Tant que nos enfants vont à l`école, nous nous portons bien

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Tant que nos enfants vont à l`école, nous nous portons bien
014 » TÉMOIGNAGE
Tant que nos enfants vont à l’école,
nous nous portons bien
Entretien avec une famille syrienne qui a obtenu
le statut de réfugié
Récemment nous avons rencontré
Hekmat Rashad et sa famille dans leur
appartement à Differdange, ensemble
avec une responsable du « Comité National de Défense Sociale » qui encadre
la famille dans ses démarches.
Hekmat a été agriculteur en Syrie,
exploitant notamment une plantation
de pommes grenade et d’oliviers près de
la ville d’Afrin,
dans la province
d’Aleppo.
Dans la saison creuse, il a travaillé comme
couturier à Aleppo. C’est cette qualification qui lui a permis de trouver un travail
chez nous. Depuis un an, il est employé
par « Nei Aarbecht » à Helmdange. Une des
initiatives de « Nei Aarbecht » est l’« upcycling » de vêtements, c’est-à-dire la mise
en valeur de vêtements de seconde main
à travers une transformation. C’est avec
une fierté non cachée qu’il nous montre
un exemple, un sac, réalisé à partir d’un
veston de costume pour homme.
Hekmat est kurde, il est arrivé avec sa
famille au Luxembourg en 2011. Un de
ses frères a fait partie des forces armées
syriennes. Pour une raison qu’il ignore,
celui-ci a été exécuté et depuis toute sa
famille est en disgrâce, pas d’accès ni à
des études, ni à un travail. En quittant la
Syrie en direction
de la Turquie, ils
avaient l’intention
« Je ne sais pas ce qui reste de notre maison »
had
Hekmat Ras
42 ans
Rossil
11 ans
Lawandoz Ali
32 ans
(les femmes ga
rdent
leur nom de na
issance)
Roliane
8 ans
» 015 de se rendre en Grande-Bretagne, où
d’autres membres de sa famille ont trouvé
refuge. A partir de la Turquie, ils ont été à la
merci de passeurs. Il ne souhaite pas nous
dire combien il a dépensé, en tout cas cela
a dû être substantiel. Commence alors un
calvaire dans un camion, la famille ignore
par où elle est passée pour se ­retrouver un
jour en Allemagne. L’évocation de ce trajet
fait remonter des souvenirs douloureux et
les enfants sont priés de quitter le salon
pour ne pas les traumatiser davantage.
En Allemagne la famille est orientée vers
le Luxembourg.
On dit à Hekmat qu’au Luxembourg, il
saura au bout de 6 mois si on lui accorde
le statut de réfugié ou non. C’est dans
cet espoir que la famille est d’abord
hébergée pendant un mois au foyer Don
Bosco, avant d’être transférée à l’ancien
­Institut Héliar à Weilerbach, où la famille se
retrouve séparée. Par manque de place, les
hommes sont regroupés avec les hommes
et les femmes entre femmes dans des
chambres collectives. Au bout d’un mois
la famille est à nouveau réunie dans une
chambre. Elle restera un an et demi dans
cette chambre dans une grande isolation,
les autres résidents à la Weilerbach étant
majoritairement des ressortissants de
l’ex-Yougoslavie, la communication était
difficile.
Contrairement à ce qui lui avait été
annoncé au départ, l’interview portant
acceptation du statut de réfugié, n’a eu
lieu qu’après un période d’attente d’un an
et demi. Suite à quoi la famille est transférée ensemble avec une autre famille
dans une maison individuelle à Livange.
En évoquant cette période à Livange, nous
ressentons une certaine nostalgie. En effet,
comme la maison disposait d’un jardin,
ils ne se sont pas fait prier pour le cultiver,
ce qui a été bénéfique pour le moral,
mais également une façon de nouer
des contacts avec les voisins. Depuis
trois mois, ils sont installés dans leur
appartement
à Differdange
et regrettent
Livange. Les
enfants, surtout la fille cadette, peinent
à s’adapter à leur nouvel environnement
et on sent que la possibilité de travailler la
terre manque à cet ancien cultivateur.
Interrogé sur la problématique des religions, Hekmat constate que longtemps
il n’y avait pas eu de conflits entre les
différentes religions dans sa région natale.
Or, depuis que des forces qu’il ignore,
s’agitent les uns contre les autres, la
situation est devenue invivable. Il constate
que toutes les religions prônent l’amour
vers autrui. Ainsi il déplore profondément
l’agissement des extrémistes à travers le
monde entier.
Est-ce qu’ils se plaisent au Luxembourg ?
Du moment que les enfants vont à l’école
c’est l’essentiel, car en Syrie il n’y a plus
d’écoles.
« L’essentiel, c’est que nous sommes
ensemble, sains et saufs »
A la question quelles étaient leurs aspirations, la réponse est claire et nette : de
la stabilité. En effet, ils savent déjà qu’ils
devront quitter l’appartement dans lequel
ils sont au bout de 3 ans. Difficile de s’intégrer dans ces conditions.
Est-ce qu’ils ont l’espoir de retourner en
Syrie ? On sent qu’ils aimeraient répondre
par oui, mais en restant réaliste, c’est peu
probable.
L’essentiel, c’est qu’ils sont ensemble et
qu’ils sont sains et saufs, contrairement à
d’autres membres de sa famille qui se sont
noyés en Méditerranée pendant leur fuite.
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» 017 Sur Google Earth, nous avons cherché et
trouvé la maison qu’ils habitaient, ainsi
que les plantations. Visiblement ému,
­Hekmat Rashad nous avoue qu’il ne sait
pas ce qu’il en reste.
Madame Josée Gales, chargée de
direction de « Nei Aarbecht », nous
précise que la famille bénéficie du
RMG, que l’appartement appartient au
Fonds du logement et qu’il est géré par
la « Wunnengshëllef ». Le contrat avec
« Nei Aarbecht » prévoit 30 heures de
travail hebdomadaire et 4 heures de
cours de français.
“Nous espérons avoir de la stabilité
dans notre vie”
Le saviez-vous ?
Les Kurdes
Les Kurdes sont un peuple descendant des Mèdes, qui compterait 30
à 40 millions de personnes vivant
surtout en Turquie (Kurdistan du
Nord), en Iran (Kurdistan de l’Est),
en Irak (Kurdistan du Sud) et en Syrie
(Kurdistan de l’Ouest).
Depuis un siècle, certains Kurdes
luttent pour leur autodétermination,
afin d’avoir leur propre patrie, le
Kurdistan. Tous les États qui abritent
une communauté non négligeable
de Kurdes s’opposent activement
à la création d’un État kurde, craignant de devoir abandonner une
partie de leur territoire national.
Une émigration récente a entraîné
l’apparition d’une diaspora kurde
qui est présente dans tous les pays
de l’Europe occidentale, aux ÉtatsUnis et en Australie. L’ancienne
communauté qui était près de
Kaboul quitta le pays pendant la
guerre de l’Afghanistan à la fin des
années 1970.
Les Kurdes parlent des dialectes
proches les uns des autres, tous
issus du kurde, langue indo-européenne de la branche iranienne.
Le kurde utilise des alphabets différents (latin, cyrillique, arabe, persan)
et connaît plusieurs variantes :
le sorani au Kurdistan du Sud et de
l’est, le kurmandji dans les quatre
parties, le zazaki au Kurdistan du
Nord, et d’autres dialectes sont
parlés au Kurdistan tels que le lori,
le laki, le gorani, etc. La majorité des
Kurdes sont sunnites (80 %), mais il
existe d’autres croyances tels que
l’alévisme, le yézidisme, le druze,
le yarsanisme, le christianisme, le
judaïsme (actuellement en Israël)
et dans une plus faible proportion
le chiisme.
(Wikipedia)