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6REPÈRES ET TENDANCES 4CONJONCTURES
4DOSSIER
4LIVRES ET IDÉES
POLITIQUE MONÉTAIRE
pHilippe d’arVisenet *
La bulle, la croissance
et la Banque
Les fluctuations de la Bourse et du marché immobilier, on le sait, ont un impact sur la croissance.
Mais leurs canaux de transmission prêtent souvent
à des simplifications excessives. ainsi, l’effet de
richesse (les détenteurs d’actifs dont les prix
montent sont incités à dépenser davantage) prend
des
formes
très
diverses,
et se révèle beaucoup plus puissant quand il est lié
à l’immobilier qu’à la Bourse. quant à l’ajustement
des bilans (le nécessaire désendettement), il est
d’autant plus rude que les anticipations optimistes
ont été fortes. La politique monétaire doit-elle,
comme certains le recommandent, intégrer dans
ses objectifs le suivi des prix d’actifs ? on peut en
douter. D’abord parce qu’il n’est pas facile de
prévoir, ou même d’identifier une bulle. Et aussi
parce que les expériences dans ce domaine - celle
de la Banque du Japon notamment - ont été peu
concluantes. Le principal risque dont doivent se
L
es mouvements à la hausse ou à la
baisse de la Bourse et de l’immobilier ont un impact sur la croissance économique. La meilleure illustration en est
la crise que traversent actuellement les
économies développées, conséquence
directe de l’explosion en 2000 de la
bulle boursière sur les nouvelles technologies. Au départ, la hausse des prix
d’actifs apporte du pouvoir d’achat supplémentaire aux ménages, que la plusvalue soit réalisée ou seulement latente :
c’est l’effet de richesse. Ce sentiment
d’enrichissement pousse les acteurs
* Directeur des Etudes économiques de BNP-Paribas.
économiques à dépenser ou investir
davantage. Inversement, quand les prix
de la Bourse ou de l’immobilier se
mettent à chuter, les détenteurs de ces
actifs (particuliers ou entreprises) sont
contraints d’ajuster leurs bilans, c’est-àdire de réduire fortement leurs dépenses pour compenser les pertes sur leurs
portefeuilles – ce qui affecte l’activité
économique.
Paradoxalement, les bulles sur les prix
d’actifs peuvent apparaître et se développer avec une inflation qui reste maîtrisée. Un excès de liquidité gonfle les
prix d’actifs, ce qui débouche sur un
abaissement du coût du capital, et en
conséquence sur une stimulation de
l’investissement. L’accélération des gains
de productivité et l’extension des capacités qui en résultent contribuent
à maintenir l’inflation sous contrôle,
tandis que l’effet de richesse soutient
la demande. De telles évolutions,
conjuguées à une faible inflation et à une
politique monétaire rendue du même
coup plus crédible, peuvent être perçues
comme durables et soutenables, ce qui
est propre à entretenir le gonflement
d’une bulle. Les prix d’actifs se mettent
alors à évoluer de façon complètement
déconnectée des fondamentaux économiques.
Vient un jour où la bulle éclate, ce qui
s’accompagne éventuellement de pressions déflationnistes. La rigidité des salaires renchérit alors le coût réel du travail
(puisque l’inflation a fortement diminué),
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POLITIQUE MONÉTAIRE
ce qui est défavorable à l’emploi et in fine
à la demande. La politique monétaire risque de se trouver impuissante à ranimer
la croissance si les taux d’intérêt nominaux sont déjà proches de zéro. La
disparition de l’inflation aboutira même
à renchérir les taux d’intérêt réels. Dans
un tel contexte déflationniste, les instruments traditionnels perdent en efficacité : c’est ce qui s’est passé au Japon
dans les années 90. Cette difficulté à
contrer les effets désastreux de l’éclatement d’une bulle conduit à s’interroger
sur la pertinence, pour la politique
monétaire, de prendre en compte les
prix d’actifs dans ses objectifs afin d’éviter, en amont, la formation des bulles.
que qui accompagne l’éclatement d’une
bulle boursière prend trois trimestres
pour se matérialiser, alors qu’il apparaît
immédiat en cas d’éclatement d’une
bulle immobilière.
ladiVersitÉdeseffets
dericHesse
L’
envolée de la Bourse à la fin des
années 1990, puis son effondrement, ainsi que le dynamisme persistant
du marché immobilier et les interrogations sur sa durabilité ont suscité une
vaste littérature. Pour cerner l’importance de l’effet de richesse, plusieurs
paramètres méritent l’attention. Nombre d’entre eux sont difficiles, voire
Le Fonds monétaire international, dans
impossibles à quantifier. La richesse
une étude récente1, a recensé, depuis
est-elle un objectif en soi ? La hausse
1959, 52 éclatements de bulles boursiè(ou la baisse) de la richesse est-elle
res dans 19 pays, l’éclatement étant
perçue comme durable ou comme seudéfini par une baisse d’au moins 37 %
lement temporaire ? Qu’en est-il du
entre le pic et le point bas des cours. En
souci de transmission patrimoniale ?
moyenne, la baisse est de
Quel est le rôle de
45 % et s’étend sur une
la transmission de l’informaLes éclatements
dizaine de trimestres. En ce
tion, sachant que l’informaqui concerne l’immobilier,
tion boursière est plus
de bulles sont
20 épisodes d’éclatement
développée que l’informaplus fréquents
de bulles (baisse de plus de
tion immobilière ? Quel est
dans l’immobilier
14 %) ont été identifiés
l’impact du contexte finandepuis 1970 sur 14 pays. En
cier (financement plutôt
qu’à la Bourse :
moyenne, la baisse est de
bancaire ou plutôt axé sur
40 % des bulles
30 % et s’étend sur 16 trile marché financier) ? L’exaimmobilières
mestres. Les éclatements de
men de ces quelques quesbulles sont plus fréquents
tions amène à dépasser la
sont suivies
pour l’immobilier que pour
conception simpliste selon
d’un éclatement,
la Bourse (40 % des bulles
laquelle le public consomme
contre 25 %
immobilières sont suivies
plus, simplement parce qu’il
d’un éclatement, contre
se « sent » plus riche.
dans le cas de
25 % dans le cas de booms
booms boursiers.
L’évolution de la richesse
boursiers selon la définition
résulte, d’une part, d’un effet
retenue plus haut). La transprix et, d’autre part, de l’évolution des
mission des krachs immobiliers à la
flux d’accumulation d’actifs. Le premier a
Bourse apparaît plus fréquente que celle
été dominant dans les années 1990 : au
de la Bourse à l’immobilier.
cours de cette période, année après
année, alors que les ménages américains
Un aperçu de l’impact économique est
étaient vendeurs nets d’actions, leur
fourni par la comparaison de la croisrichesse en actions augmentait.
sance et de ses composantes avant,
puis après le pic des prix d’actifs. En
L’effet de richesse boursière peut revêtir
moyenne, trois ans après l’éclatement
de multiples aspects : richesse réalisée,
d’une bulle boursière, le PIB se situe 4 %
richesse potentielle (plus-values latentes
en dessous du sentier observé trois ans
sur actions ou fonds de pensions), qui
avant le pic, et 8% en dessous dans le cas
peut entraîner aussi un surcroît de
de l’éclatement d’une bulle immobilière.
consommation dans la mesure où elle
En moyenne, le ralentissement économi-
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annonce des revenus futurs plus élevés ;
stocks options ; plus grande capacité
d’emprunt (sur la base d’un patrimoine
plus important) ; enfin, la bonne tenue de
la Bourse peut contribuer à un optimisme général (même chez ceux qui ne
détiennent pas d’actions) sur la situation
économique et l’évolution du marché du
travail, ce qui stimulera la dépense.
On imagine bien que les propensions à
consommer attachées à ces différents
éléments ne sont pas identiques. Intuitivement, par exemple, la propension à
consommer liée à des plans de retraite
est vraisemblablement plus faible que
celle liée à la détention directe d’actions.
De la même manière, une pluralité de
canaux de transmission doit être prise
en compte en ce qui concerne la
richesse immobilière : richesse réalisée
en cas de revente du bien, ou seulement
potentielle ; moindre contrainte de liquidité : les marchés financiers développés
permettent de s’endetter ou d’augmenter son endettement sur la base d’une
augmentation de la valeur du collatéral.
Ces effets positifs peuvent être contrebalancés par un effet de substitution :
la hausse des prix de l’immobilier peut
conduire à acquérir un logement plus
modeste ou à modérer la consommation pour les accédants.
Il est plus facile de réaliser des gains
boursiers que des gains immobiliers, car
les actions permettent une division de la
richesse et se négocient sur des marchés liquides. Cependant, dans plusieurs
pays, il est devenu plus aisé d’emprunter
sur la base de la valorisation accrue du
bien immobilier collatéral (home equity
loans) et de refinancer les anciens emprunts à des conditions devenues plus
attrayantes (mortgage refinancing). Les
cours des actions sont plus volatils : en
conséquence, il est plus difficile, pour
leurs détenteurs, de cerner la nature
temporaire ou permanente des modifications de prix. De ce point de vue, le
public apparaît plus « prudent » quand il
1 « When bubbles burst », World economic
outlook, avril 2003.
LA BULLE, LA CROISSANCE ET LA BANQUE
s’agit d’emprunter contre un collatéral
les anticipations optimistes. Les bilans
boursier que contre un collatéral immosont perçus comme sains, le risque appabilier. Cet élément suggère que la proraît faible, ce qui débouche sur une
pension à consommer à
décrue des coûts de finanpartir de la richesse bourcement (mécanisme de
L’effet de
sière devrait être moins élel’accélérateur financier). Si un
richesse
vée que la propension liée à
choc survient, cette évoluimmobilière est
la richesse immobilière. En
tion sera renversée, avec
outre, comme le logement
des conséquences négatives
à peu près six
est largement financé par
d’autant plus marquées que
fois plus marqué
emprunt, la hausse des prix
le levier aura été plus
que l’effet
immobiliers apporte un
fortement utilisé. L’ajusteretour supérieur à celui qui
ment des bilans et le désende richesse
serait associé à une même
dettement deviennent alors
boursière.
hausse des prix d’actions
une priorité. Les estimations
(par une sorte d’effet de
disponibles montrent que le
levier). La distribution de ces deux types
poids de la dette (rapportée à la valeur
de richesse dans la population joue dans
de marché de la firme ou aux actifs de
le même sens : la richesse boursière est
l’entreprise) pèse négativement sur l’innettement plus concentrée, sur des
vestissement, et de façon statistiquement
groupes dont la propension à épargner
significative.
est plus élevée.
Les effets ne sont cependant pas les
Pour résumer, K. Case, J. Quigley et
mêmes selon les systèmes de financeR. Schiller2 concluent, sur la base d’une
ment. Ludwig et Slock3 et le FMI4 distinanalyse économétrique portant sur 14
guent les pays où domine le financement
pays de l’OCDE et sur les 50 Etats amépar les marché (Etats-Unis, Royaumericains, à un effet de richesse immobilière
Uni, Suède, Pays-Bas, Australie, Canada,
à peu près six fois plus marqué que l’effet
Irlande) de ceux où le financement est
de richesse boursière.
majoritairement bancaire (France,
Allemagne, Italie, Japon, Norvège,
Espagne, Belgique, Danemark, Finlande).
aprèslabulle,
Dans
le premier groupe, les ménages
l’ajustementdesbilans
détiennent une plus grande partie de
autre canal de transmission des
leur richesse sous forme d’actions (la
bulles et de leur éclatement sur l’accapitalisation boursière ramenée au PIB
tivité économique passe par les bilans. La
est plus forte, de même que la proporchute des prix boursiers ou immobiliers
tion des ménages détenteurs directs
après une période de boom entraîne un
d’actions). L’impact de l’effet de richesse
ralentissement à cause d’un ressery apparaît plus marqué, aussi bien pour la
rement des dépenses, et particulièrerichesse boursière que pour la richesse
ment de l’investissement. V. Reinhart a
immobilière (effet des renégociations
montré que le prix relatif des actions
hypothécaires). La vitesse d’ajustement
avait un effet plus sensible (environ deux
de la consommation à son niveau désiré
fois plus élevé aux Etats-Unis entre 1985
(eu égard à la richesse) est également
et 1996) sur les dépenses en investisplus élevée.
sements que sur la consommation.
Par rapport aux précédentes bulles des
En effet, les périodes de bulle se caractéprix d’actifs, le dernier épisode, marqué
risent classiquement par une hausse de
par l’éclatement de la bulle Internet en
l’endettement et de l’investissement. Les
2000, présente certains traits spécifianticipations favorables sur les résultats
ques : taux d’intérêt plus bas avant l’éclastimulent la dépense en capital et le jeu
tement et faible proportion de la dette
de l’effet de levier. Le « ratio q » de Tobin
courte ; hausse plus forte du « ratio q »
(rapport de la valeur de marché des firde Tobin ; forte détérioration de la profimes à leur valeur de remplacement) protabilité - qui plus est très concentrée sur
gresse. La hausse de la demande valide
certains secteurs, particulièrement les
L’
nouvelles technologies. Parallèlement, le
recours des entreprises à des financements plus diversifiés, joint à une
meilleure gestion des risques, a limité les
conséquences négatives pour les banques. Le retournement du mécanisme
de levier a commencé plus rapidement
aux Etats-Unis qu’en Europe, et son
impact a été accentué par la faiblesse de
l’inflation (plus l’inflation est forte, plus la
dette est allégée).
peut-onprÉVoiret
prÉVenirlesbulles?
C
omment détecter une bulle ? Toute
la
difficulté
est
d’estimer
le bon niveau d’équilibre des prix des
actifs par rapport aux fondamentaux.
Mais il n’est pas toujours facile d’appréhender correctement la situation réelle
de l’économie. D’où le risque de surestimer ou au contraire de sous-estimer
l’importance d’une bulle. Pour surmonter
cet obstacle, certains recommandent
de prendre en compte des indicateurs
avancés d’éclatement des crises. A titre
d’illustration, le PER5 moyen du SP 500
américain6, calculé de 1954 à 1996, en
excluant la période de forte inflation des
années 1970 et du début des années
1980, ressort à 16,7 selon les calculs du
FMI. Or, le PER a atteint 32 en 1999,
niveau qui correspondait à des performances de croissance nettement et
durablement supérieures à celles enregistrées (de 25 à 50 % selon l’hypothèse
retenue pour la prime de risque).
La déviation de certains indicateurs par
rapport à leur tendance longue au-delà
d’un certain seuil donne en effet une
mesure du risque d’éclatement d’une
crise à différents horizons (un an, deux
2 « Comparing wealth effects : the stock
market versus housing market », NBER,
N°8606, 2001.
3 « Impact of changes in stock prices and
house prices on consumption in OECD
countries », IMF working paper, WP/02/01,
Janvier 2002.
4 « When bubble burst », article précité.
5 Price earning ratio : cours de l’action rapporté
au bénéfice par action.
6 Indice boursier Standard & Poors, prenant
en compte 500 valeurs.
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POLITIQUE MONÉTAIRE
ans). Procédant à une démarche de ce
type, Borio et Lowe7 retiennent comme
indicateurs la hausse des prix des
actions, le taux d’investissement et le
ratio du crédit au PIB. Une déviation de
ce dernier de 4 points apparaît comme le
signal le plus performant.
mais contribuait aussi à gonfler la bulle.
Après l’éclatement, les forces déflationnistes n’ont pas rencontré une vraie
résistance, la cible d’inflation implicite,
tirée de ces estimations, a même baissé
d’une période à l’autre, mais les préoccupations quant à l’évolution boursière se
sont intensifiées. En fait, la politique de la
Au total, on peut conclure, sur la base de
Banque du Japon a été menée sur la base
ces recherches, que les seules déviations
d’anticipations d’inflation qui se sont
des prix d’actifs ne constituent pas un
révélées ex post trop pessimistes, ce qui
guide très fiable pour la préaurait dû plaider pour une
diction des crises. Elles
prudence accrue contre les
Il est plus difficile
apportent simplement un
risques de déflation.
pour la politique
éclairage, combinées avec
d’autres indicateurs.
Pour Bernanke et Gertler,
ces estimations suggèrent
Au-delà de la difficulté à
qu’un ciblage de l’inflation,
à une bulle quand
identifier les excès, la politiassocié à une politique
l’environnement
que monétaire doit-elle
monétaire agressive, est
cibler directement les prix
approprié pour gérer les
est peu
d’actifs ? Il n’est pas évident
chocs économiques, y
inflationniste.
de suivre avec un seul
compris ceux qui résultent
instrument, en l’occurrence
des prix d’actifs. Des exerles taux d’intérêt, deux objectifs : les
cices de simulation, menés par ces
prix d’actifs et les prix des biens et sermêmes auteurs sur la base d’hypothèse
vices, lesquels peuvent fort bien connaîcontrastées sur les règles de politique
tre, comme on l’a vu dans la période
monétaire, aboutissent à une conclusion
récente, des évolutions divergentes.
similaire : les politiques agressives s’attaLutter contre la hausse des prix d’actifs
quant vigoureusement aux anticipations
dans un contexte de faible inflation peut
d’inflation sont stabilisantes dans un
aboutir, en cas de non éclatement d’une
scénario marqué par le gonflement puis
crise, à mettre en cause la crédibilité de
l’éclatement d’une bulle. Une politique
la politique monétaire, qui sera perçue
accommodante conduit au contraire à
comme ayant freiné l’économie de
entretenir la surchauffe.
façon injustifiée.
De plus, une politique qui ciblerait les
Pour aller plus loin dans l’analyse, on
cours boursiers apparaît déstabilisante,
peut examiner le comportement des
tant pour la croissance que pour l’inflabanques centrales dans le passé. Dans
tion. Au total, avec une réponse forte
quelle mesure ont-elles ciblé les prix
aux mouvements anticipés de l’inflation,
d’actifs, et avec quel succès ?
il y a peu à gagner à cibler en outre les
évolutions de prix d’actifs.
Une comparaison de la politique de la
Réserve fédérale américaine et de la
leVraidanGer:
politique de la Banque du Japon depuis
ladÉflation
1979, a été proposée par B. Bernanke et
l faut, enfin, relever un point important :
M. Gertler8. L’examen des résultats montre que la Fed a réagi à la déviation entre
il est plus difficile pour la politique
l’inflation et la cible de façon marquée et
monétaire d’essayer de réagir à une bulle
stabilisante. En revanche, elle n’a pas réagi
quand l’environnement est peu inflationà l’évolution de la Bourse. Les estimaniste. Une désinflation non contrôlée
tions effectuées pour la Banque du Japon
(suite à un choc sur les actifs, par exemapportent un message très différent :
ple) peut conduire à des taux d’intérêt
avant l’éclatement de la bulle, la Banque
très faibles. Comme les taux sont bornés
du Japon s’intéressait à la réalisation de
par la limite zéro, la politique monétaire
son objectif de lutte contre l’inflation,
risque de devenir peu efficace, et la défla-
monétaire
d’essayer de réagir
tion peut s’enraciner avec la hausse des
taux réels. De fait, le risque de voir l’éclatement d’une bulle d’actifs déboucher sur
des tensions déflationnistes, ou même sur
une situation de déflation, s’est accru
dans la période récente avec la décrue
générale de l’inflation : la proportion de
pays enregistrant une hausse des prix
annuelle inférieure à 1 % est passée de
moins de 10 % dans la période 19851990 à plus de 22 % en 2000-2002.
Comme il est plus facile de lutter
contre l’inflation que contre la déflation
– les risques sont, en d’autres termes,
asymétriques –, la réponse de politique
monétaire devrait être, elle aussi,
asymétrique. Plus précisément, cela
signifie qu’éviter la déflation suppose
une politique préventive, une politique
réactive étant suffisante pour lutter
contre l’inflation. Cette idée a d’ailleurs
été suggérée par la Fed au début de
2003.
Les recherches récentes suggèrent qu’il
serait dangereux de cibler une inflation
très inférieure à 2 %. Les simulations
montrent que la probabilité de se trouver
confronté à la contrainte de taux zéro est
négligeable pour une cible égale ou supérieure à 2 %. Elle devient significative et
augmente rapidement quand la cible se
rapproche de 1 %. S’il est un risque lié aux
prix d’actifs dont les banques centrales
doivent se préoccuper, il est sans doute
de ce côté-là. g
I
Sociétal N° 43
g
1er trimestre 2004
7 « Assets prices, financial and monetary
stability : exploring the nexu », BIS, Economics
and monetary department, 2002.
8 « Monetary policy and assets prices volatility »,
Federal reserve bank of Kansas city, Economic
review, quatrième trimestre 1999.

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