Les décisions du juge pour enfants et les modalités de

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Les décisions du juge pour enfants et les modalités de
Ministère de la Justice
SERVICE DE DOCUMENTATION
ET D’ETUDES
par KABASELE NZEMBELE
Conseiller à la Cour d’Appel
MONUC/SECTION PROTECTION
DE L’ENFANT
1
I. Introduction
Dans toutes les causes concernant l’enfant en conflit avec la loi,
le juge pour enfants exécute sa mission de dire le droit en rendant des
décisions.
Certaines de ces décisions revêtent un caractère provisoire,
tandis que d’autres sont rendues à titre définitif.
Dans le premier cas, le juge prend des mesures provisoires par
voie d’ordonnance sur la situation provisoire du mineur en attendant le
résultat des enquêtes préalables d’un assistant social ou de tout autre
expert régulièrement requis.
Dans le second cas, après l’examen au fond, le juge, en tenant
compte du seuil de l’âge minimum fixé par la loi, rend des mesures
définitives en rapport avec les faits reprochés au mineur.
Dans toutes ces hypothèses, le juge est tenu de prendre des
décisions en conformité avec la législation en vigueur.
A l’heure actuelle, la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l’enfant (LPPE) constitue le texte de référence pour
l’administration de la justice pour mineurs dans notre pays.
Rejoignant
les
instruments
internationaux
ratifiés
par
la
République Démocratique du Congo (RDC), la loi précitée recommande
au juge, dans la prise de décision, de tenir également compte de la
condition de l’enfant en raison de sa vulnérabilité, de sa dépendance
par rapport au
milieu, de son
manque de maturité physique,
intellectuelle et émotionnelle, nécessitant des soins spéciaux et une
protection particulière (Exposé des motifs de la Loi portant Protection
de l’Enfant).
2
Pour ce faire, toute décision à l’égard de l’enfant en conflit avec la
loi doit viser avant tout l’intérêt supérieur de celui-ci grâce aux
mesures éducatives susceptibles de garantir son redressement, sa
resocialisation, et ce, quelles que soient la gravité des faits et les
conséquences qui peuvent en résulter (art.6 de la Loi portant
Protection de l’Enfant).
Le juge siège toujours avec le concours du Ministère public ;
mais, il est admis, en ce qui concerne les mesures provisoires, que le
juge peut prendre une ordonnance dans son cabinet en l’absence de
l’officier du Ministère public, pour besoin de célérité, mais aussi si ce
dernier ne peut être atteint dans le temps requis.
Les modalités d’exécution des décisions du juge se rapportent,
d’une part, à la personne de l’enfant mis en cause, et, d’autre part, à la
réparation du préjudice causé à la victime par le fait de l’enfant en
conflit avec la loi.
A cet égard, la loi portant protection de l’enfant prévoit, pour
l’exécution des mesures susvisées, différents intervenants selon que
l’enfant est placé en milieu familial ou selon qu’il est placé en
institution. Elle prévoit également les personnes responsables de la
réparation du dommage causé à la victime ainsi la procédure pour y
parvenir.
La loi précitée et les instruments internationaux privilégient
autant que possible le maintien de l’enfant dans un environnement
familial, à titre provisoire ou à titre définitif, le placement dans les
EGEE et les ERE étant une mesure à prendre en dernier ressort et pour
une durée la plus courte possible.
Il est important de signaler que le fonctionnement et l’organisation
de l’établissement de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE) ainsi que de
3
l’Etablissement de Rééducation de l’Etat (ERE) seront fixés par décret
du Premier ministre, délibéré en conseil des ministres.
Toutefois, en attendant le décret susvisé, il est admis que
l’exécution des décisions du juge visant le placement s’effectue
conformément à l’ordonnance n° 13/140 du 23 avril 1954 portant
régime des établissements de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE)
avec cette précision que l’enfant ne peut y être placé que par décision
du juge compétent.
Le présent module comporte deux chapitres : le premier est
consacré aux décisions du juge pour enfants et le second aux modalités
d’exécution des décisions du juge pour enfants.
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Chapitre 1 : Les décisions du juge pour enfants
Le juge pour enfants peut prendre à l’égard de l’enfant en conflit
avec la loi, selon les circonstances et la gravité des faits, deux sortes
de mesures.
Pendant l’enquête, le juge prend des mesures provisoires, tandis
qu’il prend des mesures définitives à la fin de l’instruction.
Section 1 : Les mesures provisoires (art 106 et 108 LPPE)
En application des articles 106 et 108 de la LPPE, le juge pour
enfants peut, avant de statuer sur le fond, prendre par voie
d’ordonnance, quatre types de mesures provisoires.
Ces mesures sont prises en tenant compte de l’intérêt supérieur
de l’enfant et de l’adéquation de son milieu d’accueil sur proposition de
l’assistant social régulièrement requis.
Ainsi, le juge peut ordonner soit de placer l’enfant en famille sous
l’autorité de ses père et mère ou de ceux qui en ont la garde, soit de
l’assigner à résidence sous la surveillance de ses père et mère ou de
ceux qui en ont la garde, soit de le soustraire de son milieu et le confier
provisoirement à un couple de bonne moralité ou à une institution
publique ou privée agréée à caractère social (Article 106 alinéa 1
points1et 2et alinéa 3 de la LPPE), soit le placer préventivement dans
un établissement de garde et d’éducation de l’Etat (article 108 alinéa 1
de la LPPE).
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§1. Le placement en famille (art 106 al1.1)
Pendant le déroulement de l’enquête, le juge peut décider de
placer en famille l’enfant en conflit avec la loi sous l’autorité de ses
père et mère ou de ceux qui en ont la garde au moment des faits.
Dans la pratique, lorsque les parents sont connus, il ne se pose
aucun problème. Le juge prend une ordonnance de placement en vertu
de laquelle l’enfant reste chez ses parents ou chez un autre membre de
la famille en attendant le rapport de l’assistant social.
Cette mesure est cependant difficile à envisager lorsque l’enfant
est en rupture familiale. C’est le cas lorsqu’il s’agit des enfants séparés
et/ou des enfants déplacés tels que définis à l’article 2 points 2 et 7 de
la LPPE).
Elle est également difficile à prendre devant le refus de l’enfant
lui-même ou en cas de refus des parents et membres de famille qui
doivent l’accueillir.
C’est pour cette raison que le juge doit, avant d’en décider ainsi,
être rassuré qu’il n’y a aucun obstacle à le faire et se fier ainsi au
rapport de l’assistant social qui a procédé à l’enquête préalable du
milieu de vie de l’enfant.
Dans ce cas, le juge qui est convaincu de l’existence d’un quelconque
obstacle à remettre l’enfant à ses parents ne peut pas recourir à une
telle mesure au risque d’aggraver davantage sa situation.
Bien au contraire, il sera tenu de recourir à d’autres mesures.
§2. : L’assignation à résidence (art. 106 al1.2 de la LPPE)
Cette mesure figure parmi les innovations apportées par la loi
portant protection de l’enfant en matière d’administration de la justice
pour mineurs.
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Le lexique des termes juridiques définit l’assignation à résidence
comme une mesure consistant pour un individu faisant l’objet des
poursuites judiciaires de demeurer dans son milieu naturel et de ne
s’en éloigner que sous escorte des agents de l’ordre commis à l’effet de
le surveiller (1).
En matière de justice juvénile, l’assignation à résidence de
l’enfant peut consister à confier l’enfant à ses parents avec injonction
de l’accompagner partout où il peut se rendre selon les nécessités de
ses besoins vitaux ;par exemple,l’accompagner chaque jour à l’école, à
l’hôpital…
§3. Le placement chez un couple ou en institution (art 106 al1.3de la LPPE)
Il s’agit de soustraire l’enfant de son milieu familial et de le placer
dans une autre famille ayant bonne moralité ou dans une institution
publique ou privée à caractère social.
La loi ne détermine pas les raisons qui peuvent amener le juge à
prendre une telle mesure.
Néanmoins, la déchéance de l’autorité parentale, la perversité des
parents, la maltraitance de l’enfant par ses parents,l’abandon et le
rejet de l’enfant sont, parmi tant d’autres, les raisons liées à
l’irresponsabilité des parents et pour lesquelles le juge peut ordonner
pareille mesure.
La décision du juge ne s’impose pas. Elle ne peut intervenir
qu’après concertation menée par l’assistant social en accord avec ces
milieux d’accueil.
(1)Raymond Guillien et Jean Vincent : Lexique des termes juridiques,
Dalloz, 10è éd., Paris, 1995
7
Il peut arriver que ces structures d’accueil refusent d’accepter
l’enfant que le juge se propose de leur confier, soit en raison de sa
dangerosité et sa perversité notoire, soit pour cause d’insuffisance des
moyens financiers et logistiques disponibles. En pareille circonstance, le
juge n’a d’autres alternatives que de placer l’enfant en garde
préventive dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat
(EGEE).
§4. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat
(art.108 al.1 de la LPPE)
L’article 108 al1 de la LPPE dispose : « Si les mesures prévues à
l’article 106 ne peuvent être prises parce que l’enfant est présumé
dangereux et qu’aucun couple ou aucune institution n’est en mesure de
l’accueillir,
l’enfant
peut
être
préventivement
placé
dans
un
établissement de garde et d’éducation de l’Etat pour une durée ne
dépassant pas deux mois ».
Le caractère dangereux du mineur doit être explicité par le juge.
Très souvent, le juge retient qu’un enfant est dangereux lorsqu’il
manifeste une tendance persistance à la délinquance, c’est-à-dire,
lorsque l’enfant s’inscrit dans un processus de récidive.
Si le juge considère que l’enfant est dangereux, il doit étayer son
opinion par des faits probants et objectifs.
Par ailleurs, si le juge déclare que nul particulier ou nulle institution n’a
pu accueillir l’enfant, il doit démontrer qu’il a fait la demande de
placement auprès de ceux-ci et produire la preuve de leur refus.
Signalons qu’il existe très peu d’établissements de garde et
d’éducation de l’Etat en RDC. Et là où ils existent, l’on constate que les
conditions d’hébergement ne répondent pas aux normes édictées par
les instruments internationaux et par la législation nationale en cette
matière.
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En attendant le décret du Premier ministre sur
les EGEE, les
mineurs vicieux et présumés dangereux, qui ne sont acceptés ni par un
couple, ni par une institution publique ou privée, ou qui ne peuvent pas
être placés en famille, sont gardés dans un quartier spécial réservé aux
enfants dans la prison.
Dans la pratique, le juge prend une ordonnance de garde
préventive et place l’enfant pour une durée ne dépassant pas deux
mois. En fait, le mineur placé en garde préventive est privé de liberté.
La décision de garde préventive doit être une mesure de dernier
ressort et d’une durée la plus courte possible.
En effet, à l’article 1 des Règles des Nations Unies pour la
protection des mineurs privés de liberté, il est stipulé : « La justice
pour mineurs devrait protéger les droits et la sécurité et promouvoir le
bien-être physique et moral des mineurs. L’incarcération devrait être
une mesure de dernier recours ».
L’article 17 de cet instrument international insiste sur ce fait en
ces termes : « La détention avant jugement doit être évitée dans la
mesure du possible et limitée à des circonstances exceptionnelles. Par
conséquent, tout doit être fait pour appliquer d’autres mesures ».
Dans le même ordre d’idées, à l’ article 13.1 de l’Ensemble des
règles minima des Nations Unies concernant la justice pour mineurs
(Règles de Beijing), il est précisé que « La détention préventive ne peut
être qu’une mesure de dernier ressort et sa durée doit être aussi courte
que possible ».
Il en est également ainsi de l’article
37.b de la Convention
relative aux droits de l’enfant qui dispose : « … Nul enfant ne soit privé
de liberté de façon illégale ou arbitraire. L’arrestation, la détention ou
l’emprisonnement d’un enfant doit être en conformité avec la loi, n’être
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qu’une mesure de dernier ressort, et d’être d’une durée aussi brève
que possible ».
Sur le plan interne, cette recommandation faisant de la détention
une mesure de dernier ressort est consacrée par l’article 106 alinéa 4
de la LPPE qui dispose : « Le placement dans une institution publique
ou privée agréée à caractère social ne peut être envisagée que comme
mesure de dernier recours ».
En d’autres termes, la garde préventive est à éviter dans la
mesure du possible afin de préserver l’enfant du danger de contagiosité
criminelle.
Dans tous les cas, lorsque le juge ordonne la garde préventive, il
devra en déterminer la durée et indiquer que le mineur sera séparé des
adultes et des autres mineurs faisant l’objet d’une mesure définitive.
Après enquête, le juge est tenu de prendre des mesures
définitives à l’égard de l’enfant déféré devant lui.
Section 2 : Les mesures définitives
Les mesures définitives interviennent après enquête et à l’issue
d’une instruction suffisamment menée.
Elles sont rendues dans les huit jours qui suivent la prise en délibéré de
la cause (art.113 al.1 de la LPPE).
Guidé par son intime conviction, le juge statue sur le fond et
prend l’une des mesures prévues par les articles 96,113 et 117 de la
LPPE.
De la combinaison des dispositions précitées ,il résulte que le
juge peut décider, soit de relaxer l’enfant, soit de le réprimander et de
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le rendre à ses parents ou aux personnes qui exerçaient sur lui
l’autorité parentale en leur enjoignant de mieux le surveiller à l’avenir,
soit de le confier à un couple de bonne moralité ou soit de le mettre
dans une institution publique à caractère social, soit de le placer dans
un centre médical ou médico-éducatif, soit
de le mettre dans un
établissement de rééducation de l’Etat, soit de le placer dans un
établissement de garde et d’éducation de l’Etat.
Comme il sied de le constater, la loi portant protection de l’enfant
n’a pas repris la mesure tendant à mettre l’enfant à la disposition du
gouvernement, laquelle mesure a été consacrée par le décret du 06
décembre 1950.
§1. La relaxe (art 96 LPPE)
La relaxe est définie par le lexique des termes juridiques comme
étant la décision d’une juridiction répressive autre que la Cour
d’Assises, déclarant non coupable le prévenu traduit en justice (2)
D’après la définition contenue dans le Recueil sur la minorité, on
entend par ‘’Relaxe’’, la décision du juge de paix qui déclare le mineur
prévenu non coupable des faits qui lui étaient reprochés (3).
Ces deux définitions ne permettent pas, cependant, une bonne
compréhension de l’esprit de la loi portant protection de l’enfant.
En effet, dans le cadre de la loi précitée, la mesure de relaxe
n’est pas ordonnée, ni par une juridiction répressive, ni pour déclarer le
mineur non coupable des faits lui reprochés.
Elle est prise automatiquement et uniquement par le juge pour
enfants à l’égard de l’enfant âgé de moins de 14 ans ayant commis un
manquement qualifié d’infraction par la loi pénale.
L’article 96 al.1 de la LPPE dispose à ce propos : « Lorsque
l’enfant déféré devant le juge a moins de 14 ans, celui-ci le relaxe
comme ayant agi sans discernement et ce, sans préjudice de la
réparation du dommage causé à la victime ».
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Cette décision consiste pour le juge de soustraire l’enfant de son
milieu familial et de le confier à un assistant social et/ou à un
psychologue qui prend des mesures d’accompagnement appropriées.
La mesure de relaxe ne doit pas préjudicier l’action civile de la
victime.
Dans la pratique, le juge saisi des manquements commis par un
enfant âgé de moins de 14 ans devra le relaxer et se prononcer ensuite
sur la réparation du préjudice causé à la victime.
Est pris en considération, l’âge de l’enfant au moment de la
commission des faits (art 98 LPPE).
Ainsi, si les faits ne sont pas prescrits et que l’enfant a déjà
atteint sa majorité au moment où le tribunal est saisi, le juge doit le
relaxer en considérant l’âge de moins de 14 ans qu’il avait lors de la
commission desdits faits.
Dans ces conditions, le juge pour enfants n’a pas de raisons de se
dessaisir au profit du juge pénal (juge pour adultes) en se déclarant
incompétent ratione personae.
L’enfant ainsi relaxé est placé dans une famille d’accueil ou dans
une institution privée agréée à caractère social autre que celle
accueillant des enfants en situation difficile (art 96 al3 de la LPPE).
Quid alors, si les faits ne sont pas établis dans le chef d’un tel
enfant ou dans celui de tout autre mineur ?
Nous pensons qu’en pareille circonstance, le juge aura également à
relaxer l’enfant et pourra se déclarer incompétent pour statuer sur les
dommages et intérêts.
§2. La réprimande et la remise de l’enfant à ses parents ou aux personnes
qui exerçaient sur lui l’autorité parentale (art 113 al 1.1 LPPE)
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La
réprimande
consiste
en
un
reproche,
un
blâme,
un
avertissement, une remontrance que l’on adresse à quelqu’un qui a
commis une faute (Dictionnaire Petit Larousse,éd. 2008).
La loi ne prescrit pas une formule spéciale pour le faire.
Le juge réprimande l’enfant ayant commis un manquement
qualifié d’infraction par la loi pénale en lui faisant savoir sa faute et les
conséquences y relatives, et le met en garde pour que pareil
comportement ne se répète.
La décision prévue à l’article 113 al1 point2 de la loi portant
protection de l’enfant comporte deux volets : la réprimande, d’abord,
et, ensuite la remise aux parents ou aux personnes qui exerçaient sur
l’enfant l’autorité parentale avec injonctions de mieux le surveiller.
Ces deux volets sont cumulatifs.
La remise du mineur à ses parents ou à toute autre personne
s’accompagne toujours des injonctions données par le juge à ces
derniers de mieux le surveiller à l’avenir.
D’après le rapport du Conseil colonial relatif au Décret du 6
décembre
1950 sur l’Enfance
délinquante, « l’injonction
qui sera
adressée aux parents devrait l’être hors de la présence du mineur : les
parents étant les éducateurs naturels de l’enfant, il faut éviter toute
attitude inconciliable avec leur prestige paternel. Si l’on veut les
amener à coopérer au bon fonctionnement de la nouvelle juridiction, il
faut non seulement user du tact, mais inspirer confiance ». (1)
(1)Rapport du Conseil colonial, cité par Cécile KIALA dans son module sur la Protection pénale de l’enfant en
conflit avec la loi, in Recueil de modules de formation en matière de protection légale de l’enfant, Kinshasa,
juillet 2005, p. 108, inédit.
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La loi ne définit pas les cas pour lesquels le juge peut prendre
une telle décision.
Nous osons croire qu’elle intervient pour des faits de moindre
gravité aussi bien à l’égard de l’enfant qu’à celui de la victime et pour
lesquels le Président du Tribunal pour enfants peut ordonner la
médiation conformément à l’article 136 de la LPPE.
Cette mesure peut paraître utopique et inopérante lorsque les
parents ne sont pas connus. Elle l’est également lorsque les parents
sont connus, mais refusent d’accueillir leur enfant, de même que
lorsque celui-ci refuse de retourner en famille.
C’est
pourquoi,
l’intervention
de
l’assistant
social
s’avère
indispensable pour déterminer, par une enquête préalable, qu’il n’y a
pas désaccord entre l’enfant et ses parents.
Dans l’hypothèse où le rapport de l’assistant social fait état d’un
refus de part et d’autre, le juge est tenu de réprimander l’enfant et de
le soustraire de son milieu familial pour le placer dans une autre famille
d’accueil ou dans une institution préalablement consultée à cet effet.
§3. Le placement chez un couple ou dans une institution privée (art 113 al.1
point 2 LPPE)
Le placement de l’enfant chez un couple de bonne moralité
privilégie le maintien de l’enfant dans un environnement familial qui
soit favorable à son éducation. Ce choix est opéré après rapport de
l’assistant social.
La condition requise est qu’il doit s’agir d’un couple, c’est-à-dire
de deux personnes de sexes opposés légalement mariées et jouissant
d’une bonne moralité.
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Contrairement à l’article 106 al1.3 qui se limite à dire que l’enfant
est confié provisoirement à un couple ou à une institution privée, la
durée du placement en tant que mesure définitive ne doit pas dépasser
la dix-huitième année d’âge de l’enfant.
L’institution privée dont il est question peut être un orphelinat,
une maison de charité…
§4. Le placement dans une institution publique à caractère social (art 113
al1 point 3 LPPE)
Aux termes de l’article 67 de la loi portant protection de
l’enfant,on entend par institution publique, « une structure ou un
établissement de garde et d’éducation créé par l’Etat, placé sous la
tutelle du ministère ayant les affaires sociales dans ses attributions en
collaboration avec celui ayant la justice dans ses attributions avec
comme objectif la garde, la rééducation et la réinsertion sociale des
enfants en situation difficile ou en conflit avec la loi, ayant entre autres
comme agents les assistants sociaux qui y sont employés ».
La durée du placement dans une institution publique ne doit pas
dépasser la dix-huitième année d’âge de l’enfant (art.113 al1 point 3
LPPE).
Cette mesure ne s’applique pas à l’enfant âgé de plus de seize
ans (art 113 al 2 LPPE).
§5. Le placement dans un centre médical ou médico-éducatif approprié (art
113 al1.4 LPPE)
La loi portant protection de l’enfant qui prévoit le placement de
l’enfant dans un centre médical ou médico-éducatif n’en détermine pas
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la durée parce que tout dépendra du rapport médical qui sera établi par
le médecin auquel le juge doit recourir.
La loi ne détermine pas non plus les cas pour lesquels le juge peut
la prendre.
Nous pensons que cette mesure vise les enfants en conflit avec la
loi souffrant d’une maladie et/ou d’une déficience mentale et dont l’état
de santé exige des soins médicaux spéciaux et une éducation
permanente.
§6. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat
(art 113 al1.5 LPPE)
La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant
prévoit, en son article 113 alinéa 1 point 5, le placement de l’enfant
dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat ; mais, elle
n’énumère pas les faits pour lesquels l’enfant qui les commet devra
faire l’objet de cette mesure.
Néanmoins, le législateur a pris soin de considérer le taux de la
peine prévue par la loi pénale comme critère déterminant de la mesure
de placement dans un EGEE.
C’est ainsi qu’aux termes de l’article 115 alinéa 1 de la LPPE, «
en cas de manquement qualifié d’infraction à la loi pénale punissable
de plus de cinq ans de servitude pénale principale et qui n’est pas
punissable de la peine de mort ou de la servitude pénale à perpétuité,
le juge qui a pris cette mesure pourra la prolonger pour un terme qui
ne peut dépasser la vingt-deuxième année d’âge de l’enfant ».
Par ailleurs, le juge pourra prolonger la mesure susvisée au-delà
de la dix-huitième année d’âge de l’enfant pour un terme de dix ans au
maximum, si le manquement est punissable par la loi pénale de la
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peine de mort ou de la peine de servitude pénale à perpétuité (art.116
al.1 LPPE).
Dans les deux cas prévus aux articles 115 et 116 de la loi,
l’intéressé qui atteint sa dix-huitième année d’âge, devra être séparé
des enfants au sein du même établissement de garde et d’éducation de
l’Etat,
sur
décision
du
juge,
à
la
demande
de
l’autorité
de
l’établissement de garde (art.115 al.2 et 116 al.2 LPPE).
.
§7. Le placement dans un établissement de rééducation de l’Etat (art 117)
L’article 117 al.1 de la LPPE prévoit, au titre de mesure définitive,
le placement dans un établissement de rééducation de l’Etat (ERE)
dans deux hypothèses :
- L’enfant doit avoir commis un manquement qualifié d’infraction à
la loi pénale punissable de plus d’un an de servitude pénale ;
- L’enfant doit être d’une perversité caractérisée ou récidiviste.
La durée de placement dans un ERE est d’une année au moins et de
cinq ans au plus (art.117 in fine LPPE). Cette décision n’est pas
applicable aux enfants âgés de moins de quinze ans (art.117 al.2
LPPE).
Un décret du Premier Ministre délibéré en conseil des ministres
fixera
l’organisation
et
le
fonctionnement
de
l’établissement
de
rééducation de l’Etat.
Mais à ce jour, le décret susvisé n’est pas encore pris ; et, en
attendant, l’enfant faisant l’objet de la mesure de placement dans un
ERE, sera placé dans un EGEE.
17
Section 3 : Les mesures complémentaires.
Le juge pour enfants peut, pour telle ou telle autre raison,
assortir sa décision définitive d’une mesure complémentaire.
Il peut, soit ordonner le placement avec sursis, soit soumettre l’enfant
au régime de la liberté surveillée.
§1. Le placement avec sursis (art 114 LPPE)
Le sursis ou la condamnation conditionnelle est une mesure de
dispense de l’exécution de la peine que le juge a la faculté d’accorder
aux courtes peines pendant une durée d’épreuve qui ne dépassera pas
cinq ans. (2)
En matière d’enfant en conflit avec la loi, le sursis consiste en ce
que l’enfant ayant fait l’objet d’une mesure de placement dans un
établissement de garde et d’éducation de l’Etat soit dispensé de
l’exécution de cette mesure pour une période
qui n’excède pas sa
majorité, c’est-à-dire sa dix-huitième année, et pour le manquement
qualifié d’infraction à la loi pénale punissable au maximum de cinq ans
de servitude pénale principale (art 114 al1 LPPE).
Il en résulte que le sursis n’est concevable que dans les
hypothèses suivantes :
- la mesure principale doit consister en un placement dans un
établissement de garde et d’éducation de l’Etat ;
- la durée du sursis ne peut pas dépasser la dix-huitième année
d’âge de l’enfant ;
- le manquement commis par l’enfant doit être punissable par la loi
pénale au maximum de cinq ans de servitude pénale principale.
2
NYABIRUNGU MWENE SONGA : Droit Pénal Général Zaïrois, éd. Droit et Société « DES », Kinshasa, 1989, p.
339
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Les conditions du sursis ne sont pas déterminées par la
loi comme c’est le cas en matière pénale; c’est une question de fait
laissée à l’appréciation du juge pour enfants (art 114 al2 LPPE).
Les conditions du sursis peuvent varier selon la personnalité du
mineur (par ex. délinquance primaire), la nature des faits commis (par
ex. bénignité des faits) et les circonstances de la commission des faits
(par ex. la provocation de la victime).
C’est pour cela qu’il est recommandé au juge de motiver
suffisamment sa décision en précisant les raisons qui l’ont amené à
prononcer le sursis.
A cet égard, il détermine les conditions que l’enfant doit
raisonnablement respecter, par exemple, ne pas récidiver, ne pas
fréquenter telle personne ou tel milieu à telle heure.
§2. La liberté surveillée (art 118 LPPE)
C’est une mesure complémentaire que le juge peut prononcer à
l’égard de l’enfant qui n’a pas fait l’objet de placement ou dont le
placement a été levé.
Sa durée ne doit pas dépasser la dix-huitième année d’âge de
l’enfant.
En fait, cette mesure peut être prononcée dans tous les cas
prévus à l’article 113 al.1, 2, 3, 4 à l’exception du point 5 de cette
disposition.
La liberté surveillée ne peut pas être prononcée lorsque le juge décide
du placement dans un établissement de garde et d’éducation de l’Etat.
19
La raison est que dans les EGEE il existe déjà des agents de l’Etat
chargés de la surveillance de l’enfant qui y est placé.
La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant
ne donne pas des précisions sur le statut des personnes chargées de
surveiller l’enfant lorsque ce dernier a fait l’objet d’une mesure autre
que celle de placement dans un EGEE.
Par contre, le décret du 06 décembre 1950 sur l’enfance
délinquante, en son article 13 alinéa 3 confiait la surveillance de
l’enfant en liberté surveillée à des personnes qui portaient le nom
de’’Délégués à la protection de l’enfance’’.
Au regard de la loi du 10 janvier 2009, la liberté surveillée est
assurée par les assistants sociaux.
Section 4 : Les spécificités des décisions du juge pour enfants
Il ressort de l’économie des textes protecteurs des droits de
l’enfant que les mesures du juge pour mineurs sont spécifiques en ce
que :
- elles ont une portée éducative et non pas répressive ;
- elles se fondent sur l’intérêt supérieur de l’enfant en vue de sa
resocialisation, son redressement et sa réinsertion et non pas
nécessairement le rétablissement de l’ordre public (art.6 al.1
LPPE) ;
- elles sont toujours rendues contradictoirement à l’égard du
mineur, la procédure par défaut étant exclue (art.104 point 2 et
art.110 al.5 LPPE) ;
- elles sont rendues en tenant compte de l’âge de l’enfant au
moment de la commission des faits et non pas au moment de la
saisine du juge (art.98 LPPE) ;
- elles sont obligatoirement sujettes à révision tous les 3 ans par le
juge (art.127 LPPE) ;
20
- elles sont prises par le juge en concertation avec l’assistant
social ;
- elles ne peuvent pas consister en la peine de mort ni la servitude
pénale à perpétuité (art.9 al.2 LPPE).
Chapitre 2 : Les modalités d’exécution des décisions du
juge pour enfants
L’article 128 de la LPPE dispose : « A moins que le juge
n’en décide autrement, la décision est exécutoire sur minute dès le
prononcé en ce qui concerne la mesure prise à l’endroit de l’enfant » ;
et l’article 129 d’ajouter, « Le juge veille à l’exécution de toutes les
mesures qu’il a prises à l’égard de l’enfant.Il est aidé par l’assistant
social territorialement compétent ».
Par ailleurs, la loi précitée stipule à son article 119 : « Si
le manquement qualifié d’infraction est établi, le juge met les frais à
charge des personnes civilement responsables et, s’il y a lieu, les oblige
aux restitutions et aux dommages et intérêts ».
Il résulte de ce qui précède que les décisions du juge pour
enfants s’exécutent, d’une part, par rapport à l’enfant qui en fait
l’objet, et, d’autre part, par rapport aux réparations civiles au profit de
la victime.
Section 1 : L’exécution des décisions par rapport à l’enfant en
conflit avec la loi.
21
La décision du juge pour enfants peut consister, comme
nous l’avons examiné précédemment, soit à maintenir l’enfant en
conflit avec la loi dans son milieu familial ou dans une famille de
substitution, soit à le placer dans une institution, sous l’autorité des
particuliers ou des personnes publiques investis légalement des
pouvoirs de surveillance, de garde et d’éducation.
§1.Le rôle des intervenants dans l’exécution des décisions du
juge pour enfants en milieu familial.
Les parents, tout comme les autres personnes exerçant sur l’enfant
l’autorité parentale ou tutélaire , ainsi que les couples auxquels
l’enfant est confié sont les principaux intervenants pour l’exécution
des décisions en milieu familial. Ceux-ci, de même que le juge,
bénéficient, en toute circonstance, de l’appui technique de l’assistant
social à qui incombe la charge du suivi permanent.
1. Les parents et les particuliers personnes physiques.
Lorsque la loi parle de la remise de l’enfant à ses parents, il faut
considérer qu’il s’agit des ses père et mère biologiques ; les oncles, les
tantes et les autres membres de la famille peuvent être mis dans la
catégorie de « ceux qui en ont la garde » ou de « ceux qui exerçaient
sur lui l’autorité parentale ». Cela paraît plus clairement à l’article 106
al1.1 de la LPPE lorsque, s’agissant d’ « une mesure provisoire, l’enfant
est placé sous l’autorité de ses père et mère… », tandis que le couple
de bonne moralité fait partie de ceux qui sont qualifiés de ‘’particulier’’.
L’obligation qui incombe aux parents et/ou à toutes personnes
civilement responsables,
consiste à surveiller l’enfant dans tous ses
mouvements en vue de l’empêcher à se livrer de nouveau à des actes
qui soient de nature à porter atteinte à l’ordre public et aux droits
d’autrui.
En milieu familial, la loi n’a pas prévu la possibilité de séparer
l’enfant en conflit avec la loi avec les autres enfants, ni avec les autres
22
membres de la famille ; les parents ne peuvent pas adopter pareille
attitude, du reste, stigmatisante et frustrante à son égard, car elle ne
favorise pas l’amandement de l’enfant, ni sa réinsertion sociale.
Les parents et les particuliers dont il est question sont également
tenus, sous peine d’encourir les sanctions prévues à l’article 131 al.1
point 1 de la LPPE, de maintenir l’enfant dans ce milieu et de s’abstenir
de le soustraire ou de tenter de le soustraire à la procédure intentée
contre lui.
Il y a lieu de noter que, lorsque la mesure du juge consiste à placer
l’enfant chez un couple, la charge des frais d’entretien et d’éducation
de cet enfant, résultant des mesures prononcées par le tribunal,
incombent aux personnes qui lui doivent des aliments, si elles sont
solvables, ou, à défaut, à charge de l’Etat (art.121 de la LPPE).
Pour se rassurer de la meilleure observance des mesures ayant trait
au placement en milieu familial, le juge devra recourir au service de
l’assistant social (art.129 LPPE).
2. L’assistant social.
L’assistant social jouit des prérogatives très étendues dans
l’exécution des décisions rendues par le juge pour enfants.
A l’égard du juge, il vient en appui dans toutes les décisions que
celui-ci prend envers le mineur.
A l’endroit de l’enfant, son rôle consiste à prendre des mesures
d’accompagnement visant la sauvegarde de l’ordre public et la sécurité
de l’enfant et tenant compte de la réparation du préjudice causé (art
96 al. 2 LPPE).
Vis-à-vis du milieu, il veille sur les conditions de vie de l’enfant,
des parents et des personnes qui en ont la garde.
A cet effet :
-il recueille l’histoire de vie de l’enfant ;
-il examine les conditions socio-économiques de la famille ;
-il examine le climat relationnel et affectif dans la famille ;
23
-il se renseigne sur les projets de chacun concernant l’enfant ;
-il identifie les facteurs facilitant et les freins à son épanouissement ;
-il recueille avec beaucoup de prudence des informations auprès de
l’entourage sur le comportement de l’enfant et celui de ses parents…
Par ailleurs, l’assistant social, en procédant à la collecte des
informations concernant la conduite et le comportement de l’enfant
(art. 109 LPPE), peut saisir le juge en vue de la révision des mesures
prises à l’égard de l’ntéressé (art 125 al 1 in fine LPPE).
3. Le juge
L’article 129 al 1 de la LPPE dispose : « Le juge veille à
l’exécution de toutes les mesures qu’il a prises à l’égard de l’enfant ».
En matière de justice juvénile, le prononcé de la décision ne
dessaisit pas le juge qui l’a rendue comme il en est le cas pour la
justice des adultes. Bien au contraire, il est très actif et assure le suivi
des mesures qu’il a lui-même prises ou, s’il est empêché pour le faire,
un autre juge peut y pourvoir.
Grâce à son pouvoir de suivi même en milieu familial, et
conformément à l’article 125 de la LPPE, le juge peut être amené à
réviser sa décision, soit en la renforçant, soit en l’adoucissant. La
révision est obligatoirement envisagée tous les trois ans (art 127
LPPE), mais le juge peut intervenir avant l’expiration de cette période
grâce au rapport sur le dossier de la personnalité de l’enfant.
§2. L’exécution des décisions du juge pour enfants en milieu
institutionnel.
L’exécution des décisions du juge pour enfants peut être également
assurée par les institutions, privées ou publiques, et ce, dans le respect
de la réglementation en la matière.
24
§1. Les institutions privées
Il s’agit des établissements et des organisations à caractère social
et éducatif, créés par des particuliers en vue de l’encadrement des
jeunes enfants, en général, et des enfants en situation difficile en
particulier. Les institutions privées les plus répandues à l’heure actuelle
prennent la forme des organisations non gouvernementales agréées
par l’Etat. Les orphelinats privés font également partie des institutions
privées.
Dans ces institutions privées, le personnel qui y travaille est doté
des compétences qui lui permettent de veiller à l’encadrement psychoaffectif de l’enfant, à lui assurer les moyens nécessaires pour son
développement physique, mental et moral, son éducation… La liberté
du mineur se retrouve restreinte. Il y apprend des métiers et des
activités récréatives, culturelles, sportives…..
Par ailleurs, il est permis à l’enfant de fréquenter l’école ou de
faire un travail rémunéré.
Les institutions privées sont des milieux semi-ouverts dotés d’un
personnel qualifié et capable de surveiller l’enfant. Elles doivent remplir
les conditions suffisantes d’hygiène et de prise en charge médicale de
l’enfant.
§2. Les institutions publiques à caractère social
Il s’agit des établissements ou des services de l’Etat qui sont
chargés habituellement de l’encadrement des jeunes.
On peut citer, notamment, les orphelinats de l’Etat, les Centres
de Promotion Sociale de l’Etat placés sous l’autorité du Ministre ayant
les Affaires sociales dans ses attributions…
25
Ce sont des milieux semi-ouverts.
L’enfant placé dans une telle institution apprend les métiers et
peut aussi fréquenter l’école.
Il convient de noter que les établissements de garde et
d’éducation de l’Etat et les établissements de rééducation de l’Etat sont
aussi des institutions publiques ; mais, elles fonctionnent selon un
régime particulier.
§3. Les établissements de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE)
A titre de rappel, il sied de signaler que le décret du Premier Ministre
délibéré
en
conseil
des
Ministres
fixera
l’organisation
et
le
fonctionnement des établissements de garde et d’éducation de l’Etat.
Mais, en attendant, l’exécution des décisions du juge ayant trait à cette
mesure repose sur l’ordonnance n° 13/140 du 23 avril 1954 portant
régime des établissements de garde et d’éducation de l’Etat.
En vertu de l’article 1 de l’Ordonnance précitée, l’institution
susvisée est destinée à ne recevoir que les enfants en conflit avec la loi
qui font l’objet d’une mesure de garde, d’éducation et de réinsertion
prise par le juge pour enfants.
Il n’est, donc, pas normal que dans ces établissements, destinés
uniquement aux enfants placés par le juge à la suite d’une décision de
justice, on y trouve, de nos jours, les enfants provenant d’autres
milieux, tels que les services de sécurité…
Dans les EGEE, les mineurs privés de liberté sont soumis à
l’autorité d’un agent de l’Etat appelé Directeur, chargé de prendre
toutes les mesures de sûreté et précautions pour empêcher lesdits
mineurs de se soustraire à sa surveillance et à l’exécution de la
26
décision prise à leur égard. Leur vie privée y est garantie en ce sens
qu’ils ont le droit de conserver leurs effets personnels.
Le personnel des EGEE, constitué des éducateurs, des travailleurs
sociaux, des psychologues, des psychiatres, des infirmiers, des
moniteurs d’enseignement… doit, dans l’exercice de ses fonctions,
respecter et protéger la dignité humaine et les droits individuels
fondamentaux de tous les mineurs. Il lui est interdit de recourir à la
force et aux moyens de contrainte physique pour maintenir la
discipline, sauf pour des cas exceptionnels et lorsque les autres moyens
pour le faire se sont avérés inefficaces.
Chaque mineur placé dans un EGEE
dispose d’un dossier personnel
contenant les pièces de procédure, les certificats médicaux, les notes
relatives à sa conduite, les notes relatives aux résultats scolaires, aux
travaux d’atelier et aux sanctions disciplinaires, et éventuellement les
correspondances échangées à son sujet.
Le dossier personnel du mineur doit être gardé de manière à ne
pas y donner accès au public. Il est confidentiel par souci de préserver
sa vie privée, mais peut être consulté par des personnes dûment
habilitées.
Toutefois, il est recommandé que tous les rapports et tous les
autres documents ayant trait à la personnalité de l’enfant placé dans
un EGEE soient transmis au juge pour enfants avec avis du Directeur
de l’Etablissement.
Le mineur placé dans un EGEE a droit :
- à une formation morale, scolaire et professionnelle assurée de
préférence
hors
de
l’établissement,
dans
des
communautaires ;
- a un travail propre à préparer son retour dans la société ;
écoles
27
- à une rémunération équitable s’il travaille ;
- aux soins médicaux et à la nourriture ;
- aux activités récréatives et culturelles ;
- aux visites et aux correspondances ;
- à l’éducation religieuse selon sa foi ;
-
à porter ses propres habits pour éviter l’humiliation et la
stigmatisation.
§4. Les établissements de rééducation de l’Etat (ERE)
Ces établissements concernent les enfants en conflit avec la loi et
qui ont commis les faits punissables par la loi pénale de plus d’un an de
servitude pénale, lesquels faits sont doublés d’un état de perversité
caractérisée du mineur.
Les établissements de rééducation n’ont jamais été organisés en
RDC, faute de décret y relatif.
Nous pensons que pour de tels cas, la décision du juge s’exécute
conformément à la législation sur les établissements de garde et
d’éducation de l’Etat.
Section 2 : L’exécution des décisions par rapport à la victime.
Dans la plupart des cas, la perpétration des manquements
qualifiés d’infraction par la loi commis par un enfant cause souvent
préjudice à la personne qui en est victime directe ou indirecte.
A cet égard, il importe de déterminer, d’une part, la personne
responsable de la réparation du dommage causé à la victime, et d’autre
part, d’indiquer la modalité d’exécution.
§1. Les personnes responsables de la réparation du préjudice.
28
Aux termes de l’article 258 du code civil congolais livre III,
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage,
oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
Il résulte de cette disposition que la victime d’un fait
dommageable a droit à la réparation du préjudice subi. Dans ce cas,
c’est l’auteur du fait incriminé qui est tenu directement de cette
réparation, sans préjudice des frais de justice entraînés par le procès.
C’est dans cette logique que le décret du 6 décembre 1954 sur
l’enfance délinquante a eu à condamner l’enfant aux frais et à le tenir
solidairement avec les civilement responsables
aux dommages et
intérêts en réparation du préjudice causé à la victime.
Par contre, la loi portant protection de l’enfant, en son article
119 stipule : « Si le manquement qualifié d’infraction est établi, le juge
met les frais à charge des personnes civilement responsables et, s’il y a
lieu, les oblige aux restitutions et aux dommages et intérêts ».
La disposition légale précitée se rapproche de l’article 260
du
code civil congolais livre III qui dispose : « On est responsable non
seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore
de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre,
ou des choses que l’on a sous sa garde.
-Le père, et la mère après le décès du mari, sont responsables du
dommage causé par leurs enfants habitant avec eux.
-Les instituteurs et les artisans, du dommage causé par leurs élèves et
apprentis pendant le temps qu’ils sont sous leur surveillance… ».
De l’examen des dispositions légales précitées il ressort que l’enfant en
conflit avec la loi est hors cause pour la réparation du préjudice que
son fait aurait causé à la victime.
En revanche, sont tenus aux frais, aux dommages et intérêts et autres
réparations :
-Les parents, c’est-à-dire les père et mère, ou ceux qui exerçaient
l’autorité parentale ou tutélaire sur l’enfant ;
29
- Les particuliers, tels que les couples et les institutions à qui le
juge a confié l’enfant ;
- et, dans une certaine mesure, l’Etat.
§2. Les personnes chargées de l’exécution des intérêts civils
de la victime et des réparations éventuelles.
En règle générale, lorsqu’une décision judiciaire comporte des
condamnations civiles, il est reconnu que la personne responsable peut
s’exécuter volontairement ; à défaut de l’exécution volontaire, il peut
être procédé par la voie forcée aux soins de l’huissier de justice.
Toutefois, au regard de la loi portant protection de l’enfant, il est
admis que le comité de médiation peut aussi parvenir à obtenir
réparation du préjudice au profit de la victime.
En effet, l’huissier exécute la décision du juge en recourant à la
procédure ordinaire prévue par le code de procédure civile.
Pour sa part, le comité de médiation, dûment saisi par le Président
du tribunal pour enfants, assure la réparation du dommage causé à la
victime en se conformant à l’un des procédés prévus à l’article 134 de
la loi portant protection de l’enfant, à savoir :
- l’indemnisation de la victime :
- la réparation matérielle du dommage ;
- la restitution des biens à la victime ;
- la compensation ;
- les excuses expresses présentées de façon verbale ou écrite à la
victime ;
- la réconciliation ;
- l’assistance à la victime
- le travail d’intérêt communautaire.
Il est bon de noter que la matière relative à la médiation fait l’objet
d’un module bien détaillé et nous conseillons aux lecteurs de s’y
référer.
30
Table des matières
I. Introduction .............................................................................1
Chapitre 1 : Les décisions prononcées par le juge pour enfants ..........4
31
Section 1 : Les mesures provisoires (art 106 et 108 LPPE) ..............4
§1. Le placement en famille (art 106 al1.1) ................................5
§2. : L’assignation à résidence (art. 106 al1.2 de la LPPE)............5
§3. Le placement chez un couple ou en institution (art 106 al1.3de
la LPPE) ................................................................................6
§4. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de
l’Etat (art.108 al.1 de la LPPE)..................................................7
Section 2 : Les décisions ou mesures définitives ............................9
§1. La relaxe (art 96 LPPE) .................................................... 10
§2. La réprimande
et la remise de l’enfant à ses parents ou aux
personnes qui exerçaient sur lui l’autorité parentale (art 113 al 1.1
LPPE).................................................................................. 11
§3. Le placement chez un couple ou dans une institution privée (art
113.2 LPPE)......................................................................... 13
§4. Le placement dans une institution publique à caractère social
(art 113 al1 LPPE) ................................................................ 14
§5. Le placement dans un centre médical ou médico-éducatif
approprié (art 113 al1.4 LPPE) ............................................... 14
§6. Le placement dans un établissement de garde et d’éducation de
l’Etat (art 113 al1.5 LPPE)...................................................... 15
§7. Le placement dans un établissement de rééducation de l’Etat
(art 117) ............................................................................. 16
Section 3 : Les spécificités des décisions du juge pour enfants....... 19
Chapitre 2 : Les modalités d’exécution des décisions du juge ........... 20
Section 1 : Structures d’exécution ........ Erreur ! Signet non défini.
§1. La famille ....................................................................... 21
§2. Les particuliers .......................... Erreur ! Signet non défini.
§3. Les institutions privées .................................................... 24
§4. Les institutions publiques à caractère social ........................ 24
1°) Les établissements de garde et d’éducation de l’Etat (EGEE) . 25
2°) Les établissements de rééducation de l’Etat (ERE) ............... 27
Section 2 : Le rôle des intervenants dans l’exécution des décisions en
matière de justice juvénile........................................................ 27
32
§1. Le rôle du juge .......................... Erreur ! Signet non défini.
§2. Le rôle de l’Officier du Ministère publicErreur !
Signet
non
défini.
§3. Le rôle des parents ou tuteurs ..... Erreur ! Signet non défini.
§4. Le rôle de l’assistant social .......... Erreur ! Signet non défini.
§5. Le rôle du greffier ...................... Erreur ! Signet non défini.
Table des matières ..................................................................... 30