réseau Guyafor

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réseau Guyafor
Forêts
Forêt guyanaise. © L. Blanc/Cirad
Forêt de bas-fond. © L. Blanc/Cirad
Bois cathédrale. © L. Blanc/Cirad
Comprendre le rôle
des forêts tropicales humides
Le Cirad en 2009 . 62
dans le cycle du carbone
Les forêts jouent un rôle déterminant
dans le cycle du carbone.
Pour comprendre leur fonction,
notamment leur potentiel
d’atténuation du réchauffement
climatique, il est essentiel d’évaluer
précisément leur capacité de stockage
du carbone. C’est l’objectif que se
sont fixé les partenaires scientifiques
de Guyafor, un réseau de parcelles
aménagées pour l’étude
de la dynamique forestière
installées en Guyane française.
D
epuis plusieurs décennies, des
dispositifs forestiers permanents, uniques en zones tropicales,
ont été installés en Guyane française,
comme celui du Bafog sur la commune de Saint-Laurent-du-Maroni
et les stations de Paracou et des
Nouragues. Récemment, l’ONF, le
Cirad et le CNRS ont décidé de
fédérer ces dispositifs au sein du
réseau Guyafor et de respecter des
protocoles communs de suivi de la
dynamique forestière, de caractérisation de l’environnement et de
gestion des données.
Depuis deux ans, les recherches
menées à partir de ce réseau portent
sur la quantité de carbone forestier
des forêts naturelles et son évolution
dans le contexte des changements
climatiques. Elles s’intéressent aussi
à la dynamique de reconstitution
des stocks de carbone dans les forêts
exploitées.
Accumuler
du carbone en réponse
aux perturbations
passées
Sur le dispositif de Paracou, les
données démographiques acquises
depuis 25 ans sur six parcelles de
6,25 hectares montrent que la forêt
naturelle se comporte comme un
puits de carbone, avec une accumulation de 0,17 à 0,80 tonne par hectare
et par an. Ces résultats confirment
les conclusions d’études menées dans
le Bassin amazonien et dans le bassin
du Congo. Cependant, l’interprétation de cette accumulation reste
sujette à controverse : est-ce une
réponse des forêts aux changements
climatiques ou bien une réaction
aux perturbations passées ? Selon les
premiers résultats, c’est cette seconde
hypothèse qui serait la bonne. Les
changements de distribution de dia-
mètre des arbres sur les 25 années de
suivi sont caractéristiques des forêts
en reconstitution. En outre, la mortalité des arbres de gros diamètre a
un effet prépondérant dans les bilans
de carbone, ce qui indique que la
maturité des forêts est un critère
fondamental de ces bilans. Enfin,
à l’échelle de l’Amazonie (Bassin
amazonien et plateau des Guyanes),
une étude récente prouve qu’une
perturbation climatique comme la
sécheresse peut faire chuter le bilan
carbone des forêts.
45 ans pour reconstituer
le stock de carbone
Un autre résultat majeur de ces
études concerne l’évolution du stock
de carbone dans les forêts exploitées.
L’extraction du bois d’œuvre ou du
bois-énergie, si elle fournit des biens
et des revenus, participe dans le
même temps à l’émission de carbone
dans l’atmosphère, accentuant ainsi
les effets de la déforestation. Cependant, une forêt exploitée restocke du
carbone lorsqu’elle se régénère, avec
l’apparition de nouveaux arbres et la
croissance des arbres existants. Toujours à Paracou, il faut 45 ans pour
que la forêt reconstitue son stock de
carbone après une exploitation d’environ 30 mètres cubes par hectare.
En utilisant des techniques d’exploitation à faible impact, il serait
possible de réduire cette durée.
Estimer le carbone
des forêts à partir
de données aériennes
Au-delà de ces résultats, le réseau
Guyafor participe à la mise au point
de nouvelles méthodes d’estimation
du carbone des forêts à partir de
données aériennes. Récemment, il
s’est associé au projet Biomass, un
ambitieux programme de conception
d’un radar à synthèse d’ouverture en
bande P (432-438 MHz, longueur
d’onde 68 centimètres), qui devrait
permettre d’observer la distribution
spatiale de la biomasse à l’échelle
Partenaires
Centre national
de la recherche
scientifique (CNRS),
Institut national
de la recherche
agronomique (Inra),
Université
des Antilles
et de la Guyane,
Ecole nationale
du génie rural,
des eaux et des forêts
(Engref ),
AgroParisTech,
Office national
des forêts (ONF)
Forêts
globale. Ce projet est en lice pour
devenir le septième satellite de programme scientifique d’observation
de la Terre de l’Agence spatiale
européenne. Après une validation
des techniques de télémétrie radar
sur les forêts boréales et tempérées,
le réseau Guyafor a été sélectionné
pour valider ces techniques en forêts
tropicales humides. Une intense
campagne de collecte de données
aériennes s’est déroulée en août 2009
sur les dispositifs de Paracou et des
Nouragues.
Contact > Lilian Blanc, Ecologie
des forêts de Guyane (Ecofog)
Ensavoirplus
Blanc L. et al., 2009. Dynamics of aboveground
carbon stocks in a selectively logged tropical forest.
Ecological Applications, 19 : 1397-1404.
Phillips O.L. et al., 2009. Drought sensitivity of
the Amazon rainforest. Science, 323 : 1344-1347.
Rutishauser E. et al., 2009. Above-ground biomass
dynamic in a rainforest of eastern South America.
Journal of Vegetation Science. (sous presse)
LES RECHERCHES . 63 . Axe 6
La forêt guyanaise : une forêt en reconstitution ? © L. Blanc/Cirad