electricite verte

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electricite verte
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ELECTRICITE VERTE
Zoom
Promouvoir l’électricité renouvelable
dans un marché libéralisé :
le marché des certificats verts
La politique énergétique européenne poursuit deux objectifs fondamentaux :
la libéralisation du marché de l’électricité et la réduction des émissions de
gaz à effet de serre. Or, ces deux objectifs peuvent se révéler conflictuels,
notamment par rapport au développement des énergies renouvelables.
Les certificats verts constituent un moyen de dépasser cette contradiction.
A condition de ne pas devenir le seul instrument de promotion de l’électricité renouvelable.
Le marché des certificats verts
Depuis décembre 19961, la libéralisation du marché de l’électricité est en cours dans toute l’Union
européenne (UE). En cassant les monopoles existants, la libéralisation du marché crée des opportunités pour l’entrée sur le marché de nouveaux
producteurs ou distributeurs d’électricité, notamment renouvelable. Mais la libéralisation constitue
aussi une menace, car l’électricité produite à partir
de sources d’énergie renouvelables est souvent
moins compétitive. Par ailleurs, en ratifiant le
protocole de Kyoto, l’UE s’est engagée à réduire
ses émissions de gaz à effet de serre de 8 % à l’horizon 2008-12 par rapport à leur niveau de 1990.
Pour y parvenir l’UE table entre autre sur un
important déploiement d’énergies renouvelables
(22,1 % à l’horizon 2010). Dans ce contexte, un
nouvel instrument semble particulièrement adapté
pour promouvoir l’électricité renouvelable : le marché des certificats verts.
Le système des certificats verts se fonde sur la volonté de valoriser les externalités positives2 qui découlent de la production d’électricité à partir de sources
renouvelables. Sur le plan pratique, ce système repose sur deux instruments classiques de politique
publique : le quota et la certification. Le quota a
pour rôle de créer une demande en obligeant les
divers acteurs à acheter une certaine quantité – un
quota – d’électricité d’origine renouvelable; tandis
que, du côté de l’offre, la certification garantit l’origine renouvelable de l’électricité produite.
L’originalité du système réside dans le mécanisme de
marché qui établit un rapport entre le demandeur,
tenu de respecter un quota, et le producteur d’électricité renouvelable, à qui un revenu additionnel est
garanti par un certificat. Les producteurs d’électricité
obtiennent ainsi des certificats verts selon la quantité d’électricité verte qu’ils génèrent et vendent ces
certificats sur un marché spécifique (graphique 1).
Graphique 1 : Schéma du marché des certificats verts négociables
Producteurs d’électricité
Producteurs
d’électricité
grise
Vente
Marché libéralisé
de l’électricité
Achat
Clients finaux
* Les acheteurs de CV peuvent être divers: producteurs, fournisseurs, gestionnaires de réseau, clients
finaux (cf. tableau ci-dessous).
Vente
Régulateurs
publics**
Producteurs
d’électricité
verte
Certification ER +
Attribution CV
Vente
Flux d’électricité physique
1
2
2
Comptabilisation (quota)
Nouveau
marché des CV
Flux de CV
Acheteurs de CV*
Achat
** Les régulateurs publics peuvent être multiples en fonction des différentes fonctions de la régulation
(surveillance de la concurrence, du respect des obligations de service public, des
conditions d’accès des tiers
au réseau, etc.).
Avec l’entrée en vigueur de la directive 96/92/EC du Parlement européen et du Conseil du 19 décembre 1996 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l’électricité.
Avantages sur le plan environnemental, mais aussi social (emploi), économique et politique (indépendance énergétique), qui ne sont pas valorisés sur le marché sans intervention publique.
Renouvelle n° 3 |
1er trimestre 2003
Technologies exclues
Prix min.
garanti
Import /Export
Fournisseurs et gestionBelgique
Région flamande naires de réseau
1 MWh
Incinération déchets
hydro >10 MW
Oui5
Non, marché
régional
Fournisseurs et gestionBelgique4
Région wallonne naires de réseau
1 MW/taux
d'économie de CO2
Incinération déchets
hydro >20 MW
cogénération >20 MW
Oui
Non, marché
régional
Danemark6
Consommateurs finaux
1 MWh
Incinération déchets
hydraulique >10 MW
Oui
Oui, avec
restrictions
Italie
Producteurs d'électricité
100 MWh
Stockage d'eau pompée
Non
Oui en cas
d'importation
de l'électricité
Pays-Bas
Volontaire, déductible
d'impôt
10 MWh
Incinération déchets
hydraulique >15 MW
Non7
Oui en cas
d'importation
de l'électricité
Suède
Consommateurs finaux
1 MWh
Incinération déchets
hydraulique >1.5 MW
Oui
Oui, avec
restrictions
Royaume-Uni
Fournisseurs
1 MWh
Incinération déchets
hydraulique >20 MW
Non
Oui, avec
restrictions
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ELECTRICITE VERTE
Règles d'attribution
des certificats3
Soumis au quota
Comparaison des systèmes de certificats verts en Europe (situation en 2001)8
Comparaison européenne
L’introduction des certificats verts est récente dans
l’UE et chaque pays membre crée son propre système. Chaque système diffère selon les acteurs auxquels il impose le quota (producteurs, fournisseurs,
clients finaux), les règles d’attribution des certificats,
les technologies ou les sources d’énergie éligibles
pour obtenir les certificats, l’existence ou non d’un
prix minimal garanti pour les certificats (flèche en
pointillé dans le graphique 1), les possibilités d’importation-exportation. Ainsi faut-il être prudent lorsqu’on parle « du » système des certificats verts : il
n’existe pas de système unique.
Conclusion
Un soutien spécifique à l’électricité d’origine renouvelable est essentiel en Europe du fait des engagements du protocole de Kyoto. La question n’est plus
de savoir si oui ou non les gouvernements européens
doivent mettre en place une politique de promotion
des énergies renouvelables, mais de savoir comment
ils vont s’y prendre. Un mouvement semble se dessi-
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6
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ner dans de nombreux pays membres de l’UE en
faveur du système de certificats verts. Le fait que cet
instrument se développe peu de temps après la libéralisation du marché de l’électricité n’est pas dû au
hasard. Car il repose sur un mécanisme de marché
concurrentiel séparé du reste du marché de l’électricité de façon à assurer un revenu additionnel aux
producteurs d’électricité renouvelable. La diffusion
de cet instrument n’affecte pas tous les pays européens. En particulier, l’Allemagne et la France s’en
tiennent à l’écart, alors qu’il attire l’Italie, les PaysBas, la Belgique et le Royaume-Uni.
En conséquence, la sélection d’un instrument de politique implique de trouver des compromis qui doivent
être discutés démocratiquement, ce qui n’est pas toujours le cas dans le processus de décision publique.
ISABELLE DE LOVINFOSSE,
Assistante en science politique à l’UCL
et chercheuse au sein de l’Association universitaire
de recherche sur l’action publique (AURAP)9
Selon les pays, un certificat vert peut représenter de 1MWh à 100MWh d’électricité produite, ce qui représente une énorme différence et rend
difficile l’échange des certificats entre certains pays.
En Belgique, il existe trois marchés différents de certificats car la promotion des énergies renouvelables est une compétence régionale.
Pour un aperçu des politiques belges en matière de soutien aux énergies renouvelables : de LOVINFOSSE I. et VARONE F., « Belgium », in
Reiche D. (dir.), Handbook of Renewable Energies in the European Union. Case Studies of all Member States, pp. 49-62. Peter Lang, Frankfurt,
2002.
Un système de prix de rachat garanti des certificats verts est mis en place au niveau fédéral.
Fin 2001, le nouveau gouvernement danois a gelé l’introduction des certificats verts qui devaient entrer en vigueur en 2002.
Il n’y a pas de prix garanti pour les certificats mais les producteurs d’électricité renouvelable bénéficient de primes versées par l’Etat, indépendamment du système des certificats verts.
Pour une analyse plus approfondie : de LOVINFOSSE I. et VARONE F., Renewable electricity policies in Europe: patterns of change in the liberalised market. Université catholique de Louvain, Prix Tractebel 2001, Working paper n° 1, 2002.
www.aurap.ucl.ac.be/Bibliographie.htm
www.aurap.ucl.ac.be
Renouvelle n° 3 |
1er trimestre 2003
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