Forum N° 1 Petite enfance : un champ en pleine mutation

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Forum N° 1 Petite enfance : un champ en pleine mutation
Forum N° 1
Petite enfance :
un champ en pleine mutation
Présidence et animation :
Joëlle MARTINAUX, membre du bureau de l’UNCCAS
Intervenants :
• Sylvie LE CHEVILLIER, sous-directrice à la CNAF, responsable du département "Vie
familiale et cadre de vie", à la direction de l’action sociale
• Ibrahim MOUSSOUNI, responsable du bureau Enfance et Famille à la DGCS
• Maria DA COSTA-PEREIRA, représentante du collectif "Pas de bébé à la consigne"
• Christiane PALLEZ, vice-présidente du CCAS de Metz, administratrice de l’UNCCAS
• Elisabeth DOINEAU, conseillère générale et présidente de la commission "Solidarité,
familles, enfance et insertion" au conseil général de Mayenne
• Christine ATTALI-MAROT, présidente de la commission petite enfance de l’UNIOPSS
Compte rendu :
Ibrahim Moussouni (DGCS) a présenté le contexte dans lequel s’inscrit la
politique de l’Etat aujourd’hui. Elle s’articule autour des 4 axes suivants :
Améliorer le volume l’offre d’accueil par la création de 200 000 solutions
d’accueil d’ici 2012, dont la moitié en accueil collectif et l’autre en accueil individuel
Diversifier les modes d’accueil : Le décret « crèche » de juin 2010 et les
récents modes d’accueil :
o Jardins d’éveil : préparer le passage vers l’école maternelle
o Consolider les micro-crèches : passage de l’expérimental au droit commun
o Maisons d’assistants maternels : faciliter l’accès au métier et rompre
l’isolement
Satisfaire les besoins en professionnels et leur offrir de meilleures
perspectives par la mise en œuvre concrète du « Plan métiers », le développement de
l’offre de formation en volume, l’adaptation du contenu des formations et développer les
passerelles (Aux Puer, Bac Pro...)
Renforcer les moyens, notamment ceux accordés à la branche Famille via
la Convention d’objectifs et de gestion 2009/2012 entre l’État et la CNAF (1,3 Mds€ de
plus dans le FNAS), la PAJE majorée pour horaires atypiques et le prêt installation
assistants maternels
Sur le décret « crèche », le représentant de la DGCS rappelle les modifications
apportées (reconnaissance du rôle « d’éducation » des crèches, intégration des
appellations génériques (« crèches collectives », « jardins d’enfants »…), clarification
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de la notion « d’unité d’accueil », simplifications de la procédure d’autorisation…) mais
précise qu’aucune modification du taux d’encadrement adulte/enfants n’a été apportée
en tant que telle. Les autres modifications ont concerné : le ratio des personnels
qualifiés (passage de 50/50 à 40/60), la possibilité de compter le directeur-adjoint (>60
places) dans le taux d’encadrement dans la limite d’1/4 temps, et l’accueil en
surnombre.
Après une présentation plus détaillée des jardins d’éveil, micro-crèches et
maisons d’assistants maternels, Ibrahim Moussouni évoque la Directive services en
présentant le choix fait par la France d’intégrer ce secteur et en affirmant que les
craintes de remise en cause du régime d’autorisation et des aides d’Etat ne sont pas
justifiées.
Maria Da Costa Pereira présente le collectif « pas de bébé à la consigne » créé
en mars 2009 pour défendre la qualité de l’accueil, individuel et collectif, des jeunes
enfants. Réunissant près de 50 organisations syndicales et associatives, il s’est
fortement mobilisé contre le décret de juin 2010.
Les principales craintes sont :
La baisse des taux d’encadrement via l’augmentation de l’accueil
en surnombre. Une crèche de 60 enfants pourra dorénavant accueillir jusqu’à 72
enfants simultanément dans les mêmes locaux et avec les mêmes
professionnels. Comment sera-t-il possible de personnaliser l’accueil des jeunes
enfants ?
La baisse du nombre de professionnels qualifiés (EJE,
puéricultrices, auxiliaires de puériculture) qui passent de 50 % à 40 % : comment
garantir un accueil de qualité ?
La mise en place des jardins d’éveil avec des taux d’encadrement
de 1 adulte pour 12 enfants auprès d’enfants de 2-3 ans qui sont encore des tout
petits, de grands « bébés » : que deviendra la section des grands en crèche ?
Que deviendra l’école maternelle ?
Ces mesures, associées à l’augmentation de l’agrément de 3 à 4 enfants chez
les assistantes maternelles, se heurtent au manque de professionnels qualifiés.
Si le besoin de création de places n’est pas contestable, cela ne peut se faire,
selon le collectif, au détriment de chaque enfant et de leur famille. Ce sont les
premières années de la vie qui sont déterminantes pour la vie d’une personne. Il est
moins coûteux d’agir sur la prévention que sur les conséquences qui pourront
apparaître à moyen terme si la principale préoccupation des politiques d’accueil de la
petite enfant est le taux de remplissage.
Sylvie Le Chevillier (CNAF) rappelle que le rôle de la branche Famille est
d’entendre les craintes des familles, des professionnels, des gestionnaires et des
pouvoirs publiques, même si l’exercice est complexe car les craintes exprimées ne sont
pas nécessaires les mêmes. La CNAF doit alors agir par son expertise (service d’étude
et de recherche, outils de pilotage via un système d’information poussé) pour adapter
l’offre aux besoins.
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Quant au rôle de régulateur des financements, la CNAF rappelle que la Petite
enfance représente 1 point de PIB (plus de 19 milliards d’euros, dont 10 milliards par la
CNAF et 14 milliards par la MSA). La COG entre l’Etat et la CNAF a été signée avant la
crise et a donc permis au fonds national des prestations familiales et au fonds national
d’action sociale de croître de +7,5 % par an en moyenne. Cependant la création de
places ne peut se faire sans les acteurs locaux. Il est donc important de faire des
arbitrages face au coût élevé des structures d’accueil. Cependant la création de
crèches rapporte d’un point de vue économique et sociétal. S. Le Chevillier ajoute qu’il
serait intéressant de recenser toutes les externalités positives des créations de places
(effets sur l’emploi, le secteur du bâtiment, la cohésion sociale sur le territoire…).
Dans le cadre de la politique de création de 200 000 solutions d’accueil, la CNAF
a un rôle à jouer. Face au nombre de départs à la retraite des assistantes maternelles
par exemple, elle doit agir en matière d’information sur les besoins des territoires.
Quant aux nouveaux modes d’accueil, la CNAF reconnaît que le coût des microcrèches est sensiblement identique à celui des crèches classiques et que l’effet de
l’augmentation législative de l’agrément de 3 à 4 enfants sur la capacité d’accueil sera
limité par la taille des logements des assistantes maternelles. Enfin, Sylvie Le Chevillier
reconnaît que les mesures nationales n’ont pas nécessairement d’effet mécanique sur
la création de places en raison des difficultés de recrutement et de financement des
gestionnaires. Pour conclure, la CNAF estime que la diversification des modes d’accueil
doit être adaptée aux familles et aux territoires.
Elisabeth Doisneau, du Conseil général de Mayenne, présente les 27 Maisons
d’assistantes maternelles (MAM) existant sur le territoire.
89 assistantes maternelles exercent aujourd’hui leur activité en
MAM pour une capacité totale d’accueil de 348 places (5 projets
supplémentaires en cours)
Les assistantes maternelles regroupées à plusieurs (2, 3 ou 4) et
constituées en association, accueillent des enfants hors de leur domicile, dans
un local dédié à cet accueil tout en conservant les spécificités de leur statut
d'assistante maternelle, notamment la relation contractuelle avec les parents
employeurs.
De nombreuses MAM se caractérisent par leur implantation au sein
de communes rurales dépourvues de mode d’accueil collectif et/ou fonctionnent
selon des horaires dits atypiques (dès 4 h 30 le matin jusqu'à 21 h 30 le soir).
Etant donné le caractère rural du département, les taux élevé de natalité et
d’activité des femmes et le faible taux d’équipements collectifs en Mayenne (7 % de
l’offre globale), ces MAM se sont développées :
à la demande des familles, qui étaient intéressées par un mode de
garde diversifié, à mi-chemin entre l’accueil collectif et individuel, permettant une
continuité de l’accueil en cas d’absence temporaire d’une assistante maternelle
et offrant un accueil sur des horaires décalés,
à la demande des assistantes maternelles, qui souhaitaient
travailler différemment en séparant mieux leur vie professionnelle de leur vie
familiale, rompre leur isolement et garder leur statut d’assistante maternelle.
Les communes « accueillantes » bénéficient quant à elles, outre du
fait de rendre leur territoire plus attractif (horaires, diversification), d’un mode
d’accueil à un coût inférieur à celui des structures classiques, type crèches.
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Ces projets de création de MAM sont accompagnés par le conseil général qui a
défini le contenu du dossier à déposer par les assistantes maternelles intéressées
(projet pédagogique, expérience minimale des assistantes maternelles, agencement de
la maison, budget prévisionnel..) et organise des visites des locaux à la suite desquelles
une nouvelle attestation d’agrément, libellée à l’adresse de la MAM, est adressée à
chaque assistante maternelle et la signature d’une convention relative au
fonctionnement du RAM est exigée.
Un guide pratique relatif aux MAM a également été rédigé afin de servir de «
référence », notamment aux porteurs de nouveaux projets.
Christiane Pallez présente les nouveaux projets du CCAS de Metz qui
s’articulent autour de :
L’extension des horaires d’ouverture d’un multi-accueil fonctionnant
dorénavant de 6h à 22h avec du personnel volontaire.
La création d’une micro-crèche de nuit, mixée avec un accueil
familial, fonctionnant ainsi 24h/24h avec une direction par une puéricultrice.
La réservation de places de crèches publiques par des entreprises
afin d’accroître l’attractivité du territoire.
Un projet de multi-accueil de 60 places avec un projet culturel grâce
au Centre Pompidou Metz voisin.
C. Pallez rappelle que ces projets ont un coût et émanent d’une volonté politique
forte de répondre aux besoins des familles, mais ils ne peuvent être mis en œuvre sans
la CNAF. L’exigence de taux d’occupation de 100% n’est par réaliste, il faudrait
s’interroger sur les raisons qui expliquent que les taux soient dans la réalité inférieurs
(60-70 %) avant d’assouplir les règles d’accueil en surnombre. Comment remplir les
crèches de 7h à 7h30 et de 19h à 19h30 ? Ces exigences génèrent un stress important
sur les équipes et impliquent un surcroit de travail non négligeable (adaptation d’un
même couchage pour la sieste de 2-3 enfants différents par jour) et préjudiciable à la
santé des personnels.
C. Pallez rappelle que les élus, locaux comme nationaux, sont conscients des
réalités économiques mais que celles-ci ne peuvent mettre à mal les réalités sociales.
Christine Attali-Marot (UNIOPSS) présente les enjeux de l’inclusion du secteur
de la Petite enfance dans le champ de la Directive européenne sur les services dans le
marché intérieur. Après avoir présenté le sens de cette Directive* et les règles
d’exclusion, prévues à la fois à l’article 2.2.j et par l’obligation de mandatement du
prestataire de service par la puissance publique, le calendrier et le processus de
décision du gouvernement français ont été expliqués. Bien que le public des
établissements d’accueil de jeunes enfants ait été reconnu comme vulnérable et fragile,
la petite enfance n’a pas été intégrée dans la définition française du secteur « child
care » qui pouvait être exclu de la Directive services, la traduction de ce dernier terme
en français ayant été réduit à l’aide sociale à l’enfance (ASE).
L’UNIOPSS rappelle que cet arbitrage aboutit à une situation contradictoire dans
laquelle l’accueil individuel par une assistante maternelle est exclu de la DS alors que
l’accueil collectif est inclus. Cette décision a fait réagir les fédérations, dont l’UNIOPSS
et l’UNCCAS, qui demandent un cadre de protection des services d’accueil de la petite
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enfance afin d’éviter un assouplissement des normes de fonctionnement et
d’encadrement à l’avenir.
Pour l’UNIOPSS, le temps de la petite enfance doit être considéré comme le
premier temps de l’éducation des enfants. « Investir dans la qualité de l’accueil, c’est
investir dans les futurs citoyens de demain ».
* Réduire les entraves et autres barrières administratives qui empêchent la libre
installation et la libre prestation des opérateurs européens de services
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