des dinosaures « à sang chaud » au cretacé

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des dinosaures « à sang chaud » au cretacé
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DES DINOSAURES « À SANG CHAUD »
AU CRETACÉ ?
COMMUNIQUÉ DE PRESSE - PARIS – 15 JUIN 2006
www.cnrs.fr/presse
Certains dinosaures vivant au Crétacé, de -145,5 à -65,5 millions d’années, auraient été « à sang
chaud » plutôt qu’ « à sang froid », comme il est généralement admis. Pour le montrer, des
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chercheurs du laboratoire Paléoenvironnements et paléobiosphère et du laboratoire de
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Paléomagnétisme ont utilisé un « thermomètre » naturel : la composition isotopique de l’oxygène
contenu dans les restes de dinosaures appartenant à quatre grands groupes. Ces travaux sont publiés
dans la revue Earth and Planetary Science Letters du 15 juin 2006.
Les dinosaures, qui dominaient l’essentiel des écosystèmes terrestres entre -230 et -65 millions
d’années (Mésozoïque), sont traditionnellement vus comme des reptiles de taille démesurée et « à sang
froid » ou ectothermes, c’est-à-dire dont la chaleur corporelle provient du milieu extérieur. Ils auraient
ainsi largement bénéficié des climats supposés chauds et homogènes qui régnaient alors sur une bonne
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partie des continents. Mais la question du métabolisme de ces « terribles reptiles » divise encore les
scientifiques. Par exemple, les restes de certains dinosaures ont été découverts près des pôles de
l’époque (Australie, Antarctique, Alaska et Sibérie), dans des gisements dépourvus de restes d’animaux
« à sang froid » comme les crocodiles, les tortues, les lézards et les serpents. D’autres pistes suggèrent
également que certains dinosaures auraient été, comme les mammifères et les oiseaux actuels, « à
sang chaud » ou endothermes, c’est-à-dire dont la chaleur corporelle est produite par le métabolisme.
Pour déterminer si certains dinosaures étaient « à sang chaud », des chercheurs du laboratoire
Paléoenvironnements et paléobiosphère et du laboratoire de Paléomagnétisme ont utilisé un
« thermomètre » naturel : la composition isotopique de l’oxygène, mesurée dans des restes de
dinosaures. On retrouve l’oxygène ingéré par un animal sous forme d’eau ou d’air dans des tissus
minéralisés comme l’os, la dent ou encore l’écaille. La proportion des différents isotopes de l’oxygène
dépend de la température de l’animal lors de la fabrication de ces tissus. Ainsi un endotherme, qui
maintient une température corporelle constante et généralement plus élevée qu’un ectotherme, aura
une composition isotopique de l’oxygène différente, même si les deux animaux vivent au même endroit
et boivent la même eau.
Les chercheurs ont appliqué cette méthode à des restes de dinosaures ayant vécu au Crétacé, de -145,5
à -65,5 millions d'années, et appartenant à quatre grands groupes (théropodes, sauropodes,
ornithopodes et cératopsiens). Ces restes provenaient de gisements d’Amérique du Nord, d’Europe,
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d’Afrique et d’Asie. La composition de l’oxygène en isotopes O et O des dents de dinosaures a été
comparée à celle de restes d’animaux ectothermes, comme les crocodiles et les tortues, trouvés dans
les mêmes gisements. Les différences constatées sont identiques à celles que l’on peut observer
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Laboratoire Paléoenvironnements et paléobiosphère (CNRS, Université Claude Bernard Lyon 1)
Laboratoire de Paléomagnétisme (CNRS, Institut de Physique du Globe de Paris)
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Il existe trois isotopes naturels stables de l’oxygène ( O, O, O), dont le noyau comporte 8 protons et 8, 9 ou 10 neutrons.
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Dinosaure : du grec deinos (terrible) et sauros (lézard).
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aujourd’hui entre des mammifères et les mêmes ectothermes. Le métabolisme des animaux des quatre
groupes étudiés devait donc être similaire à celui des mammifères actuels. Autrement dit, ces
dinosaures auraient été « à sang chaud ».
Comme les dinosaures étudiés appartiennent à des groupes très divers, et que les restes analysés
proviennent de différents continents, les scientifiques suggèrent que l’endothermie était même assez
répandue chez les dinosaures au Crétacé. En conséquence, ils estiment que la structuration des
communautés animales et les relations trophiques au Mésozoïque devaient être beaucoup plus
complexes que ce qui était envisagé jusque là. Enfin, au vu de ces résultats, les chercheurs pensent qu’il
est peu probable qu’un refroidissement climatique ait pu être une des causes principales de la
disparition des dinosaures il y a 65 millions d’années, comme on l’a souvent proposé. En effet leur
endothermie devait les rendre moins sensibles aux fluctuations du climat que les reptiles ectothermes,
qui eux ont survécu.
Ces recherches ont été soutenues par le programme national ECLIPSE 1&2 de l’INSU-CNRS
(http://www.insu.cnrs.fr/web/article/rub.php?rub=246), l’Institut Universitaire de France et la Jurassic
Foundation.
Dent de dinosaure « Spinosaurus »
avec la trace de l’échantillonnage.
© R. Amiot, laboratoire
Paléoenvironnements et
paléobiosphère
Cristal d’Ag3PO4 obtenu à partir d’un protocole chimique appliqué à une dent de
dinosaure et permettant l’analyse isotopique de l’oxygène (cliché microscope
électronique à balayage, grossissement : 400 fois).
© C. Lécuyer, laboratoire Paléoenvironnements et
paléobiosphère
Photos uniquement disponibles en résolution web.
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BIBLIOGRAPHIE
Amiot R., Lécuyer C., Buffetaut E., Escarguel G., Fluteau F. and Martineau F. 2006. Oxygen isotopes from biogenic apatites suggest widespread
endothermy in Cretaceous dinosaurs. Earth Planet. Sci. Lett., 246 : 41-54.
CONTACTS
Chercheurs
Christophe Lécuyer, laboratoire Paléoenvironnements et paléobiosphère, Professeur de l’IUF
T 04 72 44 83 76
[email protected]
Eric Buffetaut, laboratoire Paléoenvironnements et paléobiosphère
T 06 26 36 69 97 et 01 45 84 81 45
[email protected]
Gilles Escarguel, laboratoire Paléoenvironnements et paléobiosphère
T 04 72 44 84 24
[email protected]
INSU
Guillaume Duveau
T 01 44 96 43 13
[email protected]
Presse
Muriel Ilous
T 01 44 96 43 09
[email protected]