1 Tribunal Spécial pour le Liban Bureau de la Défense Séminaire

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1 Tribunal Spécial pour le Liban Bureau de la Défense Séminaire
Tribunal Spécial pour le Liban Bureau de la Défense Séminaire « Défendre devant les juridictions pénales internationales : Plaider coupable ou non coupable » Allocution du Président de l’Ordre des avocats de Tripoli, Me Antoine Ayrout, à l’occasion de l’ouverture du séminaire sur le Tribunal spécial pour le Liban organisé à l’hôtel Royal Dbayeh 4 Mars 2010 Monsieur le Chef du Bureau de la Défense, Me François Roux, Madame la Présidente de l’Ordre des avocats de Beyrouth, Me Amal Fayez Haddad, Mes chers confrères, Ce séminaire ayant pour thème « Défendre devant les juridictions pénales internationales » revêt une importance capitale. En effet, l’assassinat de l’ancien Premier Ministre Rafik Hariri a secoué le Liban et aurait pu, si le Liban n’était pas ce phénix renaissant sans cesse de ses cendres et vivant du sang de ses martyrs dont sa terre est gorgée, anéantir le pays et notre formule libanaise, qui n’a quasiment pas sa pareille dans le monde. L’importance de ce séminaire, organisé à l’initiative du Bureau de la Défense auprès du Tribunal spécial pour le Liban, est incontestable puisqu’il s’agit d’un séminaire de formation spécialisé destiné aux Barreaux libanais, avec la participation du Bâtonnier de Tripoli et de la Présidente de l’Ordre des avocats de Beyrouth. Depuis son élection, celle‐ci a travaillé sans relâche comme pour demander que le soleil brille toujours sur le Liban et que le jour ne décline tant que la profession judiciaire ne sera pas affranchie des maux qui la minent. Je partage avec Beyrouth l’espoir de panser les plaies rongeant la justice libanaise afin que la profession regagne courtoisie, respect mutuel et intégrité par le savoir, la coopération, l’expérience, la dignité et l’impartialité, et que vienne enfin le règne de la justice. Mes chers confrères, Hier encore, la rue libanaise était divisée quant à la création du Tribunal spécial pour le Liban et au rôle joué par l’Organisation des Nations Unies en particulier, compte tenu de ses échecs successifs à défendre nos causes nationale et arabe, comme en témoignent les nombreuses résolutions restées lettres mortes. Ces échecs se manifestent notamment par l’incapacité des Nations Unies à sanctionner nombre de crimes contre l’humanité et de génocides qu’Israël continue de commettre, allant de la migration forcée des Palestiniens en passant par l’agression tripartite de l’Égypte, la guerre de 1967, les 1 invasions israéliennes du Liban en 1978 et 1982, jusqu’aux massacres de Qana et de Gaza et la guerre de 2006 contre le Liban. Aucun de ces crimes n’a fait l’objet de poursuites pénales internationales équitables et pourtant, la nation entière s’est mobilisée, en dépit des clivages politiques, en faveur de la création d’un tribunal spécial pour le Liban. D’emblée, la nation, toute la nation, s’est accordée sur la nécessité de faire la lumière sur ce crime, compte tenu du rôle emblématique du Premier Ministre Hariri au Liban et des desseins poursuivis par les auteurs de cet assassinat. Mes chers confrères, Le droit diffère de la politique. Ainsi, lorsqu’un tribunal spécial pour le Liban est créé en vertu d’une résolution du Conseil de sécurité afin de révéler la vérité et de sanctionner les auteurs du crime, tout le monde s’accorde à penser que la décision est politique et des divergences naissent par crainte d’une politisation. En revanche, pour ce qui est du rôle du Tribunal, on s’accorde sur la nécessité de rendre justice à l’échelle internationale. À cet effet, la Défense est investie d’une mission non négligeable dans la préparation des affaires portées devant le Tribunal, notamment par l’examen de dizaines de milliers de documents, la protection des droits de la Défense, y compris la garantie du droit de l’accusé à l’assistance d’un conseil, en fournissant l’appui, l’aide et les avis juridiques nécessaires aux conseils de la Défense et en s’adressant aux juges concernant des questions d’intérêt général pour la Défense. En outre, le Bureau de la Défense doit s’acquitter de sa mission en toute indépendance s’agissant de la charge de la preuve et des règles de procédure afin de garantir l’égalité des armes. N’oublions pas à ce titre la conscience du juge, guidée par l’équité, le savoir, l’expérience et l’impartialité, afin que la justice internationale prélude à l’avènement d’une communauté internationale équitable. Il ne fait aucun doute, mes chers confrères, que les questions de la protection et de la crédibilité des témoins, de la charge de la preuve, des jugements par défaut, des droits de l’accusé et de l’existence d’un bureau de la Défense seront longuement examinées et débattues au cours de ce séminaire, organisé avec la contribution d’avocats et d’experts auprès de juridictions pénales internationales et à l’initiative du Bureau de la Défense du Tribunal spécial pour le Liban. Ce séminaire permettra à nos confrères participants de comprendre les principes, les règles, les procédures et la conduite pratique des procédures devant le Tribunal. Nous espérons qu’il servira le travail des avocats plaidant devant les juridictions internationales et leur sera bénéfique sur le plan professionnel. Enfin, je souhaite que cette rencontre soit couronnée de succès et qu’elle puisse éclairer de nombreuses questions et problématiques pour faire triompher la culture du droit sur la culture de la politique au sein du Tribunal spécial pour le Liban et parvenir enfin à une justice équitable. 2