Journal no 8 - Direction N`tolo
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Journal no 8 - Direction N`tolo
Direction N’tolo Journal N° 8 - Février 2009 Noël à N’tolo - Une fête réussie Nous avions commencé l’année 2008 au Cameroun, fêtant l’entrée dans la nouvelle année dans un foyer fraîchement inauguré. Un an plus tard, nous pouvons prendre la mesure des effets que ce voyage aura eu sur notre association. L’entrée dans la nouvelle année est l’occasion de considérer le chemin parcouru et les projets accomplis. Mais c’est aussi envisager la suite, les projets d’une envergure de plus en plus importante, avec un regard nouveau. Nous vous proposons donc, dans cette nouvelle formule de notre journal, un aperçu détaillé des projets en cours et à venir, un retour sur notre histoire, complété d’un bilan de l’année 2008, ainsi que différents éclairages et réflexions que nous inspirent nos liens avec le Cameroun. Pascal Briod Dans ce journal ... Nouvelles du foyer culturel 2 Bibliothèque à Ebone 2 Projets moustiquaires 3 Microcrédit 4 Nouvelles de FARESO 5 L’histoire de Petit Njoume 5 Marché de Noël à Givrins 6 Rétrospectives 6 Rapport d’activités 6 Fenêtre sur ... 7 Instant Photo 7 Réflexion 8 Suite au décès d’un membre de la famille de Laurence, de nombreuses personnes ont fait un don en faveur de Direction N’tolo. Nous avons longuement réfléchi à la manière d’utiliser ces dons… et nous avions vraiment envie qu’ils soient destinés à un événement précis et non pas dispersés dans divers petits projets. Les fêtes de fin d’année approchant, nous avions alors décidé d’offrir une fête de Noël aux habitants du village de N’tolo. Cette fête, ce fut avant tout celles des habitants de N’tolo… Nous avons émis cette proposition, et ce sont eux qui ont pris les choses en main : de la préparation du budget qu’ils nous ont soumis, jusqu’au choix des cadeaux pour les enfants ou du menu du repas, en passant par la sélection des morceaux de musique pour la « soirée dansante » ! Dans ce petit village parfois bien tiraillé par des querelles de voisinage, c’est alors un véritable esprit de collaboration qui s’est installé. C’est ainsi que le 24 décembre 2008, les festivités ont commencé avec un match de foot opposant les jeunes de N’tolo à ceux du village voisin. La partie religieuse de la fête a également été interprétée à leur manière. Puis vint l’heure de la distribution des cadeaux, à chaque enfant du village. Nous pouvons imaginer à distance leurs yeux tout pétillants à la découverte de ces jouets, qui avaient été emballés et décorés de ficelle. Au téléphone le lendemain de la fête, une petite fille nous a confié : « c’était la première fois que j’ai reçu un cadeau dans du papier ». La journée a continué avec un repas : bâtons de manioc, macabot, banane plantain, poisson séché, poulet sauce arachide… et tout cela accompagné d’une boisson par personne. La fête fut belle et la soirée longue, tous les échos que nous avons reçus nous le confirment! Merci à tous ceux qui nous ont permis d’offrir ce moment de joie et de détente à ce village. Projections de films - 22 et 29 mars Pour vous tenir directement au courant des projets menés au Cameroun et de l’évolution de notre association en Suisse, nous vous proposons deux rencontres, le 22 mars à Nyon et le 29 mars à Pully. Nous commencerons par projeter les images tournées lors de notre voyage en hiver 2007-08, film que les participants à notre dernier repas de soutien ont déjà vu. Nous passerons ensuite à un bref retour sur l’année 2008 et les perspectives pour 2009. Après cela, vous pourrez visionner un nouveau film, tourné par Laurence cet été, qui permet de mieux comprendre la structure de FARESO et les projets que nous soutenons sur place. Nous nous réjouissons de vous y retrouver! 15h00: Film de voyage 16h00: Apéro 16h30: Retour sur 2008 et perspectives 2009 17h00: Film sur nos projets Sentez-vous libre de venir pour n’importe quelle partie du programme! 1 PROGRAMME EDITO NOUVELLES DU CAMEROUN Des nouvelles du foyer de N’tolo Nous sommes ravis de voir que durant ces derniers mois, le foyer financé par Direction Le foyer culturel dont nous avons financé la construction est utilisé pour de nombreuses et diverses activités. N'tolo dans le village a servi à différentes occasions : mariage, tournoi de foot, fête de Noël, distribution des moustiquaires, congrès de Génération Action, réunion des autorités etc… Après notre visite en décembre 2007, nous avions laissé un foyer en plein chantier. Laurence, lors de son séjour en été 2008, a constaté que le plafond avait été terminé et les murs crépis. Par contre, des tensions se sont fait sentir lors de son séjour. En effet, nous avons remarqué que nous n'avions pas entièrement respecté la hiérarchie du village : jamais les clefs du foyer n'ont été remises à sa majesté le chef de N'tolo. Dès lors, il ne s'est pas senti impliqué dans cette structure et aucun règlement d'usage n'a été élaboré, chacun désirant y appliquer des règles différentes. Des dis- cordes sont apparues au sujet de l'éventuelle location du foyer ou de l'utilisation du matériel (chaises…) ainsi que de la consommation d'électricité qui, pour l'instant, est prise sur la maison voisine. C'est pourquoi nous avons voulu réparer cette erreur et une petite cérémonie a été organisée durant le séjour de Laurence pour remettre officiellement les clefs au chef du village. Nous espérons désormais qu'ils parviendront à se mettre d'accord sur l'utilisation de la salle, afin que cet édifice reste un lieu de rencontre entre les villageois et non une source de tensions. Salle de consultation de manuels au lycée d’Ebone Comme mentionné dans le numéro précédant de notre journal, le lycée d'Ebone nous a rapporté que près de trois quarts des élèves n'ont pas de Le lycée d’Ebone qui bénéficie déjà d’une aide de notre part par le biais de l’Association des Parents d’Elèves devrait se voir doter d’une salle de consultation de manuels. 2 manuels scolaires, faute de moyens financiers. Comme ce lycée est fréquenté par des jeunes de N'tolo que nous soutenons et que l'éducation fait partie de nos préoccupations, nous avons voulu agir et faire face à ce problème. Pour cela, nous avons réfléchi à différents systèmes, notamment au prêt de manuels, mais la meilleure solution nous a semblé être une salle de consultation des manuels, si- tuée dans le lycée même. Notre projet serait d'aménager une salle de classe et d'y mettre à disposition les manuels des matières principales. Pour avoir accès à cette salle, les élèves devront s'inscrire et payer une cotisation annuelle symbolique (2.5 CHF), permettant de cibler les élèves véritablement intéressés par cette opportunité et ne profitant pas simplement de la gratuité du service. A l'heure actuelle, 157 élèves sur 800 ont déjà montré un intérêt à cette salle. Un système de contrôle des arrivées et des sorties ainsi que la présentation du reçu de paiement de la cotisation seraient des moyens d'éviter les abus. Un effectif maximum sera également fixé, afin que les conditions de travail soient les meilleures possible. Pour encadrer les jeunes et répondre à leurs questions, un professeur du lycée sera présent pendant les heures d'ouverture. Nous avons donc envoyé un dossier présentant notre projet au Proviseur, qui ne nous a répondu que trois mois plus tard. Ce manque de rapidité, ainsi que le flou dans certaines informations demandées, nous ont gênés, mais le sérieux avec lequel notre projet a été pris en considération nous a par contre enthousiasmés. En effet, un règlement de la salle a déjà été établi et un professeur a été nommé comme personne de référence. Nous espérons ainsi que la communication sera plus efficace, car mener à bien un projet à distance nécessite une communication optimale. Il nous reste encore des décisions importantes à prendre, notamment concernant le local à utiliser, une salle qu'il faudra sûrement rénover. En effet, le Proviseur nous a écrit : « La mise a disposition d'une salle est la preuve de notre engagement en faveur du projet. Construite en matériaux définitifs, celle-ci n'a ni fenêtre, ni plafond et ses murs ne sont ni peints ni crépis. Les installations électriques et sanitaires ne sont pas réalisées de même que le sol non revêtu ». Nous vous tiendrons au courant de l'avancée du projet dans les prochains numéros. NOUVELLES DU CAMEROUN Le congrès de Génération Action à N’tolo Le 6 décembre dernier s'est déroulé, à N'tolo, le Congrès de Génération Action. Ce grand rendez-vous réunissant tout le village au foyer a été l'occasion, pour le groupe de jeunes ressortissants de N'tolo, de présenter ses projets parmi lesquels certains sont réalisés avec notre collaboration. Tout d'abord, Génération Action a désiré profiter de ce moment privilégié pour mettre en place un atelier de prévention contre le paludisme, s'inscrivant dans notre projet commun de distribution de moustiquaires aux villageois. D'autre part, le concept du microcrédit ainsi que la mise en route du projet nommé «Crédit.com» (voir l'article «Un pas en avant pour Crédit.com») y ont également été évoqués, ce qui constitue un premier pas dans le domaine. D’autre part, ce Congrès était l'occasion de raffermir les liens entre les jeunes du village partis pour Douala – en les personnes des membres de Génération Action – et les habitants de N'tolo. Un repas a été organisé au foyer, ainsi que différentes activités culturelles. Génération Action est un partenaire très apprécié de Direction N'tolo, entre autre pour sa fiabilité et son efficacité mais aussi pour les bons contacts humains que nous entretenons avec ses membres. C'est pourquoi nous avons décidé de soutenir financièrement cette réunion néces- saire au fonctionnement de leur association Nous ne pouvons que répéter que nous nous réjouissons d'une telle collaboration et que nous souhaitons pleine réussite à ce groupe dans les projets qu'il mène avec et sans nous. Danger, un de nos interlocuteurs principaux de Génération Action. Le projet « Stop aux piqûres de moustiques » Le 6 décembre 2008, dans le foyer culturel de N'tolo, s'est déroulé un atelier de prévention et de lutte contre le paludisme. Nous vous l'exposions déjà dans nos précédents journaux ; le projet de distribution de moustiquaires, mené avec la collaboration de l'association camerounaise Génération Action, a commencé au mois de mai de l'année passée par une distribution d'une centaine de moustiquaires imprégnées aux habitants du village de N'tolo grâce au soutien du club de tennis suisse JoTo. Ce projet de lutte contre le paludisme est important car la malaria est l'une des plus grandes causes de mortalité au Cameroun, alors que l'utilisation d'une moustiquaire imprégnée diminue fortement les risques de tomber malade. Mais après cette distribution, les membres de Génération Action ainsi que Laurence, lors de son voyage cet été, ont découvert qu'une partie des moustiquaires n'étaient pas ou mal utilisées et que certains foyers n'en étaient pas encore dotés. Nous avons donc décidé, en accord avec Génération Action, de réitérer cette action pour compléter la première distribution tout en proposant une meilleure sensibilisation avec l'aide d'un médecin. C'est donc au courant du mois de décembre qu'une journée de prévention a été organisée par Génération Action avec l'aide du Dr. Hans Mossi, médecin à l'hôpital de Nkongsamba. Dans un premier temps, le docteur a présenté avec l'aide d'un projecteur les dangers du paludisme, ses manifestations chez l'homme et les protections à mettre en place contre la maladie. Ensuite, la parole a été donnée à l'assistance pour les différentes questions. Nous pensons avoir ainsi mieux préparé la population à cette action grâce à cet atelier, ce qui avait manqué lors de la première distribution. Cette journée, qui a rassemblé les habitants de la région du village de N'tolo, a été très positive, car la population a réellement pris connaissance des risques de la maladie, et les moustiquaires distribuées seront sûrement mieux utilisées à l'avenir. Le troisième acte de cette lutte contre le paludisme est la distribution de nouvelles moustiquaires, demandées uniquement par les personnes présentes après avoir suivi l'atelier. C'est ainsi qu'une liste de 80 nouvelles moustiquaires nous a été transmise, comprenant une demande de 10 moustiquaires pour les jeunes enfants de l'orphelinat de N'tolo, ainsi que pour le centre de santé. Grâce à cela, les femmes enceintes recevront une moustiquaire lors des consultations prénatales. Cette distribution, qui aura lieu ces prochains mois, sera accompagnée d'une nouvelle sensibilisation et d'une aide de la part des jeunes du village pour l'installation des moustiquaires. On distingue des indication de prévention du paludisme, projetées sur un drap, avec comme dernier point: « utiliser les moustiquaires imprégnées » 3 NOUVELLES DU CAMEROUN Un pas en avant pour Credit.com Les projets d’élevage et d’agriculture représenteront sans doute la majorité des projets bénéficiant de cette structure de microcrédit. Dans notre journal du mois de novembre dernier, nous vous décrivions un projet d'un style nouveau ; la création d'un fonds de microcrédit. Depuis lors, des progrès ont été réalisés sur cette voie, main dans la main avec Génération Action, cette association de jeunes originaires de N'tolo, basée à Douala. Si l'impulsion a tout d'abord été donnée par Direction N'tolo lorsqu'elle a fait connaître son envie de mener à bien un tel projet, le premier pas a été fait pour sa part par Génération Action. En effet, au mois de septembre, nous avons reçu un e-mail contenant une ébauche de statuts pour ce projet baptisé « Crédit.com », rédigée par le groupe de jeunes camerounais. Les bases de ces statuts correspondaient en grande partie à nos attentes et c'est pourquoi nous les avons reprises et retravaillées en partie, selon ce que nous pensions être le but du projet et suivant ce que nous avons appris par la lecture d'articles sur le sujet. Dans les grandes lignes, Crédit.com vise des projets dans un périmètre relativement restreint autour de N'tolo, notamment dans les domaines de l'agriculture et de l'artisanat. Les conditions générales sont que le projet soit considéré comme viable, lucratif et respectueux d'autrui et de l'environnement. Dans un premier temps, les bénéficiaires d'un prêt seront des personnes de confiance, des connaissances fiables des membres de Génération Action, non dans un but de discrimination, mais afin que nous démarrions avec des réussites et que nous puissions faire les quelques ajustements nécessaires sans trop de difficulté. Pour obtenir un prêt, la personne qui le demande doit disposer du quart de son budget. Si c'est le cas, Crédit.com mettra à sa disposition les trois quarts restants. De manière générale, les sommes prêtées seront remboursées à hauteur de la moitié, et de 30% pour des prêts inférieurs à 500 francs suisses. Notre but est en effet de soutenir les efforts constructifs de personnes entreprenantes et en aucun cas de faire du profit. L'entier du projet étant basé sur la confiance, les prêts ne sont pas soumis à des intérêts et les remboursements seront échelonnés d'un commun accord. Par ailleurs, Crédit.com met un point d'honneur à ce que les femmes soient particulière- ment encouragées à participer et à entreprendre des projets qui les valorisent au sein de la société. Aujourd'hui, alors que les statuts ont été acceptés par Génération Action et par Direction N'tolo, de solides bases sont enfin jetées. La campagne pour faire connaître le projet débute ces jours. Elle a pour but d'informer la population de N'tolo et des alentours avec précision de notre projet, afin que tout un chacun en ait connaissance. Cette opération de « publicité » est menée par des membres de Génération Action ; ces derniers utilisent des affichettes, des flyers et pratiquent le porte à porte dans le village de N'tolo. Bien que nous ayons déjà suivi d'autres projets ressemblant à ceux visés par Crédit.com, notre but est de commencer avec quelque trois ou quatre projets au cours d'une première période. Cette relative prudence nous permettra de nous familiariser avec les problèmes que nous rencontrerons immanquablement. Lancer un nouveau projet représente toujours un pari et celui-ci en est un, plus que tout autre. Mais nous espérons sincèrement que de la bonne volonté de chacun puisse émerger une structure qui élargira le champ des opportunités des villageois de N'tolo. Yeux de Bœuf, des perles du Cameroun 4 Lors de notre voyage en décembre 2007 au bord de la mer à Limbé, nous avons trouvé des graines, nommées sur place des "Yeux de boeuf". Notre tante a eu l'idée d'en acheter une grande quantité, de les percer d'un petit trou et de les ramener en Suisse. Ainsi, on peut fabriquer de magnifiques bijoux et autres décorations. Un magasin spécialisé dans la vente au détails de perles (Magasin Bead Box, rue Haldimand 6, à Lausanne) s'est montré intéressé par ces graines. Nous lui avons ainsi fourni 1500 pièces qui sont en vente dans leur magasin. L'argent ainsi récolté a été envoyé à Jocanto, le responsable de FARESO. Il est libre d'utiliser cette somme selon ses priorités et ses besoins du moment. NOUVELLES DU CAMEROUN La vie à FARESO La vie suit son cours à FARESO, qui se prépare au début de la saison des cultures vivrières. En effet, le centre possède maintenant de nouveaux terrains qu'il s'agit d'exploiter au mieux. Contribuant à rendre la structure autonome financièrement, l'élevage de poulets apporte quelques bénéfices à chaque volée de nouveaux poussins. Notre soutien à FARESO avait commencé en 1998 par le financement des petitsdéjeuners pour les jeunes de FARESO. D'ailleurs, pour les anciens du centre, nous som- mes toujours les « enfants des petits-déjeuners ». C'est une action qui nous tient à cœur et dont les résidents de FARESO bénéficient encore à ce jour, tout comme l'aide scolaire, sous forme de cours privés. Jocanto doit faire face à des problèmes de discipline avec ses jeunes. Il a en effet été confronté à diverses désobéissances au règlement interne, notamment au couvre-feu et à des fugues plus ou moins définitives. Il est toujours décevant de voir des jeunes tourner ainsi le dos à cette main que leur tend Jocanto, mais ce dernier reste réaliste et s’attend à ce que les excursions des jeunes tournent court. Il s'applique à soutenir ceux qui sont prêts à travailler et à l'écouter. L’histoire de Petit Njoume Décembre 2007, nous sommes à N’tolo, et nous voyons chaque jour avancer la construction du foyer culturel que nous avons financé depuis la Suisse. Nous voyons des jeunes du village et des alentours s’affairer afin de finir dans les temps pour l’inauguration. Et parmi ces jeunes, il y a Petit Njoume, habitant de N’tolo. C’est lui qu’on voit toujours s’agiter de tous les côtés, montant sur les échelles et travaillant d’arrache pied pour respecter les délais. En mars 2008, Petit est victime d’un accident de moto. Il souffre d’une fracture à la cheville, qui sera mal soignée à l’hôpital de la ville voisine, N’kongsamba. Plusieurs mois s’écoulent et les douleurs s’intensifient. Nous sommes alertés de la situation par un ami, qui nous décrit la difficulté que Petit a pour se déplacer : il traverse le village avec peine, aidé d’une béquille. Il ne peut plus travailler et peine à nourrir sa femme et sa fille, âgée alors d’un an. Il avait monté un projet de culture de piments, auquel nous avions participé financièrement, et toute sa culture se retrouve sans soins. On nous parle d’une opération possible, mais à un prix qui lui est inac- cessible. Et nous nous retrouvons de notre côté avec un choix lourd, un pouvoir que nous ne voulons pas avoir, une position que nous ne voulons pas occuper… À nous de décider, si oui ou non, Direction N’tolo va financer l’opération de ce jeune homme. Nous sommes persuadés de l’urgence et de la précarité de la situation, mais nous avons toujours évité de mettre sur place une aide à titre uniquement personnel. Cette action irait contre les principes habituels avec lesquels nous avons décidé de monter notre projet, mais nous nous rendons vite compte que nous ne pouvons pas rester insensibles à la situation, nous protégeant derrière nos habitudes. Il n’est pas possible de justifier un refus, surtout après les liens que nous avons créés avec lui lors de notre séjour. C’est ainsi que nous avons décidé de débloquer une somme de 1700 CHF pour financer l’opération de sa cheville. En juillet 2008, Laurence est à N’tolo ; l’opération a eu lieu au mois de juin. Petit vient d’enlever son plâtre et peut désormais se déplacer librement, même s’il boîte encore. Les douleurs se font plus rares et l’espoir renaît. Il est désormais papa d’une deuxième petite fille née le jour-même de l’opération. Il lui reste encore un long chemin à parcourir : savoir ménager son pied pour ne pas trop le fragiliser, tout en remettant en place un nouveau projet de culture pour subvenir aux besoins de sa petite famille. De cette histoire, nous pensons avoir beaucoup appris. Nous n’avions encore jamais été confrontés à une telle situation. La décision de l’aider fut unanime, mais elle nous a placés dans une position que nous n’affectionnons pas : d’un seul clic sur le site de la gestion du compte de l’association nous pouvions décider si cet homme allait marcher à nouveau. Nous avons eu beaucoup de mal à supporter ce « pouvoir » et nous avons dû finir par apprivoiser cette situation et ses enjeux avant de prendre une décision… Petit et sa béquille 5 NOUVELLES DE SUISSE Marché de Noël à Givrins Nous avons déjà parlé à plusieurs reprises des activités Un jeune de l’école de Givrins, tenant un stand. que nous menons avec les élèves de l’école de Givrins. Nous nous sommes rendus plusieurs fois dans leurs classes, afin de leur montrer le film du voyage, des photos ou encore discuter avec Landry lors de sa venue en septembre dernier. beaucoup de peine pour organiser cette vente, et nous sommes touchés qu’ils aient choisi de la faire en faveur de notre association. Cette fois, ce sont eux qui se sont mis à l’action ! Ils ont préparé des bricolages, cartes de vœux, décorations de Noël et des biscuits, qu’ils ont vendus lors du traditionnel marché de Noël de leur école, ayant décidé de verser les bénéfices à notre association. Nous sommes ravis de voir que ces enfants se sont donnés En remerciement, chaque classe a reçu un calendrier avec des photos des enfants de N’tolo, afin qu’ils aient une image réelle des autres jeunes qu’ils ont ainsi soutenus ! Un grand merci à toutes les maîtresses de l’établissement qui ont organisé ce marché, ainsi qu’à Mme Mertens qui est notre interlocutrice à l’école ! Retour sur les débuts de notre association Le graphique que nous vous proposons ci-dessous retrace un pan de l'histoire de notre association, qui fête ses onze ans cette année. Cette longévité, gage de crédibilité et de stabilité, nous étonne encore. Nous prenons plaisir à nous pencher sur nos tout premiers journaux, sur notre manière de fonctionner naïve et enfantine des premières années et, lorsque l'on constate le chemin accompli, nous ressentons une indéniable fierté. Si les premiers mots griffonnés à l'âge de dix ans sont émouvants, les statistiques de nos récoltes de fonds depuis le début de notre action sont, elles aussi, intéressantes. Nous avons récolté 180 francs en 1998, puis presque 500 francs l’année suivante, et passions la barre symbolique des 1000 francs en 2000. Aujourd'hui, le budget annuel de notre association tourne en général autour de 20'000 francs! Bien que les chiffres concernant les premières années de notre action soient assez ap- Bilan 2008 L'année 2008 nous a permis de récolter plus de 30'000 francs, surfant sur la vague provoquée par notre voyage. À noter que dans cette somme est comprise une contribution importante et exceptionnelle du Gymnase de Nyon (15'000frs), que nous remercions tout particulièrement. Cette somme sera consacrée à des projets dans le cadre de l’éducation. Nous avons ainsi pu envisager de nombreuses actions, dont certaines ne sont encore qu’en phase d'élaboration ou de test, comme le projet de microcrédit. C'est un total de plus de 9'000 francs que nous avons envoyé au Cameroun, à nos différents interlocuteurs; pour plus de la moitié à FARESO, une bonne partie dans le cadre de nos partenariats avec Génération Action et le reste à l’APE. Argent récolté de 1998 à 2009 6 proximatifs, il est très intéressant de mettre tout cela en perspective. L’évolution de nos moyens nous a permis au fil des ans de soutenir de plus en plus de projets et d’ampleur croissante. Nous continuons à envoyer de l'argent pour les petitsdéjeuners, premier projet à forte symbolique, mais cette action fait partie d'un éventail aujourd'hui beaucoup plus large. Notre voyage fut bien sûr l'occasion d'élaborer et de lancer de nombreux projets. Dans la structure de FARESO d'abord, avec l'élevage de poulets, les cultures vivrières et l'atelier Sida, puis une aide à l'APE, l'association des parents d'élèves du lycée d'Ebone, et enfin de nombreux partenariats avec Génération Action. FENETRE SUR ... La communication entre un patient et son médecin La communication est la base d’une consultation médicale, le moyen d’échanger, de parler, le lien qui unit un médecin et son patient. Dès les premières années d’études de médecine en Suisse, on nous parle de cette communication, de ses diverses formes, de ses multiples visages, mais surtout on ne cesse de nous illustrer son importance. Lors d’un séjour au Cameroun, j’ai participé à une campagne de santé durant laquelle nous nous rendions dans des zones reculées en milieu rural pour organiser des consultations médicales gratuites, avec distribution de médicaments. Parmi l’extraordinaire richesse de mes découvertes, je pense que le thème de la communication m’a particulièrement interpellée. Voici quelques exemples des surprises que j’ai rencontrées et des anecdotes que j’ai vécues. Premier constat : le sexe reste un sujet tabou. Typiquement, on ne dira jamais à une femme: « Avez-vous encore des relations sexuelles? » la question étant bien trop directe, même dans le cabinet d'un médecin, dans lequel chez nous la question serait acceptée par la plupart des patientes. Un jour dans un village reculé, je participais aux consultations avec un jeune médecin camerounais et je l’ai entendu dire à une femme: « Tu fais encore la chose de la vie? ». Quand je l’ai entendu poser cette question, je me suis demandée ce qu'il sous-entendait et ce n'est qu’après la réponse de la patiente que j'ai fini par comprendre ! C'est une communication et une manière de décrire les symptômes et les événements de nos vies très surprenantes, avec des moyens parfois détournés, usant de sous-entendus très subtils, tout en restant très imagés. Les questions sont parfois directes ou alors au contraire totalement détournées, selon le sujet abordé. Les réponses sont courtes, discrètes ou murmurées. Le vocabulaire est très vulgarisé afin d'être compris de tous. Par exemple, on m’a un jour conseillé de ne jamais dire : « Souffrez-vous d’allergies?». Intriguée, je n’ai pas compris pourquoi c’était un terme à éviter. Alors Hulain, jeune médecin camerounais, m’a proposé de m’illustrer ce problème avec le prochain patient. Pendant la consultation du malade, Hulain lui a demandé s’il souffrait d’allergies et le patient nous a répondu négativement, sûr de lui, avec un grand sourire. Après l’avoir ausculté, Hulain lui a demandé à nouveau : « Est-ce qu'il y a un médicament qui te dérange dans le corps ou sur la peau quand tu le prends? ». A cette question, l’homme lui a répondu très sérieusement: « Oui, quand je prends la quinine (un anti-malarique), après ça me fait les boutons sur la peau ». Cet homme ignorait tout simplement ce qu’était une allergie, mais je n’aurais jamais imaginé tourner la question ainsi, et pourtant il le fallait si on désirait obtenir une réponse valable. Voilà comment en une seule question, un médecin formé sous nos latitudes serait passé à côté de ce problème, en y ayant pourtant pensé! Un autre exemple de vulgarisation, au sujet du type de douleur: « C'est une douleur qui était tout le temps dans toi, ou bien ça va, ça vient, ça va faire un tour dehors et ça revient? ». Des qualificatifs bien éloignés de nos lancées, douleur fulgurante, sourde, aiguë et autres…. Cette communication, bien que comique à découvrir, me dérange dans certains aspects. Elle me dérange justement car ce que je découvre ici ne correspond pas à ma définition de la communication, où deux personnes échangent et se transmettent des informations. Je vois au Cameroun un médecin poser des questions, beaucoup de questions, et des patients répondre, souvent avec quelques mots à peine, à part quelques mamas qui nous racontent leur vie, leurs projets, leur rêves, le nom de leurs quinze petits-fils, la date du mariage du dernier neveu ou le nombre de tubercules de manioc qu’elles ont déterrés de leurs champs durant la matinée… Mais je ne vois ni un échange ni l’établissement d’une relation, qui sont pourtant pour moi les fondements même de la communication. J’ai donc découvert un autre visage de la communication au Cameroun. Un visage qui reste très scientifique, au risque d’oublier parfois qu'en face de nous le patient, avant d'être une maladie, est un être humain. Mais un visage que je me suis efforcée d’observer sous toutes ses facettes, avant de parvenir à découvrir ce qui fait sa force. C’est après mon retour en Suisse, en repensant aux heures de consultations auxquelles j’ai assisté, que j’ai finir par réaliser la justesse et l’adaptation dont pouvaient faire preuve ces jeunes médecins dans leur manière de parler aux patients. Ils connaissent leur pays, ses coutumes, ses habitudes et sa population. Quant une vieille personne entrait, ils engageaient directement la conversation en dialecte local afin d’être sûrs d’être compris. Quand une jeune fille s’asseyait en face de nous, ils pouvaient reconnaître aux cicatrices de scarification traditionnelle sur son visage à quelle tribu elle appartenait et ainsi savoir si la polygamie était fréquente dans ces populations, prescrivant alors par exemple les traitements contre les IST à tout le « ménage » et demandant aux autres femmes de venir également se faire consulter. Quand une femme susurrait un « non » étranglé à la question « avez-vous déjà subi un avortement », ils savaient que cette réponse voulait en fait dire oui, l’avortement étant illégal au Cameroun. Quand une maman nous affirmait que son enfant suivait déjà un traitement chez un « ami », ils pensaient directement à la sorcellerie… Autant d’exemples qui illustrent l’importance de la connaissance de la culture dans laquelle on travaille. C’est alors que j’ai réalisé combien nous pouvions être surpris par l’expérience du visage que prend la communication dans d’autres pays. Mais qu’au final, c’était à moi d’accepter que cette communication était en lien et en adéquation avec leur culture, et surtout efficace dans ce milieu, celui que j’étais venue découvrir. Laurence Thévoz INSTANT PHOTO Nous ne sommes pas partis au Cameroun pour y découvrir ses paysages ou la beauté de sa nature; mais plutôt pour y rencontrer ses habitants, sans doute la vraie richesse de ce pays. La nature y est pourtant magnifique : ici les chutes d'Ekom nous offrent une atmosphère à couper le souffle. Loin de la pollution de la ville ou de l'agitation du village, la beauté de la nature, le relief, le bruit de l'eau permettent de s'extirper un instant d'une réalité pas toujours facile à vivre et de prendre le recul nécessaire pour l'assimiler. L’aide du Nord, la cause du sousdéveloppement du Sud ? REFLEXION CONTACT Les relations qui lient le Nord et le Sud, qu’elles soient aide au développement, aide internationale ou aide humanitaire, se basent bien souvent sur un rapport de force inégal. Ces termes expriment tous un déséquilibre, qu'ils ne font peut-être en définitive qu'accentuer. On peut en effet facilement être critique et sceptique face à cette aide intercontinentale. Pour certains simplement inutile, pour d'autres, considérée comme néfaste, elle est même accusée d’être la cause du sous-développement. Elle ne ferait qu'entretenir un rapport de dépendance des pays du Sud envers ceux du Nord, freinant l'esprit d'entreprise et entravant le développement. De plus, elle est souvent mal dirigée, ne touchant que l’élite et les fonctionnaires et très peu le reste de la population. Les aides internationales seraient même un moyen pour l'Occident d'asseoir sa domination sur les pays du Sud en les maintenant dans une pauvreté, qui lui est finalement bien utile. Les membres de l’élite à la tête des Etats du Sud, souvent maintenus en place par le Nord, n'ont donc pas intérêt à œuvrer au développement de leurs pays et au bien-être de la population. Sans prendre au pied de la lettre cette thèse du complot international et ce tableau sombre de l'aide internationale, il faut toutefois garder un esprit critique face aux bonnes actions qu'on nous vend bien souvent. L'on pourrait se dire que c'est uniquement l'aide à grande échelle qui pose problème, en raison d'un contrôle difficile et d'un passage obligé par les gouvernements qui empêche l'aide d'atteindre sa cible. Mais l'aide à l'échelle locale ne s'affranchit pas complètement des paradoxes de la solidarité intercontinentale. Site internet : www.direction-ntolo.com Une bonne intention peut parfois avoir des conséquences négatives. Une récolte d'habits d'occasions dans un pays du Nord, acheminés et vendus à des prix défiant toute concurrence sur les marchés africains peut par exemple ruiner les artisans locaux. Ces aberrations et ces paradoxes ne doivent pas nous pousser à ne rien faire, à fermer les yeux devant les inégalités de ce monde, mais à faire mieux, en ouvrant grands les yeux et les oreilles pour comprendre au mieux ceux que l'on soutient. Je crois qu'il faut agir en gardant la dose d'utopie nécessaire à toute action de solidarité mais en y ajoutant pragmatisme et humilité lors de la mise sur pied de projets concrets. C'est ce que nous nous efforçons de faire dans nos relations avec les Camerounais que nous soutenons. Nous nous plaçons sur un pied d'égalité et collaborons à l'élaboration de projets, ne cherchant pas à imposer nos idées préconçues. Nous cherchons également à tout prix à éviter de rendre les personnes que nous aidons dépendantes et préférons les projets qui ont pour but de les rendre économiquement plus autonomes. Plutôt que d'aller dans le sens de la victimisation et de la déresponsabilisation de nos interlocuteurs camerounais, nous visons à favoriser et soutenir leur esprit d'initiative et d'entreprise. Sans prétendre éviter tous les pièges de l'aide au développement, nous sommes conscients qu'ils existent, et avons la conviction que le peu que nous pouvons faire, il faut le faire! Pascal Briod Adresse email : [email protected] Compte postal : 17-520072-5 1279 Chavannes-de-Bogis Adresse et téléphone région Lausanne: Pascal Briod, C.F.Ramuz 51, 1009 Pully 076 220 23 10 Adresse et téléphone région Nyon: Laurence Thévoz, Champs Blancs 72, 1279 Chavannes-de-Bogis 079 694 90 05