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16 La page des profs Qui est cet homme qui se cache derrière ses petites lunettes ovale, vêtu d’une marinière du Mans? Le P’tit Insolent a rencontré M. Vinclair, prof de philo et de français multifonctions. Vous dites que prof de philo, c’est le meilleur job du monde. Pourquoi ? Lorsque je faisais mes études, je me suis rendu compte qu’en philo, il y avait deux possibilités : prof à la fac ou prof au lycée. Ce que j’aimais bien, c’était justement avoir des élèves qui n’en ont jamais fait et essayer de vivre avec eux cette expérience qui amène à voir un petit peu différemment la réalité et observer cette transformation là chez eux. J’aimais bien le côté un peu revêche des élèves qui ne sont pas là pour ça, qui n’ont pas choisi d’être là… Leur faire cette violence là, leur prendre la tête et leur dire maintenant « tu regardes le réel ». Vous avez eu combien au bac de philo ? 17 C’est quoi la philo pour vous ? Un espace de liberté. Quand j’étais plus jeune, c’était un truc de rebelle puisque c’était le fait d’embêter le prof en lui posant des questions et en essayant de lui faire des objections alors qu’il voulait simplement faire son truc. La différence entre la philo et les autres textes, c’est qu’elle vous fait réfléchir, et de manière volontaire. Donc à partir du moment où vous continuez dans votre vie à vous poser des questions je trouve que vous avez réussi. J’aurai l’impression d’avoir réussi mon « business » si j’ai d’une manière ou d’une autre, même à une toute petite échelle, contribué à ce que les gens quand ils sont grands et qu’ils ont plein de problèmes, arrivent malgré tout à trouver une place pour réfléchir à leur vie… Si les gens peuvent être un peu les métaphysiciens d’eux-mêmes, je trouve ça énorme ! Avez-vous un philosophe préféré ? J’en ai plein. En tous cas, un qui m’a beaucoup marqué, c’est Foucault. Parce que j’ai beaucoup travaillé sur lui (…) Non. Hegel. Hegel, ça c’est la vraie classe. Vous nous avez un jour parlé du Japon. Vous aimez beaucoup l’Asie ? Je ne connaissais pas du tout l’Asie mais j’en avais marre de vivre en France. J’en avais marre de la dépression généralisée en France. En plus, j’enseignais en ZEP dans des conditions un peu difficiles. Il se trouve que j’ai écrit quelques bouquins et, du coup, j’ai candidaté pour une résidence d’écriture à Kyoto : la villa Kujoyama. Je suis parti pendant 6 mois écrire là-bas. J’ai commencé à y apprendre le japonais, je me suis fait des copains, j’ai découvert un peu la culture et j’ai traduit une épopée (…) Finalement, je suis resté un an et demi là-bas. Un événement en particulier a-t-il marqué votre vie ? Ouais (il hésite) J’étais en première à l’époque et je faisais encore du rap. (Il se reprend) Oh non, mais je peux pas raconter ça (rires) Bon, ce sera mon petit secret. En première, donc, j’ai changé. (ricanements) J’ai arrêté de faire du rap et mon rap s’est transformé petit à petit en écriture. Je me suis mis à écrire. Vous faites toujours du rap ? Non, j’ai fait du punk acoustique jusqu’à assez récemment. J’ai chanté. Très, très bien. (rires) J’ai même participé à un concert à Kyoto. Parce qu’à la villa Kujuyama, il y avait des artistes de toutes sortes. Il y avait des musiciens, il y avait des vidéastes. Un livre que vous recommanderiez aux lecteurs du journal ? Un livre pas trop difficile. Et en même temps pas trop relou. En fait si : les Méditations Métaphysiques de Descartes. Mais c’est dur quoi ! C’est hyper bien écrit. C’est génial, c’est le mec qui dit: « Bon bah, j’ai entendu que des conneries dans ma vie, allez maintenant je doute de tout, et je repars à 0 ». C’est énorme. Et il y a un côté funky en plus. Ou alors, Les carnets du sous-sol de Dostoïevski (ou les Notes du souterrain, cela dépend des traductions) : c’est une sorte de roman maniaque, dont la première partie est une méditation crispée sur la question du sens de la vie. C’est très beau, ça fait réfléchir. Ça met mal à l’aise aussi et comme c’est sous forme de monologue dans un roman, ça se lit très bien. Agathe Mercier & Louis Walfroy Danneaux Perles de Profs « Une phrase d’accroche, c’est comme un décolleté, il faut un truc sexy ! » « Je n’achèterai pas le journal tant que mon nom ne sera pas dedans » (M. Telliez, voilà c’est fait) « Si vous ne travaillez pas, vous avez une mauvaise note. Si vous avez une mauvaise note, vous avez un mauvais examen. Si vous avez un mauvais examen, vous avez une mauvaise école. Si vous avez une mauvaise école, vous avez un mauvais travail et vous êtes pauvres. » 16