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Travailler le fruit sénégalais Coumba mère de famille sénégalaise, se rend à notre rendez-vous habillée d’une superbe robe africaine turquoise. Sous un soleil radieux, attablés en bord de mer sous les cocotiers, le cadre de notre entrevue est idyllique. Nous sommes à Mbour au Sud de Dakar, sur la ‘petite côte’ du Sénégal. Coumba y a développé une petite entreprise de transformation de fruits. Son témoignage est captivant car il est profondément ancré dans la réalité quotidienne des africains. |Thibaut Dehem & Christophe De Beukelaer à Mbour (Sénégal) Le fruit, un produit saisonnier Coumba Diop Fondatrice de G.I.E Kawral Mère de famille de 5 enfants. G.I.E Kawral L’idée d’entreprise de Coumba vient d’un constat simple. Chaque fruit est disponible en quantité énorme lors de sa récolte. Cette abondance soudaine condamne une partie des récoltes à pourrir ou à nourrir le bétail. Le reste de l’année, le fruit reste indisponible. Ce déséquilibre fait jaillir chez Coumba l’idée de transformer le fruit, par exemple en confiture, pour le conserver. Le modèle est le suivant. La surproduction de fruit se vend très bon marché en fin de saison. Elle y achète les surplus de mangue, bissap, ananas, et autres pour en faire des confitures, des jus, ou encore des fruits secs. Sous cette forme, elle stocke ces fruits et les commercialise durant l’année entière. Choisir une structure Fondé en 2003 CA 3.000.000 CFA (environ 4.500€) Pour débuter cette entreprise de confiture en 2003, Coumba réunit dix femmes. Ce type d’association est habituelle ici et permet aux femmes de jouer un rôle majeur dans la société sénégalaise. En s’associant à des voisines ou des connaissances, un groupe de femmes se donne les moyens de gérer une coopérative de production ou une ‘tontine’ de microcrédit. Dans le groupe « Car ils adorent manger très sucré » de Coumba, elles mettent chacune 2.000 sait-elle. francs CFA, l’équivalent de 3 euro, en L’entreprise est rentable. « Je ne commun. « Mais il s’est vite avéré qu’on pourrais pas en faire vivre toute la n’avait pas la même vision. La confiture famille. Surtout que je réinvestis l’argent ne fait pas partie du petit déjeuner gagné. Mais cela ma permet d’offrir de sénégalais. Elles n’y croyaient pas. » se temps en temps un petit plus à mes filles, souvient-elle. Coumba décide alors de se une robe, un bijou. » sourit-elle. Ses séparer du groupe et commence la enfants sont au cœur de la création de production de son entreprise. Etre femme entrepreneur… confiture seule, Au lieu d’aller avec l’aide de sa elle-même à « Ce n’est pas facile ! Il y a des exigences famille. l’une ou l’autre sociales et familiales. Mais cela est en A l’arrière de la formation, elle train de changer…» maison, deux envoie étroites pièces sont construites où elle régulièrement une de ses filles. Elle installe son sommaire atelier. Elle nous souhaite les impliquer au maximum dans montre aussi, fièrement, ses diplômes ce petit business. « Cela pourra au moins obtenus suite à quelques cours de leur servir d’exemple pour leur montrer comptabilité et de transformation de qu’elles peuvent s’en sortir dans la vie fruits. Elle y a appris à diversifier son en comptant sur elles-mêmes », insiste-toffre. En plus de la confiture, Coumba elle. propose de plus en plus des fruits secs, des jus,… Ses clients ? Principalement Grandir et développer l’activité des hôtels dans les environs. Avant, Avec un chiffres d’affaires de 3 millions ceux-ci se fournissaient de francs CFA, l’équivalent de 4.500€, sur le marché la production de Coumba n’en est qu’à d’importation. Un gâchis ses débuts. Elle souhaite développer quand on connait la l’activité malgré les obstacles. « La saveur des mangues principal difficulté réside dans la nonlocales ! En plus de ces différenciation entre travail et famille. clients fidèles, Coumba Au Sénégal la famille, les voisins, les est convaincue que les Sénégalais amis sont omniprésents. Leurs visites viendront bientôt acheter ses produits. fréquentes m’empêchent souvent de travailler. Je devrais avoir mon propre lieu de travail.» Dans un nouveau lieu de travail, Coumba pense pouvoir augmenter la production et embaucher un ou deux employés. Car les clients ne manquent pas ! Mais pour cela il faut de la liquidité. L’obtention de financement n’est pas facile au Sénégal. Les intérêts sont élevés et il y a le problème de la garantie. Malgré sa soif d’apprendre, Coumba a du arrêter ses études après l’obtention du BAC. Dans son ethnie, une femme n’est pas autorisée à aller plus loin. Plutôt, elle se doit de se marier et de suivre son mari dans sa famille. Avec cinq enfants, Coumba consacre beaucoup de temps aux tâches ménagères. Ce sera le second obstacle au développement de son entreprise. « Préparer le mil, passer le balais et s’occuper des enfants sont des tâches quotidiennes qui ont priorité sur une commande de confiture. Mon mari n’est pas complaisant. Parfois je me dis que je laisserais même bien tomber le mariage pour développer mon activité », nous confie Coumba, défiant décidément l’image attentiviste souvent attachée à la société africaine. Questions & Discussion 1) Si vous décidiez de développer la même activité que Coumba mais en Belgique. Cela fonctionnerait-il ? Rencontreriez-vous les mêmes obstacles qu’elle? Ou d’autres ? Réfléchissez en termes de ressources, de concurrence, de coûts, de clientèle,… Pourriez-vous vivre de cette activité ? Faites une petite prévision en considérant que vous travaillez seul(e) 5 jours par semaine. 2) Discutez les différentes structures d’une société en Belgique (SA, SPRL, coopérative etc.) 3) Mettez en exergue le rôle de la femme dans la société africaine. Dans quelle mesure est-ce différent chez nous en Europe ? Les femmes sont elles amenées à jouer un rôle plus important dans l’économie actuelle ? Mot-clés : Stock, microcrédit, liquidité, garantie, surproduction, comptabilité, rentable, un fond de roulement, un apport.