Philippe ROCHER - CFBD - Collège Français de Biomatériaux
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Philippe ROCHER - CFBD - Collège Français de Biomatériaux
Journal de Biomatériaux Dentaires 19es Journées du Collège Français de Biomatériaux Dentaires Textes coordonnés par : Philippe ROCHER Publication du Collège Français de Biomatériaux Dentaires www.cfbd.asso.fr ANNÉE 2002 VOLUME 17 Journal de Biomatériaux Dentaires Directeur de la Publication Michèle LISSAC Coordination des Textes Philippe ROCHER Directeur de la Rédaction Philippe ROCHER Comité de Lecture J.P. ATTAL M. BOLLA G. BURDAIRON J. COLAT-PARROS P. COLON C.L. DAVIDSON (Pays-Bas) M. DEGRANGE J. DEJOU P. EXBRAYAT G. GRÉGOIRE B. GROSGOGEAT J.J. GUYONNET P. JONAS G. LELOUP (Belgique) M. LISSAC H. LOGET M. MAQUIN J.M. MEYER (Suisse) P. MILLET M. MORENAS F. MOYA B. PICARD L. POURREYRON P. ROCHER M. SADOUN C. SÉVERIN J. VREVEN (Belgique) AG. WILSON (Grande-Bretagne) COLLÈGE FRANÇAIS DE BIOMATÉRIAUX DENTAIRES Faculté d'Odontologie, Place de Verdun 59000 LILLE www.cfbd.asso.fr 4 TABLES DES MATIÈRES •Le point sur les alliages en 2002 ..................................................................................p. 7 Jean-Marc MEYER, Christian SUSZ, Lucien RECLARU 1. LES ALLIAGES DENTAIRES AUJOURD’HUI (J-M. MEYER) 2. ÉCHECS : COMMENT LES ÉVITER ? (CH. SUSZ) 3. DÉGRADATIONS EN MILIEU BIOLOGIQUE SIMULÉ (L. RECLARU) • NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications ...................................p. 37 Jan VAN HUMBEECK • Compte rendu des 19es journées scientifiques du CFBD SESSION 1 MÉTHODOLOGIE ET CARACTÉRISATION • ADHÉSION DE FIBROBLASTES GINGIVAUX HUMAINS SUR DIFFÉRENTES RUGOSITÉS D’ALLIAGES ORTHOPÉDIQUES.....................................................p. 48 V. COMTE, C. LAGNEAU & M. LISSAC. • MESURE DE L’ÉNERGIE LIBRE DE SURFACE DE MATÉRIAUX IMPLANTAIRES DENTAIRES : MÉTHODES DE LA GOUTTE POSÉE ET DE LA BULLE CAPTIVE .................................p. 52 F. MABBOUX, L. PONSONNET, J. J. MORRIER & O. BARSOTTI • FINITION ET POLISSAGE DES RÉSINES COMPOSITES : INFLUENCE DU MATÉRIAU ET VARIABILITÉ INTER-OPÉRATEUR..................................................p. 56 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DEJOU • EFFETS DU RENFORCEMENT A L’AIDE DE FIBRES DE VERRE ET DE LA POST-POLYMÉRISATION SUR LES PROPRIÉTÉS MÉCANIQUES DE DEUX RÉSINES COMPOSITES DE LABORATOIRE.....................................................................p. 62 J. KOSORIC, M. CATTANI-LORENTE, CH. GODIN & J-M. MEYER • ABSORPTION D’EAU ET SOLUBILITÉ DE CINQ MATÉRIAUX DE RESTAURATION À BASE DE RÉSINE ET DE LEURS ADHÉSIFS ..................................................p. 67 E. MORTIER, D. GERDOLLE, B. JACQUOT & M. PANIGHI • CAPTATION PAR L’EMAIL HUMAIN D’IONS FLUORURES ET STRONTIUM RELARGUÉS PAR DES CVI : MISE AU POINT D’UN PROTOCOLE D’ÉTUDE.....................................p. 71 B. TERRIÉ, P. SHARROCK & G. GRÉGOIRE • BIOMATÉRIAUX INJECTABLES : RHÉOLOGIE ET APPLICATIONS ODONTOLOGIQUES EN SITE OSSEUX..............................................................p. 76 I. KHAIROUN, P. WEISS, G. DACULSI, A. JEAN & J-M BOULER SESSION 2 POLYMÉRISATION ET LUMIÈRE • CARACTÉRISATION ET EFFICACITÉ DE TROIS LAMPES A POLYMÉRISER........................................p. 79 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER • INTÉRÊT DU MODE DE PHOTOPOLYMÉRISATION EXPONENTIEL SUR LES CONTRAINTES DE RÉTICULATION DE RÉSINES COMPOSITES .............................................................................p. 85 C. CHARTON, C. G’SELL & M. PANIGHI • ÉVALUATION DE L'EFFICACITÉ DE LA PHOTOPOLYMÉRISATION LED DE 2 MATÉRIAUX COMPOSITES..........................................p. 88 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET 5 • COMPARAISON DE LA DURETÉ KNOOP DE 2 MATÉRIAUX COMPOSITES AVEC 5 LAMPES À DIODES ÉLECTROLUMINESCENTES ............................................p. 94 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET • INFLUENCE DE LA POLYMÉRISATION SUR LA DURETÉ ET LA RÉSISTANCE À LA FLEXION DE COMPOSITES DENTAIRES...................................................p. 98 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT & M. LISSAC SESSION 3 ADHÉSION ET ADHÉSIF • ÉTUDE AU MICROSCOPE ÉLÉCTRONIQUE À BALAYAGE DE 2 ADHÉSIFS DE 5ÈME GÉNÉRATION................................................................p. 102 J. BALLEYDIER, C. LAGNEAU, D. SEUX & M. LISSAC • INFLUENCE DE LA SIMULATION IN VITRO DES CONDITIONS INTRA-ORALES EXTRÊMES SUR LA MORPHOLOGIE DES INTERFACES OBTENUES ENTRE LA DENTINE ET DEUX SYSTÈMES ADHÉSIFS EN M.E.B .................................p. 108 C. BESNAULT, JP. ATTAL & M. DEGRANGE • ÉTUDE IN VITRO DE L’ÉTANCHÉITÉ A L’INTERFACE DE QUATRE SYSTÈMES DE COLLAGE A USAGE PROTHÉTIQUE ...................................................p. 110 D. GERDOLLE, E. MORTIER, B. JACQUOT & M. PANIGHI • ÉTUDE PRÉLIMINAIRE DE LA VISCOSITÉ INITIALE DE TROIS ADHÉSIFS DENTINAIRES; RELATION AVEC LEUR PÉNÉTRATION DANS LES TUBULI. ..................................p. 114 E. LEFORESTIER, E. DARQUE-CERETTI, Ch. PEITI, PO. BOUCHARD & M. BOLLA • PROPRIÉTÉS DES SYSTÈMES ADHÉSIFS ET ÉTANCHÉITE IN VITRO DÉTERMINATION DES FACTEURS DISCRIMANTS ...............................p. 119 A. RASKIN, J. VREVEN & J. DEJOU • ÉVALUATION DE L’ADHÉRENCE DE VERROUS ORTHODONTIQUES SELON DIFFÉRENTS PROTOCOLES DE COLLAGE ET OBSERVATION DES SURFACES APRÈS RUPTURE...................................................................p. 123 T. VERGE, G. GREGOIRE & P. SHARROCK • ÉVALUATION IN VITRO DES PERFORMANCES DE 2 ADHÉSIFS AUTO-MORDANCANTS ET D'UN COMPOSITE FLUIDE POUR L'OBTURATION DE PUITS ET FISSURES .............................p. 128 D. GLAVINA, F. COURSON, W. ARANDA, JP. ATTAL & M. DEGRANGE La loi du 11 mars 1957 n’autorisant, aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. © CFBD 2003 (Imprimé en France) ISBN : 2-9519994-3-7 6 Le point sur les alliages en 2002 Jean-Marc MEYER (1), Christian SUSZ (2), Lucien RECLARU (3) (1)- Section de Médecine Dentaire, Université de Genève, Suisse (2)- Qualident S.A., Genève, Suisse (3)- Groupe PX, La Chaux-de-Fonds, Suisse Collège Français de Biomatériaux Dentaires Les Journées Scientifiques de Lille 2002 Faculté d’Odontologie, 6 & 7 juin 2002 RÉSUMÉ L’offre des alliages dentaires à couler a été considérablement modifiée pour des raisons économiques et de biocompatibilité. Les alliages à bas prix à base de nickel sont soumis de plus en plus à des restrictions, voire des interdictions. On voit apparaître des alliages dits “bio”, contenant presque exclusivement des alliages nobles (or et platine). Pour simplifier le travail des techniciens, des alliages dits “universels” sont également proposés, qui permettent de réduire le nombre d’alliages à maintenir en stock dans le laboratoire. Les alliages à base de cobalt se développent comme une alternative économique aux alliages non-précieux à base de nickel. Le titane et ses alliages, utilisés pour la coulée, ont de la peine à s’imposer sur le marché, principalement à cause des difficultés de manipulation et de la lourdeur de l’investissement technique nécessaire (machine de coulée spécifique). Les échecs observés lors de l’utilisation au laboratoire odonto-technique des alliages dentaires à l’état coulé reposent en partie sur des déficiences au niveau de la conception de la restauration (formes et dimensions ne respectant pas les exigences mécaniques minimales) et sur un traitement inadéquat de l’alliage lors de sa transformation par coulée. En particulier, les facteurs thermiques sont souvent à l’origine de défauts plus ou moins graves, tels que porosités et coulées incomplètes. Il existe pour chaque type d’alliage une gamme de températures de moule et de coulée optimales, dont le non-respect entraîne l’apparition des défauts cités. Les alliages dentaires faisant partie des dispositifs médicaux selon la législation européenne, ils sont soumis aux directives sur l’évaluation biologique de ces dispositifs. L’évaluation de leur résistance à la corrosion est l’un des tests clés dans ce domaine, à cause des risques que peuvent entraîner le relargage de certains ions, comme le nickel notamment. La mesure du potentiel en circuit ouvert en milieu biologique simulé (salive artificielle) donne une première indication de la noblesse relative de l’alliage, mais cette première indication doit être complétée par des mesures de la résistance de polarisation, du courant de corrosion, et du potentiel de crevasse. Une évaluation des risques liés au galvanisme créé par la mise en contact permanente ou répétitive avec un autre alliage doit également être réalisée. La présente étude donne enfin deux exemples illustrant le processus de relargage d’ions : celui d’alliages dentaires à base de cuivre utilisés dans certains pays de l’Europe de l’Est et en Amérique du Sud, et celui d’alliages à base de nickel. Parmi les orientations pour de futures recherches, il est mentionné le recours à des corrélations entre éléments relargués (mis en évidence 7 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 par des méthodes aussi sophistiquées que les analyses de traces par ICP-MS, GC-MS et HPLC-MS) et tests immunologiques (MELISA, LTT-CITA). Mots-clés : matériaux dentaires, alliage dentaire, dégradation, corrosion, galvanisme Cet article rend compte des trois présentations regroupées lors des Journées Scientifiques 2002 du CFBD sous le titre général « Le point sur les alliages en 2002 ». Afin de ne pas trahir les opinions des trois auteurs, chacun d’eux a rédigé la partie qui lui avait été dévolue lors de cette présentation, à savoir : Les alliages dentaires aujourd’hui, par Jean-Marc Meyer, Echecs : comment les éviter ? par Christian Susz, et Dégradations en milieu biologique simulé, par Lucien Reclaru. LES ALLIAGES DENTAIRES AUJOURD’HUI (J.-M. MEYER) Origine des changements (prix du palladium) Le marché des alliages dentaires en Europe a subi de profondes mutations durant les dernières années. Les causes en sont multiples, mais on peut néanmoins identifier assez clairement l’effet dévastateur du rejet du palladium comme constituant important des alliages dentaires par le marché allemand. À cet effet d’origine essentiellement psychologique est ensuite venu s’ajouter un effet financier, lié à la hausse massive du prix du palladium. Ainsi, de métal noble plus économique que les autres métaux nobles et pour cela très prisé comme alternative économique à l’or, le palladium est devenu plus coûteux que l’or qu’il avait si longtemps remplacé. Pendant des années, le prix du palladium était suffisamment bas pour en faire un élément très intéressant comme substitut de l’or dans les alliages dentaires nobles. Les alliages à base de palladium étaient alors considérés comme une solution économique raisonnable, d’autant plus que leur comportement biologique (à l’exception des alliages Pd-Cu) et électrochimique est excellent. Un incident malheureux et monté en épingle par les médias allemands (présentation à la télévision allemande, dans une émission de consommateurs, d’une patiente victime d’une impressionnante réaction allergique à un alliage palladium-cuivre encore en cours de développement) a durablement affecté la réputation des alliages au palladium dans ce pays – avec comme résultat des ventes en chute libre ! La montée rapide et considérable du cours du palladium a également contribué à l’abandon temporaire des alliages à base de ce métal. Son cours a en effet passé de US $ 116.- l’once en octobre 1996 à US $ 1 047.- l’once en janvier 2001, dépassant alors largement le prix du platine (US $ 625.- l’once en janvier 2001), et bien sûr celui de l’or (US $ 260.- l’once à la même date). Le prix actuel du palladium est retombé à environ US $ 246.- l’once en décembre 2002. Face à ces difficultés, de nombreux fabricants allemands d’alliages dentaires nobles se sont tournés vers le développement d’alliages nobles de remplacement, principalement des alliages à base d’or et de platine et sans palladium, créant ainsi une nouvelle catégorie d’alliages devant posséder les meilleures qualités possibles. Nouvelle classification des alliages dentaires aujourd’hui Sur la base de la documentation obtenue lors de l’exposition IDS 2001 à Cologne Les alliages nobles Classiquement, les alliages dentaires se répartissaient en deux grands groupes : les alliages “pour la technique céramo-métallique” et les alliages “conventionnels”, chacun de ces deux groupes se divisant à leur tour en trois sous-groupes : 8 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Alliages “céramo-métalliques” Alliages riches en or (base or-platine-palladium) Alliages à teneur en or réduite (or remplacé en partie par du palladium) Alliages à base de palladium (avec ou sans argent) Ces alliages, formant aujourd’hui la part la plus importante du marché, sont caractérisés par un coefficient d’expansion thermique (CET) compris entre 13.8 et 15.5 x 10-6/ °C. Ils sont donc bien adaptés à la majorité des céramiques dentaires classiques. Alliages “conventionnels” Alliages riches en or (base traditionnelle or-cuivre) Alliages à teneur en or réduite (or remplacé en partie par de l’argent) Alliages à base d’argent (très bon marché, mais d’une moins bonne qualité) Compte tenu de la demande toujours plus faible de restaurations dentaires fixées entièrement métalliques, les alliages de ce type ne sont guère plus qu’une survivance de produits anciens. Comme il est par ailleurs possible de réaliser une couronne “tout-métal” avec un alliage céramo-métallique, alors que le contraire n’est pas possible, la nécessité de stocker au laboratoire des alliages conventionnels ne s’impose plus. L’apparition de nouvelles céramiques dentaires, notamment à plus basse fusion (porcelaines LFC), mais avec des CET nettement plus élevés que les céramiques classiques, a conduit à l’élaboration d’alliages dits “universels”, possédant un CET compris entre 15.8 et 16.8 x 10-6/ °C. De tels alliages sont par ailleurs proposés pour l’ensemble des travaux prothétiques (céramo-métallique, conventionnel, et même pour les châssis de prothèse partielle adjointe). On a donc aujourd’hui une nouvelle classification, comportant trois groupes principaux au lieu de deux : Alliages “céramo-métalliques” Alliages “universels” Alliages “conventionnels” Malgré les efforts de rationalisation, les producteurs d’alliages dentaires ont toujours tendance à maintenir dans leur catalogue un nombre trop élevé d’alliages. Ainsi, pour la seule maison Metalor, on trouve dans le catalogue les produits suivants : Alliages “céramo-métalliques” (bonding alloys) Riches en or : V-Gnathos Plus, V-Gnathos PF, V-Supragold, V 92, V 44, V-Supra Plus, V-Classic Teneur en or réduite : V-Delta SF, V-Deltabond, V-Deltaloy, V-Delta 450, V-Delta Classic À base de palladium : Deltapal, Cerapall 2, Cerapall 4 CF, Cerapall 6, Ceradelta, Ceradelta 2 Alliages “universels” (universal alloys) Riches en or : Aurofluid Plus, Pontor LFC, Pontor 4 CF, Aurofluid CPF À base de Pd et Ag : Pagalinor 4 Alliages “conventionnels” (casting alloys) Riches en or : Aurofluid 2 PF, Pontor MPF, Aurofluid M, Aurofluid 3, Prothauro 22 Teneur en or réduite : Pontor 2, Solaro 3À base d’Ag et Pd : Pagalinor 2, Pagalin2 Cette pratique se retrouve chez bon nombre de fabricants, et le consommateur aura bien de la peine à s’y retrouver. 9 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Les alliages “bio” Les très violentes critiques allemandes contre les alliages contenant du palladium ont conduit les fabricants à proposer des alliages soi-disant plus sûrs, sans palladium. Ces nouveaux alliages ont été affublés du qualificatif “bio”. Pour le même fabricant cité plus haut, la démarche a été la suivante : à partir de l’alliage “céramo-métallique” riche en or V-44, de composition Au 76.9 % pds, Pt 10.3 %, Pd 9.4 % et In 1.4 %, deux alliages ont été développés : V-Gnathos Plus (Au 85.9 %, Pt 11.7 % et Zn 1.5 %), et V-Gnathos PF (Au 86.8 %, Pt 11.7 %), avec comme objectif d’offrir des alliages sans métaux “à risque”. Cette démarche se retrouve chez la plupart des fabricants, qui proposent maintenant des produits de ce type, comme le montre le tableau 1. Fabricant BegoGold Wegold Wegold Wegold Cendres&Métaux Ivoclar/Vivadent Novametal Produit Bio PontoStar Wegold GS Wegold Biologic Wegold Bio-REVO CM Bio Ethic d.SIGN 98 NovaBio Au 87.0 86.8 78.0 86.0 86.7 85.9 86.0 Pt 10.6 11.6 19.3 11.0 10.8 12.1 10.4 Zn 1.5 1.5 1.2 X 1.5 1.5 1.5 CET 14.4 14.4 14.0 14.5 14.5 14.3 14.4 Tableau 1 : Quelques alliages “bio” récemment mis sur le marché Mis à part le produit Wegold Biologic, les ressemblances entre les autres produits sont vraiment étonnantes : on a bien là une catégorie très clairement définie. Mais attention aux pièges… Malgré une si forte teneur en métaux nobles, les premiers alliages de ce type étaient cytotoxiques, comme on va le démontrer ici. Lors du contrôle final de qualité d’un nouvel alliage Au-Pt, contrôle incluant un test de cytotoxicité, un fabricant d’alliages dentaires constate que ce produit apparaît comme cytotoxique. Les contrôles sont répétés, des comparaisons sont réalisées avec des produits concurrents, et une ligne claire se fait jour : la teneur en zinc – élément indispensable pour assurer la coulabilité de ce type d’alliages – est la cause de cette réaction néfaste. Une étude le montre nettement : au-delà d’une teneur en Zn supérieure à 16 millièmes, l’alliage devient cytotoxique (J.-C. Wataha, J.-M. Meyer, M.H. Zurcher : "Correlation between Cytotoxicity, Composition, and Microstructure of Au-Pt Alloys" IADR General Session, March 13-17, 1996, San Francisco, USA). Ceci s’explique par la disparition de la solubilité totale du Zn dans l’alliage Au-Pt, il se forme des précipités riches en Zn, et c’est ce métal qui provoque, en présence de cultures de fibroblastes, la dégradation, voire la disparition totale de la vitalité cellulaire. En utilisant une technique statistique adéquate ("Quick Cluster" procedure, SPSS-X), il est possible de regrouper les résultats de la vitalité cellulaire (exprimée en pourcentage de la vitalité cellulaire en présence du Teflon utilisé comme contrôle négatif) en “paquets” ou “clusters”, statistiquement différents : Cluster #1 = cytotoxique, Cluster #2 = cytocompatible, et Cluster #3 = intermédiaire. On le voit, la seule présence dominante de métaux aussi nobles que l’or et le platine ne suffit pas à assurer une parfaite biocompatibilité d’un alliage : les éléments d’addition en quantités minimes peuvent fortement dégrader la biocompatibilité si l’on n’y prend pas garde. D’ailleurs, la liste des alliages établie en 2001 (Tableau 1) indique partout une teneur en Zn inférieure à 1.6 %. L’engouement pour les alliages “bio” a suscité bien des convoitises et bien des “vocations” parmi ceux qui savent flairer les bonnes affaires. Ainsi cette présentation vue à la dernière exposition dentaire internationale de Cologne en avril 2001, d’une société allemande spécialisée dans les “systèmes d’alliages dentaires biocompatibles à haut titre en or”, ne contenant, selon le brevet présenté, que des « métaux non allergéniques et non toxiques comme l’or, le platine, l’argent, le rhodium, le cuivre, le zinc et le fer ». L’assortiment contient essentiellement 4 alliages : 10 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Universel, pour céramique ; Universel, pour coulée ; Spécial patients sensibles, céramique ; Spécial patients sensibles, inlays. La description des alliages dits “spéciaux pour patients sensibles” est loin d’être explicite, et il n’est fait aucune mention des méthodes utilisées pour les caractériser ; aucune documentation scientifique sérieuse ni la moindre publication dans des journaux à politique éditoriale n’étaient disponibles sur le stand de ce fabricant. Le vocable “bio” ne doit pas permettre toutes les aventures. Les alliages “universels” Dans un effort louable pour réduire le nombre d’alliages utilisés, certains fabricants proposent aujourd’hui des alliages dits “universels”, adaptés pour pratiquement toutes les indications, telles que les travaux céramo-métallique avec céramiques LFC à forte expansion thermique, les travaux avec recouvrements de résines composites de laboratoire, les travaux coulés, et enfin les travaux fraisés et télescopiques. Un nouveau couple dans le domaine des alliages “universels” est constitué par exemple par l’alliage Degunorm et par la céramique hydrothermale à forte expansion Duceragold. Similairement, l’alliage Pontor LCF, qui constitue la réponse du fabricant Metalor au marché des alliages ”universels “, est plus particulièrement adapté aux nouvelles céramiques Duceragold et Evolution à basse température de cuisson et à coefficient d’expansion thermique élevé. Les alliages à base de cobalt Afin de proposer une alternative aux alliages non-nobles à base de nickel, de nouveaux alliages à base de cobalt ont été développés, plus spécialement comme alliages destinés à la technique céramométallique. Ils sont censés être utilisés comme des alliages précieux, et s’adapter à la majorité des céramiques dentaires. On peut citer comme exemple les produits suivants : Wirobond® C (Bego, Allemagne) Alliage cobalt-chrome pour la technique céramo-métallique exempte de nickel et de béryllium : Composition : Co 61 % pds ; Cr 26 ; Mo 6 ; W 5 ; Si 1 ; Fe 0.5 ; Ce 0.5 ; C max. 0.02 Pour une utilisation avec des céramiques à basse température de cuisson, dont le coefficient d’expansion thermique (CET) est trop élevé pour les alliages à base de CoCr, des alliages spéciaux ont dû être conçus : Wirobond® LFC (Bego, Allemagne) Alliage cobalt-chrome pour la technique céramo-métallique, breveté, à large spectre d’utilisation, sans nickel ni béryllium ; peut-être recouvert de céramiques à forte expansion et à basse température de cuisson (céramiques LFC), comme par exemple la céramique VITA RESPONSE® Composition : Co 33 % pds ; Cr 30 ; Fe 29 ; Mo 5 ; Mn 1,5 ; Si 1 ; N 0,2 ; C 0,3 GOLD CORE 2 (Jeneric Pentron, USA) Alliage cobalt-chrome contenant de l’or, selon norme ISO 9001, et à CET élevé, pour les céramiques LFC Composition : Au 2,0 % pds ; Co 63,5 % ; Cr 21,0 % ; Mn 6,5 % % ; Ga 4,5 % ; Al 2,5 % L’accent mis dans la publicité sur la présence d’or dans cet alliage a créé de vives réactions lors de sa présentation à la dernière IDS en avril 2001, notamment de la part de concurrents qui ont jugé inopportune et trompeuse une démarche visant à donner une importance exagérée à une si faible présence d’or dans un tel alliage, et surtout le présentant comme une alternative économique aux nouveaux alliages universels riches en or pour les céramiques LFC. 11 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Enfin, pour l’utilisation avec d’autres types de céramiques, comme par exemple les vitrocéramiques, une formulation particulière s’est révélée nécessaire : IPS d.SIGN® 30 (Ivoclar, Liechtenstein) Alliage cobalt-chrome pour la technique céramo-métallique avec propriétés mécaniques et physiques adaptées à la vitrocéramique à la fluorapatite IPS d.SIGN Composition : Co 60,2 % pds ; Cr 30,1 ; Mo 0,6 ; Si 0,9 ; Ga 3,9 ; Nb 3,2 ; B Fe Al Li Le titane et ses alliages Le titane, en raison de son excellente biocompatibilité, a trouvé des applications multiples en dentisterie, mais il a de la peine à s’imposer en Europe. Pour l’instant, les champions de son utilisation sont les Japonais, qui ont su développer une technologie capable de surmonter les difficultés de base liées à la coulée de ce métal : très grande réactivité avec l’oxygène et faible densité. Cette mise en œuvre du titane nécessite ainsi des moyens très spécifiques, notamment au niveau des revêtements, des techniques de fusion et de coulée, et ensuite des céramiques destinées à les recouvrir. Les revêtements spéciaux pour la coulée du titane sont à base de magnésie, d’alumine, de spinel, ou de zircone, mais rarement à base de phosphate. Les systèmes de fusion et coulée travaillent tous sous vide et avec une protection d’argon. Un système à deux chambres superposées (fusion à l’arc électrique en haut et coulée dans le cylindre en bas) est repris par plusieurs fabricants, mais il existe aussi des systèmes avec coulée centrifuge. Les principaux problèmes liés à la coulée du titane et de ses alliages peuvent être le manque d’exactitude volumétrique des pièces coulées (problèmes de revêtements), et les porosités internes (faible densité du métal et systèmes de coulée, pression des gaz et turbulences lors de l’injection). Les céramiques spécifiques pour les armatures en titane doivent avoir une température de cuisson inférieure à 800 °C (low fusing ceramics). Des progrès sont faits dans les qualités esthétiques de ces céramiques à basse fusion, qui avaient initialement une mauvaise réputation à ce sujet. Quels alliages de titane peut-on utiliser en dentisterie ? Classique : Ti-6Al-4V alliage α + β Problèmes : forte libération de V dans une solution d’ac. lactique : > 2 000 mg/m2/30 jours Solutions possibles : Ti-6Al-7Nb ou Ti-5Al-13Ta Caractéristiques : propriétés mécaniques comme Ti6Al4V, mais plus ductile Autres approches : alliages β Ti-7.5Mo, Ti-13Nb-13Zr Ti-7.5Mo-1Nb Ti-7.5Mo-1Zr Ti-23Nb-13Ta-4.6Zr moins rigides et plus résistants que cp Ti, meilleure biocompatibilité que Ti-6Al-4V Ti-0.2Pd Ti-0.5Pt plus résistants à la corrosion en présence de F - que c.p.Ti Ceci reflète les grandes lignes de développement, telles que montrées au récent 5th Iinternational Symposium on Titanium in Dentistry, tenu à Chiba, Japon, les 30 juin - 1er juillet 2001. Pour la réalisation des suprastructures implanto-portées – pratiquement impossibles à couler avec la parfaite qualité d’adaptation (passive fit) imposée par la totale immobilité des implants – il faut 12 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 relever qu’il existe divers systèmes d’ajustement des pièces coulées en titane ; on peut citer par exemple Cresco Ti Systems, API All Parts Included. Conclusions On notera que l’intérêt pour les restaurations “tout céramique” est très fort, mais il faut toutefois rappeler que seuls 3 % des travaux de ponts et couronnes sont faits en “tout céramique”. Avec 97 % des travaux réalisés sur une base métallique, les alliages ont encore de beaux jours devant eux. Il restera des situations pour lesquelles il sera toujours plus simple, moins coûteux et moins risqué d’avoir encore recours aux alliages métalliques, plutôt qu’aux solutions non-métalliques (tout céramique, ou résines composites de laboratoire renforcées par des fibres, par exemple). ÉCHECS : COMMENT LES ÉVITER ? (CH. SUSZ) Exigences fondamentales Les exigences fondamentales des alliages dentaires destinés à la réalisation de restaurations fixes concernent d’une part le patient et d’autre part le prothésiste : Les dispositifs médicaux doivent pouvoir être en mesure, après réalisation, de satisfaire aux besoins de fonctionnalité c’est-à-dire présenter des propriétés mécaniques suffisantes afin de supporter sans dommage et à long terme les contraintes en bouche. D’après la norme ISO 9693, la limite conventionnelle d’élasticité doit au moins atteinte 250 N/mm2 pour les alliages pour la technique céramo-métallique (Figure 1). Pour les alliages destinés à la technique conventionnelle, cette limite doit pouvoir atteindre 450 N/mm2 pour les alliages du type 4. Ils doivent également présenter un caractère de pérennité de par le milieu agressif (résistance à la corrosion) et doivent être tolérés, sans induire d’agression sur le milieu biologique (allergie, cytotoxicité, génotoxicité). Figure 1 : Limites conventionnelles d’élasticité des alliages pour la technique céramo-métallique par familles: U alliages universels - A1 alliages «bio» Au-Pt - A2 alliages Au-Pt-Pd B alliages Au-Pd - C alliages Pd-Ag - Co alliages Co-Cr 13 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Le prothésiste attend des matériaux des caractéristiques fiables permettant des conditions de mise œuvre fiables (performance à la coulée, paramètres de céramisation, aptitudes au brasage, traitement des surfaces…). Il est en droit d’attendre également la sécurité lors des différentes phases de travail (pas de risques de toxicité). Les alliages Figure 2 : Structure de la liaison métallique Figure 3 : Les éléments de transition et les alliages dentaires précieux Les caractéristiques particulières des alliages sont dues à la nature de la liaison métallique qui est déterminée par le réseau tridimensionnel de sa structure (Figure 2). Cet arrangement permet en particulier d’ajouter à l’élément de base (atomes a) de nombreux autres éléments (atomes b) dans le même réseau comme éléments d’addition. Ces diverses additions permettent de modifier notablement les propriétés de l’élément de base comme par exemple les propriétés mécaniques, la couleur, la résistance à la corrosion et des propriétés techniques telles qu’expansion thermique, intervalle de fusion, sensibilité à l’oxydation, poids spécifique, propriétés au casting. 14 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Dans ce contexte, on considère particulièrement les éléments de transition (Figure 3). On peut distinguer parmi ces éléments les éléments nobles utilisés comme éléments de base, les éléments utilisés comme éléments d’addition et faiblement utilisés ainsi que les éléments à proscrire tels que les éléments potentiellement allergènes ou toxiques. Figure 4 : Pouvoir de renforcement de l’or par % d’ajout de V, Ni, Nb, Sn et Zn. Figure 5. Pouvoir d’élévation de la température de solidus Ts de l’or par % d’ajout de Ti, Pd, V, Nb et Cr. Les alliages dits “bio” pour la technique céro-métallique Les alliages dits “bio” pour la technique céramo-métallique sont essentiellement constitués d’or et de platine (rapport Au/Pt env. 85/15.) et ne contiennent en principe ni palladium ou cuivre (excellente résistance à la corrosion, bonne biocompatibilité). De tels mélanges binaires déterminent des alliages aux propriétés mécaniques faibles et à températures de solidus trop faibles pour des raisons techniques. Il convient alors d’ajouter des éléments d’addition, mais lesquels ? Les éléments d’addition les plus efficaces (Figure 4) en ce qui concerne la rigidité sont le vanadium, à éviter en raison de son caractère toxique, le nickel, à écarter en raison de son effet allergisant, le niobium qui amène certaines difficultés lors du casting, l’étain qui est un élément abaissant trop la température de solidus et le zinc qui présente la meilleure solution. 15 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Les éléments d’addition les plus efficaces (Figure 5) pour l’augmentation de la température de solidus sont le titane et le niobium, à éviter car ils amènent certaines difficultés lors du casting, le vanadium qui est à écarter en raisin de son caractère toxique, le chrome qui est également à écarter pour son caractère allergisant et le palladium qui représente en fait le meilleur compromis. Un très bon compromis est obtenu par des adjonctions mesurées en palladium / zinc et de quelques traces d’autres éléments qui sont additionnés à la base adéquate Au - Pt. Fonctionnalité - stabilité mécanique Pour la forme anatomique réelle d’une restauration fixe, la résistance à la flexion est difficile à calculer. Il est cependant instructif de rappeler de quels facteurs dépend la flexion pour une forme géométrique plus simple : Une poutre parallélépipédique, par exemple (Figure 6), supportée par deux piliers distants de la longueur L et soumise en son milieu à une force F, subit une flèche f en son centre qui est proportionnelle au cube de la distance L. D’autre part la flèche est d’autant plus grande que le métal montre un module d’élasticité E faible et que le moment d’inertie I de la section de la poutre par rapport à l’axe de flexion est restreint. Ceci répond à la formule suivante : 1 F L3 f= 48 E I Un pont d’une portée de plus de 3 éléments intermédiaires dans un segment postérieur doit déjà être considéré comme présentant un certain risque. Au-delà de cette portée, en raison de la dépendance en L3, cela devient très risqué et aucune technique céramo-métallique ne résistera aux contraintes qui amèneront fatalement, avec le temps, des échecs par fracture de la céramique, de la structure métallique et/ou descellement. Un bridge de 13 éléments avec 5 éléments intermédiaires (32-36) a par exemple montré progressivement dans le temps des fractures de la céramique, un descellement et enfin la fracture de la structure métallique. La rigidité d’une restauration fixe est certes augmentée en choisissant un alliage avec un grand module d’élasticité E. Nous remarquons cependant que, pour la technique céramo-métallique, le choix (Figure 7) ne présente au maximum qu’un facteur 2 entre les alliages les plus faibles U et A1 et les alliages les plus performants Co. La rigidité est par contre extrêmement dépendante du modelage de l’armature, non seulement par le respect des sections minimales mais également par la topologie des formes par rapport à l’axe de flexion le plus important. Nous constatons en effet pour des sections identiques des moments d’inertie I présentant des facteurs variant de 1 à 70 en raison de la répartition de la matière par rapport à l’axe de flexion (Figure 8). Dans certains cas, un liserai métallique lingual serait particulièrement recommandé pour augmenter cet effet. 16 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Figure 6 : Flèche résultant de la flexion d’une poutre Figure 7 : Modules d’élasticité E des alliages pour la technique céramo-métallique par familles : U alliages universels - A1 alliages “bio” Au-Pt - A2 alliages Au-Pt-Pd - B alliages Au-Pd C alliages Pd-Ag - Co alliages Co-Cr Figure 8 : Valeurs relatives du moment d’inertie I pour différents profils caractérisés par des sections identiques mais de différentes orientations. Figure 9 : Cas d’un élément en extension 17 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Fonctionnalité - élément en extension La pérennité fonctionnelle d’une restauration comportant un élément en extension est très critique si la surface de la zone de contact est trop faible et si de plus la topologie du modelage de cette zone est mal orientée par rapport à l’axe de flexion probable. Dans le cas simple d’une symétrie cylindrique (Figure 9), cas théorique, la flèche répond à la formule suivante : 3 F L f=a E d4 Nous remarquons également que les propriétés de l’alliage (module d’élasticité E) ne jouent qu’un rôle mineur en comparaison des conditions géométriques (moment d’inertie par rapport à l’axe de flexion principal ou comme explicité ici par le diamètre du point de contact d4 et le bras de levier L3. Les extensions céramo-métalliques distales de piliers naturels, surtout au niveau des molaires, représentent un risque mécanique majeur (fracture de la céramique, fractures radiculaires, descellement). Elles sont à éviter en raison de l’effet important de bras de levier (L) et des forces importantes de mastication notamment dans le cas pour lequel les conditions cliniques imposaient une hauteur au niveau du point de contact (d) de l’ordre de 2 mm. Coulabilité L’exacte reproduction de la maquette en cire dans les détails les plus fins et les qualités de la pièce intrinsèques de la pièce coulée dépendent de nombreux facteurs qui sont fonction de la technique de coulée (diverses machines d’injection), réalisation de la maquette (positionnement de la pièce dans le cylindre et modelage du dispositif d’alimentation), de l’exécution du moule (qualité du revêtement et procédure de mise en revêtement), du type et des qualités de l’alliage, des conditions thermiques de l’injection (température de maintien du cylindre et température de l’alliage au moment de la coulée) et naturellement le savoir-faire du prothésiste (Figure 10). Figure 10 : Ensemble des paramètres influençant la coulabilité. 18 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Figure 11 : Quelques exemples de défauts de coulée facilement évitables A. Porosité externe températures de moule et / ou d’alliage insuffisantes temps de préchauffage du moule insuffisant inclusion de gaz par flamme mal réglée ou revêtement trop imperméable B. Peau d’oxyde mauvais choix de creuset lors de coulée par chauffage à l’induction C. Coulée incomplète températures de moule et / ou d’alliage insuffisantes peur du prothésiste lors de la fusion à la flamme mauvais positionnement et/ou système d’alimentation insuffisant force d’injection trop faible D. Porosité interne températures de moule et / ou d’alliage insuffisantes temps de préchauffage du moule insuffisant inclusion de gaz par flamme mal réglée ou revêtement trop imperméable E. Bavures force d’injection trop puissante préparation fautive du revêtement préchauffage trop rapide ou non conforme du revêtement F. Coulée de raccord température du cylindre et / ou de l’alliage légèrement trop hautes lors de coulée d’un alliage pour la technique céramo-métallique sur une pièce préfabriquée en alliage à haut point de fusion. On constate trop souvent des défauts (Figure 11) qui auraient pu être évités tels que porosité interne et / ou externe (A, D), techniques hasardeuses (B), paramètres thermiques mal adaptés (C, D), défauts secondaires (E) et détérioration des pièces préfabriquées lors de coulées de raccord (F). 19 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Influence des paramètres thermiques Le choix correct des températures du moule et de l’alliage au moment de l’injection jouent un rôle très important sur la coulabilité. Les tests réalisés à l’aide du modèle MBS (Figure 12) permettent une quantification très fine de la coulabilité en fonction de ces deux critères. L’indice de coulabilité IC en % est obtenu en multipliant par 4 le nombre de zones effectivement complètement coulées (25 zones discernables sur le disque). Figure 12 : Modèle MBS permettant de quantifier l’aptitude à la coulée. Le comptage des zones effectivement complètement coulées permet d’établir un indice de coulabilité IC en %. La coulabilité d’un alliage précieux à haute teneur en métaux précieux, par exemple, a été observée par cette technique par des coulées par centrifugation et fusion au four électrique. Vingt disques MBS ont été coulés en faisant varier la température du moule entre 500 et 900 °C et la température de l’alliage au moment de l’injection entre 900 et 1 200 °C. L’intervalle de fusion de l’alliage est de 880 - 920 °C. Les indices de coulabilité relevés varient de 12 à 100 % (Figure 12). Nous remarquons que des températures élevées du moule et de l’alliage déterminent une excellente coulabilité. À l’inverse, les températures basses génèrent une coulabilité plus faible. Les observations combinées des indices de coulabilité et des structures métallurgiques permettent de définir un domaine des températures (moule / alliage) pour lequel on obtient des pièces complètes avec les meilleures qualités internes (taux de porosité interne faible bonne structure métallurgique). Pour cet alliage, avec un cylindre normalement préchauffé à 650 °C, il est indispensable de porter l’alliage à une température de 150 °C supérieure à celle du liquidus de l’alliage (Figure 12). Cette constatation peut être étendue à tous les alliages de la même famille. Pour les alliages destinés à la technique céramo-métallique, il convient de porter la température des moules à des températures supérieures de l’ordre de 850 à 900 °C et de respecter la même règle pour la température de l’alliage soit de 150 °C supérieure à celle du liquidus de l’alliage. 20 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 DÉGRADATIONS EN MILIEU BIOLOGIQUE SIMULÉ (L. Reclaru) Législation, exigences Conçus pour un environnement biologique, les biomatériaux doivent essentiellement s’intégrer dans cet environnement sans y développer d’effets contraires et y maintenir leur fonction sans se dégrader au-delà d’une limite acceptable. La conception d’un biomatériau naît généralement d’un besoin médical précis ; Des solutions techniques empruntant aux connaissances des matériaux sont développées pour répondre aux cahiers des charges souvent très contraignants. L’énoncé des contraintes auxquelles le nouveau matériau est censé résister doit être pris au sens le plus large, incluant notamment les problèmes de mécanique, de durée fonctionnelle, de tolérance par les tissus dans lesquels le matériau sera placé et de résistance du matériau aux composants du milieu. Le choix et l’évaluation clinique de tout matériau ou dispositif destiné à être utilisé chez l’homme sont aujourd’hui réglementés par la Directive “Dispositifs médicaux” 93/42 CEE et son amendement, la Directive “Dispositifs médicaux implantables actifs” 90/385 CEE. Nous sommes aujourd’hui confrontés à l'application très stricte du contrôle de l’évaluation clinique des dispositifs médicaux. De plus, les législations en questions engendrent des difficultés importantes, pour certains fournisseurs, à conformer leurs produits aux marchés des pays de la CE. La transcription des directives EN 93/42 et EN 90/385 en législations nationales dans les pays membres de la CE est une difficulté supplémentaire due aux particularités spécifiques de chaque pays. Ainsi, pour une harmonisation au niveau européen, les deux directives seront appuyées par la norme EN 540 “Investigations cliniques des dispositifs médicaux sur les sujets humains”. Dans une première étape, l’évaluation préclinique des matériaux ou dispositifs médicaux est impérativement nécessaire. Dans ce contexte, pour une première évaluation biologique in vitro ou in vivo, la norme ISO 10 993 s’inscrit parfaitement dans le choix, la description et l'interprétation des tests, en tenant compte de la composition chimique des matériaux, de la nature, du degré, de la fréquence et de la durée ainsi que de l'environnement du dispositif ou de ses constituants vis-à-vis du corps. Ces principes conduisent ainsi à une classification des matériaux ou des dispositifs médicaux facilitant le choix des tests appropriés. La norme ISO 10 993 partie I pour les essais initiaux prévoit le guide pour l’évaluation initiale en fonction du type, la forme et la durée de contact avec le corps humain. Ainsi les effets biologiques recherchés sont : la cytotoxicité ; la sensibilisation / irritation ; la génotoxicité / mutagénicité ; l’implantation et l’hémocompatibilité. Enfin, une task force du Comité européen de Normalisation a proposé un “guideline” des informations nécessaires pour pouvoir juger de la sécurité biologique du dispositif médical ; En fait, de déterminer si les preuves réunies confirment ou infirment la sécurité biologique du dispositif dans le cadre de l’utilisation prévue. Contraintes biologiques, chimiques, mécaniques imposées Le développement d’un biomatériau doit tenir compte d’une part de la législation en vigueur, contrainte juridique, et, d’autre part, des multiples contraintes liées à ses fonctions dans le milieu biologique. Avant de pouvoir être utilisé chez l’homme, “le biomatériau” doit subir une série de tests in vitro et in vivo, qui sont déterminants pour la décision de continuer l’étape suivante, les essais cliniques. À l’issue de la période d’essai clinique, pendant lesquels les contraintes réelles d’utilisation sont effectivement appliquées, les résultats obtenus permettent de prendre une première décision quant à l’utilisation ou non dans le milieu biologique envisagé. Comportement à la corrosion des alliages dentaire De nombreuses études ont montré que des techniques électrochimiques permettent de mettre en évidence le comportement à la corrosion de n'importe quel type d'alliage. Cependant, la validité des résultats est fortement dépendante des conditions expérimentales dans lesquelles ces alliages sont testés. Par conséquent, l'alliage idéal devrait pouvoir résister aux conditions les plus extrêmes qu'il peut être amené à subir en bouche, quelles que soient les conditions individuelles auxquelles il sera confronté. 21 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Pendant 17 ans nous avons testé plus de 200 alliages dentaires, et dans cette partie nous nous sommes proposés de présenter un certain nombre d’aspects liés au comportement à la corrosion à partir de mesures électrochimiques telles que potentiel, courant, charges électriques consommées ainsi que la quantification des processus de relargage. Classification des alliages : Actuellement, la classification des alliages dentaires est essentiellement gouvernée selon deux axes, la première étant basée sur un concept de composition minimale de certains éléments constitutifs, le second étant fondé sur le concept de propriétés physiques minimales de l’alliage mis en œuvre. Ces concepts sont à la base de toutes les normes en vigueur en Europe (normes ISO, DIN, AFNOR, NIOM…) et USA (ADA, FDA…). Étant donné que nous poursuivons un aspect scientifique de leur comportement à la corrosion, la répartition en classes et sous-classes des alliages étudiés est faite de la manière suivante (Figure 13) : Figure 13 : Classification des alliages dentaires selon leurs propriétés physico-chimiques Choix du milieu de test La complexité des problèmes liés à la salive naturelle (compositions, stabilité dans le temps….) a obligé les chercheurs, dans leur test de corrosion, à recourir à des milieux artificiels avec des compositions très diverses. D’une manière générale ces solutions peuvent être divisées en trois classes : Salive artificielle (Fusayama, Carter, Tani et Zucchi, AFNOR…) ; Solutions isotoniques (plasma…) ; Autres (solution de Ringer…). Aujourd’hui il y a une tendance à ajouter dans ces milieux principalement constitués de sels inorganiques, des bactéries, protéines, amino-acides… dans le but de se rapprocher de la salive naturelle. Malheureusement la plupart des d’études s’avèrent laborieuses. La difficulté majeure consiste à caractériser la stabilité chimique des composants d’une part et d’autre part de savoir si les composants ajoutés ou les produits formés par leur dégradation influencent le processus de corrosion. La complexité est tel que plusieurs sciences doivent apporter leur contribution à cette connaissance : la chimie (organique, analytique, électrochimique), la physique, la biologie moléculaire, la médecine… L’utilisation d’une multitude de compositions pour les solutions électrolytiques conduit à des résultats très différents. Il est donc impératif d’étudier les séries d’alliages dans les mêmes conditions expérimentales. Dans nos études nous avons ainsi toujours utilisé comme milieu de test une salive artificielle de type Fusayama-Meyer. 22 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Quelles grandeurs électrochimiques sont significatives pour caractériser leur comportement à la corrosion ? Le potentiel en circuit ouvert : E=f(temps). Le potentiel électrique d'un métal immergé dans un électrolyte varie en fonction du temps mais se stabilise à une valeur stationnaire après une longue durée d'immersion. Ce potentiel n'est pas une caractéristique du métal. Il dépend des conditions expérimentales, en particulier de la concentration, de la température et de la teneur en oxygène de l’électrolyte, mais également de l'état de surface du métal. Les réactions électrochimiques à l'interface métal-solution (électrolyte) ne sont pas réversibles, l'équation d'équilibre de type Nernst n'est donc plus valable. Dans ces conditions, le potentiel en circuit ouvert est un potentiel irréversible puisque la nature de l'interface métal-solution varie avec le temps. Le potentiel en circuit ouvert après 24 heures permet d'établir une comparaison relative de la noblesse des alliages dans le milieu considéré et de construire une série galvanique. Plus la valeur du potentiel est élevée mieux le métal ou l'alliage résisteront à la corrosion. Pour les alliages précieux de type conventionnel, les potentiels en circuit ouvert mesurés sont compris entre 40 mV et 185 mV ECS. Par contre, les alliages précieux pour la technique céramo-métallique (base or et base palladium) ont des potentiels compris entre 80 mV et 300 mV (Figure 14). Le cobalt - chrome, montre une chute rapide du potentiel qui se stabilise ensuite vers une valeur négative de - 60 mV. Les alliages Co-Cr montrent un meilleur comportement par rapport aux alliages Ni-Cr. Les valeurs de potentiel des alliages Ni-Cr se stabilisent vers des valeurs négatives de -210 mV pour le Rexillium III, - 199 Will-Cram, - 170 mV pour Wiron 88… D’une manière générale, les alliages de métaux non précieux dans une salive Fusayama-Meyer montrent des valeurs négatives, valeurs situées entre - 30 mV et - 390 mV ECS. Figure 14 : Écart des potentiels en circuit ouvert d’alliages en métaux précieux dans la salive de type Fusayama-Meyer. Dans la figure 14 nous avons également représenté les métaux purs mesurés dans les mêmes conditions expérimentales. Les métaux nobles Au, Pt, Pd ont des potentiels qui tendent vers des valeurs cathodiques (positives). Les métaux intermédiaires Cu, Ni ont des potentiels qui se stabilisent à des valeurs anodiques (négatives). Les métaux communs Zn, Cd et Co ont des potentiels négatifs, donc un comportement anodique très prononcé. On peut ainsi prévoir un très mauvais comportement de ces métaux avec mise en solution progressive de cations, sans tendance à la passivation. L'écart entre l'or et le zinc atteint 1 volt. 23 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 En résumé, on peut dire que les alliages de la série dont les potentiels sont les plus actifs (anodiques = négatifs) tendront généralement à subir une corrosion plus importante en cas de couplage galvanique, tandis que l'autre métal (la cathode) subira généralement une attaque réduite. Pratiquement, plus les alliages sont éloignés les uns des autres dans une série galvanique, plus la différence entre leur potentiel sera grande et plus la corrosion du métal le plus actif (négatif) sera forte. Le potentiel en circuit ouvert est un critère de l'analyse du comportement à la corrosion, cependant il est insuffisant. L'approche des résultats obtenus est toujours qualitative mais donne un classement des nuances testées et permet de dégager des tendances relatives, spécifiques aux conditions expérimentales de test. La résistance de polarisation (Rp) Au voisinage immédiat du potentiel de corrosion (Ecorr), on mesure le courant résultant de la variation du potentiel électrique (* 20 mV ECS). À partir de la courbe de polarisation linéaire, on calcule la résistance de polarisation Rp, en déterminant la pente de la tangente à la courbe, au potentiel où i=0. Cette pente est en relation avec la vitesse de corrosion. La polarisation (Rp) est un critère qui permet de caractériser de façon quantitative le comportement des alliages dentaires à la corrosion. La validité des résultats obtenus est fortement dépendante des conditions expérimentales dans lesquelles les alliages sont testés. Plus la valeur de Rp est élevée, mieux l'alliage résistera à la corrosion et plus la densité de courant Icorr sera faible. Pour les alliages précieux de type conventionnel, les valeurs de Rp calculées se situent entre 600 et 2 500 kOhm/cm2 et pour les alliages pour la TCM entre 1100 et 3500 kOhm/cm2 (Figure 15). En ce qui concerne les alliages non précieux de type conventionnel et céramo-métallique les valeurs de la résistance de polarisation sont nettement plus faibles Dans le cas des alliages étudiés elle se situe entre 100 et 1 600 kOhm/cm2. Figure 15 : Représentation comparative des valeurs de la résistance de polarisation. Dans le cas des métaux purs, les valeurs de Rp montrent une très bonne corrélation avec le degré de passivité du métal. 24 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 En résumé la résistance à la polarisation est une grandeur électrochimique importante qui permet également de caractériser le comportement à la corrosion des métaux et alliages. Elle est une grandeur quantitative, donnée par la résultante des deux courbes représentant les phénomènes de réduction cathodique et d'oxydation anodique se produisant simultanément aux environs du potentiel de corrosion (Ecorr). Elle peut illustrer très bien, par analogie, le comportement d'un alliage dentaire en bouche quand aucun autre alliage ne vient perturber ce comportement. Courant de corrosion Il est obtenu par un procédé mathématique faisant intervenir les pentes de Tafel. Elles doivent s'intercepter dans le point de coordonnées (Ecorr, Icorr). Le courant de corrosion (Icorr) est représentatif du degré de dégradation de l'alliage. La densité du courant de corrosion (Icorr) est représentative du degré de dégradation de l'alliage dans les conditions de l'essai. Le Icorr est également une mesure instantanée. À partir de cette valeur, on peut calculer la vitesse de corrosion. Sans entrer dans l'aspect fondamental concernant les valeurs limites des pentes de Tafel, dès que l'on examine les résultats obtenus par le traitement numérique des courbes de polarisation linéaire, on remarque que : - la méthode électrochimique est très sensible, et peut être aisément perturbée par toute sorte de facteurs relatifs tant à l'électrolyte qu'aux caractéristiques métallurgiques de l'alliage testé. Il suffit de peu de chose pour provoquer une déviation de la courbe expérimentale par rapport au modèle théorique pouvant conduire à des résultats douteux après le traitement mathématique. - il faut pouvoir disposer d'un algorithme mathématique adapté pour ce genre de calculs. - l’interprétation des résultats est relativement difficile surtout lorsqu’il faut éliminer éventuellement des résultats qui paraissent illogiques ou douteux. - les valeurs de courant mesurées varient entre quelques nA et 100 à 200 mA. - c’est une grandeur électrochimique non-discriminante par rapport aux classements de familles d’alliages étudiées. En résumé les résultats obtenus dépendent fortement des conditions expérimentales et ils sont non-discriminants par rapport aux classements des alliages étudiés. Analyse coulométrique par zone Elle consiste à diviser les courbes de polarisation anodiques en trois zones distinctes : Zone I : Ecorr (après 24 h d'immersion) à + 300 mV; Zone II : + 300 mV à + 700 mV ; Zone III : + 700 mV à + 1 000 mV. Les surfaces sous les courbes de polarisation sont intégrées pour chaque zone et les résultats obtenus sont exprimés en mC. Autrement dit, on intègre la quantité de courant consommée pour la dégradation électrochimique de l'alliage dans un domaine de balayage anodique compris entre le Ecorr et +1 000 mV. Bien que l'intensité du phénomène de dégradation électrochimique varie d'une personne à l'autre, nous considérons qu'un danger réel du comportement d'un alliage peut survenir dans la Zone I et exceptionnellement un risque potentiel dans la Zone II. Pour les métaux purs on peut remarquer que la quantité de courant consommée pour dégrader l'or, le palladium et le titane ne dépasse pas 0.8 mC. Par contre, pour l'argent, le cuivre et le nickel les quantités de courant sont très importantes : 700 mC pour l'argent, 2 300 mC pour le nickel et 3 300 mC pour le cuivre. Selon les résultats obtenus, on peut faire plusieurs remarques : - d'une manière générale, les alliages en métaux précieux ont une résistance nettement meilleure que les alliages non précieux. - les quantités de charge électrique consommées dans la zone I sont pratiquement égales à zéro pour les précieux de type conventionnel et égales à zéro pour les céramo-métalliques (Figure 16). - les céramo-métalliques précieux haute teneur ne montrent pas de différences significatives de comportement à la corrosion dans la zone II (Figure 17). 25 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 - dans l'ensemble des alliages les alliages à base argent ont un moins bon comportement à la corrosion. - le Cu, l’Ag et le Ni diminuent la résistance à la corrosion. - en ce qui concerne les alliages non précieux, une analyse comparative est extrêmement difficile à faire surtout dans le cas des aciers. Dans la série 316L le meilleur comportement est celui de 1.4441(316L Medical). La série 904L montre également une bonne résistance à la corrosion. - pour les alliages précieux les résultats obtenus peuvent être corrélés. Ceci est probablement dû au fait que la composition de la couche d'immunité est très proche de la composition nominale. En résumé, la méthode proposée permet d'obtenir une bonne estimation comparative des processus de dégradation des alliages étudiés. Potentiel en crevasse Lors de reconstructions prothétiques, il y a toujours aux interfaces des interstices résultants de la géométrie des éléments en montage. Ceux-ci ne peuvent malheureusement pas être évités et sont la cause principale de la corrosion en crevasse. Une fois que l’électrolyte a pénétré dans l’interstice, le métal se dissout en formant des ions métalliques. Ceux-ci, en présence d’un milieu chloré, forment des chlorures métalliques qui eux, conduisent à la réaction de précipitation des hydroxydes et à la formation d’acide libre HCl. Le confinement de l’électrolyte dans les limites de la crevasse produit une diminution de l’oxygène dissout. Il se créera ainsi une pile électrochimique due à la différence de concentrations en oxygène entre les surfaces externes et les interstices. Comme la diffusion de l’oxygène du milieu extérieur est bloquée, une migration d'ions chlorure, à partir du milieu extérieur aura lieu pour maintenir la neutralité des charges. Il y aura ainsi une acidification avec une augmentation de la concentration en ions chlorures. Ceux-ci entraînent une dissolution de la couche passive du métal et mènent à une accélération du processus sélective de corrosion. L’acidification et l’augmentation de la concentration en ions chlorures sont les deux facteurs essentiels de l'amorçage et la propagation du phénomène de corrosion caverneuse. L’augmentation de l’acidité de ce milieu, qui est stagnant, entraîne une dissolution de la couche passive du métal et conduit à une accélération du processus local de corrosion. On peut ainsi caractériser le comportement des métaux à ce type de corrosion à partir de la valeur du pH à laquelle la couche de passivation est détruite. Souvent la corrosion en crevasse est accompagnée par de la corrosion galvanique. Les produits de corrosion diffusent vers l’extérieur et se déposent sur les parties cathodiques de la pile. Dans certains cas on se trouve avec un rapport de surface anode cathode qui favorise une densité de courant anodique très élevé, ce qui se traduit par une accélération du processus de corrosion en crevasse. Dans les constructions implant-suprastructure, la complexité des processus électrochimique est liée également aux phénomènes de couplage galvanique et de la corrosion localisée en crevasse. Figure 18 : Montage spécifique pour le test en crevasse 26 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Pour l’évaluation de la corrosion en crevasse nous avons utilisé un test adapté à partir de la norme ASTM F746-87. Les échantillons de test sont préparés selon la figure 18. La modification faite par rapport à la description du test en crevasse F746-87 consiste à l’utilisation de la technique de l’électrode tournante. Le test se déroule en deux temps : - dans un premier temps, on effectue une excitation anodique de l’échantillon à évaluer à 800 mV ECS pendant 10 secondes. - dans un deuxième temps, le potentiostat impose la valeur du potentiel d’abandon pendant 15 minutes. Ainsi on trace la courbe, variation du courant en fonction du temps pour un potentiel imposé (Figure 19). Figure 19 : Mesures de potentiel en crevasse ; le tracé des courbes de polarisation potentiostatiques Si le courant enregistré reste dans le domaine cathodique (valeurs négatives) on recommence un nouveau cycle de mesure : excitation pendant 10 secondes à 800 mV et mesure du courant pour un potentiel fixé à Eabandon + 50 mV. Les cycles se répètent, à chaque fois pour un potentiel plus élevé jusqu’à ce que le courant mesuré reste dans le domaine anodique (valeurs positives). Ainsi on détermine le potentiel en crevasse, potentiel qui correspond à l’avant dernière mesure où le courant est positif. Le résultat physique du test est présenté dans la figure 20. Une fois que la bague en téflon est éliminée, sur la surface de l’échantillon métallique on remarque une rainure caractéristique de la corrosion en crevasse. Figure 20 : Corrosion en crevasse de l’échantillon testé 27 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 En ce qui concerne les alliages base métaux précieux : L’ensemble des résultats montre que le meilleur comportement est révélé par les alliages pour la technique céramo-métaliques (2a, 2b, 2c). Les valeurs de potentiel en crevasse sont très élevées ; Il n’y a pas de risque d’amorcer une corrosion en crevasse alimenter par un couplage galvanique. Un bon comportement est révélé également par les alliages pour la technique conventionnelle 1a et 1b (Figure 21). Par contre les alliages pour la technique conventionnelle base argent révèlent un mauvais comportement. En ce qui concerne les alliages base métaux non-précieux : les valeurs de potentiel mesurées se situent entre 100–450 mV. Il faut rappeler également que les études sur l’équilibre des cations dans des milieux confinés montrent que la libération de cations chrome dans l’interstice provoque une acidification à l’intérieur de la crevasse. Ce phénomène conduit à un risque d’amorçage de la corrosion en crevasse. En résumé : Nous accordons une très grande importance à cette grandeur électrochimique pour la caractérisation des alliages dentaires quant à leur comportement à la corrosion localisée surtout dans les constructions implant-suprastructure. Les alliages précieux ne posent pas de problèmes étant donné que leur potentiel de couplage est nettement plus petit que le potentiel en crevasse. Un processus de corrosion en crevasse ne pourra donc pas être amorcé. Par contre dans les cas des alliages non-précieux, le risque d’amorcer une corrosion en crevasse est très important, du fait que les potentiels de couplage implant (Ti, Ti6Al4V) sont plus grands ou proches de ceux en crevasse. Dans les mêmes conditions de mesure, le titane révèle un potentiel en crevasse de plus de 2000 mV. Courant galvanique En bouche la multitude des alliages ou des amalgames, des constructions implant-suprastrucure, éléments brasés…, peuvent déclencher des processus électrochimiques des piles macrogalvaniques ou microgalvaniques. La mise en contact permanente ou temporaire de deux ou plusieurs alliages dissemblables dans un électrolyte commun (salive, liquides osseux ou sanguin) a comme résultat la formation d'une pile galvanique qui débitera un courant électrique d'une certaine intensité. Dans une pile galvanique l'anode sera toujours le métal moins noble et la cathode sera formée du métal le plus noble. La dégradation de l'anode est plus ou moins importante. Celle-ci dépend d'une multitude de facteurs qui peuvent être groupés dans six classes de base : - Potentiels (potentiels d'électrode, potentiel commun de couplage…) ; - Polarisation des électrodes (contrôle mixte, contrôle cathodique ou contrôle anodique) ; - Surfaces des électrodes (l'état de surface, géométrie, rapport des surfaces…) ; - Résistance de passage et l'intensité du courant galvanique ; - Milieu électrolytique (composition, concentration, pH, température, conductivité électrique…) ; - Phénomènes de transfert de masse (aération, désaération, diffusion et agitation du milieu électrolytique) ; Le fonctionnement d'une pile galvanique peut impliquer des processus de corrosion de forme généralisée, localisée (en crevasse ou par piqûres) et également sous contrainte et à la fatigue. Du fait que la pile débitera un courant, elle sera la source et l'entretien d'une forme ou de plusieurs formes de corrosion. L'importance des dégâts dus aux phénomènes de corrosion est proportionnelle d'une part, à la quantité de courant débitée par la pile et, d'autre part, liée à la géométrie de l'assemblage. Les piles galvaniques fonctionnent sous trois types de contrôle : anodique, cathodique ou mixte. - Dans le contrôle cathodique, la polarisation cathodique est prédominante. L'intensité du phénomène de corrosion dépend de la résistance de polarisation de la cathode et en particulier des 28 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 variations de surface de la cathode. - Dans le contrôle anodique c'est le contraire : elle dépend de la résistance de polarisation anodique et donc de la surface de l'anode. - Dans le cas du contrôle mixte, l'intensité du phénomène de corrosion est due à la participation commune des phénomènes de polarisation. D'une manière pratique, dans l'étude des couplages galvaniques, il est important de connaître la valeur de courant galvanique débitée et le potentiel de couplage donc, à savoir sous quel type de contrôle sera la pile dans son fonctionnement. Le courant galvanique peut être déterminé de deux manières différentes : - À partir de mesures directes - Par prédiction, c’est-à-dire par des calculs mathématiques en appliquant (Figures 22 et 23) : a) La théorie de potentiel mixte b) La méthode d’Evans Figure 22 : Interfaces brasées ; alliages pour TCM code 2a, et brasure riche or, présentation du cas Figure 23 : Mesures avec la technique de micro-électrode pour déterminer les caractéristiques du couplage Sur les centaines de mesures effectuées sur des couplages galvaniques les courants enregistrés se situent entre les dizaines de pico ampères à des centaines de micro ampères. Par conséquent, il est difficile de faire un classement de couplage des alliages, des alliages - brasures, des implants-suprastructures… En pratique, si on doit faire un choix optimum de deux ou plusieurs alliages dissemblables, le choix sera correct si on peut déterminer les caractéristiques de couplage, autrement dit de mesurer des couplages et d’utiliser des techniques mathématiques de prédiction. Il faudra que la quantité de 29 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 courant débitée en couplage soit très faible et par conséquent les taux de corrosion seront très faibles. Une question qui se posera également est de savoir si le couplage peut amorcer un processus de corrosion en crevasse. En résumé : Le phénomène galvanique est un processus complexe qui se manifeste sous différentes facettes et limite la durée de vie des réalisations prothétiques. Il peut se traduire également par une sensation électrique plus ou moins ressentie par le patient. Les courants galvaniques sont très désagréables et vont de la sensation de goût métallique à des inflammations chroniques des tissus. Pour faire un bon choix des matériaux dans les reconstitutions prothétiques, il est important de mesurer d'une part les grandeurs électrochimiques spécifiques aux piles galvaniques (potentiels, courant) et, d'autre part, d'étudier conjointement le comportement en corrosion localisée en crevasse de chacun des composants. Conclusions : Les résultats que nous venons de présenter montrent la complexité des facteurs qui doivent être pris en considération dans l'étude du comportement à la corrosion des métaux et des alliages. Pour caractériser le comportement à la corrosion d'un alliage, il faut plusieurs critères obtenus à partir des techniques de mesures de potentiel, de courant et d'impédance. Les comparaisons doivent être faites entre les alliages de la même classe. Un alliage base or doit être comparé avec des alliages précieux et non avec des non précieux, sachant pertinemment que le comportement à la corrosion des non précieux est moins bon. - Les résultats des mesures électrochimiques sont fortement dépendants des conditions expérimentales et par conséquent, on ne pourra faire des comparaisons que pour les alliages qui ont subi les tests dans les mêmes conditions. Cependant, l'utilisation de milieux différents est intéressante et nous apporte des informations qui permettent de mieux caractériser l'alliage testé. Processus de relargage Tout en démontrant que les surfaces des matériaux en contact avec le milieu biologique se dégradent par processus de corrosion, ces essais ne permettaient nullement de préciser quels éléments constitutifs des matériaux se dissolvent préférentiellement, ni dans quelles quantités. Par contre les effets négatifs que les matériaux peuvent éventuellement avoir sur le milieu cellulaire, sur les tissus ou sur l’organisme sont précisément dus à la présence de certains composants relargués comme produits de dégradation, plus particulièrement de cations métalliques en solution. Les perspectives pour les matériaux en contact avec les tissus vivants vont dans le sens d’une “biocompatibilité accrue”. On remarque, par exemple, avec les travaux de normalisation du CEN BT/WG 132 - Methods for analysis of allergens - qui introduit, outre le nickel, une multitude d’allergènes (cobalt, chrome, thiuram, mercaptobenzothiazoles, dithiocarbamates, diisocyanates, résines époxy, anydride phtalique, etc.). Figure 24 : Voies possibles pour les processus de relargage 30 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Dans le cas d’alliages dentaires, le but est d’identifier les ions relargués, de doser leur concentration en solution, et de corréler les résultats obtenus avec les essais biologiques. La mise en œuvre des techniques d’extraction et d’analyses de traces, nécessite de nombreuses mises au point, tant au niveau de développement des techniques d’extraction que des techniques de quantification. Le processus de relargage peut être envisagé de plusieurs manières (Figure 24) : - par la dissolution chimique, - par la dégradation due à la corrosion, - physique par des phénomènes tribologiques. Les composants relargués seront des ions métalliques et des particules métalliques Deux méthodes d’extractions sont décrites pour les alliages dentaires. La première est la norme dentaire ISO 1562, la deuxième est la norme ISO 10 993-12. Dans les deux techniques d’extraction, le but est d’obtenir un extrait d'ions métalliques à partir d’échantillons sous forme de plaquettes coulées selon la technique dentaire. Il faut mentionner que pour la quantification de la quantité du nickel relargué à partir des objets métalliques usuels en contact avec la peau il y a une autre norme, la norme EN 1811. La solution d’extraction est une suer artificielle qui contient du chlorure de sodium, de l’acide lactique et de l’urée. Dans ces types de tests il est difficile de faire un classement quant au comportement des alliages caractériser à partir des quantités des ions relargués. En effet, la quantité des ions relargués est fortement dépendante de la cinétique de relargage (temps d’extraction, pH, composition chimique, la présence de bactéries, température…), de l’état surface, du traitement thermique, de la géométrie de l’échantillon, de la géométrie du flacon utilisé, du rapport volume / surface, position de l’échantillon… Dans le contexte de la directive 94/27/CEE pour le relargage de nickel à partir des alliages précieux, des aciers inoxydables et des revêtements nous avons effectué quelques centaines de tests d’extraction dans un programme “round robin test” avec d’autres laboratoires en Suisse, en France, en Angleterre, en Allemagne et en Suède. Les résultats obtenus révèlent une telle dispersion que le CEN a pris la décision d’ajuster les résultats d’extraction par la multiplication d’un facteur de 0.1 dans la norme EN 1811. D’autre part, il faut être très prudent avec des affirmations « claires et irréfutables » telles que : « les alliages précieux sont susceptibles de relarguer des ions dans des proportions considérablement moindres que les alliages non-précieux ». Voici un exemple : Dans des tests d’extraction du relargage nickel pour des aciers 316L médical (1.4441) (13-15.5 Ni 1719Cr 2.5-3.2Mo <0.03C >0.010S) ou 904L (1.4539) (24-26N 19-21Cr 4-5Mo 1.2-2Cu <0.020C <0.010S) les quantités de nickel dosé dans les extraits sans la multiplication avec 0.1 sont plus petites de 0.1 microgrammes/cm2 et par semaine. Dans les mêmes conditions expérimentales effectuées sur des alliages précieux montrent que certaines compositions relarguent des quantités de nickel nettement plus importantes que les aciers (Tableau 2). 31 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Composition (%) Pt 95.0 Au 75.0 Au 75.0 Au 75.0 Au 37.5 Au 58.5 Au 75.0 Au 75.0 Ag 11.0 Ag 9.0 Pd 1.8 Co 2.5 Cu 5.1 Cu 3.5 Zn 3.0 Zn 10.3 Cu 30.5 Zn 3.0 Zn 3.7 Pd 15.0 Pd 5.0 Cu 13.0 Cu 31.9 Pd 1.0 Cu 9.0 Cu 7.1 Ni 2.5 Ni 4.9 Ni 5.5 Ni 9.0 Ni 9.3 Ni 10.0 Ni 11.2 Ni 14.2 Conc. Ni *g/cm2.sem 0.06 0.35 0.87 0.78 1.30 0.61 3.35 1.88 Tableau 2 : Dosage du nickel après le test d’extraction selon la norme 1811 pour des alliages précieux Aujourd’hui tout fabricant d’alliages de joaillerie tend à remplacer le nickel dans la composition des alliages ou de diminuer sa concentration au maximum à 3 %. Dans ce qui suit, nous présentons deux types d’alliages dentaires que l'on retrouve sur le marché. Alliages base cuivre Les alliages cuivre-aluminium commencent à être mentionnés à partir des années quatre-vingt. Pour des raisons économiques, dans certains pays de l’Europe de l’Est, les bronzes à usage dentaire (Gaudent) commencent à être utilisés à partir de 1978 ; des alliages similaires se retrouvent aux USA (Alba Dent, Trindium Goldent), en Amérique Latine (Duracast MS) et au Japon (Moduka), (Non-precious Type III Casting Alloy). Deux alliages avec la composition : #A Cu 75 %, Al 15 %, Fe 7 %, Ni 7 % Mn 5 % et Zn 5 % #B Cu 85, Al 10.7 %, Fe 2.3 %, Ni 3.45 %, Mn 1.0 % et Zn0.05 % ont été testés. Les tests d’extraction dans NaCl 0.1M, acide lactique 0.1M pendant 168 heures révèlent des quantités de cuivre relarguées de 1.8 mg/cm2 pour le #A et 2.2 mg/cm2 pour le # B. La perte en poids après 35 jours d’immersion pour l’alliage #A est de 1.56 mg/cm2 et de 1.85 mg/cm2 pour le #B. Kappert et coll ont testé également ces types d’alliages (Figure 25). Ils dosent les Al, Ni, Fe et Zn après un jour, 4 jours et 7 jours d’extraction. Figure 25 : Quantités des ions métalliques selon Kappert et coll. Lucas, Bumgardner (J. D. Bumgardner and L. C. Lucas J. Biomed. Mat. Res. 1989), Stoffer et Kappert (Verträglihkeit von Dentallegierungen unter besonderer Berücksichtigung “alternativer” Verfahren zur Diagnostik, heraussgeber Institut der Deutschen Zahnärzte (IDZ), Deutscher Artze-Verlag, Köln 1998, pages 67-181) dans leurs études démontrent que ces types d’alliages posent des problèmes de toxicité 32 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 et leurs utilisations dans le domaine de la reconstruction prothétique sont très discutables. Lucas et coll rapportent également qu’il y a une altération dans la structure de l’ADN des cellules épithéliales à partir de sels de cuivre en concentration de 10 ppm (Figure 26). En conséquence, l’utilisation dans le domaine prothétique est contestable. Alliages Ni-Cr, Rexillium III L’alliage Rexillium III a fait l’objet de nombreuses études et est utilisé surtout comme alliage de comparaison. Les quantités de nickel relargué sont importantes selon les études de Kappert et cool (Figure 27). Kappert constate également que d’autres cations sont relargués à partir de cet alliage (Figure 28). Fig. 26 Quantités de cuivre relagué à partir des alliages base cuivre Figure 27 : Quantité de nickel relargué selon Kappert et coll pendant 7 jours d’extraction Figure 28 : Dosage des autres ions métalliques pendant 7 jours d’extraction 33 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Malgré les quantités importantes de nickel relargué à partir d’alliages Ni-Cr, la recherche bibliographique dans les bases de données que nous avons effectuée, ne révèle aucune information concernant l’existence d’études épidémiologiques quant à la relation entre les porteurs d’éléments prothétiques en Ni-Cr en bouche et les personnes susceptibles d’induire une allergie au nickel (contact dermatitis). Allergie au nickel, concernant les matériaux en contact avec la peau soumis à la législation pour la protection du consommateur Plus de 4 000 produits chimiques sont répertoriés comme éléments potentiellement capables d’induire un processus allergique. Les tests épidémiologiques démontrent qu’aujourd’hui, dans notre société, il y une recrudescence de la population sensibilisée par certains allergènes. Les estimations admettent que 15 à 20 % des adultes de la population européenne sont sensibilisés par un contact avec au moins un allergène. 30 millions de personnes qui vivent dans les pays de la communauté sont capables d’induire une allergie au nickel. Ce problème de santé publique est ainsi devenu une préoccupation du législateur de la CE, qui a déjà formé un groupe de travail, le CEN BT/WG 132. Ainsi la Directive 94/27/CEE votée le 30 juin 1994 décrète que tous les objets en contact permanent ou temporaire avec la peau sont interdits dans l’usage si ils relarguent une quantité de nickel supérieure à 0,5 µg/cm2.semaine. Un contrôle sévère est instauré dans tous les pays de la CE, et la législation en vigueur est gérée par les normes EN 1810 (Body-piercing post assemblies-Reference test method for determination of nickel content by flame atomic absortion spectrometry), EN 1811 (reference test method for release of nickel from products intended to come into direct and prolonged contact with the skin), EN 12472 (Method for the simulation of wer and corrosion for detection of nickel release from caoted items) et Tr 12471(Screening test for nickel release from alloys and coatings in items that comme into direct and prolonged contact with the skin). La limitation ou l’interdiction d’autres produits chimiques fortement allergènes est en cours. Celle-ci impliquera des recherches nécessitant une collaboration scientifique pluridisciplinaire, avec des instituts universitaires et des laboratoires spécialisés. La complexité du sujet est de taille, et il faudra résoudre un certain nombre d’inconnues telles que : - Identification des familles de produits chimiques capables d’induire des réactions allergiques et qui se trouvent dans les matériaux comme : caoutchouc, plastique, cuir, cosmétique, composites… - L’analyse chimique et l’identification clinique de l’allergène à partir des tests “in vitro” et “in vivo”. - Les implications et le rôle que joue le système immunitaire dans les réactions allergiques. Actuellement le groupe de travail, le CEN BT/WG 132 a comme mission d’établir la Liste des allergènes à traiter La sélection s'est basée sur les critères suivants : • L'allergène doit concerner une partie importante de la population ou provoquer des problèmes graves de santé. • L'allergène doit être mesurable par une analyse chimique. • Les possibilités de contrôle de l'allergène par des moyens législatifs ou préventifs doivent être réalistes. • Sont exclus : les produits pharmaceutiques et médicaux, les composants allergènes dans les aliments et les protéines dans le Latex, tout produit medical device. On peut constater que le même matériau est géré quant à sa toxicité de deux manières différentes : - dans le cas de la protection du consommateur par la Directive 94/27/CEE - dans le cas de l’utilisation comme dispositif médical par la Directive “Dispositifs médicaux” 93/42 CEE et son amendement, la Directive “Dispositifs médicaux implantables actifs” 90/385 CEE. 34 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Les alliages Ni-Cr utilisés dans le domaine prothétique sont classés comme dispositifs médicaux et, par conséquent, ils ne pourront pas être jugés selon EN1811, quant à la limitation ou leur interdiction si les quantités de nickel relargués sont plus grandes que 0,5 µg/cm2.semaine. Directions futures de recherche Dans le contexte actuel des connaissances acquises nos directions des recherche seront canalisées dans l’utilisation des nouvelles méthodes d’analyse : - Dégradation électrochimique de surface à des courants de l'ordre nA (microélectrodes, AFM) - Perfectionnement des tests d'extraction chimiques et électrochimiques - Analyse de traces ICP-MS, GC-MS, HPLC-MS - Corrélation entre les éléments relargués et les tests immunologiques comme : - MELISA (Memeory Lymphocyte Immuno-Stimulation Assaay) - LTT-CITA (Lymphozytentransformationtest ; Improving the vitro antigen specific T cell proliferation assay the use interferon-alpha to elicit antigen specific stimulation and decrease bystander proliferation). Conclusion La gamme des alliages dentaires à couler s’est sensiblement modifiée, pour des raisons économiques et à cause d’une prise en compte accrue de la notion de biocompatibilité. C’est ainsi que sont apparus des alliages dits “bio” à base d’or et de platine, et des alliages dits “universels”, disponibles aussi bien pour la technique céramo-métallique que pour les autres travaux de coulée dentaire. L’utilisation du titane et de ses alliages sous forme coulée peine à s’imposer, malgré des caractéristiques biologiques et mécaniques particulièrement intéressantes. Le choix d’un alliage en fonction des impératifs liés à son utilisation clinique spécifique a souvent été marqué par l’existence d’une très vaste palette de produits, qui pousse à multiplier les produits effectivement utilisés au laboratoire. En fait, avec les alliages nobles “universels”, une réduction sensible du nombre d’alliages nécessaires dans un laboratoire odonto-technique devrait permettre une gestion plus simple et plus économique. La mise en œuvre des alliages peut parfois subir des échecs. Leur analyse montre qu’en majorité, les causes de ces échecs se réduisent à deux grandes catégories : un dessin inadéquat de la maquette, ne tenant pas suffisamment compte des impératifs mécaniques liés à la situation clinique particulière, et des erreurs au niveau de la coulée proprement dite, en particulier du point de vue des températures respectives du moule en revêtement et de l’alliage au moment de son injection. Il existe pour chaque type d’alliage un domaine optimal de températures de moule et d’alliage en fusion en dehors duquel des porosités et des coulées incomplètes peuvent apparaître. Enfin, les alliages dentaires à couler faisant partie des dispositifs médicaux, selon la législation européenne, ils sont soumis aux directives pour l’évaluation biologique de ces dispositifs médicaux. Parmi les tests les plus importants, l’évaluation de leur comportement électrochimique en milieu biologique simulé permet de se rendre compte avec une bonne précision de leur tendance à la dégradation, et par conséquent au relargage éventuel d’ions potentiellement dangereux, comme par exemple les ions nickel. Des tests électrochimiques approfondis peuvent être réalisés de façon assez simple, mais la mise en évidence et l’identification des traces d’ions relargués est beaucoup plus délicate. Enfin, la mise en relation entre la présence de traces d’ions relargués et certains tests immunologiques devrait être entreprise, pour clarifier l’influence exacte de ces ions sur le déclenchement de phénomènes comme la sensibilisation et l’allergie. 35 Jean-Marc MEYER , Christian SUSZ , Lucien RECLARU Le point sur les alliages en 2002 Adresse des auteurs Prof Jean-Marc MEYER Section de Médecine Dentaire 19, Rue Barthélemy-Menn 1205 Genève (Suisse) [email protected] Dr Christian SUSZ Qualident S.A. 45A route des Acacias CH-1227 Les Acacias (Suisse) [email protected] [email protected] Dr Lucien RECLARU PX Tech SA., Département Recherche et Développement Bd des Eplatures 46 CH-2304 La Chaux-de-Fonds (Suisse) [email protected] 36 NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications Jan VAN HUMBEECK Dep. MTM-K.U.Leuven Kasteelpark Arenberg 44, 3001 Heverlee, Belgium NiTi Shape memory alloys offer attractive potentials such as : superelastic behaviour, reversible strains of several percent during heating or cooling over a limited temperature range, generation of high recovery stresses, and a work output with a high power / weight ratio. This paper describes the origin of those properties and summerizes the shape memory functions and some orthodontic applications. SHAPE MEMORY ALLOYS AND THE MARTENSITIC TRANSFORMATION The distinctive functional properties of shape memory alloys are closely linked to a solid-solid phase transformation occurring in a metastable solid state of some specific alloys. It occurs diffusionless and is therefore called martensitic. The solid phase obtained during cooling is called martensite. The parent phase in which the transformation occurs is called the beta(β)-phase and many times, in anology with steel, the austenite phase (Ahlers, 1986), (Delaey, 1991), (Funakubo, 1984). The temperature at which the transformation occurs can be choosen in a temperature range between 150 °C and 200 °C, depending on the composition and the microstructural constitution, the latter determined mainly by the thermomechanical processing. The temperature induced transformation is characterised by four temperatures : Ms and Mf during cooling and As and Af during heating. Ms and Mf indicate the temperatures at which the transformation from the parent phase (also called beta-phase) into martensite respectively starts and finishes, as illustrated in figure 1. Figure 1 : Schematic representation of the volume transformed as a function of temperature 37 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications As and Af indicate respectively the temperatures where the reverse transformation (martensite to beta) starts and finishes. The overall transformation describes a hysteresis of the order of 10°C to 50°C in temperature. At a temperature above the Af temperature (limited to a few tens of °C), the martensitic phase can also be induced by straining the sample, as illustrated in figure 2. When deformed above Af, the deformation if fully reversible. If deformed above Ms but below Af, some strain-induced martensite will remain stable and lead to an incomplete shape restoration. Figure 2 : Superelastic behaviour at constant temperature due to stress-induced transformation Important to notice is also that many characteristics such as the Young's’ modulus and the electrical resistivity, change drastically during transformation. These changes can be used in specific applications and also for feedback control of SMA-actuators. Many alloy systems (Delaey, 1991) show shape memory behaviour but only a few of them have been developed on a commercial scale (NiTi, NiTi-X, Cu-based). At present more than 90 % of all SMAapplications are based on NiTi or ternary NiTi-Cu and NiTi-Nb alloys. Other shape memory alloys are close to market introduction (Cu-Al-Ni, Fe-Mn-Si) while still others have interesting potentials but are difficult to produce or suffer from brittleness (NiTi-Zr, Cu-Zr, Ni-Al). Although NiTi SMAs are more expensive and more difficult to machine than Cu-based SMAs, there are several reasons why almost only NiTi SMAs are used in new developments. NiTi SMAs allow much higher working stresses and strains, NiTi SMAs show in general a higher stability in cyclic applications, NiTi SMAs are available in the shape of thin wires and thin films, and NiTi SMAs have a higher electrical resistivity making electrical activation much simpler. The requirements for medical applications also eliminate the Cu-based alloys in most cases. Moreover, mainly Ni but also Ti can be partially (a few percent) replaced by Cu, Co, Fe, Nb or Mo. Those elements can improve the hysteresis (stress and / or temperature hysteresis), corrosion behaviour, control of transformation temperatures, fatigue behaviour… 38 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications FUNCTIONAL PROPERTIES OF SHAPE MEMORY ALLOYS Shape memory alloys show different functional properties and can be used in different ways. For those properties a shape change is at the origin of the property. This shape change is a consequence of the shearing component of the martensitic variants during martensitic transformation. The so called “cold shape” is thus related to the martensite phase, while the material has its “hot shape” when in the austenitic phase. These properties are described in general terms below. Quantitative data refer to Ni-Ti alloys unless otherwise stated. One way shape memory effect A shape memory element can be easily deformed to almost any “cold shape”. The basic restriction is that the deformations may not exceed a certain limit, typically 8 % for NiTi, somewhat lower for Cubased and Fe-based shape memory alloys. These apparent plastic deformations can be recovered completely during heating, resulting in the original “hot shape”. This strain and shape recovery during heating is called the one way shape memory effect since only the hot shape is memorised. Two way shape memory effect and training The two way memory effect refers to the memorisation of two shapes. À cold shape is obtained spontaneously during cooling from the hot shape, that had been obtained by the former thermomechanical processing. Different from the one way memory effect, no external forces are required to obtain the “memorised” cold shape. During subsequent heating the original hot shape is restored. The maximum strains are in general substantially smaller than in the case of the one way memory effect. A strain limit of about 2 % has been mentioned although higher TWME strains have been found in specific cases. The microstructural asymmetry and the resulting TWME are not inherent characteristics of shape memory alloys, as the one way effect, but can only be induced after particular thermomechanical procedures. These thermomechanical procedures are in general based on the repetition of thermomechanical cycles through the transformation region [Perkins 1984, Perkins 1990, Guénin 1989], i.e. transformation cycles from the parent phase to preferentially oriented martensite. The goal of these repetitive procedures is to acquire the cold shape and therefore these procedures are referred to as “training”. Some examples of such training procedures are temperature cycling at a constant strain or at a constant stress, and superelastic cycling. It can be easily understood that many combinations and variants of these procedures can also be applied. Superelasticity The shape memory effects described above require temperature changes. In contrast, the superelastic effect, also indicated as pseudoelastic effect, is isothermal in nature [Otsuka 1986, Duerig 1990]. A superelastic specimen exhibits normal elastic behaviour until a critical stress is reached. With further straining, the specimen elongates substantially as if it were plastically deformed. However when the stress is removed, the specimen contracts to its original dimension and the apparent plastic strain is recovered. Superelasticity can be considered as the mechanical analogue of the thermal shape memory effect. Isothermal loading at a temperature above Af results in a stress induced martensitic transformation which starts at a critical stress σMs. Further straining occurs at a nearly constant stress level until the transformation finishes at σMf. The apparent plastic strain is thus caused by the shape strain accompanying the stress induced formation of preferentially oriented martensite. During subsequent unloading, the reverse transformation occurs at a lower stress level between σAs and σAf and the apparent plastic strains are recovered. Large reversible deformations of up to 10 % can be obtained, 39 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications to be compared to 0.2 %-0.5 % elastic strain in most other metallic alloys. Further straining at stress levels above σMf results in elastic straining of the stress induced martensite, followed at sy by plastic yielding of martensite. The stress induced transformation shows a stress hysteresis, revealed by the different stress levels for the forward and reverse transformation. This hysteresis is typically 50-300 MPa in NiTi and results in the dissipation of energy during superelastic cycling. The energy dissipated per cycle is given by the area enclosed between the upper and lower curve in figure 2. Superelasticity also involves the storage of potential energy. This elastic energy storage capacity can be as high as 10 J/g. All above mentioned superelastic characteristics are strongly affected by processing and composition [Zhang 1994, Russell 1997]. The critical transformation stresses (σMs, σMf, σAs and σAf) increase in a first approximation linearly with temperature starting from zero at the corresponding transformation temperature, as described by the Clausius-Clapeyron equation : dσ ∆S = εmax dT in which σ is the stress at which martensite is induced, T the temperature, DS the entropy change during transformation and εmax the maximum strain due to transformation. It follows that at a temperature, denoted as Md, the stress for plastic yielding becomes equal to the stress for martensite formation. Superelasticity occurs thus only over a relatively narrow temperature window between the temperatures Af and Md. This temperature range of typically 20-100 K is too small for applications in most industrial and consumer fields. The strong temperature dependence of the mechanical behaviour, described by the Clausius-Clapeyron equation, is a further impediment to the general use of superelasticity [Duerig 1996]. The temperature dependence and small temperature range are no barrier to the use in mammalian bodies where the temperature is constant. Moreover, the superelastic effect results in a unique combination of deduced properties. No other material or technology can offer the combination of high strength, high stiffness, high pliability and a high kink resistance. NiTi with a proper surface treatment shows an excellent biocompatibility. Also the concept of a metallic material with an extreme elasticity and with nearly constant stress levels over a large strain area is something that can be tackled easier by designers than the concepts related with temperature activated shape memory effects. Accordingly, the largest commercial successes of SMAs in recent years are linked with the use of superelasticity in biomedical applications [Duerig 1996, Melton 1994, Fernald 1994]. Generation of recovery stresses When an external constraint prevents the SMA-element from returning to the hot shape on heating, high recovery stresses are gradually generated during heating. Stresses up to 700 MPa can be obtained [Sittner, 2000]. Similar to the one way and two way memory effect, the generation of recovery stresses starts from a macroscopic deformation in the martensitic state. During subsequent heating free recovery occurs until a temperature Tc at which contact is made with an external mechanical obstacle. The recovery of the remaining deformation, characterized by the contact strain ec, is impeded by this obstacle. Therefore, from the temperature Tc recovery stresses are generated at a nearly constant stress rate dσr/dT, often described by a Clausius-Clapeyron equation. This shape memory property is the basis of some very successful shape memory applications, especially in earlier years for couplings [Proft 1990, Kapgan 1990]. 40 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications The recent substantial efforts in the development of hybrid composites with embedded shape memory elements have resulted in an increasing interest in the understanding of the generation of recovery stresses [Stalmans 1987, Vokoun 1999, Zheng 2000]. In these smart composites, thin SMAwires or other SMA-elements are embedded into advanced structural materials, without losing the structural integrity of the matrix material. Most functional properties of such adaptive composites are directly related to the following mechanism on the level of the SMA-elements. Prestrained martensitic SMA-elements operate during heating against he elastic stiffness of the host matrix, biasing the strain recovery and the reverse transformation of the SMA-elements. The result is that recovery stresses are generated gradually by the SMA-elements in the composite during heating, and the strain recovery and reverse transformation of the SMA-elements is delayed. After overcoming a temperature hysteresis, the reverse process occurs during cooling. A crucial difference with earlier applications using the generation of recovery stresses is that these hybrid composites are activated repeatedly, i.e. recovery stresses are generated cyclically. Work output The one and two way memory effect can be used for free recovery applications in which the single function of the SMA-element is to cause motions without any biasing stress. At constant strains, shape memory elements can generate substantial recovery stresses. Between these two extremes of free recovery and completely constrained recovery, shape memory components can yield a wide variety of combinations of strains and stresses. The shape memory element can be deformed with a low force in the martensitic condition or during the forward transformation, and can exert a substantially higher force as it reverts to the hot shape on heating. So, work is done on heating, up to 5 J/g. This concept can be used in thermal actuators in which the SMA-element is activated by an increase in the environmental temperature, or in electrical actuators in which the SMA-element is in general activated by direct Joule’s heating. The work needed to deform the SMA-element is much lower than the work that can be obtained during heating. This has been the basis of many prototypes of heat engines which could convert heat into useful work (see e.g. [Banks 1982]). SMA-actuators offer distinct advantages with respect to other types of actuators [Van Humbeeck 1998]. The main advantage is that SMA-actuators offer by far the highest work and power to weight ratios from all available actuating technologies at low levels of weight [Ikuta 1990]. These high work and power densities enable a whole class of applications (e.g. in the field of micro-actuation) which are simply impossible to realise with other actuation technologies. SMA-actuators can mostly be reduced to a single SMA-element without auxiliary parts, resulting in a simple compact and reliable device. Several important drawbacks which limit the use of SMA-actuators to specific niches, should also be considered. The conversion of heat into mechanical energy via SMA-actuators has been studied extensively 15 to 25 years ago. Simple thermodynamic calculations have shown that the maximum theoretical efficiency of an SMA-actuator is below 10 % [Wollants 1979]. In practice, the conversion of heat into mechanical work occurs less efficient with the result that the real efficiency is even one order of magnitude smaller than the theoretical value. Another drawback is that the SMA-actuator has to be heated and cooled. Especially the low cooling rate limits the use of SMA-actuators to relatively low frequency applications. High damping capacity SMA-elements have a high damping capacity in the austenitic and martensitic condition. Shape memory alloys show in the martensitic condition a strong amplitude dependent internal friction. For impact loads, the specific damping capacity can be as high as 90 %. Starting from the austenitic condition, energy is dissipated during superelastic cycling as a result of the stress hysteresis between superelastic loading and unloading, as explained before. A detailed analysis can be found in [Van Humbeeck 1999]. 41 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications NI-TI ALLOYS Ni50Ti50 is the best explored system of all shape memory alloys and occupies almost the whole market of SMA. Ni50Ti50 is an intermetallic phase that has some solubility at higher temperatures. The science and technology of Ni-Ti is overwhelmingly documented. The influence of composition and thermomechanical processing on the functional properties is well understood and described in literature. Therefore we refer only to some very interesting and relevant publications such as [Saburi 1998, Treppman 1995, Wayman 1989, Todoriki 1987]. The basic concept of processing Ni-Ti alloys is that in order to avoid plastic deformation during shape memory or during pseudoelastic loading, the martensitic and the β-phase have to be strengthened. This occurs by classic methods : strain hardening during cold deformation, solution hardening, precipitation hardening. Ni-Ti alloys have the significant advantage that these techniques can be easily applied due to an excellent ductility and a very interesting but complicated precipitation process of metastable and stable neighbouring intermetallic phases [Nishida 1986]. The compositions of the Ni-Ti-SME alloys are approximately between 48 and 52 at % Ni and the transformation temperatures of the B2 structure to the martensitic phase with a monoclinic B19’ structure, are very sensitive to the nickel-content (a decrease of about 150 degrees for an increase of 1 at % Ni). The transformation temperatures can be chosen between –40°C and +100°C. Ni-Ti alloys show the best shape memory behaviour of all SMA. Even in polycrystalline state 8 % shape recovery is possible and 8 % pseudo-elastic strain is completely reversible above Af, while the recovery stress is of the order of 800 MPa. In some cases the martensitic transformation is preceded by the so-called R-phase transition. The R-transition is a B2 ↔ rombohedral transformation that has also second-order characteristics [Wayman 1986]. The most specific characteristics of this R-phase transition is that it shows a clear one- and twoway memory effect in the order of 1 % recoverable strain and that the hysteresis of the transformation is very small, only a few degrees which creates possibilities for accurately regulating devices. It should be noted that further cooling transforms the R-phase into B19’ martensite. During heating only the reverse martensitic transformation will be observed. To observe the reverse R-phase transition cooling should be stopped above Ms. It has been shown that the appearance of the R-phase depends on composition, alloying elements and thermomechanical processing [Todoriki 1987]. In fact the major common point is that all effects depressing the martensitic forward transformation below room temperature will favour the appearance of the R-phase transition which is quite stable near 30°C. 42 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications Ternary Ni-Ti alloy systems Addition of third elements opens even more possibilities for adapting binary Ni-Ti alloys toward more specific needs of applications. Adding a third element implies a relative replacement of Ni and/or Ti. Therefore it must be always very well indicated which atom Ni or Ti or both is replaced by the third element. Alloying third elements will influence not only the transformation temperatures but will also have an effect on hysteresis, strength, ductility, shape memory characteristics and also on the B2→(R)→B19’ sequence. The influence of several elements has been already described in [Eckelmeyer 1976, Honma 1979, Kachin 1989]. More application oriented, one can distinguish four purposes to add third elements : 1. to decrease (Cu) or increase (Nb) the hysteresis, 2. to lower the transformation temperatures (Fe, Cr, Co, Al), 3. to increase the transformation temperatures (Hf, Zr, Pd, Pt, Au), 4. to strengthen the matrix (Mo, W, O, C). Some of the ternary alloys have been developed for large-scale applications. We will only summarise the two most well developed : NiTiCu and NiTiNb and the Ni(Ti, X) with X=Hf, Zr which are under investigation as High Temperature Shape Memory Alloys (HTSMA). BIOMEDICAL APPLICATIONS Most of the earlier developments of SMA-applications were linked with the thermally activated functions of actuation and coupling. In recent years however it has become clear that the largest commercial successes of SMAs are linked to biomedical applications (Besselink 1995, Melton 1994, Pelton 1994, Yahia 2000). The combination of good biocompatibility, good strength and ductility with the specific functional properties such as the shape memory effect and superelasticity creates a unique material for medical applications. Especially the superelastic effect of SMAs results in a unique combination of high strength, high stiffness and high pliability ; no other material or technology can offer this unique combination. The temperature dependent character of the superelastic effect, which is disadvantageous in other application areas, is of less importance in the biomedical field because of the stable temperature of the human body. NiTi with a proper surface treatment shows an excellent biocompatibility (Shabalovskaya, 1995). Also the concept of a metallic material with an extreme elasticity and with nearly constant stress levels over a large strain area is something that can be tackled easier by designers than the concepts related to temperature activated shape memory effects (Melton, 1994). As a consequence, regarding the specific functional properties, the largest commercial successes of SMAs are linked with the use of superelasticity. The following paragraphs illustrate present developments of applications in the biomedical field that obtain an added value by the functional properties of shape memory alloys. 43 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications APPLICATIONS IN ORTHODONTICS Orthodontic archwires were the first mass biomedical application (Sachdeva, Miyazaki 1990), (Duerig 1990), (Fukuyo 1992). While in the case of stainless steel wires the forces quickly relax during movement of the teeth, concomitantly retarding this movement, NiTi-wires allow the teeth to move under almost constant force over a long treatment time and a much larger deplacement of the teeth before the orthodontist has to re-tighten. The stored elastic energy for the same maximum stress is much larger for superelastic material than for steel. Depending on the desired constant force a wire with a specific plateau stress can be chosen. The plateau stress depends on the relative difference between the ambient temperature and the transformation temperature. The value is high for wires with a low transformation temperature. This makes the wire more sensitive to small temperature changes in the mouth which causes intermittent forces on the teeth. A new type of orthodontic wire has a transformation temperature just below the body temperature and thus has a very low plateau stress. The advantages are obvious : the treatment requires less chair time and is thus less expensive. The force remains constant and does not reach the point of causing pain. Different grades of wire stiffness are now available : round and rectangular sections, variation in diameters and thus in strength (Sachdeva, Oshida 1990), (Tuissi 1995). Since NiTi archwires were introduced in the late 1970’s, over 30 % of the archwires used today are NiTi (Dutta 1996). Besides archwires, specific endosseous implants based on the shape memory effect have also been developed. Those implants can be in blade or rod form, depending whether several teeth or one single tooth has to be inserted. After insertion, the predeformed shapes are heated by warm saline or by an induction coil apparatus to a temperature not above 50°C, but above the Af temperature of the material (Fukuyo 1992), (Sachdeva, Fukuyo 1990). Other common devices for applications in orthodontics are listed below. - Dental root implants for a stable attachment in the bone. The memory metal root deforms and locks itself firmly in the bone after reaching body temperature. - Adjustable dental abutments with self-locking temperature sensitive ball joints. - Adjustable telescopic head gears for reposition of the molars. This device uses a memory metal locking ring that prevents relative motion between the inner head gear wire and the head gear tube. Adjustment of the length or angle is easily accomplished by cooling the locking ring. - Small superelastic tension and compression springs to create space or close gaps between the elements in the mouth. - Heavy suture expanders with superelastic springs to change the width of the mandable. - Martensitic, very shapeable wires and strips for retention of the teeth after correction. - Special connectors with a wedge-shape to hold two teeth tightly together. - Adjustable orthodontic brackets with torque and angulation control. - Connectors for threadless anchoring of abutments to dental root implants. Although orthodontic devices became very familiar and are abundantly used, some attention should be given to the “real properties” of the purchased material. For example a systematic study on a spring with a total length of 10 mm, an active length of 4 mm and an outer diameter of 1.3 mm showed that in spite of identical specifications, the important values of stress and strain could vary strongly. First it was observed that the global superelastic behaviour of springs, delivered by two different suppliers was very different. Also the thermomecanical behaviour as function of temperature was very different, i.e. the spring of supplier A was not anymore thermoelastic at 5°C while the one of supplier B was. Moreover, different batches of the same supplier (A as well as B) gave different values for the required force at the same temperature. In case the specification was 150 gr. at 37°C, this force varied sometimes by almost ± 50 gr. for different batches. The origin of those problems could be related to inadequate or bad reproduced heat treatments. A quality sheet for a definite batch could be advised. 44 Jan VAN HUMBEECK NiTi alloys : Shape Memory Alloys for orthodontic applications BIOCOMPATIBILITY OF NITI ALLOYS NiTi alloys are considered to be high corrosion resistant, good biocompatible materials. Both elements Ni and Ti form an intermetallic stoichiometric compound Ni0.5Ti0.5. Off-stoichiometric alloys will contain no more than a few tenths of an atomic per cent Ni in solid solution. Extensive in vivo experience in the human body with implants, mainly related to dentistry, especially orthodontic wires, but also in orthopaedics, stenting or other medical branches has thus far not revealed any special problems. Regarding its biocompatibility NiTi can be compared with stainless steel (grade 316 L), CoCr alloys and even pure Ti. The origin of these properties is mainly related to the passivation layer of TiO2. To obtain a good passivation, care must be taken in the final treatment in order to avoid small islands of pure Ni at the surface or mixtures of NiO and Ti2O, which may create favoured sites for selective dissolution in crystals (Chan 1990), (Oshida 1992). In this respect surface conditions are extremely important. These surface conditions are controlled by the specific thermomechanical treatments that NiTi alloys must undergo in order to achieve optimal performance. Further processing and mounting should be performed with care in order not to damage the TiO2 layer. More detailed information and discussion on the biocompatibility of NiTi alloys can be found in several publications (Castleman 1976, Oshida 1990, Oshida 1991, Catright 1973, Dutta 1993, Shabalovskaya 1995, Yahia 2000, Rykänen 1999, Shablovskaya 2002). (Ahlers 1986) : Ahlers M. (1986), “Martensite and equilibrium phases in Cu-Zn and Cu-Zn-Al alloys”, Progress in Mat. Science, 30 (3), 135-186. 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Paradin 69372 Lyon cedex 08 Dans les années 1960, Buelher et Wang (1963) mettent en évidence les caractéristiques innovantes de l’alliage équiatomique de nickel et titane (NiTi). Cet alliage possède des propriétés thermodynamiques de mémoire de forme très utile en orthopédie, mais également un pouvoir de superélasticité peu commun chez les alliages à mémoire de forme (AMF). L’alliage de NiTi est un des concepts les plus innovants de ces dernières années dans le domaine des biomatériaux métalliques, ils offrent des perspectives intéressantes en orthopédie et en odontologie : orthodontie, endodontie et implantologie. Il a ainsi attiré l’attention et l’intérêt des cliniciens. Il est actuellement admis que les propriétés de surface des biomatériaux conditionnent la réponse biologique des tissus à leur contact. Dans le processus complexe de la chirurgie implantaire, la rugosité de surface des biomatériaux utilisés est un facteur important modulant la réponse biologique. Nous nous proposons de mettre en évidence les corrélations entre les différents états de surfaces du NiTi et l’adhésion de fibroblastes gingivaux. Pour cette étude in vitro, des échantillons de nickel-titane sont préparés par polissage mécanique manuelle à différents grades. Les matériaux de comparaisons, couramment utilisés comme matériaux implantaires, tel que le titane commercialement pur de grade 2, l’alliage Ti-6Al-4V et l’acier inoxydable 316L sont polis industriellement. Plusieurs études sont réalisées afin d’évaluer l’adhésion cellulaire sur les différents états de surface. Des fibroblastes gingivaux humains, obtenus à partir de la technique d’explant, sont mis en culture sur les matériaux testés. Dans un premier temps, nous avons observé la morphologie cellulaire par microscopie électronique à balayage (MEB), puis évalué la prolifération cellulaire par un test MTT. Par la suite, nous avons visualisé deux protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire par une technique d’immunomarquage. 48 V. COMTE, C. LAGNEAU & M. LISSAC Adhésion de fibroblastes gingivaux humains sur différentes rugosités d’alliages orthopédiques MATÉRIELS & MÉTHODES 1.1 – Matériaux Les échantillons de l’alliage nickel-titane sont fournis par la société AMF (Reuilly, France). Ils sont polis mécaniquement et manuellement à plusieurs rugosités décroissante à l’aide de papier à grain de SiC de grade 80, 400 et 2400. La topographie de surface est analysée par profilométrie pour en déduire les Ra représentés dans la figure 1. Figure 1 : Rugosité moyenne des matériaux (µm) Les échantillons de titane commercialement pur (Ti-cp) et l’alliage Ti-6Al-4V (TA6V) que nous avons utilisé sont fournis par la société SERF (Décines, France). Les échantillons d’acier inoxydable 316L proviennent de la société Goodfellow (Huntingdon, Angleterre). Ces matériaux ont été polis miroir industriellement et utilisé comme tels. La composition chimique des alliages est donnée dans le tableau 1. Pour cette étude in vitro, les échantillons de chaque alliage ont été stérilisés aux rayons gamma selon la norme en vigueur à 2500 Gy. NiTi Ti-cp TA6V 316L Ti 44,5 99,56 90 Al V 6 4 Ni O N C H Fe Cu 55,5 0,101 0,02 0,002 0,18 0,05 0,013 0,2 0,2 0,007 0,008 0,015 0,3 10 69 Cr Mo 18 3 Tableau 1 : Composition chimique en % en poids du NiTi, Ti-cp, TA6V et 316L 1.2 – Cultures cellulaires Des biopsies de gencives humaines saines sont prélevées avec les consentement des patient à la suite d’extraction de prémolaire. Les prélèvements, découpés en explants, sont placés dans du milieu de culture DMEM (Dulbecco’s Modified Eagle Medium)(Gibco, USA) additionné de 10 % de sérum de veau fœtal (Biowest, France), de pénicilline (100 U/ml)(Biowest), de streptomycine (50 µg/ml)(Biowest) et de fongizone (100 µl)(Gibco) afin d’obtenir une culture primaire de fibroblastes gingivaux. Ces cellules sont utilisées pour l’ensemble de notre expérience à des passages compris entre P2 et P5. 49 V. COMTE, C. LAGNEAU & M. LISSAC Adhésion de fibroblastes gingivaux humains sur différentes rugosités d’alliages orthopédiques 1.3 - Étude de la morphologie cellulaire Les fibroblastes sont ensemencés à 104 cellules/cm2 sur les échantillons métalliques et laissés en culture pendant 4 heures. Les cellules sont fixées au glutaraldhéyde 2 %, puis post-fixées au tétroxyde d’osmium. Les échantillons sont ensuite préparés pour pouvoir être observés au microscope électronique à balayage (Hitachi S800, Centre Technologique des Microstuctures – Université Claude Bernard, Lyon). 1.4 - Étude de la prolifération cellulaire Après plusieurs jours de culture sur les différents substrats (2, 4 et 7 jours), l’activité proliférative des fibroblastes gingivaux est déterminée par la méthode de Mossman (ou test MTT). Les cellules vivantes possèdent une enzyme mitochondriale capable de transformer un sel de tetrazolium jaune (MTT) en cristaux de formazan bleus. La mesure au spectrophotomètre de l’intensité de coloration de la solution est proportionnelle au nombre de cellules vivantes. 1.5 – Observation des protéines de l'adhésion cellulaires Deux protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire, le collagène I et la vinculine, sont mises en évidence par immunomarquage. Cette technique est réalisée sur un tapis cellulaire confluent après 7 jours de culture. Les cellules sont fixées au paraformaldéhyde à 4 %, puis marquées avec un anticorps primaire monoclonal et révélées à l’aide d’un anticorps secondaire de souris couplé au FITC. Le marquage ainsi obtenu est visualisé au microscope à épifluorescence. RÉSULTATS & DISCUSSION 2.1 – Observation de la morphologie cellulaire Figure 2 : Observation de la morphologie cellulaire par microscopie électronique à balayage (G : x 1000) Sur les échantillons les plus lisses (NiTi2400, Ti-cp, TA6V et 316L), les fibroblastes apparaissent bien étalés avec des prolongements cytoplasmiques rayonnant tout autour du corps cellulaire. Ce résultat témoigne d’une non-toxicité des matériaux, mais aussi que les cellules adhèrent et s’aplanissent sans 50 V. COMTE, C. LAGNEAU & M. LISSAC Adhésion de fibroblastes gingivaux humains sur différentes rugosités d’alliages orthopédiques obstacle au substrat. Sur les NiTi 400 et 80, de rugosité plus importante, les cellules ont adhéré et ont pris une forme longitudinale parallèle à la topographie du matériau. Cette morphologie cellulaire ne semble pas naturelle et est contrainte par les sillons de surface des NiTi rugueux. 2.2 – Étude de la prolifération cellulaire Le test de prolifération indique, à 7 jours de culture in vitro, que les matériaux les moins rugueux sont les plus favorables à l’activité cellulaire. Les NiTi 400 et 80 marquent leur différence en ne permettant pas aux cellules de proliférer aussi librement que sur les matériaux les plus lisses. La rugosité de surface semble bien influencer la prolifération des fibroblastes. Figure 3 : Évaluation de la prolifération cellulaire par un test MTT 2.3 – Observation des protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire : Les protéines marquées sont observées sur chacun des matériaux, cela indique que l’état de surface n’intervient pas dans la synthèse des protéines impliquées dans l’adhésion cellulaire. Pour le collagène I, un marquage intracellulaire et périnucléaire est observé, de plus des spots sont visualisés aux niveaux des contacts focaux. Le marquage de la vinculine montre également un marquage intense au niveau des contacts focaux. En revanche, en comparant les immunomarquages sur les différents états de surface, les protéines d’adhésion observées, collagène I et vinculine, suivent la forme des cellules et se développent en fonction de la topographie du matériau. CONCLUSION Nos résultats indiquent que la rugosité de surface de l’alliage NiTi affecte l’orientation et la prolifération de fibroblaste in vitro. De plus nous avons observé que les rainures parallèles à la surface des échantillons contrôlent l’alignement cellulaire. Il y a donc une relation entre la topographie de surface des substrats et le processus d’adhésion et de prolifération des fibroblastes gingivaux humains. Pour une meilleure compréhension de ce phénomène, il serait intéressant de mieux connaître l’adhésion cellulaire au niveau moléculaire, et en particulier de quantifier les protéines présentes dans les contacts focaux sur des matériaux de différentes rugosités. En effet, c’est l’établissement des contacts entre les cellules et les substrats qui déterminent l’activité de la cellule et notamment sa prolifération. 51 V. COMTE, C. LAGNEAU & M. LISSAC Mesure de l'énergie libre de surface de matériaux implantaires dentaires : méthodes de la goutte posée et de la bulle captive F. MABBOUX (1), L. PONSONNET (2), J.J. MORRIER (1), & O. BARSOTTI (1) (1)- Laboratoire d’Etude des Interfaces en Odontologie EA 637, Faculté d’Odontologie, rue G. Paradin, 69372 Lyon cedex 08, France. (2)- Laboratoire d’Ingéniérie et Fonctionnalisation des Surfaces - CNRS, UMR 5621, Ecole Centrale de Lyon, 36 avenue Guy de Collongue, BP 163, 69131 Ecully cedex. INTRODUCTION Les propriétés de surface d’un implant dentaire dépendent de ses propriétés physico-chimiques (Energie Libre de Surface (ELS), mouillabilité) mécaniques et topographiques (rugosité) (1). Ces propriétés de surface conditionnent les réponses biologiques à leur contact : cytocompatibilité, ostéointégration et développement d'un biofilm. Le but de cette étude a été de comparer les valeurs de l'énergie libre de surface et de ses composantes, de 2 biomatériaux dentaires couramment utilisés en implantologie (Titane et alliage Ti-6Al-4V), selon la méthode de la goutte posée et de la bulle captive. Ces 2 méthodologies renseignent sur les composantes polaires et dispersives de l'ELS et facilitent la compréhension du comportement des matériaux implantaires dans différents environnements. Si la méthode de la goutte posée est couramment utilisée pour cette caractérisation, la méthode de la bulle captive n’a pas ou a été très peu utilisée dans l’étude des propriétés de surface des biomatériaux dentaires. MATÉRIEL ET MÉTHODES Matériaux testés Les matériaux utilisés dans cette étude sont le Titane (CP Ti grade 2 (TIMET Savoie SA)) et le Ti-6Al4V (TIMET Savoie SA). La composition et la rugosité de chaque alliage sont résumées dans le tableau I. Pour chacun d’eux, 10 pastilles (diamètre = 8 mm, épaisseur = 2 mm) ont été préparées. Matériau Ti-6Al-4V Rugosité (Ra) 0,0572 (0,007) Ti 40 cp 2 0,0472 (0,009) Composition chimique (%) Al : 5,5-6,5 ; V : 3,5-4,5 C : < 0,08 ; Fe < 0,25 ; O2 < 0,13 N2 < 0,05 ; H2 < 0,012 N : 0,01 ; C : 0,01 ; H : 0,0013 Fe : 0,08 ; O : 0,11 Tableau 1 : caractéristiques des matériaux testés 52 F. MABBOUX, L. PONSONNET, J.J. MORRIER, & O. BARSOTTI Mesure de l'énergie libre de surface de matériaux implantaires dentaires : méthodes de la goutte posée et de la bulle captive Échantillons Les pastilles ont été polies mécaniquement et manuellement à plusieurs rugosités décroissantes, à l’aide de papier métallographique SiC (Buehler) de grade 80, 240, 400, 800, 1000, 1200, 2400 et 4000. Puis les matériaux ont été polis miroir avec feutre “Chemomet I” (Buehler) en présence d’une Solution. Pour métallographie (Le stade poli miroir permet de ne pas prendre en compte l’hystérésis de la mesure de l’angle de contact liée à la rugosité des surfaces. La rugosité a été contrôlée par profilométrie (Perthometer C5D) (tableau 1). Pour chaque série de dépôt (goutte posée ou bulle captive), les pastilles ont subi le traitement suivant : lavage dans un bain à ultrasons (100 W) 20 minutes dans l’acétone, puis 20 minutes dans l’alcool et 20 minutes dans l’eau. Les pastilles ont ensuite été séchées 15 minutes dans un four à 40 C puis conservées dans un dessiccateur avant et pendant la durée de chaque expérience. Méthode de la goutte posée Deux gouttes (1 µl / goutte) sont déposées sur chaque échantillon. L’image de la goutte est acquise par ordinateur. Le logiciel Digidrop de celui-ci peut alors analyser la forme de la goutte en équilibre sur la surface (hauteur et largeur, relations trigonométriques sphériques) afin de déterminer l’angle de contact θ. L’ELS (γT) et les composantes dispersives (γLW), polaire (γAB), acide (γA), base (γB) du Ti et du TA6V ont été déterminées à partir des mesures des angles de contact, en utilisant 3 liquides sonde sur chaque matériau : l’eau pure et le formamide (deux liquides polaires) et le diiodométhane (liquide apolaire) (2). Pour chaque liquide sonde et pour chaque surface (Ti et TA6V), 20 angles de contact ont été mesurés, et les moyennes calculées et comparées à l’aide de tests statistiques. microseringue aiguille Air θ Liquide Surface = échantillon Méthode de la goutte posée 53 F. MABBOUX, L. PONSONNET, J.J. MORRIER, & O. BARSOTTI Mesure de l'énergie libre de surface de matériaux implantaires dentaires : méthodes de la goutte posée et de la bulle captive Méthode de la bulle captive La pastille est totalement immergée dans l’eau. Une bulle d’air ou d’octane est formée au bout de l’aiguille munie d’une micro seringue. L’angle de contact est calculé à partir de la mesure des dimensions de la bulle, et il correspond à : θ = φ (bulle d’air dans l’eau) et θ = Θ (bulle d’octane dans l’eau). L’ELS (γSV), les interactions dispersives (γSVd), acide/base (γSVp), l’énergie libre interfaciale (γSW) et les interactions non dispersives (ISW) du Ti et du TA6V ont été déterminées à partir de ces mesures, selon l’approche d’Andrade et al. (1985). Pour chaque surface (Ti et TA6V), 20 angles de contact ont été mesurés avec l’air et 20 angles de contact avec l’octane. Les moyennes ont également été calculées et comparées statistiquement. Φ Bulle d’air ou d’octane Θ Méthode de la bulle captive RÉSULTATS – DISCUSSION Les moyennes des valeurs des angles de contact obtenus selon les deux méthodologies sont présentées dans les tableaux 2 et 3. Les valeurs de l’ELS et de ses composantes sont résumées dans les figures 1 et 2. Les deux méthodes montrent que les deux matériaux sont moyennement hydrophobes. Cependant, avec la méthode de la goutte posée, des différences sont observées entre les deux matériaux : ELS totale, composantes polaire et dispersive, alors qu’il n’y a aucune différence avec la méthode de la bulle captive. Les différences obtenues peuvent s’expliquer par la présence plus importante d’éléments contaminants (O2, contaminants hydrocarbonés) lorsque les mesures s’effectuent dans l’air (méthode de la goutte posée) (4). En effet, pour Andrade. (5), dans un environnement complexe (vapeurs, particules d’air), un hydrogel se forme à la surface des métaux et influe sur les valeurs de l’ELS. La méthode de la bulle captive montre aussi la présence d’un hydrogel à la surface des échantillons. Il est fortement hydraté : γSW< 5 mJ/m2. Matériau φ Θ Titane 50,40 (3,43) 127,02 (2,13) Ti-6Al-4V 51,24 (3,25) 130,25 (2,09) Tableau 2 : Moyenne des angles de contact (en degrés) et des écart-types calculée avec la méthode de la goutte posée 54 F. MABBOUX, L. PONSONNET, J.J. MORRIER, & O. BARSOTTI Mesure de l'énergie libre de surface de matériaux implantaires dentaires : méthodes de la goutte posée et de la bulle captive Matériau Eau Diiodométhane Formamide Titane 55,60 (8,92) 45,84 (3,65) 42,86 (6,18) Ti-6Al-4V 49,61 (4,54) 37,80 (1,62) 56,00 (5,87) Tableau 3 : Moyenne des angles de contact (en degrés) et écart-type, calculée avec la méthode de la bulle captive Figures 1 et 2 : Représentation des Energies de Surface et de leurs composantes, pour le Ti et le Ti-6Al-4V, respectivement à partir de la méthode de la goutte posée (figure 1) et à partir de la méthode de la bulle captive (figure 2). CONCLUSION Le choix de la méthode utilisée pour mesurer les valeurs de l’ELS et de ses composantes est important dans la caractérisation des propriétés de surface d’un biomatériau et par conséquent dans la compréhension des phénomènes d’adhésion. La méthode de la bulle captive permet de tester l’interface hydrogel-eau dans un état d’hydratation complet, in situ, et d’obtenir des informations supplémentaires à celles de la goutte posée. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. Quirynen M., Bollen C.M.L., Willems G., van Steeberghe D. Comparison of surface characteristics of six commercially pure titanium abutments. Int J Oral Maxillofac Implants 1994 ; 9 : 71-76. 2. van Oss C.J. Forces interfaciales en milieux aqueux. (Ed) Paris, Masson. 3. Andrade J.D., King R. N., Gregonis D.E., Coleman D.L. Surface characterization of poly(hydroxyethyl methacrylate) and related polymers. I. Contact angle methods in water. Journal of polymer Science : Polymer Symposium 1979 ; 66 : 313-336. 4. Schrader M.E. High- and Medium-Energy Surfaces : ultrahigh vacuum approach. Modern approaches to wettability. Plenum Press, New York, 1992. 5. Andrade J.D. Interfacial phenomena and biomaterials. Medical Instrumentation 1973 ; 7 : 110-120. 55 F. MABBOUX, L. PONSONNET, J.J. MORRIER, & O. BARSOTTI Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur L. BEAUCOURT (1), S. ETIENNE (1), J-P. SALOMON (1) & J. DÉJOU (1) (1) Université de la Méditerranée. UFR Odontologie de Marseille. Département de biomatériaux OBJECTIFS Cette étude a eu deux objectifs : 1- Evaluer l’état de surface de six matériaux à base de résines composites : Filtek Flow® (3M-ESPE), Filtek A110® (3M-ESPE), Filtek Z250® (3M-ESPE), Filtek P60® (3M-ESPE), Z100 MP® (3M-ESPE) et F2000® (3M-ESPE), après finition et polissage à l’aide de disques Sof-Lex® (3M-ESPE) à base d’alumine. 2- Evaluer la variabilité inter-opérateur des résultats obtenus avec le F2000 et les disques du système Sof-Lex ®. MATÉRIEL ET MÉTHODE Des éprouvettes cylindriques des matériaux (d = 6 ± 1 mm, e = 1mm) ont été polymérisées pendant 40 secondes avec une lampe Freelight® (3M-ESPE), en mode standard (40 s, 400 mW/cm2), sous une matrice de Mylar et une plaque de verre. Pour la première partie de l’étude 60 éprouvettes de chaque matériau (Tableau 1) ont été finies et polies, immédiatement après polymérisation, par un seul opérateur, en utilisant successivement les 4 disques de granulométrie décroissante (Tableau 2). Entre chaque étape de polissage, un rinçage soigneux a été réalisé avec un spray d’air et d’eau, puis chaque éprouvette a été séchée. Tableau 1 : Chronologie du polissage à l’aide des disques du système Sof-Lex (3M-ESPE) des matériaux évalués 56 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur Tableau 2 : caractéristiques et protocole d’utilisations des disques du système (Sof-Lex –3M-ESPE) Pour la deuxième partie de l’étude 4 opérateurs différents ont fini et poli chacun 15 éprouvettes de F2000 selon le même protocole. L’état de surface des éprouvettes a été évalué à l’aide d’un profilomètre tactile (Mitutoyo Surftest, rayon de courbure 5 µm, vitesse de déplacement 0,1 mm/s, valeur du cut-off 0,25 mm, longueur du profil 1,5 mm). Cinq profils différents ont été enregistrés sur chaque éprouvette. Deux paramètres de rugosité ont été retenus : Ra et Rt. Pour la 2e partie de l’étude, seul l’état de surface obtenu après la 4e étape a été évalué. Le critère retenu pour l’évaluation statistique a été la moyenne des 5 valeurs de Ra et Rt obtenues à partir des 5 profils sur chaque éprouvette. Après contrôle de la normalité des distributions et de l’égalité des variances, l’influence du facteur matériau (1ère partie) et du facteur opérateur (2e partie), ont été évalués grâce à une analyse de variance et un test a posteriori de Duncan (p = 0,05). De plus, une corrélation a été recherchée entre les valeurs de Ra et Rt obtenues en fin de polissage et les caractéristiques des charges contenues dans les matériaux étudiés : taille moyenne, taille maximale et pourcentage en poids (Tableau 5). Le test mis en œuvre a été un test non paramétrique (corrélation des rangs de Spearmann). 57 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur RÉSULTATS Les résultats sont résumés dans les tableaux 3 et 4 et les figures 1 et 2. Tableau 3 : Évaluation de l’état de surface (Ra en µm) en fonction du matériau et de l’étape. Pour chaque ligne, les groupes avec la même lettre en exposant ne diffèrent pas significativement Figure 1 : Évaluation de l’état de surface (Rt en µm) en fonction de l’étape de finition/polissage et du matériau 58 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur Tableau 4 : Évaluation de l’état de surface (Rt en µm) en fonction du matériau et de l’étape. Pour chaque ligne, les groupes avec la même lettre en exposant ne diffèrent pas significativement Figure 2 : Évaluation de l’état de surface (Ra en µm) en fonction de l’étape de finition/polissage et du matériau Tableau 5 : Caractéristiques des charges minérales contenues dans les 6 matériaux évalués 59 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur Une corrélation a pu être mise en évidence entre les valeurs de Ra et Rt obtenues en fin de polissage et la dimension moyenne des charges (Rho Ra = 0,79, Rho Rt = 0,83), la dimension maximale des charges (Rho Ra = 0,79, Rho Rt = 0,83), le % en poids des charges (Rho Ra = 0,30, Rho Rt = 0,37). Les figures 3 et 4 illustrent ces résultats. Figure 3 : Ra et Rt obtenus en fin de polissage en fonction de la taille moyenne des charges contenues dans les matériaux Figure 4 : Ra et Rt obtenus en fin de polissage en fonction de la taille maximale des charges contenues dans les matériaux 60 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Finition et polissage des résines composites : influence du matériau et variabilité inter-opérateur Le tableau 6 résume les résultats concernant l’influence de l’opérateur sur les valeurs de Ra et Rt obtenues en fin de polissage avec les F2000. Tableau 6 : Pour chaque ligne, les groupes avec les mêmes lettres en exposant ne différent pas significativement CONCLUSION Tous les matériaux à base de résine composite ne peuvent pas être polis de la même façon avec le système Sof-Lex ®. Un des facteurs influençant les résultats pourrait être la structure du matériau (en particulier la taille moyenne et maximale des charges). Les résultats obtenus avec les disques Sof-Lex ® utilisés sur le F2000 ® mettent en évidence l’influence de l’opérateur au cours des étapes de polissage. Cependant, il est à noter que le F2000 ® est celui des 6 matériaux testés qui a montré les capacités de polissage les plus mauvaises. 61 L. BEAUCOURT, S. ETIENNE, J-P. SALOMON & J. DÉJOU Effets du renforcement à l’aide de fibres de verre et de la post-polymérisation sur les propriétés mécaniques de deux résines composites de laboratoire et une résine composite provisoire J. KOSORIC (1), M. CATTANI-LORENTE (1), CH. GODIN (1) & J-M. MEYER (1) (1) Ecole de Médecine Dentaire, Université de Genève INTRODUCTION Le renforcement des résines dentaires avec des fibres a été décrit dans la littérature dès les années 60 1 2 3 4. Cependant ce n’est que récemment que des fibres pour des applications dentaires ont été commercialisées 5 6. Actuellement, les utilisations potentielles des fibres en médecine dentaires sont nombreuses. Par exemple, dans les prothèses partielles ou totales 7 8, dans les ponts provisoires 9 10 ou les splints 11. De plus, grâce au succès en chirurgie orale de la charge immédiate des implants 12, l’utilisation de fibres pour renforcer les suprastructures sur implant 13 est redevenue d’actualité. Les résines composites de laboratoire sont couramment employées pour la fabrication de ponts et couronnes provisoires. Ils pourraient être également utilisés pour les suprastructures sur implant, cependant leur résistance aux contraintes est relativement faible. Le renforcement de ces résines par des fibres pourrait être une alternative à l’utilisation de structures métalliques. Le but de notre étude était d’évaluer le comportement mécanique de deux résines composites de laboratoire renforcées par des fibres de verre unidirectionnelles. L’influence de la post-polymérisation des résines a également été examinée. MATÉRIEL ET MÉTHODES Deux résines composites de laboratoire, différant par leur composition chimique et leur taux de charges minérales (Cristobal+ de IDR et Sinfony de 3M ESPE) et une résine composite provisoire (Protemp 3 Garant de 3 M ESPE) ont été utilisées. Des fibres de verre de type E, unidirectionnelles, silanisées (Stick Tech Ltd.) ont été coupées à des longueurs de 22 mm. Elles ont été ensuite imprégnées pendant 10 min avec la résine composite fluide Synfony Transparent (3M-ESPE). Des barreaux de 25 mm de longueur et 2 mm de hauteur et 2 mm de largeur ont été préparés dans des moules de plexiglas de la manière suivante. Après la mise en place d’une première couche de résine composite de laboratoire, une couche de fibres est déposée et le tout est polymérisé pendant 15 sec. avec la lampe halogène Elipar Trilight (800mW/cm2). Ensuite une deuxième couche de résine composite et de fibres est ajoutée et polymérisée de la même manière. Finalement une dernière couche de résine est placée dans le moule. On effectue alors la polymérisation dans le four MPA 2000 (IDR) pendant 90 sec. Pour la moitié des échantillons une post-polymérisation a été effectuée avec le four MPA 2000 Post Cure (IDR). Les échantillons fabriqués avec la résine composite provisoire ne contiennent qu’une seule couche de 62 J. KOSORIC, M. CATTANI-LORENTE, CH. GODIN & J-M. MEYER Effets du renforcement à l’aide de fibres de verre et de la post-polymérisation sur les propriétés mécaniques de deux résines composites de laboratoire et une résine composite provisoire fibres. Pour ces échantillons la post-polymérisation a été effectuée dans le four Beta Vision Unit (3M ESPE) avec le programme auxiliaire n°1. Les modules d’élasticité et la résistance à la flexion ont été mesurés à l’aide de tests en flexion troispoints et quatre-points, en utilisant une machine d’essai Instron 1114 avec une vitesse de traverse de 0.5 mm/min. Pour étudier l’effet de la post-polymérisation sur les résines composites de laboratoire, 6 échantillons post-polymérisés ont été mesurés en flexion trois-points, une heure après leur fabrication. Leur module et leur résistance à la flexion ont été comparés à ceux d’échantillons non post-polymérisés, ayant été conservés à sec à 37°C. Pour étudier le renforcement par les fibres 6 échantillons ont été conservés pendant 24 heures et 7 jours dans de l’eau à 37°C. Ils ont ensuite été testés en flexion quatre points. La teneur en fibres et en charges minérales des échantillons a été déterminée après calcination des échantillons à 700°C pendant 1 heure. Les résultats obtenus ont été analysés au moyen d’une analyse de variance ANOVA à deux facteurs suivie d’un test LSD avec p<0.05. RÉSULTATS Le module d’élasticité en flexion E (GPa) et la résistance à la flexion (MPa) mesurés sont présentés dans les Tableaux 1 et 2. Résine Cristobal+ Synfony E (GPa) Sans post-polym. 2.7 ± 0.3 0.4 ± 0.04 Post-polymérisé 10 ± 0.2 5.5 ± 0.7 Résistance (MPa) Sans post-polym. 57 ± 2 32 ± 2 Post-polymérisé 89 ± 5 119 ± 3 Tableau 1 : Modules d’élasticité et résistance à la flexion trois-points obtenus pour les composites de laboratoire avec et sans post-polymérisation. E (GPa) Sans fibres Avec fibres 24h 7j 24h 7j Cristobal 11.6±2.1 17.8±4.6 14.4±4.5 12.9±7.2 Sinphony 6.1±0.05 6.0±0.9 14.1±1.1 8.8±1.0 Flx (MPa) Sans fibres Avec fibres 24h 7j 24h 7j 93±17 106±20 307±87 227±34 109±10 108±12 350±3 308±60 Tableau 2 : Modules d’élasticité et résistance à la flexion quatre-points obtenus pour les composites de laboratoire après vieillissement dans l’eau à 37°C pendant 24 heures et 7 jours. L’analyse de variance à deux facteurs montre que la post-polymérisation augmente de manière significative le module d’élasticité et la résistance à la flexion des deux résines composites de laboratoire. Il existe également des différences significatives entre les deux composites de laboratoire. Après post-polymérisation, Synfony présente un module d’élasticité plus faible et une résistance à la flexion supérieure à celle de Cristobal+. L’analyse de variance montre également une augmentation significative de la résistance à la flexion pour les échantillons contenant des fibres (p<0.05). Sur cette propriété, le temps de vieillissement n’a pas d’influence significative. Le module d’élasticité des échantillons de Cristobal + n’est pas influencé significativement ni par la présence de fibres de verre, ni par le temps 63 J. KOSORIC, M. CATTANI-LORENTE, CH. GODIN & J-M. MEYER Effets du renforcement à l’aide de fibres de verre et de la post-polymérisation sur les propriétés mécaniques de deux résines composites de laboratoire et une résine composite provisoire de vieillissement. Par contre, le module d’élasticité des échantillons à base de Sinfony augmente significativement lorsque des fibres de verre y sont incorporées. La teneur en charges minérales (particules de verre) et en fibres a été déterminée par calcination à 700° et exprimée en pourcentage par rapport au poids total des échantillons. Les résultats obtenus sont donnés dans la Table 3. Composite Cristobal+ Sinfony Sans fibres % charge (poids) 73.2 ± 0.1 42.3 ± 2.5 Avec fibres % charge (poids) 55.1 ± 3.4 29.3 ± 9.3 % fibres (poids) 18.2 ± 3.0 22.2 ± 6.9 Table 3 : Teneur en charges minérales (particules de verre) et en fibres Des relations linéaires entre les propriétés mécaniques et le pourcentage de fibres et de charge minérale (particules de verre) ont été établies (Figure 1). Figure 1 : Relations linéaires entre les propriétés mécaniques et le pourcentage de fibres et de charge minétale. Pour Cristobal+, le module d’élasticité ne dépend que de la teneur en fibre, mais la corrélation obtenue (a) est modérée (r : 0.57) et n’est pas statistiquement significative (p<0.1). Pour Sinfony, le module dépend simultanément de la teneur en fibres et de la teneur en particules (p<0.1). Cependant pour un intervalle de confiance plus élevé, ce terme ne dépend que de la teneur en fibres (b) et, dans ce cas, il existe entre ces deux paramètres une forte corrélation (r : 0.92) statistiquement significative (p<0.01). 64 J. KOSORIC, M. CATTANI-LORENTE, CH. GODIN & J-M. MEYER Effets du renforcement à l’aide de fibres de verre et de la post-polymérisation sur les propriétés mécaniques de deux résines composites de laboratoire et une résine composite provisoire DISCUSSION Avec la post-polymérisation on atteint rapidement les valeurs maximales des modules d’élasticité et des résistances à la flexion et ceci pour les deux composites de laboratoire utilisées. La chaleur a pour effet d’accélérer la réaction de polymérisation des composites en augmentant la mobilité des molécules qui y participent. Par contre, la post-polymérisation n’influence pas le degré de conversion final obtenu, et ceci se traduit par des propriétés mécaniques équivalentes après 1 heure pour les échantillons post-polymérisés et après 24h pour les échantillons n’ayant pas été post-polymérisés. Ces résultats sont conformes à ceux obtenus par Ferracane. Les propriétés mécaniques de Sinfony sont inférieures à celles de Cristobal+. Ceci est probablement dû à une teneur en charge minérale plus faible pour cette résine. Il est évident que les fibres renforcent les résines composites de laboratoire, puisqu’une augmentation significative de la résistance à la flexion a été observée pour les deux résines étudiées. Lorsqu’on utilise Sinfony, on observe également une augmentation du module d’élasticité. Ceci n’est pas le cas pour Cristobal+. Le module d’élasticité d’un composite dépend des modules d’élasticité des éléments qui le composent. Par conséquent on peut écrire : Ecomposite ÷ Vrésine*Erésine + Vparticules*Eparticules + Vfibres*Efibres Des relations linéaires entre le module d’élasticité et la teneur en fibres et en particules de verre des échantillons ont été établies. La teneur en charge minérale a été exprimée en pourcentage de poids car ce paramètre est plus facile à mesurer. Une forte corrélation existe entre les modules d'élasticité des échantillons fabriqués avec Sinfony et leur teneur en fibres. Pour ces échantillons la teneur en fibres représente la moitié de la charge minérale totale. La relation existante entre les modules d’élasticité des échantillons fabriqués avec Cristobal+ et leur teneur en fibres est faible et n’est pas statistiquement significative. Probablement la quantité de fibres incorporée dans les échantillons n’est pas suffisante pour observer un effet sur le module d’élasticité, puisqu’elle correspond en moyenne à 25 % de la charge minérale totale. CONCLUSIONS Avec une post-polymérisation par la chaleur, les propriétés mécaniques maximales des résines composites de laboratoire sont développées plus vite. Il faut au moins 24 heures pour que des échantillons non-post-polymérisés atteignent des propriétés mécaniques équivalentes à celles des échantillons post-polymérisés. Les fibres de verre renforcent les résines composites de laboratoire même si elles ne sont pas préimprégnées. Cependant la rigidité du composite obtenu dépend principalement de la nature de la résine. Ainsi la présence de fibres n’influence pas le module d’élasticité de Cristobal+, parce que cette résine est très chargée et que le volume de fibres incorporées dans les échantillons ne représente que 25 % de la charge minérale. 65 J. KOSORIC, M. CATTANI-LORENTE, CH. GODIN & J-M. MEYER Effets du renforcement à l’aide de fibres de verre et de la post-polymérisation sur les propriétés mécaniques de deux résines composites de laboratoire et une résine composite provisoire RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1 Smith DC, Recente developements and prospects in dental polymer. J Prosthet Dent 1962 ; 12 :1066 2 Schreiber CK. Polymethacrylate reinforced with carbon fibers. Br Dent J 137 : 21-22 (1971) 3 Manley TR, Bowman AJ, Cook M (1979). Denture bases reinforced with carbon fibers. Br Dent J 146 : 25 4 Grave AMH, Chandler HD, Wolfaardt JF (1985) Denture base acrylic reinforced with high modulus fibre. Dent mater 1 : 185-187 5 Vallittu PK.(1999) Flexural properties of acrylic resin polymers reinforced with unidirectional and woven glass fibers. J Prosthet Dent 81 : 318-26 6 Zanghellini G. Fiber-reinforced framework and ceromer restorations : a technical review. 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PANIGHI (1) (1)- Laboratoire de Physique des Matériaux - Nancy UMR CNRS 7556 (2)- Laboratoire de Chimie du Solide Minéral - Nancy UMR CNRS 7555 OBJECTIFS Évaluer l’absorption d’eau et la solubilité de deux résines composites, d’un ormocer (organically modified ceramic), d’un compomère et de leurs adhésifs ainsi que d’un verre ionomère modifié à la résine (VIMR). MATÉRIAUX, MATÉRIELS ET MÉTHODES Les matériaux et adhésifs testés sont : le Filtek P60 (résine composite) et le Scotchbond 1 ; le Solitaire 2 (résine composite) et le Gluma One Bond ; l’Admira (ormocer) et l’Admira Bond ; le Compoglass F (compomère) et l’Excite ainsi que le Fuji II LC (VIMR). Cinq disques de chaque matériau et de chaque adhésif sont réalisés selon les recommandations de la norme ISO 4049 (12/1998) (figure 1) à l’aide d’un moule en poly-tétra-fluoro-éthylène de 15 mm de diamètre et de 1 mm d’épaisseur. Les disques sont photo-polymérisés (lampe 3M Curing XL 3 000®) 200 secondes en neuf points différents par face puis soumis à une première dessiccation à 37°C dans un dessiccateur accompagnés de silice. Les disques sont pesés quotidiennement à l’aide d’une balance électronique (Denver Instruments M-120®). Lorsque la masse demeure constante (à ± 1µg près), celle-ci est relevée et notée m1. Les disques sont alors mesurés avec un pied à coulisse électronique (Mitutoyo 500181U®) et leur volume v est calculé. Puis suit une étape d’immersion durant 168 heures dans 40 ml d’eau distillée par disque à 37°C à l’issue desquelles la masse m2 est notée. Enfin une nouvelle étape de dessiccation dans les mêmes conditions que la première est menée jusqu’à obtention d’une masse m3 constante. L’absorption d’eau est calculée avec la formule (m2 – m3) / v tandis que la solubilité est calculée avec la formule (m1 – m3) / v. Figure 1 : Étapes de la procédure ISO 4049 Les résultats sont analysés statistiquement par des tests de Kruskal-Wallis suivis de tests multiples de comparaison deux à deux ajustés par Bonferroni. 67 E. MORTIER, D. GERDOLLE, B. JACQUOT & M. PANIGHI Absorption d’eau et solubilité de cinq matériaux de restauration à base de résine et de leurs adhésifs RÉSULTATS Absorption d’eau et solubilité moyennes (écart-type) en µg.mm-3 (n=5) matériau absorption solubilité adhésif absorption solubilité Admira 23,3 (0,8) a 1,2 (0,3) a Admira Bond 106,2 (15,2) a 82,2 (20,8) a Compoglass F 31,5 (3,2) a 10,0 (2,1) b Excite 273,4 (66,1) b 144,5 (32,8) b a c Filtek P60 19,2 (1,0) 2,4 (1,1) Scotchbond 1 355,4 (29,7) c 133,6 (12,6) b a c Solitaire 2 20,2 (0,4) 4,9 (0,7) Gluma One Bond 77,4 (19,0) a 75,9 (13,0) a b b Fuji II LC 167,5 (12,4) 8,3 (0,8) sans adhésif (dans chaque colonne, des exposants identiques indiquent des résultats non statistiquement différents) DISCUSSION L’absorption d’eau et la solubilité sont des propriétés des matériaux d’obturation que l’on ne peut négliger. La solubilité intervient dans la dégradation des restaurations et dans leur biocompatibilité du fait de la libération de différentes espèces chimiques. L’absorption d’eau engendre des variations dimensionnelles, des altérations des propriétés mécaniques (Cattani-Lorente et coll., 1999 ; Musanje et coll, 2001) et des colorations internes. Aussi ces propriétés sont-elles intéressantes à quantifier puisqu’elles participent pleinement à l’évaluation de l’aptitude clinique du matériau. L’expérimentation montre une absorption d’eau significativement supérieure pour le Fuji II LC expliquée surtout par le caractère hydrophile des VIMR. L’eau est en effet susceptible d’être absorbée d’une part du fait de la présence des groupes carboxyles réactifs et d’autre part par les nombreux groupes hydrophiles fonctionnels du réseau d’HEMA (Yap, 1996 ; Kanchanavasita et coll., 1997 ; Yap et Lee, 1997). Le compomère est le produit qui après le VIMR absorbe le plus d’eau avec une valeur moyenne néanmoins nettement inférieure ; viennent ensuite par ordre décroissant l’ormocer et les deux résines composites. Bien qu’il soit du point de vue chimique quelque peu inexact de vouloir comparer ces mesures du fait de la différence majeure d’hydrophilie / hydrophobie entre ces produits, il apparaît que la capacité d’absorption d’eau est proportionnelle à l’importance de la réaction acidobasique dans les phénomènes de prise (Iwami et coll., 1998). Le compomère, initialement anhydre, connaît une réaction acido-basique secondaire expliquant sans doute cette absorption. Les composites et l’ormocer étant dépourvus d’une telle réaction, les différences entre ces matériaux peuvent s’expliquer de différentes manières. Le taux de charges est un élément prépondérant : plus un matériau est chargé, plus petit est son volume matriciel, moins il peut absorber. Par ailleurs, l’hydrophobie relativement plus importante des monomères constituants est aussi un paramètre important (Oysaed et Ruyter, 1986). Le P60 contient des Bis-EMA qui ne présentent pas de groupements hydroxyles disponibles sur les chaînes polymères principales lui confèrent une nature « encore plus hydrophobe » (Yap et coll., 2000). De plus, la nature et la qualité des liens entre les charges et la matrice importent également : en effet une éventuelle adhésion limitée entre ces éléments peut déterminer des voies de diffusion capillaires acheminant et logeant l’eau (Kalachandra, 1989 ; Feilzer et coll., 1990). Certains auteurs indiquent aussi l’influence de bulles accidentellement incluses dans l’obturation comme libérant un volume potentiel d’absorption (Oysaed et Ruyter, 1986). Nos résultats de l’étude de la solubilité vont dans le sens de ce qui est retrouvé dans la littérature : les résines composites se solubilisent moins que les VIMR et les compomères (Iwami et coll., 1998). On relève que le P60 présente une solubilité deux fois moins importante que celle du Solitaire 2. Ici encore, le taux de charges, leurs natures et leurs liens avec la matrice jouent un rôle essentiel. Le P60 ne contient que des charges ZrSiO4 tandis que le Solitaire 2 contient essentiellement des charges de verre Ba-Al-B-F-silicate dont on sait qu’elles sont susceptibles de se solubiliser plus (Soderholm, 1990). Les éléments comme le baryum ajoutés pour augmenter la radio-opacité du matériau se solubilisent également aisément (Oysaed et Ruyter, 1986). Cela étant, si le réseau de polymères entourant les 68 E. MORTIER, D. GERDOLLE, B. JACQUOT & M. PANIGHI Absorption d’eau et solubilité de cinq matériaux de restauration à base de résine et de leurs adhésifs charges joue efficacement son rôle protecteur, la solubilité théorique de ces éléments ne se traduit pas par une perte de masse du matériau. En conséquence, un autre facteur déterminant de la solubilité d’une résine composite est le taux de conversion des monomères : un taux plus faible favorise la solubilité (Pearson et Longman, 1989 ; Yap et Lee, 1997, Palmer et coll., 1999). Le corollaire immédiat de cette remarque est l’importance de la présence de bulles qui, emprisonnant de l’oxygène qui inhibe la polymérisation, diminuent le taux de conversion et facilitent la solubilité. L’Admira est un matériau à base d’ormocers. On peut schématiquement décrire ce type de produit comme étant constitué d’une charpente inorganique SiO2 recroquevillée en pelote sur laquelle sont greffées des unités organiques polymérisables. Des charges sont incorporées dans cette structure ainsi que de la matrice résineuse en faible proportion. La faible solubilité de l’Admira peut sans doute s’expliquer par la structure tridimensionnelle complexe pré-établie des ormocers assurant, comme évoqué plus haut, un rôle protecteur vis-à-vis des charges ou des monomères résiduels. Le Compoglass F et le Fuji II LC sont les matériaux présentant la plus haute solubilité. Qu’il s’agisse de VIMR ou de compomères, la solubilité, dans une certaine mesure, fait partie des qualités requises : ces matériaux constituent un réservoir de fluorures à visée cariostatique potentiellement libérables selon les conditions dans lesquelles ils se trouvent. La libération de fluorures est le fait de l’attaque acide initiale sur les charges de verre fluoro-silicate. Les quantités libérées sont maximales durant la première semaine pour décroître significativement à 6 mois (Frield et coll., 1997). Les VIMR sont aptes à se recharger au cours d’applications topiques de fluorures. La réaction acide-base des compomères n’apparaissant que secondairement, la libération de fluorures est significativement plus faible, même si, selon les fabricants, des particules de petites tailles du type des trifluorures d’ytterbium présentes dans le Compoglass F seraient capables de la majorer. Nous avons évalué l’absorption et la solubilité des adhésifs utilisés en association avec les matériaux d’obturation. En effet, la détermination de la capacité d’absorption et de solubilisation des produits de restauration avec à l’esprit une volonté d’éclairage sur leur comportement clinique perd une part essentielle de son intérêt si l’on ne considère pas le couple matériau / adhésif. Les adhésifs amélodentinaires, constitués de monomères résineux, contiennent peu ou pas de charges, le tout se trouvant dans un solvant. Pour surpasser le problème de l’hydrophobie des résines incompatible avec la dentine intrinsèquement humide, soit des monomères résineux modifiés de façon à être amphiphiles, soit des monomères hydrophiles de type HEMA ont été ajoutés. De ce fait, les adhésifs sont aptes à absorber des quantités importantes d’eau. Dans notre étude, nous notons effectivement de très hautes valeurs d’absorption d’eau. Tous les produits contenant de l’HEMA, c’est vraisemblablement la différence de proportion entre les monomères hydrophiles et les monomères hydrophobes qui explique la fourchette large des valeurs relevées. Cette information n’est malheureusement pas disponible auprès des fabricants. Seul le Gluma One Bond, présentant la plus faible des mesures d’absorption, est décrit comme contenant un ratio HEMA / UDMA = 40 / 60. Par ailleurs, le Gluma est le seul adhésif contenant de l'acide 4-META (10 % de son poids) connu pour être amphiphile. On peut penser que les autres produits contiennent proportionnellement plus d’HEMA. Le Scotchbond 1 qui présente la valeur d’absorption la plus élevée est le seul à contenir de l’eau parmi ses solvants, signant sans doute un caractère hydrophile global plus affirmé. Par ailleurs, tous les produits comportent des solvants de type éthanol ou acétone, qui, éliminés par la dessiccation initiale, engendrent vraisemblablement la libération de volumes disponibles pour l’absorption d’eau distillée. Là encore les proportions inconnues sont sans doute à l’origine des variations relevées entre les adhésifs. On remarque qu’Excite, seul produit à contenir des charges, ne présente pas de capacité d’absorption plus faible. La quantité minime de silice dispersée (0,5 % du poids) en est l’explication plausible. La solubilité mesurée est également élevée pour l’ensemble des différents adhésifs. La composition du mélange initial est de nature à ne pas favoriser une structure polymère aboutie, laissant de nombreux monomères non convertis potentiellement solubles. Mis à part le Gluma One Bond, il est remarquable de noter que les valeurs de la solubilité n’atteignent pas les valeurs de l’absorption d’eau : l’expansion hygroscopique engendrée n’est pas potentiellement compensée par une perte de volume liée à la solubilisation. 69 E. MORTIER, D. GERDOLLE, B. JACQUOT & M. PANIGHI Absorption d’eau et solubilité de cinq matériaux de restauration à base de résine et de leurs adhésifs CONCLUSIONS • Les matériaux à base de résine n’ont pas le même comportement vis-à-vis de l’eau en fonction de leur famille d’appartenance. Les composites (P60 et Solitaire 2) présentent l’absorption la plus faible suivis de l’ormocer (Admira). Le VIMR montre des valeurs d’absorption d’eau significativement supérieures. L’ormocer a la solubilité la plus faible suivi des deux composites. • La proportion élevée de monomères hydrophiles (ou amphiphiles) dans les adhésifs est à l’origine des hautes valeurs d’absorption d’eau. L’absence ou la très faible proportion de charges dans les adhésifs augmente cette capacité. La solubilité des adhésifs est inférieure en valeur absolue à l’absorption. Les mouvements de fluides associant la solubilisation à l’absorption sont potentiellement responsables de l’endommagement des interfaces collées. • Il s’avère que les valeurs d’absorption / solubilité des seuls matériaux de restauration sont insuffisantes pour rendre compte des phénomènes interfaciaux. L’expérimentation présente montre que les adhésifs contribuent de manière importante à ces phénomènes. La détermination de la capacité d’absorption et de solubilisation des produits de restauration avec une volonté d’éclairage sur leur comportement clinique perd une part essentielle de son intérêt si l’on ne considère pas le couple matériau / adhésif. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES CATTANI- LORENTE MA, DUPUIS V, PAYA N J, MOYA F, MEYER J.-M. Effect of water on the physical properties of resinmodified glass-ionomer cements. Dent Mater, 15 : 71- 8, 1999 FEILZER AJ, DE GEE AJ, DAVIDSON CL. Relaxation of polymerization contraction stress by hygroscopic expansion. J Dent Res, 1 :36- 39, 1990 FRIELD KH, SCHMALZ G, HILLER KA, SHAMS M. Resin-modified glass ionomer cements : fluoride release and influence on Streptocoque Mutans growth. J Oral Sci, 105 : 81- 5, 1997 IWAMI Y, YAMAMOTO H, SATO W, KAWAI K, TORII M, EBISU S. Weight change of various light- cured restorative materials after water immersion. Operative Dentistry, 23 : 132- 7, 1998 KALACHANDRA S. 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Cette action s'exerce de deux manières : - pendant l'amélogénèse, l'apport de fluor par voie systémique (eau de boisson fluorée, sel, lait, farines… fluorés, prescriptions médicamenteuses) à la bonne dose (0,05 mg/Kg/jour selon les recommandations de l'O.M.S.) induit la formation au sein des cristaux d'apatite de l'émail, de fluoroapatite. Leur solubilité se situe autour de pH 4,6, alors que celle de l'hydroxyapatite débute à pH 5,5. - après l'émergence des dents, surtout pendant la phase de maturation de l'émail (caractérisée par l'élimination de la majeure partie des protéines matricielles qui induisent des porosités au sein de l'émail), mais aussi tout au long de la vie de la dent en contact permanent avec le milieu salivaire et bactérien, l'action topique du fluor devient essentielle : lors des phénomènes de déminéralisationreminéralisation de la surface amélaire, le fluor peut s'incorporer à l'émail, le rendant ainsi moins soluble en milieu acide. Le relargage des ions fluorures a également une action enzymatique antibactérienne, augmentant l'action cario-prophylactique du fluor. Face à des situations cliniques particulières où le risque carieux est accru (puits et fissures chez le jeune enfant, collage de verrous orthodontiques chez l'adolescent, lésions carieuses radiculaires des personnes âgées) de nombreux fabricants ont été amenés à incorporer des ions fluor au sein des matériaux de collage ou de restauration. Kawai K., Tantbirojn D., Kamalawat A.S. et coll. (6) ont étudié en 1998 la libération du fluor contenu dans trois composites et ont noté que la quantité de fluor diffusé augmentait rapidement pendant 48 h, puis diminuait jusqu'à atteindre un plateau. Hicks J., Flaitz C.M., Garcia-Godoy F.,(4) en 2000, comparent un sealant relargant du fluor à un sealant traditionnel lors de la formation in vitro de lésions carieuses, et constatent que l'apparition des caries est moins importante lors de l'utilisation d'un sealant contenant du fluor. Eronat N., Kocatas N., et Alpöz A. R.(1) réalisent en 1999 une étude comparative sur l'incorporation du fluor au niveau de l'émail : les verres ionomères semblent assurer un apport de fluor au niveau de l'émail de dents permanentes supérieur à celui apporté par des agents de liaison amélo-dentinaires chargés en fluor. OBJECTIFS Quantifier les ions captés par l’émail mis en contact avec des CVI lors du collage de verrous orthodontiques. Dans une précédente étude, LAVERNHE P., GREGOIRE G., MILLAS A., ESCABASSE A., SHARROCK P. (7) ont mis en évidence la migration à la surface de l’émail d’ions strontium et fluor. À cause des variations naturelles de concentration de fluor dans l’émail, il n’a pas été possible de déterminer statistiquement la différence entre les dents traitées par le CVI et les dents témoins. La première partie de l'étude vise à valider le protocole ; la deuxième partie compare la concentration de fluor dans l'émail en contact avec un CVI pendant des durées de 48 heures, 7 jours et 30 jours. 71 B. TERRIÉ, P. SHARROCK, & G. GRÉGOIRE Captation par l’émail humain d’ions fluorures relargués par des CVI : Étude in vitro MATÉRIEL ET MÉTHODES Pour la première partie de l'étude, 30 prémolaires saines extraites pour des raisons orthodontiques chez des enfants de 11 à 14 ans sont réparties aléatoirement en trois groupes A, B et C. L’émail vestibulaire et lingual de chaque dent est prélevé par section au disque diamanté (Komet réf.919.104.220). La dentine est éliminée par usure au moyen d’un instrument diamanté (Komet réf.6368.314.023). Les coquilles d’émail obtenues sont réduites en poudre par fragmentation à haute pression (Presse EUROLABO-10 tonnes) à température ambiante, puis tamisées pour obtenir une poudre de granulométrie connue (entre 100 et 250 micromètres). Cette poudre permet l’analyse globale de l’émail (calcium, strontium et fluor). Pour chaque dent, 100 mg de poudre d’émail vestibulaire sont immergés dans une solution fluorée : solution à 10 ppm pour le groupe A, 100 ppm pour le groupe B et 1000 ppm pour le groupe C. La solution fluorée est éliminée au bout d’une, deux et trois semaines, la poudre est ensuite dissoute dans une solution d’acide nitrique à 50 %. Pour la deuxième partie de l'étude, des verrous orthodontiques ont été collés avec un CVI (Fujiortho LC II - GC, TOKYO, JAPAN) sur la face vestibulaire de 30 autres prémolaires saines extraites pour des raisons orthodontiques chez des enfants de 11 à 14 ans. Les racines sont vernies et les dents conservées dans de la chloramine à 1 % pendant 48 heures, 7 jours, 30 jours. Les verrous sont déposés et le CVI éliminé par polissage. Les fragments d’émail vestibulaire (en contact avec le CVI) et d’émail lingual (témoin) sont prélevés, chaque fragment est pesé à l'aide d'une balance de précision 0,00001. Le morceau d'émail est dissout dans 1 ml de solution d'acide nitrique à 70 %. Une fois dissout, on neutralise par 1 ml d'une solution de NaOH à 30 %, puis on ramène le pH à 5 en ajoutant 1 ml de tampon TAFIC. On rajoute enfin 7 ml d'eau pure (c’est-à-dire totalement dépourvue d'ions afin de ne pas fausser les mesures) pour obtenir un volume total de solution à analyser de 10 ml. La quantité de fluor contenu dans l’émail est déterminée par ionométrie au moyen d’une électrode à membrane sélective spécifique “fluor” (membrane type PF4-L dont la limite de détection est de 10-7 mol/l. - ION METER LPH 530T, TACUSSEL). Avant chaque série de mesures, l'électrode est étalonnée par des solutions de concentrations connues de 0.05, 0.1, 1, 10, 20, 100 et 1 000 ppm. Après quelques minutes nécessaires à la stabilisation du courant, celui-ci peut être lu directement en mV sur l'écran du ionomètre, et permet de calculer la concentration de l'élément fluor. 72 B. TERRIÉ, P. SHARROCK, & G. GRÉGOIRE Captation par l’émail humain d’ions fluorures relargués par des CVI : Étude in vitro RÉSULTATS Les résultats de la première expérimentation montrent (tableau 1) que la quantité de F- adsorbée par 100 mg d’émail est à peu près identique pour un vieillissement de 7 jours et 21 jours pour des concentrations de 10 ppm et 100 ppm mais pour des concentrations élevées (1 000 ppm) la quantité de F-adsorbée par l’émail augmente avec le vieillissement. Tableau 1 : Quantité de Fluor absorbé sur 100 mg d’émail Les résultats de la deuxième expérimentation montrent un accroissement de la concentration en fluor dans l'émail en contact avec le CVI de collage. La captation du fluor est variable d'une dent à l'autre. Elle paraît importante dans les premières 48 heures et au bout de 7 jours (Tableaux 2 et 3). La différence entre les échantillons et leur témoin semble plus faible à un mois (Tableaux 4 et 5). Tableau 2 : Teneur en Fluor de l’émail en contact avec un CVI pendant 48 h Tableau 3 : Teneur en Fluor de l’émail en contact avec un CVI pendant 7 jours 73 B. TERRIÉ, P. SHARROCK, & G. GRÉGOIRE Captation par l’émail humain d’ions fluorures relargués par des CVI : Étude in vitro Tableau 4 : Teneur en Fluor de l’émail en contact avec un CVI pendant 1 mois Tableau 5 : Moyenne des concentrations en Fluor de l’émail en contact avec un CVI DISCUSSION L'étude se poursuit par un dosage dans les mêmes conditions à 90 jours, et permettra de mieux préciser la cinétique de captation du fluor par l'émail humain mis en contact direct avec un CVI. D'autres études sont nécessaires pour vérifier qu'il n'y a pas de relargage secondaire du fluor soit vers la solution où chaque échantillon est conservé, soit vers la dentine. D'autres techniques d'analyses chimiques sont envisagées : l'absorption atomique de flamme donne un pic nitrates qui masque le pic fluor ; l'électrophorèse capillaire est quant à elle rendue difficile par la viscosité de la solution à analyser. 74 B. TERRIÉ, P. SHARROCK, & G. GRÉGOIRE Captation par l’émail humain d’ions fluorures relargués par des CVI : Étude in vitro RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1- ERONAT N., KOCATAS N., ALPÖZ A.R. : A comparative study of fluoride uptake from dentin bonding agents and glass-ionomer cements in permanent and primary tooth enamel. Quintessence International vol 13, 7, 496-500 1999. 2- GANSS C., KLIMEK J., SCHÄFFER U., SPALL T. : Effectiveness of two fluoridation measures on erosion progression in human enamel and dentine in vitro. Caries Research 35 : 325-330, 2001. 3- GLASSPOOLE E.A., ERICKSON R.L., DAVIDSON C.L. : Demineralization of enamel in relation to the fluoride release of materials. American Journal of Dentistry, vol. 14, N° 1 : 8-12, February, 2001. 4- HICKS J., FLAITZ C.M., GARCIA-GODOY F. : Fluoride-releasing sealant and caries-like enamel lesion formation in vitro. 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Caries Research 35 : 45-51, 2001. 9- TAKAGI S., LIAO H., CHOW L.C. : Effect of tooth-bound fluoride on enamel demineralization / remineralization in vitro. Caries Research 34 : 281-288, 2000. 10- TRILLER M., SOMMERMATER J., CLERGEAU-GUERITHAULT S. - Fluor et prévention de la carie dentaire, éd. Masson 1992. 75 B. TERRIÉ, P. SHARROCK, & G. GRÉGOIRE Biomatériaux injectables : rhéologie et applications odontologiques en site osseux I. KHAIROUN (1), P. WEISS (1), G. DACULSI (1), A. JEAN (1) & J-M BOULER (1) (1) INSERM 99-03, Faculté de Chirurgie Dentaire, Nantes INTRODUCTION En chirurgie de reconstruction orthopédique ou maxillo-faciale, face à un défaut osseux, le chirurgien peut avoir recours soit à des greffes (auto, allo, xénogreffes), soit à des matériaux de substitution. Cependant, en cas de greffe, des inconvénients tels que les risques de rejet doivent être pris en compte. Avec l’utilisation des biomatériaux de substitution (suspensions ou ciments phosphocalciques de phosphates de calcium), la reconstitution des lésions osseuses a connu un essor considérable 1-5. Ces composés ont permis de limiter les problèmes d’intolérance posés par les greffes osseuses. Utilisés en chirurgie humaine, ils ont pour vocation d’interagir avec les systèmes biologiques afin de restaurer ou d’améliorer leur performance. Pour éviter tout phénomène de rejet par l’organisme, ces biomatériaux doivent être avant tout biocompatibles. De plus, ils doivent satisfaire à des propriétés physicochimiques appropriées au site d’implantation, c’est-à-dire des propriétés plus proches possibles de celles du tissu osseux ou du moins correspondant à l’emploi que l’on attend d’eux. Les matériaux injectables à usage biomédical présentent des caractères communs (composition et propriétés physiques) avec des matériaux industriels, tels les ciments, les barbotines et les céramiques. Ces similitudes suggèrent d’utiliser les concepts et technologies déjà bien établis dans les industries cimentières et céramiques pour développer de nouveaux biomatériaux. L’objectif de cette communication est de définir les caractères généraux des matériaux injectables, de montrer comment ces caractères sont influencés par la nature et les caractéristiques de leurs constituants, et enfin d’indiquer les voies ouvertes par les manipulations de ces caractéristiques pour la conception et le développement de nouveaux biomatériaux injectables. FONCTIONS ET CARACTÈRES D’UN BIOMATÉRIAU OSSEUX INJECTABLE La conception d’un nouveau biomatériau injectable nécessite d’abord la définition précise de ses fonctions. Celles-ci devront être traduites en termes de propriétés physiques, chimiques et biologiques souhaitées pour le matériau considéré. La tâche de l’ingénieur sera alors de chercher les meilleures combinaisons possibles de ces matières et d’optimiser leurs conditions de mise en forme. Un biomatériau injectable peut répondre à divers besoins cliniques, tels que le comblement temporaire ou définitif d’un défaut osseux, le renforcement de l’os, la reconstitution du tissu osseux, ou encore l’introduction de substances médicamenteuses. Il est souhaitable que plusieurs de ces fonctions soient remplies par un seul matériau. La biofonctionnalité du matériau est assurée par un ensemble de caractères physiques et chimiques du matériau en place, tels que la porosité, les propriétés mécaniques, réactivité chimique (solubilité, résorption in vivo) et ostéogénicité (aptitude à favoriser la repousse osseuse). 76 I. KHAIROUN, P. WEISS, G. DACULSI, A. JEAN & J-M BOULER Biomatériaux injectables : rhéologie et applications odontologiques en site osseux CONSTITUANTS DES BIOMATÉRIAUX INJECTABLES Les matériaux injectables sont en général composés d’une charge minérale dispersée dans un solvant (eau ou solvant organique) ; on y ajoute diverses substances, le plus souvent organiques (surfactants, liant et plastifiant), afin de contrôler la stabilité, la consistance et les propriétés mécaniques finales du mélange. charge minérale : c’est le constituant principal du matériau. Sa nature chimique dépend de l’application envisagée : si la repousse osseuse est souhaitée, les orthophosphates de calcium seront généralement indiqués. La charge minérale est caractérisée par sa microstructure, qui comprend la morphologie des grains et leur granulométrie : celle-ci pourra affecter de manière déterminante l’injectabilité et les propriétés finales du matériau. phase liquide vectrice : elle sert de véhicule à la charge minérale pendant l’injection, et confère au matériau la fluidité nécessaire. Dans le cas de ciments phosphocalciques, la phase liquide joue le rôle de milieu réactionnel permettant la dissolution (lente ou rapide) des réactifs de départ, jusqu’à sursaturation de la solution en produit intermédiaire ou final, moins soluble que les réactifs de départ, qui va précipiter. RHÉOLOGIE DES MATÉRIAUX INJECTABLES La rhéologie est la science qui s’intéresse aux déformations de la matière sous l’effet de contraintes mécaniques. Des caractères tels que la fluidité, la viscosité, la plasticité et le seuil de déformation plastique des matériaux relèvent de la rhéologie. Pour pouvoir être injecté ou moulé, un matériau doit présenter un comportement rhéologique adéquat, qui dépendra de nombreux facteurs tels que le rapport solide / liquide, la composition du liquide (nature du solvant, concentration en liants et surfactants), mais aussi des caractéristiques géométriques des particules en suspension (morphologie, granulométrie) 6-7. D’une manière générale, le comportement rhéologique d’un mélange poudreliquide varie en fonction de la quantité de liquide ajouté. Pour des volumes liquides faibles, le mélange ne présente aucune cohésion ; à partir d’un certain volume, appelé limite plastique, le mélange devient cohérent, et se déforme plastiquement au-delà d’un certain seuil de contrainte (consistance de la pâte à modeler) ; au-delà de cette limite, l’augmentation du volume de liquide assoupli progressivement la pâte, jusqu’à ce qu’elle prenne la consistance d’un fluide : on atteint alors la limite liquide du matériau. Les limites plastique et liquide, ainsi que l’intervalle de plasticité sont les caractéristiques importantes d’un système poudre-liquide. Elles sont très sensibles aux caractéristiques géométriques de la poudre et à son interaction avec le milieu dispersant. CONCLUSION Le développement de nouveaux biomatériaux injectables est un processus complexe. Le comportement et les propriétés finales d’un tel matériau résultent de l’interaction de nombreux facteurs physiques et chimiques : il est difficile de les optimiser sans une connaissance profonde des phénomènes mis en jeu. Les matériaux injectables présentent une grande variété de comportements, modifiables en jouant sur les caractéristiques physiques et chimiques de leurs constituants de base, sur leurs proportions et sur les conditions de leur mise en œuvre. La mise au point de biomatériaux injectables répondant à un cahier des charges précis paraît donc faisable sur base des connaissances et des techniques disponibles. 77 I. KHAIROUN, P. WEISS, G. DACULSI, A. JEAN & J-M BOULER Biomatériaux injectables : rhéologie et applications odontologiques en site osseux RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. I Khairon, D Magne, O Gauthier, JM Bouler, E Aguado, G Daculsi, P Weiss. In vitro characterization and in vivo properties of a carbonated apatite bone cement. J Biomed Mater Res. (2002) ; 60(4):633-42. 2. O. Gauthier, JM Bouler, P Weiss, J Bosco, G Daculsi, E Aguado. Kinetic study of bone ingrowth and ceramic resorption associated with the implantation of different injectable calcium-phosphate bone substitutes. J Biomed Mater Res 1999 ; 47:28-35. 3. G Daculsi, P Weiss, JM Bouler, O Gauthier, E Aguado. Biphasic calcium phosphate/hydrosoluble polymer composites : anew concept for bone and dental substitution biomaterials. Bone 1999 ; 25:59S-61S 4. I Khairoun, MG Boltong, FCM Driessens, JA Planell. Compliance of an apatitic calcium phosphate bone cement with clinical requirements and the effect of calcium carbonate. 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MEYER (1) (1) Ecole de Médecine Dentaire, Université de Genève (2) EI.VD, Yverdon-les-Bains, Suisse INTRODUCTION La réaction de polymérisation de la plupart des résines composites est activée par la lumière. L’efficacité de polymérisation est mesurée par le degré de conversion monomère-polymère (DC) [1,2]. L’obtention d’un DC élevé est recherchée, car il existe une corrélation entre ce paramètre et les propriétés mécaniques du composite [3]. Le DC dépend principalement du photo-initiateur et de son efficacité à générer des espèces réactives. La camphroquinone (CQ) est l’initiateur le plus souvent utilisé. Elle peut être employée seule ou combinée à d’autres diones telles que la phénylpropanedione (PPD) ou la butanedione (BD) [4]. Ces molécules absorbent la lumière à des longueurs d’onde différentes. Le maximum du pic d’absorption se situe à 468 nm pour la CQ, à 393 nm pour la PPD et à 418 nm pour la BD. Pour activer ces molécules, il faut donc leur fournir de l’énergie lumineuse dans un domaine de longueur d’onde déterminé. C’est pourquoi les caractéristiques de la source lumineuse influencent l’étendue la réaction de polymérisation des résines composites. L’objectif de cette étude était de caractériser trois sources de lumière et de comparer leur efficacité à polymériser une résine composite. Pour caractériser les sources, l’éclairement énergétique Ee (mW/cm2) a été mesuré. Afin de comparer l’efficacité des lampes, la profondeur de polymérisation et la dureté d’un composite ont été mesurées. MATÉRIEL ET MÉTHODES Les lampes testées étaient : l’ARC plasma Flipo (Lokki), l’halogène Elipar Trilight (3M-ESPE) et la DEL Elipar Freelight (3M-ESPE). L’éclairement énergétique Ee a été mesuré en utilisant un spectrophotomètre à fibre optique (Avantes AVS-USB2000). Deux types de mesures ont été effectués. D’abord, l’éclairement énergétique a été enregistré pour chaque longueur d’onde dans l’intervalle compris entre 350 nm et 600 nm, afin d’obtenir les spectres d’émission des lampes. Ensuite des valeurs globales Ee ont été mesurées pour deux domaines de longueur d’onde : 1) de 350 nm à 600 nm et 2) de 450 nm à 490 nm. Toutes les mesures optiques ont été effectuées dans une chambre noire. Les différentes sources lumineuses ont été placées sur un banc optique faisant face au détecteur du spectrophotomètre. La distance entre la source et le détecteur variait entre 5.2 et 20 cm. Le calibrage du spectrophotomètre a été vérifié en utilisant une source de sodium standard. Des échantillons cylindriques de 4 mm de diamètre et 4 mm de hauteur en composite Surefil (DeTrey/Dentsply) ont été polymérisés dans un moule en PVC opaque. La polymérisation a été effectuée avec des temps d’exposition de 10 s, 20 s et 40 s pour les lampes halogène et DEL et de 1 s, 2 s, 3 s, 5 s et 10 s pour la lampe ARC Plasma. La profondeur de polymérisation Dp a été mesurée avec un micromètre, après avoir éliminé le composite non-polymérisé. Trois échantillons ont été mesurés pour chaque condition expérimentale. Les échantillons ont été ensuite sectionnés parallèlement à l’axe principal, afin de mesurer la dureté à des profondeurs comprises entre 0 mm et 4 mm. La dureté Vickers a été mesurée avec un micro-duromètre Hauser. Pour chaque mesure, cinq indentations ont été effectuées en appliquant une masse de 500 gr. 79 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER Caractérisation et efficacité de trois lampes à polymériser RÉSULTATS Les spectres d’émission des lampes, mesurés à 5,2 cm de la source, sont présentés dans la figure 1. À partir des valeurs globales Ee mesurées à différentes distances de la source, le flux énergétique émis I (W) a été calculé en utilisant l’équation Ee= I/d2 (eq. 1). Pour chaque lampe, la valeur Ee au contact a été calculée en divisant le flux énergétique I par la surface du guide d’onde de la lampe. Ces valeurs sont données dans la tableau 1 pour les deux intervalles de longueur d’onde sélectionnés. Les valeurs Ee[350-600] ont été comparées avec les valeurs fournies par les fabricants (Ee*). Selon le type de lampe, des différences ont été observées. L’énergie E émise par les sources a été calculée en utilisant l’équation E= I.t (eq. 2). Les valeurs d’énergie sont données dans la tableau 2 pour les deux intervalles sélectionnés. L’épaisseur polymérisée Dp est donnée dans la tableau 2, pour chaque condition expérimentale. L’épaisseur maximum polymérisée (~4mm) a été obtenue après une illumination de 10 s avec la lampe ARC plasma et de 20 s avec les lampes halogènes et DEL. La dureté du composite diminue en fonction de l’épaisseur de l’échantillon et du temps d’exposition (Figure 2). Sur une épaisseur de ~1mm, une dureté comparable a été mesurée quel que soit le temps d’exposition et la source lumineuse utilisée. Ee (450-490) 544 297 151 ARC Plasma Halogène DEL Ee (350-600) 1 330 818 177 Ee* 1 600 800 400 Tableau 1 : Valeurs calculées de l’éclairement énergétique Ee (mW/cm2) au contact avec les lampes pour les deux domaines de longueur d’onde sélectionnés. Ee* correspond aux valeurs fournies par les fabricants. ARC Plasma halogène DEL t (s) 1 2 3 5 10 10 20 40 10 20 40 E [350-600] (J) 0.54 1.07 1.61 2.68 5.37 3.1 6.2 12.4 0.75 1.49 2.99 E [450-490] (J) 0.23 0.47 0.7 1.17 2.34 1.39 2.79 5.58 0.65 1.3 2.6 Dp (mm) 2.19 (0.01) a, b 2.34 (0.02) b 2.79 (0.11) c 3.04 (0.16) d 4.17 (0.01) g 3.58 (0.14) f 4.15 (0.02) g 4.17 (0.01) g 3.36 (0.08) e 4.05 (0.02) g 4.17 (0.01) g Tableau 2 : Énergie (J) émise dans les intervalles de longueur d’onde sélectionnés et profondeur de polymérisation Dp (mm) pour chaque condition d’exposition. Une analyse de variance (p<0.05) montre que les valeurs Dp marquées avec la même lettre ne sont pas de différentes. 80 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER Caractérisation et efficacité de trois lampes à polymériser Figure 1 : Spectres des sources lumineuses. L’éclairement énergétique pour chaque longueur d’onde entre 350 nm et 600 nm a été mesuré à 5,2 cm de distance. À cette distance, la valeur Ee globale mesurée dans l’intervalle entre 350 et 600 nm est de 20 mW/cm2 pour la lampe ARC plasma, de 12 mW/cm2 pour la lampe halogène et de 2,8 mW/cm2 pour la lampe DEL. Cette valeur correspond à la surface sous la courbe du spectre lumineux. 81 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER Caractérisation et efficacité de trois lampes à polymériser Figure 2 : Dureté [HVN] en fonction de l’épaisseur (mm). a) lampe ARC Plasma b) lampe halogène c) lampe DEL 82 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER Caractérisation et efficacité de trois lampes à polymériser DISCUSSION Pour caractériser les sources lumineuses, nous avons choisi de mesurer l’éclairement énergétique Ee, qui représente la densité de flux énergétique reçu par une surface unitaire. Idéalement Ee aurait dû être mesurée en contact direct avec la source lumineuse. Pour éviter la saturation du détecteur du spectrophotomètre (4 MW/cm2), nous avons opté pour des mesures à distance. La loi de la distance au carré (eq 1) définit la relation entre l’éclairement énergétique d’une source ponctuelle et la distance à laquelle la mesure est effectuée. Dans ce travail, la distance minimum a été calculée de manière à ce qu’elle soit supérieure à 5 fois le diamètre de la source. Dans ces conditions, les sources peuvent être considérées comme ponctuelles et l’équation 1 peut être appliquée pour calculer la puissance ou flux énergétique I de la lampe. À partir du flux énergétique, les valeurs Ee au contact avec la lampe ont été calculées. Pour la lampe DEL, une différence importante entre la valeur donnée par le fabricant et la valeur calculée Ee(350600) a été observée. Cette divergence n’a pas pu être expliquée de manière satisfaisante. Cependant, le flux énergétique obtenu pour cette lampe est du même ordre de grandeur que ceux mesurés par Parr et Rueggeberg [5] pour d’autres sources DEL commerciales. Dans ce travail, les mêmes conditions expérimentales ont été utilisées pour caractériser les trois sources lumineuses, par conséquent une comparaison entre les paramètres mesurés est possible. Cook [6] a montré que l’épaisseur polymérisée dépend de l’intensité de la lumière incidente, et du temps d’exposition. Pour chaque condition expérimentale, l’énergie E émise par les sources lumineuses a été calculée (eq 2). Deux intervalles de longueur d’onde λ différents ont été considérés. Le premier couvre la totalité des spectres d’émission (350-600 nm). Le deuxième (450-490 nm) correspond au domaine de longueur d’onde où la camphroquinone absorbe plus efficacement la lumière [7]. Le rapport entre E450-490 et l’énergie totale E350-600 est de 85 % pour la lampe DEL, 41 % pour la lampe ARC plasma et 36 % pour la lampe halogène. Une relation a été établie entre la profondeur maximum polymérisée Dp et l’énergie : Dp = a [1-exp(-b Eλ)]. Lorsque l’énergie émise dans l’intervalle 450-490 nm est considérée, il existe une bonne corrélation entre ces deux paramètres (a : 4.06 ; b : 2.08 ; r : 0.88 et se : 0.38). Ceci indique que l’épaisseur de composite polymérisé dépend de la quantité d’énergie absorbée par l’initiateur, plutôt que de l’énergie totale émise par la source lumineuse. En utilisant cette relation, on peut calculer l’énergie nécessaire pour obtenir une profondeur de polymérisation de 4 mm, qui est de 2.03 (J). Cette valeur serait obtenue avec un temps d’exposition lumineux d’environ 9 s avec la lampe ARC Plasma, de 15 s avec la lampe halogène et 31 s avec la lampe DEL. CONCLUSIONS Lorsqu’on évalue l’efficacité d’une lampe à polymériser, il faut considérer la quantité d’énergie absorbée par le photo-initiateur. Cette quantité d’énergie représente une fraction de l’énergie totale émise. Dans le cas où la camphroquinone serait utilisée pour activer la réaction de polymérisation, le rapport entre l’énergie absorbée et l’énergie émise est beaucoup plus favorable pour la lampe DEL. L’énergie émise par une source lumineuse dépend simultanément de la puissance de la source et du temps d’exposition à la lumière. La lampe DEL est moins puissante que les lampes halogène et ARC Plasma. C’est pourquoi pour obtenir la même profondeur de polymérisation, un temps d’illumination plus élevé est nécessaire avec cette lampe. 83 M. CATTANI-LORENTE, P. PAYOT, C. GODIN, S. BOUILLAGUET, J. FORCHELET & J-M. MEYER Caractérisation et efficacité de trois lampes à polymériser RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [1] J.L Ferracane, E. H Greener. Fourier transform infrared analysis of degree of polymerization in unfilled resins.Methods comparison. J Dent Res 63 : 1093-1095 (1984) [2] J.-M. Antonucci, E.E Toth. Extent of polymerization of dental resins by differential scanning calorimetry. 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PANIGHI (1) (1) Laboratoire de Physique des Matériaux - Nancy UMR CNRS 7556 INTRODUCTION Dès les années 70, BRANNSTRÖM (1) a montré que la perte d'étanchéité interfaciale semblait plus nocive pour le complexe dentino-pulpaire que la nature éventuellement toxique du matériau résineux lui-même. Cette intégrité interfaciale est intimement liée à la contraction de réticulation, mais, lors d'un collage efficace, cette contraction prend la forme de contraintes susceptibles de séparer le composite des parois cavitaires. Pour certains auteurs (2), ces contraintes sont au cœur de la problématique interfaciale. On a donc cherché à diminuer ces contraintes par différents moyens et en particulier en contrôlant le mode de réticulation. En outre, il semblerait que la photopolymérisation séquentielle ("soft-start polymerization"), qui correspond à une augmentation graduelle de l'intensité lumineuse sur les premières secondes d'irradiation, pourrait limiter ces contraintes en laissant au réseau matriciel plus de temps pour d'établir sa relaxation visco-élastique (3). OBJECTIFS L'objectif de cette étude est tout d'abord de mettre au point un système de mesure in vitro des contraintes de contraction de polymérisation dans une géométrie confinée. Puis d'évaluer l'effet d'un nouveau mode de photopolymérisation séquentiel - la photopolymérisation exponentielle ("ramped photopolymerization") - sur les contraintes de contraction de sept produits commerciaux : Solitaire1, Solitaire21, Renew2, Aelitefil2, Tetric Ceram3, Z1004 et AP-X5. En comparant deux modes d'exposition, on observe s'il existe des différences entre les contraintes de contraction de chacun des produits testés. Dans le but d'évaluer l'effet d'échauffement imposé par la lampe à photopolymériser, l'analyse des contraintes de dilatation / contraction thermique des mêmes matériaux polymérisés, sous des modes identiques d'insolation, a également été réalisée. MÉTHODES EXPÉRIMENTALES Une machine d'essais mécaniques enregistre, pendant 400 secondes, les contraintes de contraction de cylindres de composites (∆ = 6 mm ; h = 2 mm ; C = 1,5) sous deux modes d'irradiation : - Standard 60s (800 mW/cm-2). - Exponentiel 60s (150 mW/cm-2 de 1 à 15 secondes, puis 800 mW/cm-2 au-delà). Cinq essais sont réalisés pour chaque mode d'insolation. À partir de diagrammes contrainte/temps, on calcule les valeurs suivantes : 1 HERAEUS KULZER (Heraeus kulzer Inc, Wehrheim, Allemagne 2 BISCO (Itasca, Illinois 60143, USA) 3 VIVADENT (Vivadent Ets, FL – 9494 Schaan, Liechtenstein) 4 3M (Saint Paul, Minnesota 55101, USA) 5 KURARAY (Kuraray Compagny, 530-8611 Osaka, Japon) 85 C. CHARTON, C. G’SELL & M. PANIGHI Intérêt du Mode de Photopolymérisation Exponentiel sur les Contraintes de Réticulation de Résines Composites • de polymérisation post-gel (VPP). • de contraction maximum (CCM). • de dilatation thermique maximum (CDTM). Un test-T de STUDENT multiple pour échantillons indépendants de Bonferroni (a<0,05) a permis d'évaluer l'influence des matériaux sur les résultats. L'influence globale du mode d'irradiation sur les résultats a été calculée par un test t de STUDENT pour deux séries appariées (a<0,05). Enfin, un test de corrélation simple (a<0,05) est mis en place pour établir si VPP et CDTM influencent les CCM. RÉSULTATS - Quel que soit le mode d'insolation, les CCM maximums sont enregistrées pour Aelitefil et Solitaire qui sont significativement plus élevées que celles de Renew et de Solitaire2. AP-X et Z100 montrent les valeurs de contraintes les plus faibles. - Pour tous les produits, le mode Exponentiel diminue les vitesses de polymérisation et les CCM de façon statistiquement significatives. - Il n'y a pas de corrélation entre VPP, CDTM et CCM. - Solitaire montre une réticulation incomplète dès le mode Standard 60s. DISCUSSION Les matériaux émettant des contraintes de contraction faibles sont les plus chargés, les plus rigides et les plus stables en contraction volumique. Le mode de photopolymérisation Exponentiel diminue sensiblement les contraintes de contraction car il optimiserait les propriétés de relaxation viscoélastique du réseau (3). Cependant, les valeurs de contraintes de contraction sont essentiellement liées au ratio matrice / charge (4) mais aussi à la composition de la matrice. Sa souplesse (grâce à l'adjonction de diluants à chaînes longues et flexibles comme le TEGDMA par exemple) améliore les propriétés visco-élastiques du matériau donc l'évacuation des contraintes. Les monomères tétrafonctionnels de haut poids moléculaire (bis-GMA et UDMA) au squelette volumineux et à la flexibilité limitée augmentent la compacité des structures formées et réduisent la mobilité moléculaire. Ils engendreraient des contraintes plus fortes à cause de capacités de relaxation viscoélastique limitées. Le secret de la diminution effective des contraintes de contraction réside dans le contrôle de la chimie du matériau et non de sa vitesse de réticulation (5). CONCLUSIONS – PERSPECTIVE Les contraintes de contraction peuvent être diminuées de façon extrinsèque en améliorant les capacités de relaxation viscoélastique du réseau pendant la réticulation à l’aide d’une photopolymérisation séquentielle ou en réduisant la concentration en agent initiateur / agent réducteur (6). Cependant, il nous paraît primordial d'insister sur le fait que le moyen le plus efficace pour diminuer ces contraintes et améliorer l'étanchéité interfaciale des résines composites, est d'opérer un choix raisonné de la composition du produit, notamment en ce qui concerne le taux de charges qui doit être le plus élevé possible et aussi la chimie de la matrice (adjonction de monomères à chaîne longue et souple, de solvant ou de diluants réactifs ; limitation de la proportion de monomères plurifonctionnels) en respectant les impératifs de biocompatibilité et de résistance mécanique. 86 C. CHARTON, C. G’SELL & M. PANIGHI Intérêt du Mode de Photopolymérisation Exponentiel sur les Contraintes de Réticulation de Résines Composites Dans le futur, il nous semble nécessaire d'envisager le développement d'autres voies de recherches : - travailler en spectrométrie de relaxation mécanique pour évaluer les capacités viscoélastiques des matériaux. - réaliser des essais sur des matériaux dont le ratio matrice / charge en poids est identique mais dans lesquels : • la forme et le volume des charges sont différents, ce qui permet une analyse de l'influence des charges sur les contraintes de contraction. • le type et la proportion de monomères sont différents, ce qui permet une analyse de l'influence de la matrice sur les contraintes de contraction. - travailler avec une cellule de force plus adaptée aux contraintes faibles enregistrées dans le cadre de notre étude (cellule de force de 1 kN). - rechercher un meilleur contrôle du protocole expérimental et en même temps évaluer l'effet de la température sur les contraintes de contraction, par des expérimentations en chambre thermostatée. - mesurer le degré de conversion par spectroscopie infrarouge à transformée de Fourrier parallèlement à chaque mode d'insolation pour contrôler si le taux de réticulation est identique entre chaque produit. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1 BRÄNNSTRÖM M., ASTRÖM A. The hydrodynamics of the dentin : its possible relationship to dentinal pain. Int. Dent., 1972, 22 : 219-227. 2 DAVIDSON C.L., FEILZER A.J. Polymérisation shrinkage and polymérisation shrinkage stress in polymer-based restoratives. J. Dent., 1997, 25 : 435-440. 3 BOUSCHLICHER M.R., RUEGGEBERG F.A. Effect of ramped light intensity on polymerization force and conversion in a photoactived composite Esthet. Dent., 2000, 12 : 328-339. 4 REES J.-S., JACOBSEN P.H. The polymérisation shrinkage of composite resins. Dent. Mater., 1989, 5 : 41-44. 5 CHEN H.Y., MANHART J., HICKEL R., KUNZELMANN K.H. Polymerization contraction stress in light-cured packable composite resins. Dent. Mater., 2001, 17 : 253-259. 6 UNO S., ASMUSSEN E. Marginal adaptation of a restaurative resin polymerized at reduced rate.Scand. J. Dent. Res., 1991, 99 : 440-444. 87 C. CHARTON, C. G’SELL & M. PANIGHI Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites B. PELISSIER (1), E. CASTANY (1), N. DE SOUFFRON (2) & F. DURET (3) (1) UFR d'Ondotologie de Montpellier I, (2) Ingénieur des Mines d'Alès, (3) Nippon Dental University, Niigata, Japon INTRODUCTION Actuellement, il est nécessaire de restaurer une cavité couche par couche avec des incréments toujours inférieurs à 2 mm d'épaisseur pour une lampe halogène et des incréments de 1 mm d'épaisseur pour une lampe type plasma (1, 2, 6, 7, 9, 12). L'intérêt de la technique de stratification est de permettre, à chaque apport successif de composite, une polymérisation complémentaire de la couche précédente. L’évolution de la technologie LED (3, 4, 8, 10, 13) montre des résultats de dureté intéressants avec des mesures de dureté voisines des lampes halogènes. La lampe GC-e-light® permet même d’obtenir des valeurs plus homogènes en profondeur (11). Cette étude a pour but d'évaluer la microdureté (5) de 2 matériaux composites de restauration dentaire. Donc de connaître l'influence de la photopolymérisation en profondeur utilisant des lampes à diodes électroluminescentes (LEDs). MATÉRIEL ET MÉTHODES Des échantillons (figure n°1) de Z100 MP® et de GC Unfil S® sous forme de pastilles de 8 mm de diamètre et de différentes épaisseurs (1, 2 et 3 mm) ont été insolés avec 2 lampes à diodes électroluminescentes (GC e-light® de GC et Aquablue® de Toesco) (photo n°1) (figure n°2) pendant 9 secondes à pleine puissance lumineuse. Les mesures de microdureté Knoop immédiate ont été effectuées avec un microduromètre Leica VMHT 30 avec une charge de 50 grammes pendant 10 secondes. Les mesures ont été relevées sur le côté opposé à l'insolation à différents points suivant un diamètre (0,5 mm ; 2 mm ; 4 mm ; 6 mm ; 7,5 mm) et ceci à différentes épaisseurs (1 ; 2 ; 3 mm). 5 pastilles par matériau ont été réalisées pour chaque épaisseur lors des relevés des mesures de microdureté Knoop. Figure 1 : échantillon de composite et points de mesure de dureté Knoop 88 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites Photo n°1 : Lampes LEDs Figure 2 : Spectres d’émission des 2 lampes LED utilisées 89 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites REPRÉSENTATION DE LA DURETÉ D’UN VOLUME DE MATÉRIAU COMPOSITE DURCI PAR LES LAMPES LEDS (GC-ELIGHT® ET AQUA BLUE®) DE PHOTOPOLYMÉRISATION Échelle de valeur Dureté Knoop Composite : GC Unifil S A4 90 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites Coupe centrale d’un échantillon Figure n° 3 : Visualisation de la profondeur de polymérisation du GC unifil® 91 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites REPRÉSENTATION DE LA DURETÉ D’UN MATÉRIAU COMPOSITE DURCI PAR LES LAMPES LEDS (GC-E-LIGHT® ET AQUA BLUE®) DE PHOTOPOLYMÉRISATION Échelle de valeur Dureté Knoop Composite : 3M Z100 A3.5 Figure 4 : Visualisation de la profondeur de polymérisation du Z100MP® Les deux matériaux montrent des différences de dureté entre eux, suivant les épaisseurs, les lampes utilisées, et en fonction des mesures effectuées sur le diamètre des pastilles. Les résultats de microdureté obtenus avec la lampe GC-e-light sont supérieurs en profondeur. Ils confirment les résultats de nombreuses analyses qui montrent une meilleure homogénéité de polymérisation pour cette lampe (figures 3 et 4) En conclusion pour cette étude, nous remarquons que la dureté Knoop (12) est influencée par le type de matériau et de son épaisseur mais aussi par la lampe LED utilisée. 92 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Évaluation de l'efficacité de la photopolymérisation led de 2 matériaux composites RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1-COOK WD. Factors affecting the depth of cure of UV-polymeriezd composites. J. Dent. Res. 1980 May ; 59(5) : 800808 2-DE WALD J-P., FERACANE J-L. A comparison of four modes of evaluating depht of cure of light-activated composites. J. Dent. Res. 1987 Mar ; 66(3) : 727-730 3-DUKE E. Light-emitting diodes in composite resin photo polymerisation. Oral health, 2002 Jan ; 92 (1) : 27-9 4-DUNN WJ, BUSH AC. À comparison of polymerization by light-emitting diode and halogen-based light-curing units. J. Am Dent Assoc. 2002 Mar ; 133(3) :335-41 5-FERRACANE J-L. Correlation betwween hardness and degree of conversion during the setting reaction of unfilled dental restorative resins J. Dent. Res.1985 ; 1: 11-14. 6-FERRACANE J-L., ADAY P., MATSUMOTO H., MARKER VA. Relationship between shade and depth of cure for lightactivated dental composite resins. Dent. Mater. 1986 Apr ; 2(2) : 80-84. 7-JANDT KD, MILLS RW, BLACWELL GB, ASHWORTH SH. Depth of cure and compressive strenght of dental composites cured with blue lignt emitting diodes. Dent Mater 2000 ; 16 : 41-7 8-KURACHI C., TUBOY AM., MAGALHAES DV., BAGNATO VS. Hardness evaluation of a dental composite polymerized with experimental LED-based devices. Dent. Mat. 2001 Jul ; 17(4) : 309-315. 9-MARAIS JT., DANNHEIMER MF., GERMISHUYS PJ., BORMAN JW. Depth of cure of light-cured composite resin with light-curing units of different intensity. J. Dent. Assoc. S. Afr. 1997 Jun ; 52(6) : 403-407 10-MILLS RW. Blue light emitting diodes : an alternative method of light-curing ? Br. Dent. J. 1995 ; 178 : 169 letter. 11-PELISSIER B. Influence du mode d’irradiation lumineuse sur le degré de polymérisation des biomatériaux composites et dérivésThèse Doctorat d’Université, Montpellier, mars 2002 12-RUEGGEBERG FA., ERGLE JW., METTENBURG DJ. Polymerization depths of contemporary light-curing units using microhardness. J. Esthet. Dent. 2000 ; 12(6) : 340-349 13-STAHL F., ASHWORTH SH., JANDT D., MILLS RW. Light-emitting diode (LED) polymerisation of dental composites : flexural properties and polymerisation potential Biomater. 2000 ; 21 : 1379-1385. 93 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Comparaison de la dureté knoop de 2 matériaux composites avec 5 lampes à diodes électroluminescentes B. PELISSIER (1), E. CASTANY (1), N. DE SOUFFRON (2) & F. DURET (3) (1) UFR d'Ondotologie de Montpellier I, (2) Ingénieur des Mines d'Alès, (3) Nippon Dental University, Niigata, Japon INTRODUCTION Jusqu’en 1998, les matériaux composites ont été polymérisés avec des lampes halogènes sans trop de problèmes ; mais depuis, pour limiter les temps d’irradiation lumineuse, des lampes à hautes énergies ont été développées ; ces lampes ont présenté de nombreux avantages, mais aussi certains inconvénients (3, 8, 9). Des lampes à diodes électroluminescentes ont alors été introduites depuis l’année 2000 et semblent être une alternative intéressante au processus classique de photopolymérisation. Une LED émet dans le domaine du bleu de la lumière visible (spectre allant de 420 à 490 nm) (figure n°1), pratiquement centré sur le spectre d’absorption de la camphoroquinone. Ces lampes n’ont pas de filtres, ce qui autorise une diminution de la puissance initiale. Mais il existe de nombreuses différences de puissance entre les lampes LED mises sur le marché. La polymérisation d’un composite varie en fonction de la lampe, de l’épaisseur et de la teinte du matériau, de la technique de stratification. Compte tenu des données actuelles (1, 2, 5, 6, 7, 10), il nous a semblé intéressant d’analyser et de comparer la polymérisation (4) de 2 matériaux composites de restauration dentaire en utilisant 5 lampes à diodes électroluminescentes (LEDs). MATÉRIEL ET MÉTHODES Des échantillons (figure n°2) de Z100 MP® et de Spectrum TPH® sous forme de pastilles de 8 mm de diamètre et d'une épaisseur de 2,5 mm ont été insolés avec 5 lampes à diodes électroluminescentes (GC e-light® de GC, Aquablue® de Toesco, Freelight® de 3MESPE, Luxomax® de Akeda et Cool Blu® de Oral hygien Center) pendant différents temps (7, 8, 9, 10 secondes) à pleine puissance lumineuse. Les mesures de microdureté Knoop immédiate ont été effectuées avec un microduromètre Leica VMHT 30 avec une charge de 50 grammes pendant 10 secondes. Les mesures ont été relevées sur le côté opposé à l'insolation à différents points suivant un diamètre (0,5 mm ; 2 mm ; 4 mm ; 6 mm ; 7,5 mm). 5 pastilles par matériau et par temps d'insolation ont été réalisées pour chaque lampe lors des relevés des mesures de microdureté Knoop immédiate. 94 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Comparaison de la dureté knoop de 2 matériaux composites avec 5 lampes à diodes électroluminescentes Figure 1 : Spectres d’émission des différentes lampes LED utilisées Figure 2 : échantillon de composite et points de mesure de dureté Knoop Les moyennes des mesures de microdureté montrent des différences significatives entre les 5 lampes LEDs utilisées (figures n° 3 et 4) ; le Z100 MP® présente des mesures de microdureté supérieures au Spectrum TPH®. Le temps de polymérisation permet l'augmentation de la dureté des 2 matériaux. Selon les lampes, l'augmentation se fait différemment. Les mesures montrent de meilleurs résultats avec la lampe GC e-light® de GC. En conclusion pour cette étude, nous remarquons que la dureté Knoop est influencée par le type de matériau, le temps de polymérisation mais aussi par la lampe LED utilisée et surtout par sa 95 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Comparaison de la dureté knoop de 2 matériaux composites avec 5 lampes à diodes électroluminescentes puissance. Les meilleurs résultats ont été obtenus avec la lampe GC-e-light® de GC. Cette nouvelle technologie de lampes à photopolymériser semble bien adaptée au domaine de la dentisterie restauratrice. Figure n° 3 : duretés Knoop immédiates du Z100 MP en fonction des 5 lampes LEDs et du temps d’irradiation Figure 4 : duretés Knoop immédiates du Z100 MP en fonction des 5 lampes LEDs et du temps d’irradiation 96 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Comparaison de la dureté knoop de 2 matériaux composites avec 5 lampes à diodes électroluminescentes RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1-DUKE E. Light-emitting diodes in composite resin photo polymerisation. Oral health, 2002 Jan ; 92 (1) : 27-9 2-DUNN WJ, BUSH AC. À comparison of polymerization by light-emitting diode and halogen-based light-curing units. J. Am Dent Assoc. 2002 Mar ; 133(3) :335-41 3-DURET F., PELISSIER B., CREVASSOL B. Mise au point sur la lampe à polymérisation ultra-rapide plasmatique : bilan après 6 ans et mode d’emploi. Inf…Dent… 1999 ; 44 : 3547-3558. 4-FERRACANE J.-L. Correlation betwween hardness and degree of conversion during the setting reaction of unfilled dental restorative resins J. Dent. Res.1985 ; 1: 11-14. 5-JANDT KD, MILLS RW, BLACWELL GB, ASHWORTH SH. Depth of cure and compressive strenght of dental composites cured with blue lignt emitting diodes. Dent Mater 2000 ; 16 : 41-7 6-KURACHI C., TUBOY AM., MAGALHAES DV., BAGNATO VS. Hardness evaluation of a dental composite polymerized with experimental LED-based devices. Dent. Mat. 2001 Jul ; 17(4) : 309-315. 7-MILLS RW. Blue light emitting diodes : an alternative method of light-curing ? Br. Dent. J. 1995 ; 178 : 169 letter. 8-PELISSIER B. Influence du mode d’irradiation lumineuse sur le degré de polymérisation des biomatériaux composites et dérivés. Thèse Doctorat d’Université, Montpellier, mars 2002 9-PELISSIER B, TRAMINI P., CASTANY E. et DURET F. Restauration cosmétique directe par stratification et polymérisation rapide plasmatique : approche clinique CDF, n°971-972, 10-17/02/2000 : 25-33. 10-STAHL F., ASHWORTH SH., JANDT D., MILLS RW. Light-emitting diode (LED) polymerisation of dental composites : flexural properties and polymerisation potential Biomater. 2000 ; 21 : 1379-1385. 97 B. PELISSIER, E. CASTANY, N. DE SOUFFRON & F. DURET Influence de la polymérisation sur la dureté et la résistance à la flexion de composites dentaires N. KAPRIELIAN (1), C. LAGNEAU (1), B. GROSGOGEAT (1), N. ZYDOWICZ (2) & M. LISSAC (1) (1) Laboratoire d’Etude des Interfaces et des Biofilms en Odontologie (EA 637)Faculté d’Odontologie de Lyon (2) Laboratoire des Matériaux Polymères et des Biomatériaux (UMR 5627) – Institut des Sciences et Techniques de l’Ingénieur de Lyon RÉSUMÉ Objectifs : Le propos de la présente étude est de comparer 2 propriétés mécaniques : la dureté et la résistance en flexion de 3 composites hybrides (Tetric® Ceram, Z-100TM et Inten-S®) insolés soit avec une lampe « plasma » à polymérisation rapide (Flipo®, LOKKI), soit avec une lampe halogène conventionnelle (Astralis® 7, Vivadent). Méthodes : Les échantillons ont été insolés selon la durée préconisée par les fabricants, 40 secondes avec l’Astralis® 7 et 3 secondes avec la Flipo®. L’analyse de la dureté Vickers des matériaux est réalisée au moyen d’un microduremètre Shimadzu avec une charge de 100 grammes pendant 30 secondes. Les mesures sont faites sur la face insolée et sur la face non insolée, c’est-à-dire à 3 mm de profondeur. Pour les tests de flexion 3 points réalisés sur une machine Adamel Lhomargy DY-34 avec une vitesse de traverse de 0,1 mm/mn, les échantillons ont été préparés selon la norme ISO 4049. Résultats : En ce qui concerne la face insolée, la dureté est identique quel que soit le type de polymérisation pour l’Inten-S®, alors que l’on constate une dureté moindre pour le Tetric® Ceram et le Z-100TM insolés par la lampe plasma. Sur la face non insolée, les valeurs sont inférieures pour les composites polymérisés avec la lampe rapide. En ce qui concerne la résistance à la flexion, il n’y a pas de différence significative entre les 2 lampes pour le Z-100TM alors que l’on a une résistance à la flexion légèrement abaissée pour le Tetric® Ceram et l’Inten-S® polymérisés avec la lampe plasma. Conclusion : Les différences obtenues peuvent s’expliquer par la formulation du composite et par le type de polymérisation. Et bien que la dureté reflète assez bien le taux de polymérisation, il paraît nécessaire d’entreprendre des études complémentaires (évaluation de la contraction, taux de monomères résiduels…) afin de valider ou non l’utilisation des lampes à plasma en odontologie conservatrice. Mots clés : Composites, Polymérisation, Propriétés mécaniques 98 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Influence de la polymérisation sur la dureté et la résistance à la flexion de composites dentaires INTRODUCTION L’utilisation des résines composites est de plus en plus développée, notamment pour la réalisation des restaurations en odontologie conservatrice. La photopolymérisation offre au praticien la possibilité de figer ce type de matériau dans la forme souhaitée et représente déjà un progrès considérable dans notre discipline. Cependant, nous sommes toujours à la recherche de nouveaux moyens pour améliorer notre exercice quotidien. Ainsi, des lampes permettant une photopolymérisation plus rapide sont récemment apparues sur le marché. Le fait de diminuer le temps nécessaire à la photopolymérisation a permis notamment d’élargir le domaine d’utilisation des composites photopolymérisables à d’autres spécialités telles que l’odontologie pédiatrique et l’orthopédie dento-faciale. Cependant, au vu des premiers travaux présentés, la rapidité de prise induite par la lumière peut s’avérer génératrice de contraintes brutales susceptibles de modifier les propriétés de composites insolés. Ce travail a pour but de comparer 2 propriétés mécaniques : la dureté et la résistance en flexion de 3 composites (Tetric® Ceram, Z-100TM et Inten-S®) insolés soit avec une lampe « plasma » à polymérisation rapide (Flipo®, Lokki) soit avec une lampe halogène conventionnelle (Astralis® 7, Vivadent) MATÉRIELS ET MÉTHODES Matériaux Au cours de cette étude, 3 résines composites microhybrides ont été sélectionnées : • Tetric® Ceram (Ivoclar Vivadent) : composite hybride contenant 2 photoinitiateurs (la camphoroquinone + X) • Z-100TM (3M) : composite hybride contenant un seul photoinitiateur (la camphoroquinone) • Inten-S® (Ivoclar Vivadent) : composite hybride contenant 2 photoinitiateurs (la camphoroquinone + Y) 2 lampes à polymériser ont été utilisées : • une lampe halogène : Astralis® 7 (Ivoclar Vivadent) Mode HIP : 750 mW/cm2 Durée d’insolation : 40 secondes • une lampe à plasma : Flipo® (Lokki) Durée d’insolation : 3 secondes Méthodologie Tests de dureté Vickers Les échantillons pour la réalisation des tests de dureté sont préparés dans des moules en téflon de 10 mm de longueur, de 4 mm de largeur et 3 mm de profondeur. Le fond du moule repose sur une plaque de verre. Le composite, sous forme de capsule, est introduit au moyen d’un pistolet, puis recouvert d’un ruban de mylar et irradié au travers d’une plaque de verre. L’embout de la lampe est placé au centre du moule et l’échantillon est irradié. Les échantillons sont conservés à l’étuve à 37°C dans de l’eau distillée. La dureté Vickers est mesurée au moyen d’un microduremètre Shimadzu. Les échantillons sont 99 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Influence de la polymérisation sur la dureté et la résistance à la flexion de composites dentaires soumis à une charge de 100 grammes pendant 30 secondes. Les mesures sont réalisées au centre du moule, sur la face insolée et sur la face non insolée c’est-à-dire à 3 mm de profondeur. Pour chaque composite et chaque type de lampe, une série de 3 mesures sur chacun des 10 échantillons est effectuée. Les valeurs mesurées sont exprimées en µm, puis transformées en valeurs de dureté Vickers (soit des kg/mm2). Les résultats sont traités statistiquement par un test Anova non apparié. Essais en flexion Les échantillons sont réalisés dans des moules en téflon de longueur de 25 mm et 2 mm de largeur et 2 mm de hauteur. La mise en place du composite s’effectue comme précédemment. L’embout de la lampe est placé au centre de l’échantillon qui est irradié. Les échantillons sont gardés dans de l’eau distillée à 37°C pendant 24 heures. Les mesures sont réalisées sur une machine Adamel Lhomargy DY 34. Les échantillons sont placés sur un appareil de flexion 3 points. La distance qui sépare les supports parallèles est de 20 mm. La vitesse de la traverse est de 0,1 mm/min. Pour chaque composite et chaque type de lampe, 10 échantillons sont réalisés. La résistance en flexion et le module sont calculés selon la norme NF EN ISO 4049. Les résultats sont traités statistiquement par un test Anova non apparié. RESULTATS-DISCUSSION Tests de dureté Vickers Sur la face insolée, la dureté n’est statistiquement pas différente quel que soit le type de polymérisation pour l’Inten-S®, alors qu’elle est moins élevée pour le Tetric® Ceram et le Z-100TM insolés par la lampe à plasma (figure 1). Figure 1 : Dureté Vickers selon le mode de polymérisation (face insolée) Essais en flexion En ce qui concerne la résistance à la flexion, il n’y a pas de différences significatives entre les 2 modes de polymérisation pour le Z-100TM. On a une résistance à la flexion légèrement abaissée pour le Tetric® Ceram et l’Inten-S® polymérisés avec une lampe à plasma ce qui indique que les matériaux étudiés sont un peu plus fragiles dans ce cas-là (figure 2). 100 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Influence de la polymérisation sur la dureté et la résistance à la flexion de composites dentaires Figure 2 : Contrainte : effet de 2 lampes (Flipo & Astralis 7) sur la polymérisation de différents composites CONCLUSION Les différences obtenues peuvent s’expliquer par la formulation du composite et par le type de polymérisation. Bien que les propriétés mécaniques reflètent assez bien le taux de polymérisation, il paraît nécessaire d’entreprendre des études complémentaires (évaluation de la contraction, taux de monomères résiduels…) afin de valider ou non l’utilisation des lampes à plasma en odontologie conservatrice. 101 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération J. BALLEYDIER (1), C. LAGNEAU (1), D. SEUX (2,3) & M. LISSAC (1) (1) Laboratoire d’Etude des Interfaces et des Biofilms en Odontologie (EA 637)-Faculté d’Odontologie de Lyon (2) Service d’Odontologie Conservatrice Endodontie-Lyon (3) Laboratoire du Développement des Tissus Dentaires (EA 1892)-Faculté d’Odontologie de Lyon RÉSUMÉ Le but de notre étude est d’appliquer un protocole expérimental simple afin d’évaluer in vitro l’adhésion amélaire et dentinaire de 2 systèmes adhésifs de 5ème génération : un adhésif classique mono-flacon (Excite®) et un auto-mordançant (Prompt® L-Pop® ). Des dents de sagesse extraites pour des raisons orthodontiques ont été conservées dans de la chloramine T. Des cavités occlusales, d’une profondeur de 3 mm, ont été réalisées, sous spray d’eau, à l’aide d’une fraise ronde diamantée. 2 adhésifs de 5ème génération, un conventionnel et un automordançant et leur composite respectif ont été testés : - adhésif conventionnel : Excite® et le Tetric® Ceram (Vivadent) - adhésif auto-mordançant : Prompt® L-Pop® et le Pertac® II Aplitip® (ESPE) Ces 2 adhésifs ont été appliqués selon les recommandations du fabricant et ont été polymérisés pendant 20 secondes avec une lampe halogène classique. Des coupes longitudinales ont été effectuées à hauteur du sillon central. Les interfaces obtenues ont été polies mécaniquement à l’aide de disques abrasifs de granulométrie décroissante (80, 400 et 800 grits) et nettoyées à l’acide pendant 15 secondes. Après déshydratation à l’alcool, les coupes sont métallisées et observées au microscope électronique à balayage. Avec l’adhésif Excite®, adhésif mono-flacon avec mordançage préalable, nous avons observé une adhésion optimale avec création d’une couche hybride et digitations résineuses intratubulaires. Avec l’adhésif auto-mordançant, Prompt® L-Pop® , nous avons observé une adhésion amélaire de bonne qualité, des fractures adhésives essentiellement au niveau du joint composite-couche hybride en fond de cavité. L’adhésif est cependant relativement adhérent sur la dentine bien que la résine ne pénètre pas suffisamment dans les tubuli dentinaires ouverts. Mots clés : Adhésifs, Dentine, Couche hybride, Microscopie électronique à balayage INTRODUCTION La possibilité de coller un matériau aux tissus dentaires a profondément changé les concepts de l’odontologie conservatrice. Les techniques modernes de dentisterie adhésive permettent aux praticiens d’éliminer les tissus carieux sans toucher aux tissus sains sous-jacents. L’adhésion à la dent implique l’adhésion à 2 structures de nature fondamentalement différente. Les matériaux peuvent facilement être collés à l’émail, grâce à une résine fluide photo-polymérisable. La qualité du collage à l’émail dépend principalement de la qualité du traitement acide effectué. Une 102 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération surface micro-rétentive est obtenue. Le collage à l’émail est résistant, fiable, durable et permet une étanchéité excellente. Par contre, les mécanismes d’adhésion à la dentine font encore l’objet de nombreuses recherches. Actuellement, 5 générations de systèmes adhésifs ont été recensées sur le marché dentaire. On retrouve dans cette dernière génération 2 types d’adhésifs : Les adhésifs mono-composants regroupent dans un même flacon le primaire d’adhésion et la résine adhésive mélangés dans un solvant organique qui est généralement de l’alcool, de l’acétone ou de l’eau. Cette étape est précédée de l’application du gel de mordançage. Les adhésifs auto-mordançants sont constitués d’un seul et même produit de faible pH qui contient de quoi déminéraliser la dentine en surface puis l’infiltrer, afin finalement, de copolymériser avec les composites. Ces systèmes sont basés sur l’infiltration et la modification de la smear layer par des monomères acides. Cette étude a pour objectif d’appliquer un protocole expérimental simple permettant de comparer in vitro l’adhésion amélaire et dentinaire de 2 adhésifs de 5ème génération : un mono-composant et un auto-mordançant. MATÉRIELS ET MÉTHODES Matériaux Dans cette étude, nous avons étudié 2 adhésifs de 5ème génération : • adhésif mono-composant : Excite® de Vivadent • adhésif auto-mordançant : Prompt® L-Pop® d’ESPE Nous avons employé le composite correspondant au système adhésif utilisé selon les recommandations du fabricant : c’est-à-dire Tetric® Ceram pour Excite® de Vivadent et PERTAC® II Aplitip® pour Prompt® L-Pop® d’ESPE. Méthodologie Les dents choisies sont des dents de sagesse indemnes de caries. Immédiatement après leur extraction, elles sont conservées à 4°C dans une solution de chloramine T à 1 %. Des cavités occlusales, de 3 mm de profondeur à partir du fond du sillon central, sont réalisées sous spray d’eau à l’aide d’une fraise ronde diamantée. Les 2 adhésifs ont été appliqués selon les recommandations du fabricant et ont été polymérisés pendant 20 secondes avec une lampe halogène classique. Les composites ont été appliqués en 2 couches successives de 1,5 mm chacunes et photo-polymérisées à chaque fois durant 40 secondes. Les dents sont sectionnées longitudinalement au niveau du sillon central à l’aide d’une tronçonneuse de précision équipée d’un disque diamanté. Les coupes sont effectuées à faible vitesse de rotation et sous irrigation constante d’alcool à 70°C. Les interfaces sont ensuite polies à l’aide de disques abrasifs de granulométrie décroissante (80, 400 et 800 grits) et rincées dans un bain d’alcool à 70°. Les échantillons, après polissage, ont subi un nettoyage à l’acide sur toute la section à observer de façon à éliminer les débris de coupe. Les sections dentaires sont ensuite rincées à l’eau, déshydratées à l’alcool 70° avant d’être observées au microscope électronique à balayage. 103 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération RÉSULTATS ET DISCUSSION Avec le système adhésif Excite®, nous avons pu constater une bonne adhésion sur l’ensemble de la cavité (photo 1a). Au niveau de la jonction émail-dentine-adhésif (paroi verticale de la cavité), l’adhésion se poursuit entre l’émail et la dentine sans interruption notable (photo 1b). En effet, le collage amélaire apparaît de bonne qualité faisant intervenir une adhésion micromécanique grâce au mordançage à l’acide orthophosphorique à 37 % (photo 1c). Dans cette même zone, l’adhésion dentinaire ne montre pas d’interruption et laisse apparaître une couche hybride continue (photo 1d). En fond de cavité, nous avons observé une bonne adhésion du composite à la dentine avec une absence de hiatus entre le composite et la dentine (photo 1e). La lumière des tubuli dentinaires est nettement visible signifiant une action efficace du mordançage. Dans ces orifices dentinaires, des brides de résine se forment et contribuent à la réalisation du joint dentinaire. La couche hybride fait le lien entre le composite et la dentine (photo 1f). Avec le Prompt® L-Pop®, l’interface composite-dentine apparaît plus irrégulière avec notamment l’apparition de zones de non adhésion ou hiatus (photo 2a). Elles se situent principalement au niveau du fond de cavité. Au niveau de la jonction émail-dentine-adhésif, on constate une discontinuité de l’adhésion lorsque l’on passe de l’émail à la dentine (photo 2b). L’adhésion amélaire semble correcte avec un micro-relief qui signe l’action des agents de mordançage contenus dans le produit adhésif (photo 2c). L’adhésion dentine-adhésif existe avec formation d’une couche hybride acido-résistante recouvrant les tubuli dentinaires. Cependant, une fracture adhésive est nettement visualisable entre le composite et l’adhésif (photo 2d). La couche hybride est adhérente à la dentine mais on peut noter un hiatus entre la couche hybride et le composite notamment en fond de cavité (photos 2e et 2f). CONCLUSION Cette méthodologie simplifiée nous a permis de comparer l’adhésion aux tissus dentaires de 2 adhésifs de 5ème génération. Dans notre étude, au niveau amélaire, l’agent mordançant du Prompt® L-Pop® semble être aussi efficace que l’acide orthophosphorique : avec les 2 systèmes adhésifs, nous avons observé une bonne adhésion. Au niveau dentinaire, nous avons observé une adhésion satisfaisante avec formation d’une couche hybride et des tags de résine avec l’adhésif mono-composant (Excite“). Cependant, avec l’adhésif " tout en un ", le Prompt® L-Pop®, nous avons pu déplorer une adhésion de qualité moindre (fracture adhésive) au niveau adhésif-composite. Il semblerait donc qu’il y ait plus de problème au niveau de l’adhésion au composite qu’au niveau de l’adhésion dentinaire. 104 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération Figures 1a à 1d: Étude au microscope électronique à balayage avec le système adhésif Excite® 105 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération Figures 1e à 1f : Étude au microscope électronique à balayage avec le système adhésif Excite® Figures 2a à 2b : Étude au microscope électronique à balayage avec le système adhésif Prompt® L-Pop® 106 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Étude au microscope électronique à balayage de 2 adhésifs de 5e génération Figures 2c à 2f : Étude au microscope électronique à balayage avec le système adhésif Prompt® L-Pop® 107 N. KAPRIELIAN, C. LAGNEAU, B. GROSGOGEAT, N. ZYDOWICZ & M. LISSAC Influence de la simulation in vitro des conditions intra-orales extrêmes sur la morphologie des interfaces obtenues entre la dentine et deux systèmes adhésifs en M.E.B. C. BESNAULT (1), JP. ATTAL (1) & M. DEGRANGE (1) (1) Groupe de Recherche Biomatériaux, Faculté de Chirurgie Dentaire Paris 5, Montrouge, France OBJECTIFS Ce volet représente la troisième partie d’une étude consacrée à l’influence de la simulation in vitro des conditions de température et d’hygrométrie relative, caractéristiques de la cavité buccale, sur les interfaces collées. Le but de ce volet est d’évaluer l’influence des conditions extrêmes (35°C /95 % HR) sur la morphologie des interfaces entre la dentine et deux systèmes adhésifs (Scotchbond MultiPurpose Plus – 3M et Clearfil SE Bond – Kuraray) en microscopie électronique à balayage. MATÉRIELS ET MÉTHODES Le dispositif expérimental est constitué par une enceinte qui nous permet d’imposer des conditions de température et d’hygrométrie définies. Dans cette étude, deux situations environnementales ont été comparées : conditions ambiantes (20-25°C/ 30-40% HR) et conditions intra-orales extrêmes (35°C/ 95% HR). Huit molaires humaines conservées dans la Chloramine T à 1 % à 4°C pendant moins de 3 mois ont été utilisées dans cette étude. Après élimination de la partie radiculaire, extirpation du tissu pulpaire et abrasion de l’émail occlusal, l’épaisseur de dentine résiduelle a été mesurée et fixée en moyenne à 1,4-1,5 mm. Les échantillons ont été enrobés dans une résine acrylique avant la réalisation des protocoles de collage et application d’une fine couche de composite fluide (Filtek Flow – 3M). Pour chaque échantillon, trois coupes longitudinales ont alors été réalisées, générant deux interfaces jumelles. Une interface a été déminéralisée (HCL 0,1 % - 15 sec), alors que l’autre a été déminéralisée et déprotéinisée (HCl 0,1 % - 15 sec + NaClO 3 % - 30 min). Les deux interfaces ont alors été fixées, déshydratées dans des bains d’alcool de concentration croissante et immergées dans l’HMDS (hexaméthyldisilasane – 10 min). Après métallisation, les échantillons ont été observés au microscope électronique à balayage (Jeol JSM 6400 – 10-15 kV). RÉSULTATS Pour le SBMP+, la simulation des conditions environnementales extrêmes induit des modifications très importantes de l’interface avec la dentine. Sur les échantillons déprotéinisés, la couche hybride est absente et un réseau de “galeries” communiquant les unes avec les autres et apparaissant vides lors de l’observation est mis en évidence. Pour le SE Bond, des espaces lenticulaires, hémisphériques, correspondant vraisemblablement à l’emprisonnement de gouttelettes d’eau, ont été observés au sein de la résine adhésive. Pour cet adhésif, une couche de résine est systématiquement présente en surface de la dentine. 108 C. BESNAULT, JP. ATTAL & M. DEGRANGE Influence de la simulation in vitro des conditions intra-orales extrêmes sur la morphologie des interfaces obtenues entre la dentine et deux systèmes adhésifs en M.E.B. CONCLUSIONS Pour les deux systèmes adhésifs étudiés, la simulation in vitro des conditions environnementales extrêmes induit des altérations des interfaces avec la dentine, qui semblent plus importantes pour le SBMP+ que pour le SE Bond. De plus, cette étude en M.E.B. confirme les résultats obtenus avec les approches précédentes (adhérence et étanchéité) et permet de mieux comprendre les phénomènes interfaciaux qui se produisent lorsqu’un environnement humide est simulé. 109 C. BESNAULT, JP. ATTAL & M. DEGRANGE Étude in vitro de l’étanchéité à l’interface de quatre matériaux de collages à usage prothétique D. GERDOLLE (1), E. MORTIER (1), B. JACQUOT (2) & M. PANIGHI (1) (1) Laboratoire de Physique des Matériaux - Nancy UMR CNRS 7556 (2) Laboratoire de Chimie du Solide Minéral - Nancy UMR CNRS 7555 INTRODUCTION Parmi les matériaux permettant le collage, les ciments aux verres ionomères et les résines composites ont ouvert la voie et restent encore les plus largement utilisés. Des formes hybrides ont été déclinées ensuite à partir de ces formulations de départ pour tenter d’améliorer les propriétés et les performances des matériaux. Jusqu’à maintenant, l’accent a été mis sur l’amélioration des propriétés d’adhésion à l’émail et à la dentine. Bien que cet aspect ait connu des progrès sensibles, le manque d’étanchéité de nos restaurations s’avère être la raison majeure du développement de caries secondaires et de lésions pulpaires (BARBER et coll. 1964). Ainsi la mise en place de tels matériaux impliqueraient-elles de fait des possibilités d’inflammation pulpaire (COX et coll. 1987). Il semble de plus, que la biocompatibilité des matériaux dentaires, vis-à-vis de la pulpe essentiellement, soit d’avantage lié au passage des bactéries (BRANNSTROM 1976, PATERSON 1976, BROWNE et coll. 1983, COX et coll. 1988, ALANI 1990, CAMPS et coll. 2000), qu’à la toxicité propre des matériaux utilisés, bien que ce dernier facteur soit également considéré comme potentiellement inducteur d’une réponse pulpaire inflammatoire (GEURTSEN et coll. 1998, HANSEL et coll. 1998, HEBLING et coll. 1999, SIX et coll. 2000). L’évaluation de l’étanchéité à l’interface est donc un paramètre susceptible de fournir indirectement des renseignements en terme de biocompatibilité. MATÉRIELS ET MÉTHODES Quatre-vingts cavités de classe V standardisées sont taillées sur troisièmes molaires inférieures (40 vestibulaires et 40 linguales). Chaque cavité est obturée par un inlay en résine thermophotopolymérisée (Targis, Vivadent). Les 80 inlays sont collés au moyen de quatre matériaux différents à raison de 20 inlays par matériau. Sont ainsi utilisés : une résine composite autoadhésive (Panavia F, Kuraray), une résine composite avec agent de couplage (Variolink II, Excite, Vivadent), un compomère (Resinomer, Bisco) et un verre ionomère modifié (Fuji Plus, GC). La moitié des échantillons (10 pour chaque matériau) subit un thermocyclage (2000 cycles 5/55°C). 110 D. GERDOLLE, E. MORTIER, B. JACQUOT & M. PANIGHI Étude in vitro de l’étanchéité à l’interface de quatre matériaux de collages à usage prothétique Étude d’étanchéité : protocole ISO/DTS 1140 RÉSULTATS La situation de la cavité du côté vestibulaire ou lingual n’a aucune influence sur la pénétration du bleu de méthylène, quel que soit le matériau, quelle que soit la situation de la ligne de finition (émail ou cément) et quel que soit le vieillissement thermique imposé (dents avec ou sans thermocyclage). Pour chaque matériau, il apparaît en revanche une différence significative entre les lots thermocyclés et non thermocyclés ; le thermocyclage affecte l’étanchéité dans tous les cas. Pour chaque matériau également, la pénétration au niveau de l’émail semble toujours moins prononcée qu’au niveau du cément, le thermocyclage accentuant ce clivage. Les matériaux composites (Panavia F, Variolink II) ou apparenté (Resinomer), montrent une pénétration du colorant globalement inférieure au verre ionomère modifié (Fuji Plus), les résultats étant moins tranchés à l’interface cémentaire ; à ce niveau, ils sont même favorables au Fuji Plus après thermocyclage, par rapport au Resinomer et au Variolink II. Par ailleurs, Au sein des composites la résine sans agent de couplage (Panavia F) semble être la moins sensible au traitement thermique, ce produit présentant également le meilleur pourcentage global de cavités sans aucune pénétration. DISCUSSION L’organisation prismatique de l’émail lui confère un comportement anisotrope (RASMUSEN et coll. 1976). Dès lors, lorsque les prismes sont sectionnés transversalement (limite biseautée), l’adhésion se révèle supérieure à celle obtenue après une section longitudinale (joint vif), en raison de la création d’un plan de clivage entre prismes et matériau (MUNECHIKA 1984). Il est classique de retrouver l’adhésion la plus forte au niveau de l’émail. Celle-ci serait due à l’action synergique de deux phénomènes. L’attaque acide augmente considérablement la surface réelle de l’émail (par rapport à la surface apparente) en créant un grand nombre de micro-rugosités, propices à l’ancrage des adhésifs. De même elle accroît l’énergie de surface, augmentant de fait la mouillabilité des agents de recouvrement. Ce dernier point repose sur le principe, que le mouillage est proportionnel à l’énergie superficielle du substrat dentaire qui doit toujours être supérieure à la tension superficielle de l’adhésif. La tension superficielle de l’adhésif étant imposée par le fabricant, on comprend toute l’importance de l’activation des surfaces (DEGRANGE 1995). L’émail et la dentine ont été mordancés avec l’acide orthophosphorique pour le Resinomer et le Variolink II, afin de promouvoir au maximum les possibilités d’adhésion à ce substrat, l’émail ayant été mordancé vingt secondes de plus que la dentine. Au niveau cémentaire, les résultats d’autres études corroborent les nôtres (WHITE et coll. 1994, DIETSCHI et coll. 1995). Le cément n’offre pas, contrairement à l’émail et à la dentine, une structure 111 D. GERDOLLE, E. MORTIER, B. JACQUOT & M. PANIGHI Étude in vitro de l’étanchéité à l’interface de quatre matériaux de collages à usage prothétique cristalline favorable au microclavetage des matériaux. Cette structure, se rapprochant de celle de l’os, ne permet en effet qu’une pénétration très aléatoire des promoteurs d’adhésion. Cette architecture est non seulement capable d’expliquer les défauts d’étanchéité des composites exprimés dans nos résultats, mais aide également à comprendre pourquoi le verre ionomère modifié est dans ce cas, aussi étanche que les polymères, notamment par rapport à ceux qui utilisent un agent de couplage (Resinomer & Variolink II), le Panavia F conservant des résultats supérieurs. À l'instar des ciments aux verres ionomères conventionnels, les verres ionomères modifiés possèdent en effet des propriétés auto-adhésives par formation de liaisons chimiques. Les scores amélaires et cémentaires sont pour tous les matériaux, à l’exception du Panavia F, significativement moins bons après le thermocyclage. Si ces résultats concordent avec ceux d’autres études (NELSEN et coll. 1953, HAHN et coll. 1998, IRIE et SUZUKI 2001), il faut noter que peu d’expérimentations se sont attachées au seul rôle du thermocyclage pour des restaurations indirectes. La littérature montre clairement que le thermocyclage diminue l’étanchéité interfaciale des restaurations indirectes beaucoup plus que celle des techniques directes (EAKLE 1986, CRIM et coll. 1987, HAKIMEK et coll. 2000). La raison provient vraisemblablement des propriétés mécaniques des composites de laboratoires par rapport à celle des composites d’usage clinique. Les premiers sont en effet moins aptes à " absorber " les variations dimensionnelles dues aux contraintes thermiques, en raison de leur module d’élasticité et de leur taux de conversion plus élevés. C’est ainsi le joint interfacial qui subi ainsi la majorité des contraintes. Par ailleurs, si les produits sont capables des mêmes performances théoriques, les conditions de manipulations cliniques pourraient peut-être, pour partie, expliquer les variations d’étanchéité constatées. Concernant le Fuji Plus, la pénétration assez récurrente du colorant pourrait être liée aux conditions mêmes de l’étude in vitro. Bien que les verres ionomères modifiés soient en effet moins sensibles que leurs homologues sans résine, à la dessiccation immédiate, et bien que les dents n’aient été maintenues hors de l’eau distillée sans être manipulées promptement, les molaires extraites pourraient ne pas avoir été suffisamment hydratées (intrinsèquement) pour prévenir un assèchement précoce du matériau. La pénétration de colorant aurait alors été favorisée par la présence de porosité ou de microfractures dans l’épaisseur même du matériau (BROWNING 1997). Ainsi, les matériaux à base de résine composite semblent globalement plus étanches que le verre ionomère modifié, sauf au niveau cémentaire. Parmi les résines composites, la résine auto-adhésive (Panavia F) se détache, sans que ses performances puissent être directement attribuées à la composition chimique de ses constituants ou à la facilité et donc à la constance de sa mise en œuvre. Les aléas et les particularités de l’étude in vitro doivent également inciter à la prudence quant à la transposition des résultats à la clinique. En particulier, les conditions locales rencontrées en clinique étant sous la coupe de variations multiples et peu quantifiables, l’utilisation des produits de collage, dont les performances sont intimement liées au contexte, ne peut dans l’état actuel des connaissances, être généralisée à l’ensemble des indications de fixation de pièces prothétiques. Il paraît acquis cependant, que leur champ d’application s’étoffera dans les années à venir, au-delà de leur domaine réservé du moment, à savoir la mise en place des reconstitutions esthétiques en résine composite ou en céramique. 112 D. GERDOLLE, E. MORTIER, B. JACQUOT & M. PANIGHI Étude in vitro de l’étanchéité à l’interface de quatre matériaux de collages à usage prothétique RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. ALANI AH.- The influence of dentin bonding agents upon the microleakage associated with composite resin restorations and their effects upon the dental pulp, PhD Thesis, University of Dundee, Scotland, 1990. 2. BARBER D, LYELL J, MASSLER M.- Effectiveness of copal resin varnish under amalgam restorations, J Prosthet Dent, 14 : 533-536, 1964. 3. BRANNSTROM M, VOJINOVIC O.- Response of the dental pulp to the invasion of bacteria around three filling materials, J Dent Child, 43 : 83-89, 1976. 4. 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BOLLA (1) (1) : L.B.D.O.E-UFR Odontologie- Université de Nice 24 Av .des Diables Bleus 06357 Nice Cedex 4 - France (2) : Ecole des Mines de Paris, CNRS UMR 7538, BP 207, 06904 Sophia-Antipolis Cedex, France La viscosité caractérise l’aptitude d’un fluide à s’écouler. À notre connaissance, la littérature ne rapporte aucune étude sur l’investigation de la viscosité des adhésifs dentaires. Tout au plus, il a été montré la nécessité d’interposer une résine de basse viscosité sur l’émail traité [Dogon 1975] [Hansen 1984]. Les précédents travaux portent plus sur l’étude de la tension superficielle des différents substrats impliqués en vue d’évaluer la répercussion de ce facteur sur les phénomènes de mouillabilité. La pénétration des résines composites dans les micro-infractuosités de l’émail dentaire traité a également été étudiée par Asmussen [Asmussen 1998] [Mount 1989] [uno 1992] [Werner 1994]. L’objectif principal de cette étude est de déterminer la viscosité de systèmes adhésifs amélodentinaires reposant sur le même principe de l’élimination complète de la boue dentinaire par la réalisation d’une couche hybride en une étape, le primaire d’adhésion et la résine adhésive étant contenus dans le même flacon. L’objectif secondaire est d’étudier le temps de remplissage d’un tubulus selon deux approches : de manière analytique et par éléments finis. MATÉRIELS ET MÉTHODES Les adhésifs : Les trois adhésifs choisis éliminent la boue dentinaire en deux étapes : le Prime & Bond 2.1®, le Prime & Bond NT®, le Syntac Sprint®. Le Prime & Bond NT® constitue une évolution du Prime & Bond 21® par adjonction de différents éléments (concentration de la résine augmentée, adjonction de D-résine, de T-résine et de microcharges). Méthode de détermination de la viscosité : La viscosité de trois systèmes adhésifs est déterminée grâce à un viscosimètre (StressTech® Rheometer) sur lequel est monté un outil type rhéomètre de Couette (figure 1). Cet outil, constitué d’un espace annulaire entre un cylindre creux et un cylindre tournant permet d’effectuer des mesures à cisaillement homogène. Il travaille à gradient de cisaillement faible proche du régime newtonien. Ainsi l’évolution de la cission (en Pa) en fonction du taux de cisaillement en (1) est obtenue (t = f). La pente de cette droite donne la viscosité. Figure 1 114 E. LEFORESTIER, E. DARQUE-CERETTI, Ch. PEITI, PO.BOUCHARD & M. BOLLA Étude préliminaire de la viscosité initiale de trois adhésifs dentinaires, relation avec leur pénétration dans les tubuli Les conditions expérimentales sont les suivantes : 60 gouttes d’adhésif Entrefer : 0,1 mm Température : 25 °C (constante) Taux de cisaillement : Durée de l’expérience : 1200 secondes Étude analytique de la pénétration des adhésifs dans les tubuli : Les forces agissant sur un liquide pénétrant dans un tube capillaire sont, sans prendre en compte la pression atmosphérique ni la pression appliquée, la tension de surface, la gravité mg (liée à la pression hydrostatique), la viscosité du liquide. L’équation de Washburn (1) est obtenue en équilibrant ces trois forces [Washburn 1921], (1) avec : r est le rayon du capillaire, en m g la tension de surface du liquide, en mJ. m-2 = m.N.m-1 q l’angle de contact, en degrés g l’accélération due à la pesanteur, en m. s-2 h(t) la hauteur du liquide à l’intérieur du capillaire à l’instant t, en m r la densité du liquide, en g. cm-3 = 1.10+3 kg. m-3 h la densité et la viscosité du liquide, en Pa. s = N/m2.s =kg.m.s-2.m-2.s = kg.m-1.s-1 Pour résoudre cette équation, il est nécessaire de comparer l’ordre de grandeur des valeurs numériques des forces dues à la pression hydrostatique avec celles des forces dues à la pression capillaire. On trouve ainsi le temps t de pénétration du liquide dans le capillaire : Avec : Patm : Pression atmosphérique Peo : Pression électro -osmotique Essai de modélisation de l’écoulement de fluide dans les tubuli : Le but de la simulation numérique consiste à analyser et à comparer l’écoulement de différents échantillons dans des tubuli sous l’action de la gravité. Pour cela, un logiciel aux éléments finis 2D FORGE2‚ a été utilisé. Ce logiciel permet de ramener la géométrie des tubuli se référant à un problème 3D à une configuration 2D axisymétrique. Ainsi, une modélisation par éléments finis est réalisée et les résultats obtenus peuvent être comparés à ceux de l’approche analytique. Ce logiciel n’étant pas destiné initialement à cette utilisation, quelques hypothèses simplificatrices (géométrique, d’interface et de comportement) ont dû être réalisées. 115 E. LEFORESTIER, E. DARQUE-CERETTI, Ch. PEITI, PO.BOUCHARD & M. BOLLA Étude préliminaire de la viscosité initiale de trois adhésifs dentinaires, relation avec leur pénétration dans les tubuli Figure 2 : Configuration géométrique du substrat et du tubulus.Vue en coupe Un modèle de tubulus est fixé (figure 2) : hypothèse d’une cavité cylindro-conique fermée dans sa partie inférieure, de profondeur 11 mm, de rayon supérieur 1,5 mm et inférieur 0,5 mm. Ceci permet d’étudier analytiquement le temps de remplissage de ces tubuli par les adhésifs en fonction de leur viscosité, et des différentes pressions qui interviennent lors de leur mise en place sur le tissu dentinaire. DISCUSSION La valeur de la tension de surface de l’eau a été prise dans la littérature, celle des adhésifs choisis comme une moyenne des valeurs de polymère liquide à température ambiante [Wu 1982]. Le calcul analytique montre que la valeur de l’angle de mouillage q n’a que très peu d’influence sur le temps de remplissage du tubulus par l’adhésif. À viscosité égale (eau et Prime & Bond 2.1®) le temps de remplissage dépend de la tension superficielle. Par exemple, dans le cas précis, où il y a un facteur 2 entre geau et g Prime & bond 2.1 le temps de remplissage est multiplié par 2. D’autre part, pour des valeurs de tension superficielle g égale (les 3 systèmes adhésifs), c’est la viscosité h qui influe sur le temps de remplissage canalaire (cf. Prime & Bond 2.1® ou Prime & Bond® avec Syntac Sprint®). La simulation numérique, qui elle prend seulement en compte la pression hydrostatique montre que pour trois adhésifs les temps de remplissage dépendent de la viscosité et de la masse volumique. Des calculs sont actuellement en cours pour simuler le comportement de l’eau. Quelle que soit la méthode de calcul, les temps déterminés sont extrêmement courts. Il faut noter que les hypothèses sont très contraignantes. Dans la littérature [Morris 96] il a été par exemple montré que le temps de remplissage permettait de calculer une viscosité apparente qui était 103 fois supérieure à celle déterminée par viscosimétrie classique. CONCLUSION Les résultats issus du calcul analytique et de la modélisation confirment un comportement différent des trois adhésifs de viscosité différente. Les trois adhésifs rempliraient les tubuli dentinaires extrêmement rapidement. À valeur de tension superficielle identique, la viscosité interviendrait sur le temps de remplissage des tubuli dentinaires. Cliniquement, compte tenu du temps de 20 s préconisé par les fabricants pour que ces produits imprègnent le tissu dentinaire, la viscosité de ces adhésifs ne semble pas être un élément déterminant dans la formation de la couche hybride. 116 E. LEFORESTIER, E. DARQUE-CERETTI, Ch. PEITI, PO.BOUCHARD & M. BOLLA Étude préliminaire de la viscosité initiale de trois adhésifs dentinaires, relation avec leur pénétration dans les tubuli RÉSULTATS Liquide Masse Tension Viscosité Volumique de surface (h) (r) (g) (Pa.s) (kg.m-3) (N.m-1) Calcul du temps de Pénétration t(s) par méthode analytique (sans tenir compte de la pression appliquée) Cosq= 1 Eau Prime & Bond 2.1® Prime & Bond NT® Syntac Sprint ® Calcul du temps de Pénétration t(s) par méthode modélisation Cosq= Temps t (s) où le fluide touche le fond du tubulus Temps t’ (s) de remplissage du tubulus 1.10-3 1.10+3 72.10-3 2,2.10-11 3,2.10-11 - - 1,1.10-3 0,58 10+3 30.10-3 5,9.10-11 7.10-11 7,34.10-4 2,6.10-3 1,4.10-3 0,6 10+3 30.10-3 7,5.10-11 1.10-10 9,28.10-4 3,79.10-3 50.10-3 1,04 10+3 30.10-3 2,7.10-9 3,8.10-9 1,84.10-2 7,21.10-2 117 E. LEFORESTIER, E. DARQUE-CERETTI, Ch. PEITI, PO.BOUCHARD & M. BOLLA RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES [Asmussen 1998] ASMUSSEN (E.), PEUTFZELD (A.). Surface energy characteristics of adhesive monomers. Dent Mater, janvier 1998, 14 : 22-28. [Dogon 1975] DOGON (I.L.). Studies demonstrating the need for an intermediary resin of low viscosity for the acid-etch technique. San Moritz, Switzerland, decembre 1974. St Paul : 3M Compagny (North Central Publishing), 1975 : 100-118. [Hansen 1984] HANSEN (E.K.). Marginal porosity of light-actived composites in relation to use of intermediary low-viscosity resin. Scand Journal dental of Research, 1984, 92 : 148-155. [Morris 1996] “Aspects de l’adhésion élastomère-métal poreux” Thèse en Sciences et Génie des Matériaux. ENSMPCorbeil. Centre des Matériaux, 1996. [Mount 1989] MOUNT (G.J.). The wettability of bonding resins used in the composite resin / glass ionomer “sandwich technique”. Australian Dent J, 1989, 34 : 32-35. [Uno 1992] UNO (S.), ASMUSSEN (E.). Dentin-bonding resins : Effects of solubility parameter and fractional polarity. J Dent Res, 1992, 71 : 614 (abstr 793). [Washburn 1921] WASHBURN (E.W.). The Dynamics of Capillary Flow. Phys Rev, 17 : 374-375, 1921. [Werner 1994] WERNER (J.F.), INOUE (M.), ASMUSSEN (E.). Effect of wettability of adhesive resins on bonding to dentin. Am J Dent, fevrier 1994, 7 : 35-38. [Wu 1982] WU (S.). Polymer Interface and Adhesion. Marcel Dekker, New York and Basel, 1982. 118 Propriétés des systèmes adhésifs et étanchéité in vitro. Détermination des facteurs discriminants. A. RASKIN (2), J. VREVEN (1) & J. DEJOU (2) (1) Université catholique de Louvain, Ecole de Médecine Dentaire et de Stomatologie, Bruxelles, Belgique. (2) Université de la Méditerranée, UFR d’Odontologie de Marseille, France. INTRODUCTION L’objectif de notre travail n’a pas été de comparer des matériaux mais d’évaluer les facteurs d’influence d’ordre méthodologique sur les résultats des études in vitro d’étanchéité. Cependant, toutes les études réalisées ont permis d’utiliser neuf adhésifs différents (avec deux protocoles de mise en œuvre pour l’un d’entre eux – CLB2Vp et CLB2Vd). Les modes d’action (dissolution ou élimination de la boue dentinaire), la nature du solvant (eau – acétone – alcool), la présence ou l’absence de charges, et le nombre d’étapes (2 ou 3) différencient ces adhésifs. De nombreuses publications ont cherché à montrer que tel ou tel de ces facteurs influençait les performances des adhésifs. Il a semblé intéressant, à la fin de cette étude méthodologique, d’utiliser la grande quantité de résultats collectés avec les neuf adhésifs testés (340 restaurations réalisées par l’opérateur 1, classe V en U et 3 000 cycles de thermocyclage), afin d’essayer de mettre en évidence l’importance respective de ces facteurs d’influence possibles. Le but n’était pas de comparer les adhésifs. Cependant, la méthodologie appliquée a été la même lors de la réalisation et de l’évaluation des 340 restaurations dans notre travail. Plutôt que rechercher des facteurs de causalité pouvant expliquer les résultats collectés, il s’est agi ici de décrire des groupes caractérisés par des facteurs de ressemblance et de dissemblance, en ce qui concerne les résultats de percolation. OBJECTIF Déterminer, parmi les variables permettant de caractériser un adhésif (mode d’action, solvant contenu dans le "primer", présence de charges dans la résine adhésive, nombre d’étapes), celle(s) qui influence(nt) l’étanchéité des restaurations évaluées dans les tests in vitro. MATÉRIEL ET MÉTHODE 1- Echantillon Les résultats des adhésifs, considérés dans cette étude, ont été repris des différentes expérimentations réalisées in vitro. Seuls les résultats obtenus par l’opérateur 1, avec 3 000 cycles de thermocyclage et pour des cavités de classe V en U ont été retenus. 340 restaurations ont été sélectionnées pour cette étude : - Étude 1 (Influence du délai de conservation des dents après extraction) : - Prime & Bond NT, Dentsply, Konstanz, Allemagne (PBNT) : n = 40 - Gluma One Bond, Heraeus Kulzer GmbH, Wehrheim, Allemagne (GOB) : n = 40 - Étude 2 (Influence de l’opérateur – opérateur 1 uniquement) : - Syntac Sprint, Vivadent, Schaan, Liechtenstein (SP) : n = 40 - Coltene Duo Bond, Coltene-Whaledent, Mahwah, NJ, USA (CDB) : n = 40 - Étude 3 (Influence de la forme de la cavité – cavités en U uniquement) : - Scotchbond Multi-Purpose, 3M Dental Products, St. Paul, MN, USA (SBMP) : n = 20 119 A. RASKIN, J. VREVEN & J. DEJOU Propriétés des systèmes adhésifs et étanchéité in vitro. Détermination des facteurs discriminants. - Étude 5 (Influence du thermocyclage – 3 000 cycles uniquement) : - Scotchbond Multi-Purpose, 3M Dental Products, St Paul, MN, USA (SBMP) : n = 20 - Clearfil Liner Bond 2, Kuraray Co, Osaka, Japon (CLB2) : n = 20 - Scotchbond One, 3M Dental Products, St Paul, MN, USA (SB1) : n = 20 - Optibond Solo Plus, Kerr Corp., Orange, CA, USA (OBS) : n = 20 - Corrélation étanchéité / adhérence : - Scotchbond Multi-Purpose Plus, 3M, St Paul, MN, USA (SBMP) : n = 20 - Optibond Solo Plus, Kerr Corp., Orange, CA, USA (OBS) : n = 20 - Clearfil Liner Bond 2 V photopolymérisable, Kuraray Co, Osaka, Japon (CLB2Vp) : n = 20 - Clearfil Liner Bond 2 V " dual ", Kuraray Co, Osaka, Japon (CLB2Vd) : n = 20 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 Adhésifs CDB CLB2 CLB2Vp CLB2Vd GOB OBS PBNT SB1 SBMP SP Mode d’action Elimination boue dentinaire Dissolution boue dentinaire Dissolution boue dentinaire Dissolution boue dentinaire Elimination boue dentinaire Elimination boue dentinaire Elimination boue dentinaire Elimination boue dentinaire Elimination boue dentinaire Elimination boue dentinaire Solvant Eau (5 %) Ethanol + eau Eau Eau Acétone (+ eau) Ethanol + eau Acétone Ethanol + eau Eau Ethanol (+ eau) Charges Oui Oui Oui Oui Non Oui Oui Non Non Non Nombre d’étapes 2 2 2 2 2 2 2 2 3 2 Tableau 1 : Classement des adhésifs (mode d’action, solvant, présence de charges et nombre d’étapes) Adhésifs 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 CDB CDB CLB2 CLB2Vp CLB2Vd GOB GOB OBS OBS PBNT PBNT SB1 SBMP SBMP SBMP SP SP Effectif expérimental Etanchéité (µm) Moyenne des maxima 416 315 1 027 196 777 1 838 1 799 659 606 2 037 1 713 1 280 1 393 1 082 1 503 921 1 664 40 (2 x 20) 20 20 20 40 (2 x 20) 40 (2 x 20) 40 (2 x 20) 20 60 (3 x 20) 40 (2 x 20) Ecart-type 105 137 1 468 471 1 104 961 959 589 250 1 059 785 1 005 969 764 1 227 467 976 Tableau 2 : Résumé des résultats d’étanchéité (µm) obtenus par les adhésifs testés 120 A. RASKIN, J. VREVEN & J. DEJOU Propriétés des systèmes adhésifs et étanchéité in vitro. Détermination des facteurs discriminants. 2- Analyse statistique La recherche des facteurs influençant le comportement des adhésifs, considérés comme variables explicatives, a été réalisée par la méthode A.I.D. (" Automatic interaction Detector "). Cette méthode permet de déterminer les relations entre une variable à expliquer (Y : profondeur de pénétration du traceur) et un ensemble de variables explicatives (Xi : mode d’action, solvant, charges, nombre d'étapes). Dans ce type de méthode, les variables explicatives sont qualitatives et la variable à expliquer, quantitative. Le principe est de constituer, à l’aide des Xi, des sous-groupes (profils) aussi homogènes que possible intra-groupe et aussi différents que possible inter-groupes. Les résultats sont présentés sous la forme d’un arbre binaire. Chaque branche de l’arbre donne un profil avec son résultat concernant la variable Y. Les branches correspondent aux sous-groupes les plus différents vis-à-vis de la variable à expliquer. Chaque découpage en deux sous-groupes est réalisé de la façon suivante : - pour chaque variable Xi restante, on cherche la meilleure partition en deux sous-ensembles de classes, - on cherche la meilleure variable explicative, c’est-à-dire celle qui sépare le mieux les individus. L’indice de séparation est le même pour le choix de la partition et de la variable. RÉSULTATS n = effectif du segment ; m = moyenne arithmétique de la variable à expliquer ; s = écart-type TSS = somme des carrés du segment (" total sum of square ") BSS = proximité des segments (" between sum of square ") b = gain entraîné par le découpage (rapport BSS / TSS segment 1) a = contribution du segment à la somme totale des carrés (rapport TSS / TSS segment 1) Convention : au cours de chaque découpage, on place dans le segment gauche, le sous-groupe ayant la plus grande moyenne, en valeur algébrique, de l’étanchéité. La première variable explicative qui a séparé les adhésifs a été le solvant : les adhésifs dont le " primer " contenait de l’eau ou de l’éthanol + eau ont obtenu les meilleurs résultats d’étanchéité (Figure 1). Pour ces adhésifs, la deuxième variable explicative a été la présence de charges : les adhésifs chargés ont obtenu de meilleurs résultats d’étanchéité que les adhésifs non chargés. Par la suite, aucune autre variable explicative n’a pu être mise en évidence pour les adhésifs à solvant acétone ou acétone + eau. Le mode d’action (dissolution ou élimination de la boue dentinaire) et le nombre d’étapes, lors de la mise en œuvre de l’adhésif (deux ou trois étapes), n’ont pas été retenus par le test AID parmi les facteurs expliquant les différences de pénétration du traceur. Cependant, la relativement faible part de variabilité expliquée par ce découpage (10,4 %) montre que d’autres facteurs ont influencé ces résultats. Deux analyses A.I.D., réalisées uniquement avec les adhésifs mono-composants (1) en incluant ou (2) en excluant les adhésifs avec “primer” auto-mordançant, n’ont pas modifié l’ordre des facteurs d’influence obtenu en premier lieu sur la totalité des matériaux testés et, a conduit même à une augmentation de la part de variance expliquée par le découpage (12,7 %) (Annexes (CD Rom) A2 – Adhésifs). Il n’en reste pas moins que les modes d’actions et le nombre d’étapes, mais aussi la nature chimique des monomères composant les adhésifs testés ont pu jouer un rôle non négligeable que l’effectif expérimental et, surtout les différences de tailles des échantillons, ont pu masquer. 121 A. RASKIN, J. VREVEN & J. DEJOU Propriétés des systèmes adhésifs et étanchéité in vitro. Détermination des facteurs discriminants. Figure 1 : Résultats de l’analyse par segmentation (méthode A.I.D. : " Automatic Interaction Detector ") CONCLUSION L’analyse multivariée réalisée dans ce travail (A.I.D.) a permis de mettre en évidence que la nature du solvant et la présence ou non de charges dans les adhésifs sont les deux facteurs, parmi ceux qui ont été étudiés, qui influencent le plus les résultats d’étanchéité. Dans ce cadre, ce sont les adhésifs à base d’eau ou d’éthanol et parmi eux, ceux qui contiennent des charges, qui ont semblé les plus susceptibles de limiter la percolation. 122 A. RASKIN, J. VREVEN & J. DEJOU Évaluation de l’adhérence de verrous orthodontiques selon différents protocoles de collage et observation des surfaces après rupture T. VERGÉ (1), G. GRÉGOIRE (1) & P. SHARROCK (2) (1) Laboratoire Interactions Biomatériaux Tissus Bucco-dentaires UFR Odontologie, Université Paul Sabatier, Toulouse (2) Laboratoire de Chimie Inorganique, Institut Universitaire de Technologie Paul Sabatier, Département de Chimie de Castres INTRODUCTION Le rôle des verrous orthodontiques est de transmettre les forces et moments délivrés par les systèmes orthodontiques mécaniques aux dents. L’utilisation des colles photopolymérisables s’est imposée largement aux orthodontistes par leur facilité d’emploi ainsi que leur fiabilité, qu’elles soient à base de résine composite ou de ciment aux verres ionomères. La manipulation de ces systèmes adhésifs dans des conditions souvent délicates (jeunes patients, difficultés de mise en place) amène les orthodontistes à rechercher des systèmes adhésifs tolérants et fiables durant le temps nécessaire à l’action de ces forces mécaniques sur les dents. BUTS DE CETTE ÉTUDE Évaluer l’adhérence d’un ciment aux verres ionomères sous différentes conditions d’utilisation, traitement préalable du substrat dentaire (mordançage ou conditionnement) et état physique de ce substrat (sec ou humide). Ces protocoles se retrouvant dans la plupart des systèmes adhésifs utilisés en orthodontie et tels qu’ils sont utilisés en pratique courante. Corréler ces valeurs d’adhérence mesurées, à des observations en microscopie électronique à balayage des surfaces amélaires après fracture, afin de préciser la nature de cette rupture. MATÉRIEL ET MÉTHODES La variabilité des techniques de préparation amélaire préalables (mordançage, conditionnement) ainsi que des matériaux utilisés (composite, ciment aux verres ionomères) nous a conduit à réaliser des tests d’adhérence in vitro sur 32 prémolaires (maxillaires et mandibulaires) fraîchement extraites selon des protocoles de collage différents. Les verrous utilisés sont des verrous en acier à base grillagée (Prémolaire supérieure universel, ORMCO, Glendora, CA, USA). Les systèmes adhésifs utilisés : - un système adhésif composite photopolymérisable (Transbond XT, 3M Unitek, Monrovia, CA, USA) - un système adhésif au ciment verre ionomère modifié à la résine (CVI), photopolymérisable (Fuji Ortho LC en capsule pré dosée, GC Corporation, Tokyo, Japon) 123 T. VERGÉ, G. GRÉGOIRE & P. SHARROCK Évaluation de l’adhérence de verrous orthodontiques selon différents protocoles de collage et observation des surfaces après rupture Constitution des groupes Les dents sont débarrassées de tout substrat organique au préalable ; la surface vestibulaire, future zone de collage, est nettoyée à la pierre ponce, exempte de fluor, puis rincée abondamment. Le lot des 32 prémolaires est divisé aléatoirement en quatre groupes de huit dents ; chaque groupe subira un traitement avant collage différent selon le système adhésif utilisé, l’émail étant soit séché à l’air sec pendant 20 secondes jusqu'à obtention d’une surface blanche crayeuse, soit laissé légèrement humide après rinçage. Le mordançage est réalisé à l’aide d’un gel à 37 % d’acide orthophosphorique (3M Unitek, Monrovia, CA, USA) déposé au pinceau sur les surfaces vestibulaires et activé par brossage pendant 30 secondes, l’émail est ensuite rincé au spray air/eau pendant le même temps. Le conditionnement est réalisé à l’aide d’acide polyacrylique (GC Corporation, Tokyo, Japon) à 10 % pendant 20 secondes puis l’émail est rincé selon un protocole identique. Groupes 1 2 3 4 Traitement de surface Mordançage Conditionnement Conditionnement Mordançage Etat Sec Humide Sec Sec Système adhésif Transbond XT Fuji Ortho LC Fuji Ortho LC Fuji Ortho LC Les racines des dents sont incluses dans des blocs de résine auto polymérisable de section parallélépipédique, les dimensions de ces blocs s’accordant aux mors du système de traction. Les essais mécaniques Les essais seront réalisés sur une machine à traction INSTRON à une vitesse constante de 0,5 mm/min pour une précision de 5 kN, les tests déterminent la contrainte de cisaillement (MPa) ramenée à une surface de collage de 12.2 mm2 (surface utile du verrou). La partie fixe du système de traction est reliée au verrou par l’intermédiaire d’un fil de ligature orthodontique, la liaison est réalisée de telle façon que la direction de la force (l’axe du fil de ligature) soit exercée parallèlement à la base du verrou. Les résultats sont enregistrés par un système informatisé qui délivre pour chaque essai des courbes de traction ainsi que les valeurs numériques des contraintes de cisaillement. Observation des interfaces de rupture Les surfaces amélaires sont ensuite dégagées de leur support résineux et préparées afin d’être observées en microscopie électronique à balayage (microscope électronique environnemental ESEM Philips XL 30). L’observation permettra la caractérisation de la zone de fracture grâce au score ARI (Adhesive Remnant Index) ou Index de Colle Résiduelle décrit et utilisé par Artun et Bergland 1 (1984) et par Flores et al.5 (1999). Pour chaque groupe, des observations zonales seront répétées afin de préciser sur toute la surface de collage la présence ou l’absence de matériau de collage après fracture. 124 T. VERGÉ, G. GRÉGOIRE & P. SHARROCK Évaluation de l’adhérence de verrous orthodontiques selon différents protocoles de collage et observation des surfaces après rupture RÉSULTATS Résultats des tests de cisaillement Notre étude montre des résultats conformes aux valeurs de la littérature, les valeurs des contraintes de cisaillement sont comprises entre 4.7 et 19 MPa selon les protocoles et les systèmes d’adhésion utilisés. On note que les meilleurs résultats sont obtenus pour le matériau de collage en résine composite (Transbond XT) placé sur un émail sec et mordancé au préalable. Les valeurs obtenues pour le Fuji Ortho LC sont variables en fonction du traitement de surface et de son état, cette différence significative entre collage sur émail conditionné sec et humide est également observée par les travaux de Liebmann et Jost-Brinkmann 6 (1999). Nous constatons également de très bonne valeur d’adhérence pour le groupe 4 (émail mordancé, sec, Fuji Ortho LC), en accord également avec les autres études expérimentales publiées à ce jour, protocole qui peut sembler contradictoire connaissant les propriétés des ciments verre-ionomères (Béress et al.2, 1998 ; Chung et al.3, 1999). Résultats des observations des faciès de rupture Le score ARI porte sur l’évaluation quantitative en pourcentage de la surface d’émail encore recouverte par le système de collage utilisé, après rupture de la liaison verrou / dent… Quatre scores sont décrits, en fonction du pourcentage croissant de colle restant à la surface amélaire : - score 0 : moins de 10 % de colle résiduelle - score 1 : entre 10 % et 50 % de colle résiduelle - score 2 : entre 50 % et 90 % de colle résiduelle - score 3 : plus de 90 % de colle résiduelle 125 T. VERGÉ, G. GRÉGOIRE & P. SHARROCK Évaluation de l’adhérence de verrous orthodontiques selon différents protocoles de collage et observation des surfaces après rupture Les scores privilégiant la protection de l’émail après rupture, concerne le score 3, obtenu en majorité pour le groupe 4 (mordançage, sec, Fuji II LC), c’est dans le groupe 1 (mordançage, sec, Transbond XT) que la couche d’émail superficielle est la plus sollicitée, alors qu’elle a été précédemment agressée chimiquement par l’acide orthophosphorique. Les groupes 2 et 3, montrent des ruptures adhésives avec un pourcentage variable selon l’état de surface de l’émail. DISCUSSION L’observation des résultats des tests d’adhérence nous montre que les valeurs moyennes obtenues par les quatre groupes sont suffisantes pour mener un traitement d’orthodontie, la plupart des auteurs (Maijer et al.7, 1979 ; Reynolds, 8 1975), estiment qu’une valeur d’adhérence de l’ordre de 8 MPa est compatible avec les forces exercées sur les dents par les systèmes mécaniques orthodontiques. On peut noter, comme toutes les études réalisées, la supériorité des systèmes de collage à base de résine composite sur les ciments aux verres ionomères, cette supériorité s’explique à la fois par les propriétés mécaniques supérieures de la colle composite sur les ciments aux verres ionomères, mais aussi par le traitement mordançant appliqué à l’émail qui majore l’adhérence par les rétentions micromécaniques ainsi créées. La comparaison entre les groupes 3 et 4 ne montre pas de différence significative entre conditionnement et mordançage dans l’emploi du Fuji II LC, par contre, il semble préférable de réaliser un collage sur émail sec lorsque l’on utilise ce système adhésif après conditionnement, les valeurs obtenues se rapprochant trop des limites de l’utilisation clinique. Il semble donc qu’une surface sèche après préparation amélaire (conditionnement ou mordançage), associée aux couples de collage classiques : mordançage / composite ou conditionnement / CVI, amènent à des résultats probants en terme de valeur d’adhérence. 126 T. VERGÉ, G. GRÉGOIRE & P. SHARROCK Évaluation de l’adhérence de verrous orthodontiques selon différents protocoles de collage et observation des surfaces après rupture En terme de sollicitation des couches superficielles de l’émail, le système composite est celui qui semble provoquer les plus grandes contraintes lors de la rupture, les collages réalisés à l’aide du CVI provoquent des fractures adhésives avec des zones où persiste le ciment sur l’émail, plus ou moins nombreuses selon les groupes. CONCLUSION Au vu des résultats obtenus, quel que soit le système de collage utilisé (CVI ou colle composite) les valeurs d’adhérence sont compatibles avec un exercice orthodontique habituel. S’il s’agit de rechercher des valeurs d’adhérence supérieures (cas clinique particulier, forces exercées par les dispositifs mécaniques importantes) les composites de collage associés à un protocole classique semblent recommandés. Néanmoins, ces collages au-delà de l’agression chimique qu’ils réalisent sur l’émail (8 à 15 µm), sollicitent lors de la dépose en fin de traitement ou en cas de rupture accidentelle de la liaison verrou / dent, la surface de l’émail, pouvant provoquer des altérations préjudiciables (FischerBrandies H. et al.4, 1989). D’autres études complémentaires seront nécessaires afin de quantifier ces altérations et de mieux évaluer ainsi les répercussions sur l’organe dentaire. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1. ARTUN J., BERGLAND S. Clinical trials with crystal growth conditioning as an alternative to acid-etch enamel pretreatment.Am J Orthod. 1984 Apr ; 85(4):333-40. 2. BERESS A., TJAN AH., SCHLENKER WL., WONGSRIMONGKOL T. Bond strengths of two resin-modified glass adhesive. Am. J Orthod Dentofacial Orthop. 1998 ; 32 :299-302 3. CHUNG C., CUOZZO PT., MANTE FK. Shear bond strength of a resin-reinforced glass ionomer cement : An in-vitro comparative study. Am. J Orthod Dentofacial Orthop. 1999 ; 115 :52-4 4. FISCHER-BRANDIES H., TRÄGNER-BORN J. Les ciments aux verres ionomères utilisés comme matériaux de fixation en orthodontie. Ortho.Fr, 1989 ; 60 : 827-34 5. FLORES AR., SAEZ G., BARCELO F. Metallic bracket to enamel bonding with a photopolymerizable resin-reinforced glass ionomer. Am. J Orthod Dentofacial Orthop. 1999 ; 116 :514-17 6. LIEBMANN SM., JOST-BRINKMANN PG. In-vitro study of resin-modified glass ionomer cements for cementation of orthodontic bands. J Orofac Orthop 1999 ; 60 :348-60 7. MAIJER R., SMITH DC. A new surface treatment for bonding. J. Biomed. Mater. Res.1979 ; 13 :975-85 8. REYNOLDS IR. À review of direct orthodontic bonding. Br. J. Orthod. 1975 ; 2:171-78 127 T. VERGÉ, G. GRÉGOIRE & P. SHARROCK Évaluation in vitro des performances de deux adhésifs auto-mordançants et d’un composite fluide pour l’obturation de puits et fissures D. GLAVINA (1), F. COURSON (2), W. ARANDA (2), JP. ATTAL (2) & M. DEGRANGE (2) (1) Faculté de Chirurgie Dentaire Zagreb, Croatie (2) Groupe de Recherche Biomatériaux, Faculté de Chirurgie Dentaire Paris 5, Montrouge, France OBJECTIFS DE L'ÉTUDE : 1/Évaluer le potentiel d'étanchéité procuré par 2 adhésifs auto mordançants (Clearfil SE bondKuraray(CSEbond) – et Prompt L pop(Plpop) – 3M/ESPE) versus un pre-mordançage classique (H3PO4 37 %). 2/Étudier les performances d'un composite fluide (Tetric Flow(Tflow) – Vivadent) en alternative à un sealant (Concise White Sealant (CWS) – 3M/ESPE). MATÉRIEL ET MÉTHODE 90 dents réparties en 6 groupes = Groupe 1 : H3PO4 + CWS / Groupe 2 : PlpopLC + CWS / Groupe 3 : Plpop + CWS / groupe 4 : H3PO4 + Tflow / Groupe 5 : Plpop + Tflow / Groupe 6 : Clearfil SE bond + CWS. Après thermocyclage et coloration au nitrate d'argent, les dents sont enrobées et sectionnées. Sous loupe binoculaire, 2 paramètres sont enregistrés : 1. Pénétration du matériau dans les puits et fissures, 2. Étanchéité suivant la méthode des scores (de 0 à 3). Pour l'analyse statistique, le plus mauvais score est retenu pour chaque échantillon. L'effet matériau et/ou l'effet de traitement de surface sont mis en évidence par un test non-paramétrique de Kolmogorov-Smirnov. Pour la comparaison des lots 2 à 2, un test de Kruskal-Wallis et un test de Mann-Whitney sont utilisés. RÉSULTATS Pour la pénétration du matériau il existe une différence significative entre les deux matériaux (p = 0,001) : la résine fluide remplissant moins bien les puits et fissures des dents permanentes. Au contraire, le traitement de surface n'influence pas le taux de pénétration (p=0,08). Le choix du matériau n'influence pas l'étanchéité (p=0,16). Par contre, le traitement de surface montre une différence significative entre les différents groupes (p=0,0006). L'H3PO4 reste le meilleur traitement de surface. Les meilleures combinaisons sont H3PO4 + Tflow, H3PO4 + CWS et SE bond + CWS. CONCLUSION En terme de pénétration, l'utilisation d'une résine fluide ne s'avère pas aussi efficace que le sealant traditionnel. Pour l'étanchéité, le traitement de surface est plus important que le choix du matériau. L'acide phosphorique reste le meilleur traitement quel que soit le matériau. Au contraire, l'utilisation d'un “Tout en un” ne présente pas une bonne étanchéité quelque soit le matériau. Le selfetching primer avec le sealant peut être un bon compromis. SELF-ETCHING ADHÉSIFS, SEALANTS 128 D. GLAVINA, F. COURSON, W. ARANDA, JP. ATTAL & M. DEGRANGE