ECO Immo_10-2010.pub - Etudes économiques du Crédit Agricole
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ECO Immo_10-2010.pub - Etudes économiques du Crédit Agricole
Note trimestrielle N°26 - Octobre 2010 Vers un marché plus équilibré en 2011 L e marché résidentiel connaît un redressement un peu surprenant depuis le début de l’année. Après un boom immobilier soutenu pendant dix ans (1997-2007), puis une crise économique et financière historique, une correction significative du marché semblait logique : non pas l’éclatement d’une bulle de l’immobilier et du crédit (comme aux ÉtatsUnis, Royaume-Uni, Espagne), le boom ayant été plus mesuré et moins risqué que dans ces pays, mais un ajustement des ventes et des prix pendant au moins deux à trois ans (comme dans les cycles précédents). Or, la correction est restée modeste et de courte durée (un an environ). Depuis le début de la crise, la baisse cumulée des prix de l’ancien est très faible, -4% selon les Notaires et -8% selon la FNAIM. Les prix sont repartis à la hausse et sont même en croissance forte sur certains segments (+9,8% sur un an à Paris), même si les hausses sont plus mesurées sur la France entière. Les ventes se redressent, mais restent en retrait de l’ordre de 15% par rapport aux années du boom, dans l’ancien comme dans le neuf. Cette reprise du marché étonne car, d’une part, les prix sont encore clairement surévalués, d’au moins 10 à 15%, et d’autre part, le climat économique reste médiocre, les perspectives incertaines et le taux de chômage élevé, supérieur à 9%. Le redressement du marché est donc assez artificiel et permis par les facteurs suivants. D’un côté, la demande de logements, qui est on le sait structurellement forte, bénéficie d’un double coup de pouce : des niveaux de taux de crédit habitat historiquement bas et un effet valeur refuge, lié aux incertitudes économiques, à une épargne faiblement rémunérée et à des marchés financiers très volatils. De l’autre, l’offre reste basse en France et très limitée en Ile-de-France : hésitation des propriétaires de logements loués à les mettre en vente, ces actifs étant plus sûrs et plus rentables que les investissements financiers, marché de la secondo-accession en reprise prudente, offre de logements neufs très limitée, notamment en Ile-de-France. En 2011, le marché devrait toutefois devenir plus équilibré. La demande sera potentiellement moins dynamique. La solvabilité des acheteurs sera plus dégradée qu’en 2010. Les avantages fiscaux seront revus en baisse. De plus, les taux de crédit habitat pourraient commencer à remonter légèrement au second semestre 2011. Inversement, l’offre pourrait s’élargir un peu. Sous l’hypothèse de moindres inquiétudes sur l’économie mondiale, l'effet valeur refuge jouera moins. Les secondoaccédants seraient plus confiants, et dans le neuf les mises en vente vont redémarrer. Ce marché plus équilibré devrait conduire à des hausses de prix contenues, ce qui permettrait une reconstitution progressive de la solvabilité des acheteurs. Olivier ELUERE Tendance dans l’ancien 2 Reprise graduelle des ventes de logements anciens Prix de l’ancien : débat sur l’ampleur de la reprise Tendances dans le neuf 3 Hausse des ventes au premier semestre 2010 Reprise des mises en ventes et stabilisation des stocks Les permis de construire se redressent 2010-2011 : 5 une reprise atypique 2009 : stabilisation du marché 2010 : offre basse et redémarrage des prix 2011 : vers un marché plus équilibré Nouvelles mesures fiscales 7 Création d‘un PTZ renforcé Réduction de certaines aides fiscales Olivier ELUERE [email protected] Tendances dans l’ancien Reprise graduelle des ventes de logements anciens Les ventes se sont redressées après l’effondrement du début 2009. Mais la dynamique de reprise reste assez modérée. Le nombre de transactions remonte, mais reste en retrait (-14%) par rapport à 2003-2007. En France, le nombre de transactions dans l’ancien avait chuté de 12% en 2009 (après -17% en 2008), pour atteindre 592 000 unités (à comparer à des niveaux de 820 000 par an en 2002-2007). Ces estimations sont établies par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (d’après les bases fiscales et notariales). Après un effondrement fin 2008-début 2009, elles sont ensuite remontées, pour atteindre 160 000 unités par trimestre au second semestre. Au premier semestre 2010, le nombre de ventes remonte encore, à 180 000 par trimestre. Il devrait atteindre 710 000 unités en 2010, niveau élevé mais qui reste en retrait de 14% par rapport aux niveaux moyens de 2003-2007. En Ile-de-France, la tendance est assez comparable. Les ventes de logements anciens, qui s’étaient effondrées au premier trimestre 2009 sont remontées ensuite. Sur les appartements anciens, le repli a été de 11% sur un an en moyenne en 2009 (après -17% en 2008) (source Notaires Paris Ile-de-France). Au premier semestre 2010, les ventes d’appartements sont en légère hausse par rapport aux niveaux du second semestre 2009. Les ventes des douze derniers mois sont inférieures de 10% à celles du boom (2004-2007). Prix de l’ancien : débat sur l’ampleur de la reprise Les chiffres FNAIM et INSEE-Notaires sont les principales références pour le suivi des prix de l’ancien. Ils donnent des signaux relativement divergents depuis le début 2010 (alors que les évolutions étaient assez similaires sur les dix dernières années). Au regard des chiffres FNAIM, les prix des logements anciens sont en croissance très modérée sur les derniers mois. après avoir nettement baissé en 2008, -10% sur un an (T4/T4), et s’être un peu redressés en 2009, +2,2% sur un an. Au troisième trimestre 2010, les prix sont en hausse de 1,1% t/t. En glissement annuel (T3 2010/T3 2009), ils sont quasi-stables, +0,6%. Sur les douze derniers mois, ils sont également en hausse très mesurée, 0,8% sur un an. D’après ces chiffres, la baisse cumulée des prix depuis le pic (atteint fin 2007) est modeste : elle atteint -8% (cf. analyse p. 5). Selon les indices INSEE Notaires, les prix se sont redressés au premier semestre et affichent une hausse assez forte, +6% sur un an au T2 2010. Depuis le début de la crise, la baisse cumulée des prix mesurés par les notaires est donc très faible, - 4%. En province, les hausses de prix restent modérées, voire en léger repli dans certaines régions, mais en Ile-de-France elles sont fortes. Au deuxième trimestre, les prix des appartements anciens sont en hausse de + 9,8% sur un an à Paris, +7,7% en Petite Couronne, +6,8% en Grande Couronne (source Notaires, Base BIEN). Les prix des maisons anciennes sont en hausse de 11% en Petite Couronne et 4,3% en Grande Couronne. Le prix moyen du mètre carré des appartements anciens s’élève à 6 680 € à Paris, 3 860 € en Petite Couronne et 2 900 € en Grande Couronne. ■ 2 Transactions de logements anciens 250 000 (nombre estimé par trimestre) 200 000 150 000 100 000 50 000 04 05 So urce : CGEDD, No taires, Crédit A grico le S.A . 06 07 08 09 No mbre de transactio ns estimées Prix des logements anciens Notaires 20 indice a/a 210 15 190 10 170 150 5 130 0 110 -5 90 -10 70 97 98 99 00 01 02 03 04 05 06 07 08 09 Variatio n sur un an, % So urce : INSEE, No taires indice base 100 T4 2000 Appartements anciens vendus libres à Paris euro s / m² 7 000 12 000 6 000 5 000 8 000 4 000 3 000 4 000 91 94 So urce : Chambre des no taires 2 000 97 00 03 No mbre 06 09 P rix au m² (éch. dr.) N° 26 — Octobre 2010 Olivier ELUERE [email protected] Tendances dans le neuf Hausse des ventes au premier semestre 2010 Au premier semestre 2010, les ventes de logements neufs (réservations, filière promoteurs, programmes d’au moins cinq logements) ont progressé de 6,5% par rapport au premier semestre 2009. Au deuxième trimestre, les ventes ont atteint 28 600 unités (cvs), en hausse de 7,2% sur un an. Les ventes de neuf, qui s’étaient redressées de 35% sur un an en 2009 (après il est vrai une chute des ventes très marquée en 2008) continuent donc à progresser. Toutefois, cette remontée reste relative. Les ventes du premier semestre 2010 sont en repli de 5,3% par rapport à celles du second semestre 2009. De plus, les niveaux récents (26 800 par trimestre au premier semestre) sont assez élevés mais assez nettement en deçà (-12%) de ceux des années 2004-2007 (30 500 ventes en moyenne par trimestre). milliers par trim. 49 Commercialisation de logements neufs 41 33 25 18 10 91 94 97 00 M ises en vente So urce : M inistère de l'Eco lo gie 03 06 Ventes 09 La tendance actuelle montre donc une reprise du marché, sans qu’on puisse parler de nouveau cycle de forte croissance de l’immobilier neuf. La nature des ventes reste d’ailleurs relativement atypique. En 2009, le rebond concernait essentiellement les investisseurs. Sur 107 000 ventes, 70 000 environ correspondaient à des investissements locatifs soit 65% environ, contre 40% habituellement (source Fédération des Promoteurs Constructeurs). Ceci a été permis par le vif succès du dispositif Scellier pour l’investissement locatif dans le neuf, très attractif fiscalement. Il permet (en 2009 et 2010) une réduction d’impôt de 25% (étalée à parts égales sur neuf ans) du montant de l’investissement, ce dernier pris en compte dans la limite de 300 000 euros. L’économie d’impôt peut donc atteindre 8 333 euros par an. Ceci a d’autant plus joué que les placements financiers étaient assez peu attractifs. Cette tendance se maintient sur l’ensemble de l‘année 2010 (proportion d’investisseurs de l’ordre de 60%), sachant que le dispositif sera un peu moins incitatif en 2011-2012 (cf. page 7). Le dynamisme des ventes est, en revanche, moins net chez les acquéreurs classiques (achetant un bien pour y habiter) et notamment les primo-accédants. En 2009, ce type de ventes a atteint un faible niveau, de l’ordre de 35 000 unités, soit 32% du total. Ce ratio est un peu plus élevé au premier semestre 2010. Ces acheteurs bénéficient pourtant de plusieurs facteurs favorables : Stocks de logements neufs (France) 130 milliers mois 23 110 19 90 15 70 11 50 7 30 3 91 94 97 00 03 06 09 Stocks à vendre Stock en mois de vente (éch. dr.) Source : Ministère de l'Ecologie la baisse des taux de crédit habitat ; le doublement du prêt à taux zéro (PTZ) pour les acquisitions de logement neuf (résidence principale) par des primo-accédants (sous conditions de ressources). Le PTZ peut ainsi atteindre jusqu’à 65 100 €. La doublement du PTZ n’est toutefois effectif que jusqu‘à mi-2010, et sa majoration n’est plus que de 50% au second semestre. Cette mesure a bénéficié au segment « maisons individuelles », mais assez peu au segment « promoteurs ». En effet, certains facteurs négatifs continuent à jouer : inquiétudes liées à une conjoncture économique incertaine et au niveau élevé du taux de chômage ; prix de vente trop élevés ; difficulté pour les « secondo-accédants » à combiner achat dans le neuf et vente dans l’ancien. De plus, l’offre reste relativement faible (cf. plus bas). 45 40 Ventes et stocks de logements neufs ventes en milliers mo is de vente 35 24 20 16 30 12 25 8 20 4 15 10 0 91 94 97 00 03 06 09 Ventes Sto cks en mo is de vente So urce : M inistère de l'Eco lo gie Au regard des enquêtes auprès des promoteurs, la demande de logements neufs à acheter s’est améliorée sur les derniers mois, mais reste voisine de sa moyenne de longue période. Le volume de ventes de logements neufs en 2010 devrait donc être en hausse modérée par rapport à 2009, de l’ordre N° 26 — Octobre 2010 3 Olivier ELUERE [email protected] de 3%, pour atteindre 109 000 unités (107 000 en 2009) (cf. analyse page 6). Stocks de logements neufs 20 Reprise des mises en ventes et stabilisation des stocks Les mises en ventes de logements se sont nettement redressées au deuxième trimestre 2010, 28 900 unités, en hausse de 56% sur un an et de 48% par rapport au niveau moyen de 2009. Mais elles étaient très basses en 2009 : les promoteurs se sont montrés très prudents après la chute des ventes de 2008 et ont réduit nettement leur offre de nouveaux programmes. Les stocks sont donc revenus assez rapidement à la normale (cf. plus bas). Avec ces niveaux de stocks et une demande en reprise graduelle, les promoteurs accroissent prudemment leurs mises en vente, Mais le niveau moyen du premier semestre, 28 000 unités, reste clairement en deçà de ceux atteints entre 2004 et 2007 (34 000 par trimestre). Les stocks de logements neufs atteignent 67 600 logements au deuxième trimestre (chiffre cvs), niveau quasiment identique à celui du trimestre précédent (67 700). En effet, le nombre de ventes a été à peu près le même que celui des mises en ventes au cours du deuxième trimestre. Sur un an, les stocks sont en baisse marquée, de 21%. Le ratio stocks/ventes, qui mesure le délai moyen d’écoulement des stocks, atteint 7,5 mois en juin 2010, après 7,7 mois en mars 2010 et 10,2 mois en juin 2009. Il se situe au niveau moyen de la période 2000-2010 (un point bas de 3,8 mois avait été atteint en 2004). Seulement 42% des stocks sont achevés ou en cours de construction, et 58% sont en projet. En Ile-de-France, les stocks sont à nouveau à des plus bas historiques, 3,9 mois de vente, du fait d’une demande assez soutenue et d’une offre nouvelle nettement insuffisante. (Ile-de-France) milliers mo is 30 25 17 20 14 15 11 10 8 5 5 0 91 94 97 00 03 06 09 Sto cks à vendre Sto cks en mo is de vente (éch. dr.) So urce : M inistère de l'Eco lo gie 600 France : mises en chantier et permis de construire milliers, cumul 12m 500 400 300 200 Les permis de construire se redressent En 2008 et 2009, la chute des ventes et la nette remontée des stocks (intervenues en 2008) avaient conduit les promoteurs et les constructeurs à ajuster leur offre et à réduire nettement les mises en chantier de logements. Ils ont été plus prudents et plus réactifs qu’au moment du « krach » de 1991-1992. Depuis quelques mois s’amorce un redressement, lié à la remontée des ventes et à des stocks à nouveau proches de leur moyenne de longue période. Ce mouvement est net sur les permis de construire, mais pas encore sur les mises en chantier, qui réagissent avec un certain délai. Sur les trois derniers mois connus (juin-août), les mises en chantier ont baissé de 7,2 % sur un an et les permis de construire se sont accrus de 28 %. En cumul 12 mois, la tendance est négative pour les mises en chantier 332 000 unités, -3,6% sur un an. Les permis de construire totalisent 444 000 unités et progressent de 8,8 % sur un an. Légère hausse des prix de vente Les prix du neuf se sont accrus au deuxième trimestre 2010 de 5,4% sur un an pour les appartements. Ils se sont repliés de 4,2% pour les maisons. Sur les douze derniers mois comparés aux douze mois précédents, les prix sont restés en hausse assez modérée, 3,7% (appartements), ou quasi-nulle, 0,1% (maisons). 97 99 01 03 05 mises en chantier de lo gements So urce : M inistère de l'Eco lo gie 07 09 permis de co nstruire Prix des appartements neufs 30 variatio n annuelle, % 20 10 0 -10 -20 91 94 97 So urce : M inistère de l'Eco lo gie 00 03 France 06 09 Ile-de-France Cette hausse des prix est cohérente avec les niveaux actuels de stocks, proches de leur moyenne de longue période. Elle s’explique aussi par la baisse des taux de crédit et la nécessité d’amortir les hausses de coûts de production, avec notamment le poids grandissant des normes environnementales. Rappelons qu’il s’agit de prix « à la réservation ». ■ 4 N° 26 — Octobre 2010 Olivier ELUERE [email protected] 2010-2011 : une reprise atypique 2009 : stabilisation du marché Le marché immobilier résidentiel français, en chute historique fin 2008début 2009, s’est ensuite redressé. Sur l’année 2009, les ventes de logements neufs ont connu une reprise de 35%, tandis que celles de logements anciens ont baissé de 12%. Les prix sont restés à peu près stables sur l’année, dans l’ancien comme dans le neuf. Cette stabilisation s’explique par les stimuli fiscaux, la baisse des taux de crédit et un ajustement de l’offre. 20 10 0 -5 Les prix se sont stabilisés, grâce à la baisse des taux de crédit et à un ajustement de l’offre. Dans le neuf, les promoteurs ont limité les nouvelles mises en vente et la réduction des stocks a été assez rapide ; dans l’ancien, une partie des vendeurs ont préféré retirer provisoirement leurs biens du marché. 8 5 essentiellement au dispositif Scellier en faveur de l’investissement locatif. mestre. Elles sont toutefois restées à des niveaux assez modérés, la demande restant affectée par : les inquiétudes liées à une conjoncture économique médiocre et à un taux de chômage en hausse ; une solvabilité des acheteurs encore dégradée malgré la baisse des prix (en 2008) et des taux de crédit ; un comportement attentiste chez les « secondo-accédants ». 6 15 Dans le neuf (filière promoteurs), la reprise des ventes a tenu Dans l’ancien, les ventes se sont redressées dès le deuxième tri- France : prix des logements anciens et taux de chômage 10 -10 12 86 87 89 90 92 93 95 96 98 99 01 02 04 05 07 08 10 hausse des prix sur un an So urce : FNA IM , taux de chô mage (éch.dte inversée) B dF Immobilier et Bourse Séries déflatées indices base 100 T11988 225 500 200 2010 : offre basse et redémarrage des prix 175 Au premier semestre 2010 sont apparus des signes de reprise, une remontée relative des ventes et un redémarrage des prix de l’ancien. Sur ce point, il faut rester prudent, les principales sources n’étant pas cohérentes (cf. page 2), avec des prix en hausse assez marquée selon les Notaires et quasi-stables selon la FNAIM. 150 400 300 125 200 100 100 75 0 88 89 91 92 94 95 97 98 00 01 03 04 06 07 09 10 prix de l'ancien en France prix de l'ancien à P aris So urce : FNA IM , No taires CA C 40 (éch.dte) Le marché ne semble toutefois pas encore engagé dans un nouveau cycle de croissance marquée et durable. Il est plutôt en reprise graduelle, avec des niveaux de prix artificiellement soutenus par une offre insuffisante, et des tendances différentes entre Ile-de-France et province. La demande de logement est assez forte, mais les ventes sont inférieures (de 14%) à celles du boom de 2004-2007. Des facteurs positifs et négatifs se conjuguent. Facteurs positifs Valeur refuge : face aux incertitudes conjoncturelles et à des marchés financiers (Bourses, marchés obligataires) volatils, l’immobilier apparaît plus que jamais comme une valeur refuge. Les taux de rendement locatifs (hors avantages fiscaux) sont supérieurs aux rendements obligataires, et la valorisation reste en générale favorable : les prix ont peu baissé pendant la crise et avaient beaucoup progressé auparavant. Facteurs de soutien structurels : démographie, décohabitation, préparation de la retraite, désir d’accéder à la propriété. Rappelons par ailleurs qu’il n’est pas nécessaire de purger une bulle de crédit, les banques étant restées vigilantes en matière de crédit habitat : octroi fondé sur la capacité de l’emprunteur à rembourser son prêt et non pas sur la valeur du bien, exigence d’un taux d’effort limité à un tiers du revenu, prêts amortissables majoritairement à taux fixe (à la différence du Royaume-Uni et de l'Espagne, où s’était constituée une bulle du crédit, et où la phase de correction est loin d’être achevée). Taux de crédit habitat mo yennes trimestrielles en % 12 10 8 6 4 2 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 taux mo yen d'un crédit habitat à taux fixe (TEG) So urce : B dF, Crédit A grico le SA taux OA T 10 ans Taux de crédit habitat : ils sont à des niveaux très bas et pourraient rester à peu près stables à ces bas niveaux sur les prochains N° 26 — Octobre 2010 5 Olivier ELUERE [email protected] mois, car la politique monétaire va rester très accommodante (pas de relèvement du taux refi de la BCE avant début 2012). Facteurs négatifs Prix surévalués : les prix restent encore significativement surévalués (de 10 à 15%) et l’assainissement du marché n’est pas terminé. Les prix étaient en effet, au début de la crise (fin 2007), surévalués de 20 à 25%, au regard d’outils comme la « prime de risque sur un investissement immobilier ou le taux d’effort théorique. Le recul des prix ayant été très modéré de début 2008 à mi-2010 (-8% en cumulé dans le logement ancien pour la FNAIM, -4% pour les Notaires), une baisse supplémentaire des prix d’au moins 10 à 15% serait donc a priori nécessaire pour restaurer pleinement la solvabilité des acheteurs. en % 35 33 31 29 27 25 87 Conjoncture médiocre : le climat économique reste incertain, la croissance est modeste, 1,5% en moyenne en 2010, 1,4% en 2011, la confiance des ménages reste dégradée et le taux de chômage élevé, 9,4% en 2010, 9,2% en 2011. Taux d'effort théorique en France 37 89 91 93 95 97 99 01 03 05 07 09 annuité de crédit habitat/revenu So urce : B dF, FNA IM , calculs Crédit A grico le S.A . Avantages fiscaux revus en baisse : ceux qui concernent le logement neuf sont réduits à partir de la mi-2010. Plus globalement, une refonte des avantages fiscaux dans l’immobilier est à l’œuvre (cf. page 7). D'où au total une demande élevée, mais pas encore un « boom » marqué. La spécificité de la situation actuelle tient à l'offre, qui est assez basse en France et très limitée en Ile-de-France. Les propriétaires de logements mis en location hésitent à les mettre en vente, ces actifs étant jugés actuellement plus sûrs et plus rentables que les investissements financiers. De plus, les ménages désirant vendre un bien pour un acheter un autre sont également hésitants, par crainte de vendre à un prix jugé insuffisant et de ne pas trouver le bien adéquat du fait de la faiblesse de l’offre. Et dans le neuf (promoteurs), l’offre est très faible en Ile-de-France, avec des stocks au plus bas et des mises en vente très réduites. Ceci explique que les prix ne baissent pas et soient même en hausse significative sur certains segments, Paris notamment. % France : prix des logements anciens et stocks de logements neufs mo is 13 0 4 8 8 3 12 -2 16 -7 20 -12 24 86 87 89 90 92 93 95 96 98 99 01 02 04 05 07 08 10 So urce : hausse des prix sur un an FNA IM , B dF sto cks neuf en mo is de vente (éch.dte inv) En 2010, les ventes de logement seraient en hausse de 20% dans l’ancien (ceci étant lié en partie à un effet de base, avec les bas niveaux de début 2009) et de 3% dans le neuf. Les prix seraient en hausse de 5% environ dans l’ancien comme dans le neuf. 2011 : vers un marché plus équilibré Cette situation de pénurie de l’offre risque de durer à court terme. En 2011, le marché devrait toutefois devenir plus équilibré. La demande sera du même ordre qu‘en 2010, mais ne devrait guère augmenter. On peut en effet penser que les facteurs négatifs seront encore plus présents. La solvabilité des acheteurs sera un peu plus dégradée qu’en 2010, compte tenu des hausses de prix intervenues récemment. La révision en baisse de certains avantages fiscaux (Scellier) risque de stimuler un peu les ventes fin 2010 et de les faire baisser un peu en 2011. Et les taux de crédit habitat pourraient commencer à remonter légèrement au second semestre 2011 (avec la hausse graduelle attendue des taux trois mois et dix ans). En revanche, l’offre pourrait s’élargir quelque peu. Les marchés boursiers devraient être mieux orientés, les rendements obligataires seraient un peu plus élevés et l'effet valeur refuge devrait moins jouer. Avec de plus des secondo-accédants plus confiants, et un redémarrage progressif des mises en vente dans le neuf, l’offre serait un peu plus abondante. Ce marché plus équilibré devrait conduire à des hausses de prix modérées. Ceci permettrait une reconstitution progressive de la solvabilité des acheteurs. En 2011, les ventes seraient stables dans le neuf et en hausse modérée dans l’ancien, et les prix en hausse de 3% environ. ■ 6 6 Prime de risque sur l'investissement immobilier en France en % 4 2 0 -2 1991 1993 1995 1997 1999 2001 2003 2005 2007 2009 So urce : Insee, P rime de risque sur un investissement immo bilier B dF, CA (1) : le taux d’effort est la charge de remboursement annuelle d’un crédit habitat (capital et intérêts) rapportée au revenu annuel du ménage acquéreur. Le taux d’effort théorique est calculé aux conditions du marché (prix, taux, durée des crédits), mais en supposant constants la surface, le taux d’apport et le profil de revenu des acheteurs. N° 26 — Octobre 2010 Olivier ELUERE [email protected] Nouvelles mesures fiscales Création d‘un PTZ renforcé Dans le projet de loi de finances 2011, un dispositif unique de soutien à l’accession à la propriété est mis en place, le prêt à taux zéro renforcé. Pour l’instant, trois dispositifs d’aides à l’accession existent : le Prêt à taux zéro pour l’acquisition ou la construction d’une résidence principale par des primo-accédants (sous conditions de ressources). Dans le logement neuf, le PTZ a été doublé en 2009. Il varie en fonction des zones et de la taille du ménage et pouvait ainsi atteindre jusqu’à 65 100 €. La doublement du PTZ n’a toutefois été effectif que jusqu‘à mi-2010, et sa majoration n’est plus que de 50% au second semestre. Le crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt : il concerne les prêts contractés pour l’acquisition ou la construction d’une résidence principale, sans conditions de ressources, pour les primo comme les secondo-accédants. Le taux du crédit d’impôt est de 40% pour les intérêts versés la première année et 20% pour les quatre années suivantes. Le pass foncier, dispositif permettant un « portage dans le temps » du coût du terrain ou bien, depuis peu, un prêt à remboursement différé. mds euro s 800 Encours de crédits habitat ménages %a/a 20 600 15 400 10 200 5 0 0 96 98 00 mo ntants 02 04 06 08 10 cro issance sur 12m (éch.dte) So urce : B dF, Crédit A grico le S.A . Le nouveau PTZ remplacera l’ensemble de ces dispositifs. Ce nouveau prêt, appelé PTZ+, est ouvert à tous les primo-accédants, donc sans conditions de ressources. Son montant varie en fonction de la taille du ménage, de la zone où se situe le logement, du fait qu’il soit neuf ou ancien et de sa performance énergétique. Ceci permettra d’améliorer la solvabilité des acheteurs, d’autant que cette aide touchera l’ensemble des primo-accédants et que l’impact du PTZ+ sera pris en compte dans le calcul du taux d’effort de l’acquéreur, ce qui n’était en général pas le cas pour la mesure de crédit d’impôt sur les intérêts d’emprunt. Il reste que les prix sont encore clairement surévalués, qu’ils continuent à monter, que l’assainissement du marché n’est pas terminé et que l’offre n’est pas revenue à la normale. Le PTZ+ pourra avoir un effet « coup de pouce » pour concrétiser un projet d’achat mais ne suffira pas à restaurer pleinement la solvabilité des acquéreurs. millio ns euro s 160000 Production de crédits habitat (cumuls 12 mois) %a/a 60 40 120000 20 Réduction de certaines aides fiscales Dans le cadre de l’effort d’assainissement des finances publiques, certains avantages fiscaux concernant l’immobilier seront réduits en 2011. Les réductions ou crédits d’impôts sont réduits de 10%. Ceci concerne notamment le dispositif Scellier pour l’investissement locatif dans le neuf, mais aussi les réductions d’impôt au titre des investissements dans l’immobilier de loisir ou de la location meublée non professionnelle. 80000 0 40000 -20 -40 0 03 04 05 06 07 08 09 10 mo ntants cro issance sur 12m (éch.dte) So urce : B dF, Crédit A grico le S.A . Par ailleurs, la taxation des plus values immobilières sera portée de 16% (hors CSG-CRDS) à 17% (mesure décidée dans le cadre de la réforme des retraites). Enfin, rappelons que dans la loi de finances 2010 avait été prévu une modification du dispositif Scellier pour 2011-2012 : réduction d’impôt de 25% en 2011 et 20% en 2012 pour les logements BBC (respectant le label « bâtiment basse consommation ») ; réduction limitée à 15% et 10% pour les logements non-BBC. ■ N° 26 — Octobre 2010 7 Olivier ELUERE [email protected] Indicateurs des marchés immobiliers français Résidentiel Non résidentiel Ancien Neuf Ventes × Ö Demande Ö Prix × × Offre Ö Ö Taux de Vacance Ö Valeurs locatives Ö Construction Directeur de la Publication : Jean-Paul Betbèze Rédaction en chef : Jean-Paul Betbèze — Olivier Eluère Réalisation & secrétariat de rédaction : Fabienne Pesty Contact : [email protected] Crédit Agricole S.A.— Direction des Études Économiques 75710 PARIS Cedex 15 — Fax : +33 (0)1 43 23 58 60 Copyright Crédit Agricole S.A. — ISSN : 1779 - 5672 Cette publication reflète l’opinion de Crédit Agricole S.A. à la date de sa publication, sauf mention contraire (contributeurs extérieurs). 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