Correspondant à l`étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner
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Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 En juin 2013, nous accueillions une vingtaine d’étudiants arrivant en Croatie par la voie des airs. C’était le début d’une grande aventure : un stage de deux semaines à Trogir, importante ville de la Dalmatie. Leur curiosité et leur énergie sans borne ont permis la production de six reportages vidéo et de deux reportages photos. Pour les deux correspondants à l’étranger produisant des reportages photos, le défi était de taille! Sans coéquipier, leur rôle était de rapporter des images témoignant des évènements au quotidien et de construire une série d’images dans un but documentaire. Voici donc les deux reportages photos de l’édition 2013 du projet Correspondant à l’étranger. Coordonnateur Stéphane Fontaine, professeur de sciences politiques Responsables du projet Philippe Aubin-Lussier, professeur de psychologie Luc Dragon, professeur d’économie Catherine Beaulieu, professeur de psychologie Table des matières L'architecture de la Dalmatie: un décor influencé par l'histoire ..................................... page 2 Par Florence Gamache-Lavoie Prières d’horizon ............................................................................................................ page 16 Par Joanie Tremblay Page 1 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner L’architecture de la Dalmatie : Un décor influencé par l’histoire. Par Florence Gamache - Lavoie Page 2 Croatie 2013 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 La Dalmatie est une région du Sud de la Croatie. Puisque ce pays a seulement été formé à la suite de la dissolution de la Yougoslavie, les différentes régions de la Croatie ont des histoires divergentes dépendamment des différents Empires les ayant conquises par le passé. Étant située géographiquement proche de l'Italie, la Dalmatie a beaucoup été influencée par celle-ci (on le constate, par exemple, en remarquant la nourriture servie dans les restaurants de la région, fortement inspirée par la cuisine italienne). L'architecture de cette région a également été marquée par l'histoire. Lors de mon séjour en Croatie, j'ai résidé dans une petite ville touristique nommée Trogir. Située sur le bord de l'eau, cette ville est peuplée de maisons rappelant celles que l'on peut apercevoir dans le Sud de l'Europe dans des pays comme la Grèce; les murs sont blancs et les toits, orangés. La photo suivante représente bien les bâtiments que l'on retrouve généralement en Dalmatie. Vue sur la Mer Adriatique, à Split. Des bateaux de pêche et de touristes y sont généralement accostés. Au second plan, on aperçoit des maisons d'apparence typiquement méditerranéenne, avec des murs de couleur pâle et des toits en tuiles oranges. D'autres maisons, situées plus en hauteur, sont visibles à l'arrière-plan. Page 3 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 De nombreuses traces de l'histoire peuvent être observées à Trogir. Par exemple, la cathédrale de Saint-Laurent. Celle-ci a commencé à être bâtie vers 1200, mais sa construction a été terminée au XVIe siècle. En conséquence, les trois styles architecturaux (roman, gothique et baroque) y sont présents à différents endroits. Ce bâtiment n'a pas été le plus facile à photographier, puisqu'il était immense et que la prise de photos était interdite à beaucoup d'endroits à l'intérieur. Fenêtres de la cathédrale Saint-Laurent. Celles-ci ont été rénovées, mais le contour des fenêtres indique une appartenance au style architectural gothique, puisque la forme des bordures des fenêtres est un design typique des Vénitiens l'époque, tout comme les colonnes qui y sont rattachées. Page 4 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 La cathédrale de Saint-Laurent, tout comme le palais Cipiko situé juste à côté, doivent la majorité de leur design architectural aux Vénitiens, qui ont conquis la Dalmatie au cours de la période des Croisades. Le portail de la cathédrale, sculpté en 1240 par le Croate Radovan, est un chef-d'œuvre de l'art roman. Il est encadré par deux lions qui symbolisent la suprématie de Venise sur la Dalmatie. Bien que le palais de Cipiko (une famille de riches aristocrates Vénitiens) ait été bâti surtout dans le style architectural gothique, certains endroits situés plus près de la cathédrale portent des traces du style roman, comme identifié ci-dessous. L'église Saint-Pierre, également située à Trogir, a été construite à la même époque, en 1242. Cette église appartenait au monastère des femmes. La photo suivante représente la sculpture de SaintPierre, présente au-dessus du portail d'entrée de l'église. Les sculptures de ce genre étaient couramment construites au cours de l'Antiquité. Sculpture présente au-dessus de l'entrée de l'église Saint-Pierre, à Trogir. Page 5 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 La tour de l'horloge est située juste à côté de la cathédrale Saint-Laurent et du palais Cipiko. Cette tour a été construite au quatorzième siècle. On peut y voir l'heure écrite en chiffres romains sur la photo ci-dessous. L'architecture de cette tour est inspirée du style roman, puisqu'elle comporte des éléments rappelant l'Antiquité. La raison pour laquelle tant d'éléments de toutes les périodes historiques se retrouvent ensemble à cet endroit, c'est les nombreuses guerres que la Dalmatie a dut subir au cours de son histoire autour des années 1200-1500, causant parfois la démolition de certaines parties des bâtiments. Les Vénitiens ayant été un peuple particulièrement attaché à l'expression artistique en général (tout comme la plupart des villes italiennes), ils se sont beaucoup exprimés à travers l'architecture. La vieille ville de Trogir comporte tant de bâtiments anciens portant des traces de l'histoire qu'elle est complètement protégée par l'UNESCO. Page 6 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 La grande horloge présente dans la place centrale de la ville de Trogir. En se promenant dans les rues très étroites de la ville, on peut contempler des bâtiments dont l'apparence rappelle les époques où les Grecs, les Romains et les Vénitiens ont occupé la Dalmatie. La religion est également très présente dans la ville. Portail d'entrée de la vieille ville de Trogir, on peut voir en arrière-plan des boutiques où les touristes vont souvent acheter des souvenirs. Trogir est une ville qui compte beaucoup sur le tourisme pour faire rouler son économie. Page 7 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 On le réalise en montant au sommet de la grande tour de 154 pieds de haut située à côté de l'entrée de la cathédrale Saint-Laurent. En regardant la ville à vol d'oiseau, on remarque la présence de nombreuses églises, identifiables par les croix installées à leur sommet. Escaliers de la tour d'observation située à côté de la cathédrale de Saint-Laurent. Il y a tellement de bâtiments historiques à Trogir qu'il n'est pas rare d'en apercevoir quelques-uns se fondant dans le décor quotidien de la ville. Page 8 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 La photo ci-dessous représente la tour Saint-Marc, construite en 1470. Un terrain de soccer a été aménagé juste devant celle-ci et lors de mon séjour en Croatie, j'ai remarqué que des groupes d'enfants s'y rassemblaient souvent (de l'autre côté de la tour, il y a une garderie). On peut voir, à l'avant-plan, le terrain de soccer qui a été emménagé juste à côté de la tour Saint-Marc. La construction de la tour Saint-Marc s'est terminée à la fin du quinzième siècle. Au deuxième étage de la tour, on peut voir les armoiries du comte Antonio de Canal (ses armoiries datent de 1496 et sont symboliques de l'époque de la Renaissance). Ce sont les Vénitiens qui l'ont construite, lorsqu'ils se sont mis à fortifier la ville au quinzième siècle. Page 9 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Situé à mi-chemin entre Trogir et Split se trouve une série de villages regroupés en une seule ville sous le nom de «Kastela». Ces villages sont nommés après les châteaux qui y ont été érigés. De nombreux vestiges de l'Empire romain peuvent être observés à Kastela; à Kastel Sucurac, il y avait un musée Photographie de l'intérieur de la tour Saint-Marc. comportant des reliques de l'Antiquité que l'on pouvait observer. Il y avait sept places fortes entre Split et Trogir pour défendre le littoral contre les Turcs et servir de refuge à la population avoisinante. Cinq de ces châteaux existent encore aujourd’hui; ils ont été construits entre le 15 e et le 16 e siècle. Certains ont été transformés en villas fortifiées. L’un d’eux demeure inchangé depuis sa construction, le Kastel Stari, un autre exemple d’architecture gothique. Le Château Saint-Georges (Kastel Sucurac) n’était initialement qu’un tour, lors de sa construction en 1392, il a été transformé en palais gothique Kastela, vue sur des bâtiments anciens, dont une église catholique de style roman. à la fin du 15 e siècle. Une photo montrant ces deux parties du château pourrait être prise afin de comparer leur architecture. Le Kastel Luksic est de style Renaissance (terminé de construire en 1564) et c’est le plus grand de la série, il abrite aujourd’hui un centre culturel. La photo suivante représente un exemple de l'architecture de cette région. On peut constater que les bâtiments sont encore plus vieux que ceux de Trogir. Page 10 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Split est la plus grosse ville de la Dalmatie. Comme Trogir, elle a une architecture très méditerranéenne. C'est une ville médiévale remplis de palais gothiques et de la Renaissance, rappelant beaucoup Trogir à cet égard également. Ci-dessous, une vue à vol d'oiseau de la ville. Vue d'envol de la ville de Split, on peut apercevoir d'autres maisons blanches aux toits rouges ainsi que des montagnes en arrière-plan. C'est à Split que l'on retrouve le fameux palais de Dioclétien, cet ancien Empereur romain qui y avait fait construire sa demeure. Dioclétien était un empereur romain qu’on croit originaire de Salona, il fut porté au pouvoir en l’an 284. Lors de sa construction, avec son enceinte fortifiée, le palais ressemblait à un camp militaire romain. A l’extérieur du palais, on peut observer de puissantes murailles et des tours carrées du troisième siècle. Quand les habitants de Salona s’y réfugièrent en 615, ils Page 11 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 construisirent des habitations à l’intérieur. Il en va de soi que l'architecture du palais, tout comme celle de la place de la ville juste à côté, est de style roman. On remarque l'influence romaine dans la vieille ville par la structure des voies identique à celle utilisée par les romains, avec sa rue principale commerciale orientée nord-sud et les rues secondaires alignées d’est en ouest. Par contre, l’hôtel de ville situé juste à côté du palais est de style Colonnes de style roman à la place de la ville de Split. gothique; il a été construit par les Vénitiens à la première moitié du 15 e siècle. La photo suivante illustre des colonnes à l'extérieur du palais de Dioclétien. Dubrovnik est une autre ville qui a été particulièrement touchée par l'histoire. Elle est située à l'extrémité Sud de la Dalmatie. Pour s'y rendre, il faut passer par la frontière de la BosnieHerzégovine. La ville de Dubrovnik a vécu un tremblement de terre en 1667 et a été reconstruite par LA VILLE A AUSSI ÉTÉ BOMBARDÉE PAR L’ ARMÉE YOUGOSLAVE LORS DE LA GUERRE EN 1991-1992. la suite dans un style baroque. La ville a aussi été bombardée par l’armée yougoslave lors de la guerre en 1991-1992. La photographie de droite montre un bâtiment ayant subi des bombardements pendant la guerre. Page 12 Un bâtiment ayant été endommagé par les bombardements lors de la guerre yougoslave à Dubrovnik. Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Il y a beaucoup de très belles églises dans le Vieux Dubrovnik. Une des plus prestigieuses est sans doute l'église de Saint-Ignace, bâtiment de style baroque datant du dix-septième siècle. Contrairement à Split et Trogir, où les styles architecturaux romans et gothiques dominaient, Dubrovnik est principalement caractérisée par ses bâtiments de style baroque inspirés des Siciliens. La photo suivante nous montre une fenêtre d'église de style baroque. Fenêtre d'une église de style baroque à Dubrovnik Page 13 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Le vitrail est l'élément le plus représentatif du style gothique; la religion était l'élément autour duquel tout tournait pendant le Moyen-âge, conséquemment les vitraux des églises étaient mis en valeur. Ces derniers représentent des scènes religieuses qu'on peut retrouver dans la Bible. Salona est une ville où se trouvent beaucoup de ruines de l'Empire romain. Cette ville était la capitale de la province de la Dalmatie lorsque celle-ci se trouvait sous le régime romain. Le style architectural date donc de l'Antiquité. C’est de Salona que les gens sont partis pour se réfugier dans le palais de Dioclétien qui était abandonné à cette époque. Son inoccupation remonte à l’an 614; ce qu’on y voit est vraiment d’origine et n’a pas été modifié. Vitrail présent dans une église de style gothique à Dubrovnik Page 14 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Il y avait dans cette ville un amphithéâtre, un forum, des temples et des thermes. C'était la ville la plus riche et la plus peuplée de cette région de l'Adriatique pendant la période de l'Empire romain. La photographie suivante illustre une partie des ruines de Salona. Ruines de l'Empire romain à Salona. On aperçoit sur cette image le portail d'entrée. Page 15 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Prières d’horizon Par Joanie Tremblay Page 16 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Première image de la Croatie : un paysage vert de forêts, rocailleux de montagnes, bleu de la mer Adriatique. Première observation au sujet des Croates : ils sont grands, minces, le visage sévère, l’expression désintéressée. L A RELIGION CATHOLIQUE ROMAINE EST EN RÉALITÉ UNE PLEINE PART DE L ’ IDENTITÉ CROATE D ’ HIER ET D ’ AUJOURD ’ HUI. Sur plusieurs plans, ils forment un tableau très homogène. L’un d’entre eux est celui de la religion; la Croatie constitue d’abord et avant tout une nation catholique. La proportion d’individus adhérant au catholicisme s’élève actuellement à quelque 87,8% de la population, contre 4,4% d’orthodoxes, 1,3% de musulmans, 0,3% de protestants, 5,2% d’agnostiques et de non-croyants et 1% d’autres religions diverses. La population est certes moins pratiquante qu’auparavant mais elle reste visiblement croyante. Les fêtes religieuses sont nombreuses et grandement célébrées. La religion catholique romaine est en réalité une pleine part de l’identité croate d’hier et d’aujourd’hui. Pour cause, le pays possède une position géographique particulière l’isolant entre plusieurs nations orthodoxes et musulmanes. La situation, jugée à de nombreuses instances comme « menaçante », a contribué à élargir la main mise que possédait alors l’Église catholique romaine sur la population. La religion s’est rapidement élevée en tant que l’une des caractéristiques distinctes d’un peuple croate plongé au cœur d’un territoire de nations disparates. Véritable rempart de l’identité, le catholicisme colore largement le nationalisme croate. Dans le contexte de la guerre ayant déchiré la Yougoslavie en 1991, ce nationalisme contribue grandement aux violences commises par les Croates. La distinction entre le peuple croate et les nations alors Page 17 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 ennemies, Serbes, Bosniaques, Monténégrins, etc., est magnifiée. Les affrontements, de tous les côtés, se rendent parfois jusqu’à l’intention du génocide à l’égard de l’autre. La religion forme l’un des critères décisifs de cette division ethnique qui permet de diaboliser à un tel point son adversaire. À l’époque, elle est utilisée comme une sorte d’idéologie par les gens au pouvoir, ce qui explique aussi son encastrement dans le nationalisme. Ainsi, il est possible aujourd’hui encore de voir les traces d’une ferveur religieuse enrichie du sentiment d’appartenance nationale en Croatie. En Dalmatie, dans le sud de la Croatie, les messes en soi sont surtout peuplées de personnes plus âgées, mais l’impact de la religion et de ses pratiques traditionnelles, se décline toujours dans une majeure partie de la population qui y vit. Des symboles religieux se disséminent un peu partout. Par exemple, les chauffeurs de taxi et d’autobus se munissent généralement d’un chapelet suspendu à leur rétroviseur, sans doute dans l’idée d’appeler Dieu à les protéger sur la route. Chez les gens plus âgés, la séparation entre les hommes et les femmes est grande. À dire vrai, l’espace de la femme se trouve encore dans la demeure, car il est rare d’observer une dame se promener sans but à l’extérieur, sans sacs de course entre les mains. Les Croates plus âgés pouvant être aperçus au dehors sont essentiellement des groupes d’hommes. Chez Page 18 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 les plus jeunes, la chose est un peu différente; ceux-ci sortent, boivent ensemble dans des cafés et se mélangent davantage que leurs aînés. Cependant, les jeunes femmes sont toujours bien soignées : leurs cheveux sont longs, attachés, C HEZ LES GENS PLUS ÂGÉS , LA SÉPARATION ENTRE LES HOMMES leur visage est maquillé, leurs ET LES FEMMES EST GRANDE . vêtements à la mode et les jambes cachées même par temps d’extrême chaleur. Lorsque la femme quitte la demeure, elle doit être présentable pour toute occasion selon des normes établies. Enfin, exemple notable du mélange entre religion et nationalisme : suite à une cérémonie de mariage dans la petite ville de Trogir, une voiture suivait celle des mariés, munie d’un gigantesque drapeau de la Croatie en klaxonnant à tout va pour célébrer l’union du couple. Il est aussi fréquent de voir un bâtiment religieux, une église, une cathédrale, surmonté du drapeau de la Croatie. Trogir Au cœur de la Dalmatie se trouve la vieille ville médiévale de Trogir. Fondée par les Grecs environ au IIIe siècle avant J.-C., elle est l’une des premières à composer la région de l’Adriatique. Elle est forte d’un climat agréable, caractéristique du littoral. Elle subit au cours des siècles l’influence grecque, romaine, byzantine et vénitienne, prise tour à tour sous la domination de ces différents peuples. Merveilleusement préservée, la ville figure présentement sur la liste du Patrimoine mondial de l’Unesco. Page 19 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Trogir fait partie des villes du littoral qui, au cours de la guerre ayant ravagé la Croatie, a vu son économie être durement touchée. Depuis les années 1970, elle tirait en effet la majeure partie de sa subsistance dans le tourisme, bien devant l’agriculture et la pêche malgré sa marina très active. Ainsi, Trogir commence depuis peu à rafistoler les bouts abandonnés au marasme de l’après-guerre. Par sa splendide vieillesse et son mélange d’influences culturelles, Trogir offre un sujet de photographie fascinant. Elle est évidemment forte de son identité catholique et se répand en nombreuses églises anciennes, préservées d’aussi lointainement que le 13e siècle. Maisons, palais, cafés et commerces vibrent de ce même historique et veinent les ruelles étroites de la ville PAR SA SPLENDIDE VIEILLESSE ET SON MÉLANGE D ’INFLUENCES CULTURELLES , T ROGIR OFFRE UN SUJET DE PHOTOGRAPHIE FASCINANT . surmontées de hauts murs de pierre. La porte nord de Trogir est gardée de la sculpture de Saint-Ivan (francisé en « Saint-Jean »), le patron de la ville. L’image de la statue est symbolique de la teneur du catholicisme de la ville. Le personnage religieux délimite l’une des frontières de la ville et lui accorde une protection toute divine, tout en Page 20 Correspondant à l’étranger prévenant ce qui Découvrir – Rencontrer – Témoigner peut Croatie 2013 s’y aventurer. Il surplombe l’arche d’entrée avec une prestance toute nette, main tendue, doigt relevé comme s’il s’apprêtait à prononcer un discours. Mise en garde peutêtre à qui entrera? Trogir est bien entendu riche en bâtiments religieux. Plusieurs petites églises s’y retrouvent, certaines laissées en désuétude, d’autres bien entretenues. De la même façon, on retrouve à l’occasion des autels religieux construits sur le bord des routes résidentielles, souvent munis d’une statue de la Vierge Marie en leur centre. La cathédrale St Lovro, située au cœur de la vieille ville, constitue l’un des établissements religieux les plus connus de Trogir. Chaque jour, on peut entendre résonner son clocher à intervalles réguliers. Son portail, finement sculpté par un artiste de renom, est achevé en 1420, et entouré de statues d’Adam et Ève. De style roman, elle est la plus haute bâtisse de la ville et possède un clocher du haut duquel il est possible de grimper. L’intérieur de la cathédrale renferme le sarcophage de St Ivan, le saint ayant servi de modèle à la statue dominant la frontière nord de Trogir. Le lieu est magnifique; il démontre une richesse et un souci du détail puissant, en plus d’être symbolique par le fait même de conserver les restes du patron de la ville. Page 21 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 À l’extérieur de la cathédrale se trouve un vaste espace dégagé, majoritairement occupé par les clients des différents cafés longeant les murs de la place. À cet endroit, divers évènements s’organisent régulièrement; spectacles, célébrations nationales, religieuses, etc. La place de la cathédrale forme un véritable lieu de rassemblement pour les habitants de Trogir. La photo ci-dessus représente un groupe de femmes entamant des chants religieux en croate. Le spectacle avait attiré une foule importante et certains individus chantaient en chœur avec elles, une dame agitant même le drapeau national avec émotion. Page 22 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 En ce même endroit, face de la cathédrale, un petit bâtiment est dédié à la mémoire d’hommes natifs de Trogir tombés lors de la guerre de 1991. Il s’agit d’une petite pièce blanche, sobre, munie d’un autel sur lequel se dresse une magnifique sculpture. Une vitrine est affichée sur le mur, contenant les photos et les noms des soldats morts. Tout près d’un tombeau se tient un large drapeau de la Croatie. Éternel rappel d’une guerre encore trop fraîche dans l’esprit de chacun. Dubrovnik Dubrovnik est l’une des villes touristiques les plus prisées du pays, ayant gagné le surnom de la « perle de l’Adriatique ». Elle se trouve à l’extrême-sud de la Dalmatie et forme le premier port de la route maritime de l’ouest. Au cours de la guerre de 1991, elle joue un rôle de première importance. Lorsque la Croatie déclare son indépendance, les Serbes, aidés des Monténégrins, y répondent notamment en s’attaquant à la ville, car Dubrovnik représente alors une position stratégique au cœur de la mer adriatique. Encerclée et bombardée durant quelque Page 23 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 huit mois, la ville est ravagée. La région aux alentours subit tout autant les effets de l’occupation ennemie. La reconstruction de Dubrovnik se fit avec l’aide d’un vaste programme de restauration ordonné par l’Unesco pour y retrouver et protéger les traces de son précieux patrimoine. De toute évidence, Dubrovnik L A RECONSTRUCTION DE DUBROVNIK SE FIT AVEC L ’AIDE D’UN VASTE PROGRAMME DE RESTAURATION ORDONNÉ PAR L’UNESCO regorge de magnifiques églises POUR Y RETROUVER ET PROTÉGER LES TRACES DE SON PRÉCIEUX catholiques, tout particulièrement PATRIMOINE . dans la vieille ville. Toutefois, la colonne de Roland est un monument extrêmement intéressant dans la perspective du récent conflit yougoslave. Il s’agit d’une longue colonne située tout près de l’église Saint-Blaise, surmontée d’une sculpture datant de 1418 d’un chevalier, un paladin nommé Roland. Cette colonne représente un symbole de liberté au cœur de la ville de Dubrovnik. Au cours de la guerre de 1991, alors que la ville était assiégée, la colonne Roland servit de point de ralliement pour les défenseurs de la cité. La statue ne se rapporte pas explicitement à l’aspect religieux, mais, par définition, un ordre de chevaliers était tout autant militaire que religieux. Ainsi, on peut encore y voir l’idée forte d’un protecteur, gardien de la ville, gardien de la liberté dans ce cas-ci, rattaché à la religion. À l’échelle des villes, on commence rapidement à observer au travers d’une architecture datée le même motif qui circule dans toute la Croatie : la religion Page 24 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 protectrice, la religion comme rempart contre les autres. Dubrovnik est une ville importante de la Dalmatie qui comprend une bonne diversité de lieux de culte. L’église orthodoxe serbe de la Sainte-Trinité est l’un des plus reconnus. Le monument date d’environ 1877 et s’illustre d’une architecture assez distinctive des bâtiments catholiques. À noter qu’elle possède une haute clôture en fer entourant son périmètre, chose qu’aucune autre église de la Croatie ne semble être pourvue. On ne peut alors s’empêcher de supposer l’importance de la division religieuse, tout en remarquant à quel point Serbes orthodoxes et Croates catholiques ont longtemps évolué en une grande proximité. Page 25 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Regard sur la Bosnie-Herzégovine : Mostar Page 26 Croatie 2013 Correspondant à l’étranger Découvrir – Rencontrer – Témoigner Croatie 2013 Si certaines villes de la Croatie portent encore des traces nettes de la guerre de l’ex-Yougoslavie, la ville de Mostar en respire le constant souvenir. Des bâtiments en ruine sillonnent ses rues, condamnés d’accès par danger d’effondrement, masqués de longs voiles ou simplement laissés à découvert, au vent et à la chaleur. Certains établissements portent des traces visibles d’impacts d’obus ou de balles, des explosions de ciment rajouté après coup qui ne font que trahir le violent passé de l’endroit. Parallèlement, Mostar est une ville affichant à l’inverse de celle de la Croatie une étonnante hétérogénéité religieuse. La population bosniaque est majorité musulmane, mais dans une proportion atteignant à peine plus de 40% des individus. Au cœur de la ville, on aperçoit alors une panoplie de mosquées, de synagogues et d’églises chrétiennes, plus bon nombre de cimetières assortis. Enfin, le sentiment national se fait plus discret qu’en Croatie. Le drapeau national n’est que peu affiché, alors que le passé communiste et la guerre de 1991 sont ouvertement exposés et même utilisés comme attractions touristiques. Bon nombre de marchands vendent des répliques d’artefacts de l’époque yougoslave, des tshirts exposant le visage de Tito, des casques de guerre, des chapeaux, des badges militaires et ainsi de suite. Parfois, des graffitis se lisent « Yugoslavia » sur les murs en ruine. Mostar n’est pas seulement une ville forgée de violence, elle est aussi une ville qui se refuse d’oublier. Page 27