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Les infirmiers anesthésistes en souffrance
La Roche-sur-Yon - Modifié le 25/02/2016 à 04:00 | Publié le 23/02/2016 à 02:11
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Les infirmières anesthésistes Estelle Chenechaud et Maëlle Doremus militent pour le maintien
de leur niveau d'excellence, aussi pour les patients. |
Patrick GUYOMARD.
Ils se sentent exclus de la loi santé de 2015. Les infirmiers anesthésistes souhaitent défendre
leur exclusivité de pratique, leur technicité. Pour ne pas disparaître.
Elles bataillent, Maëlle Doremus et Estelle Chenechaud. Représentantes du collectif des infirmiers
anesthésistes du CHD (centre hospitalier départemental) de Vendée, elles sont remontées contre la
nouvelle loi santé qui les aurait oubliés, « qui nous a mise à l'écart ».
Ils sont près de 10 000 en France à être diplômés d'État (IADE), quarante au CHD yonnais, et six
à la clinique Saint-Charles. Une profession finalement mal connue du grand public, qui demande
une solide formation. « Avant de devenir infirmier anesthésiste, il faut faire les trois ans
d'études d'infirmier, ensuite exercer pendant au moins deux ans avant de pouvoir prétendre
à passer le concours, qui s'étale sur deux ans, détaille Estelle Chenechaud. Au total, ça fait
sept ans de formation. » Le cursus est validé avec un master.
Au quotidien, les deux infirmières tournent aux urgences, à la maternité, pour traiter la douleur en
général, au Smur (Service mobile d'urgence et de réanimation), et bien sûr, au bloc opératoire.
Une amplitude de 12 h intensives. « On a une exclusivité de compétence. Ne peuvent exercer
dans notre domaine, que les infirmiers anesthésistes ou certaines sages-femmes. »
Le statut bénéficie d'une grande autonomie dans sa pratique. « Notre expérience au bloc
opératoire nous sert énormément pour les urgences. On est capable d'endormir un patient,
de l'intuber », mais toujours sous la responsabilité du médecin.
« Notre formation risque d'être démantelée »
Justement, Maëlle Doremus intervient en ce moment aux urgences en renfort, pour les cas lourds.
Elle accompagne aussi les sorties du Smur. « On travaille en binôme avec le médecin
urgentiste, pour les gestes techniques, la mise en place des protocoles... » Dans ce service
mobile, le stress est décuplé. « C'est une prise en charge du patient, et de son entourage, qui
se fait dans tout type de situation à l'extérieur. »
Le problème des infirmiers anesthésistes, aujourd'hui, c'est l'article 119 de la loi santé de 2015. Un
nouvel échelon a été créé : les professions intermédiaires, un statut d'Infirmier de pratiques
avancées (IPA). Il s'intègre dans le cursus universitaire licence-master-doctorat (LMD). « Les
infirmiers anesthésistes correspondent exactement à cette définition, assure Estelle
Chenechaud. Pourtant, le ministère de la santé refuse notre accession au statut de profession
intermédiaire. Notre formation risque d'être démantelée en plusieurs formations.»
Maëlle Doremus confirme : « On se retrouve déconsidérés sur notre exclusivité de pratique,
notre technicité. Aujourd'hui, on doit se battre pour continuer à exister. »
Pour l'instant, le statut IPA ne concerne que les domaines de la cancérologie, de la diabétologie, et
les parcours complexes de la gériatrie et de la neurologie. « Mais cela pourrait s'étendre aux
urgences », s'inquiète Estelle Chenechaud.
Elle cite un exemple au niveau du Samu : « Les transports sanitaires doivent être réalisés par
un infirmier anesthésiste, mais ce n'est plus une obligation légale. Les patients seront pris en
charge par des soignants moins formés. Preuve qu'à terme, notre exclusivité de compétence
et notre formation de sept ans vont disparaître. »
La sécurité des patients
Si Estelle Chenechaud respecte profondément le travail des autres infirmiers, elle compare la loi
sur les nouvelles professions intermédiaires à « un grand squelette sans articulation. Autour,
tout est possible. On va être remplacés par des infirmiers formés sur des bases floues.
Vraiment, on se sent dévalorisés depuis l'introduction de ce statut IPA. »
Surtout, la sécurité des patients demeure au coeur de son discours : « L'anesthésie a fait de
grands progrès au travers du binôme médecin anesthésiste-infirmier
anesthésiste, noteMaëlle Doremus. Les accidents surviennent quand on commence à dégrader
la compétence et la qualité. On se bat aussi pour conserver notre place importante dans la
prise en charge du patient. »
Renseignements sur www.infirmiers.anesthesistes.com