SyStèmE dE filtRation d`aiR : Suivi d`un an SuR tRoiS fERmES

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SyStèmE dE filtRation d`aiR : Suivi d`un an SuR tRoiS fERmES
RECHERCHE
Francis Pouliot, ingénieur, Valérie Dufour, chargée de projets, Marie-Aude Ricard,
ingénieure junior, Centre de développement du porc du Québec inc.
BÂTIMENTS PORCINS
Système de filtration
d’air : suivi d’un an sur
trois fermes
À l’heure où tous s’ingénient à traquer toutes les sources
d’économie à la ferme, il semble que la filtration d’air à l’entrée
des bâtiments associée à la mise en place de mesures de
biosécurité permette de réduire le risque global de contamination
par le syndrome reproducteur et respiratoire porcin (SRRP),
bien qu’il ne s’agisse pas d’une garantie à toute épreuve.
Dans la même perspective d’économie, il faut aussi savoir que le coût
des systèmes de filtration d’air a baissé
significativement depuis les cinq dernières années. Si l’on considère les
coûts que peut représenter une crise
sanitaire (voir l’encadré), la filtration
d’air accompagnée de mesures de
biosécurité présente un potentiel de
rentabilité important, particulièrement
dans une zone où la population porcine est de forte densité.
C’est ce que permettent de
conclure les résultats d’un projet
conduit par une équipe du Centre de
Douloureuse
facture des
problèmes
sanitaires
Les pertes reliées à une crise de
SRRP ont été estimées (Mussell,
2010) à 257 $/truie/an pour
une entreprise où le SRRP est
présent de manière chronique,
mais elles peuvent atteindre
464 $/truie pour une crise
aiguë majeure touchant une
entreprise naisseur-finisseur,
par rapport à une entreprise
exempte de SRRP.
42. Porc Québec
Juin 2011
développement du porc du Québec
inc. (CDPQ) terminé récemment. Le
projet en question s’intitulait « Mise au
point sur une ferme porcine d’un système de filtration d’air, muni d’agents
virucides/bactéricides afin d’éviter la
transmission aérienne de pathogènes ».
Suivi des plans
économique et
d’ingénierie
Trois fermes québécoises, sur lesquelles
le système de filtration d’air de Noveko
a été installé, ont été suivies pendant
une année (2009-2010). Dans les prochaines lignes, seul le suivi technicoéconomique sera abordé, soit celui
effectué sur les fermes A et B. Ce suivi a
permis de mesurer l’impact du système
de filtration d’air sur l’ambiance à l’intérieur des bâtiments en plus de documenter les entretiens à effectuer et les
coûts du système de filtration.
Bien qu’un suivi du statut sanitaire
des troupeaux des fermes B et C ait
également été effectué, ce dernier ne
sera pas abordé ici. Pour en savoir plus
à ce sujet, il est possible de consulter
le rapport final.
Un système
qui demande peu
d’entretien
L’accumulation de poussières, de débris
végétaux et autres particules peut nuire
Ferme A :
site naisseur-finisseur
constitué d’une maternité
de 320 truies, d’une
pouponnière de
1 200 places et de deux
engraissements de
1 300 porcs chacun
Ferme B : site naisseur
de 1 000 truies
au bon fonctionnement du système
de ventilation et de filtration, ce qui
nécessite un nettoyage ou un lavage
des filtres. L’encrassement des filtres n’a
généré aucun problème. Les filtres n’ont
été lavés qu’une seule fois pendant le
suivi, mais les moustiquaires (préfiltres)
ont été brossées à l’aide de balais à quelques reprises afin d’enlever les grosses
particules. Seulement 13 à 20 minutes
par boîtier de filtres ont été requises
afin de les entretenir. Un boîtier de la
première génération de filtres Noveko
renfermait deux cartouches de filtres
antimicrobiens et une moustiquaire.
De la théorie
à la réalité
En général, la pression statique
mesurée pendant le suivi a été similaire
à celle calculée lors de la conception.
Les filtres n’ont pas généré de pression
indue, puisque 99 % des mesures de
pression statique enregistrées ont été
au-dessous de la pression maximum
recommandée qui est de 0,15 po d’eau.
La température
intérieure :
un indicateur
Bien que les périodes chaudes soient
critiques pour la ventilation des bâtiments d’élevage, il n’y a eu aucun problème de fonctionnement relié aux
filtres. De plus, aucune mortalité n’a
été répertoriée pendant ces périodes,
qui ont été de courte durée au cours
de l’année. D’ailleurs, à l’intérieur de
toutes les salles des deux fermes, la
température a dépassé 25 °C durant
45 jours au maximum et n’a dépassé
30 °C que 2,5 jours tout au plus.
Normalement, pendant les
périodes chaudes de l’été, le débit d’air
des systèmes de ventilation est déterminé afin que la température dans le
bâtiment ne dépasse pas la température extérieure de plus de 3 °C environ.
Le différentiel entre les températures
intérieure et extérieure s’est maintenu à moins de 3 °C à plus de 91 %
du temps.
La filtration d’air :
un outil de gestion
du risque
Malheureusement, la ferme B a connu
une crise liée au SRRP causée par une
souche exogène à l’élevage au début
du projet. Selon l’audit effectué, deux
hypothèses peuvent expliquer l’origine
de la contamination du troupeau : une
contamination indirecte à la suite d’un
épandage de fumier dans le champ à
côté de la ferme (fort possiblement
par une infiltration d’air contaminé par
les volets non étanches de ventilateurs
arrêtés) ou une contamination des
cochettes de remplacement pendant
leur transport. La cause exacte n’est
pas connue mais l’hypothèse de contamination par les volets de ventilateurs
est la plus plausible.
Puisque la transmission par aérosol
ne constitue pas le seul vecteur de transmission, il est important de considérer
l’implantation du système de filtration
d’air conjointement avec l’application
stricte de protocoles de biosécurité
de base pour compléter la gestion du
risque et favoriser le maintien de la
stabilité sanitaire des troupeaux. Ainsi,
malgré l’installation de filtres à la ferme
B et la mise en place d’un bon protocole de biosécurité, la contamination du
troupeau démontre bien que l’utilisation
de ces outils n’offre pas une garantie
absolue contre la contamination causée
par le virus du SRRP. Il faut entre autres
mettre tous les éléments en place afin
de minimiser les entrées d’air parasite
pour réduire les risques.
Les coûts
Basés sur une durée de vie des filtres
de deux ans, les coûts totaux annuels
Bâtiment sous air filtré
d’installation, d’entretien et de remplacement des filtres antimicrobiens
Noveko représentaient près de 115 $/
truie/an pour filtrer l’air de l’ensemble
du site naisseur-finisseur de la ferme A.
L’investissement initial représentait
365 $/truie en inventaire. En considérant un changement de filtres tous les
trois ans, tel que préconisé aujourd’hui
avec les nouveaux types de filtres et
l’avancement des connaissances, le
coût total annuel passe à 93 $/truie/
an. En filtrant seulement l’air de la
maternité, le coût annuel diminue à
33 $/truie/an (changement de filtres
tous les trois ans).
Il faut noter que depuis le début
du projet, les coûts et les types de filtres de Noveko ont évolué : le développement technologique a permis
de réduire les coûts et d’augmenter
la durée de vie des filtres. Aujourd’hui,
l’entreprise offre sur le marché de nouveaux modèles de filtres.
Rentabiliser
le système de
filtration d’air
Les pertes liées à une crise majeure
seraient quatre fois plus importantes
que les coûts annuels du système de
filtration pour des remplacements de
filtres tous les deux ans. Autrement dit,
sur une période de dix ans, le système
de filtration installé dans l’ensemble
des bâtiments d’un site naisseur-finisseur doit permettre d’éviter 2,0 à
2,5 crises majeures avec changement
de filtres tous les deux ou trois ans respectivement pour se rentabiliser. Dans
le cas d’une maternité seule, la rentabilité est atteinte en évitant une crise
majeure (en considérant les pertes
générées jusqu’en engraissement).
Dans le cas d’un élevage où le
SRRP sévit de façon chronique, les
coûts annuels du système sont tout
de même moins élevés que les coûts
annuels de la maladie. Dans ce cas particulier, en ne considérant pas l’évitement d’une crise aiguë, la rentabilité
d’un système de filtration d’air ne sera
atteinte qu’en éradiquant d’abord la
maladie du troupeau afin d’éviter les
pertes liées au SRRP et dégager un
avantage économique.
Des avenues
intéressantes
Avec l’expérience acquise pendant ce
projet, le CDPQ poursuit son travail
afin de diminuer le coût des systèmes
de filtration d’air et les risques d’infiltration d’air non filtré. Le Centre a déjà
débuté un projet afin de trouver des
solutions pour minimiser les débits
d’air requis durant la période estivale,
ainsi qu’un autre pour développer des
méthodes permettant de réduire les
infiltrations d’air parasite dans les bâtiments porcins sous air filtré par les
volets de ventilateurs arrêtés.
Note : pour en savoir davantage sur les résultats du
projet, vous pouvez consulter le rapport complet
disponible sur les sites Internet d’Agri-Réseau et du
CDPQ.
Remerciements : la réalisation de ce projet a été
rendue possible par la contribution financière du
Programme pour l’avancement du secteur canadien
de l’agriculture et de l’agroalimentaire (PASCAA). Ce programme d’Agriculture et Agroalimentaire Canada est livré par l’intermédiaire du Conseil
pour le développement de l’agriculture du Québec
(CDAQ). Cette étude a également été possible grâce
à la participation financière de Noveko inc., de Monitrol inc., du Centre de développement du porc du Québec inc. et des trois producteurs
ayant participé au projet. n
Porc Québec Juin 2011
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