Une petite iconographie de Paul

Une petite iconographie de Paul
n homme de petite taille, à la tête chauve, aux jambes arquées, aux
sourcils joints, au nez légèrement busqué, l’air rayonnant ». Telle est
l’image que les gens d’Asie avaient gardé de Paul et qu’ils se
transmirent fidèlement de génération en génération, pendant plus d’un siècle. Elle
est reprise dans un roman chrétien du IIe siècle : Les actes de Paul.
Portrait quelque peu stéréotypé de Sémite, il inspirera néanmoins directement le
premier art chrétien.
«U
Paul se signalait évidemment comme étranger dans la société gréco-romaine : il
était si basané qu’il pouvait passer pour un Egyptien ; il portait la barbe,
contrairement aux Romains de l’époque. Paul insista lui-même sur ses misères
physiques et sur son vieillissement prématuré après les épreuves d’Ephèse.
Cependant, il n’avait rien d’un avorton au sens propre du terme, lui qui pouvait
nager une nuit et un jour en pleine mer après un naufrage.
Dans les Actes de Paul, on se mit à broder sur les données de Luc pour restituer un
être de chair et de sentiments, un être surnaturel même tel qu’en attendaient les
Grecs. Cette élaboration, si fantaisiste qu’elle soit, est en elle-même significative du
charisme de Paul et de son potentiel affectif.
On ne possède aucun « vrai » portrait
de Paul. Vêtu de la tunique et du
pallium, la physionomie de Paul est
fixée depuis le Ve siècle : visage
noble, cheveu rare et longue barbe
noire, suivant la description d’Eusèbe
de Césarée (IIIe-IVe siècle) ; il a pour
attributs le livre, par référence à ses
épîtres
écrites
aux
premières
communautés chrétiennes, et à
siècle,
l’épée,
partir
du
XIIIe
instrument de son martyre.
Paul est souvent représenté en
évangéliste, écrivant ses Épîtres. Il
apparaît aussi enseignant (Lucas de
Leyde, triptyque du Jugement
dernier,
1526-1527,
musée
de
Leyde) ; à l’arrière-plan figurent des
navires. Tous les épisodes de sa vie,
de ses voyages, ont été illustrés
(fresques, XIIe siècle, chapelle SaintAnselme,
cathédrale
de
Cantorbéry).
Sklerijenn n° 47
9
Saint Paul, persécuteur converti, infatigable voyageur, fondateur de nombreuses
communautés, écrivain et prédicateur passionné n’a pas manqué d’inspirer de
nombreux artistes parmi les plus grands au fil des siècles.
La conversion sur le chemin de Damas
L’art occidental a multiplié les images de la conversion de saint Paul. Qui n’a jamais
vu Saül ébloui tombant de son cheval ?
« Il fut tout d’un coup environné et frappé d’une lumière du ciel. En tombant par
terre, il entendit une voix qui lui disait : Saül, Saül pourquoi me persécutez-vous ? » Ac
9, 3-4.
Cette image est cependant totalement absente des icônes grecques ou russes.
Lors de sa rencontre avec le Christ, Saül est
à pied (mosaïque de la chapelle Palatine
de Palerme), ou à cheval, ou précipité à
bas de sa monture.
½ Il est désarçonné, gisant sur le dos, au
pied de son cheval pommelé dans ce
tableau de Caravage (1601) conservé dans
l’église Sainte-Marie-du-Peuple à Rome.
Ici, dans la fresque de Michel-Ange
de la chapelle Palatine du Vatican.
il est aveuglé par un rayon incandescent qui représente à la fois
l’éclair divin et la voix du Christ
Souvent, le Christ persécuté par Saül
est visible dans les nuées, sous la
forme du Ressuscité avec la Croix. ¾
Sklerijenn n° 47
10
La prédication
Paul est souvent représenté prêchant et enseignant…
Paul prêche à Éphèse et à Athènes
Raphaël, carton de tapisserie, 1515, Londres, Victoria and Albert Museum)
Prédication de l'Apôtre Paul à Damas
Monastère de Visoki Ducani,
Union Serbie-Monténégro
(fresque, 1348-1350)
Prédication de saint Paul,
gravure de Gustave Doré
Sklerijenn n° 47
11
Paul en prison
Saint Paul en Prison
Rembrandt, 1627.
Staatsgalerie, Stuttgart
La décollation
La tête aux yeux bandés, coupée, aurait rebondi trois fois sur le sol et fait jaillir trois
fontaines. La décollation apparaît dans un bas-relief (façade de l’église de Ripoll,
Catalogne) ; elle est figurée par Holbein l’Ancien (Scènes de la vie de saint Paul,
1503-1504, musée d’Augsbourg).
Ici, elle est représentée sur une enluminure, dans une
Bible médiévale.
Ici, encore dans un détail du tombeau
du pape Sixte IV, à Rome.
M
Martine Kerfourn
D’après un dossier du diocèse de Rouen
Sklerijenn n° 47
12