Mesures de sauvegarde
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Mesures de sauvegarde
MODULE 5 Mesures de sauvegarde DURÉE ESTIMÉE: 3 heures OBJECTIFS DU MODULE 5 Comprendre les disciplines fondamentales de l'OMC concernant les sauvegardes générales; et se familiariser avec les différentes procédures et enquêtes se rapportant aux sauvegardes générales.. I. INTRODUCTION Comme nous l'avons vu dans le cadre du Module 2, certaines disciplines fondamentales en matière d'accès aux marchés obligent les Membres de l'OMC à: ne pas établir de discrimination (traitement NPF et traitement national); ne pas revenir sur leurs "engagements/concessions en matière de libéralisation" (consolidations); et ne pas interdire les importations ou limiter l'accès des produits ou services étrangers à leur marché intérieur (interdiction des restrictions quantitatives). Ces obligations sont toutefois modulées par le droit conditionnel qu'ont les Membres de l'OMC, dans certaines circonstances, de déroger à ces principes et aux engagements qu'ils ont souscrits en la matière. Les conditions applicables sont destinées à faire en sorte que le droit de recourir à des dérogations ne compromette pas les disciplines fondamentales en matière d'accès aux marchés qui sont au cœur du système de l'OMC. Comme nous l'avons vu dans le Module 2, les règles commerciales multilatérales prévoient un certain nombre de dérogations de ce type, dont les sauvegardes générales, certaines sauvegardes sectorielles (notamment en ce qui concerne les produits agricoles), les mesures appliquées à des fins de balance des paiements et les sauvegardes concernant le commerce des services. Les dispositions relatives aux mesures appliquées à des fins de balance des paiements figurent aux articles XVII et XVIII B) du GATT de 1994; le mécanisme de sauvegarde spéciale pour les produits agricoles est établi à l'article 5 de l'Accord sur l'agriculture; et les dispositions concernant les sauvegardes en matière de commerce des services se trouvent à l'article X de l'AGCS. Le présent module traite exclusivement des sauvegardes générales visées à l'article XIX du GATT de 1994 et dans l'Accord sur les sauvegardes. Étant donné qu'il fait partie des accords concernant les marchandises incorporés dans le GATT de 1994, l'Accord sur les sauvegardes ne s'applique qu'au commerce des marchandises. EN BREF Un Membre de l'OMC peut prendre une mesure de "sauvegarde" au sens de l'article XIX du GATT de 1994 et de l'Accord sur les sauvegardes (c'est-à-dire suspendre les concessions multilatérales à titre provisoire) pour protéger une branche de production nationale donnée contre un accroissement des importations de tout produit qui cause ou menace de causer un dommage grave à ladite branche de production. Les mesures de sauvegarde ont toujours été autorisées par le GATT (article XIX). Cependant, avant l'entrée en vigueur de l'Accord sur les sauvegardes, les sauvegardes visées par l'article XIX étaient relativement peu utilisées, nombre de gouvernements préférant protéger leurs branches de production nationales par des mesures de la "zone grise" car il n'existait pas de règles multilatérales claires régissant ces mesures. En particulier, il n'y avait pas d'obligation de versement d'une compensation aux partenaires commerciaux affectés, comme le voulaient les règles relatives aux mesures relevant de l'article XIX. (Les mesures de la zone grise comprenaient les accords d'autolimitation des exportations, les arrangements de prix minimums et d'autres types de mesures. Il y était souvent fait recours au sujet de produits faisant constamment l'objet de frictions commerciales, tels que les automobiles, l'acier et les semi-conducteurs.) L'Accord de l'OMC sur les sauvegardes a innové en prohibant les mesures de la "zone grise" et en établissant des délais d'application ("clause d'extinction") pour toutes les mesures de sauvegarde. EN DÉTAIL Conformément à la règle fondamentale relative aux sauvegardes établie à l'article XIX du GATT de 1994, un Membre de l'OMC peut temporairement suspendre des concessions multilatérales sur ses importations d'un produit donné (c'est-à-dire relever le droit de douane au-dessus du taux consolidé, appliquer une restriction quantitative ou prendre d'autres mesures de restriction des échanges qui seraient autrement prohibées), si sa branche de production nationale subit ou est menacée de subir un dommage grave causé par un accroissement des importations. Prohibition des mesures de la zone grise Si l'article XIX du GATT de 1947 autorisait lui aussi le recours à des mesures de sauvegarde (de fait, le texte de cet article et celui de l'article XIX du GATT de 1994 sont identiques), dans la pratique, de telles mesures étaient rarement appliquées avant l'entrée en vigueur des Accords du Cycle d'Uruguay. Avant le Cycle d'Uruguay, aucune discipline multilatérale ne visait le recours aux mesures de la zone grise imposées de manière bilatérale ou unilatérale dans le but de résoudre des frictions commerciales. Les mesures de la zone grise étaient souvent des autolimitations des exportations et/ou des importations, des arrangements de commercialisation ordonnée, des mesures de fixation des prix à l'exportation ou à l'importation ou de surveillance de ces prix, la suspension des licences d'importation, l'application de licences d'importation spéciales et des mesures similaires. Les mesures de la zone grise étaient appliquées à un large éventail de produits faisant l'objet d'un volume d'échanges important pour lesquels la concurrence internationale est perpétuellement forte, notamment les véhicules automobiles, les textiles et les vêtements, les chaussures, les produits en acier, les téléviseurs et les produits agricoles, entre autres. Bien que réduisant dans une certaine mesure les frictions bilatérales directement concernées, l'application d'un grand nombre de mesures de la zone grise a néanmoins donné lieu à d'importantes préoccupations dans le cadre du système commercial multilatéral, et ce pour un certain nombre de raisons. L'une de ces raisons était l'effet de détournement des échanges qu'avaient ces mesures. En particulier, il était craint que, si un pays limitait volontairement ses exportations d'un produit donné vers un marché d'exportation donné, il accroîtrait probablement les exportations de ce produit vers d'autres marchés d'exportation, non soumis à des restrictions, ce qui pouvait créer des problèmes sur ces autres marchés. À cet égard, certaines préoccupations avaient trait à la propagation effective ou potentielle des mesures de la zone grise d'un marché à un autre, puis à un autre encore, avec un effet domino du détournement des échanges sur plusieurs marchés d'exportation. D'importantes préoccupations concernaient par ailleurs le manque de transparence s'agissant des mesures de la zone grise. Ces mesures, non régulées en tant que telles par un ensemble de disciplines du GATT en particulier, n'étaient généralement pas notifiées aux Parties contractantes du GATT et, dans certains cas, lorsque des mesures étaient appliquées par un importateur, les exportateurs affectés eux-mêmes n'étaient pas parfaitement informés des mesures qui leur étaient appliquées. Par conséquent, la résolution des nombreuses questions et préoccupations concernant le recours à ces mesures de la zone grise non réglementées était l'un des grands objectifs des négociations du Cycle d'Uruguay sur les sauvegardes. Le résultat de ce volet des négociations a été la prohibition, aux termes de l'Accord sur les sauvegardes, de toutes les mesures "de la zone grise", ainsi que des dispositions visant la transparence et l'élimination progressive des mesures de ce type qui étaient alors en vigueur. En outre, étant donné que les mesures prises au titre de l'article XIX du GATT de 1947 (c'est-à-dire les véritables mesures de sauvegarde) en vigueur pendant le Cycle d'Uruguay n'étaient évidemment pas conformes – et ne pouvaient être conformes – aux dispositions du nouvel Accord sur les sauvegardes et à l'article XIX du GATT de 1994, l'Accord sur les sauvegardes prévoyait également l'élimination progressive de ces mesures. En d'autres termes, les mesures de restriction des échanges destinées à remédier à un dommage causé à une branche de production nationale par un accroissement des importations totales d'un produit donné devaient désormais être conformes aux règles et aux procédures énoncées dans l'Accord sur les sauvegardes, y compris pour ce qui était de la nondiscrimination et de la transparence. Ces objectifs transparaissent dans le préambule de l'Accord sur les sauvegardes. En particulier, il y est reconnu "la nécessité de clarifier et de renforcer les disciplines du GATT de 1994, et en particulier celles de l'article XIX […], [et] de rétablir un contrôle multilatéral sur les sauvegardes et d'éliminer les mesures qui échappent à ce contrôle", c'est-à-dire les mesures de la zone grise et les mesures préexistantes prises au titre de l'article XIX. Nouvelles règles et procédures concernant le recours aux mesures de sauvegarde En plus de prohiber les mesures de la zone grise, et donc de renvoyer les problèmes qu'elles étaient destinées à traiter vers le système multilatéral, l'Accord sur les sauvegardes a établi de nouvelles règles et procédures concernant le recours aux mesures de sauvegarde, c'est-à-dire la mise en œuvre de l'article XIX du GATT de 1994. En bref, pour pouvoir recourir à une mesure de sauvegarde, un Membre doit auparavant publier une loi ou une réglementation permettant de le faire, mener une enquête à laquelle les parties intéressées ont le droit de participer, y compris pour présenter des éléments de preuve et des arguments, et faire preuve d'une grande transparence à chaque étape de l'enquête et lors de l'application de la mesure. Par ailleurs, la durée des mesures de sauvegarde est strictement limitée (quoiqu'elle puisse être prolongée si certaines conditions sont réunies). Afin de réduire la désincitation à l'utilisation de sauvegardes créée par l'obligation, au titre de l'article XIX, d'offrir une compensation commerciale aux Membres affectés, l'Accord sur les sauvegardes suspend effectivement cette obligation pour les trois premières années de l'application d'une mesure, moyennant certaines conditions. Examinons plus en détail le texte de l'article XIX du GATT, qui renferme les dispositions générales pertinentes sur les sauvegardes, et de l'Accord sur les sauvegardes, qui clarifie et renforce les dispositions de l'article XIX. L'ARTICLE XIX DU GATT ET L'ACCORD SUR LES SAUVEGARDES Article XIX du GATT de 1994: Mesures d'urgence concernant l'importation de produits particuliers 1.a) Si, par suite de l'évolution imprévue des circonstances et par l'effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu'un Membre a assumés en vertu du présent Accord, un produit est importé sur le territoire de ce Membre en quantités tellement accrues et à des conditions telles qu'il cause ou menace de causer un dommage grave aux producteurs nationaux de produits similaires ou de produits directement concurrents, ce Membre aura la faculté, en ce qui concerne ce produit, dans la mesure et pendant le temps qui pourront être nécessaires pour prévenir ou réparer ce dommage, de suspendre l'engagement en totalité ou en partie, de retirer ou de modifier la concession. L'Accord sur les sauvegardes développe les principes énoncés à l'article XIX: Accord sur les sauvegardes Article 2 (Conditions) 1. Un Membre ne pourra appliquer une mesure de sauvegarde à l'égard d'un produit que si ce Membre a déterminé, conformément aux dispositions énoncées ci-après, que ce produit est importé sur son territoire en quantités tellement accrues, dans l'absolu ou par rapport à la production nationale, et à des conditions telles qu'il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents. 2. Des mesures de sauvegarde seront appliquées à un produit importé quelle qu'en soit la provenance. Article 3 (Enquête) 1. Un Membre ne pourra appliquer une mesure de sauvegarde qu'à la suite d'une enquête menée par les autorités compétentes de ce Membre selon des procédures préalablement établies et rendues publiques … Le principe fondamental, énoncé très simplement dans l'Accord sur les sauvegardes et à l'article XIX du GATT de 1994, est que les Membres ont le droit d'appliquer des mesures de sauvegardes, qui, comme l'indique l'article XIX, consistent en la suspension temporaire de concessions négociées au niveau multilatéral. Dans la pratique, cela signifie que les Membres ont le droit de déroger aux disciplines fondamentales du système du GATT, en particulier pour ce qui est des consolidations tarifaires et des restrictions quantitatives (prévues aux articles II et XI du GATT, respectivement) moyennant les conditions énoncées. EXERCICES: 1. Pourquoi les négociateurs du Cycle d'Uruguay ont-ils estimé que l'article XIX du GATT ne suffisait pas à lui seul à réglementer le recours aux mesures de sauvegarde (autrement dit, pourquoi ont-ils jugé nécessaire de mettre au point un Accord sur les sauvegardes? 2. Aux termes de l'Accord sur les sauvegardes, comment ont-été traitées les mesures de la zone grise et les mesures de sauvegarde prises au titre de l'article XIX qui étaient en place lors de l'entrée en vigueur de l'Accord? II. CONDITIONS D'APPLICATION D'UNE MESURE DE SAUVEGARDE Lors de l'application d'une mesure de sauvegarde, il faut respecter aussi bien les dispositions de l'article XIX que celles de l'Accord sur les sauvegardes. ÉVOLUTION IMPRÉVUE DES CIRCONSTANCES Article XIX du GATT "Si, par suite de l'évolution imprévue des circonstances et par l'effet des engagements, y compris les concessions tarifaires, qu'une partie contractante a assumés en vertu du présent Accord … " En premier lieu, aux termes de l'article XIX, l'accroissement des importations qui constitue la condition fondamentale de l'application d'une mesure de sauvegarde doit être le résultat d'une "évolution imprévue des circonstances" et le Membre en question doit avoir fait des concessions tarifaires et/ou d'autres concessions commerciales multilatérales. Selon l'interprétation de l'Organe d'appel, la référence faite à une évolution imprévue des circonstances à l'article XIX du GATT de 1994 signifie, dans la pratique, que l'autorité chargée de l'enquête doit démontrer, en tant que circonstance factuelle, l'existence d'une "évolution imprévue des circonstances", c'est-à-dire d'une situation qui n'était pas prévue lorsque le Membre en question a contracté ses engagements multilatéraux relativement au produit considéré (par exemple lorsqu'il a consolidé son droit de douane sur ce produit). ACCROISSEMENT DES IMPORTATIONS/CONDITIONS DE CONCURRENCE Article XIX du GATT "… si […] un produit est importé […] en quantités tellement accrues et à des conditions telles …" Article 2:1 de l'Accord sur les sauvegardes "… si […] [un] produit est importé […] en quantités tellement accrues, dans l'absolu ou par rapport à la production nationale, et à des conditions telles …" La référence faite à l'article XIX et dans l'Accord sur les sauvegardes à des quantités "tellement" accrues des importations d'un produit signifie qu'il doit y a voir eu un accroissement des importations. En outre, l'Accord sur les sauvegardes précise qu'un tel accroissement peut être établi en termes absolus ou en termes relatifs. Pour déterminer s'il y a eu un accroissement des importations, l'autorité chargée de l'enquête doit examiner: LES DONNÉES RELATIVES À LA QUANTITÉ DES IMPORTATIONS DU PRODUIT EN QUESTION Concernant une période récente (afin d'examiner les changements et les tendances, en particulier pour déterminer s'il y a eu un accroissement) en termes absolus, et par rapport à la production nationale totale de ce produit. Il n'est défini aucun seuil quantitatif au-delà duquel un accroissement des importations est jugé suffisant pour satisfaire aux conditions énoncées à l'article XIX et dans l'Accord sur les subventions. Chaque cas doit donc être examiné selon ses propres particularités. Cela ne signifie pas pour autant qu'un accroissement quel qu'il soit puisse être suffisant. Au contraire, l'Organe d'appel a indiqué dans ce contexte que, pour entrer en ligne de compte, un accroissement des importations doit être "soudain, récent et brutal", qu'il soit mesuré en termes absolus ou par rapport à la production nationale. (Dans ce dernier cas, il se peut que les importations augmentent tandis que la production nationale diminue ou stagne, ou qu'elles augmentent plus rapidement que la production nationale.) Article XIX du GATT et article 2:1 de l'Accord sur les sauvegardes "… et à des conditions telles …" Un accroissement des importations, même important, ne suffit pas à lui seul à satisfaire aux conditions requises pour l'application d'une mesure de sauvegarde. En effet, il doit aussi se produire "à des conditions telles" qu'il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale. Dans la pratique, cela signifie qu'il faut examiner les conditions de concurrence entre les produits nationaux et les produits importés. Il doit être établi qu'il existe une concurrence directe suffisante entre ces produits et que les importations l'emportent sur la production nationale. Article XIX du GATT et article 2:1 de l'Accord sur les sauvegardes … qu'il cause ou menace de causer un dommage grave à la branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents … Une fois établi que les importations ont connu un accroissement suffisamment important et sont en concurrence directe avec les produits nationaux, il se pose la question de leur incidence sur la branche de production nationale. En particulier, ces importations causent-elles ou menacent-elles de causer un dommage grave à ladite branche de production? DOMMAGE GRAVE La notion de "dommage grave" est fondamentale pour l'application de mesures de sauvegarde, et s'entend généralement d'un fait plus grave que le "dommage important" qui conditionne l'imposition de mesures antidumping ou de mesures compensatoires. Aux termes de l'Accord sur les sauvegardes, le "dommage grave" s'entend d'une "dégradation générale notable de la situation d'une branche de production nationale". Une menace de dommage grave est définie comme étant "l'imminence évidente d'un dommage grave" et il est prescrit que la détermination de l'existence d'une menace de dommage grave "se fond[e] sur des faits, et non pas seulement sur des allégations, des conjectures ou de lointaines possibilités". Pour parvenir à la constatation de l'existence d'un dommage grave ou d'une menace de dommage grave, l'autorité chargée de l'enquête doit procéder à un examen détaillé de tous les indicateurs pertinents ayant trait à la situation de la branche de production nationale (tels que la production, les ventes, l'emploi, l'utilisation de la capacité et les résultats financiers). Cet examen doit porter sur une période suffisamment longue pour que ladite autorité soit en mesure d'observer l'évolution des données. En outre, étant donné que le dommage grave doit être présent ou imminent pour qu'il soit justifié d'appliquer une mesure de sauvegarde, la fin de la période considérée doit être très récente. BRANCHE DE PRODUCTION NATIONALE L'expression "branche de production nationale" s'entend des producteurs nationaux de produits qui sont similaires au produit importé considéré ou qui lui font directement concurrence. Étant donné que, aux fins des sauvegardes, la branche de production nationale n'est pas limitée aux seuls producteurs de produits "similaires", mais peut aussi englober les producteurs de produits qui sont en concurrence directe avec les produits importés, les effets sur la concurrence à prendre en considération en vue de l'application d'une mesure de sauvegarde peuvent être plus larges que dans le cas d'une mesure antidumping ou d'une mesure compensatoire. Aux fins de l'analyse du dommage et du lien de causalité, la branche de production nationale peut être définie comme l'ensemble des producteurs de produits similaires ou directement concurrents, ou de ceux qui constituent collectivement une proportion majeure de la production nationale totale de ces produits. LIEN DE CAUSALITÉ ET NON-IMPUTATION Enfin, même si les importations ont connu un accroissement suffisant et sont en concurrence avec la production nationale, et même si la situation de la branche de production nationale semble si mauvaise que l'on peut considérer qu'il y a dommage "grave", toutes les conditions ne sont pas remplies. La condition la plus importante est l'établissement d'un lien de causalité positif entre l'accroissement des importations et les conditions de concurrence, d'une part, et la mauvaise situation de la branche de production, d'autre part. Dans ce contexte, il faut veiller à ne pas imputer à l'accroissement des importations un dommage causé par d'"autres facteurs". L'Organe d'appel s'est prononcé sur la nature du lien de causalité dont l'existence doit être établie et de l'analyse dite "aux fins de la non-imputation". En particulier, il a précisé que l'accroissement des importations ne devait pas nécessairement être la seule cause, ni même la cause principale, du dommage grave ou de la menace de dommage grave. En revanche, il doit y avoir un "rapport réel et substantiel de cause à effet" (selon les termes de l'Organe d'appel) entre les importations et le dommage. En outre, afin d'établir avec certitude l'existence de ce rapport, il faut dissocier et distinguer les effets produits sur la branche de production nationale par d'autres facteurs (par exemple, des cas de force majeure, l'évolution des techniques, etc.) de ceux découlant de l'accroissement des importations. Il n'existe pas de méthode unique à suivre, que ce soit pour établir un lien de causalité positif ou pour distinguer et dissocier les autres facteurs de dommage. Lorsqu'elles s'emploient à déterminer si l'accroissement des importations a causé ou menace de causer un dommage grave, les autorités doivent évaluer tous les facteurs pertinents de nature objective et quantifiable qui influent sur la situation de cette branche de production. Les facteurs énumérés à ce sujet dans l'Accord sur les sauvegardes sont les suivants: le rythme d'accroissement des importations et leur accroissement en volume, en termes absolus et relatifs, la part du marché intérieur absorbée par les importations accrues, les variations du niveau des ventes, la production, la productivité, l'utilisation de la capacité, les profits et pertes et l'emploi. Compte tenu de tout ce qui précède, l'analyse visant à déterminer si une mesure de sauvegarde peut être appliquée ou non est un travail qui repose dans une large mesure sur les faits et qui varie d'un cas à un autre. L'ENQUÊTE Article 3 de l'Accord sur les sauvegardes "Un Membre ne pourra appliquer une mesure de sauvegarde qu'à la suite d'une enquête …" Comment recueille-t-on et analyse-t-on les données de fait nécessaires et comment parvient-on aux conclusions requises? Aux termes de l'Accord sur les sauvegardes, une enquête doit être menée par les autorités du Membre importateur selon des procédures internes ayant été publiées auparavant. Ces procédures doivent quant à elles être conformes aux prescriptions de procédure de l'Accord sur les sauvegardes et les conclusions de l'enquête doivent satisfaire aux prescriptions de fond de l'Accord. En général, une enquête est ouverte à la suite d'une demande de la branche de production nationale. Toutefois, contrairement aux cas de l'antidumping et des mesures compensatoires, il n'y existe aucune prescription quant au contenu des demandes d'ouverture d'enquête en matière de sauvegardes ou à la représentativité du/des requérant(s). Les enquêtes doivent comprendre la publication d'un avis d'audition publique et d'autres moyens appropriés par lesquels les parties intéressées peuvent présenter des éléments de preuve et leurs vues, notamment en réponse aux exposés d'autres parties. Les parties intéressées doivent avoir la possibilité de faire connaître leurs vues, entre autres choses, sur le point de savoir si l'application d'une mesure serait ou non dans l'intérêt public. RENSEIGNEMENTS CONFIDENTIELS Si les parties intéressées doivent avoir accès aux éléments de preuve et aux arguments présentés par les autres parties intéressées, de façon à pouvoir formuler leurs réponses, les autorités chargées de l'enquête ont également l'obligation de protéger les renseignements confidentiels, à moins qu'elles n'estiment qu'une demande de traitement confidentiel n'est pas justifiée. Les parties qui fournissent des renseignements confidentiels sont censées en donner un résumé non confidentiel ou exposer les raisons pour lesquelles un résumé ne peut être établi. PUBLICATION DE RAPPORTS En plus de se conformer aux prescriptions de fond et de procédure de l'Accord sur les sauvegardes concernant la conduite des enquêtes, les Membres doivent publier un ou plusieurs rapports détaillés exposant les constatations et les conclusions motivées auxquelles ils sont arrivés sur tous les points de fait et de droit pertinents, dans lesquels ils doivent notamment démontrer la pertinence des facteurs examinés. En particulier, dans ces rapports, les Membres doivent démontrer, en se fondant sur les éléments de preuve versés au dossier, que les importations ont augmenté dans des quantités et à des conditions telles qu'elles ont causé un dommage à la branche de production nationale et justifier la pertinence des renseignements sur lesquels les conclusions sont fondées. Les rapports doivent aussi expliquer les raisons pour lesquelles il est jugé nécessaire d'appliquer une mesure de sauvegarde, ainsi que la nature, le fonctionnement et la durée de la mesure proposée, en mettant en évidence la relation entre ces éléments et le dommage et les perspectives d'ajustement de la branche de production. EXERCICES: 3. Quelles sont les conditions et les circonstances factuelles fondamentales nécessaires pour qu'un Membre puisse appliquer une mesure de sauvegarde? 4. Qu'est-ce qu'un "dommage grave" et quels types de facteurs faut-il examiner pour déterminer si une branche de production nationale subit ou est menacée de subir un dommage grave? APPLICATION DE MESURES DE SAUVEGARDE PROVISOIRES ET DÉFINITIVES Article 2:1 de l'Accord sur les sauvegardes (Nation la plus favorisée) "Des mesures de sauvegarde seront appliquées à un produit importé quelle qu'en soit la provenance." Comme indiqué à l'article XIX du GATT de 1994, une mesure de sauvegarde est la suspension provisoire de concessions ou d'obligations multilatérales. Cela signifie qu'elle affecte toutes les importations visées par ces concessions ou obligations, c'est-à-dire que la mesure de sauvegarde, comme les concessions auxquelles elle déroge, doit s'appliquer selon le principe de la nation la plus favorisée. Si tel a toujours été le cas en théorie, rappelons que la plupart des mesures de la zone grise n'étaient pas appliquées au niveau multilatéral, mais au niveau bilatéral ou d'une autre manière également limitée. Afin de veiller à ce que la nature multilatérale intrinsèque des mesures de sauvegarde soit respectée et que ces mesures soient appliquées conformément au principe de la nation la plus favorisée, l'Accord sur les sauvegardes contient une prescription expresse à cet effet. Ainsi, sous réserve de certaines exceptions (liées à la répartition des contingents et aux exportations des Membres en développement), l'Accord prescrit que les mesures de sauvegarde doivent être appliquées à un produit importé quelle qu'en soit la provenance. MESURES DE SAUVEGARDE PROVISOIRES Article 6 de l'Accord sur les sauvegardes – Mesures provisoires "Dans des circonstances critiques où tout délai causerait un tort qu'il serait difficile de réparer, un Membre pourra prendre une mesure de sauvegarde provisoire…" L'Accord sur les sauvegardes autorise l'application d'une mesure de sauvegarde provisoire s'il a été déterminé à titre préliminaire qu'il existe des éléments de preuve manifestes selon lesquels un accroissement des importations a causé ou menace de causer un dommage grave. L'application de mesures provisoires n'est autorisée que dans des circonstances critiques où tout délai causerait un tort qu'il serait difficile de réparer. Les mesures provisoires ne peuvent prendre la forme que d'une majoration des droits de douane (et non de restrictions quantitatives ni d'autres formes), qui doivent être remboursés dans les moindres délais si la détermination finale de l'existence d'un dommage et d'un lien de causalité est négative. Leur durée ne peut dépasser 200 jours et doit être prise en considération dans le calcul de la durée totale maximale de toute mesure définitive ultérieure. MESURES DE SAUVEGARDE DÉFINITIVES À la différence des mesures provisoires, les mesures de sauvegarde définitives ne sont pas limitées à certaines formes particulières en vertu de l'Accord sur les sauvegardes. Les formes de mesures de sauvegarde les plus fréquentes sont la majoration des droits de douane à un niveau supérieur au taux consolidé convenu dans le cadre de l'OMC, les contingents (restrictions quantitatives) et les contingents tarifaires (qui consistent à appliquer un certain taux de droit aux importations jusqu'à un certain volume, puis un taux de droit plus élevé une fois ce volume dépassé). D'autres types de mesures sont parfois appliqués, notamment des mesures fondées sur un prix minimum et différents types de mesures reposant sur des licences d'importation. NIVEAU DES MESURES DE SAUVEGARDE DÉFINITIVES Article 5:1 de l'Accord sur les sauvegardes – niveau des mesures de sauvegarde "Un Membre n'appliquera des mesures de sauvegarde que dans la mesure nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l'ajustement …" Article 7:4 de l'Accord sur les sauvegardes - libéralisation progressive "Afin de faciliter l'ajustement dans le cas où la durée prévue d'une mesure de sauvegarde […] dépasse un an, le Membre qui applique ladite mesure la libéralisera progressivement, à intervalles réguliers, pendant la période d'application …" Le niveau d'une mesure de sauvegarde doit être adapté d'une manière ou d'une autre au degré de gravité du dommage ou de la menace de dommage, ainsi qu'à la nécessité d'aider la branche de production nationale à s'adapter aux nouvelles conditions de concurrence (en particulier au volume accru des importations). En outre, si sa durée dépasse un an, la mesure doit être libéralisée progressivement. En ce sens, ces dispositions, tout comme l'Accord sur les subventions dans son intégralité, reposent sur le principe que les accroissements des importations visés par l'Accord sont généralement de nature structurelle, plutôt que provisoire, ce que reflète le préambule de l'Accord, où il est reconnu "l'importance de l'ajustement structurel et la nécessité d'accroître plutôt que de limiter la concurrence sur les marchés internationaux". Dans cette optique, le principe d'une mesure de sauvegarde est d'offrir un degré de protection adapté et décroissant à une branche de production nationale pendant une période limitée. La branche de production doit profiter de cette période de protection (décroissante) pour prendre toute mesure nécessaire à son adaptation à la nouvelle situation de concurrence. Comment déterminer la "mesure nécessaire" pour prévenir ou réparer un dommage grave, ainsi que la durée et le calendrier de libéralisation appropriés d'une mesure? Ces questions ne sont évidemment pas simples, d'autant que l'Accord sur les sauvegardes ne donne que peu d'orientations à ce sujet, et ce uniquement en ce qui concerne une forme possible de mesure de sauvegarde: les restrictions quantitatives. Pour les autres types de mesures, la prescription la plus importante est que les autorités du Membre importateur doivent publier une explication dûment motivée de la forme, du niveau, de la durée et du calendrier de libéralisation de la mesure projetée, en mettant en évidence la relation entre cette mesure et la situation particulière de la branche de production nationale en question. RESTRICTIONS QUANTITATIVES L'Accord sur les subventions dispose que, lorsqu'une restriction quantitative est appliquée, son niveau ne doit pas, en principe, ramener les quantités importées au-dessous de la moyenne des trois dernières années représentatives pour lesquelles des statistiques sont disponibles. Si un niveau différent est jugé nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave, les autorités doivent fournir une justification claire de l'application d'un tel niveau. L'Accord sur les subventions contient en outre des règles relatives à la répartition des restrictions quantitatives entre les pays exportateurs, les parts historiques devant généralement être respectées, sauf dans les cas où certains Membres exportateurs sont responsables dans une mesure disproportionnée de l'accroissement des importations totales. Cependant, les parts de contingent doivent dans tous les cas être équitables pour tous les exportateurs. LIBÉRALISATION PROGRESSIVE L'Accord sur les sauvegardes contient une autre prescription destinée à éviter que les mesures de sauvegarde ne deviennent un "mur rigide" de protection: l'obligation de libéraliser progressivement toute mesure dont la durée dépasse un an. Dans la pratique, cela signifie que le niveau des contingents doit augmenter ou que le niveau des droits de douane doit diminuer pendant la période d'application de la mesure (ou, dans le cas d'autres formes de mesures, que celles-ci doivent être rendues progressivement moins restrictives pendant leur période d'application). En outre, les mesures dont la durée dépasse trois ans doivent être réexaminées à mi-parcours et, si nécessaire compte tenu des résultats de ce réexamen, doivent être retirées ou libéralisées plus rapidement que prévu initialement. Par ailleurs, il n'est permis aucun retour en arrière en ce qui concerne le niveau de protection dans les cas où une mesure est prorogée au-delà de sa période d'application initiale (voir ci-dessous). La mesure prorogée ne doit pas devenir plus restrictive qu'elle ne l'était à la fin de la période initiale et doit au contraire continuer d'être libéralisée pendant la période de prorogation. DURÉE D'UNE MESURE DE SAUVEGARDE DÉFINITIVE Article 7 de l'Accord sur les sauvegardes – durée d'une mesure de sauvegarde. Un Membre n'appliquera des mesures de sauvegarde que pendant la période nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l'ajustement [au maximum quatre ans à moins d'une prorogation, la durée totale ne devant pas dépasser huit ans, y compris la période d'application de toute mesure provisoire]. L'un des grands problèmes des mesures de sauvegarde prises au titre de l'article XIX du GATT de 1947 était que leur durée n'était soumise à aucune limitation particulière. Ainsi, dans certains cas, les mesures restaient en vigueur pendant de nombreuses années, voire des décennies, devenant effectivement des formes de protection quasi-permanentes. Cela n'est plus possible aux termes de l'Accord sur les sauvegardes. Au contraire, la durée initiale, la prorogation et la réapplication de mesures sont soumises à des limites strictes. En particulier, une mesure quelle qu'elle soit ne peut être appliquée pendant plus de quatre ans sur la base d'une une enquête. Cette période doit comprendre la période d'application de toute mesure provisoire. PROROGATION D'UNE MESURE DE SAUVEGARDE DÉFINITIVE Il est possible de prolonger la durée d'une mesure de sauvegarde au-delà de sa période d'application initiale. Toute prorogation ne peut toutefois avoir lieu qu'à la suite d'un réexamen, à l'issue duquel les autorités déterminent que la mesure continue d'être nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et qu'il existe des éléments de preuve selon lesquels la branche de production nationale procède à des ajustements. La durée maximale autorisée d'une prorogation est de quatre ans, la période d'application totale maximale étant de huit ans. APPLICATION D'UNE NOUVELLE MESURE DE SAUVEGARDE Une fois qu'une mesure de sauvegarde initiale a expiré, il n'est pas possible d'appliquer immédiatement une nouvelle mesure de sauvegarde au même produit sur la base d'une nouvelle enquête. En d'autres termes, il n'est pas possible de proroger indéfiniment la protection en appliquant une série de mesures de sauvegarde consécutives. De fait, un laps de temps obligatoire doit s'écouler entre l'application de mesures à un même produit. En particulier (sauf pour les mesures de très courte durée), aucune nouvelle mesure de sauvegarde ne peut être de nouveau appliquée à un produit pendant une période égale à la durée de la première mesure. Ainsi, par exemple, si une mesure de sauvegarde est appliquée pendant quatre ans, le pays importateur doit attendre quatre ans après l'expiration de cette mesure pour pouvoir appliquer une nouvelle mesure au même produit. COMPENSATION ET RÉTORSION Article XIX:3 a) du GATT de 1994 "Si les Membres intéressés n'arrivent pas à un accord au sujet de [l'application de la mesure], […] il sera loisible aux Membres que [cette mesure] léserai[t] de suspendre […] [des] concessions […] substantiellement équivalentes…" Article 8 de l'Accord sur les sauvegardes – Niveau de concessions et d'autres obligations "Un Membre qui projette d'appliquer une mesure de sauvegarde ou qui cherche à en proroger une s'efforcera de maintenir un niveau de concessions et d'autres obligations substantiellement équivalent à celui qui existe en vertu du GATT de 1994 entre lui et les Membres exportateurs qui seraient affectés par cette mesure …" [y compris en convenant d'une compensation commerciale, avec un droit de rétorsion s'il ne peut être convenu d'aucune compensation. Toutefois, ce droit ne peut être exercé pendant les trois premières années d'application de la mesure, moyennant certaines conditions.] Rappelons que, aux termes de l'article XIX du GATT de 1994, une mesure de sauvegarde est une suspension provisoire de concessions ou d'obligations multilatérales et qu'elle doit être appliquée quelle que soit l'origine des importations. Elle affecte donc toutes les importations du produit considéré quelle qu'en soit l'origine, c'est-à-dire selon le principe NPF. Conformément aux règles générales du GATT, et comme le prévoit d'ailleurs l'article XIX lui-même, lorsqu'un Membre réduit ou élimine une concession négociée, il doit offrir une compensation commerciale aux Membres exportateurs qui seraient affectés, de façon à préserver l'équilibre général des droits et des obligations qui existe entre les Membres. En outre, lorsque aucun accord n'intervient quant au niveau et aux autres conditions de la compensation, les Membres exportateurs affectés ont le droit de prendre des mesures de rétorsion, c'est-à-dire qu'ils peuvent eux-mêmes suspendre des "concessions substantiellement équivalentes" vis-à-vis du Membre qui applique la mesure de sauvegarde, et ce également dans le but de préserver l'équilibre général des droits et des obligations entre les Membres. Ainsi, toutes les mesures de sauvegarde devraient en principe entraîner l'obligation d'offrir une compensation aux exportateurs affectés et donner à ces derniers le droit de prendre des mesures de rétorsion. Pourtant, la pratique observée dans le cadre du GATT de 1947 a montré que la clause de compensation/rétorsion de l'article XIX était l'une des grandes raisons pour lesquelles les parties contractantes du GATT avaient recours à des mesures de la zone grise plutôt qu'à des mesures de sauvegarde au titre de l'article XIX. Par conséquent, les négociateurs du Cycle d'Uruguay ont introduit dans l'Accord sur les sauvegardes des dispositions propres à assouplir la clause de compensation/rétorsion de l'article XIX. En particulier, bien qu'un Membre projetant d'appliquer une mesure de sauvegarde doive dans tous les cas consulter les Membres exportateurs qui seraient affectés, ceux-ci ne peuvent souvent pas exercer immédiatement leur droit de rétorsion si aucun accord n'intervient quant à la compensation. En particulier, lorsque la constatation d'un accroissement des importations se fonde sur un accroissement en termes absolus (et non seulement par rapport à la production nationale), les Membres exportateurs affectés ne peuvent exercer leur droit de rétorsion pendant les trois premières années d'application de la mesure. EXERCICES: 5. Dans quelles circonstances et selon quelles règles une mesure de sauvegarde provisoire peut-elle être appliquée? 6. Un Membre peut-il appliquer des mesures de sauvegarde sur une base bilatérale ou sélective au titre de l'Accord? 7. Comment l'Accord sur les sauvegardes remplit-il son objectif consistant à faciliter les ajustements structurels auxquels doit procéder la branche de production nationale pour s'adapter aux nouvelles conditions de concurrence internationale? 8. Un Membre qui applique une mesure de sauvegarde doit-il dans tous les cas offrir une compensation commerciale aux Membres exportateurs affectés? III. TRAITEMENT SPÉCIAL ET DIFFÉRENCIÉ INTRODUCTION Au titre de l'Accord sur les sauvegardes, les Membres en développement reçoivent un traitement spécial et différencié selon deux modes. Premièrement, lorsque les Membres en développement font l'objet de mesures de sauvegarde prises par d'autres Membres, ils bénéficient d'une exemption concernant le volume de minimis des importations. Deuxièmement, lorsque les Membres en développement appliquent eux-mêmes une mesure de sauvegarde, ils sont autorisés à le faire pendant une période plus longue que les Membres développés et sont assujettis à une période d'attente moins longue pour pouvoir appliquer à nouveau des mesures de sauvegarde à un produit donné. DISPOSITIONS CONCERNANT LES MEMBRES EN DÉVELOPPEMENT SOUMIS À DES MESURES DE SAUVEGARDE – EXEMPTION DU NIVEAU DE MINIMIS DES IMPORTATIONS Lorsque le volume des exportations d'un Membre en développement est inférieur à un certain seuil, ces exportations doivent être exemptées de la mesure de sauvegarde appliquée par un autre Membre. En particulier, la mesure ne peut en principe pas être appliquée à un Membre en développement dont la part du volume total des importations du produit considéré ne dépasse pas trois pour cent. Il existe cependant une exception à cette règle: si les exportations de tous les Membres en développement dont les exportations sont individuellement inférieures au seuil de trois pour cent représentent collectivement plus de neuf pour cent des importations totales, la mesure s'appliquera à toutes ces exportations. L'exemple simple ci-dessous illustre le fonctionnement de ces dispositions. Dans chacun des cas de figure présentés, supposons que quatre Membres en développement exportent le produit considéré vers le Membre qui applique la mesure de sauvegarde. CAS DE FIGURE 1: Membre en développement A: 2%; Membre en développement B: 1%; Membre en développement C: 3%; Membre en développement D: 2%. Aucun Membre en développement n'a une part individuelle de plus de 3%. La part totale des Membres en développement est de 8% (<9%). Tous les Membres en développement doivent être exemptés de la mesure. CAS DE FIGURE 2: Membre en développement A: 4%; Membre en développement B: 1%; Membre en développement C: 3%; Membre en développement D: 3%. Le Membre en développement A a une part individuelle supérieure à 3% et doit donc être soumis à la mesure. La part totale des Membres en développement B, C et D est de 7% (<9%). Les Membres B, C et D doivent être exemptés de la mesure. CAS DE FIGURE 3: Membre en développement A: 3%; Membre en développement B: 3%; Membre en développement C: 2%; Membre en développement D: 2%. Aucun Membre en développement n'a une part individuelle supérieure à 3%. Cependant, la part collective des Membres en développement dans les importations totales est de A+B+C+D = 10% (>9%). Tous ces Membres doivent donc être soumis à la mesure. DISPOSITIONS CONCERNANT LES MEMBRES EN DÉVELOPPEMENT QUI APPLIQUENT DES MESURES DE SAUVEGARDE DURÉE DE LA PROROGATION DE MESURES La durée maximale d'application initiale d'une mesure de sauvegarde est la même pour les Membres en développement que pour les Membres développés (quatre ans). En revanche, pour toute prorogation, les Membres en développement bénéficient d'une période plus longue de deux ans que celle accordée aux Membres développés. Plus précisément, un Membre en développement qui applique une mesure peut bénéficier d'une période de prorogation maximale de six ans, contre quatre pour les Membres développés. Ainsi, assujetti aux mêmes prescriptions de fond et de procédure en matière d'enquêtes et de réexamens, un Membre en développement peut maintenir une mesure de sauvegarde en vigueur pour une durée totale de dix ans (contre huit ans au maximum pour un Membre développé). NOUVELLE APPLICATION DE MESURES Les règles relatives à la nouvelle application de mesures à un produit donné sont également plus souples pour les Membres en développement. En particulier, sauf pour les mesures de très courte durée, la période d'attente à observer avant de pouvoir appliquer une nouvelle mesure à un produit donné est égale à la moitié de la période d'application de la mesure initiale, à condition que la période d'attente soit d'au moins deux ans. ACCORDS COMMERCIAUX RÉGIONAUX, PARALLÉLISME ET TRAITEMENT NPF Des questions sont fréquemment soulevées quant à l'application de mesures de sauvegarde entre partenaires dans le cadre d'accords commerciaux régionaux (ACR). Ces questions sont étroitement liées à des questions fondamentales (et non résolues à ce jour) ayant trait à l'interprétation de l'article XXIV du GATT de 1994. Il se pose notamment la question du seuil permettant de déterminer si un tel accord couvre "l'essentiel des échanges commerciaux" entre ses parties et, si tel est le cas, de l'obligation qui en résulte d'éliminer différentes mesures restrictives pour le commerce. En particulier, l'application de mesures de sauvegarde entre parties à un ACR est-elle prohibée (en vertu de l'article XXIV) ou, au contraire, est-elle requise (conformément au principe NPF inscrit à l'article XIX et à l'Accord sur les sauvegardes)? Si ces questions fondamentales, n'ayant pas été traitées dans le cadre du règlement des différends, ne sont toujours pas résolues, la question du "parallélisme" a été soulevée dans un certain nombre de différends soumis à l'OMC au sujet de mesures de sauvegarde. Il s'agit en particulier de savoir si un Membre peut mener une enquête en matière de sauvegardes (portant sur un accroissement des importations et l'existence d'un dommage et d'un lien de causalité) en se fondant sur les importations totales du produit considéré en provenance de toutes les sources (y compris de ses partenaires dans le cadre de l'ACR), puis exclure ses partenaires dans le cadre de l'ACR de l'application de la mesure car il se serait engagé à ne pas appliquer de mesures de sauvegarde à ses partenaires en vertu de l'ACR. À ce sujet, l'Organe d'appel a invariablement décidé qu'un tel manque de parallélisme entre les importations sur la base desquelles l'enquête a été menée et les conclusions en faveur de l'application d'une mesure de sauvegarde ont été établies, d'une part, et les importations auxquelles s'applique la mesure, d'autre part, n'était pas autorisé. Pour être justifiée, une mesure ne peut exclure une partie des importations dont l'accroissement a été constaté où qui ont causé le dommage constaté. Il se pose toutefois une autre question à ce sujet, qui reste irrésolue à ce jour: l'article XXIV du GATT de 1994 autoriserait-il (ou peut-être même obligerait-il) un Membre menant une enquête en matière de sauvegardes à ne prendre en considération que les importations en provenance de pays autres que ses partenaires dans le cadre de l'ACR aux fins de son enquête et, s'il constatait de cette manière l'existence d'un accroissement des importations, d'un dommage et d'un lien de causalité, à n'appliquer la mesure qu'aux importations visées par l'enquête (c'est-à-dire en provenance de pays autres que les parties à l'ACR)? EXERCICES: 9. Quel traitement spécial et différencié l'Accord sur les sauvegardes prévoit-il pour les Membres en développement qui appliquent des mesures de sauvegarde? 10. Quel traitement spécial et différencié l'Accord sur les sauvegardes prévoit-il pour les Membres en développement soumis à des mesures de sauvegarde par d'autres Membres? IV. SURVEILLANCE MULTILATÉRALE ET INSTITUTIONS Pour permettre une surveillance multilatérale de l'utilisation des mesures de sauvegarde, il a été institué d'importantes obligations de notification ainsi qu'un Comité des sauvegardes chargé d'examiner les notifications relatives aux sauvegardes et, d'une façon générale, de contrôler la mise en œuvre de l'Accord sur les sauvegardes. Les Membres sont tenus de notifier au Comité des sauvegardes les ouvertures d'enquête au sujet de l'existence d'un dommage grave ou d'une menace de dommage grave, et les raisons de cette action; les constatations de l'existence d'un dommage grave ou d'une menace de dommage grave causé par un accroissement des importations; et les décisions d'appliquer ou de proroger des mesures de sauvegarde. Ces notifications doivent contenir les renseignements pertinents sur lesquels sont fondées les décisions. Toutefois, il est important de noter que les Membres n'ont pas l'obligation de divulguer des renseignements confidentiels dans leurs notifications. Les Membres sont tenus, avant d'appliquer ou de proroger une mesure de sauvegarde, de ménager des possibilités adéquates de consultation avec les Membres ayant des intérêts substantiels en tant qu'exportateurs du produit. Les objectifs de ces consultations doivent être, entre autres choses, d'examiner les renseignements concernant les faits de la cause, d'échanger des vues sur les mesures projetées et d'arriver à un accord sur le maintien d'un niveau de concessions et d'obligations substantiellement équivalent. Les mesures provisoires doivent être notifiées avant d'être appliquées, et des consultations doivent commencer immédiatement après que les mesures ont été appliquées. Les résultats des consultations, les résultats des réexamens de milieu de période d'application des mesures, la compensation et/ou la suspension de concessions doivent être notifiés immédiatement par le Membre concerné au Conseil du commerce des marchandises, par l'intermédiaire du Comité des sauvegardes. En outre, les Membres sont tenus de notifier au Comité des sauvegardes leurs législation et réglementations ainsi que leurs procédures administratives internes en matière d'enquêtes et en ce qui concerne l'application de mesures de sauvegardes. Les Membres qui n'ont pas de législation, de réglementations ou de procédures en la matière doivent le signaler en présentant une notification "néant". Les Membres ont par ailleurs le droit d'adresser des contre-notifications sur les lois et réglementations, actions ou mesures en vigueur pertinentes d'autres Membres. Lorsque l'Accord sur les sauvegardes est entré en vigueur, les Membres étaient tenus de notifier dans un certain délai leurs mesures au titre de l'article XIX et leurs mesures de la zone grise existantes, et d'indiquer le calendrier prévu pour l'élimination progressive de ces mesures. (La date finale d'élimination de la dernière mesure de ce type était à la fin de 1999.) Le rôle du Comité est généralement de suivre (et de présenter à ce sujet un rapport au Conseil du commerce des marchandises) la mise en œuvre et le fonctionnement de l'Accord, d'examiner les notifications des Membres et de vérifier si les Membres ont respecté les dispositions procédurales de l'Accord pour l'application des mesures de sauvegarde, d'aider les Membres dans leurs consultations et d'examiner les mesures de rétorsion projetées. Les consultations et le règlement des différends relevant de l'Accord sont assujettis aux règles horizontales de règlement des différends de l'OMC, énoncées dans le Mémorandum d'accord sur le règlement des différends. Il n'existe aucune règle spéciale ou additionnelle en matière de règlement des différends pour ce qui est des sauvegardes. V. RÉSUMÉ – SAUVEGARDES GÉNÉRALES Une mesure de sauvegarde ne peut être appliquée que s'il est déterminé, lors d'une enquête menée conformément aux règles énoncées à l'article XIX du GATT de 1994 et de l'Accord sur les sauvegardes, que les importations d'un produit ont augmenté dans une mesure et à des conditions telles qu'elles causent ou menacent de causer un dommage grave à la branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents. Il doit par ailleurs être effectivement établi que l'accroissement des importations était imprévu. Les mesures de sauvegarde, qui consistent en la suspension provisoire de concessions multilatérales et d'autres obligations, doivent en principe être appliquées à toutes les importations d'un produit, quelle qu'en soit la source. En d'autres termes, elles doivent être appliquées selon le principe NPF (sous réserve, toutefois, de l'obligation de ne pas les appliquer aux Membres en développement dont les parts dans les importations sont faibles). Le principe du parallélisme doit être respecté, c'est-à-dire que l'application d'une mesure ne peut être limitée à certaines importations sur la base d'une enquête et de conclusions ayant pris en considération toutes les importations (sous réserve de l'exception visant les Membres en développement dont les parts dans les importations sont faibles). Les mesures de sauvegarde peuvent revêtir des formes très diverses, dont les plus fréquentes sont la majoration des droits de douane au-dessus des taux consolidés, les contingents et les contingents tarifaires, d'autres formes étant également possibles. Le niveau d'une mesure de sauvegarde ne doit pas être plus restrictif que nécessaire pour prévenir ou réparer un dommage grave et faciliter l'ajustement. répartition des contingents. Des règles spécifiques régissent le niveau et la Pour toutes les formes de mesures de sauvegarde, les autorités du Membre importateur doivent en justifier la forme et le niveau dans les rapports qu'elles publient et les notifications qu'elles présentent à leur sujet. Les mesures de sauvegarde dont la durée dépasse un an doivent être libéralisées progressivement pendant leur période d'application. Si la durée d'une mesure est prorogée, celle-ci ne doit pas être plus restrictive qu'elle ne l'était à la fin de la période d'application initiale et doit continuer d'être libéralisée pendant la période de prorogation. La durée des mesures de sauvegarde est soumise à des limites numériques. La période d'application initiale ne peut dépasser quatre ans. Toute(s) prorogation(s) ne peu(ven)t dépasser une période additionnelle de quatre ans au total (six ans dans le cas des mesures appliquées par les Membres en développement). Hormis les mesures de très courte durée, aucune nouvelle mesure de sauvegarde ne peut être appliquée à un produit avant qu'une période égale à la période d'application de la mesure précédente visant ce produit ne se soit écoulée. Un Membre appliquant une mesure de sauvegarde doit en principe offrir une compensation commerciale aux Membres exportateurs affectés, faute de quoi ces derniers peuvent prendre des mesures de rétorsion commerciale à son encontre, mais, dans nombre de cas, le droit de rétorsion ne peut être exercé pendant les trois premières années d'application d'une mesure de sauvegarde. Tous les Membres doivent notifier leurs législation et réglementation intérieures et/ou leurs procédures internes concernant les enquêtes en matière de sauvegardes et les mesures de sauvegarde. S'ils n'ont pas de législation, etc., en la matière, ils doivent présenter une notification "néant". Les Membres qui engagent des actions en matière de sauvegardes doivent notifier: l'ouverture d'une enquête; la constatation de l'existence d'un dommage grave ou d'une menace de dommage grave causé(e) par un accroissement des importations; la décision d'appliquer une mesure de sauvegarde; les résultats des réexamens de milieu de période d'application des mesures; les résultats des consultations tenues avec les Membres exportateurs affectés; ainsi que toute compensation ou rétorsion envisagée. RÉPONSES PROPOSÉES: 1. Pourquoi les négociateurs du Cycle d'Uruguay ont-ils estimé que l'article XIX du GATT ne suffisait pas à lui seul à réglementer le recours aux mesures de sauvegarde (autrement dit, pourquoi ont-ils jugé nécessaire de mettre au point un Accord sur les sauvegardes? Avant le Cycle d'Uruguay, les mesures de sauvegarde étaient réglementées exclusivement par l'article XIX du GATT de 1947. Entre autres choses, cet article disposait que les mesures de sauvegarde devaient être appliquées strictement selon le principe NPF et qu'une compensation devait être offerte dans tous les cas sous peine de rétorsion. En outre, l'article XIX ne donnait aucune orientation sur la manière dont les Membres devaient établir qu'il était satisfait aux conditions requises pour l'application d'une mesure, et le niveau et la durée des mesures n'étaient soumis à aucune limitation. Par conséquent, il était fréquemment recouru à des mesures "de la zone grise" (mesures restrictives pour le commerce appliquées au niveau bilatéral ou plurilatéral), mesures qui, comme les mesures prises au titre de l'article XIX , restaient généralement en vigueur pendant de longues périodes (dans certains cas, pendant des décennies),. Ainsi, les négociateurs ont décidé qu'il était nécessaire de mettre en place des règles additionnelles pour rétablir un contrôle multilatéral sur les mesures de sauvegarde et pour veiller à ce que ces mesures soient utilisées de manière à faciliter l'adaptation des branches de production aux nouvelles conditions de concurrence internationale, plutôt que pour les tenir à l'abri de cette concurrence. 2. Dans l'Accord sur les sauvegardes, comment les mesures de la zone grise et les mesures de sauvegarde prises au titre de l'article XIX qui étaient en place lors de l'entrée en vigueur de l'Accord ont-elles été traitées? L'Accord sur les sauvegardes prescrivait l'élimination progressive de toutes les mesures de la zone grise et des mesures prises au titre de l'article XIX qui étaient en place lors de son entrée en vigueur. Les Membres ont dû notifier toutes leurs mesures de ce type dans un certain délai et les éliminer progressivement selon un certain calendrier. Les mesures préexistantes de ce type ne pouvaient être maintenues au-delà du 31 décembre 1999. En outre, l'Accord sur les sauvegardes prohibe désormais strictement le recours à de telles mesures. 3. Quelles sont les conditions et les circonstances factuelles fondamentales nécessaires pour qu'un Membre puisse appliquer une mesure de sauvegarde? Pour qu'un Membre puisse appliquer une mesure de sauvegarde, il doit y avoir un accroissement des importations d'un produit, cet accroissement devant être soudain, récent et brutal et les importations en question devant avoir lieu à des conditions de concurrence telles qu'elles causent ou menacent de causer un dommage grave à la branche de production nationale de produits similaires ou directement concurrents. De plus, l'accroissement des importations ne doit pas avoir été prévu lorsque le Membre importateur a souscrit ses engagements multilatéraux (tels que la consolidation des droits de douane) s'agissant du produit considéré. Il doit être démontré que toutes ces conditions sont remplies au moyen d'une enquête menée par les autorités compétentes du Membre importateur. 4. Qu'est-ce qu'un "dommage grave" et une "menace de dommage grave" et quels types de facteurs faut-il examiner pour déterminer si une branche de production nationale subit ou est menacée de subir un dommage grave? Un dommage grave est défini comme étant une "dégradation générale notable de la situation d'une branche de production nationale". Une menace de dommage grave est l'imminence évidente d'un dommage grave qui n'a pas encore eu lieu, qui doit être démontrée par les faits et non pas seulement sur la base d'allégations, de conjectures ou de lointaines possibilités. Pour déterminer si une branche de production nationale subit ou est menacée de subir un dommage grave, l'autorité chargée de l'enquête doit examiner tous les facteurs pertinents concernant la situation de la branche de production, notamment la production, les ventes, l'emploi, l'utilisation de la capacité et les résultats financiers. Les données relatives à ces indicateurs doivent être examinées sur une période suffisamment longue pour que les tendances puissent être observées et la fin de la période considérée doit être très récente. 5. Dans quelles circonstances et selon quelles règles une mesure de sauvegarde provisoire peutelle être appliquée? Une mesure de sauvegarde provisoire ne peut être appliquée que dans des "circonstances critiques" où tout délai dans l'application d'une mesure causerait un tort qu'il serait difficile de réparer. Il doit donc être satisfait à des critères relativement rigoureux. L'autorité chargée de l'enquête doit déterminer à titre préliminaire qu'il existe des éléments de preuve manifestes selon lesquels un accroissement des importations a causé ou menace de causer un dommage grave. Une mesure provisoire ne peut prendre la forme que d'une majoration des droits de douane, qui doivent être remboursés dans les moindres délais en cas de détermination négative de l'existence d'un accroissement des importations, d'un dommage et d'un lien de causalité. La période d'application d'une mesure provisoire ne doit pas dépasser 200 jours et doit être comptée pour une partie de la période d'application de toute mesure définitive. 6. Un Membre peut-il appliquer des mesures de sauvegarde sur une base bilatérale ou sélective au titre de l'Accord? Non. L'un des grands principes directeurs de l'Accord est que ces mesures doivent être appliquées de façon non sélective, c'est-à-dire conformément au principe de la nation la plus favorisée ou "NPF". (L'article 2:2 est ainsi libellé: "Des mesures de sauvegarde seront appliquées à un produit importé quelle qu'en soit la provenance.") Ce principe est cependant soumis à l'obligation d'exempter de l'application d'une mesure les Membres en développement dont la part dans les importations est faible. 7. Comment l'Accord sur les sauvegardes remplit-il son objectif consistant à faciliter les ajustements structurels auxquels doit procéder la branche de production nationale pour s'adapter aux nouvelles conditions de concurrence internationale? L'Accord sur les sauvegardes contient un certain nombre de règles visant à faire en sorte que les branches de production qui bénéficient de la protection d'une mesure de sauvegarde procèdent à des ajustements pour s'adapter aux nouvelles conditions de concurrence. Premièrement, l'application d'une mesure de sauvegarde est limitée dans le temps. Deuxièmement, toute mesure de sauvegarde dont la durée dépasse un an doit être libéralisée progressivement pendant sa période d'application, de sorte que la branche de production soit de plus en plus exposée à la concurrence internationale pendant cette période. Troisièmement, les mesures dont la durée dépasse trois ans doivent être réexaminées au milieu de leur période d'application, l'objectif étant de déterminer si leur application reste nécessaire ou si elles pourraient être libéralisées plus rapidement que prévu initialement. Quatrièmement, une période d'attente doit être observée entre la fin d'une mesure de sauvegarde et l'application d'une nouvelle mesure au même produit. Prises ensemble, toutes ces prescriptions visent à assurer que la branche de production mette à profit la période de protection pour se préparer à subir de plein fouet la concurrence internationale. 8. Un Membre qui applique une mesure de sauvegarde doit-il dans tous les cas offrir une compensation commerciale aux Membres exportateurs affectés? Dans la pratique, non, car dans nombre de cas, le droit des Membres affectés de prendre des mesures de rétorsion en réponse à la mesure de sauvegarde d'un autre Membre est suspendu pendant les trois premières années de l'application de cette dernière. En particulier, le droit de rétorsion ne peut être exercé pendant les trois premières années de l'application d'une mesure lorsque l'accroissement des importations a lieu en termes absolus (et non relativement à la production nationale) et pour autant que la mesure soit conforme aux dispositions de l'Accord sur les sauvegardes. 9. Quel traitement spécial et différencié l'Accord sur les sauvegardes prévoit-il pour les Membres en développement qui appliquent des mesures de sauvegarde? Les Membres en développement qui appliquent des mesures de sauvegarde sont soumis aux mêmes règles de procédure que les Membres développés en ce qui concerne les enquêtes, l'application initiale de mesures et les réexamens. Ils peuvent toutefois proroger leurs mesures pendant une période plus longue de deux ans que celle dont bénéficient les Membres développés, de sorte que la mesure de sauvegarde d'un Membre en développement peut rester en vigueur pour une durée totale de dix ans. De plus, les Membres en développement sont soumis à une période d'attente moins longue que les Membres développés entre la fin d'une mesure de sauvegarde visant un produit et l'application d'une nouvelle mesure de sauvegarde au même produit. 10. Quel traitement spécial et différencié l'Accord sur les sauvegardes prévoit-il pour les Membres en développement soumis à des mesures de sauvegarde par d'autres Membres? Un Membre en développement exportateur doit être exclu de l'application d'une mesure de sauvegarde par un autre Membre lorsque sa part dans les importations totales du Membre importateur ne dépasse pas trois pour cent, sauf si les exportations de tous les Membres en développement dont les exportations sont individuellement inférieures à ce seuil représentent collectivement plus de neuf pour cent des importations totales.