la bordure orientale s’étirent du nord au sud,
dispersant sur une longueur triple des ressources 1,73 plus faible (cf. tableau ci-dessus, supra
fig. 8 et photo 14 infra photo 32 page suivante et fig. 9). Si on considère l’ensemble des deux
biotopes et non pas leur seule longueur actuellement occupée, la dispersion reste 3,2 fois
supérieure le long des falaises orientales.
Le biotope Glandasse – Archiane offre au Gypaète pour des ressources alimentaires
fournies par les cadavres de Bouquetin à la fois plus abondantes et bien plus concentrées
dans le rayon efficace que celui de la bordure orientale du Vercors
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Photo P. BEAUDOIN, FRAPNA
Photo 36. – Biotope à Bouquetin Capra ibex des falaises orientales du Vercors
du nord au sud 40 km dont 21 déjà colonisés par environ un tiers de la population de la zone d’étude.
Photo M.MILCENT
Photo 37. – Biotope à Bouquetin des falaises méridionales des Hts Plateaux du Vercors
Falaises au tracé sinueux inscrites dans une aire compacte de 12,5 km de long. Hébergent près
des deux tiers des effectifs actuels de la zone d’étude, concentrés actuellement dans un
périmètre de longueur ! 7 km, entre la Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors (audessus) et une Réserve Biologique gérée par l’Office National des Forêts (en-dessous).
Lors du travail de terrain à quelque distance des itinéraires fréquentés, il n’est plus
exceptionnel de trouver au pied des falaises des squelettes de Bouquetin nettoyés par le
Vautour fauve (cf. page suivante).
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Photo J. TRAVERSIER, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 38. – Bouquetins Capra ibex mâles, cirque d’Archiane.
Photo M. PROUVEUR, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 39. – Squelette de Bouquetin Capra ibex femelle nettoyé par les vautours
éboulis de Pédane, sous les falaises, cirque d’Archiane.
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2. - CHAMOIS, MOUTON : LES DEUX AUTRES ESPECES TRES FAVORABLES
La concentration spatiale des effectifs dans Glandasse-Archiane dans le rayon pertinent et, au
contraire, leur étalement linéaire bien au-delà le long de la bordure orientale, déjà notée pour
le Bouquetin, se retrouve chez le Chamois. En moyenne, les troupeaux de brebis sont, autour
du cirque d’Archiane, bien plus proches des falaises qu’ailleurs sur les Hauts-Plateaux.
LA DISTRIBUTION DU CHAMOIS ET DU MOUTON EST PLUS FAVORABLE A GLANDASSEARCHIANE QUE SUR LA BORDURE ORIENTALE, donc convergence avec le Bouquetin.
Photo RESERVE NATURELLE DES HAUTS PLATEAUX DU VERCORS
Photo 40. - Troupeau de transhumants. Plusieurs des dizaines de milliers de brebis transhumante de la
zone d’étude estivent en bordure immédiate des falaises d’Archiane et du Glandasse.
Photo Gabriel DURAND
Photo 41. – Les charognes de transhumants in natura dans le Parc naturel Régional du
Vercors sont déjà exploitées par les vautours.
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VERS LE MEILLEUR COMPROMIS
Sur le Plateau mais très proche du nord-est du cirque très approximativement dans le secteur
de la Tête du Jardin, cumulerait de nombreux avantages (cf. photo ci-dessous) :
- non loin de falaises avec abondance de bouquetins et tranquillité ;
- les juvéniles à l’envol disposeraient non seulement d’un vaste éboulis au pied des parois
mais également d’une profusion de larges vires dans celles-ci, aussi bien dans la falaise du
taquet que, plus encore, dans celle qui fait avec elle un angle droit ;
- accès par le dessus du plateau en une grande partie possible en véhicule ;
- situé entre, au pied, une vaste Réserve Biologique gérée par l’Office National des Forêts et,
au sommet, une propriété départementale étendue, au sein de la Réserve Naturelle des
Hauts Plateaux du Vercors, : statuts offrant, pour un projet porté par le Parc Naturel
Régional du Vercors, de grandes facilités d’obtention d’autorisation, ainsi que des moyens
réglementaires et en personnel pour prévenir les éventuelles perturbations ;
-
possibilité d’hébergement non loin de stagiaires pour surveillance, par exemple à Tussac.
-
possibilité d’installer un taquet alentour mais plus sur le plateau et ses alpages :
environnement du type des photos 49 et 50cf. infra.
Photo P. BEAUDOIN, FRAPNA
Photo 45. – Site potentiel pour le taquet : Pédane et Tête du Jardin : près des crêtes (accès par le
plateau) ou si taquet en pied de falaise par le bas du vallon sous l’ellipse
Deux autres sites favorables, l’un moins accessible, l’autre plus fréquenté.
Photo suivante: détail du site encadré par les deux autres.
Les falaises sont situées aux confins de la Réserve Naturelle la plus étendue de France, celle des
Hauts Plateaux du Vercors et, en continuité, d’une vaste Réserve Biologique gérée par l’Office
National des Forêts.
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TENIR COMPTE DES DIFFERENCES ENTRE CONDITIONS LOCALES
Le « danger majeur pour les jeunes lors de leurs premiers vols » (Heuret) que constitue la
forêt pour les jeunes à l’envol vaut aussi pour les autres grands Rapaces rupestres, même nés
dans la nature. Toutefois :
- dans le cirque d’Archiane, le site de la photo précédente a été depuis 2007, choisi par
le Vautour pour y nicher avec succès, quatorze couples en 2009.
- la réintroduction des autres vautours dans la zone d’étude, bien en dessous de la
limite supérieure des forêts est aussi une source d’information : plus d’une centaine de
vautours fauves et déjà près de trente vautours moines ont été lâchés sur les deux sites de
réintroduction de la zone d’étude. Or, les individus tombés dans les zones boisées s’en
sortis seuls : à pied ! Même ceux de Vautour fauve, espèce qui n’a pourtant pas les
aptitudes du Gypaète et du Vautour moine à pénétrer les boisements clairs.
Une différence régionale à prendre en compte : du fait de la sécheresse du climat,
les forêts de la grande majorité de la zone d’étude sont beaucoup plus claires que celles
de Haute-Savoie. La seule mort déplorée du fait de la végétation a été, dans les Baronnies,
celle d’un vautour fauve peu de jours après lâcher, tombé1 d’un perchoir nocturne dans des
fourrés denses, où il s’est épuisé.
Certes, presque tous ces oiseaux étaient, non pas des juvéniles au sortir du nid, mais des
adultes et subadultes. Mais très peu d’entre eux avait une expérience préalable du vol en
liberté. Presque tous avaient été recueillis après chute prématurée de l’aire parentale. Puis
les vautours fauves avaient passé trois ou quatre années en volière, parfois cinq. Il leur a
fallu jusqu’à un mois pour maîtriser le vol libre : ils n’étaient guère plus habiles au sortir
des volières que des jeunes gypaètes quittant un taquet.
Enfin, pour les sept vautours moines des Baronnies et les deux autres du Pays du Verdon,
qui, eux, se sont envolés d’un taquet, comme des gypaètes, les choses ne se sont pas mal
passées non plus.
Les photos qui suivent, présentent un aperçu non exhaustif de la diversité des types de sites
potentiels.
Photo R. LECONTE
Photo 46. – Autre site potentiel pour l’installation du taquet avec hautes falaises calcaires et vastes
éboulis, facteurs géomorphologiques très favorables à l’installation du Gypaète. Site médian parmi
les trois qui sont indiqués sur la photo 40, vu de l’amont. Mais une heure de marche pour accès.
1
Probablement après avoir été perturbé dans son sommeil.
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pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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II. LE MEILLEUR BIOTOPE POUR INSTALLER UN
TAQUET
A – RESSOURCES ALIMENTAIRES
1. Bouquetin : l’espèce la plus favorable
L’abondance de bouquetins est décisive pour les gypaètes immatures en phase de prospection,
(cf. supra et pour analyse statistique Hirzel et al.). Le début de cette phase suivant rapidement
l’envol des jeunes, cette abondance doit donc être un critère de choix du biotope de lâcher.
De plus dans les deux principaux biotopes de la zone d’étude où le Bouquetin est présent
abondent les falaises calcaires, avec à leur pied de vastes éboulis propices au cassage d’os.
Effectifs
Longueur du biotope
Densité linéaire dans le
biotope déjà occupé
Absolus
Relatifs
Déjà occupé
Potentiel
Bordure oriental
124
37%
21 km
40 km
5,9 /km de falaise
Glandasse – Archiane
215
63 %
" 7 km
12,5 km
30,7/km de falaise
Tableau VII – Distribution spatiale des effectifs du bouquetin Capra ibex entre les deux biotopes de l’est
du Vercors à la fin de 2005.
Les deux biotopes ne sont pas également favorables :
effectifs de Glandasse-Archiane presque double de ceux de la
bordure orientale. Or, « during the prospecting phase (1987 -94, mostly immature
birds), the most important variable explaining bearded vulture distribution was
ibex biomass ». Hirzel et al .
b) CONCENTRATION SPATIALE : les corrélations avec les facteurs biologiques et la
présence du Gypaète sont maximales à une échelle intermédiaire : « bearded
vulture distribution was more sensitive to environmental medium-extent variables
(2000 – m radius) » Hirzel et al. Elles sont beaucoup plus faibles dans un rayon
de quelques centaines de mètres ou, au contraire, approchant la dizaine de
kilomètres, à fortiori, la dépassant. Or, les falaises à bouquetins, sinueuses tout
autour du Glandasse et du cirque d’Archiane, sont inscrites dans un périmètre
compact, concentrant les ressources. Au contraire, les falaises de la bordure
orientale s’étirent du nord au sud, dispersant sur une longueur triple des
ressources, 1,73 plus faible. Si on considère l’ensemble des deux biotopes et non
pas leur seule longueur actuellement occupée, la dispersion reste 3,2 fois
supérieure le long des falaises orientales.
a) ABONDANCE :
Le biotope Glandasse – Archiane offre au Gypaète pour des ressources alimentaires
fournies par les cadavres de Bouquetin à la fois plus abondantes et bien plus concentrées
dans le rayon efficace que celui de la bordure orientale du Vercors.
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III. REINTRODUCTION DU GYPAETE AU TAQUET EN
PRESENCE DU VAUTOUR FAUVE :
ENSEIGNEMENTS DU SUIVI PAR LE PARC
NATIONAL DU MERCANTOUR
A. – EN PHASE D'ACQUISITION DE LA MAITRISE DU VOL
Lors de la réintroduction du Vautour fauve dans les Alpes l’acquisition de la maîtrise du vol
après des années en volière a pris environ un mois lors d’un premier lâcher, mais a été les
années suivantes, raccourcie de moitié environ : les individus déjà présents fonctionnent en
indicateurs de localisation des zones d’ascendances.
Un effet analogue au Mercantour a été observé sur le Casseur d’os : depuis le
développement de l’estivage de vautours fauves les gypaètes juvéniles qui y sont lâchés
au taquet totalisent en moyenne 74% d’heures de vol en plus qu’auparavant.
Nom
Temps de vol cumulé
Pelat (BG 275) lâché en 1997
686 min.
Gelas (BG 279) lâché en 1997
415 min.
Roubion (BG 311) lâché en 1999
503 min
Péone (BG 312) lâché en 1999
658 min
Larche (BG 369) lâché en 2001
891 min
Roure (BG 370) lâché en 2001
467 min
n=6
Moyenne = 603
Guillaumes (BG 411) lâché en 2003
1675 min
Jausiers (BG 413) lâché en 2003
880 min
Monaco (BG 452) lâché en 2005
746 min
Monte-Carlo (BG 455) lâché en 2005
556 min
Rocca (BG 516) lâché en 2007
1223 min
Fontvieille (BG 520) lâché en 2007
1209 min
n=6
Moyenne = 1048
Différence entre moyennes statistiquement significative
t = 2,57 > 2,23 qui est le seuil pour p = 0,05, 10 ddl.
TABLEAU VI . – Temps de vol cumulé des juvéniles de Gypaète Gypaetus barbatus : moyenne
supérieure de 74 % depuis le développement de l’estivage du Vautour fauve
Gyps fulvus au cours du premier mois suivant l’envol du taquet au
Mercantour. D’après L. Zimmerman in V. Coirié. Seul Monte-Carlo n’a volé
qu’approximativement autant d’heures (8% en moins) que la moyenne d’avant 2002, les
cinq autres l’ont fait beaucoup plus : Rocca et Fontvieille plus de deux fois plus,
Guillaumes près de trois fois.
À notre connaissance, c’est la première fois que le fait est mis en évidence. Il est probable
que les parents des gypaètes juvéniles nés dans la nature jouent le même rôle pour ceux-ci.
L’aptitude des gypaètes envolés du taquet à utiliser de même les vautours fauves mérite d’être
soulignée.
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B. – APRES ACQUISITION DE LA MAITRISE DU VOL
Citations de Coirié 2007
Lors du suivi des vautours fauves l’été 2007, la mise au taquet de « deux gypaètes le 22 mai
2007 (Rocca et Fontvieille), au sein même de la zone fréquentée par les vautours fauves, a
permis d’observer quelques relations entre les deux espèces.Les vautours fauves ont fréquenté
de façon importante le site de réintroduction sur un couloir de passage entre le massif du
Mounier et le plateau de Longon (et) régulièrement utilisé comme reposoir diurne mais aussi
comme lieu propice aux ascendances thermiques. »
1. Territorialisme à distance du taquet
« De mi-juillet à mi-août, les gypaètes ont commencé l’apprentissage du vol… A plusieurs
reprises, nous avons pu observer ces deux jeunes oiseaux à la poursuite de vautours fauves de
passage. Ce comportement peut être assimilé à de la territorialité : (en effet) ce phénomène
n’a été constaté que sur le site même de réintroduction. (Au contraire) en d’autres lieux, les
gypaètes sont (restés) pacifiques vis-à-vis des vautours. »
2. Grégarisme à distance du taquet
« nous avons pu, à plusieurs reprises, observer les gypaètes en compagnie des vautours
…aussi bien sur le reposoir nocturne de la Barre Sud du Mounier que sur…des curées »
3. Découverte de carcasses
« …le Vautour fauve, prompt à trouver les carcasses disponibles et à les consommer, a
(ainsi) permis aux jeunes gypaètes l’accès à une ressource trophique très abondante. Des
cassages d’os ont été constatés en ces lieux. »
4. Moindre dispersion, conséquences probables
« ...la présence des vautours et l’abondance en nourriture qui en découle entraîne
vraisemblablement une fixation plus longue des gypaètes sur le massif du Mounier avant leur
départ automnal en phase d’erratisme, Plus cette imprégnation au site sera longue, plus les
chances de retour pourraient être importantes. »
CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse :
LA PRESENCE PERENNE DE VAUTOURS FAUVES DANS LA ZONE D’ETUDE :
- d’abord FACILITERA L’ACQUISITION .DE LAMAITRISE DU VOL
PAR LES GYPAETES QUITTANT LE TAQUET ;
.
- ensuite FAVORISERA :
- LA DECOUVERTE DE NOURRITURE ET DE REPOSOIRS ;
- UN SEJOUR PROLONGE DES GYPAETES MAITRISANT LE VOL.
CES FACTEURS ECOLOGIQUES ET ETHOLOGIQUES MAXIMALISERONT
LA PROBABILITE DE SURVIE DES JUVENILES, PUIS D’ATTACHEMENT
AU BIOTOPE.
Il est probable que la réintroduction préalable du Vautour fauve ait déjà contribué de même au succès ultérieur
de celle du Vautour moine dans les Causses et contribue à celui des opérations en cours dans les Préalpes, bien
qu’on ne dispose pas d’observations aussi circonstanciées que pour le Gypaète au Mercantour.
Le versant occidental du Glandasse offrent aussi des sites potentiels avec falaises, éboulis, bouquetins,
chamois et, sur l’alpage entre lui-même et le cirque d’Archiane, des troupeaux de brebis en estive.
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Photo P. LARDANCHET, CORA
Photo 47. – Versant occidental du Glandasse.
Photo P. BEAUDOIN, FRAPNA
Photo 48. – Le dessus du Glandasse vu de la pointe sud :
Entre vallée de la Drôme à l’ouest (à gauche sur la photo) et cirque d’Archiane à l’est (à droite
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.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 49 – Nord du versant ouest du Glandasse à sa jonction de la bordure méridionale du
Vercors à l’ouest de la photo. Fréquenté du fait d’un sentier d’accès aux Hauts Plateaux,
mais surveillance continuelle habituelle lors de lâchers au taquet.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 50. – L’est de la bordure méridionale du Vercors un peu à l’ouest de sa jonction avec le
Glandasse. L’accès d’un éventuel taquet se ferait par le plateau.
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Le sud Hauts-Plateaux du Vercors (Glandasse inclus) bordant les falaises biotopes de la
principale population de bouquetins offrent des reliefs rocheux escarpés, modestes mais
suffisant pour un taquet, environnés d’alpages, prés-bois, bosquets clairs et épars,
essentiellement de Pin-à-crochets Pinus uncinata, sans boisement étendus ni denses.
Photos R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA….
Photos 51. - Le sud des Hauts des Plateaux du Vercors :
photo du haut paysage typique,
photo du bas : détail de petits sites escarpés.
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Photos R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photos 52. - Le sud des Hauts des Plateaux du Vercors : sites escarpés moins modestes que photos 46.
Sur celui du bas des bouquetins commencent à être vus.
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COMBE MALE
Ce site pourrait être considéré comme une variante de celui de Chamaloc (cf. supra début du
chapitre) : les avantages logistiques sont presque équivalents, sans le risque d’une ligne
électrique, avec des pentes à couvert ligneux notablement plus faible.
QUINT
Si une distance de 14 ou 15 km à l’ouest du plus important noyau de population de bouquetins
était considérée comme négligeable, des sites de la bordure méridionale du Vercors, tel que
celui-ci-dessous, seraient excellents.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 53. – Bordure méridionale du Vercors : falaises du Quint.
INCONVENIENTS :
- encore sans population de bouquetins ;
- ligne à moyenne tension non balisée ;
- hors de la Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors.
AVANTAGES :
- excellente position géographique : à l’ouest de la zone d’étude ;
- chamois, mouflon, cerf ;
- brebis et autres transhumants ;
-
- domaniaux étendus et propriété départementale en réserve de chasse
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IV. LE PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS :
CADRE ET AGENT DE REALISATION
La réalisation de l’opération impliquera une concertation du Parc Naturel Régional avec les
organismes directement concernés, tant publics (Ministère de l’Environnement, DIREN, etc.)
qu’associatifs (FCBV, LPO Misson Rapaces, LPO Drôme, LPO Isère, CORA Faune sauvage,
etc.).
Seront des partenaires techniques privilégiés :
-
les associations, Vautours-en-Baronnies et International Bearded-Vulture Monitoring
et Agir pour la Sauvegarde des Territoires et des Espèces Remarquables ou Sensibles
(ASTERS). Cette dernière ayant réalisé l’opération de réintroduction du Gypaète
achevée en Haute-Savoie, participe à la reproduction de l’espèce en captivité et
coordonne sa réintroduction dans les Alpes françaises ;
-
le Parc National des Ecrins, qui centralise les données de Gypaète en Dauphiné. Son
territoire, au centre d’un zone d’estivage massif de vautours fauves non nicheurs et
quelques vautours moines, provenant surtout de la population de la zone d’étude, le
sera nécessairement également par des gypaètes qui y seront lâchés.
Le protocole commun de réintroduction et de suivi entre ASTERS et le Parc National du
Mercantour fournit un modèle (Geng, Heuret & Rouillon) qui pourrait être adapté au contexte
local et aux connaissances actuelles. La compétence de l’association étant reconnue en la
matière, ce qui suit analyse les aptitudes à réaliser l’opération de l’autre partenaire : le Parc
Naturel Régional du Vercors.
A. - UN CONTEXTE GENERAL DE RETOUR LA GRANDE FAUNE
En France comme dans l’ensemble de la chaîne des Alpes, il n’y a guère de territoires qui
puissent se comparer à celui du Parc Naturel Régional du Vercors par le retour de sa grande
faune54, avec ou sans réintroduction :
1. Retours spontanés
Sanglier Sus scrofa : dès le premier quart du XX° siècle ;
Héron cendré Ardea cinerea, tous cours d’eau, localement avec nidification ;
Grand cormoran Phalacrocorax carbo : en hivernage sur les grands cours d’eau encadrant
Parc Naturel Régional du Vercors au nord et à l’ouest avec remontée à l’intérieur des Préalpes
en petit nombre le long des basses vallées ;
Loup Canis lupus : la source des pionniers a été le renouveau de l’espèce en Italie
péninsulaire d’où elle a gagné les Alpes françaises par le Mercantour, dont la zone d’étude.
Les difficultés de la gestion de sa cohabitation avec l’élevage font trop souvent oublier que ce
qui permet au Loup de vivre toute l’année c’est d’abord le renouveau spectaculaire des
Ongulés sauvages, base de sa subsistance : en Europe en général, dans le Parc du Vercors et
massifs contigus en particulier.
54
On peut toujours discuter la limite inférieure de la faune dite « grande ». On y a inclus ici la totalité des
Ongulés, ainsi que les deux Rongeurs de taille très supérieure à celle des autres espèces de l’ordre en Europe :
Marmotte et Castor. Du point de vue démographique ce sont toutes des espèces qui, autrefois, n’avaient pu
compenser prélèvements ou/et destructions, en dépit de la persistance d’habitats favorables.
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À l’échelle locale, certaines espèces, naguère réduites à une minorité de stations du territoire
du Parc Naturel Régional du Vercors, ont fait un très large retour spontané dans les biotopes
adéquats du massif : Chamois R. rupicapra55, Rapaces en général, dont les plus
remarquables sont Aigle royal Aquila chrysaetos, Jean-le-Blanc Circaetus gallicus, Autour
Accipiter gentilis, Pèlerin Falco peregrinus, Grand-duc Bubo bubo.
2.
Réintroductions56
Cerf Cervus elaphus, Chevreuil C. capreolus, d’abord, puis Marmotte Marmotta marmotta,
en 1989-90 Bouquetin Capra ibex et, de 1996 à 2008, Vautour fauve Gyps fulvus.
C’est dans le Vercors qu’ont vécu, au moins jusqu’à la fin des années 1930, les derniers
individus d’Ours Ursus arctos des Alpes françaises. Une étude de faisabilité (Erome &
Michelot 1990) couvrant leur ensemble a conclu que le Vercors et le Haut-Diois étaient, de
nos jours, leur zone la plus favorable au retour de l’espèce. Le Parc Naturel Régional du
Vercors a organisé un colloque avec des spécialistes européens de l’espèce qui ont visité les
biotopes et validé l’étude et ses conclusions. Non réalisé le projet n’est nullement
officiellement abandonné. D’autres espèces pourraient encore être réintroduites.
3. Processus mixtes
Lynx Lynx lynx : retour spontané à partir de la Suisse, où l’espèce avait été antérieurement
réintroduite. Retour permis par le renouveau des Ongulés, surtout celui du Chevreuil ;
Castor Castor fiber : retour spontané à partir du bas bassin du Rhône, où l’espèce avait
survécu. Concerne le sud du PNRV pour le bassin de la Drôme. Réintroduction dans la région
grenobloise, d’où il a gagné la Gresse, jusque dans l’est du PNR du Vercors ;
Vautour moine Aegypius monachus. L’estivage d’individus de la population réintroduite
avec succès dans les Causses, régulier depuis 2002 aux confins du Diois et du Vercors, nulle
part ailleurs dans les Alpes avant les premiers lâchers dans les Baronnies et, depuis ces
derniers, la présence de l’espèce en toutes saisons, traduisent la qualité des biotopes, la
diversité et l’abondance des Ongulés sauvages et domestiques, donc de leurs cadavres. Un
couple semble se cantonner à Chamaloc ;
Vautour percnoptère Neophron percnopterus. Le retour de ce picoreur de bribes, nettoyeur
de carcasses, est le résultat d’une synergie :
- démographique = source d’oiseaux : la population jadis relictuelle de la région
méditerranéenne française (Gallardo 2006) désormais en renouveau ;
- écologique = nourriture : charniers à Vautour fauve et renouveau de la grande
faune ;
- éthologique = stimulus : l’espèce a évolué en finisseur de restes et suiveur des
grands vautours.
55
En dépit de certains sous-peuplements locaux du fait d’attributions de prélèvements excessives.
56
L’introduction d’espèces exotiques peut user de moyens analogues : les lâchers. Mais, processus
majeur d’altération de la biodiversité, elle est diamétralement opposée aux politiques visant à la conserver ou à la
restaurer. La zone d’étude n’est pas totalement indemne des séquelles de cette « maladie infantile » de la
protection de la nature d’antan qu’exprimait l’expression désuète : « Société d’Acclimatation ». On doit y
déplorer l’introduction du Mouflon Ovis gmelini. La gestion cynégétique actuelle des populations subsistantes de
l’est et du sud-ouest Vercors ainsi que des confins méridionaux de la zone d’étude et du Ventoux ne vise plus à
développer ces populations d’exotiques, bien au contraire. Le précédent du Mercantour permet d’espérer que,
particulièrement dans les zones à fort enneigement, le retour du Loup contribuera à supprimer ou réduire cette
aberration biogéographique. Les tentatives d’introduire le Sika Cervus (Sika) nippon et le Faisan vénéré
Syrmaticus reevesi ont, elles, échoué… heureusement !
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pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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La réintroduction du Vautour fauve, comme dans les trois autres massifs qui en ont bénéficié
en France, a ici joué dans le Parc Naturel Régional du Vercors ce rôle éco-éthologique.
Une quarantaine d’années après la disparition de l’espèce au nord de la rivière Drôme, son
retour y a recommencé en 2001, d’abord, centré sur le site de réintroduction de Chamaloc.
Le charnier de cette commune du Diois est toujours fréquenté par le couple qui, depuis 2008,
niche avec succès dans le sud-ouest du Vercors (cf. supra) comme par des non nicheurs.
B. - A LA CONVERGENCE DE GRANDS AXES POLITIQUES DU .PARC
NATUREL REGIONAL DU VERCORS
1. Une politique ferme, ancienne, persévérante de conservation et restauration de la
biodiversité
LE RETOUR DE TREIZE GRANDES ESPECES, LE RENOUVEAU SPECTACULAIRE DE PLUSIEURS
AUTRES dont deux grands Carnivores, quatre Ongulés, trois vautours C’EST D’ABORD ET
FONDAMENTALEMENT UNE TRES REMARQUABLE RECONSTITUTION DE LA BIODIVERSITE
FAUNISTIQUE. Ceci que le Parc Naturel Régional du Vercors ait pris l’initiative de ces retours,
qu’il en ait simplement bénéficié ou que, comme dans le cas du Loup, sans l’avoir voulu, il ait
assumé la gestion de la cohabitation avec l’espèce. Or, par leur originalité taxonomique, leurs
habitats ou/et leur place dans le fonctionnement des écosystèmes, ces grands animaux ont un
poids dans la biodiversité qui dépasse de beaucoup le seul nombre de leurs espèces,
relativement modeste.
LA POLITIQUE DE CONSERVATION ET RESTAURATION DE LA BIODIVERSITE DU PARC
NATUREL REGIONAL DU VERCORS, DE LONGUE DATE ET PERSEVERANTE, est pour beaucoup
dans ces retours et renouveaux, notamment en ce qui concerne les espèces réintroduites par
lui directement (Bouquetin, Vautour fauve et, en coopération, Marmotte) ou indirectement
(Percnoptère, Vautour moine). Dès son entrée en fonction, et à diverse reprises ensuite,
le Président Pillet, au sommet de la direction politique du Parc Naturel Régional du Vercors,
avait affirmé, réaffirmé ensuite, que la conservation et la restauration de la biodiversité en
général, les réintroductions en particulier, étaient au nombre des missions majeures de cet
organisme. La présidente Pic, qui lui succédé depuis la première rédaction de ce travail, n’a
nullement remis en cause cette orientation. Celle-ci irait de soi dans un Parc National.
Dans un Parc Naturel Régional, syndicat mixte de communes et collectivités territoriales,
cette prise de position publique ferme montre une volonté politique du Bureau qui mérite
d’être soulignée.
2. Retombées pour d’autres politiques
a. - POLITIQUE AGRICOLE
La réintroduction des vautours en général est une contribution à la gestion des charognes en
zone d’élevage extensif élégante, efficace et économique (cf. Chassagne et in ANNEXES II Choisy
2004 b). Le retour du Gypaète, consommateur des squelettes, complètera la guilde des grands
charognards.
b. - POLITIQUE DE DEVELOPPEMENT DU TOURISME RURAL
Le développement du tourisme rural est l’un des grands axes de l’action du Parc Naturel
Régional du Vercors. LES PROFESSIONNELS DU TOURISME SONT DE PLUS EN PLUS
CONSCIENTS DE L’ATOUT MAJEUR QUE CONSTITUE UN RETOUR AUSSI SPECTACULAIRE DE LA
GRANDE FAUNE, à trois niveaux, d’intensité et d’extension inverses :
- SUPPORT MEME DU TOURISME NATURALISTE « FAUNE », dont la clientèle, minoritaire
mais en expansion, est fortement motivée par l’extrême diversité. La région Rhône-Alpes
est actuellement la seule d’Europe où, depuis 2009, pondent des couples des quatre
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vautours du continent, bien que le Vautour moine n’ait pas encore élevé de jeunes, les trois
autres que le Gypaète le faisant dans la zone d’étude. Le retour du Gypaète donnera aux
Préalpes du Dauphiné méridional un caractère ornithologique exceptionnel par la
cohabitation des quatre Vautours d’Europe.
- SUPPLEMENT TRES APPRECIE DU TOURISME DE PLEIN AIR : une probabilité élevée de
rencontrer la grande faune est extrêmement appréciée par un nombre considérable de
randonneurs. Les plus « rentables » sont actuellement, sans conteste, Bouquetin et Vautour
fauve : grandes espèces observables sans contraintes d’horaire, à distance modérée, voire
courte, et souvent en nombre. Ces deux espèces sont désormais associées aux Hauts
Plateaux du Vercors dans l’esprit des randonneurs, la seconde également plus largement :
du Diois au sud du Vercors.
- MARQUAGE FORT DU TERRITOIRE DANS LA REPRESENTATION QUE S’EN FAIT LE GRAND
PUBLIC SUSCEPTIBLE D’Y VENIR SEJOURNER : « si la grande faune prospère, c’est donc
une région à la nature préservée, donc agréable pour y passer ses vacances ».
Écologiquement un peu simpliste mais il faut bien constater que, au niveau des
représentations, ça fonctionne !
c . – CULTURE : UN FAIT SOCIAL CONCERNANT LE NIVEAU POLITIQUE
Le retour de la grande faune en général, du Gypaète en particulier, ajoute à l’émotion57 du
plus grand nombre face aux grands animaux une dimension culturelle certaine ; objet de
recherches scientifiques sur divers aspects de la biologie des espèces, support à la créativité
artistique du photographe, du peintre, du sculpteur, de diffusion dans le public des
connaissances acquises et des œuvres créées.
d. – PERCEPTION
DU TERRITOIRE PAR SES HABITANTS
COMPTE AU NIVEAU POLITIQUE
:
UN AUTRE FAIT SOCIAL PRIS EN
Bien entendu, le monde associatif concerné (naturalistes, protecteurs de la nature), souvent
partenaire, notamment pour des études et des suivis, perçoit très positivement ce qui précède.
Peut-être moins attendue : l’exploitation de quatre cents questionnaires d’enquête58 retournés
a montré à la rubrique « Ce qui plaît le plus aux habitants sur le territoire du Parc » que le
premier rang revenait à « l’environnement naturel ». Si on considère que « les services de
proximité » et « la proximité d’un pôle urbain », légitimes préoccupations matérielles,
n’arrivent qu’aux quinzième et seizième places, soit en fin de classement, « la faune » au
septième rang, après « les relations humaines » et avant « la flore », occupe un rang très
honorable.
En dépit de problèmes très réels de cohabitation avec quelques espèces (essentiellement Loup
et Sanglier), le retour de la grande faune est globalement perçu par la grande majorité des
habitants comme valorisant le territoire, sans qu’on puisse en réduire les motivations aux
retombées touristiques escomptées ou à la possibilité de chasser certains Ongulés. Cette
composante socio-culturelle, trop souvent négligée, mériterait d’être davantage prise en
considération, car tout ce qui contribue à donner aux ruraux une perception positive du
territoire qu’ils habitent est un facteur sociologiquement dynamisant.
57
Emotion complexe : esthétique, certes, mais non pas exclusivement.
Enquête de mai-juin 2006 dans le cadre du renouvellement décennal de la charte du Parc Naturel
Régional du Vercors, bureau d’étude EDATER.
58
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La réussite des réintroductions antérieures, leur perception positive par l’opinion
publique dominante, y compris au fil des ans de la part d’une fraction initialement
réticente, constitue un précédent créant a priori positif en faveur de nouvelles
opérations : facteur favorable à leur réussite.
3. Réintroductions : des compétences et des moyens
Les projets de réintroduction de toutes espèces qui peuvent être portés ou soutenus par une
structure officielle telle que Parc National, Réserve Naturelle ou Parc Naturel Régional
disposent généralement de moyens de réalisation généralement bien supérieurs à ceux
d’autres projets, par ailleurs tout aussi justifiés pour la restauration de la biodiversité.
Le biotope de la zone d’étude le plus favorable au lâcher de Gypaète se trouve dans le
PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS, aux confins de la RESERVE NATURELLE DES
HAUTS PLATEAUX DU VERCORS, la plus vaste de France, gérée par le Parc, et d’une
RESERVE BIOLOGIQUE FORESTIERE gérée par l’Office National des Forêts.
Photo T. PUJOL
Photo 54. – La Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors, vue aérienne partielle
.
vers le N-NE, d’un planeur à 1500 m. au dessus de la Grande Cabane.
Pour une vue analogue de la partie sud cf. supra photo 33.
Ces statuts représentent de réels avantages, tant du point de vue du personnel disponible et de
la réglementation en vigueur que de l’obtention de financements.
Le statut de Réserve Naturelle de la partie du Parc Naturel Régional du Vercors de la zone
plus favorable à la réalisation des lâchers donne des moyens réglementaires et de garderie
pour prévenir ou supprimer d’éventuels perturbations très au-dessus de la moyenne, ainsi que
pour la surveillance pendant le séjour des juvéniles au taquet et le suivi ultérieur,
notamment pendant la phase d’acquisition de l’indépendance. Ces personnels sont déjà
engagés dans le suivi de la reproduction du Vautour fauve.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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Le biologiste de terrain du Parc Naturel Régional du Vercors concerné par les réintroductions
de Bouquetin et de Vautours fauve, par leur suivi et par celui du Percnoptère et du Vautour
moine, a acquis une compétence reconnue, tant sur le plan technique que scientifique : par sa
contribution au progrès des connaissances de l’éco-éthologie de ces espèces. Preuve en est la
fréquence des consultations ou demandes de coopération qu’il reçoit en tant qu’expert pour :
- critique constructive d’études de faisabilité de réintroduction du Bouquetin dans d’autres
Parcs Naturels Régionaux français (et même un projet relatif au Chamois dans le Massif
Central) ;
- critique constructive d’études de projets de réintroduction de Vautour fauve en Roumanie,
en Bulgarie, en Italie ;
- co-rédaction d’un guide méthodologique pour la réintroduction du Vautour fauve, à
destination de chargés d’études de faisabilité à l’étranger ;
- échange et diffusion d’informations sur les mouvements de vautours en Europe à distance
des population en Europe à la belle saison (isolés jusqu’en Scandinavie, groupes jusqu’en
Allemagne et aux Pays-Bas).
Il participe régulièrement aux réunions de travail, séminaires, colloques français et
internationaux consacrés aux quatre espèce de Vautours d’Europe et prépare plusieurs articles
sur la biologie de ces espèces et/ou leur réintroduction.
Tant le biologiste que les gardes évoqués ci-dessus, outre qu’ils ont une grande pratique des
trois autres espèces de Vautours d’Europe ont suivi le stage d’une semaine sur le Gypaète
organisé dans les Pyrénées par l’Atelier Technique des Espaces Naturels avec la coopération
du FIR – LPO.
Dans le cadre du suivi local et à grande distance des trois autres espèces de vautours,
un réseau très étoffé d’observateurs est animé, déjà collectant et rediffusion des informations
sur les vautours de toutes espèces. Il est tout autant prêt à fonctionner pour le Gypaète et a
d’ailleurs déjà fourni certaines des données de cette espèce dans la zone d’étude. La diffusion
des actualités et documents se fait depuis la fin de 2007 via un site :
http://www.parc-du-vercors.fr/blog-nature
On y trouvera également documents et articles de diverses provenances. Ce réseau coopère
déjà avec celui de l’IBM consacré au suivi du Gypaète dans l’ensemble de la chaîne alpine.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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CONCLUSIONS à ce niveau de l’analyse
LE TERRITOIRE DU PARC NATUREL REGIONAL DU VERCORS
EST EMINEMMENT FAVORABLE A LA REALISATION D’UNE OPERATION
REINTRODUCTION
DU
GYPAETE
DANS
LA
ZONE
D’ETUDE,
PAR LES COMPOSANTES LES PLUS DIVERSES DE SON CONTEXTE LOCAL :
..- RESTAURATION SPECTACULAIRE DE LA GRANDE FAUNE
en cours depuis des décennies ;
..- POLITIQUE DE CONSERVATION ET RESTAURATION
DE LA BIODIVERSITE. Pour la grande faune, réintroductions de certaines espèces,
gestion de difficiles problèmes de cohabitation avec d’autres, revenues seules ;
..- OPINION PUBLIQUE : perception largement positive tant du retour de la grande faune
que de la politique ci-dessus ;
..- IMPORTANTES STRUCTURES OFFICIELLES DE GESTION
- ET DE PROTECTION DE L’ESPACE NATUREL
engagées dans ces politiques, dont le Parc NATUREL REGIONAL DU VERCORS
qui dispose en matière de REINTRODUCTION de :
a) COMPETENCES TECHNIQUES ET SCIENTIFIQUES ;
b) MOYENS DE REALISATION ;
c) BILAN : REUSSITES ANTERIEURES.
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Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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Photo 55. – Toutes les conditions sont réunies pour retour du Gypaète dans la zone
d’étude : falaises, éboulis, bouquetins, contexte humain, moyens de réalisation et de suivi,
Parc Naturel Régional du Vercors et Réserve Naturelle des Hauts Plateaux.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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CONCLUSION
La restauration du Casseur d’os, dynamique dans les Alpes et les Pyrénées, est globalement à
peine amorcée à l’échelle de l’Europe.
Même dans les Pyrénées, elle est loin d’être achevée : cent quarante couples sur dix-neuf
mille kilomètres carrés des Pyrénées ne font qu’un seul couple pour cent trente six kilomètres
carrés.
Dans les Alpes les effectifs actuels n’atteignent qu’un huitième de ceux des Pyrénées sur une
aire dix fois plus étendue : le sous-peuplement relatif est donc énorme.
Avec dix-sept couples, dont onze nicheurs, la pérennité du Gyapète dans les Alpes reste très
fragile.
Le lent accroissement de la reproduction en liberté dans les Alpes, l’achèvement opérationnel,
atteint en Haute-Savoie, approché au Stelvio-Engadin, sont très encourageants. Mais un
relâchement prématuré des efforts risquerait fort de les gaspiller. Ils doivent, au contraire, être
exploités stratégiquement par la poursuite, et même l’intensification des lâchers.
La très récente augmentation de la production de gypaètes en liberté en donne les moyens.
Mais les effectifs disponibles de ces précieux oiseaux restent modestes par rapport aux
besoins et leur coût individuel élevé. Deux raisons pour améliorer la stratégie de
réintroduction sur la base des connaissances actuellement disponibles : le présent travail a pu
s’appuyer, aux échelles spatiales les plus diverses, sur une somme de connaissances, sur des
publications récentes et solides, dont on trouvera certaines en ANNEXES.
Certes, la réintroduction du Gypaète reste une démarche expérimentale, n’excluant pas
totalement l’imprévu et dont le suivi continue à enrichir la connaissance de l’espèce. Mais on
est désormais très loin de l’époque « héroïque » des pionniers59.
Deux nouvelles opérations sont à la fois possibles et, par leur position géographique,
stratégiquement prioritaires à l’échelle des Alpes comme de l’Europe. L’une d’elles est l’objet
du présent travail. Elle seule bénéficie actuellement d’un état d’avancement du projet et d’une
structure, le territoire du Parc Naturel Régional du Vercors, permettant un très prochain
passage à l’acte. De ce fait, elle disposera donc chaque année d’un contingent étoffé
d’oiseaux : un facteur essentiel du rendement démographique des lâchers.
59
Le succès actuel de la réintroduction du Vautour fauve dans le sud de la France, du Gypaète dans les
Alpes ne doit pas faire oublier les premières tentatives. Outre la hardiesse des pionniers, leur détermination leur
valeur d’exemple, il faut souligner que, malgré leurs échecs, ces premières expériences ont été riches
d’enseignements. « Imaginée dès le début de ce siècle (le XXe), notamment par A. RICHARD, premier président
de « Nos Oiseaux », la réintroduction du Gypaète dans les Alpes ne s’est concrétisée qu’à parttr des années
septante. Un premier projet franco-suisse vit le jour sous l’égide, entre autres, de P. GEROUDET » (Arlettaz) et
de G. AMIGUES. Invités d’honneur du colloque au Grand Bornand marquant les 20 ans de la réintroduction
l’automne 2006, ces deux pionniers ont présenté un récit vivant et remarqué de cette première tentative
mondiale, quelques semaines avant que le premier soit enlevé à l’admiration, à la reconnaissance et à l’affection
des naturalistes, francophones et autres.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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Éventuellement complétée dans les Causses, une opération à l’extrême ouest des Alpes sera
une étape essentielle pour la constitution en une même métapopulation des gypaètes de cette
chaîne et de ceux des Pyrénées. Ceci, tant du point de vue de la dynamique de population que
de la diversité génétique et de la probabilité de pérennité, constituera une amélioration
considérable pour chacune de ses composantes comme pour ce vaste ensemble, central dans la
poursuite de la restauration de l’espèce en Europe.
Photo R. MATHIEU, Observatoire de la faune drômoise CORA-FRAPNA
Photo 56. – Couple de Gypaète Gypaetus barbatus dans les Pyrénées espagnoles.
PARTICIPER A LA REINTRODUCTION DU GYPAETE EST DANS LE DROIT FIL DE LA POLITIQUE
PERSEVERANTE DE RESTAURATION DE LA BIODIVERSITE DU PARC NATUREL REGIONAL DU
VERCORS SUR SON TERRITOIRE, AVEC D’AUTRES RETOMBEES LOCALES TRES POSITIVES.
AUX
ECHELLES
ALPINE
ET
CONTINENTALE
CETTE
OPERATION
LUI
UN ROLE DE PREMIER PLAN A JOUER, A LA HAUTEUR DE CETTE RESPONSABILITE.
OFFRE
IL
N’ Y FAUT QU’INTELLIGENCE STRATEGIQUE ET VOLONTE POLITIQUE, DONT ON NE
SAURAIT DOUTER.
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+
+
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Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
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OUVRAGES ET TRAVAUX CITES OU UTILISES
En caractère gras : les plus utilisés, certains joints en ANNEXES
Arlettaz R. (1996) Observations en Valais (Alpes suisses) de Gypaètes barbus (Gypaetus
barbatus) issus de réintroduction : un premier bilan (1986-1995). Nos Oiseaux 43 : 369-388.
Arroyo B. & Razin M. (2006) Effect of human activities on bearded vulture behaviour and
breeding success in the French Pyrenees. Biological Conservation 128, 276-284.
Bijleveld M. (1974) Birds of prey of Europe. The MacMillan Press Ltd. 263 pp.
Clémente C., Eliotout B. Benoît Lequette, Jean-Pierre Martinot, Stéphane Mélé, Martine
Razin, Antoine Rouillon, Jean-François Séguin, Philippe Serre, Yvan Tariel, JeanClaude Thibault, José Torre, Marie Zimmermann (2006)
Plan national de
restauration du Gypaète Barbu. Document de travail, provisoire. Ligue pour la
Protection des Oiseaux, Ministère de l’Environnement et du Développement
Durable.
Chassagne épouse Quelennec M. (1998). Les vautours, équarisseurs naturels des Grands
Causses. Thèse de doctorat vétérinaire. Ecole Nationale Vétérinaire de Lyon.
Choisy J.-P. (1990) Le Bouquetin des Alpes (Capra ibex L.) et les facteurs écologiques.
Comparaison avec les autres espèces. 1ère partie : le point des connaissances
actuelles. 2ième partie : Faits et interprétation, Bulletin mensuel de l’O.N.C., n° 114,
pp 27-37, n° 115, pp 13-23.
Choisy J.-P. (1992) Le Retour du Bouquetin dans la Drôme. Etude de faisabilité de sa
réintroduction dans l’ensemble des sites favorables du département. Bilan de la 1ère
phase. Conseil Général de la Drôme avec la participation de la FRAPNA-Drôme.
109 pp.
Choisy J.-P. (1995) Le Bouquetin des Alpes dans le Vercors. Deuxième étape de son retour.
Le Vercors dans le contexte général de la réintroduction des Bouquetins en France.
La réintroduction du Bouquetin des Alpes dans le Vercors : situation, perspectives,
propositions. Parc Naturel Régional du Vercors. 67 pp. + annexes.
Choisy J.-P. (2002) Réintroduire des Vautours en Europe. Les Alpes une position clé.
Objectifs et stratégie : éléments de réflexion. Parc Naturel Régional du Vercors. 9 pp.
disponibles par courriel [email protected] (également en allemand et
en italien).
Choisy (2003) Réintroductions animales et biodiversité. Objectifs, stratégies. La Fayolle,
revue d’information naturaliste et culturelle du Parc Naturel Régional du Vercors,
n° 5, pp 18-31. disponible par courriel [email protected]
Choisy J.-P. (2004 a) La réintroduction des Vautours. Objectifs, retombées. Parc Naturel
Régional du Vercors. 4 pp. disponibles par courriel [email protected].
Choisy J.-P. (2004 b) Vautour et élevage extensif. Parc Naturel Régional du Vercors. 8 pp.
disponibles par courriel [email protected].
Choisy J.-P. (2006) A propos de conservation et restauration du gypaète : objectifs, stratégie,
tactiques, etc. Document de travail interne au groupe de réflexion travaillant au Plan
national de restauration du Gypaète Barbu du Ministère de l’Environnement et du
Développement Durable. 13 pp.
Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
Jean-Pierre Choisy 2010
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Choisy* J.-P. (2010 ?) A paraître prochainement. Opérations et stratégie de réintroduction.
Exemple du Gypaete Gypaetus barbatus en Europe.
Coirié V. (2007) Bilan du suivi du suivi du Vautour fauve Gyps fulvus l’été 2007 dans le Parc
National du Mercantour. Secteur, Massif du Mounieur. PN du Mercantour.
Cramp S., Simmons K, Gillmor R., Hollom P, Hudson R., Nicholson E., Ogilvie M, Olney P.,
Roselaar C., Voous K., Wallace D & Wattel J. (1980, réimpression 1994) Handbook ot
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Palearctic. Volume II – Hawk to Bustards. Oxford University Press. Pp 58-64.
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New World Vultures to Guineafowl. Lunx Edicions. Pp 52-105 + pp 124-125.
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Nature, La Maison de Valérie, Artus, Centre Ornithologique Rhône-Alpes. 409 pp.
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Reintroduction into the Alps. Annual Reports 2003. FCBV, Frankfurt Zoological
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Foundation for the Conservation of the Bearded Vulture. Bearded Vulture (2004).
Reintroduction into the Alps. Annual Reports 2004. FCBV, Frankfurt Zoological
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Hirzel A., Posse B., Oggier P.-A., Crettenand Y., Glenz C. & Arlettaz R. (2004)
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policy: the case of the bearded vulture. Journal of Applied Ecology 41, 1103–1116
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du parc naturel régional du Vercors, une contribution à la connaissance des suidés
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Rural et environnement » Encadrement C. Bignand Parc Naturel Régional du
Vercors.
Lebreton P. & coll. (1976) Les oiseaux nicheurs rhônalpins. Atlas ornithologique RhôneAlpes. Centre Onithologique Rhône-Alpes et Direction de la Protection de la Nature
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Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
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Schaub M., Zink R., Beissmann, Sarrazin F. & Arlettaz R. (2009). When to end releases
in reintroduction programmes : demographic rates and population viability analysis
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Terrasse J.-F. (2001) avec la coopération de Coton C. et Géroudet P. Le Gypaète barbu. Description,
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Terrasse M. (2006). Evolution des déplacements du Vautour fauve Gyps fulvus en France et
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Tessier C., Henriquet S. & Eliotout B. (2003) Le Vautour moine Aegypius monachus dans les
Préalpes provençales. Etude de faisabilité de la réintroduction du Vautour moine
dans le massif des Baronnies (Drôme) et les Gorges du Verdon (Alpes de Haute
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consumer dominance : scavenging at wolf- and hunter-killed carcasses in Greater
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Wilmers C., D. Stahler, R. Crabtree, D. Smith, K Murphy & W. Getz (2003b) Trophic
facilitation by introduced predators : grey wolf subsidies to scavengers in
Yellowstone National Park. Journal of Animal Ecology 72 : 909- 916
Wilmers C. & W. Getz (2004) Simulating the effect of wolf-elk population dynamics on
resource flow to scavengers. Ecological Modelling 177 : 193-208
Wilmers C. & W. Getz (2005) Gray wolves as Climate Change Buffers in Yellowstone. PLoS
Biol Vol. 3(4), e92. 571-576
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Projet de réintroduction du Gypaète Barbu dans les Préalpes occidentales:
pertinence stratégique, faisabilité, biotope et site de lâcher au PNRV.
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ANNEXES I
ARTICLES ET DOCUMENTS
HORS PARC NATUREL RÉGIONAL DU VERCORS
Schaub M., Zink R., Beissmann, Sarrazin F. & Arlettaz R. (2009) When to end releases in
reintroduction programmes : demographic rates and population viability analysis of
bearded vultures in the Alps. Journal of Applied Ecology, 46 92-100.
Hirzel A., Posse B., Oggier P.-A., Crettenand Y., Glenz C. & Arlettaz R. (2004)
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policy: the case of the bearded vulture.Journal of Applied Ecology 41, 1103–1116
Blackwell Publishing, Ltd.
Arroyo B. & Razin M. (2006) Effect of human activities on bearded vulture behaviour and
breeding success in the French Pyrenees. Biological Conservation 128, 276-284.
Heuret J. (1999) Choix du nouveau site de réintroduction des gypaètes barbus en HauteSavoie. Programme LIFE Nature, Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes
françaises. 4 pp.
Geng M., Heuret J. & Rouillon A. (2000). – Protocole commun de réintroduction et de suivi
des Gypaètes barbus dans les Alpes françaises. ASTERS & P.N. du Mercantour.
Journal of Applied Ecology 2009, 46, 92– 100
doi: 10.1111/j.1365-2664.2008.01585.x
When to end releases in reintroduction programmes:
demographic rates and population viability analysis of
bearded vultures in the Alps
Blackwell Publishing Ltd
Michael Schaub1,2*, Richard Zink3,4, Helmut Beissmann5, François Sarrazin6 and
Raphaël Arlettaz1,2,7
1
Institute of Ecology and Evolution, Division of Conservation Biology, University of Bern, Baltzerstrasse 6, CH-3012 Bern,
Switzerland; 2Swiss Ornithological Institute, CH-6204 Sempach, Switzerland; 3Research Institute of Wildlife Biology,
University of Veterinary Medicine, Savoyenstrasse 1, A-1160 Vienna, Austria; 4International Bearded Vulture Monitoring,
Hohe Tauern National Park, A-9844 Heiligenblut, Austria; 5Konrad Lorenz Institute for Comparative Ethology, Austrian
Academy of Science, Savoyenstrasse 1, A-1160 Vienna, Austria; 6UMR 5173 MNHN-CNRS-UPMC Conservation des
espèces, restauration et suivi des populations, Muséum National d’Histoire Naturelle, 61 rue Buffon, 75005 Paris, France;
and 7The Ecology Centre, University of Queensland, St Lucia, Qld 4072, Australia
Summary
1. Reintroductions are commonly used for re-establishing self-sustainable populations in formerly
inhabited areas. Reintroductions are expensive, and thus, it is worth performing a thorough demographic analysis of current and likely future population trajectories to guide strategic decisions on
release policy.
2. Bearded vultures Gypaetus barbatus were exterminated from the Alps in the late 19th century,
mainly due to human persecution. To re-establish them, captive-bred young have been released
annually since 1986. Since the first successful breeding in the wild in 1997, the population has
increased to 9 pairs in 2006. It is not known, however, for how long releases should be continued to
obtain a self-sustaining, viable population.
3. We estimated age-specific survival probabilities with a mark–resighting model and quantified
fecundity rates of released individuals. Using the resulting demographic estimates, we built a
stochastic population model to estimate population growth rates, and explored the value of
continuing to release birds for varying periods into the future.
4. Annual survival probabilities were high (first year of life, 0·88; later years, 0·96); average annual
fecundity was 0·6 fledglings per breeding pair. Using the estimated survival probabilities, projected
population growth rates would increase with additional years of releases. Yet, the population would
grow, even if releases had stopped after 2006. Only if mortality increased by ≥ 50% would the
population start to decline.
5. Synthesis and applications. Our population dynamics model provides essential information to
optimize decision-making within a major reintroduction programme. From a demographic
viewpoint, releases of captive-raised bearded vultures can be ceased in the Alps. The resources
freed could be redirected towards a close demographic surveillance of the free-ranging population,
with periodic evaluation of its viability and the option to release birds if deemed necessary. Birds
available from the captive stock could be used for reintroductions in other areas where the bearded
vulture is extinct.
Key-words: Alps, conservation, fecundity, Gypaetus barbatus, population growth rate, parameter
uncertainty, survival probability
*Correspondence author. E-mail: [email protected]
© 2008 The Authors. Journal compilation © 2008 British Ecological Society
Population viability of bearded vultures 93
Introduction
Animal population reintroductions and translocations
are likely to become a key tool in conservation biology in
the 21st century (Sarrazin & Barbault 1996; Seddon,
Armstrong & Maloney 2007). Reintroductions usually involve
the intentional release of individuals from captive-reared
stock into a species’ historical range, or translocation of
individuals from thriving populations into relict populations.
Reintroductions make sense only when the principal cause of
extinction has been eliminated (Griffith et al. 1989).
Although reintroductions and translocations are currently
widely used to reinstall or restock populations, strategic
decisions about release policy within such programmes are
still too often based on empirical rules of thumb rather than
on appropriate, quantitative scientific assessment. This is often
associated with a lack of clearly defined quantitative goals
and/or insufficient monitoring of the success or failure of the
chosen management (Sarrazin & Barbault 1996; Seddon 1999;
Armstrong & Seddon 2008). Several techniques developed
by population biologists exist, which can assist in taking
appropriate strategic decisions (Norris 2004). Often, released
and translocated animals are individually marked, and
therefore, vital rates can be estimated using capture–recapture
models. Knowledge of these rates allows us to conduct population viability analyses which can provide decisive insights
into management (Beissinger & Westphal 1998). Quantitative
demographic analyses of reintroduced species are scarce
(Sarrazin & Barbault 1996) and biased towards successful
projects (Seddon, Armstrong & Maloney 2007). In order to
orient future strategic decisions, we applied the demographic
approach to the bearded vultures Gypaetus barbatus (Linnaeus)
which have been reintroduced into the European Alps. This
reintroduction programme is one of the largest and most
publicized European reintroduction projects ever conducted.
The bearded vulture is a large (4·5–7·1 kg) scavenging
raptor that mainly feeds on bones of medium-sized wild and
domestic ungulates, and inhabits mountain ranges in Eurasia
and Africa. It went extinct in the Alps between the late 19th
and the early 20th century (Mingozzi & Estève 1997) mainly
due to shooting and poisoning. In 1986, an international
reintroduction programme, based on the release of birds born
and reared in captivity was launched (Frey 1992). By 2005,
137 individuals had been released. The first successful
reproduction of released birds in the wild took place in 1997,
and by 2006, 9 breeding pairs were established across the
range, with habitat preferences for limestone areas with
abundant populations of ibex Capra capra L. and chamois
Rupicapra rupicapra L. (Hirzel et al. 2004).
It has been proposed that releases in the Alps should be
ceased as soon as the mean yearly number of wild-born fledglings equalled the average number of yearly released young
(n = 6·5; Zink 2005a). A linear model of the number of wild-born
fledglings against year predicted that this number would be
greater than 6·5 by 2007. This strategy may be erroneous, as it
focuses on productivity alone, a parameter whose relevance for
population dynamics in a long-lived species is likely to be low
(Lebreton & Clobert 1991), and as it does not consider other
relevant demographic parameters. Moreover, as the annual
number of released individuals is used as the target, the
management decision is not objective: the ultimate goal is the
establishment of a naturally, self-sustaining population in the wild.
This study aims to estimate for how long further releases of
young will be necessary for ensuring the long-term viability of
the Alpine bearded vulture population. However, we focused
on the establishment of a self-growing population (Armstrong
& Seddon 2008) as a first step towards viability, without considering density dependence since we had no reliable estimate
of the carrying capacity. We used a demographic model that
incorporates all key demographic parameters estimated directly
from data on the released individuals. We explicitly considered
uncertainty in the parameter estimates for the population modelling to ensure careful management recommendations (Ellner
& Fieberg 2003). Such a demographic assessment is also central
for an optimal allocation of financial resources as every young
has accumulated costs of up to A70 000 by the moment of its
release (Frey 1998). Finally, we estimated the sensitivity of the
population growth to changes in survival probabilities to explore
the possible impact of an increased use of illegal poisoned
baits. These may be used against the naturally expanding wolf
Canis lupus L. population in the Alps (Valière et al. 2003), and
might represent a serious threat to bearded vultures.
Methods
RELEASE OF YOUNG
Young bearded vultures reared in different zoos were released at an
age of about 3 months (~3 weeks before fledging) in artificial eyeries
at four sites well scattered across the entire Alpine range (Frey 1992).
Starting in 1986, up to three birds were released per site annually,
amounting to 137 birds released by 2005. The released birds were fed
artificially until they were independent. All birds were marked
individually prior to release with colour rings and with an individual
pattern of bleached wing or tail feathers. The latter marks enable
individual recognition until the termination of the first moult (until
2–3 years of age; Arlettaz 1996).
DATA COLLECTION
Throughout the Alps, professional ornithologists and hundreds of
volunteer birdwatchers have monitored movements of the released
birds since the beginning of the release programme. The birds were
monitored before the start of wing and tail feather moult at 1–2
years of age, using the patterns of bleached feathers, and later by
recording the individual colour ring codes. Moulting patterns, if
discernable on pictures of birds in flight, were used when a good time
series of photographic documentation was available for a given bird
(Arlettaz 1996). In addition, recoveries of dead birds were recorded.
Observations were transferred into a central data bank (International
Bearded Vulture Monitoring, Vienna; Zink 2005b), where a reliability
check was performed; specifically, double entries for a same bird in
distant areas on the same day were eliminated, as they were indications of misidentifications. Such errors were scarce (< 5% of the
observations). We restricted our analysis to observations relating to
birds of certain identity.
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94
M. Schaub et al.
The general survey demonstrated the dispersal potential of the
species: many individuals moved several hundred kilometres from
the release sites, and some individuals eventually settled far from
these sites (Arlettaz 1996; Hirzel et al. 2004; Zink 2004). As a consequence, we consider the whole Alpine population as a single
functional demographic unit in our analysis.
Monitoring of pair formation and reproductive success was
conducted by trained biologists. The good spatial and temporal
survey coverage as well as a high number of sightings of identified
birds by independent observers within a given area suggests that the
chance of failing to locate a territorial pair is low, and the chance of
failing to detect a breeding pair is close to zero.
ESTIMATION OF SURVIVAL PROBABILITIES
From 1986 to 2005, 137 individuals were released, five died before
they fledged and 132 individuals were included in our analyses.
Naturally born individuals (33 up until 2006) were not considered,
because they were not marked individually.
To estimate survival probabilities, we considered mark–resight
data of the 132 individuals from 1986–2005, and dead recoveries up
until May 2006 from the whole Alps. Only resightings (n = 250) from
the months June–October in each year were included in order to
meet the assumption of capture–recapture models that resightings
shall be obtained within a short period of time. Additionally, 17 dead
recoveries from throughout the year were considered.
We used a probabilistic multistate capture–recapture model
(Nichols et al. 1992) to estimate annual survival probabilities jointly
from the mark–resighting data and the dead recoveries. The model
was constructed in such a way that an immediate resighting effect
could be modelled (i.e. individuals that were seen in the preceding
year had a higher probability to be seen in the current year than
individuals that were not seen in the preceding year), which was
detected by a goodness-of-fit test. We used U-CARE (Choquet et al.
2001) and E-SURGE (Choquet, Rouan & Pradel 2009) to analyse
these data (see Supporting Information, Appendix S1).
(denoted a4), the second assumes equal survival probabilities in the
establishment and the territorial phases (a3), and the third assumes
equal survival probabilities in the prospecting, establishment and
territorial phases (a2). We also considered models in which survival
probabilities varied across years. Only additive models (i.e. annual
variations were the same in all age classes) were included due to their
low number of parameters. Interactive models would have had very
limited power to detect differential temporal variation for each age
class given the small sample size.
Resighting probabilities were likely to depend on the age of the
individuals because bleached feathers are lost during the first moult
and because of the different behavioural patterns during the four
phases described above. For example, during dispersal, birds may
move to sites where fewer observers are active, which would decrease
detection probability. We considered the same three age-class models
as above for the resighting probabilities, as well as an additional
model where the resighting probabilities did not depend on age. We
always considered an immediate resighting effect, and also included
models where the resighting probabilities had an additive time effect.
If temporal variation in resighting had been present, it would have
been induced by varying resighting effort, which would affect all
individuals in a similar way.
We considered two age classes for the dead recovery probability.
The probability of recovering dead birds might be higher in the first
year than in later years because released birds usually remain close
to the release sites, where the observation effort is much higher. We
also included models without an age effect and models with additive
time effects.
We conducted model selection in two steps because of the potentially large number of models. For the first modelling step, we
considered 33 models (combination of 8 models for resighting with
4 models for dead recovery, plus a model close to that used to assess
the goodness-of-fit). We identified the smallest set of models whose
Akaike weights (wi) sum to 0·95 (95% confidence set). In the second
modelling step, we combined the structures of resighting and dead
recovery included in the 95% confidence set with the six a priori
defined models for survival. Finally, we calculated the model
averaged mean for the parameters of interest based on the wi.
MODEL SELECTION
Our aim was to obtain reliable survival estimates of released bearded
vultures in order to perform a population viability analysis. We
formulated different models and performed model selection based
on the Akaike’s Information Criterion adjusted for small sample size
and overdispersion (QAICc, Burnham & Anderson 2002).
The life history of bearded vultures can be decomposed into four
phases: juvenile, prospecting, establishment and territorial phases,
respectively. The first year of life corresponds to the juvenile phase,
when young become progressively independent from the adults. The
next 2 years (2–3 years of age) can be considered as a dispersal phase,
when immatures prospect and evaluate the landscape on a broad scale.
Subadults at 4–5 years of age enter an establishment phase when
they get more and more sedentary. Finally, in their sixth year of life,
bearded vultures become fully territorial, adopting a definitive adult
plumage; this is also when first breeding attempts may take place.
Survival probabilities might differ between these phases. For instance,
we expected lower survival in the juvenile and prospecting phases,
compared to the establishment and territorial phases, because there
are risks when birds enter an unfamiliar environment without the
assistance of parents. Based on these life phases, we considered
three different models for the age-specific changes in survival. The
first model considers different survival probabilities for each phase
ESTIMATION OF FECUNDITY
Fecundity (Ft) was estimated as the production of fledglings in year
t divided by the number of territories occupied by adult pairs in year
t. A territory was considered as occupied from the year of first
successful breeding onwards as long as an adult pair was present.
POPULATION MODELLING
Based on our life-history trait estimates, we constructed a post-breeding
census, stage-classified projection model (Caswell 2001) with 12 stages.
Six stages refer to the six age classes before maturity (J and 1–5;
Fig. 1), four stages refer to mature individuals that have not yet
reproduced (6–9), one stage refers to breeders (B) and one stage
refers to mature non-breeders (NB). Survival probabilities were agedependent as identified in the survival analysis. We assumed that
reproduction starts at 6 years of age (Bustamante 1996; Brown 1997;
Antor et al. 2007). Each year, half of the still inexperienced breeders
(classes 6–9, Fig. 1) start to reproduce (α = 0·5), and at 10 years of
age all are assumed to have reproduced at least once. Always present
in bearded vulture populations (Carrete et al. 2006), non-breeders
were incorporated by assuming that a fraction of the potential
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Population viability of bearded vultures 95
Fig. 1. Sketch of the life cycle of a bearded
vulture population with post-breeding census
as used for the present modelling. The nodes
refer to the different stages with J, juveniles;
1–9, 1 to 9-year-old, inexperienced breeders;
B, breeders; NB, non-breeders. The recruitment
transitions are shown with broken lines, the
survival transitions with solid lines. S1, first
year survival; S2, annual survival from age 1
to 3; S3, annual survival from age 3 to 5; S4, annual
adult survival; F, reproductive success; sr, sex
ratio; α, probability that an as yet inexperienced
mature individual starts to reproduce; δ, breeding
probability. Note that only the female segment
of the population is shown; the complete
model includes males as well.
breeders skips reproduction each year. Furthermore, we assumed
that fecundity of the reproducing individuals does not change with
age. We explicitly modelled both sexes, since random deviations
from an even sex ratio can affect population growth negatively in a
small population (Legendre et al. 1999). The number of breeding
pairs in a given year was assumed to be equal to the smallest number
of reproducing individuals of either sex.
In order to incorporate demographic stochasticity, we modelled
survival, fecundity, probability of starting reproduction, and breeding probability as binomial processes for each sex independently.
The binomial process for fecundity was chosen because bearded vultures have at most one fledgling per year (Margalida et al. 2003).
Mathematical details for the population model are provided in Supporting Information, Appendix S2.
Based on the estimated survival probabilities and on the number
of released and wild born individuals, we calculated the number of
individuals theoretically alive in each age class by 2006. The estimated number of experienced breeders amounted to 50 individuals
(25 breeding pairs). However, we used the actually observed number
of breeding pairs in year 2006 (9) and assumed that the remaining
individuals will never reproduce. This leads to a very conservative
scenario. Based on this initial stage-specific population size vector
(7, 7, 6, 4, 5, 3, 2, 1, 0, 0, 9, 0) for each sex, we used simulation to
model the population development. We modelled population growth
over the next 25 years, since this is a time horizon relevant to
management recommendations regarding future release policy. We
estimated the population growth rate with a linear regression model
of the logarithm of the annual number of breeding pairs against time
(Caswell 2001). Ten thousand populations with these features were
simulated to generate mean and 95% confidence intervals of the
population growth rate. Simulations were performed in  ( Development Core Team 2004), and code is available in Supporting
Information, Appendix S3.
To account for the uncertainty regarding the estimated survival
probabilities in the population modelling, we generated for each
iteration specific values from a beta distribution using the model
averaged estimates of the mean and the variance of all age-specific
survival probabilities. Uncertainty of fecundity was accounted for
by creating for each iteration a binomial random variable using the
total number of fledglings and the total number of breeding events
as parameters. These generated parameter values were held constant
across time for the given iteration.
Our main interest was to decide whether further releases of young
are essential to ensure an optimal population development, and if so,
for how long releases should continue. We therefore considered
scenarios reflecting various durations of releases in the future. First,
we assumed that no further release took place after the releases in
2006. In the next cases, we assumed that 3 females and 3 males would
be released each year for the next 5, 10 or 25 years. The uncertainty
about some demographic parameters (fecundity, breeding probability)
was accounted for in different scenarios. Our sample size was too
small to test whether fecundity was constant or stochastic; consequently, we considered two options. In the constant case, we
used the observed mean reproductive success (F ) in the simulations.
To model environmental stochasticity, we randomly chose a yearspecific, observed fecundity ( Ft). Because the fluctuations were
very wide when the population size was low, we only considered
annual fecundities from 1999 onwards. Further uncertainty surrounds the breeding probabilities (δ). We considered four scenarios
(δ = 1, 0·8, 0·6 or 0·4) to include a range from optimistic to pessimistic. The value of δ = 1 is very optimistic and unlikely to be true,
since floating non-breeders occur in many bearded vulture populations (Carrete et al. 2006). By contrast, the value of δ = 0·4 is
pessimistic in the long term, although it is similar to what is observed
currently in the Alps. Based on observations in the Pyrenees, we
regard δ = 0·8 to be the most realistic value (Carrete et al. 2006).
Thus, in total we considered 32 different scenarios (4 different
duration of releases × 4 different breeding probabilities × 2 different
fecundities).
Results
ESTIMATION OF SURVIVAL PROBABILITIES
Modelling of the resighting and dead recovery probabilities
revealed that five top-ranked models yield a summed QAIC
weight of > 0·95 (Supporting Information, Table S1). In these
models, neither resighting nor dead recovery probabilities
were time-dependent, but there was considerable uncertainty
regarding the age structure in both parameters. We combined
the resighting and dead recovery structure of these five
models with the six different models of survival, obtaining 30
models in the final modelling step (Supporting Information,
Table S2). Modelling uncertainty was considerable again,
in particular regarding the age structure of the resighting
and dead recovery probabilities. The four top-ranked models
had constant survival probabilities across time and incorporated two age classes (first year vs. older individuals,
QAIC weights summing up to 0·56), whilst lower-ranked
models differentiated between three to four age classes.
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M. Schaub et al.
Fig. 2. Model-averaged probabilities of survival (a), resighting (b) and dead recovery (c) for bearded vultures in the Alps in relationto their age and
previous resighting history. The over-dispersion coefficient was 9 = 1·224. The vertical lines show the unconditional 95% confidence intervals.
The model averaged survival probabilities were lowest in
the first year, as expected. Thereafter, however, they did not
change much with increasing age (Fig. 2a). The 95% unconditional confidence intervals were relatively wide, reflecting
uncertainty in the parameter estimates.
The model averaged resighting probabilities were highest in
the year immediately following the release (Fig. 2b). If an
individual was not seen in a year, the probability of recording
it in the subsequent year, given that it survived, was very low.
The dead recovery probabilities for young birds were higher
than for older birds (Fig. 2c), but their confidence intervals
were very large.
FECUNDITY AND POPULATION DEVELOPMENT
Bearded vultures reintroduced into the Alps from 1986
started to reproduce in the wild in 1996, totalling 55 breeding
events with 33 fledglings by 2006. Average fecundity was thus
0·6, but there were considerable annual fluctuations (Fig. 3).
Fig. 3. Number of breeding pairs, total number of fledglings, and
fecundity (number of fledglings per territorial breeding pair and year)
of bearded vultures in the Alps from 1996 to 2006.
ASSESSMENT OF DIFFERENT RELEASE STRATEGIES
The projected average population growth rates over the next
25 years were > 1, regardless of the duration of releases, the
different options for fecundity and the different breeding
probabilities (Fig. 4). They increased with increasing duration of releases. Mean population growth rates were higher
when fecundity was constant than when affected by environmental stochasticity, but the difference was marginal. Increasing
breeding probability affected population growth positively,
but this effect declines the longer the releases continued. The
confidence intervals of the population growth rate covered 1
only in the situation where releases stop immediately after
2006 and when the breeding probability is very low (0·4).
Thus, a population decline cannot be ruled out completely
under this pessimistic scenario, although it remains improbable.
The population growth rate strongly declined with increasing mortality (Fig. 5). Mortality needs to increase more than
about 50% to render the mean population growth rate less
than 1, indicating that such an increase can be supported even
if no further individuals were released after 2006 and even if
the breeding probability was low.
Discussion
This study represents the first attempt to estimate life-history
traits of a free-ranging population of bearded vultures in
natural conditions with reliable methods. This was possible
because individuals were systematically marked from the
beginning of the reintroduction and because we applied
modern demographic estimation and analytical methods.
Based on empirical estimates of vital rates, we could evaluate
the growth rate of the Alpine bearded vulture population over
the next 25 years under different durations of releases of
captive-reared young while accounting for uncertainty in
the estimates of the demographic parameters. Overall, our
model suggests that the population will further increase even
if releases cease after 2006, if breeding probability was low
and if mortality increased slightly. We are confident that
releasing young can cease without endangering the established
population, as long as new factors of mortality such as
poisoned baits does not increase mortality by more than 50%,
fecundity remains the same on average and no catastrophic
events occur.
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Population viability of bearded vultures 97
Fig. 4. Estimated population growth rates of Alpine bearded vultures
averaged over 25 years in relation to different release strategies (no
further releases after 2006, or releases of 3 males and 3 females
each year for another 5, 10 and 25 years) and to different breeding
probabilities, when fecundity is either constant or affected by
environmental stochasticity. The vertical lines show the limits of the
95% confidence intervals.
Fig. 5. Sensitivity of the population growth rate (averaged over 25
years) of Alpine bearded vultures to a linear increase of mortality
rates across all age classes with variable breeding probabilities, when
fecundity is constant and when no individuals were released. The
starting values without increase of mortality (0 on the x-axis) refer to
the average survival rates (Fig. 2). The vertical lines show the limits of
the 95% confidence intervals.
Our population model is based on some simplifying
assumptions, which may all impact on the modelling results.
First, we did not consider environmental stochasticity for survival and age at first reproduction. If stochasticity occurs, the
population growth rates would be lower (Tuljapurkar 1989)
and our conclusions too optimistic. However, given the
survival probabilities that are close to 1 and the high sensitivity
of population growth rate to survival, temporal variation of
adult survival is expected to be small, and therefore, it is likely
that any overestimation of the population growth rate is only
slight. The sensitivity of the population growth rate to changes
in the probability of starting to breed (α) is low, and therefore,
variability needs to be strong in order to have any significant
impact on population dynamics. Secondly, we assumed that
adults that had not yet reproduced in the year 2006 would not
reproduce in the future. If this assumption is wrong, which is
very likely, then the population growth rate would in fact be
higher than our conservative estimates. Taken together, we
believe that the population growth rate estimates presented
here are realistic.
Population growth is generally highly sensitive to changes
in adult survival in long-lived species (Lebreton & Clobert 1991).
Several studies have confirmed this to be the case for bearded
vulture populations (Bustamante 1996; Bustamante 1998;
Bretagnolle et al. 2004; this study) but previously, little was
known about actual survival probabilities of free-ranging
bearded vultures. Based on reliable methods, our estimates of
survival recognize two age classes, where first year survival is
slightly lower (0·88) than thereafter (0·96). A larger sample
size and longer time series would be necessary to get more
precise estimates, to detect finer age-structures and to assess
the magnitude of temporal variation of survival probabilities.
Moreover, data from naturally born individuals would be
required to test if the release has costs in terms of survival, as
observed in griffon vultures Gyps fulvus Hablizl (Sarrazin &
Legendre 2000; Le Gouar et al. 2008). Brown (1997) estimated
survival of bearded vultures from South Africa using age
ratio methods, which produces accurate estimates only under
restrictive assumptions (Conn, Doherty & Nichols 2005). He
obtained similar survival estimates for adults as the current
study, but much lower estimates for young individuals during
their first 4 years of life (~0·6). The only other information
about species-specific survival probabilities comes from zoos,
where bearded vultures appear to survive better than in the wild
(year 1, 0·92; years 2–6, 0·99; year 6+, 0·97; Bustamante 1996).
Although we have estimated survival probabilities using a
method which accounts for imperfect detection of both live
and dead individuals, the precision of our estimates was
relatively low. This mainly reflects the relatively small sample
size (low number of individuals) and the heterogeneity of
resighting probabilities among individuals. Although the
monitoring was very intense, it was difficult to re-sight
individuals once they had remained undetected for a year.
Once they lost their conspicuous bleached wing feathers due
to moulting, the resighting probability dropped dramatically
because identification was then dependent on recording their
colour rings or slight details in the moulting pattern, which is
more difficult. Once birds became territorial, the probability
of identification increased again because they mostly stayed
within the same territory and observers invested a great deal
of effort to identify territorial birds. Thus, resighting declined
after the initial wing feather moult (second and third year of life,
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M. Schaub et al.
i.e. prospecting phase) and increased during the establishment
and territorial phases, which is well modelled with the trapdependent resighting probabilities applied in this study.
As population dynamics are very sensitive to variation in
survival and because little is yet known about the important
demographic aspects (e.g. magnitude of temporal variation,
sex-specific variation, survival of wild-born individuals), survival is a key parameter for future monitoring. The number of
natural births will probably increase in the Alps in the
near future, but so far naturally fledged birds have not been
marked in order to avoid disturbances. This impedes any
chance of monitoring survival of the reconstituting population. Genetic sampling (e.g. of feathers collected in the eyrie
after fledging) seems to be a promising non-invasive method
(Gautschi et al. 2000). If a mark–resighting-based monitoring programme, as the one developed here, is to be applied to
genetic data, it must be ensured that repeated samples across
years are collected from young and adult birds. In addition,
sufficiently large sample sizes will be required, otherwise it
will be difficult to detect small but relevant variations in
survival probabilities. Furthermore, genetic tracking will
presumably be expensive and its coverage will be less comprehensive than resightings of individually marked birds.
In this respect, integrated population models, which combine
demographic information from different sources may actually
be useful to make the most efficient use of this diverse information (Schaub et al. 2007).
The average fecundity of 0·6 fledglings per breeding pair
per year is a rough estimate due to the small size of the Alpine
population. Yet, this value is within the range observed in
other areas. In the Pyrenees, fecundity declined with increasing population density from about 0·8 to 0·4 within 25 years
(Carrete, Donazar & Margalida 2006). Bearded vultures were
more productive in South Africa (0·89, Brown 1997), but
much less so in Corsica (France, 0·18, Bretagnolle et al. 2004)
than in the Alps. As evidenced in other raptors (e.g. Krüger &
Lindström 2001), fecundity in bearded vultures may decline
with increasing density due to habitat heterogeneity (suboptimal habitats colonized secondarily) and/or interference
(Carrete, Donazar & Margalida 2006; Carrete et al. 2006).
To date, there is no indication that fecundity is regulated by
density in the Alps.
Based on our estimated survival probabilities and on the
number of naturally born and released individuals, there
should be 50 mature (at least 6 years old) individuals alive in
2006. Only 18 (9 breeding pairs, 36%) of these 50 adults were
actual breeders that year, which in theory gives 32 additional
mature individuals. Although non-breeding floaters are
common in bearded vulture populations (Carrete et al. 2006),
the comparative figure for the Alps seems to be very high.
An important reason why so many mature individuals do not
reproduce could be due to inverse density-dependent phenomena such as Allee effects (Derdedec & Courchamp 2007).
First, the slightly biased sex ratio in the released individuals
(43% males, 57% females, n = 118 sexed individuals), could
lead to mating problems typical of small populations scattered over a huge area. Secondly, the local density of available
partners may still be too low in the Alps to allow mating
choice and pairing to operate properly. For example, two of
the released individuals only started to reproduce in their 13th
and 17th year of life, respectively, which is an unusually old
age for first reproduction in bearded vultures (Brown 1997;
Antor et al. 2007). The observed annual population growth
rate calculated from the number of breeding pairs between
1999 and 2006 was much higher (1·245) than the highest
estimate drawn from our model (1·113). This difference
cannot be explained by demographic mechanisms (e.g. immigration). The most likely reason is a sudden acceleration in
the formation of new pairs and reproduction thereof, as the
likelihood of new pair formations increases as a non-linear
function of the number of mature birds within the population
if an Allee effect occurs. We thus predict a decline in the
proportion of non-breeding adults in the future, when this
initial boosting mechanism will be over, with a progressive
decrease of the observed population growth rate to values
similar to those of our population modelling.
Although the Alpine bearded vulture population is
presently increasing, with further releases judged superfluous,
caution must be exercised with regard to any additional
alteration of survival. Our model shows that the population
would currently be capable of sustaining a 50% increase in
mortality, even at very low breeding probabilities, which
provides a buffer against potentially new emerging threats.
Yet, in a population which consists of 50 individuals older
than 6 years, an increase from 2 to 3 yearly fatalities would
already lead to critical mortality levels. There is thus a real
risk that the illegal practice of depositing poisonous baits
against wolves currently recolonizing the Alps may obliterate
the reintroduction effort. Tight monitoring of the poisoning
situation is therefore essential to protect the bearded vulture
population.
RECOMMENDATIONS FOR FUTURE MANAGEMENT
The model presented here shows that continued release
of young bearded vultures into the Alps would enhance
population growth rate, corroborating previous predictions
(Bustamante 1998; Bretagnolle et al. 2004). However, the
present analysis also demonstrates that the population has
been self-sustainable since 2006. From a purely demographic
viewpoint, we therefore recommend ending releases in the
Alps and redirecting reintroduction efforts towards other
areas where the species is now extinct (e.g. Sardinia, Balkans).
Demographic management in the Alps should now
concentrate on close surveillance of the breeding pairs, with
systematic collection of data on fecundity and survival
probabilities of wild-born birds, which may differ from
captive-reared birds. This requires systematic marking of
young plus sampling of genetic material at the eyrie, practices
avoided so far to minimize disturbance. In the future, analyses
combining demographic and genetic information should be
performed periodically. Further releases from captive populations should remain an option if the wild population
declines in the future.
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Population viability of bearded vultures 99
This study illustrates the relevance of detailed population
modelling studies for orienting strategic decisions in largescale reintroduction programmes. Even when the population
size is still small, the acquired information may prove invaluable for directing conservation effort. Finally, reintroduction projects provide unique opportunities to gather data on
the vital rates of free-ranging species which usually remain
inaccessible for demographic investigations. Ironically,
species that have become extinct in the wild, but have
subsequently been rehabilitated in nature, may well be better
understood than thousands of surviving species for which
knowledge of their population dynamics would greatly assist
conservation management.
Acknowledgements
We express our sincere thanks to the monitoring centres (Mercantour-, Ecrins,
Vanoise-, Gran Paradiso-, Stelvio- and Hohe Tauern National Parks, Alpi
Marittime Natural Park, ASTERS, Stiftung Pro Bartgeier, Réseau Gypaète
Suisse Occidentale, Provincia Autonoma di Trento, Foundation for the
Conservation of the Bearded Vulture) for allowing access to their data. We also
thank hundreds of volunteers who regularly check bearded vultures across the
Alps and report their observations. Marc Kéry, Lukas Jenni, Jean-Dominique
Lebreton and two anonymous reviewers provided important comments on
earlier drafts of the paper. Additional financial support was provided by the
Stiftung Pro Bartgeier.
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© 2008 The Authors. Journal compilation © 2008 British Ecological Society, Journal of Applied Ecology, 46, 92– 100
100
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Received 23 May 2008; accepted 14 October 2008
Handling Editor: Des Thompson
Supporting Information
Additional Supporting Information may be found in the
online version of this article:
Appendix S1 Details about the multistate-capture–recapture
model
Appendix S2 Mathematical details about the bearded
vulture population model
Appendix S3  code for running the stochastic population
model
Table S1. Modelling result for resighting and recovery
probabilities
Table S2. Modelling result for survival probabilities
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the authors. Any queries (other than missing material) should
be directed to the corresponding author for the article.
© 2008 The Authors. Journal compilation © 2008 British Ecological Society, Journal of Applied Ecology, 46, 92–100
Journal of Applied
Ecology 2004
41, 1103–1116
Ecological requirements of reintroduced species and
the implications for release policy: the case of
the bearded vulture
Blackwell Publishing, Ltd.
ALEXANDRE H. HIRZEL*†, BERTRAND POSSE‡, PIERRE-ALAIN
OGGIER‡, YVON CRETTENAND§, CHRISTIAN GLENZ¶ and
RAPHAËL ARLETTAZ*‡**
*Zoological Institute–Conservation Biology, University of Bern, Baltzerstrasse 6, CH-3012 Bern, Switzerland;
†Laboratory of Conservation Biology, Department of Ecology and Evolution, University of Lausanne, CH-1015
Lausanne, Switzerland; ‡Bearded Vulture Network Western Switzerland, Nature Centre, CH-3970 Salgesch,
Switzerland; §Game, Fishery and Wildlife Service, Canton of Valais, Rue de l’Industrie 14, CH-1950 Sion,
Switzerland; ¶Laboratory of Ecosystem Management, Institute of Environmental Science and Technology, Swiss
Federal Institute of Technology, CH-1015 Lausanne, Switzerland; and **Swiss Ornithological Institute, Valais Field
Station, Nature Centre, CH-3970 Salgesch, Switzerland
Summary
1. Species undergoing reintroduction offer a unique opportunity for clarifying their
specific niche requirements because they are likely, if sufficiently mobile, to colonize the
most suitable habitats first. Information drawn from the individuals released first might
thus be essential for optimizing species’ policy as reintroductions proceed.
2. Bearded vultures were extirpated from the European Alps about a century ago. An
international reintroduction programme using birds reared in captivity was launched
in 1986; up to 2003, 121 individuals had been released at four different locations.
Subsequent dispersion throughout the range has been far from homogeneous, resulting
in a clumped occurrence of the first breeding pairs within three main zones that do not
necessarily coincide with release areas.
3. In order to discern ecological requirements we performed a geographical information system (GIS) analysis of bearded vulture sightings collected in Valais (Swiss Alps)
from 1987 to 2001. This area harbours no release site, is situated in the core of the Alpine
range and has been visited by birds from all four release points.
4. During the prospecting phase (1987–94, mostly immature birds), the most important variable explaining bearded vulture distribution was ibex biomass. During the
settling phase (1995–2001), the presence of birds (mostly maturing subadults) correlated
essentially with limestone substrates, while food abundance became secondary.
5. The selection of craggy limestone zones by maturing bearded vultures might reflect
nesting sites that are well protected against adverse weather, as egg laying takes place in
the winter. Limestone landscapes, in contrast to silicate substrates, also provide essential finely structured screes that are used for bone breaking and temporary food storage,
particularly during chick rearing. Finally, limestone substrates provide the best thermal
conditions for soaring.
6. Synthesis and applications. Extrapolated to the whole Alpine range, these findings
might explain both the current distribution of the subadult/adult population and the
absence of breeding records for bearded vultures around release sites in landscapes
dominated by silicate substrates. As reintroduced bearded vultures tend to be philopatric, we suggest that population restoration would be more efficient if releases were
concentrated within large limestone massifs. This case study of the bearded vulture
illustrates the need for continual adaptive management in captive release programmes.
© 2004 British
Ecological Society
Correspondence: Raphaël Arlettaz, Zoological Institute, Division of Conservation Biology, University of Bern, Baltzerstrasse 6,
CH-3012 Bern, Switzerland (fax +41 31 631 45 35; e-mail [email protected]).
1104
A. H. Hirzel et al.
Key-words: Alps, ecological niche factor analysis (ENFA), geographic information
system (GIS), Gypaetus barbatus, habitat selection, niche modelling, reintroduction,
species conservation
Journal of Applied Ecology (2004) 41, 1103–1116
Introduction
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
As part of modern strategies to counter the risks of
biodiversity loss, reintroduction schemes are becoming
more and more common world-wide (Sarrazin &
Barbault 1996; Carroll et al. 2003). Usually relying upon
individuals stemming from captive stocks (Wedekind
2002), they aim at reinstalling wild populations of extinct
species, especially those that have been directly (overkilling) or indirectly (habitat loss, predator or competitor introduction) extirpated by humans (O’Toole,
Fielding & Haworth 2002; Richards & Short 2003;
Ripple & Beschta 2003; Schaub, Pradel & Lebreton
2004). Alternatively, they aim to reinforce relict
populations of critically endangered species (Hodder
& Bullock 1997; Wanless et al. 2002). However,
reintroduction programmes will only be effective if the
ecological requirements of a species or local population
are well understood. Species extirpated before the onset
of modern ecology are of particular concern because
knowledge of their functional position within a local
ecosystem (i.e. their ecological niche) is often poorly
documented, with information often scarce or anecdotal
(Breitenmoser 1998). On the other hand, expanding
populations of released species provide an opportunity
to unravel species’ ecological needs. This is particularly
true if the species shows a high degree of dispersal,
when it might be assumed that individuals will first settle
in those areas that offer the most suitable conditions.
The information drawn from first released individuals
can thus serve to estimate species’ preferences, thereby
guiding subsequent releases within an ongoing reintroduction programme. Reintroduced individuals therefore
offer an opportunity to identify species’ requirements
more easily than long-established populations. We
illustrate this with a study of resource selection in a newly
reintroduced population of bearded vultures Gypaetus
barbatus Linnaeus 1758 in the Alps.
The bearded vulture, or lammergeier, is a large scavenging raptor that feeds primarily on bones. It was
extirpated from the European Alps between the end of
the 19th century and the beginning of the 20th century,
with the date of extinction varying among populations
(Arlettaz 1996; Mingozzi & Estève 1997). A large-scale
reintroduction programme, based on release to the
wild of birds just prior to fledging that were born in
captivity, was launched in 1986 in Austria (Frey 1992).
This was followed by regular releases in three further
Alpine countries: France from 1987 onwards, and
Switzerland and Italy since 1991. Up to July 2003, a
total of 121 individuals has been reintroduced into the
Alps (Frey 2002; see list in Robin et al. 2004). About
60–65% of the released birds are believed to have survived (Frey 2002; Zink 2002), although this figure may
underestimate mortality because released birds are
monitored only passively, principally through patterns
of bleached feathers, a marking technique that enables
individual recognition only until the first moult (i.e.
until 2–3 years of age). Also, the limited number of
marking combinations available, as well as the difficulty of reading markings accurately, particularly by
inexperienced observers, has generated some confusion
about sighting records (Zink 2002). Feather bleaching
has nevertheless illustrated the dispersal potential of
the species: individuals released as far away as central
Austria (375 km), eastern Switzerland (250 km) and
southern France (230 km) have subsequently been
located in Valais in the Swiss Alps.
The first successful breeding event of the released
population occurred in 1997 in Haute-Savoie, France
(Heuret & Rouillon 1998). It was followed by 13 further
chicks that have fledged between 1998 to 2003, and
there were six breeding attempts in 2002 (three in France
and three in Italy). However, no successful breeding
has occurred in Austria and Switzerland, in spite of
numerous observations of mature individuals in these
countries. Several birds released in the Swiss National
Park (the only Swiss release site) settled in nearby Italy.
The absence of established breeding pairs is particularly striking for Austria, as birds were reintroduced
there from the very beginning of the programme. At
least one pair bond was established close to the release
site in Rauris, Austria, some years after the beginning
of the reintroduction effort, and a total of seven successive pair bonds was formed over the years (Zink
2002). The reasons for this lack of success remain
largely poorly understood.
Although no releases occurred in the Alps of Valais
(south-west Switzerland), they are close to the French
release site in Haute-Savoie (30 km from the Swiss border). Bearded vultures were observed in the area soon
after the first French releases in 1987 (Arlettaz 1996). A
network of observers was formed in Valais in 1988, and
the sightings checked meticulously for reliability before
being recorded into a database. Although several individuals, including some adults, have attempted to settle
in Valais, no pair has attempted to breed and the few
pairs consist of subadult individuals. In the mid-1990s,
we noticed that the distribution of bearded vultures
in Valais was heterogeneous, with the species showing
a strong preference for particular areas but avoiding
other apparently suitable mountainous zones.
1105
Reintroducing the
bearded vulture
During the last decade, with the growing availability
of digitalized spatial data, geographic information
systems (GIS) have received growing interest from
conservation biologists. These tools allow better understanding of the species–habitat links and underpin
many spatial predictions in wildlife management
(Augustin, Mugglestone & Buckland 1996; Guisan &
Zimmermann 2000; Jaberg & Guisan 2001; Cabeza et al.
2004; Johnson, Seip & Boyce 2004; Rushton, Ormerod
& Kerby 2004). By performing a GIS-based habitat
analysis using the Valais sighting data set, we sought to
identify which key environmental factors explained
the distribution of bearded vultures. An extrapolation
of these findings to other zones within the Alps could
enable an understanding of why maturing and adult
bearded vultures occupy and breed in some areas, while
others remain uninhabited. Recommendations can
then be made for improving the ongoing international
reintroduction programme.
Data and methods
We analysed the relationships between two GIS data
sets: the distribution of vulture sightings and a set of
environmental descriptors. This allowed us to quantify
and model bearded vulture’s ecological requirements.
 
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
The study area was the canton of Valais in the southwestern Swiss Alps. It covers 5191 km2 (about 2·7% of the
overall area of the Alpine massif, which is 191 000 km2
wide), modelled by a 100 × 100-m resolution raster
map, i.e. 519 124 1-ha grid cells, overlaid on the hectometric Swiss coordinate system (plane projection). Four
categories of environmental descriptors were included
in the analysis: (i) topographical (continuous variables),
comprising altitude, slope and exposition (or aspect);
(ii) geological (presence–absence), comprising compact
limestone, marl, gneiss, granite, rocky area, scree and
water (rivers and lakes); (iii) anthropogenic (presence–
absence), comprising buildings; and (iv) biological,
comprising forest and meadows (presence–absence),
ibex Capra ibex and chamois Rupicapra rupicapra
(biomass), sheep (density) and distance to release site.
The actual environmental variables were derived from
information maps to provide quantitative (a requirement of ecological niche factor analysis, ENFA; Hirzel
et al. 2002) and integrative information. In fact, vulture behaviour and resource selection are probably not
influenced by the quality of a single hectare but rather
by characteristics of a wider area (which we assumed
was circular). We envisaged three possible scales: (i) a
sight-field scale of 500-m radius; (ii) a flight-search
scale of 2000-m radius; and (iii) a long-range exploration scale (unlimited). The two first scales provided
occurrence–frequency maps computed by means of a
circular moving window, while the third provided a
map of the distance to the closest occurrence. Accord-
ingly, each presence–absence descriptor generated
three variables. We used the module CircAn of Biomapper (Hirzel, Hausser & Perrin 2002) and the module
Distance of Idrisi32 (Eastman 1999) to perform these
GIS operations.
The topographical descriptors were averaged by
means of a 2000-m radius circular moving window and
provided four variables: altitude, slope, northness (cosine
of aspect) and eastness (sine of aspect); all were averaged on the moving window. We also computed the
standard deviation of the altitude.
Wild ungulate biomass maps were built as follows.
For the chamois, data were from a detailed census
conducted in 1997–98 (Glenz et al. 2001) of the 24
cantonal gamekeeper districts and the federal and cantonal protected areas. For ibex, we had similar census
data for every colony. In order to increase the spatial
accuracy of the density estimations, we combined the
census information to potential distribution maps of
each species (Hausser 1995) to produce density maps
(individuals ha−1). These densities were finally multiplied
by average sex- and age-dependent body mass (male,
female and young: chamois, 30, 24 and 16 kg, respectively;
ibex, 84, 33 and 22 kg, respectively; Game, Fishery & Wildlife Service, Valais, 1997, unpublished data) to give the
biomass per grid cell (= kg ha−1). Additionally, we computed a map of ibex observation density (kilometric
resolution, database from the Centre Suisse de Cartographie de la Faune, 1999, unpublished data). We used our
own data on sheep density (individuals ha−1) for each
summering pasture, and their spatial coordinates (Cantonal
Veterinary Service, Valais, 1997, unpublished data). As
information about the spatial extent of these pastures
was lacking, we assumed a circular 2000-m radius shape
for all of them. Where two such pastures were overlapping, we retained only the largest density. The distributions of all environmental descriptors were, as far
as possible, rendered more symmetrical by the Box–Cox
standardizing algorithm (Sokal & Rohlf 1981).
  
Throughout the Alps, ornithologists have been monitoring birds’ movements since the beginning of the
release programme. In Valais, a network of observers
(Bearded Vulture Network Western Switzerland), in
collaboration with the Cantonal Game, Fishery and
Wildlife Service has collected and checked 1398 sightings, which stem from at least 29 different individual
birds, from 1987 to 31 December 2001. Most identified
birds (19 out of 29, c. 65%) originated from the release
site in Haute-Savoie. Data recorded included date of
observation, geographical location and, if known, the
identity of marked birds.
Although the observation effort varied with the
occurrence and effort of observers, we assumed that
our data were representative of the actual geographical
occupancy of the area by bearded vultures. Additionally, we controlled for any possible bias in observation
1106
A. H. Hirzel et al.
Fig. 1. Top: location of Valais in the European Alps and Switzerland. Bottom: hill-shade map of the study area (Valais,
Switzerland) showing 1-km2 squares with bearded vulture observations from 1987 to 1994 (black squares) and from 1995 to 2001
(white circles). The geographical subdivision of the study area is depicted by numbers (see Fig. 4).
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
clustering by subdividing the study area into major
valley systems for which observation effort within a
golden eagle Aquila chrysaetos monitoring programme
was quantified (P. A. Oggier). Bearded vulture sightings were also recorded systematically in the same area
by the same observer, and an index of frequency of
observations per observation time unit and year (1990–
2001) could be estimated for each zone separately. Both
species have converging soaring habits and frequently
use similar routes. This enabled us to assess whether
clusters of bearded vulture sightings were observation
effort-dependent or reflected actual habitat preferences
by the species.
The colonization of Valais showed two distinct
chronological phases: (i) a prospecting phase (1987–
94), when immature (i.e. mostly 1–3 years old) individuals mainly visited the south-western parts of Valais,
i.e. the valleys south of the main Rhône valley axis, at
the periphery of the release site in France; (ii) a settling
phase (1995–2001), when mostly maturing birds (sub-
adults; ≥ 3 years old) attempted to settle down in the
north-west of Valais. In order to investigate this change
of behaviour and its possible link to new patterns of
habitat selection, the observation data were divided
into two subsets (Fig. 1). The second data set included
a marginal number of observations of immature birds,
which rendered our spatial analysis conservative because
an even greater contrast would have been found if those
immatures could have been removed from this secondphase analysis.
In the survey, vulture sightings were recorded at a 1km resolution. We built two presence 100-m resolution
maps, hereafter observation maps, by assigning each
record to the central hectare of the kilometric square
where the bird had been seen.
 
A variety of methods have been developed to model
species’ habitat and potential distribution (Guisan &
1107
Reintroducing the
bearded vulture
Zimmermann 2000; Rushton, Ormerod & Kerby 2004).
The majority are based on presence–absence species’
data sets. They make the intuitive assumption that the
presence of a species is an indicator of suitable habitat
and its absence an indicator of unsuitable habitat.
However, there are many cases where these assumptions are not correct. In many cases, absence data are
either unavailable (e.g. museum data, herbarium, atlas
data) or unreliable (e.g. cryptic species, metapopulation
following extinction–recolonization dynamics, invading species) (Hirzel, Helfer & Métral 2001; Peterson
2001; Hirzel et al. 2002; Peterson et al. 2002; Engler,
Guisan & Rechsteiner 2004). In the case of the bearded
vulture, absences were unreliable for two main reasons.
(i) Being philopatric, this raptor is slowly spreading
from its release site, therefore lack of sighting in some
locations might be caused either by unsuitable conditions (true absence) or by the site being too far and
yet unreached (false absence). (ii) This bird explores a
wide area every day, making any systematic sampling
of absences difficult. The first reason is particularly
problematic as the case of a spreading species has been
shown to fool a presence–absence-based method (generalized linear model; Hirzel, Helfer & Métral 2001).
Therefore, we had to use a presence-only approach and
we selected the ENFA (Hirzel et al. 2002) as it has been
shown to be robust to spreading-species bias (Hirzel
Helfer & Métral 2001); it has been applied to several
studies based on presence-only data (Zaniewski,
Lehmann & Overton 2002; Dettki, Lofstrand & Edenius
2003; Reutter et al. 2003; Thomas 2003; Brotons et al.
2004; Engler, Guisan & Rechsteiner 2004). A further
advantage of the ENFA is that there is no descriptor
selection, a sensitive process when stepwise procedures
are involved. Instead, the ENFA computes a weight
for all descriptors indicating their importance for the
species’ niche and their correlations.
    
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
The ecological niche of a species is potentially shaped
by a large number of variables, with various levels of
importance. Moreover, most of these variables exhibit
some degree of correlation. ENFA extracts all relevant
information from these variables while discarding their
correlations and the background noise. It does so in a
similar way to principal components analysis (PCA) by
computing new, uncorrelated factors, a few of them
summarizing most of the information. The main difference between PCA and ENFA is the nature of the
data sets (here a data set is a population of vectors, the
components of which are the values of the descriptors
recorded at a grid cell). The PCA is computed on a
single data set and its factors (or components) seek to find
the directions that maximize the descriptor variances
in the multidimensional environmental space. In contrast, the ENFA is based on two data sets: (i) the global
set stores the descriptor values for all cells in the study
area, and (ii) the species set stores these values for only
Fig. 2. Geometrical interpretation of marginality and specialization factors. The two-dimensional distribution of the
global and species sets are symbolized by white and dotted
ellipses, with a crossed-circle marking their centroids. The
marginality factor (M) is the axis passing through both centroids.
Once marginality has been extracted, both distributions have
a common centroid and the specialization factor (S) is the axis
maximizing the ratio of global variance σG to species variance
σS; it is intermediary between the axes of maximal global
variance (dotted line) and minimum species variance (dashed
line). See text for further details.
those cells where the species is present; it is therefore a
subset of the global set. The ENFA factors result from
the comparison between these two sets, and they are
therefore directly interpretable. The first ENFA factor
maximizes the absolute value of the marginality, defined
as the standardized difference between the species
mean and the global mean on all descriptors. It is
geometrically figured by the line passing through the
centroids of both the species and global sets (Fig. 2a).
The marginality coefficients range from −1 to +1.
Positive or negative values indicate a species’ optimum
higher (respectively lower) than the average conditions
in the study area. Once the marginality factor has been
extracted, the global and species sets centroids are
coinciding. All the subsequent factors maximize the
specialization, defined as the ratio of the global variance to the species variance. A specialization factor is
geometrically figured by a line intermediary between
the direction of maximum global breadth and the
direction of minimum species breadth (Fig. 2b). Specialization coefficients range from −1 to +1, but only
their absolute value is meaningful. A high value indicates a narrow niche breadth in comparison with the
available conditions.
Finally, there are as many factors as descriptors. The
first one explains all the marginality and some part of
the specialization. The subsequent factors explain
the remaining specialization in decreasing amounts.
1108
A. H. Hirzel et al.
Table 1. Environmental descriptors retained for the habitat analysis. Except when stated otherwise, they were derived from the
GEOSTAT database (Swiss Federal Office of Statistics, Neuchâtel, Switzerland). EGV = ecogeographical variables
Variable category
Environmental descriptor
EGV code
Topographical
Average altitude in a 2000-m radius
Average slope in a 2000-m radius
SD of altitude in a 2000-m radius
Average northness in a 2000-m radius*
Average eastness in a 2000-m radius†
ELEV
SLOPE
SDELEV
NORTH
EAST
Geological
Frequency of limestone area in a 2000-m radius
Distance to limestone area
Rock frequency in a 2000-m radius
Rock frequency in a 500-m radius
Distance to granite area
Scree frequency in a 2000-m radius
Scree frequency in a 500-m radius
Distance to screes
Water frequency in a 2000-m radius
Water frequency in a 500-m radius
CALC-2K
CALC-D
ROCK-2K
ROCK-500
GRANIT-D
SCREE-2K
SCREE-500
SCREE-D
WATER-2K
WATER-500
Anthropogenic
Biological
Building frequency in a 2000-m radius
Forest frequency in a 2000-m radius
Forest frequency in a 500-m radius
Ibex biomass index‡
Ibex frequency in a 2000-m radius‡
Chamois biomass index‡
Sheep density in a 2000-m radius‡
Distance to release site§
BUILD-2K
FOREST-2K
FOREST-500
IBEX-BM
IBEX-2K
CHAM-BM
SHEEP-2K
RELEASE-D
*Cosine of aspect.
†Sine of aspect.
‡Derived from Swiss Federal Game statistics, Bern, Switzerland.
§Computed in the GIS.
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
Usually, the most significant part of the information is
gathered in a few of the first factors, thus reducing
the problem complexity. The factors are given by their
coefficients along the environmental descriptors and
provide information about the species’ marginality and
specialization on each of them. Moreover, the global
marginality and specialization coefficients integrate all
these descriptor-specific scores, providing general clues
about the species’ niche. The global marginality ranges
from 0 to 1 and indicates how far, all descriptors being
accounted for, the species optimum is from the average
conditions in the study area. The global specialization
ranges from 1 to infinity; for ease of interpretation, the
global tolerance coefficient, defined as the inverse of
the specialization, is usually preferred as it ranges from
0 to 1. It is an indicator of the species’ niche breadth. It
must be noted though that these coefficients are relative
to the study area and can only be used to compare
species modelled with the same set of predictors. A
detailed mathematical demonstration of the ENFA
is beyond the scope of this paper and we refer the
interested reader to our basic description (Hirzel et al.
2002).
The ENFA analysis was first applied to all the available environmental descriptors of the full set of observations (immatures and subadults pooled together);
this was done in order to select the variables relevant
for the bearded vulture distribution. Then, the ENFA
was applied with the reduced descriptor set (listed in
Table 1) to both observation subsets. This provided
two ecological niche models, one for the prospecting
phase (1987–94) and one for the settling phase (1995–
2001). All these analyses were made within the eco-GIS
package Biomapper 2·1 (Hirzel et al. 2002).
  
The two models were then used to compute a habitat
suitability map by means of the geometric mean algorithm (Hirzel & Arlettaz 2003). This algorithm works
in the multidimensional environmental space defined
by the most significant ecological niche factors computed by the ENFA. The species set defines a cloud of
points in this environmental space, the density of which
varies greatly and is assumed to be positively correlated
with the suitability of any particular combination of
descriptor values. This density is modelled for every
hypervolume element (voxel) of this space by the geometric mean of its distances to all observation points;
the higher the density of observations around a given
voxel, the lower the mean distance. These distances are
transformed into habitat suitability indices by delineating hypersurfaces (or envelopes) linking all voxels that
have the same value (like the altitude isolines of a topographic map). An envelope suitability index is computed as the proportion of observation points outside
it; for instance, the envelope 0·9 encloses 10% of the
observations and leaves out 90% of them. These envelopes
1109
Reintroducing the
bearded vulture
are then transported to the classical geographical
space to produce a habitat-suitability map. We chose to
keep only the envelopes 0·5 and 0·9. The inner envelope
(enclosing 50% of the observations) geographically
defines a region we called core habitat. The geographical area located between the two envelopes (40% of
observations) was termed marginal habitat. The area
outside the external envelope (10% of observations) was
considered unsuitable. See Hirzel & Arlettaz (2003) for
further information about this algorithm.
Results
The first ENFA including all environmental variables
and all the observations showed that some variables
were not relevant to the bearded vulture distribution:
all gneiss- and marl-related variables, 500- and 2000-m
radius granite frequency, distance to water, distance to
rock, 500-m radius frequency of human buildings and
distance to them, all meadow-related variables, and
distance to forest. The retained variables are listed in
Table 1 and were used for all subsequent analyses.
 
Observation points not used to calibrate the model
were held on a validation set. Two indices could then
be computed: (i) the absolute validation index (AVI),
which is the proportion of validation points occurring
in the predicted core habitat; and (ii) the contrast
validation index (CVI), which is the AVI minus the AVI
that would have been obtained with a hypothetical
model that would predict core habitat for all cells of the
study area. The latter index gives an indication of how
well the model discriminates poor from good habitat.
Both AVI and CVI were submitted to a cross-validation
process (Sokal & Rohlf 1981; Manly 1991; Fielding
& Bell 1997), allowing the computation of confidence
intervals: the observation data set was partitioned
into 100 subsets of which, alternately, 99 were used to
calibrate the model (calibration set) and 1 to validate it
(validation set).
 
(1987–94)
For this period, 310 observations were analysed. The
ENFA computed a global marginality coefficient of 0·72
and a global tolerance coefficient of 0·66, indicating that
the vulture was living in conditions rather uncommon in
the study area but that its niche breadth was rather wide.
By comparing the ENFA eigenvalues wit the MacArthur’s
broken-stick distribution (MacArthur 1960; Hirzel et al.
2002), the first five factors were kept as significant for the
subsequent analyses, explaining 70% of the information
(100% of the marginality and 41% of the specialization). The marginality factor explained little of the
specialization (6%), meaning that the vulture niche breadth
was not particularly narrow for the variables for which its
optimum was the furthest from the average conditions.
A slightly negative marginality coefficient (Table 2,
factor 1) for altitude indicated that, on average, the
Table 2. Correlation between ENFA factors and the environmental descriptors for the prospecting phase (1987–94). The percentages
indicate the amount of specialization accounted for by the factor (moreover, factor 1 explains 100% of the marginality)
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
ELEV
SLOPE
SDELEV
NORTH
EAST
CALC-2K
CALC-D
ROCK-2K
ROCK-500
GRANIT-D
SCREE-2K
SCREE-500
SCREE-D
WATER-2K
WATER-500
BUILD-2K
FOREST-2K
FOREST-500
IBEX-BM
IBEX-2K
CHAM-BM
SHEEP-2K
RELEASE-D
Factor 1† (6%)
Factor 2‡ (18%)
Factor 3‡ (13%)
Factor 4‡ (8%)
Factor 5‡ (7%)
–
+++
+++
––
–
++
–
+
+
0
++
+
––
++
+
–
+
0
++
+++++
+
++
–––––
*********
*
*
*
*
*
0
***
*
0
*
0
0
*
0
***
0
*
0
0
0
0
*
0
**
*
*
0
0
0
**
**
0
*
**
0
*
0
*********
*
**
0
0
0
0
*
*
*
0
**
0
****
****
****
**
****
**
**
0
**
0
**
0
*
0
0
*
*
*
***
0
*
*
*
0
0
****
**
0
**
****
*****
*
*
***
****
0
0
*
0
0
0
†Marginality factor. The symbol + means that the vulture was found in locations with higher values than average. The symbol –
means the reverse. The greater the number of symbols, the higher the correlation. 0 indicates a very weak correlation.
‡Specialization factor. The symbol * means the vulture was found occupying a narrower range of values than available. The
greater the number of asterix, the narrower the range. 0 indicates a very low specialization.
1110
A. H. Hirzel et al.
Fig. 3. Habitat suitability map computed for the (a) prospecting (1987–94) and (b) settling (1995–2001) phases showing the
spatial distribution of the core (black), marginal (dark grey) and unsuitable habitats (white).
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Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
bearded vulture was found at lower altitude (2067 m)
than the Valais average (2157 m). Furthermore, the
high value of the first specialization factor (Table 2,
factor 1) for this predictor indicated a narrow niche
breadth, meaning that birds were rarely seen flying
far from this altitude (SD = 503 m). Similar reasoning
on the other coefficients showed that the favoured
areas had steeper slopes than average (31° vs. 28°,
respectively); their average northness (−0·11) and
eastness (−0·02) and their relatively high marginality
indicated a preference for slopes orientated towards
the south or south-west. Nevertheless, the bearded
vulture showed a very low level of specialization on
these three variables. Other outstanding landscaperelated features were specialization for rocky areas
(mainly limestone and screes), relatively high frequency
of water, avoidance of human settlements and some
specialization for areas with a slightly higher forest
frequency than average (at the 2000-m radius scale).
The highest marginality was related to ibex and sheep
presence and proximity to the release site; however,
the vultures were again very tolerant regarding these
variables (all five specialization coefficients were null or
very low).
Considering the sensitivity to different scale patterns,
the vulture was almost always more marginal at the
2000-m than 500-m radius scale, or at distances greater
than 2000 m; the specialization showed the same tendency. The cross-validation gave a mean AVI of 0·49
(SD = 0·13) and a mean CVI of 0·34 (SD = 0·13) (both
values cannot be greater than 0·5). This means that,
while the presence prediction power was very good, it
could be due to a general overestimation of the habitat
suitability (Fig. 3).
1111
Reintroducing the
bearded vulture
Table 3. Correlation between ENFA factors and the environmental descriptors for the settling phase (1995–2001). The percentages
indicate the amount of specialization accounted for by the factor (moreover, factor 1 explains 100% of the marginality)
ELEV
SLOPE
SDELEV
NORTH
EAST
CALC-2K
CALC-D
ROCK-2K
ROCK-500
GRANIT-D
SCREE-2K
SCREE-500
SCREE-D
WATER-2K
WATER-500
BUILD-2K
FOREST-2K
FOREST-500
IBEX-BM
IBEX-2K
CHAM-BM
SHEEP-2K
RELEASE-D
Factor 1† (10%)
Factor 2‡ (16%)
Factor 3‡ (9%)
Factor 4‡ (9%)
Factor 5‡ (7%)
Factor 6‡ (6%)
––
+
++
–––
++
++++++
–––––
+
+
+
+
0
0
0
0
+
+
0
0
++
+
++
–––
******
**
***
***
*
*
0
*****
*
*
*
**
**
*
0
0
**
*
**
0
0
*
0
********
0
*
*
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*
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****
0
0
*
0
0
0
0
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0
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*
0
0
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*
*
0
*
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0
*
*
*
*
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0
0
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*
*
*
0
0
**
******
****
***
*
**
*
*
***
*
*
*
*
0
*
0
***
*
*
*
0
0
*
**
***
*
*
*
0
**
****
*
*
0
*
**
******
*
*
0
**
*
*****
*
*
0
**
†Marginality factor. The symbol + means that the vulture was found in locations with higher value than average. The symbol –
means the reverse. The greater the number of symbols, the higher the correlation. 0 indicates a very weak correlation.
‡Specialization factor. The symbol * means the vulture was found occupying a narrower range of values than available. The
greater the number of asterix, the narrower the range. 0 indicates a very low specialization.
 
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
(1995–2001)
More observations (1088) were available for this phase,
but the global tolerance coefficient remained almost
identical (0·65 vs. 0·66), whereas the global marginality
coefficient was larger (0·84 vs. 0·72). By comparison of
the eigenvalues with the MacArthur’s broken-stick distribution (MacArthur 1960; Hirzel et al. 2002), the first
six factors were significant and were used in the subsequent analyses, explaining 79% of the information
(100% of the marginality and 58% of the specialization). The marginality factor explained slightly more of
the specialization (10% vs. 6%).
In this phase, the situation was far more contrasted,
with a few variables accounting for most of the marginality and specialization (Table 3). The most striking
feature was the high marginality related to limestone
areas: the bearded vulture tended to be seen in limestone
environments (an average of 28% of limestone area in a
2000-m radius circle around observation points) or
close to them (mean distance 468 m). There was some
evidence of specialization on this variable, indicating a
narrow niche breadth. The distance to release site was
less marginal than for immatures, indicating that the
mature birds had spread further. The average altitude
was slightly lower than for immatures (mean = 1864 m,
SD = 638 m), whereas the marginality for forest frequency was similar. The preference for southwards slopes
was stronger among settling adults but with a tendency
towards south-eastern slopes. Ibex- and sheep-related
variables lost their outstanding marginality, but vulture
distribution was still biased towards them.
The cross-validation gave a mean AVI of 0·5 (SD = 0·23)
and a mean CVI of 0·45 (SD = 0·23). The contrast
value was greater than in immatures, confirming the
fact that this map is obviously more accurate (Fig. 3).
   . 

The frequency of bearded vulture sightings was not
dependent on local observation effort (Fig. 4). In geographical subunits 1 and 2 (compare Fig. 4 with Fig. 1),
the observation ‘reward’ was definitely biased towards
bearded vultures, actually confirming a more dense
presence of the raptor in the north-western Valais
Alps.
Discussion

The ecological requirements of reintroduced bearded
vultures colonizing Valais differed markedly between
the prospecting (1987–94) and settling (1995–2001)
phases. Bearded vultures were globally more selective
during the settling phase than during the prospecting
phase. Habitat suitability maps also had a better predictive
1112
A. H. Hirzel et al.
Fig. 4. Observation effort [mean (± SEM) number of hours per year] and reward [mean (± SEM) number of bearded vultures
observed per hour × year] in the various geographical subunits depicted in Fig. 1.
power in the second phase. It should be noted that
bearded vulture distribution was more sensitive to
environmental medium-extent variables (2000-m radius)
than to small-extent variables (500-m radius). This is not
surprising given that bearded vultures are potentially
wide-ranging, and that our vulture observations were
recorded at a 1-km resolution. Changes in ecological
preferences did not result from changes in food
abundance and distribution between the two phases:
both ibex and chamois populations, as well as flocks of
sheep, had similar densities and occupied similar ranges
throughout the study.
    
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
Our data show that bearded vultures tended to visit
areas at lower altitude and with a higher forest cover
than expected. Because of a wide altitudinal range in
Valais (mountain ranges higher than 4000 m around
the Rhône valley with a plain level of 372–680 m
a.s.l.; Fig. 1) this altitudinal effect is not surprising as
bearded vultures do not visit high peaks and glacier
zones, where wild ungulate carcasses are absent. Additionally, bearded vultures also avoided the lowest
altitudes, where human activity is high and where wild
ungulates and sheep are rare; bearded vultures thus
remain within a rather narrow altitudinal belt. The
non-avoidance of forest at a regional scale might seem
peculiar as bearded vultures tend to prefer open habitats in most of their range. In central Valais, however,
because of the dry climate (Valais is the driest area
within the Alps) and nature of the geological substrate,
woodlands consist most often of small scattered trees
and shrubs; they are thus readily accessible to bearded
vultures. Moreover, in several areas such as game
reserves, ungulates are numerous in forests in winter;
this is also where lynx Lynx lynx hunt, providing additional carcasses. In central Valais, bearded vultures
are often seen flying over sparse forests covering steep
slopes, in search of carcass remains; they can land
among scattered trees and shrub, or on rocky outcrops,
and walk several dozens of metres on forest ground to
reach a carcass (R. Arlettaz, personal observations).
The preference for steeper slopes can be explained by
the well-documented association of bearded vultures
with cliffs, where they roost and nest, and because
ungulates are more numerous in steep, remote areas,
located further from human civilization.
Bearded vultures tended to be observed closer than
expected to the release site in Haute-Savoie, from
where most individuals that visit Valais originate
(see the Introduction). Interestingly, this pattern did
not differ strikingly between the prospecting and
settling phases, indicating a philopatric tendency in the
species.
During both prospecting and settling phases bearded
vultures preferred areas with a higher density of ibex
and sheep, although there was no link with the presence
of chamois, another important source of food for bearded
vultures in the Alps. However, chamois are abundant
(c. 17 000 individuals) and widespread in Valais, where
they inhabit a broader habitat spectrum and a wider
altitudinal range than ibex (c. 5000 individuals); it is
thus possible that a ‘chamois effect’ could not be detected
because there was little variation in the abundance and
distribution of this ungulate.
    :
 .  
A change of slope orientation between the two phases
can be explained by the frequent visits of birds during
the first phase to a lateral (north–south orientated)
valley south of the Rhône (Val de Bagnes), while subsequent sightings were mostly on the south-exposed
slope of the main valley axis (ENE – SSW; Fig. 1).
A slight preference for areas not far from streams
appeared during the prospecting phase but disappeared later. This is again probably because of an initial
concentration of bearded vulture observations within
major side valleys, whereas birds were then mostly seen
in Central Valais, north of the Rhône, where lateral
1113
Reintroducing the
bearded vulture
Fig. 5. Map of the European Alps (thick line) showing approximate limestone distribution (shaded), release sites (stars) and the
first six breeding pairs (circles).
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Ecological Society,
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Ecology, 41,
1103–1116
valleys are both much shorter and rare (Fig. 1) because
of the limestone substrate.
Although the contribution of sheep and chamois did
not differ between the two periods, ibex tended to be less
influential in the second phase. This may be because
roaming immature birds are mainly concerned with
finding and tracking food resources, whereas subadults
and adults have additional ecological requirements that
are not uniquely trophic.
This interpretation makes sense when considering
the geological variables that explain most of the habitat
preferences during the second phase: limestone had
a greater explanatory power than any other variable
within the two models, pointing to a net selection for
limestone zones. Such a preference was even clearer
on comparison of the distribution map of records in
Valais during the settling phase with a geological map:
bearded vultures concentrated on the limestone zones
(west and north-west Valais) but avoided metamorphic
and silicate substrates (east and south of the canton;
Fig. 1). We believe there are three, possibly not
mutually exclusive, explanations for this selection
pattern. First, the limestone areas in Valais belong
tectonically to the Helvetic and external Alps, which are
characterized by huge vertical cliffs rich in cavities and
ledges (from a stratigraphic viewpoint, these cliffs
belong essentially to late Jurassic and Cretaceous formations). Such recesses provide well-protected roosts
and are excellent for eyries. This is important in the
Alps where the bearded vulture reaches the northern
border of its range: bearded vultures lay their eggs during winter, as early as February (Heuret & Rouillon
1998; Lücker 1998), which, at this latitude, can be
marked by very adverse weather. In comparison, marl,
metamorphic and crystalline (silicate) landscapes do
not offer so many favourable breeding sites. A second
hypothesis relates to the presence of suitable ossuaries.
These are places where bearded vultures break and
temporarily store bones and bone fragments (Margalida
& Bertran 2001). Usually screes with a fine-grained
structure are favourite ossuaries, although rocky plates
and outcrops may sometimes also be used. Accordingly,
screes in limestone areas are abundant and widespread.
Water is not easily retained in these rocks and so vegetation is scarce, giving a limestone landscape its typical
arid appearance. Limestone screes also have a sharpedged and fine structure, which enables bones to be broken into smaller fragments which are then more easily
retrieved from among stones. This is not the case within
silicate-stone areas, where screes are much scarcer and
consist mainly of large blocks among which fragments
would be difficult to retrieve; they also retain humidity,
making them easily colonized by plants. Margalida &
Bertran (2001) have demonstrated that ossuaries are of
importance to the bearded vulture, especially during
the breeding period when parents have to prepare
delicate food items for the growing chick. Thirdly, limestone topography offers the best thermal conditions
for this large raptor (with a c. 2·70 m wingspan), which
seems to be of prime importance to bearded vultures
(Haller 1983), particularly where they reach the
northern border of their distribution range, as in Valais.
Interestingly, north-western Valais, which offers the
most suitable habitat according to our analysis, was the
area where the last bearded vultures were reported
prior to extermination in the 19th century (see map II
in Fatio & Studer 1889).
   

Our results show that food might be the principal
driving force underlying habitat selection patterns in dispersing immature bearded vultures, whereas preparation
1114
A. H. Hirzel et al.
© 2004 British
Ecological Society,
Journal of Applied
Ecology, 41,
1103–1116
for reproduction might govern subsequent environmental preferences in subadults and adults. Interestingly,
in the expert reports published during the preparation of the international bearded vulture programme
(Müller & Buchli 1982), emphasis for the selection of
suitable release areas in the Alps was put on wild ungulate density. Geology (although mentioned) was considered as a secondary factor, except possibly regarding
the availability of cavities for placing captive birds to be
released just before fledging.
Extrapolating from our own findings, we speculate
that breeding bearded vultures recolonizing the Alps
will initially occupy limestone areas (10–50% of rock
coverage in a 2000-m radius), between 1500 and 2500 m
altitude, that offer adequate cliffs rich in nesting sites and
thermals as well as suitable bone-breaking screes. In
our study area, we expect the areas delineated as core
habitat (Fig. 3b) to be colonized first as they correspond to the most preferred conditions. However, as
the population expands, bird density and competition
are bound to increase, leading to less suitable habitats
being exploited. The bearded vultures might then be
expected to spread over the marginal habitat areas
(Fig. 3b).
Already, data on settlement of the first breeding
pairs of bearded vultures in the Alps up to 2002 seem to
support our view (Fig. 5). In northern Italy, the three extant
breeding pairs concentrate on a rather small, very arid
limestone area. Geologically, this area is referred to as
the Dolomitic Engadin Enclave, an isolated limestone
area within much larger silicate units. In France as well,
the three territorial breeding pairs have colonized wide
limestone landscapes (National Parc of Vanoise, two
pairs; Bargy-Aravis range, one pair). In contrast, the
silicate and flysch areas surrounding the Austrian
release site, where reintroductions first took place as
early as 1986, have failed to attract breeding pairs. This
is also the case for the Swiss release site, located at the
northern edge of the above-mentioned Italian Dolomitic Enclave.
Interestingly, five out of the six eyries occupied in
2002 were built on ledges or in niches in limestone cliffs.
The only exception was one pair in the Vanoise National
Park (Savoie, France), which used an old golden eagle
Aquila chrysaetos eyrie in a silicate cliff. However, as
this cliff is surrounded by limestone, this may suggest
that the selection of limestone depends primarily on
the availability of suitable ossuaries or thermals. The
monitoring of the expanding adult bearded vulture
population across the Alps will provide a further test of
this hypothesis.
The observation that bearded vultures prefer limestone areas has potential implications for the release
policy developed within the international reintroduction scheme. As bearded vultures exhibit some
philopatric behaviour (Niebuhr 1993; Heuret & Rouillon
1998; this study), releases should optimally take place
within major limestone Alpine massifs. Restricting
reintroduction efforts to these landscapes would poten-
tially enhance survival rate, by increasing the attachment of birds to areas with the most suitable habitats,
and by reducing the risks inevitably encountered by
immatures during dispersal. However, it appears clear
that the wide-ranging capacity of bearded vultures will
ultimately enable them to find the most suitable zones
on their own. On the other hand, our analysis also
suggests that the failure to settle down and reproduce
close to some release places might be due principally
to suboptimal habitat quality around the selected
reintroduction site.
It might seem unusual that, during the settling phase,
the geological environment plays a more important
role in habitat selection than the availability of ungulate carcasses, another essential component of territory
selection. Yet, in this species the trophic function depends
directly upon geology (screes for preparing food;
Margalida & Bertran 2001) so that the two factors cannot be fully disentangled. As wild ungulates are now
abundant and widespread in the Alps, in contrast with
the situation in the past centuries until the extirpation
of the species, they are unlikely to (as yet) represent a
limiting factor for the breeding population, as we are
probably at present far below the species’ trophic
carrying capacity. Density-dependent regulation is to
be expected in the future, however. The monitoring of
the spreading breeding population will tell us whether
geological constraints will continue to play a major
role in the future, or whether food requirements will
further dictate spatial patterns of bearded vulture
distribution within the Alpine range. In addition, it is
important to stress that Valais is one of the driest
areas of the Alps, which might also prove decisive for
establishment.
Acknowledgements
We thank first the numerous observers (n > 300) who
have contributed their observations. Dr Ch. Buchli
(Fornat and Stiftung Pro Bartgeier), J. Heuret and A.
Rouillon (Asters) and J. P. Martinot (Vanoise National
Park) facilitated the visits of R. Arlettaz to the various
breeding places in 2000–02. Professor M. Burri was
of great help concerning the geological aspects. Dr T.
Pachlatko and Dr Ch. Buchli helped with the literature
search. We thank the various sponsors that support the
Bearded Vulture Network Western Switzerland, especially the Stiftung Pro Bartgeier (Zernez, Switzerland).
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B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
available at www.sciencedirect.com
journal homepage: www.elsevier.com/locate/biocon
Effect of human activities on bearded vulture behaviour
and breeding success in the French Pyrenees
Beatriz Arroyoa,b,*, Martine Razinc
a
Centre for Ecology and Hydrology, Hill of Brathens, Banchory AB34 4BW, UK
Centre d’Etudes Biologiques de Chizé, CNRS, 79360 Villiers en Bois, France
c
Coordination Casseur d’os/LPO-FIR, Oihan Alde, 64210 Ahetze, France
b
A R T I C L E I N F O
A B S T R A C T
Article history:
The bearded vulture is a threatened species for which human disturbance has been sug-
Received 10 December 2004
gested as an important factor potentially influencing breeding success. Additionally, dis-
Received in revised form
turbance remains one of the few factors that is possible to control through directed
26 August 2005
policy. We evaluated the effect of human activities on the behaviour and breeding suc-
Accepted 16 September 2005
cess of bearded vultures breeding in the French Pyrenees. Human activities influenced
Available online 7 November 2005
bearded vulture behaviour (primarily through a decrease in nest attendance), but this
effect varied in relation to the type of activities and the distance to the nest. Very noisy
Keywords:
activities and hunting most frequently provoked nest unattendance even when occurring
Threatened species
far (>1.5 km) from the nest. People on foot or cars/planes only affected bearded vulture
Bearded vulture
behaviour if close (<500–700 m) to the nest. We also found a significant relationship
Disturbance
between human activities and vulture breeding success: the probability of failure
Management
increased with the frequency of human activities. In particular, there was a significant
relationship between the probability of failure and the frequency of very noisy activities.
We discuss the implications of our results for management schemes and conservation of
this species.
! 2005 Elsevier Ltd. All rights reserved.
1.
Introduction
Conflicts between humans and wildlife may arise because human activities can cause disruption of normal breeding
behaviour in wildlife (De la Torre et al., 2000; Verhulst et al.,
2001; Quan et al., 2002; Thomas et al., 2003; Rees et al., 2005)
and ultimately be a cause of breeding failure (Stevens and
Boness, 2003; Ruhlen et al., 2003). Since both human development and human recreational use of nature are likely to increase in the future, the need to understand how wildlife
responds to human activities is becoming increasingly important. Science-based management strategies are necessary to
minimise the detrimental effects of human activities (Yorio
et al., 2001). Quantitative information about how, when or
what type of human activities may be detrimental to wildlife
is thus critical to optimise management measures (Carney
and Sydeman, 1999).
When evaluating whether human activities are detrimental to wildlife, it is important to evaluate whether they alter
behaviour potentially influencing individuals reproductive
success (like time spent foraging, or attending the nest) but,
more importantly, it is critical to evaluate whether this has
an influence in the species’ population parameters, such as
breeding success. Whereas the former has been assessed for
many species (e.g. Lord et al., 1997; Burger, 1998; Gutzwiller
et al., 1998; Trimper et al., 1998; Verhulst et al., 2001; Bright
* Corresponding author: Tel.: +44 1330 826333; fax: +44 1330 823303.
E-mail address: [email protected] (B. Arroyo).
0006-3207/$ - see front matter ! 2005 Elsevier Ltd. All rights reserved.
doi:10.1016/j.biocon.2005.09.035
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
et al., 2003; Traut and Hostetler, 2003), the latter is more rare
(but see, e.g. Fraser et al., 1985; White and Thurow, 1985).
Human activities affect breeding behaviour in many species of raptor (e.g. Trimper et al., 1998; Steidl and Anthony,
2000; Kruger, 2002) and through a reduction in parental care
may affect the physiology and condition of the nestlings
(Fernández and Azkona, 1993). Thus, spatial and temporal
restrictions are commonly prescribed to protect raptors during periods of extreme sensitivity (Richardson and Miller,
1997). Quantitative studies on the behavioural responses to
human activities are needed to optimise these management
measures (White and Thurow, 1985; Holmes et al., 1993).
However, relatively few studies have attempted to quantify
this factor, particularly in Europe, and most of the statements
about the influence of humans on raptor breeding are based
on either qualitative assessments or indirect measures, such
as ‘‘number of roads’’ or ‘‘distance to villages’’ (e.g. Donázar
et al., 1993, 2002; Ontiveros, 1999; Bakaloudis et al., 2001;Sergio et al., 2003).
The bearded vulture (Gypaetus barbatus) is a threatened
species in the western Palearctic (Tucker and Heath, 1994;
Rocamora et al., 1999). Human disturbance has been described as an important factor influencing breeding success
for this species (Layna and Rico, 1991; Donázar et al., 1993;
Terrasse, 2001), although no study exists to quantify the effect. In the French Pyrenees, overall productivity for the species is 0.35 fledglings per pair (from 1994 to 2003, Razin
unpubl. data), which is relatively low compared to the Alps
(0.44 fledglings per pair from 1997 to 2002; Razin et al., 2004)
or the Spanish Pyrenees until recently (0.59 fledglings per pair
from 1994 to 2000, Heredia, 2000), and there is concern about
nest failure rates (Recovery Plan of the bearded vultures in the
French Pyrenees). Although no detailed analysis of reasons
for failure in this area has yet been carried out, causes of failure potentially include inter- and intraspecific competition,
weather, food abundance and disturbance (Razin, 2003). Of
those, the latter remains one of the few factors that can be
managed through directed policy (in addition to food supply),
if proven that it has an effect on breeding success. In the
French Pyrenees, weather is particularly cold and humid,
and most bearded vulture territories have alpine weather
with Atlantic influence (Champeaux and Tamburini, 1995).
Additionally, appropriate (sheltered) cliffs for nesting are less
numerous than in other areas of its breeding range, whereas
human pressure (i.e. human activities and development) is
strong. Under these circumstances, if human activities reduce
nest attendance, they may potentially influence bearded vulture breeding success.
We thus aimed to assess the effect of human activities on
bearded vultures breeding in the French Pyrenees. We first
evaluate whether potentially disturbing activities had any effect on bearded vulture behaviour during reproduction (primarily a decrease in nest, clutch or brood attendance). We
also evaluated whether this effect varied in relation to the
type of activities and the distance to the nest. Second, we
tested whether there was any relationship between the frequency of human activities recorded in a nest area and
breeding success. Finally, we discuss the implications of
our results for management schemes and conservation of
this species.
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
2.
Methods
2.1.
Data collection
277
Human activities (or their absence) were recorded during the
usual monitoring of the bearded vulture population in the
French Pyrenees. This involved weekly (on average) visits
to each potential nest area (hereafter called ‘‘territory’’)
throughout the season or until failure was proved, each visit
lasting on average 4 h. All observations were made at >700 m
from the nests, with binoculars and telescopes, and birds
were apparently unaware of observers. Observations were
random in relation to other parameters (i.e., they were not
longer in the event of observing human activities), since
their main purpose was to monitor the population. Each
breeding season was defined from 1st October to 30th
September the following year, which corresponds to nest
selection (October) to the end of post-fledging period (September–October). Visits to each territory were distributed
throughout the breeding season. Mean (±SD) number of visits to each nest area was 11 ± 9 (n = 129) during the prelaying period, 9 ± 5 (n = 92) during the incubation period,
16 ± 15 (n = 67) during the nestling period and 6 ± 6 (n = 39)
during the post-fledging period (see below for definition of
the breeding periods). We analysed observations recorded
during the breeding seasons 1993/1994–2001/2002, for those
territories where human activities (or their absence) were
consistently noted by observers. In total, we analysed data
for 129 breeding attempts from 22 territories (6 ± 3 breeding
attempts per territory, range 1–9). Territories are usually
occupied by the same birds year after year (unless one of
the birds die), so breeding attempts in the same territory
in different years are usually related to the same breeding
pair. In all monitoring visits, it was recorded whether birds
were present in the territory or not. ‘‘Absence’’ was defined
as no member of the pair being visible within 2 km of the
nest, for the whole duration of the visit.
Potentially disturbing activities were the following: cars
(vehicles on roads close to the nests; most observations involved relatively quick passage of cars on roads that were
not directly visible from the nest); motorbikes (in many
cases outside roads); helicopters; small planes; gliders; paragliders; forestry activities (tree cutting for forestry exploitation); burning (‘‘controlled’’ fire lit to create open areas for
grazing); hunting (mainly hunting of wildboars, stags, roe
deer and mouflon, by groups of 10–40 people, approaching
by car and/or by foot); mountain climbing; fire (criminal, as
opposed to burning); intervention (by ornithologists to monitor bearded vulture reproduction); military activities
(manoeuvres and military planes); farming/shepherding;
photographers (people approaching nests to take pictures
or to film); ‘‘walkers’’ (people by foot, including hikers, fishermen or bird watchers), infrastructure works (road or path
construction, hydroelectric work or other infrastructures).
We wanted to test whether the relationship between distance to the nest and the effect of activities on vulture
behaviour changed among types of activities, because this
has direct implications for management. For analyses, activities were grouped in five categories according to the type of
disturbance as potentially perceived by bearded vultures, as
278
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
follows: ‘‘very noisy’’ activities (helicopters, motorbikes,
infrastructure works, military activities, forestry activities),
‘‘noisy’’ activities (cars and small planes), ‘‘least noisy’’
(‘‘walkers’’, climbers, photographers, shepherds, ornithologists, gliders, paragliders), ‘‘hunting’’ (which may be noisy,
as well as having a visual impact, depending on the size of
the hunting group and on whether or not cars and dogs
are included, and the number of shooting events) and ‘‘fire’’
(provoked or controlled).
A total of 490 observations of human activities occurring
within 2 km of a nest were gathered. Every time one of these
activities was observed, the following variables were noted:
the date, the linear distance to the nest (not including altitudinal differences), the duration of the activity (in minutes)
and the behaviour of the birds, if possible. Each observation
was coded as follows: whether the birds were present or not
(birds were considered as ‘‘absent’’ following human activities
when none of the members of the pair was visible within the
territory, either at the nest or not, neither during the activity
nor afterwards for at least 2 h until the end of the monitoring
period); if they were present, whether birds showed a reaction
to the activity or not (we defined a bird showing a reaction if
the nest was un attended, i.e., if they stood up from the nest,
left the nest or flew around the nest without perching). Sometimes, it was not possible to identify the behaviour of the
birds because the nest was not directly visible from where
the observer was. We did not use those observations for the
analyses of behaviour, but we included them in the analyses
of frequency of human activities (see below).
We also calculated for each breeding attempt the following
periods: pre-laying (from October to laying, which usually
takes place between late December and early March), incubation (from laying until hatching), nestling, and post-fledging
(from first flights to September). Hence, we could allocate a
breeding period for those activities occurring in territories
where breeding had occurred, and we could calculate also
the observation effort (number of visits) for each breeding
period.
2.2.
Statistical analyses
We analysed whether behaviour was affected by disturbing
activities with logistic binary regression models, with ‘‘probability of absence’’ and ‘‘probability of reaction’’ as response
variables (as binary variables, see Section 2.1), with a Binomial distribution and a logit link function. As explanatory
variables, we included breeding period, distance, duration of
the activity, and type of activity. Additionally, we included
the interactions between type of activity and distance, and
type of activity and breeding period, since they have direct
implications for management. Observations carried out in
the same territory in the same year, or in the same territory
across years, are not necessarily independent, given that,
for example, there may exist individual differences in reaction probability, or differences related to characteristics of
the territory (like topography) that influence reaction. The
best way to analyse those type of data is to use mixed models,
including ‘‘territory’’ and ‘‘territory * year’’ as random variables. However, such models did not converge with our data
set, particularly when including interactions between vari-
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
ables (such as the interaction between type of activity and
distance). Therefore, we used General Linear Models (using
the GENMOD procedure in SAS 8.0, SAS, 1988), with a Type 1
analyses, but including ‘‘territory’’, ‘‘year’’ and ‘‘territory * year’’ as fixed effects in all models, before including
any other explanatory variable. The significance of all variables was thus calculated once the within- and among-year
effect of ‘‘territory’’ was taken into account. Additionally,
and to double-check that results obtained that way were not
the result of biased sampling across territories, we performed
an F-test based on the mean deviance of effects vs. the mean
deviance of the interaction between that effect and territory.
Our assumption was that, if that test was significant, the significance of the effect itself was not due only to differences
between territories. We do not present the results of the Ftests in the paper, but have only discussed results if they were
significant.
Second, we calculated for each breeding attempt within
each territory the total number of human activities recorded
for each of the breeding periods (as above). Given that there
was variation between territories in observation pressure,
we related this figure to the total number of visits to the territory in each of the breeding periods. We evaluated whether
frequency of human activities varied among territories and
breeding seasons with a General Linear Model analyses, using
‘‘number of human activities’’ as response variable, with a
Poisson distribution and a log link function, and using the
log of ‘‘observation pressure’’ (number of visits) as an offset,
and ‘‘territory’’, ‘‘year’’ and their interaction as explanatory
variables. We subsequently evaluated whether the probability
of hatching (if laying had occurred), the probability of fledging
(if hatching had occurred) or overall breeding success (probability of producing a fledging if laying had occurred) were related to the frequency of human activities in the relevant
period. For this, we used General Mixed Model analyses, fitting the response variable to a binomial distribution, and
using a logit link function, and including ‘‘territory’’ as a random variable, to control for among territory differences in
variables like altitude or individual differences that may also
influence breeding success.
3.
Results
3.1.
Types and seasonal frequency of human activities
Of 3561 monitoring visits to the bearded vulture territories, a
total of 490 observations of human activities was gathered.
The activities most commonly reported close to the nests
were helicopter flights, hunting and walkers (Table 1). Timing
of those activities varied. Hunting occurred mainly in the prelaying period, because the hunting season coincided temporally with that part of the bearded vulture breeding cycle.
Controlled burning occurred most frequently during the incubation and nestling period. Other activities were reported at
most times of the cycle (Table 1). Overall, human activities
were most frequent in the pre-laying and nestling periods,
least frequent during the post-fledging period (Table 1). There
were strong differences among territories in the frequency of
activities, as seen by the large standard deviation values
(Table 1).
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
279
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
Table 1 – Frequency of occurrence of the most common human activities (% of monitoring days in which each type of
activity was recorded, data presented as mean ± SD for all territories) in relation to the breeding cycle of bearded vulture
Helicopter
Walkers
Hunting
Cars
Climbing
Planes
Burning
Infrastructure works
Forestry activities
Motorcycles
Military activities
Paragliders
Intervention
Wildlife photographers
Shepperding
Gliders
Fire
Total
3.2.
Total
Prelaying
Incubation
Nestling
Postfledging
4.09 ± 4.3
3.25 ± 6.7
3.15 ± 4.4
1.72 ± 2.8
1.27 ± 5.0
1.12 ± 2.8
0.91 ± 1.6
0.42 ± 1.0
0.30 ± 0.9
0.23 ± 0.5
0.21 ± 1.0
0.14 ± 0.5
0.12 ± 0.3
0.08 ± 0.3
0.07 ± 0.3
0.05 ± 0.2
0.02 ± 0.1
2.82 ± 4.2
1.87 ± 3.4
5.86 ± 7.8
1.47 ± 3.0
0.92 ± 3.8
0.05 ± 0.2
0.18 ± 0.7
0.22 ± 1.0
0.51 ± 2.1
0.35 ± 1.0
1.03 ± 4.8
0.05 ± 0.2
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.03 ± 0.2
0.00 ± 0.0
1.10 ± 2.0
2.43 ± 4.1
0.65 ± 1.5
0.54 ± 1.4
0.00 ± 0.0
0.89 ± 2.7
1.66 ± 4.0
0.08 ± 0.4
0.21 ± 1.0
0.22 ± 0.5
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.26 ± 1.2
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.08 ± 0.4
0.00 ± 0.0
5.31 ± 12.1
2.84 ± 6.4
0.00 ± 0.0
2.22 ± 6.0
0.00 ± 0.0
3.05 ± 9.0
2.02 ± 8.9
0.36 ± 1.1
0.06 ± 0.3
0.17 ± 0.4
0.00 ± 0.0
0.23 ± 1.0
0.07 ± 0.3
0.12 ± 0.5
0.28 ± 1.0
0.06 ± 0.3
0.00 ± 0.0
1.19 ± 3.0
0.93 ± 3.3
0.00 ± 0.0
0.16 ± 0.7
0.11 ± 0.4
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
1.56 ± 6.3
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
0.00 ± 0.0
17.19 ± 17.25
16.06 ± 17.88
17.31 ± 30.23
3.95 ± 8.37
Behavioural responses to human activities
Of the 490 observations in which human activities were recorded, whether the birds were also present could be determined in 375. Birds were absent from the territories in 35%
of those cases, almost three times higher than when no human activities were recorded (13%, n = 3186). Occurrence of
human activities thus significantly influenced territory attendance (Table 2). The probability of being absent from the territory also depended on the breeding period (Table 2) as, even
when no human activities were reported, birds were more frequently absent in the post-fledging (30.3% ± 26.2% of cases,
n = 218 observations from 17 territories) or pre-laying periods
(20.5 ± 17.1, n = 1267, 23 territories) than either in the incubation (0% ± 0%, n = 738, 20 territories) or the nestling periods
(9.98% 7.8, n = 963, 20 territories). There was also a significant
interaction between breeding period and disturbance on territory attendance: birds were proportionally more likely to be
absent following human activities if those happened in the
pre-laying or the post-fledging periods (Table 4).
In those cases when human activities were reported, even
when taking into account the effect of breeding period, probability of absence depended also on the type of activity (Table
Table 2 – Results from the logistic regressions explaining
the probability of absence in relation to the breeding
period and the occurrence of human activities within
2 km of the nest
Variable
Probability of absence
Df
Territory
Year
Territory * year
Breeding period
Human activity
Period * activity
25
8
97
3
1
3
v2
290.88
20.95
351.20
221.50
106.45
51.35
P
0.0001
0.007
0.0001
0.0001
0.0001
0.0001
8.14 ± 10.47
3). The activity associated with most absences was hunting
(Table 4).
When birds were present, the probability of showing a
reaction to the activity that involved not attending the nest
depended significantly on the breeding period (being also
highest in the pre-laying period, Table 4), and the type of
activity (being highest for hunting and very noisy activities,
Table 4). In addition, probability of reaction depended on the
distance to the nest (the closer to the nest, the higher the
probability), the duration of the activity (the longer the activity, the higher the probability), and on the interaction between type of activity and distance (Table 3). The latter
arose because, whereas very noisy activities or hunting elicited responses even if far away from the nest, least noisy
activities or cars/small planes were tolerated unless within
500–700 m from the nest (Fig. 1).
In all analyses, there were significant differences in response among territories and among breeding attempts within territories (as shown by the ‘‘territory * year’’ interaction,
Tables 2, 3).
Table 3 – Results from the logistic regressions explaining
the probability of absence if human activities were
reported, and the probability of birds reacting if they
were present
Variable
Probability of
absence
Df
Territory
20
Year
9
Territory * year
48
Distance (km)
1
Breeding period
3
Type of activity
4
Duration
1
Distance * type of activity
4
Period * type of activity
9
v2
111.87
22.39
138.53
3.09
57.01
12.82
0.00
6.34
14.55
P
Probability of
reaction
Df
0.0001 18
0.008
9
0.0001 21
0.08
1
0.0001
3
0.01
4
0.95
1
0.17
4
0.10
9
v2
P
33.89
35.82
32.53
21.90
42.58
16.55
16.47
9.30
10.01
0.01
0.0001
0.05
0.0001
0.0001
0.002
0.0001
0.05
0.35
280
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
Table 4 – Responses of bearded vultures to human
activities in relation to breeding period and type of
activity: average ± SD proportion of observations where
birds where absent or, if present, the proportion that
reacted
N
% Absent
Np
% React
Breeding period
Prelaying
Incubation/hatching
Nestling
Post-fledging
194
64
101
16
53.1 ± 38.5 (19)
0.75 ± 2.5 (11)
10.7 ± 15.9 (14)
58.3 ± 50.0 (4)
52
63
84
9
52.7 ± 47.5
22.2 ± 30.6
31.1 ± 35.8
33.3 ± 47.1
Type of activity
Very noisy
Noisy
Least noisy
Hunting
Fire
111
71
84
85
24
35.7 ± 34.7
39.3 ± 40.9
26.5 ± 38.3
64.7 ± 27.5
9.25 ± 25.2
(18)
(10)
(15)
(12)
(7)
49
51
66
24
18
42.0 ± 33.6 (15)
36.6 ± 29.6 (8)
35.5 ± 42.4 (12)
41.7 ± 51.0 (10)
11.0 ± 6.4 (7)
Total
375
34.7 ± 29.5 (22)
205
35.0 ± 30.5 (20)
(15)
(11)
(13)
(2)
Averages calculated as the average for each territory (in brackets,
number of territories). N, number of observations; Np, number of
observations where birds were present.
3.3.
Relationship between frequency of human activities
and breeding success
P = 0.018, r2 = 21%). In particular, there was a significant relationship between breeding success and the frequency of very
noisy activities during the breeding season (GLIMMIX,
F1,107 = 4.19, P = 0.04), but not with the frequency of other
activities (P > 0.10). Additionally, there was a significant relationship between the proportion of monitoring days with human activities in which the nest was unattended (either
because the birds were absent or because they reacted to a
human activity) and the probability of nest success (GLIMMIX,
F1,76 = 4.07, P = 0.04). No significant relationship was found between laying date and human activity frequency during the
pre-laying period, hatching probability and human activity
frequency during the incubation period, or probability of nestling survival and human activity frequency during the nestling period (all P > 0.10).
70
60
50
40
30
20
10
F2
H3
D5
F1
C3
D6
I1
C2
C1
D7
H4
H5
F3
D1
D3
E1
D4
A3
J1
A1
B2
0
A4
Prop ortion of observati ons with
disturbance
There were strong significant differences between territories
and breeding attempts within territories in relation to the frequency of human activities recorded (X 221 ¼ 300:22, P < 0.0001
for ‘‘territory’’; X 28 ¼ 68:12, P < 0.0001 for ‘‘year’’ and
X 299 ¼ 224:96, P < 0.0001 for ‘‘territory * year’’). Six (27%) territories had none or very few reported incidences per breeding
season, whereas in four (18%) an activity within 2 km of the
nest was reported every three or four visits on average
(Fig. 2). There were also large between-year variations among
territories, as seen by the large standard deviations (Fig. 2).
The probability of success decreased with the frequency of
human activities reported during the breeding season (GLIMMIX, F1, 72 = 3.67, P = 0.05). Territories where no human activities were reported were on average five times more successful
than those where human activities were reported in more
than 20% of the monitoring visits (Fig. 3). A regression analyses of the average breeding success for each territory in relation to the average frequency of human activities reported
showed a negative significant relationship (F1,20 = 6.60,
Fig. 1 – Observed (above) and estimated (below) probability
of reaction to a human activity in relation to lineal distance
between the activity and the nest, and the type of activity.
Fig. 2 – Average (±SD) proportion of monitoring visits in which at least one activity was recorded for each study territory.
Proportion of successful
attempts
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
1
4 (21)
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
8 (38)
6 (27)
4 (25)
1-9%
10-20%
>20%
281
0.8
0.6
0.4
0.2
0
-0.2
None
Average frequency of human activities
Fig. 3 – Mean (±SD) proportion of successful attempts in relation to the average frequency of human activities reported during
the breeding season. Data represent the mean of the average success of all breeding attempts for each territory. Sample sizes:
number of territories (number of breeding attempts in brackets).
4.
Discussion
This study showed that some human activities (particularly
when close to the nest) had an influence on bearded vulture
behaviour, particularly on the probability of leaving the nest
unattended, and that the frequency of human activities in
the nest area had an influence on the probability of nest failure. It also showed that the distance at which human activities affected bearded vulture behaviour depended on the
type of activity, and that there were significant differences between territories in relation to behavioural reactions.
4.1.
Human activities and breeding success
As predicted, the frequency of human activities (particularly
those activities that were related to a higher frequency of nest
unattendance) had a significant probability of affecting nest
success. In raptor species with a breeding cycle longer than
six months, laying usually occurs at the beginning of winter,
so the nestling period (the time with highest energetic needs)
coincides with spring (when food abundance is usually at its
highest) (Newton, 1979). This means that incubation/hatching
usually takes place in the middle of winter; in those conditions,
if disturbance causes the departure of the incubating/brooding
bird from the nest area, this may engender thermoregulatory
problems for the embryo or young nestling, which may ultimately result in embryo or nestling death (Mearns and Newton,
1988; Bradley et al., 1997). In the Pyrenees, the bearded vultures
start laying during late December–early March, period during
which temperatures frequently fall below 0 "C (Margalida and
Garcı´a, 2002). Additionally, appropriate (sheltered) cliffs for
nesting are less numerous than in other areas of its breeding
range, which may explain why disturbance affected success.
The latter result does not take into account individual differences in behaviour, which are important in this and other
species (Didier et al., 2002; Van Oers et al., 2004), so human
activities do not necessarily have a disturbing effect on all
birds. In this study, the effect of human activities on bearded
vulture behaviour varied among territories: this may be related to differences in topography between territories, but
also on individual differences between the birds. There is
high site fidelity among years in this species, except when
one of the birds dies. Therefore, ‘‘territory’’ is probably also
a synonym of ‘‘breeding pair’’ and thus of individual differences in behaviour. Nevertheless, and despite these individual differences, results in this study show that human
activities occurring around the nest sites of bearded vultures
in the French Pyrenees had a high probability of affecting
their behaviour and, ultimately, their breeding success. Our
analyses did not take into account factors such as lay date,
breeding density or age of the parents, which are known to
influence breeding in this species (Heredia and Margalida,
2001; Margalida et al., 2003). It could also be that disturbance
may be a correlate of other variables (e.g., if more frequently
disturbed territories are also worse quality territories or occupied by lower quality parents). However, mixed models allow
to analyse hierarchical designs (Littell et al., 1996), so our results show that increased disturbance was associated to increased failure probabilities not only across, but within
territories and, ultimately, that human activities and disturbance are an important factor on its own. Breeding attempts
within territories that were exposed to higher frequency of
human activities, and in particular higher frequency of noisy
activities within 2 km, had higher probabilities of failure.
It would be important to evaluate how this reduced productivity affects population dynamics. As specified in Section 1,
average productivity in the French Pyrenees is lower than in
some other areas, and could thus improve if the frequency of
human activities was limited around the nest areas. In fact, results show that a reduction of human activities in the appropriate areas could potentially improve bearded vulture
productivity up to 50% in those areas: as seen from data in
Fig. 3, on average 8 fledglings are produced each year from
the 22 study territories. If human activities occurred less frequently than 10% in all territories, and productivity in the (currently) disturbed territories increased to the level of those
territories suffering less than 10% disturbance, the total productivity could increase to 10 young per year. This calculation
is possibly an overestimate, since other factors (such as weather and individual quality) also influence breeding success, but
it shows that potentially a relatively simple management measure could impact on the population of this threatened species.
282
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
Finally, it is also possible that areas that are frequently disturbed are more likely to be abandoned in subsequent breeding attempts, and thus that disturbance may also have
delayed effects on bearded vulture reproduction. This study
did not include such an analysis, but it may be worthwhile
exploring this issue in the future. Such delayed responses to
human disturbance have been observed in other species, like
Ferruginous Hawks Buteo regalis (White and Thurow, 1985).
Absence from the nest area during the pre-laying period
may lead to pair instability (leading the pair to move to another nest or territory). Movements between territories may
also be due to other factors, such as competition with Griffon
Vultures Gyps fulvus (Razin, 1997; Margalida and Garcı́a-Ferré,
1999), but disturbance and the absence from the nest area for
extended periods of time may exacerbate this problem. Since
the availability of high quality cliffs is low in the French Pyrenees (Razin, 2003), birds moving territories are likely to occupy lower quality ones in terms of availability of cavities
protected from weather, which may have important consequences for bearded vulture breeding.
4.2.
Management implications
As observed in other species (Grubb and King, 1991), the effect of human activities on bearded vulture behaviour depended on the type of activity and the distance to the
nest at which these activities occurred. Furthermore, the effect of distance varied in relation to the type of activity.
Assessment of those variations gives input on the best
management scenarios to minimise the effect of human
activities on bearded vultures since management actions
tailored to specific disturbance types may be most effective
(Grubb and King, 1991).
Very noisy activities (such as infrastructure works, motorbikes, forestry or military activities and helicopters) seemed
to be those most strongly affecting bearded vulture behaviour
and breeding success. Noise is particularly transmitted in alpine habitats, as relief provokes echoes and increases resonance. These activities thus provoked a reaction in bearded
vultures even if far away from the nest (2 km). Breeding success was significantly negatively associated with the frequency of very noisy activities in a territory during a
breeding event, as the probability that nests were left unattended was higher in those territories. These activities
should, therefore, be largely avoided around the nests in order
to maximise bearded vulture productivity.
Hunting also strongly affected bearded vulture behaviour
during the pre-laying period, as it was associated with the absence of the pair from the territory in a significantly high proportion of cases. Bearded vultures were more frequently
absent from the territories in the post-fledging period, even
in the absence of human activities. However, hunting increased significantly the probability of absence, which, as
specified above, may potentially lead to pair instability. Even
when the birds were present, hunting frequently provoked a
reaction. This effect also occurred when hunting activities
took place at large distances from the nest, which may be
associated with the fact that hunting as exercised in the
French Pyrenees (with groups of people) is also potentially
noisy as well as having a visual impact.
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
Bearded vultures were relatively tolerant of cars or planes,
and to people on foot, if they were more than 500–700 m from
the nest. The fact that no relationship was found between
bearded vulture breeding success and the frequency of cars/
planes or least-noisy activities (people on foot and gliders)
may be related to this distance effect: it is possible that only
the frequency of those activities close to the nest (and not
their overall frequency) affects bearded vulture breeding.
However, it should also be emphasized that topography, visibility and the relative altitudinal distance between the events
and the nests are likely to have a strong influence in explaining how bearded vultures react to human activities where visual, not auditory cues are the most important. In particular,
most observations of small planes (as specified in the methods) related to planes passing at high altitude (above the relief), so the actual distance was larger than the linear
distance of 500–700 m described. Additionally, most observations of cars involved relatively quick passage (rather than
parked) on roads that were not directly visible from the nest:
bearded vultures choose sites, if possible, that are far away
from roads (Donázar et al., 1993). Visibility and position in
relation to the nest significantly influenced whether Bald Eagles Haliaeetus leucocephalus reacted to human activities
(Grubb and King, 1991). Future work with bearded vultures
should include the analyses of those variables (topography,
visibility and altitudinal distance) in order to adjust the exact
distances at which buffer zones should be implemented. In
the meantime, it is probably safer to assume that such activities are not detrimental to bearded vultures beyond 500–
700 m from the nests, provided they are not within direct
sight of the nest.
Even if breeding failure was related to the frequency of human activities, there did not seem to be a particular period
where disturbance was most important in terms of leading
to failure. In the Spanish Pyrenees breeding success was overall related to the failure during the hatching and incubation
periods (Margalida et al., 2003). We could have thus expected
that, if breeding success is influenced by disturbance, it would
be during the incubation period that it would be mostly manifested. However, our analyses did not identify that disturbance during the incubation period was more important in
determining breeding success than disturbance at other
times. One of the reasons for that may be that our analyses
do not have enough power to detect differences when analysing data per period (given the smaller sample size in that
case). On the other hand, in the French Pyrenees, nest failure
does not happen more frequently in the incubation/hatching
than in the nestling period. Of 64 failures recorded between
1994 and 2002, half of them occurred during the incubation
(29.7%) and the hatching (23.4%) periods, whereas a large proportion (46.9%) of nest failures occurred during the nestling
period (particularly in the first month after hatching, 35.9%
of failures, M. Razin, unpubl. data). Weather in March–April
(when hatching has occurred) is more humid and cold in
the French than in the Spanish Pyrenees, which may explain
the nestling deaths if nestlings are unattended. Disturbance
during the pre-laying period (October–December) also seemed
to be important, as stated above, to allow bearded vultures to
settle in good nest areas, which are limited. A strong effort
should probably be directed to avoid disturbance during
B I O L O G I C A L C O N S E RVAT I O N
incubation and the first part of the nestling period (end of
December to end of April), but it probably would be important
that a ‘‘tranquillity’’ zone around the nest is kept year-round
(avoiding noisy activities up to 2 km, and other activities close
– <500–700 m – to the nest), in order to enhance bearded
vulture stability and productivity.
Overall, frequency of human activities varied between territories and between years within territories. Weather may
possibly explain annual differences in the frequency of disturbance: access to some sites in the French Pyrenees may be
precluded by snow. Results also showed that some territories
were much more prone than others to suffer disturbance
from human activities. The precautionary principle would
probably dictate that protective measures should be implemented more intensively in these disturbed areas.
In summary, this study showed that human activities
have a direct effect on bearded vulture behaviour, increasing
the likelihood that nest areas would be unattended.
Although important factors potentially explaining breeding
success could not be controlled for, results also point that
an increased probability of nest failure occurred in those
areas where disturbance was more frequent. The types of
activities that appeared to have stronger effects were very
noisy activities and hunting. It will be important to evaluate in the future whether there are any delayed effects of
disturbance on bearded vulture breeding (particularly, in
increasing the probability of territory or nest change in subsequent years), and the importance of topography on
explaining bearded vulture’s reaction to disturbance. Conservation measures based on these results may minimise detrimental effects of human activities on bearded vultures in
the French Pyrenees.
Acknowledgement
We thank all observers (voluntary or professional) that have
contributed to systematically and rigorously collect data for
this study, and all groups that form part of the Casseur D’os
(bone-breaker) network and that have participated in the
monitoring of the bearded vulture population in the northern
versant of the Pyrenees. In particular, we thank I. Rebours
from Saiak, D. Rousseau and L. Vilagines from Nature MidiPyrénées, C. Gautier from Cerca Nature, P. Beaupère from
the Ligue pour la Protection des Oiseaux (LPO), and the staff
from the Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage
(ONCFS), the Office National des Forêts (ONF) and the Réserve
Naturelle de Jujols. We also thank the Atelier Technique des
Espaces Naturels from organising a training workshop in
cooperation with the LPO, during which the observation sheet
for noting data on the field was developed. We also thank the
steering group of Recovery Plan for the bearded vulture in the
Pyrenees, lead by the Direction Régionale de l’Environnement
in Aquitaine, for allowing and encouraging this study to increase our understanding of the needs of bearded vultures.
We finally thank Antoni Margalida, Rafael Heredia, Jean
Francois Terrasse, Jean-Claude Thibault, Mick Marquiss, Gary
Bortolotti and two anonymous referees for ideas and comments on the manuscript, and Dave Elston for statistical
advice.
1 2 8 ( 2 0 0 6 ) 2 7 6 –2 8 4
283
R E F E R E N C E S
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PROGRAMME LIFE NATURE CONSERVATION DU
GYPAETE BARBU DANS LES ALPES FRANCAISES
Choix du nouveau site de réintroduction
des gypaètes barbus en Haute-Savoie
Julien Heuret
1998 - 1999

PROGRAMME INTERNATIONAL DE REINTRODUCTION ET DE SUIVI
DU GYPAETE BARBU DANS LES ALPES
1.Le contexte :
L'Agence pour l'Etude et la Gestion de l'Environnement (APEGE) est la structure chargée
de conduire le programme de réintroduction du gypaète barbu et d'en assurer le suivi
scientifique et technique dans les Alpes du Nord.
En 1973 la première réunion internationale sur le projet de réintroduction réunit à Chamonix
les français, les italiens et les suisses.
En 1978 le projet international naît, sous l'égide de la société zoologique de Francfort, du
WWF, et de l'union internationale pour la conservation de la nature (UICN).
En 1987 la première réintroduction en France a lieu sur la commune du Reposoir. Le choix
des sites avait été effectué après une étude approfondie des facteurs écologiques et
humains. La Haute Savoie est l'un des 4 sites alpins qui vont faire l'objet de ces
réintroductions avec le parc de Hohe Tauern en Autriche (depuis 1986), le parc d'Engadine
en Suisse (depuis 1991) et le site franco italien des parcs du Mercantour et Alpi Maritime
(depuis 1993)
En 1994 un couple de gypaètes se constitue dans la vallée du Reposoir.
En 1996 les deux jeunes gypaètes réintroduits font l'objet d'attaques régulières mais sans
conséquences majeures, de la part du couple installé.
En 1997 ce couple donne naissance au premier jeune gypaète né dans la nature, depuis
sa disparition de l'arc alpin au début du siècle.
Il n'y a pas de réintroduction cette année du fait d'un nombre insuffisant de naissances en
captivité.
2. Motivation de la recherche d'un nouveau site :
En 1998, suite aux interactions constatées en 1996 entre la réintroduction des deux jeunes
et le couple installé, une étude approfondie est menée du 20 mai au 11 août.
2.1 Les 49 contacts entre les adultes et les jeunes réintroduits étudiés durant cette période
mettent en évidence l'augmentation de leur intensité et de leur gravité par rapport à
l'année de comparaison 1996. 3 de ces contacts auraient pu se terminer par la mort de
l'un des oiseaux réintroduits.
2.2 Les jeunes réintroduits ont du quitter le site respectivement à 31 et 45 jours pour une
durée comparée qui avait été de 52 et 68 jours pour les jeunes de l'année 1996
confirmant les moyennes des années précédentes. L'étude des temps de vol journaliers
et la qualité des perchoirs nocturnes montre que l'émancipation des jeunes réintroduits
en 1998 était loin d'être satisfaisante au moment où ils quittent le site.
2.3 Le site de réintroduction Autrichien de la vallée de Rauris confronté au même
problème, recherche également un nouveau site de réintroduction.
3. Méthode :
Dès les premières conclusions de l'étude une réunion fin août a permis de définir la
méthode de recherche du nouveau site de réintroduction.
3.1 consultation de la carte élaborée en 1981 sur les sites potentiels de Haute-Savoie dans
le cadre de l'étude préalable à la première réintroduction.
3.2 Cahier des charges élaboré à la lumière de l'expérience acquise après 10 années de
réintroduction :
 exposition du versant excluant tous les ubacs de nord ouest à nord est.
 présence de falaises de 300 m minimum avec vires et perchoirs.
 altitude permettant d'être largement au dessus de la forêt (danger majeur pour les
jeunes lors de leurs premiers vols) mais permettant également un déneigement
rapide en mai et juin.
 accessibilité bonne et hébergement potentiel pour l'équipe de surveillance.
 pas de menaces majeures : mortalité par câbles, dérangement par sports de
montagne ou activités perturbantes.
 disponibilité alimentaire proche pour vols de reconnaissance post émancipation.
3.3 exclusion de massifs à priori :
Territoire du couple : Bargy et versant Clusaz, Grand Bornand, Manigod de la
chaîne des Aravis.
Massifs à forte fréquentation : Parmelan, Tournette.
Massifs éloignés : Haut Chablais.
3.4 prospection sur 11 sites sélectionnés par les professionnels de l'APEGE :gardes des
réserves naturelles et équipe Gypaète
4. Résultats :
Sur les 11 sites visités de septembre à novembre 1998, 9 ne sont pas retenus car cumulant
deux facteurs défavorables au moins. 2 sites sont potentiellement favorables. Ils sont tous
deux situés dans le massif des Aravis versant est, sur la commune de Sallanches.
Mayère répond à l'ensemble des critères du cahier des charges et présente
l'avantage d'être accessible tôt en début de saison, mais comprend un problème sérieux lié
à la proximité d'un altiport.
Doran répond à l'ensemble des critères. C'est un site cartographié dans l'inventaire
de 1981. Ce site est situé à 8km de l'aire du couple nicheur.
Les aspects pratiques restant à préciser :
 l'accès très tôt en début du mois de mai
 les possibilités d'hébergement (refuge grande capacité, plusieurs chalets d'alpage)
 l'organisation de l'accueil des randonneurs en juillet, août sur la base de l'expérience
acquise sur le précédent site de Montarquis.(prévoir un animateur terrain).
Tableau de synthèse des différents sites potentiels visités à l'automne 1998
Massif &
site
Mt Blanc
Paturages
de Miage
Commune
Exposition
Altitude
mini maxi
1500
3000
Potentiel
alimentaire
Faible
Grottes &
vires
Faible
potentiel
Accès
St Gervais
Sud ouest
Haut Giffre
Chalet du
Boret
Sixt fer à
Cheval
Sud est
1400
2500
Fort
bouquetins
moutons
?
Chemin
jeepable dans
la réserve &
40mn à pied
Haut Giffre
Samoens
Combe de
Gers
Est sud est
1500
1900
?
Potentiel
préciser
Buet
Emosson
Loriaz
Vallorcine
Sud est
2000
2700
Faible
Bouquetin
Chamois
Potentiel
préciser
Aravis
chalets de
coeur
Sallanches
Est
1700
2200
Rien sauf
une vire
exposée
Bon chemin 8
chalets Altiport
jeepable
déjà
très
utilisés
Aravis
Mayère
Sallanches
Est
1500
2000
Bon
Chamois
bouquetin
mouton
Bon
chamois
bouquetin
mouton
Bon
potentiel
Très bon
chemin
jeepable
même tôt en
saison
Potentiel
préciser
Aravis
Doran
Sallanches
Sud est
1500
2500
Très bon
chamois
bouquetin
mouton
Bonnes
grottes mais
altitude un
peu forte
Bon chemin
jeepable
sauf tôt en
saison
Chemin
jeepable
difficile
Refuge
grande
capacité
chalets
d'alpage
?
Chemin
jeepable
avec
autorisation
Menaces
Glaciers
Chutes
neige
tardives
Précipitations
abondantes
Fréquentation
importante
Câble
à Bon chemin Bâtiments
400000v
jeepable
de la
Fréquentacommune
tion
Samoens
importante
à Long chemin Chalets de Câble
400000v
jeepable
Loriaz
Altitude
importante
Chaîne des Sallanches
Fiz
Véran
Sud
1600
2400
Bouquetins
moutons
Roc d'Enfer Taninges
Alpage du
Foron
Roc d'Enfer Mieussy
Chalune
Sud
1500
2200
Chamois
mouflons
Sud est
1500
1850
Chamois
monflons
Grottes
très
difficiles
d'accès
Grottes
difficiles
d'accès
Mauvaise
exposition
Roc d'Enfer
Chavasse
Sud ouest
1600
1800
Chamois
monflons
Falaises
trop petites
Mieussy
Hébergt
potentiel
Eventuel
gîte étape
Peu évident
à Altiport
&
Bon chemin Plusieurs
jeepable
chalets
d'alpage
Bon chemin Plusieurs
jeepable
& chalets
30mn à pied
d'alpage
Bon chemin Nombreux
jeepable
chalets déjà
très utilisés
Nidification
potentielle
adultes.
Escalade
Braconnage
Braconnage
Câbles de la
station de
Sommand

“CONSERVATION DU GYPAETE BARBU DANS LES ALPES FRANCAISES”
PROJET N° B4-3200/98/455
PROTOCOLE COMMUN
DE REINTRODUCTION ET DE SUIVI
DES GYPAETES BARBUS
DANS LES ALPES FRANCAISES
Agir pour la Sauvegarde des Territoires et des Espèces Remarquables ou
Sensibles
Parc national du Mercantour
ASTERS

Parc national du Mercantour

LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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
ASTERS, Agir pour la Sauvegarde des Territoires et des Espèces Remarquables
ou Sensibles.
PNM, Parc national du Mercantour.
A partir de l’expérience de 11 saisons de réintroduction en Haute-Savoie, de 4 saisons
dans les Alpes-Maritimes et des échanges avec les différents sites du programme
européen

GENG Matthieu, HEURET Julien, ROUILLON Antoine - ASTERS.

•
•
•
•
•
•
LEQUETTE Benoît et PERFUS Monique - Parc national du Mercantour.
FREY Hans - Foundation for the Conservation of the Bearded Vulture, Université
de médecine vétérinaire de Vienne (Autriche).
TARIEL Yvan, COTON Christophe et CLEMENTE Céline - Ligue pour la
Protection des Oiseaux, Mission Fonds d’Intervention pour les Rapaces.
RAZIN Martine - Coordination casseur d’os Pyrénées, Ligue pour la Protection des
Oiseaux, Mission Fonds d’Intervention pour les Rapaces.
VODINH Juliette - Comité Scientifique des Réserves Naturelles de Haute-Savoie.
DELESTRADE Anne - Centre de Recherche sur les Ecosystèmes d’Altitude,
Chamonix.
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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SOMMAIRE
PREAMBULE. …………………………………..………………………………………p. 3
OBJECTIFS. ………………………………….…………………………………………p. 4
LE LACHER. …………………………………………………………………………… p. 6
A - Préparation. ……………………………………..………………………..… p. 6
B – Mise en place des oiseaux. ……………………………………………… p. 7
SUIVI ET SURVEILLANCE. ……………………………………..…………………… p. 8
A - Organisation. ………………..……………………………………………… p. 8
B - Phase pre-envol. …………………………………………………………… p. 9
C - L’envol. ……………………………………………………………………… p. 10
D - Phase post-envol. ………………………………………..……..…….…… p. 10
BILAN DE LA SAISON DE REINTRODUCTION ET OPTIMISATION DES METHODES
DE REINTRODUCTION. ……………………………………………………………… p. 13
A - Contenu du rapport annuel sur chaque site. ……………………….…… p. 13
B - Diffusion du rapport. …………………………………………..…………… p. 14
AUTRES ACTIONS. ……………………………………………………………………p. 15
A - Suivi après-départ du site de réintroduction. …………………………… p. 15
B - Suivi scientifique. ………………………………………………...………… p. 15
C - Information et prévention. ………………………………………………… p. 15
REFERENCES. ………………………………………………………………………… p. 16
ANNEXES. ……………………………………………………….…………………….. p. 17
1 - Marquage des oiseaux. …………………………………………………… p. 17
2 - Mode d’emploi de la fiche de suivi sur site de réintroduction. ………... p. 18
3 - Fiche de suivi sur site de réintroduction. …….………………………….. p. 19
4 - Qualité d’observation. …………………….………………………….……. p. 20
5 – Situation météo et registre des dépôts de nourriture. ………….……… p. 21
6 – Exemples des graphiques des séries de battements d’ailes, des temps de vol
cumulés et des perchoirs nocturnes. …………………….…….……….. p. 22
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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PREAMBULE
Le programme international de réintroduction du Gypaète barbu dans les Alpes
s’intègre dans un vaste plan de conservation de l’espèce sous l’égide de la FCBV
(Foundation for the Conservation of the Bearded Vulture). Il se concrétise par le lâcher
dans le milieu naturel, de jeunes oiseaux nés en captivité. Leur installation dans une
grotte aménagée s’effectue quelques semaines avant la date présumée d’envol, pour
permettre aux poussins de se familiariser avec leur environnement. Durant l’élevage,
les manipulations par l’homme auront été limitées au strict minimum, de manière à
réduire tout risque d’imprégnation. Durant la phase pre-envol, et sauf en cas de
problèmes liés à leur sécurité ou à leur santé, les jeunes n’ont plus de contact avec
l’homme. L’apport de nourriture se fait de préférence de nuit ou à défaut, à leur insu.
Nous appellerons, « suivi », l’observation et la récolte de données à partir d’un
certain nombre d’indicateurs biologiques ou comportementaux. Il s’étale du lâcher au
30ème jour après l’envol du dernier oiseau. Il permet de s’assurer que l’émancipation se
déroule dans de bonnes conditions, et que les oiseaux quittant le site, montrent de
bonnes aptitudes à survivre en milieu naturel.
Par ailleurs, nous appellerons, « surveillance », la veille sur l’ensemble du site
afin d’assurer la sécurité des oiseaux. Idéalement la présence de surveillants se répartit
du lâcher au départ du site du dernier oiseau.
Le suivi après le départ du site, dépendra du fonctionnement du réseau
d’observateurs et des déplacements des oiseaux.
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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OBJECTIFS
A - OBJECTIFS PRIORITAIRES :
Suivi de l’émancipation et de l’état sanitaire apparent des oiseaux
• Vérifier les indicateurs de progression :
∗ Pre-envol :
• Séries de battements d’ailes.
∗ Post-envol :
• Temps de vol.
• Perchoirs nocturnes.
• Indépendance alimentaire.
• Evaluer des éventuels symptômes pour un diagnostic rapide en cas de :
∗ Pathologies.
∗ Blessures.
∗ Déficit comportemental ...
Surveillance de l’environnement des oiseaux
•
Naturel :
∗ Veiller au choix d’une grotte protégée des intempéries et des prédateurs potentiels.
∗ Limiter les effets négatifs pouvant être entraînés par la concurrence intra
interspécifique.
•
Humain :
∗ Limiter les perturbations intentionnelles (affûts photo, curiosité ...).
∗ Limiter les perturbations non intentionnelles (escalade, parapente, randonnée ...).
Optimisation des méthodes de réintroduction
Evaluation des méthodes de lâcher,
de suivi et de surveillance.
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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B - OBJECTIFS SECONDAIRES :
Autres actions
Suivi après départ du site :
Permet de contrôler l’état général apparent des oiseaux.
Suivi scientifique :
Biologie, éthologie de l’espèce et autres ...
∗ Etudes ponctuelles.
∗ Programmes pluriannuels.
Etc., …
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et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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LE LÂCHER
A - PREPARATION :
• Date de lâcher:
Objectif : Assurer de bonnes conditions de vie aux oiseaux et le maximum de sécurité aux
observateurs.
Le choix de la date dépend de l’âge des oiseaux disponibles, du site de réintroduction et de
l’enneigement. Le lâcher a lieu entre début mai et fin juin (exceptionnellement début juillet).
• Aspect réglementaire :
Au niveau national, veiller à ce que la personne qui transporte, pour réintroduction, les
gypaètes barbus sur le territoire français ait une autorisation du Ministère de l’Aménagement du
Territoire et de l’Environnement. En effet, le Gypaète barbu est concerné par l’arrêté ministériel
du 9 juillet 1999, fixant la liste des espèces protégées menacées d’extinction (article L 211-1 du
code rural). L’autorisation de transport pour réintroduction du gypaète barbu reste de la
compétence du ministère en application du décret du 31 mars 1999 modifiant le décret du 15
janvier 1997.
Au niveau international, si l’oiseau vient d’un centre d’élevage suisse ou transite par ce pays,
le transport doit se faire dans le cadre de la CITES, la Suisse ne faisant pas partie de l’Union
Européenne.
• Préparation du site :
Objectif : Avoir une grotte abritée pour recevoir de jeunes gypaètes en toute sécurité dans un
site de lâcher leur préservant un maximum de tranquillité.
Il est important d’effectuer une visite et un aménagement de la grotte avant le lâcher. Penser
à la protection contre les éventuels prédateurs, à l’accessibilité pour l’équipe de surveillance, à
réduire au maximum les problèmes éventuels d’humidité et de chute d’éléments solides dans la
grotte ou à proximité. Installer, éventuellement, un balisage de la zone de réintroduction pour
éviter les risques de fréquentation par d’éventuels randonneurs ou curieux.
• Moyens humains :
Objectif : Assurer un suivi efficace garantissant une connaissance journalière de l’état
sanitaire et de l’émancipation des oiseaux, ainsi qu’une bonne surveillance.
L’équipe comprend trois personnes au minimum. Un encadrant qui doit être présent
suffisamment à l’avance afin de préparer l’ensemble de l’opération. Il doit avoir des
connaissances en biologie, en gestion de la faune et/ou en soins vétérinaires, avec une
expérience du suivi et/ou de la réintroduction d’espèces et doit être joignable à tout moment.
Il sera secondé dans le suivi par deux ou trois autres personnes présentes simultanément,
permettant le suivi minimum quotidien (pendant la plus grande partie de l’activité diurne des
oiseaux) depuis le jour de la réintroduction jusqu’au jour de l’arrêt de la surveillance. Celles-ci
ne doivent pas obligatoirement avoir des compétences préalables sur l’espèce Gypaète barbu,
mais doivent être motivées par le suivi. Elles feront l’objet d’une formation préalable.
• Matériel :
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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Objectif : Réaliser un suivi des oiseaux avec la plus grande précision. C’est à dire, observer
et consigner au mieux les comportements des oiseaux et contacter les personnes compétentes,
le plus rapidement possible, en cas de problème.
Il est nécessaire que l’équipe de suivi ait à sa disposition du bon matériel optique (plusieurs
paires de jumelles, une longue-vue), plusieurs exemplaires de la fiche de suivi sur site de
réintroduction (annexe 3), ainsi que le mode d’emploi de celle-ci (annexe 2). Fournir également,
une fiche de marquage des oiseaux de l’année lâchés sur le site, une montre, un chronomètre
par oiseau (en particulier pour relever les temps de vol), de quoi écrire en conditions difficiles
(stylos bille, tablettes ...) et des radios (ou téléphones portables).
• Données biologiques :
Objectif : Sexer l’oiseau et entrer son patrimoine génétique dans la base de données de la
FCBV (Foundation for the Conservation of the Bearded Vulture). Connaître la situation
pondérale de l’oiseau (état initial).
Vérifier que la prise de sang a été réalisée, avant le transport de l’oiseau vers la grotte de
lâcher.
Peser l’oiseau, avant le transport vers la grotte de lâcher.
• Marquages :
Objectif : Individualiser le suivi des oiseaux sur le site de réintroduction puis par le réseau
d’observateurs. Permettre une identification certaine de l’individu en cas d’observation des
bagues.
Ils se font suivant le plan de marquage et le code baguage de la F.C.B.V. Les effectuer,
avant le transport de l’oiseau vers la grotte de lâcher (Voir annexe 1).
Prévoir, lorsque cela est possible, le baguage avant le transport vers le site de lâcher (aspect
réglementaire).
NB : Le recueil des données biologiques ainsi que les marquages gagnent à être effectués la
veille du jour de la réintroduction, en prenant le temps nécessaire et avec un public restreint.
B - MISE EN PLACE DES OISEAUX :
• Transport jusqu'à la grotte :
Objectif : Assurer une tranquillité et un confort maximal aux oiseaux pendant le transport
jusqu’à la grotte afin d’éviter tout stress inutile.
Il est nécessaire d’opérer le plus silencieusement possible en limitant les manipulations des
jeunes au strict minimum et en limitant la présence d’observateurs extérieurs. Le transport se
fera dans des caisses fermées, d’une taille adaptée et bien aérées.
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SUIVI ET SURVEILLANCE
A - ORGANISATION :
• Formation de l’équipe de suivi :
Objectif : Garantir une observation de qualité ainsi qu’une prise de note représentative de
l’activité des oiseaux.
Prévoir une explication du fonctionnement de la fiche de suivi et mise en pratique sur le
terrain avec l’encadrant pendant une demi-journée minimum, puis vérifier régulièrement que les
consignes ont été bien intégrées.
• Utiliser le mode d’emploi de la fiche de suivi (annexe 2) et la fiche (annexe 3) prévus
pour le suivi.
• Contrôle :
Objectif : Permettre au responsable d’évaluer quotidiennement le bon déroulement du lâcher
en matière de sécurité et d’état sanitaire des jeunes à partir des critères relatant leur
émancipation. Permettre l’action rapide (après décision du responsable de la réintroduction)
rapidement en cas de nécessité. Sortir des synthèses partielles, si nécessaire.
Le responsable doit faire un bilan chaque soir en consultant les fiches d’observations de la
journée. Le responsable réalisera la saisie de données régulièrement.
Ne pas hésiter à contacter, si nécessaire, des personnes expérimentées.
• Paramètres à prendre en compte :
Objectif : Suivre quotidiennement l’état sanitaire et l’émancipation des oiseaux.
Le principe est de suivre différents indicateurs, essentiellement comportementaux, qui sont
censés refléter la condition physique de l’oiseau et la qualité de son émancipation. Ces
indicateurs peuvent évoluer avec la maturité des oiseaux. La fiche de suivi (annexe 3) fournie
permet de noter, de manière standardisées les informations pour en autoriser une analyse
comparative avec les données issues des lâchers antérieurs sur le même site et,
éventuellement, sur les autres sites.
• Poste d’observation :
Objectif : Garantir le confort de travail et la sécurité de l’observateur, tout en permettant la
quiétude des oiseaux.
Le poste d’observation doit garantir une accessibilité aisée et en toute sécurité pour les
observateurs. Il est conseillé de prévoir un abri léger permettant une protection de l’observateur
en cas d’intempéries importantes. La distance entre l’observateur et la grotte doit être un
compromis entre une observation précise et un dérangement réduit au minimum. Selon la
topographie, il est donc souhaitable qu’elle soit d’au moins 200 mètres.
Essayer d’avoir un angle de vue le plus large possible afin d’être bien placé en cas de départ
éventuel des oiseaux “à pied” ou lors de leurs premiers vols. Le point d’observation doit
permettre, éventuellement, d’intervenir en cas de dérangements extérieurs anthropiques ou
naturels (prédateur).
• Début de la période de suivi et de surveillance :
Dès l’instant où les oiseaux sont déposés dans la grotte.
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B - PHASE PRE-ENVOL :
• Nourrissage : (arrêté interministériel du 7 août 1998 relatif à l’élimination des cadavres
d’animaux et au nourrissage des rapaces nécrophages).
Objectif : Assurer aux gypaètes la quantité nécessaire de nourriture dont ils ont besoin, sous
une forme assimilable et dont la nature ne les mette pas en danger.
Veiller à ce que les oiseaux aient toujours de la nourriture à disposition, au minimum 500 g
par jour et par oiseau. La taille des morceaux carnés n’est pas très importante. Cependant il
faut veiller à les préparer (lacérer la peau, couper les tendons, fracturer les gros os si
nécessaire). Il est possible de donner des animaux entiers jusqu'à la taille du lièvre. La
nourriture doit être décongelée et constituée d’os et de viande. Il est important de ne pas
donner d’oiseaux, de carnivores, d’animaux risquant de comporter des plombs de chasse
(risque de saturnisme) ou d’animaux dont la cause de la mort n’est pas connue avec certitude
(risque d’empoisonnement).
Le dépôt de nourriture doit s’effectuer hors de la période d’activité diurne des oiseaux. Tenir
un registre (annexe 5) des dépôts de nourriture (date, quantité et nature).
• Horaires :
Objectif : couvrir la période d’activité diurne des oiseaux permettant de s’assurer de la
sécurité, de l’état sanitaire et de la progression des oiseaux.
L’activité des oiseaux nécessite, la présence d’une personne de 8h00 à 18h30. Cependant,
une surveillance peut être mise en place une heure plus tôt le matin et une demi-heure plus tard
le soir. On effectuera un relais au milieu de la journée entre deux observateurs.
• Suivi comportemental :
Objectif : Détecter tout incident dans le développement et l’état sanitaire des oiseaux, qu’il
s’agisse de problèmes physiologiques ou comportementaux.
La prise de nourriture :
Il est important de surveiller que les oiseaux aient, au moins, une prise réelle de nourriture
par jour. Si un oiseau ne mange pas pendant 2 jours, il faut s’inquiéter.
Fiente :
Du fait de sa brièveté il est facile de manquer l’observation de ce comportement. Cependant,
si aucune production de fiente n'est observée dans la journée, il faut être particulièrement
attentif à la production de fientes durant le jour qui suit.
Aspect du plumage et entretien :
Un plumage mal entretenu doit être source d’inquiétude. Si un oiseau ne prend aucun soin
de son plumage pendant deux jours de suite, il faut le surveiller attentivement.
Déplacements :
Un oiseau qui reste prostré pendant une période supérieure à une journée doit être surveillé
attentivement.
Relations intra et interspécifiques :
Les relations entre les jeunes réintroduits dans la grotte de lâcher sont inévitables et sont
même une source de socialisation. Il est important de les surveiller, afin de détecter toutes
blessures pouvant être provoquées par les contacts ou des comportements de dominance trop
affirmés risquant de traumatiser un des jeunes. Si une dominance trop marquée empêche l’un
des oiseaux de s’alimenter correctement, mettre en place deux points d’alimentation distincts
dans la grotte.
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Il arrive que l’un des problèmes soulevés ci-dessus se produise isolément. Bien que ceci
ne traduise pas forcément une situation dramatique, le suivi doit être plus attentif. Si des
perturbations sur plusieurs des aspects cités ci-dessus se confirment, une surveillance accrue
doit être mise en place et une intervention éventuelle peut-être préparée. Ne pas hésiter à se
mettre en relation avec des personnes expérimentées. Cependant, il faut garder à l’esprit
qu’une éventuelle intervention reste extrêmement délicate et devra faire l’objectif d’une décision
du responsable de la réintroduction et être pratiquée uniquement par du personnel ayant
l’expérience requise.
•
Séries de battements d’ailes :
Objectif : Evaluer quantitativement la progression du développement physique et
comportemental de l’oiseau.
Le nombre de séries de battements d’ailes est noté par oiseau, sans tenir compte du nombre
de battements par série.
C - L’ENVOL :
• Age des oiseaux à l’envol :
Les informations présentées ci-dessous n’ont qu’un objectif informatif. Elles ont été calculées
avec les données de 5 sites pour 74 oiseaux réintroduits :
∗ âge moyen d’envol :
117 jours.
∗ âge maximum d’envol : 130 jours.
∗ âge minimum d’envol :
101 jours.
Le départ prématuré de la grotte de lâcher n’est pas exceptionnel, et se traduit le plus
souvent par des déplacements des jeunes oiseaux à pied ou par un envol accidentel.
Cependant, si le départ intervient avant l’âge de 100 jours, il est souhaitable de consulter le
responsable de la réintroduction et d’envisager une recapture pour une remise en place dans la
grotte. Dans ce cas la capture de l’oiseau se fait en fin de journée, lorsque la lumière décline
légèrement, à l’aide d’une couverture. Une caisse adaptée est nécessaire en cas de transport
jusqu’à la grotte.
NB : dans le cas où l’on décide d’effectuer un suivi après départ du site, dynamiser le réseau
d’observateurs dès l’envol d’un oiseau en indiquant une date pour l’échéance théorique des
premières observations en dehors du site (environ un mois après l’envol de l’oiseau).
D - PHASE POST-ENVOL :
• Nourrissage : (arrêté interministériel du 7 août 1998 relatif à l’élimination des cadavres
d’animaux et au nourrissage des rapaces nécrophages).
Objectif : Assurer aux gypaètes la quantité nécessaire de nourriture dont ils ont besoin, sous
une forme assimilable et dont la nature ne les mette pas en danger.
Le point de nourrissage doit être réalisé sur un point haut où les oiseaux se sentiront
dominants, et d’accès par la voie des air assez aisé. L’emplacement de ce point de nourrissage
doit être identifié avant l’envol prévu et mis en place au plus tard le soir même de l’envol du
premier oiseau. Il est important de s’assurer que ce point est repéré rapidement (le jour même),
et fréquenté (au plus tard quatre à cinq jours après l’envol) au moins une fois par jour par les
oiseaux. Ne pas hésiter à déplacer le point de nourrissage en cas de non visite persistante des
oiseaux. La localisation du point de nourrissage doit garantir la tranquillité des oiseaux. Un
apport ponctuel pourra être effectué ailleurs selon le comportement d’un oiseau.
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Un oiseau a besoin d’environ 500 g de nourriture journalière. Cependant, la présence
d’autres espèces nécrophages sur les sites, impose un dépôt plus important de nourriture. Il est
souhaitable qu’un stock de nourriture soit toujours disponible. Alimenter le point de nourrissage
hors de la période d’activité diurne des oiseaux. La qualité de la nourriture doit être la même
que celle des apports dans la grotte. Il est important de ne pas donner d’oiseaux, de carnivores,
d’animaux risquant de comporter des plombs de chasse (risque de saturnisme) ou d’animaux
dont la cause de la mort n’est pas connue avec certitude (risque d’empoisonnement).
Privilégier les morceaux volumineux qui ne sont pas un handicap pour les gypaètes et qui
seront moins facilement emportés par des charognards terrestres. Essayer de mettre en place
des moyens de dissuasion des concurrents et prédateurs (urine, naphtaline), tout cela devant
être inaccessible par les oiseaux.
L’arrêt des apports de nourriture se fait au plus tard lorsque les oiseaux sont âgés de 180
jours. Il est conseillé d’interrompre progressivement les apports à partir du moment où les
oiseaux exploitent de la nourriture ailleurs et ne visitent plus régulièrement le point de
nourrissage.
Tenir à jour le registre (annexe 5) des dépôts de nourriture (date, quantité, nature).
• Horaires :
Objectif : Assurer une surveillance constante de l’oiseau pendant son activité diurne, relever
les données permettant le suivi des temps de vol et la qualité des perchoirs nocturnes.
Le suivi post-l’envol, doit couvrir l’ensemble de la période d’activité diurne des oiseaux. Il est,
de plus, souhaitable que le suivi soit effectué par deux personnes lors des périodes de forte
activité des oiseaux (en général de 7h30 à 12h00 et de 15h30 à 18h00). Il convient également
d'être particulièrement attentif en fin de journée pour le repérage du perchoir nocturne.
•
Poste d’observation :
Il n’est pas nécessairement le même que celui utilisé durant le suivi pre-envol. Il doit
permettre d’observer la plus grande partie du site, afin d’assurer un suivi correct des oiseaux
volants et une intervention rapide en cas de dérangement.
Il ne doit donc pas être trop éloigné de la zone principale d’activité des oiseaux.
• Suivi comportemental :
Objectif : Détecter tout incident dans le développement et l’état sanitaire des oiseaux, qu’il
s’agisse de problèmes physiologiques ou comportementaux.
La prise de nourriture :
Il est important de surveiller que les oiseaux aient, au moins, une prise réelle de nourriture
par jour. Si un oiseau ne mange pas pendant 5 jours, il faut s’inquiéter (attention, l’oiseau peut
se nourrir en dehors du point de nourrissage lorsqu’il maîtrise le vol).
Fiente :
Bien que particulièrement difficile pendant cette période, l’observation d’une production de
fiente est un des éléments participant à l’évaluation de l’état général de l’oiseau. Dans le cas ou
un oiseau n’est pas vu en train de se nourrir, la production de fientes, associée à un
comportement général satisfaisant, permet de supposer qu’il n’y a pas de problème majeur.
Aspect du plumage et entretien :
Un plumage mal entretenu doit être source d’inquiétude. Si un oiseau ne prend aucun soin
de son plumage pendant deux jours de suite, il faut le surveiller attentivement.
Déplacements :
Un oiseau qui reste prostré pendant une période supérieure à une journée, doit être surveillé
attentivement. Si un oiseau disparaît pendant plus de 24 heures dans la quinzaine qui suit
l’envol, il est important de mettre en place des recherches.
Relations intra et interspécifiques :
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Les relations avec des individus de son espèce ou d’autres espèces sont courantes et, le
plus souvent, constructives pour l’oiseau. Il est important de les surveiller afin de détecter tous
dommages pouvant être provoqués par les contacts.
Il arrive que l’un des problèmes soulevés ci-dessus se produise isolément. Bien que ceci
ne traduise pas forcément une situation dramatique, le suivi doit être plus attentif. Si des
perturbations sur plusieurs des aspects cités ci-dessus se confirment, une surveillance accrue
doit être mise en place et une intervention éventuelle peut-être décidée par le responsable de la
réintroduction. Ne pas hésiter à se mettre en relation avec des personnes expérimentées.
• Temps de vol :
Objectif : Evaluer quantitativement la progression du développement physique et
comportemental de l’oiseau.
Le calcul de temps de vol se fera du décollage à l’atterrissage de l’oiseau. Dans les autres
cas, noter le temps de vol observé.
• Perchoirs nocturnes :
Objectif : Evaluer l’expérience acquise et la capacité de l’oiseau à se mettre en sécurité,
donc son émancipation.
Chaque soir, évaluer la qualité du perchoir nocturne pour chaque oiseau à l'aide du mode
d’emploi de la fiche de suivi (annexe 2). En cas de doute sur la cotation du perchoir, consulter
l’encadrant. Si le doute persiste, prendre la cotation inférieure. En cas de doute sur la
localisation tenter une vérification le lendemain, au lever du jour, ou s’abstenir de cotation.
•
Fin de la période de suivi :
La période minimum de suivi quotidien s’arrête 30 jours après l’envol du dernier oiseau.
• Fin de la période de surveillance :
La période de minimum de surveillance journalière s’arrête à partir du moment où les
oiseaux quittent le site pendant plus de 2 jours ou lorsque le plus jeune des oiseaux atteint l’âge
de 180 jours.
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BILAN DE LA SAISON DE REINTRODUCTION ET
OPTIMISATION DES METHODES DE REINTRODUCTION
Un rapport sera produit à l’issu de la saison de réintroduction. Il a pour objectif de consigner
le bilan de la saison de réintroduction, d’exploiter l’essentiel des données récoltées, de les
échanger avec les autres sites de réintroduction et de les transmettre aux partenaires.
Il servira enfin à l’évaluation et l’optimisation des méthodes de réintroduction.
A - CONTENU DU RAPPORT ANNUEL SUR CHAQUE SITE :
INTRODUCTION
UN BILAN QUANTITATIF :
•
•
•
•
•
Les dates d’arrivée et de départ du site de l’équipe de suivi.
Les moyens humains et le nombre de journées homme engagées pour le suivi.
Les moyens matériels disponibles pour le suivi (optique, communication,…).
Un tableau récapitulant (voir annexe 4) :
Le nombre de jours de suivi.
La durée d’observation.
La durée d’observation oiseau vu.
La durée moyenne d’observation oiseau vu journalière.
Les pourcentages (moyen, maximum et minimum) du temps où l’oiseau est vu.
Une représentation graphique de la qualité d’observation (camembert, annexe 4)
commentée, en tenant compte de :
Une bonne journée d’observation : lorsque le temps d’observation effective dépasse
dix heures.
Une journée moyenne d’observation : lorsque le temps d’observation effective est
compris entre cinq et dix heures.
Une mauvaise journée d’observation : lorsque le temps d’observation effective
n’excède pas cinq heures.
1.
LA SAISON DE REINTRODUCTION :
• La date de réintroduction.
• L’agenda des situations météorologiques simplifiées (tableau, annexe 5).
• Un bilan des apports de nourriture (tableau, annexe 5).
2.
LES OISEAUX :
• Une fiche signalétique des oiseaux réintroduits (date et lieu de naissance, âge au
moment du lâcher, poids, marquages ...).
• Les dates et conditions d’envol. Pour le calcul de temps de vol, on prendra en compte le
jour de naissance, ainsi que celui d’envol.
• Une représentation graphique (histogramme, annexe 6) commentée du nombre de séries
de battements d’ailes sur une période allant de la date de dépôt dans la grotte de l’oiseau
jusqu’à la date d’envol.
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• Une représentation graphique (histogramme, annexe 6) commentée des temps de vols
cumulés sur une période allant de la date d’envol jusqu'au 30ème jour. Afin de ne pas
perdre d’informations, il est possible de faire un deuxième graphique reprenant toutes les
informations sur la période allant de la date d’envol jusqu'à l’arrêt du suivi après envol.
• Une représentation graphique (nuage de points, annexe 6) commentée de l’évolution de la
qualité des perchoirs nocturnes sur une période allant de la date d’envol jusqu'au 30ème
jour. Afin de ne pas perdre d’informations, il est possible de faire un deuxième graphique
reprenant toutes les informations sur la période allant de la date d’envol jusqu'à l’arrêt du
suivi après envol.
• Une synthèse commentée des relations inter et intraspécifiques.
• Une chronologie des faits marquants de la réintroduction.
3. EVALUATION DE LA SAISON DE REINTRODUCTION
•
Un bilan qualitatif contenant :
La description des conditions de réintroduction, de surveillance et de suivi.
Les dérangements constatés pendant la période d’observation des oiseaux.
Les problèmes rencontrés.
Des suggestions pour des réintroductions à venir.
Cette évaluation servira de base pour l’optimisation des méthodes de réintroduction.
CONCLUSION
B - DIFFUSION DU RAPPORT :
Afin d’échanger les expériences acquises chaque année et d’impliquer des partenaires sur le
long terme, il est nécessaire de diffuser le rapport saisonnier.
•
•
•
•
•
•
Au coordinateur et aux partenaires du programme LIFE.
Au ministère de l’aménagement du territoire et de l’environnement.
A la F.C.B.V.
Aux autres sites de réintroduction.
Interne à la structure.
Eventuellement aux autres partenaires.
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AUTRES ACTIONS
A - SUIVI APRES DEPART DU SITE DE REINTRODUCTION :
Ce suivi de proximité facultatif permet de s’assurer que les oiseaux sont encore en vie et
présente l'intérêt de contrôler leur état général après départ du site.
En fonction de chaque site, ce suivi est notamment effectué par :
L’équipe de suivi chargée de la réintroduction,
Les réseaux d’agents de terrain (gardes d’espaces protégés, ONCFS, ONF, …).
Les relais (alpagistes, restaurateurs d’altitude, gardiens de refuges, guides et
accompagnateurs de moyenne montagne …).
Les naturalistes.
B - SUIVI SCIENTIFIQUE :
Il est possible de permettre à d’autres structures d’effectuer si l’occasion se présente
d’autres études pour peu que cela ne nuise pas à l’organisation et au suivi de la réintroduction,
ainsi qu’aux gypaètes lâchés
C - INFORMATION ET PREVENTION :
L’objectif est de gérer la fréquentation pour éviter de nuire au lâcher, et à l’émancipation des
jeunes. Lorsque les sites ne permettent pas de s’affranchir de cette pression de dérangement
prévoir des moyens pour que les interventions nécessaires ne nuisent pas au travail des
observateurs chargés du suivi.
Dans le but de limiter au maximum ces perturbations, une information du public, sur la zone
de lâcher, pourra être envisagée. Deux types de public cible sont à prendre en compte : d’une
part les personnes qui fréquentent le site pour d’autres raisons que la réintroduction
(randonneurs, autres pratiques sportives), d’autre part les personnes qui sont à la recherche du
gypaète (curieux, naturalistes, photographes).
Dans le premier cas une simple information : panneaux ou accueil par une personne sera
nécessaire ; dans le second cas, une véritable vigilance et des consignes strictes devront être
prévues. Pour éviter de détourner l’équipe de surveillance de sa mission, il est possible de
prévoir au moins une personne supplémentaire pour cette mission de prévention.
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et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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REFERENCES
Gypaetus barbatus project Bearded Vulture (1987 à 1994). - Publication annuelle de : Infodienst
Wildbiologie et Oekologie Zurich.
Bearded Vulture reintroduction into the Alps (1993 à 1999). - Publication annuelle de :
Foundation for the Conservation of the Beaded Vulture.
ANDEREGG R., FREY H., MÜLLER H.U. (1983). - Reintroduction of the Bearded vulture or
Lammergeier to the Alps. Reprinted from International Zoo Yearbook, Vol. 23.
COTON C., ESTEVE R. (1990). - Premier bilan de la réintroduction du Gypaète barbu en
Haute-Savoie. Arve Léman Savoie Nature, n°61 : 9 - 19.
ESTEVE R. (1986). - La réintroduction du gypaète barbu. Dossier technique CNPN, 8 p.
GENG M. (1998). - Interaction entre la nidification d’un couple de Gypaète barbu et la
réintroduction de deux jeunes issus d’élevages. Rapport de Maîtrise de Sciences et
Techniques “Sciences de l’environnement”, Université de Rouen, 41 p.
KINNEN C. (1995). - Contribution à l’évaluation de l’émancipation des jeunes gypaètes barbus
réintroduits dans les Alpes de Haute-Savoie. Rapport de BTS Gestion et Protection de
la Nature.
Arrêté interministériel du 07 août 1998, relatif à l’élimination des cadavres d’animaux et au
nourrissage des rapaces nécrophages.
LIFE “ Conservation du Gypaète barbu dans les Alpes françaises ” - Protocole commun de réintroduction
et de suivi des gypaètes barbus dans les Alpes françaises - décembre 2000
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ANNEXES II
DOCUMENTS PARC NATUREL RÉGIONAL DU VERCORS
Pagination générale alphabétique, pagination numérique propre à chacun.
Choisy J.-P. (2002) Réintroduire des Vautours en Europe. Les Alpes une position clé.
Objectifs et stratégie : éléments de réflexion. Parc Naturel Régional du Vercors. 9 pp.
disponibles par courriel [email protected] (également en allemand et
en italien)
Choisy J.-P. (2004 a) La réintroduction des Vautours. Objectifs, retombées. Parc Naturel
Régional du Vercors. 4 pp. disponibles par courriel [email protected].
Choisy J.-P. (2004 b) Vautour et élevage extensif. Parc Naturel Régional du Vercors. 8 pp.
disponibles par courriel [email protected].
REINTRODUIRE DES VAUTOURS EN
EUROPE
LES ALPES : UNE POSITION CLE
OBJECTIFS ET STRATEGIE : ELEMENTS DE
REFLEXION
Jean-Pierre CHOISY
Sont disponibles auprès de <jean-pierre.choisy@pnr-vercors > :
-
un exposé de l’état actuel des méthodes de réintroduction du Vautour fauve en France ;
-
un bilan sur les quatre espèces dans les Préalpes françaises du sud à la fin de l’été 2002.
-
des informations actualisées régulièrement sur la population du Diois. Pour informations
relatives aux deux autres massifs prendre contact avec: <[email protected]> et
<[email protected]>.
1/9
Reintroduire des vautours en Europe. Les Alpes : une position clé
Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
J.-P. Choisy, sept. 2002
PNR du Vercors
B
INTRODUCTION
La réintroduction des vautours concerne les politiques agricoles, de développement touristique, et
elle est concernée par elles : importance du contexte humain pour réussir. Mais, par nature, elle se
place d’abord dans le cadre de politiques de conservation et restauration de la biodiversité :
européennes, nationales, locales. Celles-ci reposent sur des valeurs1. Ces niveaux supérieurs de la
hiérarchie des niveaux d’analyse et de décision sont hors de notre propos, qui se situe à ceux des
objectifs et des stratégies visant à les atteindre.
OBJECTIFS
Localement, le retour des Vautours est un grand objectif de reconstitution faunistique et écologique.
À l’échelle continentale ou mondiale, l’objectif est une contribution à la pérennité des espèces
concernée. Cette contribution, toujours importante, l’est d’autant plus pour les deux espèces aux
effectifs mondiaux réduits : Gypaète et Vautour moine. Une question fondamentale est : dans
quelle partie de l’Europe peut-on fonder des noyaux de population de vautours sans qu’il
s’agisse d’une introduction d’espèces biogéographiquement étrangères au territoire ? Deux
écueils opposés sont à éviter :
-
il n’est pas question de rééditer pour ces oiseaux les aberrations à l’origine de la présence sur en
Europe des Faisans, Rat musqué, Ragondin, Sika, Mouflon, Poisson-chat, etc ;
-
les rares données sur leurs répartitions passées, jalons biogéographiques et écologiques
précieux, ne sauraient être des références limitatives. En effet, lorsqu’on a commencé à écrire
sur les vautours d’Europe, leurs aires de répartition étaient sans aucun doute depuis longtemps
artificiellement fragmentées. En outre on ne dispose pas de témoignages écrit de présence ou
absence sur l’ensemble de l’Europe du sud à cette époque, mais simplement de rares textes
concernant des régions bien plus réduites. L’image de leurs aires de répartitions résiduelles
globales dans ce proche passé en est donc très probablement encore minorée.
STRATEGIE
La poursuite des objectifs doit tirer le meilleur parti possible de moyens relativement réduits et
même d’une véritable pénurie d’oiseaux à lâcher, sauf pour le Vautour fauve. La première question
est donc : dans quelles régions des réintroductions permettent d’optimiser à l’échelle
continentale leur efficacité pour le retour des vautours à l’échelle continentale ? La seconde
est : où doit-on lâcher au sein d’une de ces régions ? Il ne s’agit que d’un changement d’échelle :
stratégie continentale et stratégie régionale.
Le succès d’une opération particulière dans un massif retenu par la stratégie dépend étroitement
d’une approche pertinente des conditions écologiques locales et du contexte humain. Mais ce
niveau tactique de la hiérarchie des niveaux d’analyse et de décision est hors de mon propos, de
même que celui de la mise en œuvre des moyens opérationnels. Tout au plus ces niveaux seront-ils
être brièvement évoqué lorsqu’ils peuvent avoir une incidence sur la stratégie.
1
Au moins implicitement.
2/9
Reintroduire des vautours en Europe. Les Alpes : une position clé
2002
Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
J.-P. Choisy, sept.
PNR du Vercors
C
AIRES BIOGEOGRAPHIQUES
A l’échelle continentale, il n’y a lieu de discuter ni les limites occidentales (aucun des quatre vautours
d’Europe ne s’est jamais implanté au-delà de l’Atlantique), ni les limites orientales (les quatre espèces nichent plus
à l’est), ni les limites méridionales (tous atteignent le sud du continent et trois, au-delà encore) . L’analyse
portera donc sur les limites septentrionales des aires biogéographiques des vautours d’Europe, ainsi
que sur leurs discontinuités éventuelles.
I. - LIMITES SEPTENTRIONALES
Il n’y a jamais eu de vautours sous les hautes latitudes alors que, plus au sud, certains nichent à
haute altitude2. On n’en discutera pas ici le déterminisme écologique. Constatons simplement que la
Scandinavie et les régions de latitudes analogues sont en dehors des aires biogéographiques passées,
actuelles et potentielles des vautours. Plus au sud la vaste région de plaines et reliefs mous de
l’Europe moyenne3 constitue la limite septentrionale absolue des trois nicheurs rupestres :
Gypaète, Vautour fauve et Percnoptère.
Le climat cantonne-il la nidification de certains Vautours encore plus au sud ?
Pour le Gypaète, rien ne permet de le supposer. Les stations historiques les plus nordiques où l’on
mentionne la nidification du Vautour fauve atteignent la limite géomorphologique évoquée plus
haut : le sud-ouest de l’Allemagne jusqu’au Moyen Age (Glutz et al. in Cramp) et le sud de la
Pologne jusqu’au XIX° siècle et même jusqu’en 1914 (Tomialojc in Cramp). Pourtant, il est
généralement admis que les climats ensoleillés sont plus propices à cette espèce, notamment par
leurs ascendances. La nidification au-delà des Alpes du sud pourrait s’expliquer par des stations
localement plus favorables que le climat régional à la mauvaise saison (faces des massifs
d’exposition sud, etc.) et/ou une abondance particulière de charognes, permettant aux vautours
fauves de se nourrir avec relativement peu d’heures favorables au vol pendant quelques mois par
an. Il se peut aussi qu’on s’exagère beaucoup l’héliophilie du Vautour fauve et qu’il n’ait pas de
problème majeur pour nicher beaucoup plus au nord que les Alpes du sud, surtout dans les massifs
calcaires externes. Même le Percnoptère, tropical et méditerranéen mais migrateur, donc échappant
aux rigueurs hivernales, a niché jusqu’à la fin du XIX° en Haute-Savoie, près de Genève. Peut-être
nichait-il encore plus au nord dans un passé plus ancien n’ayant pas laissé de traces dans la
littérature ? Constatons que les stations septentrionales de nidification du Vautour moine, aux
confins de la Pologne et de la Slovaquie (Glutz et al., Tomialojc, in Cramp), buttent sur la même
limite géomorphologique que le Vautour fauve, alors qu’il niche sur arbre. Limite climatique? Ou
bien conséquence de la densité humaine, forte depuis des siècles dans les plaines d’Europe centrale
et occidentale ?
A la belle saison, la répartion potentielle des espèces est beaucoup plus large :
- en altitude : même pour les espèces autres que le Gypaète la haute montagne est, alors ,
exploitable, même par les nicheurs, si elle n’est qu’à un ou quelques dizaines de kilomètres du
nid ;
- en latitude : les non nicheurs peuvent aussi estiver durablement dans des zones bien plus
lointaines : potentiellement, toutes les montagnes, basses ou hautes, au sud des plaines d’Europe
moyenne, sous réserve que la nourriture y soit présente. Occasionnellement, ils font des
incursions dans celles-ci, voire plus au nord encore.
Les températures peuvent y être aussi basses que dans les régions arctiques en hiver, quand commence la
reproduction des vautours. Mais ils n’y subissent pas une extrême réduction de la longueur du jour nécessaire à la
longue recherche de cadavres sur des superficies d’autant plus vastes que la productivité primaire est réduite.
3
De la moitié nord-ouest de la France à la Russie, en passant par la plaine germano-polonaise.
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Reintroduire des vautours en Europe. Les Alpes : une position clé
2002
Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
J.-P. Choisy, sept.
PNR du Vercors
D
II. – CONTINUITE, DISCONTINUITES
La continuité biogéographique se situe à une tout autre échelle que la continuité écologique. Une
aire biogéographique est, dans la très grande majorité des cas, l’enveloppe de biotopes plus ou
moins discontinus4. Un obstacle éco-éthologique n’introduit une discontinuité biogéographique que
s’il est d’une certaine dimension, fort variable selon les aptitudes au déplacement de l’espèce
considérée5 : des vautours fauves nicheurs ayant couramment un rayon d’action de plusieurs
dizaines de kilomètres autour du nid, un hiatus de vingt ou trente kilomètres dans les parois
rocheuses ne saurait être considéré comme rompant la continuité de l’aire biogéographique. Les
autres vautours étant capables de déplacements du même ordre de grandeur, il est hautement
invraisemblable que les énormes hiatus actuels tronçonnant d’est en ouest les aires de
répartition des vautours d’Europe aient d’autres causes que des destructions par l’Homme,
directes ou indirectes, récentes à l’échelle de temps de l’évolution des grands Vertébrés. Les
données les plus anciennes ne remontent généralement qu’à quelques siècles et concernent des aires
déjà artificiellement très morcelées. Certes, il existe des discontinuités naturelles d’aires
biogéographiques. Mais elles s’expliquent par de vastes obstacles écologiques6. On en chercherait
vainement de même ampleur spatiale que les vides séparant actuellement les fragments des aires de
répartition des vautours en Europe.
PRIORITES STRATEGIQUES
La stratégie doit être modulée avec opportunisme : un contexte humain local, ou régional,
temporairement défavorable dans une zone prioritaire ne doit pas interdire d’agir ailleurs. Ainsi :
- la sauvegarde des populations existantes, dont certaines dans une situation préoccupante, voire critique, devrait être
la priorité absolue. Mais il n’est pas possible de passer à la réalisation tant que les causes de destruction locales ne
sont pas maîtrisées ;
si c’est dans les gorges des Causses qu’on a commencé la réintroduction du Vautour fauve, ce n’est pas que cette
localisation ait été géographiquement la plus pertinente à l’échelle européenne. C’est que, dans les années 1970-80,
le contexte humain, tant naturalistes que population locale, s’y prêtait bien davantage qu’ailleurs. Plus tard, pour le
Vautour moine s’y ajoutait le précédent local de la réussite de la réintroduction du Vautour fauve.
-
L’achèvement des réintroductions en cours est la priorité à très court terme : il s’agit également de
populations encore fragiles, mais dans des régions où le contexte humain permet une bonne
efficacité des lâchers. On les poursuivra donc jusqu’à ce que soient atteints des effectifs assurant le
développement ultérieur spontané des populations fondées.
Toutes autres choses étant égales par ailleurs, sont prioritaires les massifs offrant des potentialités
actuelles7 importantes, continues sur de vastes étendues.
Ainsi, les aires biogéographiques du Colvert Anas platyrhynchos, du Pinson Fringilla coelebs et de l’Alouette
Alauda arvensis couvrent toute l’Europe ou presque, quoique eaux, forêts et prairies y soient discontinues.
5
Par exemple, entre les Préalpes occidentales et le Massif Central le Rhône constitue :
- la limite biogéographique nord-est pour l’espèce Lacerta hispanica, petit lézard ibérique ;
- une limite entre populations de Chamois R. rupicapra, empêchant des échanges journaliers ou des
transhumances régulières, franchissable par des jeunes émancipés en phase de dispersion : la recolonisation
spontanée du Massif Central est actuellement en cours à partir des Préalpes ;
- un simple repère visuel pour les Vautours, aussi inexistant en tant qu’obstacle que n’importe quel cours d’eau à
l’intérieur des Alpes ou du Massif Central.
6
Par exemple entre les populations des toundras arctiques du Lagopède Lagopus mutus et celles des hautes
montagnes méridionales.
7
Ne pas se focaliser sur le passé local : sur certains versants où le Vautour fauve pouvait, vers 1850, chercher des
cadavres dans des pâturages, de nos jours, le Lynx chasse en forêt. Inversement, il y a des massifs où, il y a
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Reintroduire des vautours en Europe. Les Alpes : une position clé
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Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
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PNR du Vercors
E
Tout cela posé, la priorité est : tronçonner les plus grands hiatus entre populations actuelles
d’une même espèce par des réintroductions médianes et non pas les grignoter par les extrémités.
En Europe continentale, avant le début des réintroductions, un énorme hiatus artificiel8 centré sur
les Alpes séparaient les populations pyrénéo-ibériques de celles des Balkans, à l’exception de
populations résiduelles de Percnoptère en France méditerranéenne et en Italie. Le choix des Alpes
pour le Gypaète, plus récemment celui des Préalpes françaises du sud pour le Vautour fauve et le
Vautour moine, ont donc été particulièrement pertinents.
L’importance géographique des Alpes et de leurs bordures dans une stratégie de
réintroduction des Vautours en Europe est confirmée par l’observation dans les récents
noyaux de population de vautours fauves des Préalpes françaises d’oiseaux originaires tant de
l’ouest de l’Europe (Espagne, Pyrénées, Massif Central) que de l’est (Abruzzes, Croatie). Les
stratégies propres aux diverses espèces ont des singularités propres, dont on va discuter.
I. - GYPAETE GYPAETUS BARBATUS
Ce sont essentiellement les massifs élevés où existent d’importantes populations de chamois et de
bouquetins hors forêts qui lui offrent toute l’année des os accessibles en suffisance. Plus bas, le
milieu est souvent plus boisé et, surtout, l’Homme tolère rarement des densités d’Ongulés sauvages
suffisantes. Mais ce n’est qu’une moyenne statistique et non pas un déterminisme altitudinal direct
et absolu : aussi en dessous de la haute montagne existent aussi des massifs actuellement très
favorables. Dans les Alpes, le Gypaète s’installe dans les massifs de lâcher et dans quelques autres
particulièrement favorables (deux couples nicheurs en Vanoise), surtout s’il ne sont pas trop
éloignés (philopatrie). Ailleurs dans la chaîne, l’observation occasionnelle d’oiseaux non fixés à un
territoire, possible dans tous les massifs, est presque partout encore exceptionnelle. Le
développement des effectifs joint au comportement territorial des adultes devrait assurer à long
terme une recolonisation spontanée de tous les massifs des Alpes où l’espèce trouvera os, sécurité,
sites de nidification.
Dans la mesure où des oiseaux seraient disponibles sans porter atteinte à l’opération en cours, la
création d’un nouveau point de lâcher à l’extrême ouest des Alpes aurait un intérêt tout particulier :
diminuer rapidement le hiatus entre la population de cette chaîne et celle des Pyrénées.
Secondairement l’élargissement de l’aire de présence dans les Alpes françaises, encore très centrée
sur les massifs internes, en serait accélérée 9. Lorsque le Gypaète aura élargi son occupation actuelle
dans les Pyrénées et les Alpes, une population dans les gorges du sud du Massif Central auraient,
par rapport aux Pyrénées orientales, une position analogue à celle des canyons du sud de l'Aragon
par rapport celles des massifs du centre de la chaîne. Donc, des lâchers de Gypaètes dans
l’extrême ouest des Alpes et dans les gorges du sud du Massif Central serait une contribution
majeure au développement d’un transit entre Alpes et Pyrénées. Le retour du Chamois et du
Bouquetin dans ce massif10 contribuerait beaucoup à en augmenter les potentialités pour cette
espèce.
cinquante ans seulement, le Gypaète n’aurait pu se nourrir en dehors de la saison de présence des transhumant mais
où de nos jours, abondent Chamois et Bouquetin, fournissant des os toute l’année.
8
De 1000 à 2100 km selon les espèces.
9
Dans le Parc Naturel Régional du Vercors, les falaises du Glandasse et du cirque d’Archiane, à l’extrémité sud de
la plus réserve nature de France, de la Réserve Naturelle des Hauts Plateaux du Vercors, constituent un site
particulièrement favorable à l’espèce occupant une telle position géographique (cf. visite de Michel Terrasse, Hans
Frey, Marteen Bijleveld en 2001). L’espèce y a déjà été observée, ainsi que sur cinq autre sites du Vercors et du
Diois : à proximité immédiate et jusqu’à 20 et 25 km de là.
10
En cours pour le Chamois, projets de réintroduction pour le Bouquetin.
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Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
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PNR du Vercors
F
II. - PERCNOPTERE NEOPHRON PERCNOPTERUS
Dans les quatre noyaux de population de Vautour fauve issus de réintroductions en France, on
assiste au retour spontané du Percnoptère : estivage durable, puis nidification, cette dernière pour
l’instant seulement dans les deux populations les plus anciennement réintroduites. Il arrive même
que l’estivage commence alors que les vautours fauves sont encore maintenus en volière. Ces faits
suggèrent l’hypothèse d’une évolution du Percnoptère comme finisseur de restes : carcasses
entamées par de grands Vautours ou/et des Carnivores, avec extension ultérieure aux déchets de
l’Homme. En France, le contraste entre les effectifs pyrénéens et ceux du midi méditerranéen
suggère que ces derniers représentent les pauvres restes d’une ancienne communauté de plusieurs
espèces de vautours, ayant réussi à vivoter après l’élimination des plus grandes espèces. Pour la
restauration de la situation de l’espèce en Europe, l’état actuel des connaissances conduit à
préconiser la stratégie suivante :
- concentrer les moyens en faveur des populations subsistantes, que ce soit sur les territoires
de reproduction, ceux d’hivernage, ou en migration. La réintroduction n’est qu’un des moyens
envisagés. On ne développera pas davantage car elle n’a encore été réalisée nulle part ;
- ailleurs, suivre le retour spontané de l’espèce là où on réintroduit le Vautour fauve.
III. - VAUTOUR FAUVE GYPS FULVUS
Au contraire de l’espèce précédente, l’absence de comportement territorial, l’extrême grégarisme,
font que seuls de nouveaux lâchers peuvent créer de nouveaux noyaux de population sans attendre
des décennies, voire des siècles.
A. - CHOIX DES REGIONS DE REINTRODUCTION
Sont prioritaires les régions offrant sur de vastes étendues, simultanément :
-
abondance de sites de nidification : des parois rocheuses riches en corniches, vires et cavités. La
grégarité de l’espèce, nichant en colonie, exige cette abondance de sites. Elle se rencontre plus
souvent dans les massifs calcaires, ou dolomitiques, qu’ailleurs ;
-
altitude modérée des sites de nidification potentiels : ils doivent être bien représenté également
en dans les étage collinéens et/ou méditerranéens, à Quercus pubescens ou/et Quercus ilex, etc.
(donc bien dessous de 1000 m.). Les plus hauts doivent doit se situer au maximum au niveau du
bas de l’étage de végétation montagnard à Hêtre Fagus et/ou Pinus sp. etc. (à l’adret au plus
1300 ou 1400 m.) ;
-
domaine vital potentiel en grande partie en dessous de la haute montagne ;
-
climat régional méridional, sans être nécessairement méditerranéen. L’ensoleillement importe
davantage que la douceur de la température de l’air ;
-
position géographique scindant les hiatus entre les populations des gorges des Causses et des
Balkans.
Deux grandes régions des Alpes, répondent aux exigences exposées plus haut : les Préalpes
occidentales (Préalpes françaises du sud) et les Alpes méridionales (massifs périphériques du versant italien
des Alpes centrales et orientales)11. La réintroduction y est commencée12. : Diois, Baronnies et
Ailleurs des potentialités existent : faces méridionales et orientales des Préalpes du nord, certains sites de massifs
cristallins, des vallées internes, de la bordure italienne des Alpes occidentales. Mais les potentialités sont plus
localisées, moins continues. Ces massifs sont donc moins prioritaires.
12
Pour l’ensemble des trois sites des Préalpes, cent trente oiseaux l’hiver 2001-02, puis à la belle saison 2002, cent
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G
gorges du Verdon dans les Préalpes, Frioul dans les Alpes méridionales. De ce fait, le plus
grand hiatus entre les populations de l’ouest et de l’est de l’Europe, naguère d’environ
1000 km, a été réduit de moitié. Le transit est en train de se rétablir de l’Espagne aux
Balkans : les Préalpes échangent des vautours fauves avec les gorges des Causses, les Pyrénées,
l’Espagne, mais aussi avec l’Italie et la Croatie. Sous réserve de faisabilité locale, la poursuite de
cette réduction impose comme priorité géographique actuelle l’ouest des Alpes méridionales : le
nord-ouest de la Lombardie. Alors, de l’Espagne à la Croatie, il n’y aurait plus aucun hiatus
dépassant 250 km, ce qui devrait induire une intensification des échanges. La priorité suivante serait
l’Apennin Toscan ou ses environs : cette position géographique faciliterait le transit entre Alpes et
les Abruzzes. Des vautours des Préalpes ont déjà été vus près de Modène.
Pour poursuivre l’élaboration d’une stratégie européenne de réintroduction du Vautour fauve
la priorité d’étude actuelle est donc l’analyse des potentialités écologiques des divers massifs
des Alpes méridionales. Ceci doit venir avant l’étude, tactique, des contraintes et ressources de
faisabilité liées aux contextes humains locaux actuels. Susciter de telles analyses, dont l’importance
dépasse de beaucoup le cadre local, pourrait être un grand objectif du Réseau Alpin des Espaces
Protégés.
B. – AU SEIN D’UNE MEME REGION
1. – LACHER DANS PLUSIEURS MASSIFS
Six étés après le premier lâcher dans les Préalpes, la surface prospectée à la belle saison par les
oiseaux du Diois et des Baronnies couvre plus de 5000 km2. C’est le double de l’aire prospectée
par ceux des gorges des Causses au bout de vingt ans, en dépit d’effectifs trois fois moins élevés.
On le doit avant tout à la création de deux noyaux de populations distants de 40 km. Des oiseaux
dont le conjoint couvent dans l’un des sites fréquentent couramment l’autre. Ces faits conduisent
à, désormais, vivement préconiser, pour une même grande région, une stratégie de
réintroduction POLYCENTRIQUE. Pour optimiser l’effet souhaité, la distance entre les deux sites de
réintroduction devrait être comprise entre 40 et 70 km (extrêmes : 30 à 100 km).
2. – RESSOURCES ALIMENTAIRES
Cette espèce vit quasi-exclusivement de charognes d’Ongulés. De nos jours, en Europe, l’accès aux
cadavres de bétail est généralement nécessaire : il est rare que l’Homme tolère d’importantes
populations d’Ongulés sauvages, surtout hors des forêts, aux altitudes modérées où l’espèce se
cantonne à la mauvaise saison. Toutefois il convient de remarquer que subsister essentiellement à
partir d’animaux sauvages est, parfois, possible : on en connaît au moins un cas, dans le nord-est de
l’Espagne. Ceci suppose que la biomasse des Ongulés reste à la disposition des vautours. C’est
concevable dans les situations suivantes :
- chasse laissant le cadavre sur le terrain : chasse exclusivement pour le trophée, ou tirs d’élimination pour raison
économiques (sanglier, femelles et jeunes de Cervidés, etc.). Un compromis pourrait être de ne récolter la venaison
que des seuls animaux d’âge ! 2 ans, en laissant aux vautours les corps des animaux plus vieux ;
- populations d’Ongulés non chassées. A altitude modérée, ce n’est guère envisageable à l’échelle d’un massif que
pour le Bouquetin : du fait d’un habitat beaucoup plus rupestre que celui de toutes les autres espèces d’Ongulés, un
contrôle des effectifs peut, bien souvent, ne pas être économiquement nécessaire, surtout dans des massifs à faibles
densités humaines.
Les deux options peuvent se combiner dans un même massif : la seconde pour le Bouquetin, la première pour les autres
Ongulés.
cinquante à deux cents oiseaux, visiteurs inclus, dont trente-trois couples nicheurs et dix-huit jeunes envolés.
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H
IV. - VAUTOUR MOINE AEGYPIUS MONACHUS
En 2003 ou 2004 doit commencer la réintroduction du Vautour moine dans les Préalpes
occidentales du sud. L’espèce commence déjà à s’y montrer dans les noyaux de population de
vautours fauves : en 2000, un immature né dans les gorges des Causses, a fréquenté la population de
vautours fauves des Baronnies pendant un mois au printemps ; en 2002 six ou sept vautours
moines ont séjourné dans les Alpes occidentales du 4 juin au 14 septembre : plus d’un jour sur
quatre dans les Préalpes drômoises, passant du noyau de population de vautours fauves du Diois à celui des Baronnies
et inversement. Les deux oiseaux de juin étaient différents de ceux de juillet et août. Trois de ces oiseaux étaient bagués,
deux bagues ont été lues : immatures nés en 2000 et 2001 dans les gorges des Causses. Un individu identifié en juillet et
août, l’est à nouveau dans les gorges Causses le 10 septembre, puis dans les Baronnies les 12 et 13 septembre. C’est
probablement le même qui est vu le 14 sur les Hauts Plateaux du Vercors. Deux individus, non bagués, ont été observés
dans les gorges du Verdon le 20 juillet. Enfin un oiseau lâché juvénile dans les gorges des Causses en 2000 et marqué
par décoloration, contrairement aux précédents, à été vu dans le nord des Alpes occidentales : du 8 au 23 août Valais
(Suisse), puis Haute Savoie (France). Ces observations confirment
-
le bien-fondé global du projet de réintroduction dans les Préalpes ;
l’attrait des populations de vautours fauves, et/ou de leurs charniers pour cette espèce ;
le rôle des Baronnies « plaque-tournante » des échanges de vautours autres que le Gypaète,
tant entre populations des Préalpes qu’entre celles-ci et les populations plus à l’ouest, du fait de
son antériorité, d’effectifs plus élevés et de sa position géographique ;
l’intérêt d’une stratégie de réintroduction polycentrique, comme pour le Vautour fauve (cf.
page précédente § B, 1). Néamoins, le faible nombre d’oiseaux disponibles actuellement n’a
permis de retenir que deux sites : Baronnies et gorges du Verdon.
-
Le hiatus entre les populations occidentales et celle des Balkans, de 2100 km avant la réintroduction
dans les gorges des Causses, sera réduit à moins de 1300 km par l’opération dans les Préalpes. La
priorité géographique de réintroduction suivante serait à mi-chemin entre les Préalpes de Provence
et la Grèce, donc en Croatie, de préférence dans une population de vautours fauve. Alors, de
l’Espagne à l’Anatolie, aucun hiatus ne dépasserait celui qui existe actuellement entre les
populations ibériques et celle des gorges des Causses. Ce hiatus devrait lui-même être réduit : une
réintroduction en Catalogne favoriserait le développement du transit entre les actuelles populations
d’Espagne et les noyaux de population en cours de développement et de création du Massif Central
à l’ouest des Alpes. La recolonisation spontanée des sierras du centre et du nord de l'Espagne en
serait facilitée.
PERSPECTIVES A LONG TERME
La pénurie d’oiseaux à lâcher13 ne permet pas autant que pour l’espèce précédente de multiplier les
opérations dans une même grande région. Sans être aussi territorial que le Gypaète, le Vautour
moine, beaucoup moins grégaire que le Vautour fauve, devrait montrer une bien plus grande
aptitude à recoloniser spontanément d’autres massifs sans attendre des siècles. Pour la même raison,
ses effectifs locaux n’atteindront jamais ceux du Vautour fauve. Mais l’aire de nidification
potentielle du Vautour moine dans les Alpes est très probablement plus étendue que celle du
Vautour fauve, surtout dans le contexte actuel de retour massif des Ongulés sauvages, pour deux
raisons au moins :
- nichant dans un arbre, il n’est pas dépendant de la présence de parois rocheuses ad hoc à
altitude modérée ;
- nourriture : le Vautour moine peut vivre même de cadavres de taille modeste. Prospectant
jusqu’aux forêts claires, il peut bien davantage que les autres vautours exploiter les charognes
de toutes les espèces d’Ongulés sauvages. Disposer de charognes de bétail est pour lui un
avantage appréciable. Ce n’est pas une nécessité.
13
Les effectifs ibériques de Vautour moine sont environ cinquante fois plus faibles que ceux du Vautour fauve.
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Reintroduire des vautours en Europe. Les Alpes : une position clé
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PNR du Vercors
I
POUR CONCLURE
La faute majeure serait d’introduire une espèce étrangère au territoire de lâcher en croyant
réintroduire une espèce autochtone. Vu l’aptitude aux déplacements des quatre vautours du
Paléarctique occidental (cf. supra AIRES BIOGEOGRAPHIQUES) la réintroduction d’un des quatre
vautours entre la Méditerranée et les grandes plaines d’Europe moyenne ne risque nulle part
d’être un objectif biogéographiquement aberrant14.
Ceci ne signifie pas qu’elle y soit partout possible à l’échelle écologique. Le contexte humain peut
également être localement défavorable à une époque donnée. Donc, localement un échec tactique
est toujours possible. Bien analysé, il constituerait une expérience riche d’enseignements
scientifiques ou/et technique. Courir ce risque est le seul moyen pour savoir avec certitude
jusqu’où, vers le nord, peuvent nicher les vautours d’Europe autres que le Gypaète. Toutefois, un
échec tactique peut avoir des conséquences stratégiques négatives graves lorsque les oiseaux
disponibles sont rares, voire très rares : Gypaète, Vautour moine, Percnoptère. C’est pourquoi on ne
réintroduira ces espèces que dans les régions à l’évidence prioritaires sur la base des connaissances
actuelles.
Au contraire, l’abondance du Vautour fauve en Espagne15 autorise une stratégie hardie et
ambitieuse, multipliant les noyaux de population dans les grandes régions favorables à l’espèce,
à des distances telles que l’espace entre eux soit régulièrement parcouru (cf. p. 6, § 1, LACHER DANS
PLUSIEURS MASSIFS). Les priorités régionales seraient :
Préalpes : une quatrième réintroduction, à mi-chemin des Baronnies et du Verdon. La continuité de prospection
estivale actuelle, du Vercors au Ventoux, serait ainsi étendue du Vercors aux Préalpes de Provence, sur dix
mille kilomètres carrés ;
Alpes méridionales : plusieurs réintroduction à l’ouest du Frioul, au moins jusqu’au abords du Lac Majeur.
Cette relative abondance du Vautour fauve permet même des expériences. Par exemple :
-
réintroduire en dehors des deux grandes régions prioritaires, une fois celles-ci repeuplées, bien entendues :
Préalpes plus au nord que le Diois, sites rocheux d’altitude comparables de vallées internes, massifs cristallins,
etc. ;
-
créer une fréquentation estivale de massifs de haute montagne à importantes populations d’Ongulés sauvages et/ou
de bétail transhumant, telle celle qu’on observé dans les Hohe Tauern. Ceci par lâchers d’immatures, en juin. Pour
que ces oiseaux puissent, à la mauvaise saison, rejoindre des noyaux de populations pérennes, ces expérience ne
devrait pas commencer à plus 200 km de celles-ci, dans un premier temps au moins ;
-
favoriser l’installation spontanée de vautours fauves libres fréquentant plus ou moins régulièrement le massif : en
entretenant dans une vaste volière un groupe de vautours fauves non relâchables16 et un charnier à proximité.
Il serait très intéressant de vérifier si l’attraction de percnoptère et/ou de vautour moine, observée dans les Préalpes du
sud se manifeste également, surtout dans le premier et le dernier cas. Si oui, ce serait le moyen d’accélérer le leur retour
dans des régions où la pénurie d’oiseaux disponibles ne permet pas de lâcher dans un avenir prévisible.
Bien entendu, le succès n’est jamais garanti : c’est le propre d’une démarche expérimentale. Mais,
si ces expériences sont menées avec des moyens suffisants et, surtout, soigneusement suivies,
leurs résultats seront du plus grand intérêt, quels qu’ils soient.
+
+
+
La seule exception pourrait être les îles : classiquement le nombre d’espèces à écologie voisine diminue, souvent
avec élargissement de niche des espèces subsistantes. Ceci pourrait concerner les vautours.
15
Quelque vingt mille couples.
16
Long passé en captivité, handicap physique, etc.
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Objectifs et stratégie : éléments de réflexion
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PNR du Vercors
R
LA REINTRODUCTION DES VAUTOURS
OBJECTIFS, RETOMBEES
Jean-Pierre Choisy, PNR du Vercors
On peut, sur simple demande <[email protected]> obtenir par courriel électronique trois autres
documents autres documents, concernant :
- stratégie : réintroduction des vautours à l’échelle continentale ;
- opérations : état actuel de la méthode de réintroduction du Vautour fauve en France ;
- identification sur le terrain.
Si on ne dispose pas de messagerie électronique, écrire au même à 26150 CHAMALOC.
I. – OBJECTIFS
Les actions en faveur du Percnoptère de même que la réintroduction des trois grands Vautours
d’Europe se placent dans les POLITIQUES de conservation et restauration de la biodiversité
européenne et nationales, éventuellement régionales, voire locales. Chez des espèces qu’on peut
voir très habituellement à 50 km de leur œuf ou de leur poussin (aux bons soins du conjoint tant
qu’il n’est pas gros), parfois à 150 km, l’OBJECTIF ne saurait être le retour dans une commune, ni
même un massif, un département ou un Parc. L’échelle pertinente est bien plus large : l’Arc Alpin
et ses marges pour le Gypaète, au minimum le sud-est de la France pour Vautour fauve et Vautour
moine, pour ne parler que des réintroductions en cours. Les STRATÉGIES diffèrent selon les espèces1,
en fonction à la fois de leur éco-éthologie et de la disponibilité d’oiseaux à lâcher.
Du fait de l’extrême originalité écologique de chacune, tout retour d’une espèce de vautour est une
reconstitution majeure de la biodiversité locale de la structure des communautés de Vertébrés et de
leur fonctionnement. Mais les OPÉRATIONS de réintroduction sont bien davantage justifiées par le fait
que chaque réussite augmente la probabilité de survie globale de l’espèce à long terme, se place
dans une stratégie du : « Ne pas avoir tous les œufs dans le même panier ! » dont le principe est
d’application générale et non pas limité aux seuls vautours.
1
En Rhône-Alpes et PACA, bien au-delà pour le Gypaète :
Vautour fauve : trois opérations de réintroduction : dans les Baronnies, dans le Diois, par le Parc Naturel Régional du
Vercors et dans celui du Verdon ;
Vautour moine : La moindre abondance d’oiseaux disponibles a conduit à se contenter de deux opérations seulement :
Baronnies (premiers lâchers en 2004) et Verdon. Le retour spontané aux confins du Vercors et du Diois est une quasicertitude, du fait de la distance modérée des Baronnies comme de l’estivage de l’espèce depuis 2002, à partir des
Causses ;
Percnoptère : en France méditerranéenne et dans les Préalpes des charniers augmentant taux de survie et de
reproduction ont été la principale contribution au renouveau amorcé. On constate que la réintroduction du Vautour
fauve conduit à la restauration de l’estivage (Verdon, confins du Diois et du Vercors), puis à la reprise de la
nidification (Causses, Baronnies). Dans l’Ardèche, où le dernier couple avait disparu, le transit croissant de vautours
fauves (21 ensemble en 2004) et moines entre Causses et Préalpes, a probablement renforcé l’action de charniers qui
ont induit le retour de l’espèce (nidification d’un couple en 2004) ;
Gypaète : dans les Alpes, lâchers au Mercantour, en Haute-Savoie, en Engadine (Suisse), dans les Hohe Tauern
(Autriche) et dans les massifs contigus d’Italie. Le Parc Naturel Régional du Vercors a répondu favorablement à une
demande de la Fondation Gypaète pour étudier la faisabilité d’un point de lâcher sur son territoire, élargissant la zone
de retour vers l’extrême ouest de l’arc alpin, minimisant le hiatus entre les actuelles populations des Alpes et des
Pyrénées.
S
Exemples :
- Bison d’Europe et Première Guerre Mondiale : dans l’immense aire d’origine, l’espèce avait été totalement
exterminée par l’Homme sauf, en 1914, une seule population à Bialowieza (Pologne, dans la partie alors
russe) : environ un millier, encore trois centaines en 1917, plus aucun en 1918. L’espèce n’a pu être sauvée
qu’en « raclant les fonds de zoos », essentiellement en Allemagne et en Suède. L’espèce a failli connaître le
même sort que l’Aurochs et de nombreuses autres. Pour une espèce réduite à une seule population, une
épizootie aurait pu avoir des effets démographiques analogues. La leçon a été comprise : dix-huit populations
actuelles (Pologne orientale et ex-soviétiques) assurent l’avenir de l’espèce ;
- Bouquetin des Alpes et Seconde Guerre Mondiale : en 1945 ne subsistaient plus que 10 % de la vaste
population reconstituée grâce à sa protection dans le Parc National du Grand Paradis. Mais même si
l’anéantissement avait été total dans tous les pays belligérants, l’espèce aurait pu connaître un renouveau à
partir des populations réintroduites antérieurement en Suisse, resté hors du conflit ;
- les menaces qui pèsent sur les vautours en Espagne du fait de la reprise, illégale, des empoisonnements, des
Carnivores plaident en faveur de la réintroduction de ces espèces ailleurs en Europe, partout où c’est un
objectif biogéographiquement pertinent et où le contexte humain local le permet tactiquement, pour les moins
abondants Gypaète et Vautour moine, encore plus que pour les deux autres.
Outre ses objectifs immédiats démographiques, cette stratégie a aussi des retombées génétiques
favorables à la diversité allèlique, elle-même favorable à l’objectif de survie à long terme des
espèces concernées.
II. – RETOMBEES DE LA REINTRODUCTION DES VAUTOURS
A. - TOURISME
L’impact très positif pour le tourisme rural du retour des vautours, oiseaux, spectaculaires par leur
vol, leur taille, leur nombre, leurs mœurs, la facilité de leur observation n’a plus à être démontré :
Causses2 : en 1995, sur 250 000 touristes visitant les gorges de la Jonte, si seulement 3 750 (= 1,5 %) sont venus
spécialement pour les vautours, 33 250 (= 13,3 %) sont venus autant pour les vautours que pour d’autres motivations.
6à 7 % (12,3 % en été) s’arrêtent Belvédère des Vautours (consacré à une animation sur ce thème). Le bénéfice net
réalisé par le tourisme local lié à la présence des vautours était de 4,4 millions de francs. 102 organismes différents
(nationaux comme internationaux font découvrir les vautours à leur clientèle, 24 eux-mêmes, 78 en passant par le FIR 3.
Majoritairement locaux (Grands Causses), 44 organismes (33 privés, 11 publics) utilisent l’image du vautour dans leurs
outils de promotion publicitaire. Neuf entreprises étrangères au territoire des Grands Causses ont compris l’intérêt
touristico-économique des vautours et créent des produits touristiques le représentant. Une cinquantaine de magasins de
souvenirs vendent au total 33 produits touristiques différents d’une valeur moyenne de 60 f. et 39 modèles de cartes
postales comportant une image de vautours. 55 livres français et étrangers, dont 22 guides touristiques, citent ou
localisent géographiquement la réintroduction du Vautour fauve. Ont paru depuis 1981 158 articles (68 dans des
journaux, 90 dans des revues) dans 30 journaux français et allemands, 61 revues françaises, espagnoles et italiennes. 5
émissions radiophoniques françaises d’une durée moyenne de 20 minutes diffusées sur des radios nationales (à fort taux
d’écoute : France Inter, etc.) et locale, aux heures de grande écoute ; 19 émissions télévisées, d’une durée moyenne de 7
minutes, diffusées aux heures de grande écoute par les télévisions françaises, britannique à diffusion mondiale et
jusqu’à…Taiwan !
Baronnies : Rémuzat, la commune de réintroduction, n’avait pas d’Office Tourisme avant la première réintroduction de
vautours, en 1996. Elle en a un depuis, dit « Maison des Vautours », avec boutique, et exposition permanente. En 2002
comme en 2003 entre quatorze quinze mille personne ont visité le local. (soit un nombre analogue à celui du Belvédère
des Vautours dans les Causses en 1995) Ceci dans un canton dont la densité humaine est de 3/km2. Auparavant le
tourisme se réduisait au seul afflux estival, alors qu’actuellement la présence des vautours a généré une fréquentation
hors saison appréciable. Ces derniers sont également l’atout majeur d’une animation locale bien organisée, pour des
publics variés (touristes, classes vertes, etc.) En 2003, lors d’un séminaire européen consacré aux Vautours, le maire de
2
Source : QUILLARD V. Valeur sociale et économique de la Biodiversité in situ L’exemple de la Réintroduction du
Vautour fauve (Gyps fulvus fulvus) dans les Grands Causses. Rapport de stage de Maîtrise S. & T. Aménagement et
Mise en Valeur des Régions (Rennes). Actuellement membre du personnel du Parc National du Mercantour.
3
Fonds d’Intervention pour les Rapaces, depuis fusionné avec la LPO (Ligue pour la Protection des Oiseaux).
LA RÉINTRODUCTION DES VAUTOURS : OBJECTIFS, RETOMBEES
Jean-Pierre Choisy Sept. 2004
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T
Rémuzat, banquier à la retraite, a souligné l’impact économique du retour des vautours 4 ;Diois-Vercors : les
accompagnateurs de moyenne montagne de ces deux massifs ont vite compris le grand intérêt pour leurs activités du
retour de ces oiseaux spectaculaires. Parmi ceux qui intègrent régulièrement à leur programme hebdomadaire une sortie
« vautours », l’un est basé à Villard-de-Lans, vient spécialement aux confins des deux massifs. On n’est certainement
qu’au début de cette exploitation ;
Verdon : je ne suis guère informé sur les retombées touristiques5.
Les réintroductions de vautours auraient pu, donc, constituer des objectifs également pour les
politiques de développement local de tourisme rural. Mais6 nul responsable départemental ou
régional d’organismes dont le tourisme est la seule raison d’être, n’a su en prévoir l’intérêt local
pour cette activité économique. La prise de conscience est venue une fois le succès acquis et
l’intérêt évident. En ce qui les concerne, le terme « objectif », qui suppose un projet, avant la
réalisation d’opérations et une participation à celle-ci, financière ou autre, serait donc abusif.
« Retombées » est bien celui qui convient. Au contraire, à la lumière du précédent des Causses, les
personnes et organismes directement impliqués dans les opérations de réintroduction dans les
Préalpes, ont fait de l’intérêt économique des vautours pour le tourisme local un des argument en
faveur de leurs projets. Ceci que la promotion du tourisme rural soit au nombre de leurs missions
(Parcs Naturels Régionaux du Vercors et du Verdon) ou non (Associations Vautours en Baronnies,
FIR-LPO). Pour les Associations, développer elles-mêmes ces activités est un moyen de soutenir
leur action, tant sur le plan de l’information du public que de l’obtention des ressources financières.
B. - EQUARISSAGE NATUREL
Ce point est primordial. Il constitue la base même de la démarche dans les Préalpes de la Drôme.
Toutefois, ayant rédigé à ce sujet un document Parc Naturel Régional du Vercors pour un
colloque du Réseau Alpin des Espaces Protégés, je le joins et me contente de renvoyer à sa
lecture.
Du fait du service rendu aux éleveurs, de son efficacité sanitaire, de son moindre coût que la filière
habituelle d’équarissage et d’autres retombées (cf. document évoqués ci-dessus), les responsables
sanitaires départementaux auraient pu considérer la réintroduction des vautours dans les Causses
comme un des objectifs de leur politique d’élimination des charognes. Mais c’est a posteriori qu’ils
ont pris conscience de la contribution des vautours à cette élimination, en partie du fait de travaux
tels que ceux de Chassagne et/ou de Briquet.
Lors des réintroductions dans les Préalpes de la Drôme cet aspect du problème était déjà bien
compris. Mais les services concernés ne sont pas davantage allés jusqu’à en faire des objectifs de
leur politique de gestion des charognes, ce qui aurait été pourtant concevable 7. Comme pour le
tourisme, il s’agit donc de retombées, tactiquement essentielles pour la pérennisation du succès de
ces opérations, mais le terme objectifs, qui suppose un projet en amont serait excessif.
4
Pour plus d’information, demander à mon collègue des Baronnies : Christian Tessier <aol.com> et à la Maison des
Vautours, à Rémuzat. Une étude mériterait d’être réalisée, analogue à celle dans les Causses (cf. supra note 2).
5
Pour informations cf. LPO PACA <[email protected]>, qui mène l‘opération locale de réintroduction.
6
A ma connaissance Si je faisais erreur, ce que je souhaite, prière de transmettre l’information.
7
Si je faisais erreur, je serais très heureux de l’apprendre et faire amende honorable. Cela me semble peu probable…
LA RÉINTRODUCTION DES VAUTOURS : OBJECTIFS, RETOMBEES
Jean-Pierre Choisy Sept. 2004
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U
C. - REMARQUES
Le contexte humain local est l’un des facteurs déterminant le succès ou l’échec de toutes les
opérations de réintroduction. Dans la poursuite de ces objectifs, il est aussi véridique qu’habile,
donc doublement justifié, de mettre en avant les retombées économiques (tourisme), financières
(coût de l’équarrissage), technique (service rendu aux éleveurs), sanitaires (élimination de
charognes dans la nature). Néanmoins, biologistes et naturalistes concernés se doivent de n’analyser
les retombées d’une réintroduction qu’en termes de contraintes et ressources : une composante du
contexte tactique local qu’il serait particulièrement maladroit de ne pas prendre en compte. Mais ils
se doivent de ne pas hausser la prise en compte de ce contexte au niveau d’objectifs : ce serait trahir
respectivement leur fonction et leurs valeurs. Le feindre pourrait avoir une efficacité éventuelle à
court terme, mais, outre que ce serait éthiquement discutable, l’effet à long terme serait
probablement négatif. Encore faut-il avoir un minimum d’éthique et le souci du long terme…
La satisfaction de réussir une opération locale est légitime, que ce soit pour un Parc Régional, une
association, un organisme départemental, régional ou leurs partenaires. Il est plus valorisant encore
de la considérer comme participation locale à une stratégie de réintroduction au service d’un
objectif biogéographique à l’échelle continentale et comme contribution majeure à la pérennité à
long terme des espèces concernées. Ceci moyennant un tout petit peu de hauteur de vue. L’esprit de
clocher étant une des petitesses du monde les mieux partagée8, on est malheureusement souvent
conduit tactiquement à mettre l’accent, parfois exclusivement, sur le grand intérêt local de ces
opérations. Pire encore : certains n’y voient d’intérêt que dans le lâcher proprement dit : petit
événement d’actualité locale. « Petit » est le mot, en effet, par rapport à d’autres motivations qui se
situent à un tout autre niveau intellectuel, émotionnel, philosophique et politique, au bon sens du
terme. Je ne ferais pas l’injure à aucun des destinataires de ces lignes de croire qu’il n’ait pas une
perception un peu plus élevée des motivations des réintroductons de vautours dans la Drôme.
CONCLUSION
Les motivations essentielles des réintroductions de vautours se placent dans les politiques de
conservation et la restauration de la biodiversité, politiques européennes, nationales, parfois
régionales, voire locales. On peut contester ces politiques, que ce soit au niveau des valeurs les
fondant. Ceux qui ne les partagent pas préfèrent souvent les attaquer, de bonne ou mauvaise foi, du
fait de leur coût, réel ou supposé. Dans le cas de la réintroduction des vautours, cette critique est
sans fondement. En effet, globalement, pour la collectivité le coût de ces opérations est sans
commune mesure avec leurs bénéfices :
- augmentation induite du chiffre d’affaires du tourisme rural local ;
- amélioration sanitaire de l’élimination des charognes issues des élevages extensif comme du
renouveau des Ongulés sauvages ;
- traitement sur place au lieu de transport routier de dizaines de tonnes de charognes à des
centaines de kilomètres ;
- prestation de service gratuite pour les éleveurs de montagne, donc aide objective à leur
activité professionnelle ;
- création d’un emploi local, au moins à temps partiel, assurant la prestation ci-dessus ;
- coût moindre pour les finances publiques.
Localement, le bilan matériel est encore plus favorable puisque la majeure partie des bénéfices est
locale alors que la quasi-totalité des coûts sont départementaux, régionaux, nationaux, européens.
L’apport esthétique, émotionnel, culturel, non développé, non chiffrable, mais pourtant bien réel,
améliore encore le bilan de ces opérations pour la collectivité.
8
Pour paraphraser une formule célèbre.
LA RÉINTRODUCTION DES VAUTOURS : OBJECTIFS, RETOMBEES
Jean-Pierre Choisy Sept. 2004
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VAUTOURS
ET
ELEVAGE EXTENSIF
Jean-Pierre Choisy
Octobre 2004
On peut, sur simple demande <[email protected]> obtenir par courrier électronique
trois autres documents autres documents, concernant :
- stratégie : réintroduction des vautours à l’échelle continentale ;
- opérations : état actuel de la méthode de réintroduction du Vautour fauve en France ;
- identification sur le terrain.
On peut aussi faire partie d’une liste de diffusion d’informations sur les vautours.
Prière de faire parvenir à la même adresse électronique 1 toute observation de toute espèce de
vautours à distance des zones habituellement fréquentées : notamment pour le Vautour moine, à distance
forte ou faible des sites de réintroduction, pour le Vautour fauve idem Pyrénées exclues (n’y a jamais disparu).
1
A défaut : J.-P. Choisy 26150 CHAMALOC (F) ou tél. : (0)4 75 21 34 39.
K
I. – ELEVAGE ET TIR, PIEGEAGE, DENICHAGE DES VAUTOURS
Ces destructions ont fortement affecté les quatre espèces de vautours d’Europe : chasse de trophées,
collection d’œufs, et d’oiseaux taxidermisés, destructions des Rapaces ne s’embarrassant pas de
distinctions entre charognards et prédateurs. Mais les vautours n’ont pas suscité l‘animosité des éleveurs,
au contraire, à deux exceptions près :
a) A partir de la fin du XVIII° siècle et jusqu’à son éradication totale, l’inoffensif Gypaète, dans les
Alpes, a été victime de fantasmes cynégétique-littéraires en faisant un véritable dragon. Eleveurs
et bergers en ont diversement influencés. Curieusement, les Pyrénées et la Péninsule Ibérique
n’ont pas été contaminés par ces délires romantiques.
b) Depuis quelques années on a relaté, dans les Pyrénées et en Espagne, des cas de vautours fauves
tuant du bétail. Une fois éliminées les billevesées, ainsi qu’une prétendue expérience (une chèvre en
bonne santé peut effectivement être tuée par des vautours…si elle est bien ligotée !), le fait a été réellement
observé dans des situations très particulières, concernant toujours des animaux en situation
critique : blessé ou agonisant, jeune gisant durablement inerte sur le sol et pris pour un cadavre,
mort-né dépassant de la vulve tiré par les vautours entraînant l’utérus, etc. Dans la grande majorité
des cas, les vautours n’ont fait qu’accélérer une mort quasi-inéluctable. La récente augmentation
de ces incidents tient à deux causes :
- mise en alpage de races, notamment bovines, plus productives mais peu rustiques, dont
certaines ne devraient jamais être laissées à elles-mêmes, sans possibilité d’assistance
humaine, lors des mises-bas ;
- suppression brutale de charniers dont disposaient précédemment d’importantes populations de
vautours, d’où disette brusque et très forte motivation alimentaire.
D’impact concret très limité, localisé, le problème est néanmoins très préoccupant médiatiquement,
monté en épingle comme faits divers « sensationnels » et, plus encore, par tous ceux qui supportent
mal la protection des Rapaces en général.
NB Le problème, complexe, a été tout au plus évoqué et non pas traité. Pour information détaillée s’adresser à : Parc
National des Pyrénées <[email protected]> et/ou au FIR-LPO Yvan Tariel <[email protected]> et/ou à Guy Joncour <[email protected]> vétérinaire ayant travaillé là-dessus.
II. - ELEVAGE ET EMPOISONNEMENT DES VAUTOURS
Dans le passé, l’impact du poison a été encore bien plus catastrophique, en tout cas pour les trois
vautours autres que le Gypaète. Qu’il s’agisse d’un appât ou d’un Carnivore lui-même victime du poison,
une seule charogne peut tuer en une seule fois plusieurs dizaines de vautours. Ces derniers sont atteints
alors même que ce sont généralement les Carnivores qui sont généralement visés : le Renard pour des
raisons surtout cynégétiques, l’Ours et surtout le Loup pour protéger les cheptels domestiques.
De nos jours :
a) Situation catastrophique de tous les vautours dans les Balkans et une grande partie de
l’Afrique au Nord du Sahara du seul fait de l’usage de ce moyen de destruction redoutable et
absolument non sélectif, est la cause essentielle de la quasi-extinction des vautours ;
b) Graves préoccupations en Espagne : des centaines de vautours sont empoisonnés illégalement
chaque année. Jusqu’à maintenant la survie globale du Vautour fauve n’est pas en cause du fait de
l’importance des effectifs (cf. infra). Mais la situation pourrait vite s’aggraver. Elle est déjà
préoccupante pour les trois autres vautours, bien moins abondants. Jusqu’à un passé récent,
l’objectif était cynégétique : destruction des prédateurs2. Les incidents avec le bétail évoqués plus
haut sont parfois à l’origine d’une volonté délibérée de détruire les vautours. Alors on préfère
généralement le poison, plus discret, moins risqué, que le fusil ou le piège ;
L
c) Inquiétudes dans les Alpes : va-t-on vers une reprise illégale de l’empoisonnement des
2
conséquence de la récente intensification agricole ayant entraîné un effondrement des effectifs de nombreuses espèces,
dont Lièvre et Perdrix rouge
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VAUTOURS
ET ELEVAGE EXTENSIF
J.-P. CHOISY, 2004
PARC NATUREL RÉGIONAL DU VERCORS
Carnivores ? En France :
- un Percnoptère agonisant car empoisonné a été trouvé au printemps 2004, à moins de 20
km des Hauts Plateaux du Vercors, fréquentés tout l’été par le Vautour fauve, à l’occasion
par les trois autres Vautours, et où le Loup tue des brebis depuis quelques années ;
- au Mercantour, premier massif de retour du Loup dans les Alpes françaises, une étude
toxicologique récente des cadavres de Renard a montré que, dans au moins 80 % des cas,
le poison était la cause de la mort !
NB Rien ne prouve que le Loup ait été visé dans le cas du Percnoptère. Au Mercantour c’est le
Renard qu’on voulait détruire. Néanmoins, il est permis de redouter que le retour du Loup contribue à
augmenter de la fréquence de tels délits.
Qu’en est-il dans les autres pays de l’Arc Alpin, dans la chaîne elle-même comme ailleurs ?
III. - ELEVAGE ET RESSOURCES ALIMENTAIRES DES VAUTOURS
Certes, les Ongulés sauvages connaissent dans les Alpes et ailleurs en Europe un renouveau sans
précédent depuis des siècles. Leurs cadavres peuvent très constituer une ressource suffisante pour les
vautours lorsque ces animaux ne sont pas prélevés par la chasse3 et que, morts, ils restent à la
disposition des charognards. Le plus souvent, il s’agit des espaces hors chasses : Parc Nationaux et
certaines Réserves. Mais cela peut aussi se rencontrer ailleurs dans certaines conditions :
- pression de chasse faible ou très faible ;
- chasse exclusivement pour le trophée, abandonnant le reste du corps ;
- chasse blessant beaucoup d’animaux non retrouvés par les chasseurs : symptôme de bas niveau
cynégétique, qui n’est guère une méthode de gestion à préconiser !
- au moins une des espèces d’Ongulés n’est pas chassée4.
Pour des raisons économiques (agriculture, sylviculture) une telle situation est de nos jours rarement
tolérée ailleurs qu’en haute montagne. Celle-ci offre deux autres avantages aux vautours :
- la faiblesse ou l’absence de voirie, la faible profondeur des sols, conduisent généralement, au
moins en France, à laisser la plupart des cadavres de transhumants, sinon tous, à la disposition des
charognards ;
- la rareté ou de l’absence des ligneux rendent la grande majorité des charognes accessibles aux
vautours.
Tout ce qui précède est d’une grande importance pour la corrélation entre élevage et retour des vautours
dans les Alpes et même en Europe en général. Elle est fort diverse selon les espèces :
Gypaète Gypaetus barbatus
Certes, le Casseur d’Os peut prospérer à très basse altitude : il y a des nids à partir de 630 m. dans les
Pyrénées (bien plus bas naguère dans certaines régions d’Espagne) et de 300 m. en Crète. A ces altitudes,
ses populations dépendent en grande partie du bétail, pour des raisons analogues à celles qu’on a
exposées à propos du Vautour fauve. Mais c’est le seul des quatre vautours d’Europe à pouvoir vivre
toute l’année et nicher même en haute montagne : nids jusqu’à 2300 m. dans les Pyrénées, avec
prospections jusqu’aux plus hauts sommets. C’est pourquoi de nos jours une partie importante des Alpes
permettrait le développement de populations de Gypaète même en l’absence d’élevage. Bien que celui-ci
même en altitude lui procure des ressources saisonnières notables du fait de la transhumance, ce n’est
nullement une condition nécessaire à sa survie.
3
4
Ceux qui sont braconnés restant généralement minoritaires.
Exemple : le Bouquetin en France.
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VAUTOURS
ET ELEVAGE EXTENSIF
J.-P. CHOISY, 2004
PARC NATUREL RÉGIONAL DU VERCORS
M
Vautour moine Aegypius monachus
Jusqu’à maintenant, les réintroductions de Vautour moine ont suivi celle du Vautour fauve sur les mêmes
sites. Les charniers nécessaires à ce dernier sont donc exploités par le premier. En Europe, il niche sur
arbre5, mais guère au-dessus de 1400 m, même s’il peut exploiter les plus hautes régions, particulièrement
à la belle saison. Néanmoins, quoique pour d’autres raisons que le Gypaète, le retour du Vautour moine
ne dépende pas forcément partout de l’élevage car il peut :
- prospecter aussi les habitats semi-boisés, clairières et simples trouées en forêt, voire les
boisements très clairs, donc y exploiter des cadavres d’Ongulés inaccessibles aux autres vautours ;
- vivre de cadavres de lapins, lièvres, marmottes, et autres Vertébrés de taille analogue si leur
abondance est suffisante.
Percnoptère Neophron percnopterus
La prospérité du Vautour blanc est liée à la présence de restes à finir : originellement en picorant les
bribes laissées sur les os par les grands vautours,6 ainsi que, dédaigné par eux, le contenu de la panse des
Ruminants. Secondairement, il s’est fréquemment adapté à l’exploitation des déchets humains 7, qui
peuvent lui permettre de survivre à la disparition des grands vautours. Partout où ces déchets ne sont plus
disponibles, sa prospérité dépend de l’organisation de l’accès aux charognes de bétail, que ces charniers
soient prioritairement destinés à lui ou à d’autres vautours.
Vautour fauve Gyps fulvus
C’est l’espèce dont la prospérité est, depuis des siècles, la plus étroitement liée à l’accès aux charognes
de bétail du fait du cumul de plusieurs caractéristiques :
- il n’exploite que les charognes d’Ongulés ou de taille analogue, du fait de son extrême
grégarisme : quelques des dizaines d’individus descendus consommer un cadavre d’écureuil
dépenseraient plus d’énergie en s’envolant qu’ils en auraient obtenu ;
- il ne niche guère au-dessus de la moyenne montagne, de l’étage montagnard, même si des couples
peuvent nicher jusqu’à la limite supérieure des forêts, voire un peu au-dessus8. A la belle saison,
il prospecte jusqu’aux plus hautes altitudes, y trouve beaucoup de cadavres de bétail transhumant
et/ou, de nos jours d’Ongulés sauvages. Mais la haute montagne seule ne peut guère suffire à
l’entretien de ses populations toute l’année ;
- il ne prospecte que les habitats ouverts. Or, à basse et moyenne altitude, il est exceptionnel que,
de nos jours, agriculture et/ou sylviculture y tolèrent des densités d’Ongulés sauvages non
prélevés telles qu’il puisse y trouver dans les zones ouvertes des charognes en suffisance pour
entretenir ses colonies.
Le fondement de la prospérité du Vautour fauve en Espagne (vingt-trois à vingt-quatre mille couples, plus
de cinquante mille individus) est la persistance répandue d’une élimination des charognes par la faune
sauvage même à basse altitude.
En dessous de la haute-montagne, la mise à disposition du Vautour fauve des charognes de bétail joue un
rôle central également pour la prospérité des autres espèces de vautours : sur une même charogne leurs
préférences alimentaires ne sont pas les mêmes et très souvent, les autres Vautours repèrent les charognes
du fait des mouvements et rassemblement du Vautour fauve, plus abondant et grégaire.
Ceci n’exclut nullement que, dans certaines situations particulières rares de nos jours, même à basse altitude, le Vautour fauve
et les autres, puissent vivre essentiellement de charognes d’Ongulés sauvages. Mais c’est un autre débat.
5
Essentiellement sur Chêne vert Quercus ilex ou Pin sylvestre Pinus sylvestris
Son bec, fin, y est très bien adapté, alors qu’il n’est guère apte à ouvrir le « cuir » des Ongulés.
7
D’où ses noms allemands et néerlandais.
8
Lorsque les Rapaces en général sont persécutés ou, au contraire, lorsque l’espèce est tellement prospère que les sites
rocheux plus bas sont saturés.
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6
VAUTOURS
ET ELEVAGE EXTENSIF
J.-P. CHOISY, 2004
PARC NATUREL RÉGIONAL DU VERCORS
N
En France, en 1998 CHASSAGNE a fait de l’équarrissage naturel par les Vautours dans les Causses (sud
du Massif Central) l’objet de sa thèse de doctorat vétérinaire. Son analyse historique s’applique
parfaitement à une grande partie des montagnes françaises sinon à toutes.
a) TRAITEMENT DES CHAROGNES EN FRANCE
A partir de 1714, des mesures de police sanitaire imposent l’enfouissement des charognes, auparavant
abandonnées aux charognards. Respectées en ville, elles ne le sont pas en milieu rural où les forces de
police sont beaucoup moins présentes.
Au XIX° siècle, les découvertes pastoriennes justifient la destruction prophylactique des cadavres. Au
XX° siècle le Code Rural intègre les divers textes : loi du 2/2/42, puis du 31/12/75, revue et refondue le
26/12/96, du fait de la crise de l’ESB ( ’ maladie de la vache folle »). «Sur la majeure partie du territoire
français, de moins en moins de carcasses sont abandonnées dans la nature, les ressources alimentaires des
animaux charognards chutent et la démographie des populations sauvages qui profitaient de la situation
s’en ressent. Le niveau sanitaire de l’élevage progresse énormément. La situation des zones de montagne
reste particulière…Distance kilométrique, lenteur de l’accès, légèreté des carcasses à collecter sont
défavorables au passage de l’équarrisseur en zone de montagne9, le texte de loi du 31/12/1975, puis celui
du 26/12/1996 le reconnaissent. L’équarrisseur, le plus souvent, ne passe ni dans les 24h réglementaires
après convocation, ni dans les 48 h. tolérées.
La mise en place de conteneurs réfrigérés où les éleveurs peuvent apporter les charognes qui attendront le
passage de l’équarrisseur a diminué la dépose illégale de charognes dans la nature. Elle ne l’a pas
supprimée car beaucoup d’élevages de montagne sont situés à plusieurs dizaines de kilomètres du
conteneur réfrigéré. A défaut d’équarrissage, trois modes de traitement sur place sont admis par les
services vétérinaires :
-
-
incinération : lourd à mettre en œuvre, outre qu’il génère des pollutions, ce traitement des
charognes fait courir un risque d’incendie (hors d’un four) et nécessite d’autres combustibles,
généralement hydrocarbures) ;
traitement à la chaux vive : « l’efficacité prouvée sur les effluents organiques liquides n’est pas
forcément transposable en ce qui concerne les solides » comme l’a montré une étude utilisant
pourtant des doses de chaux triples de celles qui sont préconisées (Müller E., 1987, DEA, INSA
Lyon) « L’effet bactéricide attendu…ne se produit…pas dans les charniers chaulés » ;
enfouissement : dans des massifs où la très grande majorité des sols sont peu profonds, voire
squelettiques, cette éventualité reste généralement très théorique, une vue de l’esprit, déconnectée
de toute possibilité de réalisation concrète. En outre, on a démontré que beaucoup de spores de
bactéries pathogènes survivent de nombreuses années, une partie étant remontée en surface par les
lombrics, puis dispersée par le ruissellement.
Pour toutes ces raisons, l’abandon des charognes dans la nature est une pratique courante, quoique
parfaitement illégale et présentant de nombreux inconvénients sanitaires : nature : dissémination de
germes, de parasites, pollution des eaux, ressources trophiques supplémentaires pour les chiens errants,
pullulation des mouches, pour le bétail cause d’inconfort et agents de disséminations de germes
infectieux. Divers travaux ont montré que la consommation par les vautours était le plus efficace
traitement sur place des charognes de bétail dans les régions d’élevage extensif, tant du point de vue de
l’efficacité que du coût.
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Surtout pour des camions.
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O
« Le tube digestif des griffons10 (groupe auquel on peut joindre les vautours moines et oricou 11)
détruit tous les micro-organismes qui auraient pu survivre dans les cadavres, hormis quelques
spores très résistantes ». Outre que la plupart des spores sont détruites, Chassagne souligne que la
consommation a presque toujours lieu avant sporulation des bactéries pathogènes. Cette
aseptisation est due à l’extrême acidité du milieu stomacal : pH 1 à 1,5 ! Soit environ mille fois
plus acide que chez les Mammifères.
« L’action des vautours apparaît donc sans danger et même très bénéfique, dans une zone de
moyenne montagne mal desservie par l’équarrissage industriel conclut l’auteur à propos des
Causses. C’est a fortiori le cas dans les alpages de haute montagne : Alpes, Pyrénées. Ajoutons que
cette fonction sanitaire concerne aussi charognes d’animaux sauvages.
Ces constatations ont débouché sur des tractations pour un assouplissement de la législation en faveur
des grands rapaces charognards. Des dérogations ont d’abord été obtenues au coup par coup auprès
des services vétérinaires départementaux dans les Pyrénées, les Causses, les Alpes. Le FIR12 souligne
alors la contradiction paradoxale entre le soutien du Ministère de l’Environnement aux mesures en faveur
des vautours (charniers inclus) et le Ministère de l’Agriculture qui « se retranche derrière la législation
sanitaire et condamne en bloc les moyens nécessaires à ces actions ». Passons sur le détail des péripéties
multiples négociations entre les deux Ministères, arrêtés locaux, etc. 13, débouchant en 1998 sur un arrêté
Ministériel assouplissant l’application de la législation dans les zones à vautours, démarche étayée
scientifiquement (Briquet, 1990, Evaluation du rôle épidémiologique du vautour fauve dans le cadre de
sa réintroduction en France sur les Grands Causses, thèse doctorat vétérinaire, Alfort-Créteil). Dans les
zones à vautours, il devient possible d’entretenir légalement, outre les quelques charniers « lourds », ou
charniers proprement dits, des charniers légers intermittents, dits « placettes » gérées par les éleveurs
ou/et bergers eux-mêmes, pour les charognes issues de leur propre élevage. Les principes techniques de
base sont : étanchéité du sol (béton) et interdiction de l’accès aux mammifères (clôture électrique). Il est
exclu qu’un tel « charnier fermier » soit utilisé par d’autres éleveurs, pour éviter de transporter des
germes pathogènes d’un élevage à l’autre.
b) ORGANISATION DE LA PARTICIPATION DU VAUTOUR FAUVE À L’ÉQUARRISSAGE DANS LES MASSIFS DE
RÉINTRODUCTION DES PRÉALPES FRANÇAISES
Diois
Les éleveurs de quatre cantons (Diois et du sud du Vercors = 1 162 km2) disposent d’un numéro
téléphonique avec répondeur-enregistreur, où ils peuvent signaler les charognes à enlever chez eux. Cette
collecte permet d’approvisionner aussi bien les oiseaux en volières avant lâcher que deux charniers sur la
commune à Chamaloc, à la bordure méridionale du Vercors mais dans le Diois. Actuellement, ces frais de
collecte de charogne et de gestion de charnier sont financés dans le cadre de la réintroduction par le Parc
Naturel Régional du Vercors, opération qui n’est pas achevée.
Baronnies
Le système est analogue mais, l’opération de réintroduction étant achevée, la pérennité du financement a
été assurée en associant officiellement à l’équarrissage l’association Vautours en Baronnies, gérant les
charniers. Requise d’équarrissage, elle est rémunérée 23 ! par cadavre. Un système analogue existe dans
les Causses14 (sud du Massif Central) et en projet pour le Diois.
10
C’est-à-dire les vautours du genre Gyps, en Europe le Vautour fauve Gyps fulvus.
Torgos tracheliotus.
12
Fonds d’Intervention pour les Rapaces, fusionné depuis avec la LPO (Ligue Protectrice des Oiseaux).
13
1985, 1986, 1989, 1991, 1993, 1994, 1995, 1996, 1997.
14
Pour information plus précise demander à LPO Grands Causses <[email protected]>.
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Les avantages sont multiples pour les divers partenaires et pour la collectivité :
- politique de restauration de la biodiversité : contribution à la pérennisation du retour des
vautours, essentielle surtout pour le Vautour fauve ;
- éleveurs : ils ne sont plus obligés de choisir entre illégalité, jamais très confortable, ou bien
élimination sur place, dont on a vu plus haut les difficultés de mise en œuvre et les limites
sanitaires, ou encore le transport au conteneur réfrigéré15 à destination de l’équarrisseur, imposant
un transport par eux-mêmes, le souvent à une ou quelques dizaines de kilomètres de route de
montagne, près d’une cinquantaine parfois. La collecte à domicile des charognes constitue donc
pour eux une prestation de service très appréciée ;
- développement local : la collecte fournit un emploi à temps partiel dans des contrées où l’emploi
est rare ;
- prophylaxie : la collecte annuelle d’un millier de charognes de bétail dans le cadre de l’opération
menée par le Parc Naturel Régional du Vercors ne s’est traduite par aucune baisse de leur nombre
au conteneur réfrigéré de Die. Idem dans les Baronnies16 : douze cent charognes collectées par an.
La seule interprétation possible est que l’alimentation des charniers a diminué d’environ deux
mille deux cents charognes par an les dépôts illégaux dans la nature…;
- politique de l’environnement : un traitement sur place est préférable au transport de plusieurs
dizaines de tonnes de charognes depuis les Préalpes jusqu’à Lyon ou Marseille ;
- finances publiques : dans la grande majorité des cas, le coût pour elles est moindre que la filière
d’équarrissage classique. Celle-ci ne redevient meilleur marché que dans les cas, heureusement
rares, de mortalité massive, rentabilisant le déplacement d’un camion. Dès les trois premières
années de la réintroduction dans les Baronnies, encore au stade du maintien en volière, le nombre
de charognes collectées a été tel que leur élimination par l’équarrissage aurait coûté au Conseil
Général de la Drôme au moins autant que la subvention de celui-ci à l’opération de
réintroduction17. Ceci à supposer qu’un contrôle fortement accru ait éliminé les pratiques
d’abandon des charognes dans la nature, ce dont la possibilité concrète est douteuse, et qui ne
serait pas nécessairement préférable, tant sur le plan prophylactique qu’environnemental (cf.
supra).
Verdon
On a choisi de ne pas collecter de charognes dans les élevages et de puiser directement dans le conteneur
réfrigéré de la filière classique d’équarrissage. C’est évidemment bien plus facile que de mettre sur pied
un système de collecte à domicile ! Certes, cette manière de faire permet, elle aussi, la pérennité de
l’approvisionnement des charniers. Mais, ce faisant, on a perdu tous les autres avantages :
- affaiblissement de la légitimité politique du financement de l’opération, qui ne se justifie plus que
par la seule restauration de la biodiversité et les retombées touristiques ;
- aucun emploi à temps partiel n’est créé ;
- nulle diminution des dépôts, illégaux et dans des conditions sanitaires discutables, de charognes
dans le milieu ;
- les éleveurs, qui ne bénéficient pas d’une collecte des charognes à domicile, ne sentent pas
directement concernés par le retour des vautours.
Quelles ont bien pu être les raisons d’une telle faute tactique majeure ? Les responsables des autres
opérations de réintroduction ont été bien inspirés de faire un tout autre choix.
15
Un seul pour tout le Diois et le sud du Vercors, un seul pour toutes les Baronnies, etc.
Pour nombre exact, demander à Tessier <[email protected]>Pour comparaison avec le nombre de
charognes collectées pour l’équarrissage, avant et après le début de l’opération, demander à Traversier <[email protected]>.
17
Pour information précise demander à TROUILLET,<[email protected]>.
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c) DEUX PROBLÈMES DE GESTION D’ELEVAGE LIÉES AU RETOUR DES VAUTOURS FAUVES
-
bain dans les abreuvoirs : les vautours fauves sont des fouilleurs-tireurs qui introduisent leur tête
et leur long cou dans la cavité générale des cadavres, les souillant abondamment. Ensuite, ils se
nettoient. Lors un groupe de vautours se baigne dans des abreuvoirs, le bétail refuse ensuite l’eau
à odeur de cadavre. A court terme, le problème peut être immédiatement réglé par un épouvantail.
Si les vautours s’y habituent, d’autres techniques simples sont très efficaces.
-
disparition d’indices lors de dégâts aux troupeaux par des carnivores : quelques dizaines de
vautours fauves font rapidement disparaître l’essentiel d’une brebis. En cas d’attaque par Chien,
Lynx ou Loup, tout constat devient alors impossible. La seule parade est une intervention
extrêmement rapide ou de recouvrir le cadavre d’une bâche.
d) UN PROJET DE RÉGLEMENTATION EUROPÉEENNE MENAÇANT LES BASES MÊMES DE LA SURVIE DES VAUTOURS À
L’ÉCHELLE CONTINENTALE
Un projet actuel de réglementation européenne induit par la crise de la « vache folle » constitue une
menace majeure et sans précédent sur la pérennité des vautours à l’échelle continentale : les charognes
destinées aux charniers devraient être congelées, la tête prélevée pour analyse et ensuite, seulement, si
l’analyse est négative, les charognes seraient placées sur les charniers.
La France et l’Espagne, leurs Ministères de l’Environnement, les associations concernées par les
vautours, ont présenté des contre-propositions élaborées par des vétérinaires. En tout état de cause, une
modulation en fonction du contexte local s’impose : dans les Préalpes comme les Causses, la tremblante
du mouton n’est guère présente et les races élevés y sont résistantes. Le coût exorbitant des mesures
préconisées entraînerait obligatoirement une réduction à presque rien des charognes de bétail disponibles
pour les vautours.
Du point de vue de la conservation de la biodiversité, l’examen détaillé des contre-propositions est sans
importance. Un seul point sera stratégiquement décisif : quelle que soit l’option retenue, il importe que
l’éleveur ou le berger optant pour l’élimination par les vautours ne subissent pas la moindre
contrainte supplémentaire par rapport à la filière d’équarrissage industriel, au contraire.
Faute de quoi l’impossibilité d’un contrôle effectif (cf. supra) conduirait à un contournement de ces
contraintes par une reprise massive des pratiques antérieures de dépôt dans le milieu. Ces dépôts illégaux
ont toujours été camouflés : sous le couvert ligneux, dans des ravins, chaos rocheux, gouffres et cavernes,
toutes conditions d’inaccessibilité aux vautours.
Alors, les ressources trophiques des vautours autres que le Gypaète s’effondreraient à l’échelle
continentale, donc leurs populations également, ceci sans le moindre bénéfice prophylactique dans les
régions d’élevage extensif peu peuplées, à voirie peu dense, notamment en montagne, et même au
contraire, du fait de la reprise de la dépose clandestine de charognes dans la nature.
Le débat est en cours…
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