La formation continue Formation
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N 321-EXE_Mise en page 1 21/02/14 11:37 Page36 Formation PROFESSION La formation continue Un investissement pour l’entreprise vétérinaire « Une entreprise est le résultat de l’énergie et de la créativité et des hommes et des femmes qui la dirigent ou qui y investissent » (Arnaud Montebourg). La formation professionnelle, continue et complémentaire, est « un investissement majeur pour la compétitivité durable des entreprises et des territoires » (colloque de la Fédération de la Formation Professionnelle, février 2013). D’une manière générale, une entreprise doit innover, créer et améliorer la qualité et la fiabilité de chacun de ses produits. La formation professionnelle est le moyen pour obtenir de meilleures performances, de favoriser l’innovation et la créativité. L’entreprise vétérinaire doit aussi concevoir la formation continue et complémentaire, encore dénommée développement professionnel continu (DPC) comme une partie intégrante de ses investissements ; la formation continue est un moyen d’améliorer les compétences et la qualité des soins prodigués et aussi la productivité. Le développement professionnel continu : un besoin ? une obligation ? un plaisir ? Eric Guaguère Docteur vétérinaire Diplômé ECVD, DESV Dermatologie Vétérinaire Président AFVAC André Berthier Docteur vétérinaire Responsable de la Formation Continue AFVAC 40 rue de Berri 75008 PARIS Juliette Andréjak Docteur vétérinaire CEAV Médecine Interne Master méthodes en Santé Publique Responsable de la Formation Continue AFVAC 40 rue de Berri 75008 PARIS En préambule, la formation continue vétérinaire est organisée par le Comité de la Formation Continue Vétérinaire (CFCV) (récemment encore dénommé, Conseil National de la Formation Continue et Complémentaire (CNVFCC)) qui est une association professionnelle de loi 1901. En France, la formation continue vétérinaire est basée sur le volontariat (donc actuellement non obligatoire, contrairement à certains pays européens) ; il convient de rappeler l’obligation déontologique de formation qui existe dans notre Code de Déontologie article R 242-33 alinéa X : « Le vétérinaire acquiert l’information scientifique nécessaire à son exercice professionnel, en tient compte dans l’accomplissement de sa mission, entretient et perfectionne ses connaissances. » En médecine « canine », la formation continue s’est développée dès les années 1960, et ce, afin de répondre à une carence de formation initiale dans ce domaine. Actuellement, notre profession ne dispose que de peu de données précises sur le pourcentage de vétérinaires qui se forment régulièrement en France mais elle a la réputation de se former plus que les médecins qui ont plutôt une attitude passive dans la démarche. Quelques chiffres, en 2012 : 3180 vétérinaires se sont formés auprès de l’Association Française des Vétérinaires pour Animaux de Compagnie (AFVAC) et ont participé en moyenne à 2 formations, soit 25,4 % des 12496 vétérinaires qui possèdent une activité principale ou secondaire « animaux de compagnie » (Rapport annuel CSO 2012). Un article récent publié en septembre 2013 dans Veterinary Record, analyse les facteurs de motivation à se former en Grande-Bretagne (Motivating factors and perceived barriers to participating in continuing professional development: a national survey of veterinary surgeons V. H. M. Dale, S. E. Pierce, S. A. May). L’AFVAC a récemment réalisé une enquête en ligne auprès des vétérinaires, adhérents comme non adhérents à l’AFVAC ; 631 vétérinaires ont répondu à ce questionnaire. Cette étude a permis de préciser les facteurs de motivation et les freins à participer à des formations (tableaux 1 et 2). D’une manière générale, les raisons de se former sont multiples et variées • La formation continue a pour objectif principal l’augmentation de la compétence et de la technicité de toute l’équipe vétérinaire (vétérinaires libéraux, vétérinaires salariés et personnel non vétérinaire (AQV, ASV)). Pour les vétérinaires salariés et le personnel non vétérinaire, elle est même réglementée et obligatoire. Une équipe soignante bien formée constitue une valeur ajoutée dans l’entreprise vétérinaire. • La formation continue doit être aussi le fruit d’une démarche individuelle et intellectuelle. Une formation doit être aussi vécue comme un moment d’échanges professionnels et personnels et un moyen de lutte contre l’isolement professionnel. Chaque vétérinaire doit intégrer le développement professionnel continu dans sa pratique habituelle depuis son installation jusqu’à la fin de son exercice. Évaluer les besoins en formation de l’entreprise vétérinaire L’évaluation des besoins en formation au sein de l’entreprise vétérinaire est essentielle. La définition d’un plan de formation rationalisé et d’un responsable coordonnateur au sein de l’entreprise est souhaitable. Les fonctions de ce responsable consistent en la sélection des personnes à former (vétérinaires, ASV...), les thèmes et les sujets à développer, le choix des structures formatrices et aussi l’organisation logistique. Idéalement, cette planification doit être anticipée et devrait se faire pour une année (prévue dans l’année n - 1). L’évaluation des besoins en formation tient compte des axes de développement prévus par la structure vétérinaire : besoins généraux (gestion d’entreprise, ressources humaines, communication…), développement de nouveaux N°321 du 27 février au 5 mars 2014 36 N 321-EXE_Mise en page 1 21/02/14 11:37 Page38 PROFESSION Facteurs de motivation (d’après enquête Formation continue AFVAC 2013) Tableau 1. Facteurs de motivation à la formation continue. En rouge les facteurs intrinsèques et en bleu les facteurs extrinsèques. Les réponses ont été cotées : toujours (3), souvent (2), occasionnellement (1), jamais (0) afin d’obtenir un score moyen pour chaque facteur de motivation. Enquête AFVAC 2013. Freins à la FCV (d’après enquête Formation continue AFVAC 2013) Tableau 2. Freins à la formation continue. Les réponses ont été cotées : tout à fait d’accord (2), un peu d’accord (1), pas du tout d’accord (0), non concerné(0) afin d’obtenir un score moyen pour chaque frein. Enquête AFVAC 2013. secteurs d’activité, spécialités médicales, formations particulières (évaluation de la dangerosité des chiens...). Savoir choisir les formations Le choix des formations peut être délicat compte tenu du développement de l’offre de formation aussi importante qu’hétéroclite. Celui-ci doit tenir compte : • du caractère diplômant de la formation (et inscrit sur la liste des titres reconnus par le Conseil Supérieur de l’Ordre et dont on peut se prévaloir). En France, seules les Écoles Nationales vétérinaires sont habilitées à délivrer des diplômes (Diplômes d’Écoles (DE), Diplômes InterÉcoles (DIE), Certificats d’Études Supérieures (CES), Certificats d’Études Approfondies Vétérinaires (CEAV), Diplômes d’Études Spécialisées Vétérinaires (DESV). Les diplômes de spécialistes européens (Diplomate of…) délivrés par les collèges européens de spécialités (reconnus par l’European Board of Veterinary Specialisation (EBVS)) peuvent être reconnus après avoir suivi une procédure spécifique. Ces formations complémentaires diplômantes nécessitent un investissement personnel et financier important. N°321 du 27 février au 5 mars 2014 38 N 321-EXE_Mise en page 1 21/02/14 11:37 Page39 Formation • du type de formations : formations présentielles, formations en e-learning et lecture de journaux et d’ouvrages scientifiques. Les formations présentielles comprennent différents modes d’apprentissage (exposés, travaux pratiques, travaux dirigés et travaux cliniques (démonstrations)). D’après notre récente enquête, les vétérinaires qui ont formulé une opinion sur ce sujet (n = 523) préfèrent les travaux pratiques (68,4 %, n = 364) et les exposés (64,5 %, n = 343), aux travaux dirigés (39,1 %, n = 208) ou démonstrations (20,9 %, n = 111). • de l’ingénierie pédagogique et scientifique de la structure formatrice : objectifs pédagogiques, niveau de la formation (initiation, remise à niveau, approfondissement, spécialisation), contrôle de la formation… ayant permis ou non son accréditation par le CFCV. Quatre grands types de structures formatrices peuvent être distinguées : 1-les organismes techniques associatifs à but non lucratif, 2-les écoles nationales vétérinaires, 3-les structures commerciales privées de formations, 4-les laboratoires pharmaceutiques, les industries de l’alimentation animale, les centrales d’achat et les entreprises de matériel médical. À noter que les structures de la quatrième catégorie n’ont pas la possibilité d’obtenir l’agrément du CFVC mais peuvent être partenaires dans des formations proposées par les trois premières catégories. D’après notre enquête, l’obtention de « Crédits de Formation Continue » (CFC) ne constitue pas un critère de choix pour la formation (86 %, n = 539/625) ; l’existence de CFC pour une formation ne constitue pas non plus un critère de qualité (78 %, n = 488/625). • de leur durée qui influence sur le temps d’éviction professionnelle. Cet impact est à noter lors de formations présentielles qui se font souvent en journée. Il faut toutefois signaler l’aspect chronophage de certains e-learning mais qui ont, pour certains, l’avantage d’être plus souples dans le moment de la formation. • du statut libéral ou salarié. En effet, la possibilité de prise en charge des formations pour les salariés par l’OPCA-PL (devenu fin 2013 ACTALIANS) est très encadrée ; les formations OPCA-PL compatibles doivent respecter un certain nombre de critères d’éligibilité : groupe de 20 apprenants au maximum, modules de 7 heures à la suite, thème cohérent et précis, aucun partenariat commercial, validation en fin de journée, maximum de 5 jours par an. Évaluation du retour sur investissement d’une formation L’évaluation du retour sur investissement de la formation continue (ou professionnelle) est importante mais demeure inexistante actuellement dans notre profession. À titre indicatif, le ministère de l’économie et des finances en 2010, puis le ministère du redressement productif en 2013 ont demandé à la Fédération de la Formation Professionnelle (FFP) des entreprises l’élaboration d’une grille d’indicateurs qui permet aux entreprises de mieux rendre compte des impacts économiques et sociétaux de leurs investissements en formation professionnelle. Parmi les nombreuses missions du nouveau comité de la formation continue vétérinaire (CFCV), l’évaluation du retour sur investissement d’une formation pourrait être une mission originale et novatrice pour notre profession. Les enjeux de la formation continue vétérinaire sont donc réels. Beaucoup de vétérinaires l’ont compris. Notre profession peut se féliciter d’avoir organisé son développement professionnel continu, fondé sur le volontariat avant qu’on ne le lui impose. Le vétérinaire doit concevoir son développement professionnel continu dans un cadre personnel mais également dans le cadre de sa structure. n • de leur lieu de formation qui influe sur le coût global de la formation et aussi sur la durée de l’éviction professionnelle. Cet impact est également plus important pour les formations présentielles que pour les formations en e-learning. • de leur coût de formation, de plus en plus variable pour une offre similaire. Ces variations du coût tiennent compte de nombreux facteurs (structures de formation, partenariat, statut libéral ou salarié…). Il convient de signaler le coût élevé de certaines formations en e-learning. La formation continue permet aussi de conserver le lien entre les professionnels de la santé animale. N°321 du 27 février au 5 mars 2014 39