Contrat social, déjeuner-débat avec André Lévy - contrat

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Contrat social, déjeuner-débat avec André Lévy - contrat
Déjeuner Contrat social avec André Lévy-Lang, 8 mars 2007
Le thème d’exposé suggéré à André Lévy-Lang « causes et conséquences de la surabondance
mondiale des liquidités » a été complété à la demande de Contrat-Social par des commentaires
sur les hedge funds et le private equity.
Abondance des liquidités
Le FED a réagi au traumatisme du 11 septembre 2001 en inondant le marché de liquidités, les
taux d’intérêt étant ramenés de 6,5 % à 1 %, toutes les banques centrales lui emboîtant le pas. En
2004, les grandes banques centrales ont tenté de durcir leur politique monétaire en remontant les
taux courts mais les taux longs ne sont pas remontés. Pour deux raisons :
1. Le poids de l’Asie (Chine et Inde) dans les échanges conduit à des excédents commerciaux
massifs qui se traduisent en réserves monétaires converties en dollars et euros tout en faisant
pression sur les salaires et les prix qui restent bas aux États-Unis et en Europe. L’Amérique vit à
crédit et cela arrange les pays d’Asie ; en maintenant des parités de change largement artificielles
ces pays entretiennent les excédents de liquidités au lieu de les résorber. Probablement, cette
situation va se prolonger aussi longtemps que les réserves de main-d’œuvre disponibles dans ces
pays resteront abondantes (pendant 10 ou 15 ans ?).
2. Au même moment, les recettes des pays du Golfe se sont envolées avec la hausse des cours du
brut accroissant massivement leurs liquidités disponibles pour investir.
3. Pour ces raisons des bulles spéculatives se forment dans les actifs immobiliers et sur les marchés
d’actions. Les investisseurs empruntent à très bas taux le yen et le yuan pour se porter sur le
dollar ou l’euro qui ont des taux plus élevés. Ces phénomènes qui ne sont pas sans risque pour les
investisseurs peuvent être une menace « systémique ».
4. Les fonds d’arbitrage et de private equity qui peuvent se refinancer à des conditions très
favorables ont désormais des moyens d’action très importants.
Hedge funds et private equity.
Il ne faut pas assimiler de manière simpliste hedge funds et fonds de private equity.
Les hedge funds font-ils courir des risques sans contrôle des régulateurs ? Ils font l’objet d’un contrôle
indirect à travers la surveillance prudentielle des banques et à travers les dépositaires. Un travail
professionnel en cours de finalisation va définir des principes d’autorégulation qui seront l’objet
d’une surveillance de la part des régulateurs. Les agences de notation seront appelées à exercer
une évaluation des risques de chaque fonds. Le rôle des hedge funds est positif pour l’équilibre et
l’ajustement des marchés dès lors qu’ils sont gérés par des professionnels compétents. Le coût du risque
est diminué grâce aux mécanismes de transferts de risque par les CDS (credit default swaps) qui
doivent être assumés par des investisseurs avertis.
Le private equity exerce un rôle très favorable en apportant, notamment aux entreprises moyennes,
un appui pour leur évolution stratégique, pour franchir une étape de leur croissance ou au
moment d’une transmission. Il est vrai que les LBO utilisent l’effet de levier de manière parfois
excessive et que l’endettement élevé se traduit par des charges d’intérêt qui fragilisent l’équilibre
d’exploitation des entreprises. La PE tire violemment parti du maillon faible de la firme
capitaliste cotée depuis que « l’ère des managers » s’est imposée. La solidarité entre ces derniers
et les actionnaires n’a plus la consistante qu’elle avait dans les entreprises familiales (détention du
capital + management). Des managers, nombreux, ont irrité les pensions funds et les fonds de
placement voire des assureurs. Si la gestion (et la valeur en bourse) semble pouvoir être
optimisée, les firmes de PE trouvent donc des partenaires.
Le fait d’associer les dirigeants aux résultats est un puissant facteur de succès des opérations. Les
rémunérations que s’attribuent les gestionnaires des HF et de la PE attirent des professionnels.
Certains de haut niveau. D’autres… Le risque de bulle existe de ce fait. Les performances
relatives des HF semblent diminuer alors que leur diffusion s’élargit.
Les très grands fonds de private equity ont les moyens de se porter acquéreurs d’entreprises
même importantes cotées sur le marché et conduire à de grandes opérations de restructuration
avec des conséquences au niveau de l’emploi.
New York étant en concurrence avec Londres, les deux places cherchent la bonne dose de
régulation qui limitera les risques sans repousser les opérations vers l’autre place. Michel Prada,
Pt de l’AMF, dans une récente conférence sur les sujets évoqués dans ce compte rendu, évoque
les risques que cette concurrence entre places peuvent provoquer.
Resserrement possible des liquidités, phase moins favorable d’un cycle économique qui existe
toujours, crise de taux de change dont certains (Chine-$) sont largement artificiels pourraient
mettre HF et PE à l’épreuve. Atout français pour les salles de marché : la haute qualité de nos
écoles de mathématiques.