Les français et les matières grasses

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Les français et les matières grasses
Premiers résultats en avant-première
de l’étude DGAL/OCHA
« Manger en France aujourd’hui »
Ne sont présentés ici que des résultats en relation avec le poids et
l’obésité
Chacun des points de ce dossier est suivi du point de vue
du sociologue (Jean-Pierre Poulain) et du point de vue
du nutritionniste (Professeur Arnaud Basdevant)
I
La perception des matières grasses par rapport à leurs effets sur le
poids
Les Français citent les matières grasses en tête des aliments à limiter
pour ne pas grossir … mais ne les classent pas dans le bon ordre en
fonction de leur teneur en lipides
II
Ce qui est bon pour la ligne, bon pour la santé, bon au goût, et
marqueur d’identité
Le raisonnement alimentaire, un raisonnement complexe qui mobilise
plusieurs types de rationalités
III
Attitudes par rapport aux matières grasses en fonction de la
corpulence
Forte contradiction chez les obèses entre le goût et les connaissances
nutritionnelles
IV
Mutations des pratiques alimentaires et corpulence
Faut-il cultiver la nostalgie des « modèles traditionnels » ou accompagner
les mutations des pratiques ?
V
Désir de maigrir, besoin de maigrir et statut pondéral
Qui est le plus à risque des maigres qui veulent maigrir ou des gros qui ne
veulent pas maigrir ?
VI
Caractéristiques socio-démographiques du surpoids et de l’obésité
Mise en évidence d’un lien entre dégradation de la situation économique
individuelle et surpoids et obésité
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Dossier d’information. Les français et les matières grasses.
Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
2001
I. Perception des matières grasses par rapport à
leurs effets sur le poids
Les Français citent les matières grasses en tête des aliments
à limiter pour ne pas grossir … mais ne les classent pas dans le
bon ordre en fonction de leur teneur en lipides
Les matières grasses citées en
tête des aliments dont il faut
limiter la consommation pour
ne pas grossir
Aliments dont il faut limiter la
consommation pour ne pas
grossir.
Ensemble
de
l’échantillon.
Question ouverte, trois réponses
demandées en spontané
1 Matières grasses
2 Pâtisseries - sucreries
3 Féculents
63%
60%
45%
Aliments qui font le plus grossir
Ensemble de l’échantillon.
Question assistée sur liste
1 Charcuterie
2 Corps gras
Boissons sucrés/
3 aliments sucrés
69%
67%
65%
Matières
grasses
en
N°1,
pâtisseries et sucreries en N°2 et
féculents en N°3 constituent le
tiercé des aliments dont les
Français considèrent qu’il faut
limiter la consommation pour ne
pas grossir. Il s’agit ici de
réponses
spontanées
à
la
question « Selon vous, quels sont
les aliments
ou produits
alimentaires dont il faut limiter la
consommation pour ne pas
grossir ? Citez en trois ».
En réponse assistée, c’est à dire
lorsque l’on montre une liste de
groupes de produits alimentaires
et que l’on demande quels sont
sur cette liste ceux qui font le plus
grossir, la charcuterie devance
les corps gras et les boissons et
aliments sucrés.
Le souhait de perdre ou non du
poids n’exerce pas d’influence
significative dans les réponses à
ces deux questions.
Les matières grasses qui font
le plus grossir : beurre et
crème victimes de préjugés.
Classement par
Classement selon
les Français
teneur en lipides
1. Corps gras
??100% de lipides
toutes les huiles
animaux4 (78%
et corps gras
des citations)
animaux
2. Beurres (61%
??82% de lipides
des citations)
margarine (non
3. Crèmes (53%
allégée) et
des citations)
beurre (non
4. Huiles (36%
allégé)
des citations)
5. Margarines
??30% de lipides
crème (non
(21% des
citations)
allégée)
Beurre (82% de lipides) et encore
plus crème (30% de lipides pour
la crème entière, 15% pour la
crème allégée) sont victimes d’un
jugement plus sévère que ne le
justifie leur teneur réelle en
lipides. C’est l’inverse pour l’huile
qui devrait être en tête avec
100% de lipides et pour la
4 Corps gras animaux : graisse d’oie, de
canard, saindoux.
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margarine qui, avec 82% de
lipides, devrait être classée à
égalité avec le beurre. Quant à
l’huile d’olive, il semble qu’elle ait
la vertu de ne pas faire grossir !!!
Il n’y a pas de lien entre ces
réponses et la corpulence des
personnes interrogées.
Trois régions font preuve d’une
méconnaissance encore plus
grande que la moyenne sur la
teneur en lipides de la crème et
du beurre.
En région parisienne et dans le
Sud-Ouest, la crème qui est la
moins grasse de toutes les
matières grasses est classée au
2è rang des matières grasses qui
font le plus grossir : une image en
contradiction flagrante avec la
réalité.
Quant à la région Ouest, de
grande tradition beurrière, elle est
la seule à classer le beurre au 1è
rang des matières grasses qui
font le plus grossir, peut-être en
raison d’un attachement à ce
produit supérieur à la raison …
Partout ailleurs, les corps gras
animaux (graisse d’oie, de
canard, saindoux) sont classés
au 1è rang,
l’huile
et la
margarine aux 4è et 5è rang.
Le point de vue du sociologue
Une forte satanisation du gras.
Que la charcuterie passe au premier rang, avant les matières grasses, en
réponse assistée, est à la fois injuste (toutes les charcuteries ne sont pas
grasses) et « normal » : la charcuterie a été pointée du doigt comme le
produit gras par excellence.
Le beurre est victime de préjugés d’autant plus frappants que l’étude ne
montre pas de corrélation entre consommation de beurre et obésité.
On voit se dessiner ici une catégorisation d’une autre nature : le gras
animal, perçu comme le plus gras, le gras laitier, perçu comme moins gras
que le précédent, et le gras végétal, perçu comme le moins gras, même
si ce n’est pas toujours le cas.
Le point de vue du nutritionniste
L’huile d’olive est un « corps maigre » !
Les Français connaissent les bases théoriques de la nutrition. Ils ont
parfaitement retenu que les matières grasses avaient la plus forte densité
calorique et, qu’en conséquences, elles pouvaient contribuer à l’excès de
consommation énergétique.
Les choses se gâtent lorsque l’on passe aux travaux pratiques : la teneur
réelle des aliments est mal connue. C’est ce que nous observons dans les
consultations de nutrition : certains aliments sont « diabolisés » parce que
trop gras et d’autres absous : l’huile d’olive est définitivement un aliment
maigre pour beaucoup !
Ne fait pas grossir ce qui est réputé bon pour la santé : confusion des
registres entre le domaine quantitatif de la calorie et celui qualitatif du
nutriment. En réalité, mauvaise assimilation du discours santé : il faut
diaboliser et il faut encenser. A chacun son bouc émissaire.
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II. Ce qui est bon pour la ligne, bon pour la santé,
bon au goût et marqueur d’identité
Le raisonnement alimentaire, un raisonnement complexe qui
mobilise plusieurs types de rationalités
Classement des matières grasses par l’ensemble de l’échantillon
Pour chaque question, il était demandé aux personnes interrogées de
citer et de hiérarchiser trois matières grasses.
Les matières grasses
les meilleures pour la
santé
Huiles
Dont huile d’olive
Beurres
Dont beurre allégé
Crèmes (toutes)
70%
59%
47%
9%
26%
Les matières
grasses les
meilleures pour le
goût
Beurres
Dont beurre allégé
Huiles
Dont huile d’olive
Crèmes (toutes)
Margarine végétale
Huile Tournesol /
pépins de raisin
19%
12%
Margarines
Corps gras animaux
87%
10%
72%
53%
67%
18%
17%
Les matières
grasses les plus
marqueuses
d’identité
Beurres
Dont Beurre allégé
Crèmes (toutes)
Huiles( toutes)
Dont Huile d’olive
Dont Huile de
tournesol
Graisse Canard/oie
Saindoux
76%
4%
55%
68%
28%
28%
21%
17%
Note : il n’a pas été possible d’isoler les crèmes allégées des crèmes non allégées. En
effet, les personnes interviewées ont répondu avec leurs propres mots (crème épaisse,
crème liquide, crème fraîche, crème fleurette, crème allégée …) et beaucoup croient que
la teneur en matières grasses de la crème est liée à sa consistance épaisse ou liquide.
Or la consistance de la crème est liée à sa maturation et n’a rien à voir avec sa teneur en
matière grasse.
Si l’on isole l’huile d’olive des autres huiles, on voit que les classements
changent considérablement :
Les matières grasses
les meilleures pour la
santé
Huiles d’olive
Beurres
Crèmes (toutes)
Les matières
grasses les
meilleures pour le
goût
59%
47%
26%
Beurres
dont beurre allégé
Crèmes (toutes)
Huile d’olive
87%
10%
67%
53%
Les matières
grasses les plus
marqueuses
d’identité
régionale
Beurres
dont beurre allégé
Crèmes (toutes)
Huile d’olive
Huile de tournesol
76%
4%
55%
28%
28%
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Le point de vue du sociologue
Confusion entre les différentes rationalités mobilisées par l’acte
alimentaire
Donner des informations nutritionnelles, c’est intervenir seulement sur une
des trois dimensions de notre modèle alimentaire, et faire comme si les
autres - la dimension gustative et la dimension symbolique (ici la notion de
marqueur d’identité)- n’existaient pas. Le taux d’échec élevé des régimes
amaigrissants peut sans doute s’expliquer par une insuffisante prise en
compte des différentes formes de rationalités et des contradictions qui
peuvent apparaître entre elles. Dans sa volonté d’améliorer les modèles
alimentaires, le véritable enjeu pour la nutrition est de les faire évoluer en
respectant leur complexité.
L’étude DGAL/OCHA apporte une illustration chiffrée à cette complexité.
Les résultats ici ne sont pas liés à la corpulence et concernent l’ensemble
de l’échantillon :
* Il y a confusion entre ce qui est bon pour la santé et ce qui est bon pour
la ligne : autrement dit on ne sait pas ou on oublie que, en termes d’apport
calorique, un lipide apporte 9 calories au gramme, quelle qu’en soit
l’origine, même si leur composition en acides gras diffère.
* L ’huile d’olive bénéficie d’une image qui déforme le classement des
huiles en
général. On a vu qu’elle passe pour un « corps maigre »,
perception qu’on peut expliquer par la valorisation du « régime
méditerranéen »
dont l’image associe les bénéfices santé et la
symbolique du soleil et d’une cuisine de vacances.
* Le beurre est particulièrement l’objet de tensions entre :
?? sa très forte dimension gustative (87% de citations pour tous les
beurres, contre 19% pour toutes les huiles hors huile d’olive et 18%
seulement pour les margarines),
?? sa forte dimension identitaire (76% de citations contre seulement 28%
pour huile d’olive, 28% huile de tournesol, 12% pour autres huiles et
21% pour les graisses de canard et d’oie.).
?? son image santé, relativement positive (47%), mais moins bonne que
son image goût et identité.
?? son image excessive « fait grossir » (61% des citations pour le beurre
contre 21% pour la margarine, à égalité de teneur en lipides, et 36%
pour l’huile à teneur supérieure en lipides.)
* Certaines matières grasses sont des marqueurs d’identité régionale très
localisés : la graisse de canard dans le Sud-Ouest, le saindoux dans le
Nord et le Nord-Est et l’huile d’olive dans le Sud-Est
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Le point de vue du nutritionniste
La carte complexe de l’identité
Vive la complexité. Elle est richesse là où le discours nutritionnel classique
est normatif, étriqué et appauvrissant. Nous sommes dans une
constellation de perceptions, de marqueurs, d’identification.
Il y a dans ce sondage la présence de tous ces accents divers qui, du
Nord au Sud, font que nous savourons les différences régionales. Qui font
que nous nous renforçons des particularités des autres en défendant les
nôtres.
Oui, manger c’est se nourrir de bien d’autres choses que les nutriments.
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III. Attitudes par rapport aux matières grasse en
fonction de la corpulence
Forte contradiction chez les obèses entre le goût et les
connaissance nutritionnelles
« Je n’y porte
pas
d’attention
particulière »
Maigreur
35%
Poids Normal
33%
Surpoids
25%
Obésité
24%
Total échantillon 31%
(plusieurs réponses par personne)
« Je limite ma
« Indispensable
consommation » s pour une
cuisine
savoureuse »
46%
30%
48%
27%
58%
28%
49%
44%
50%
29%
« J’aime leur
goût »
26%
27%
27%
38%
27%
En écarts
Maigreur
Poids Normal
Surpoids
Obésité
« Je n’y porte
pas
d’attention
particulière »
4
2
-6
-7
« Je limite ma
« Indispensable
consommation » s pour une
cuisine
savoureuse »
-4
1
-2
-2
8
-1
-1
15
« J’aime leur
goût »
-1
0
0
11
(Cf. graphique 1)
Le point de vue du sociologue
Les obèses et les matières grasses : forte tension entre l’univers
nutritionnel et l’univers culinaire
Les obèses sont en effet beaucoup plus nombreux que toutes les autres
catégories à considérer les matières grasses comme indispensables à
une cuisine savoureuse (44% contre 29% pour la moyenne) et à aimer
leur goût (38% contre 27% pour la moyenne) et ils sont 24% seulement à
déclarer ne pas porter d’attention particulière à leur consommation (
contre 31% pour la moyenne).
En revanche, les personnes en surpoids (IMC entre 25 et 30) sont les
plus nombreuses à déclarer limiter leur consommation de matières
grasses (58% contre 49% pour celles dont l’IMC est supérieur à 30). En
matière de goût et de cuisine, elles font des réponses très voisines des
réponses des personnes dont le poids est normal ou inférieur à la
normale.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Le point de vue du nutritionniste
Un gras de bon goût
Ces résultats soulignent les différences, selon le statut pondéral, dans la
perception et l’expression des relations entre « ce qui est bon pour la ligne
et ce qui est bon pour le plaisir ». Il ne s’agit pas de savoir si les
personnes obèses mangent effectivement plus de matière grasse, car ce
n’est pas l’objet de ce type d’étude. Il s’agit de connaître leur perception.
Là les informations sont fort intéressantes, montrant des contrastes nets.
Attention, la lecture ne doit pas être centrée sur les sujets obèses avec
pour référence « normale » les sujets maigres ou non obèses. Il ne s’agit
pas d’attribuer la « vérité » aux maigres. Les non obèses ne se sont pas
rendu compte que les matières grasses étaient essentielles pour le goût ! !
Les minces ne sont pas normaux ! ! Il s’agit d’identifier les différences pour
en prendre compte dans une analyse plus globale.
Gardons-nous de généralisations hâtives, simplistes, de type « les gros
préfèrent le gras ».
Un peu de subtilité : la population des maigres, celle des non obèses,
celle des sujets obèses sont essentiellement hétérogènes.
Gardons-nous d’une interprétation au pied de la lettre, ne confondons pas
discours et pratique. Il a été bien montré que, plus on a reçu
d’informations diététiques et moins l’enquête alimentaire est fiable, plus
elle sous estime la consommation de certains types d’aliments. Retenons
en définitive la nécessité d’intégrer ces différences de perceptions dans
notre analyse globale des conduites alimentaires. Adaptons nos
formulations, nos recommandations à ces différences.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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IV. Mutations des pratiques alimentaires et
corpulence
Faut-il cultiver la nostalgie des « modèles nutritionnels » ou
accompagner les mutations des pratiques ?
L’enquête DGAL/OCHA a étudié
les relations entre les pratiques
réellement mises en œuvre et les
représentations
sociales
et
nutritionnelles
(« normes »)
relatives aux repas et aux
consommations hors repas. A
propos des repas, il faut entendre
par « normes » ce que les
personnes interrogées répondent
aux questions «Pour vous, un
vrai petit-déjeuner, ou un vrai
repas de midi, ou un vrai dîner,
doit comprendre ? ». Autrement
dit,
il
s’agit
de
normes
« personnelles »,
résultat
de
l’intégration des normes sociales
traditionnelles et des discours
nutritionnels. On a parallèlement
demandé aux interviewés de
reconstruire les contenus et les
modalités de leur déjeuner et
dîner de la veille et du petitdéjeuner du matin du jour de
l’enquête. La confrontation entre
les normes et les pratiques
interrogées a permis de mettre en
évidence des cohérences ou des
décalages.
Des corrélations intéressantes
avec la corpulence ont été
constatées avec la relation
normes/pratiques pour le repas
de midi et les consommations
hors repas.
?? Le repas de midi
En termes de composition du
repas, le modèle peut être le
modèle traditionnel du repas
complet
(entrée, plat garni,
fromage et/ou dessert) ou le
modèle du repas simplifié (plat et
dessert ou grosse entrée type
salade composée ou dessert, ou
plat unique, que ce soit plat garni
ou pizza ou pâtes). La pratique
est soit en cohérence soit en
décalage
avec
le
modèle
(graphique 2)
Que constate-t-on ?
o 32%
des
personnes
seulement sont en cohérence
entre norme et pratique
« repas complet »
o 34% sont en cohérence entre
norme et pratique « repas
simplifié »
o 30% pratiquent le repas
simplifié alors que leur norme
est le repas complet
Qui s’en tire le mieux sur le
plan du poids ?
o Les personnes en cohérence
sur la norme et la pratique du
repas
simplifié
ont
un
différentiel par rapport à la
moyenne de +8,3 pour la
maigreur et de -10,6 pour
l’obésité.
o Les personnes en cohérence
sur la norme et la pratique du
repas
complet
ont
un
différentiel par rapport à la
moyenne de -8,1 pour la
maigreur et de +11,4 pour
l’obésité.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Cette analyse doit être complétée
par l’étude des prises
alimentaires hors repas.
?? Les consommations hors
repas
On constate que :
o 13%
seulement
des
personnes sont en cohérence
entre modèle et pratique
traditionnelle du « rien entre
les repas »
Le cas de figure le plus
défavorable pour le poids est
celui des personnes, en décalage
entre le déclaratif « ne pas
manger entre les repas » et une
pratique de « manger souvent
entre les repas » (obésité + 5,6 et
maigreur - 4, 3)
La probabilité est grande que ces
obèses respectent les normes
traditionnelles du repas complet
pour le repas de midi et mangent
également entre les repas, tout
en considérant qu’ils ne devraient
pas le faire et en se sentant
coupables de le faire.
Le point de vue du sociologue
Les vertus du « modèle alimentaire français »
On peut faire l‘hypothèse que les personnes qui pratiquent un déjeuner
simplifié reportent sur le hors repas une partie de ce qu’elles n’ont pas
consommé au déjeuner, fromage ou dessert par exemple. Or, comme le
montre l’étude DGAL/OCHA, l’association d’un déjeuner simplifié et de
consommations hors repas n’a pas de conséquence défavorable sur le
poids, contrairement à ce que laisse entendre la norme traditionnelle qui
érige les consommations hors repas en interdits si l’on veut rester mince.
Par ailleurs, on peut se demander si faire un tabou de ces pratiques hors
repas ne revient pas à s’interdire de fait de les inclure dans des
recommandations nutritionnelles. Reconnaître qu’elles existent, c’est
prendre la mesure de leur importance et permettre au conseil nutritionnel
de prendre en considération ces consommations hors repas.
Est-ce à dire que le modèle alimentaire à la française est en voie de
disparition? Cela dépend de ce que l’on entend par là. Si le modèle à la
française se définit par le tabou absolu du hors repas, il est clair qu’il est
en voie de disparition mais il n’a probablement jamais existé comme tel. Si
ce modèle se définit par l’importance du plaisir alimentaire et par le rituel
du repas, qui est un moment d’interruption des autres activités, de
détente, de socialisation et de partage, il n’y a pas matière à inquiétude :
l’étude montre en effet que le repas reste fortement ritualisé et surtout
que 81% des prises alimentaires sont socialisées, c’est à dire partagées
avec d’autres individus.
Finalement, ce serait moins dans la composition des repas que dans la
hiérarchisation des rationalités intervenant dans le raisonnement
alimentaire (plaisir , symbolique et socialité ayant au moins autant
d’importance que la santé) que se trouveraient les vertus du « modèle
alimentaire français ».
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Le point de vue du nutritionniste
Le passé et l’avenir
L’évolution de la société, la « mal bouffe », la sédentarisation sont
accusés du développement de l’obésité. c’est sans doute vrai. Toutes les
études épidémiologiques indiquent que les évolutions rapides de
l’environnement et des comportements jouent un rôle central dans le
développement de l’actuelle épidémie d’obésité. L’abandon du modèle
traditionnel est accusé de tout : « si l’on revenait à la nourriture de nos
grands mères ! ! ! »
L’homme doit s’adapter à son environnement. Dans les périodes de
transformation des conditions de vie des adaptations sont
incontournables. Mais du temps est nécessaire à la mise au point de
nouvelles stratégies comportementales. Le problème à résoudre à l’heure
actuelle est de nous adapter à cette disponibilité alimentaire envahissante
et à cette sédentarisation massive. Nous ne sommes plus des chasseurs
ni des nomades. Nous sommes dans une société qui roule pour nous, qui
nous distribue de la nourriture, qui épargne nos dépenses énergétiques et
nous incite à consommer..
Il faut nous adapter. L’homme s’est toujours adapté. De nouvelles
typologies alimentaires vont émerger. Les unes seront des évolutions
adaptatives réussies. D’autres seront moins heureuses. Essayons de les
identifier autrement que par la seule surveillance du pourcentage des
calories et des nutriments !
Ne nous focalisons pas sur un modèle traditionnel qui serait l’étalon or de
la nutrition. Ne collons pas à une norme idéalisée. Essayons d’identifier
les stratégies adaptatives les plus performantes pour faire face à
l’environnement.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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V. Désir de maigrir, besoin de maigrir et statut
pondéral
Qui est le plus à risque des maigres qui veulent maigrir ou des
gros qui ne veulent pas maigrir ?
Le constat : 13% des maigres et 30% des personnes dont le poids est
normal veulent maigrir … et 33% des personnes en surpoids et 21%
des obèses ne le veulent pas …
?? Sur un échantillon de 1158 personnes âgées de 18 à 65 ans, et en
appliquant les standards d’IMC non corrigés en fonction de l’âge, on
constate que :
?? 15% ont un IMC inférieur à 20 1et sont donc considérées comme
maigres (même chiffre dans l’étude Credoc/Inca)
?? 54% ont un IMC entre 20 et 25 et sont donc considérées comme ayant
un poids normal (50% dans l’étude Credoc/Inca)
?? 24% ont un IMC entre 25 et 30 et sont donc considérées comme en
surpoids (27% dans l’étude Credoc/Inca)
?? 7% ont un IMC supérieur à 30 et sont donc considérées comme
obèses (8% dans l’étude Credoc/Inca).
Bien plus intéressant, il ressort de l’étude (graphique 3) :
?? d’une part, que 13% des personnes considérées comme « maigres »
et 30% des personnes dont le poids est considéré comme « normal »
souhaitent perdre du poids,
?? d’autre part, que 33% des personnes considérées comme « en
surpoids » et 21% des personnes considérées comme « obèses »
déclarent ne pas souhaiter perdre du poids.
Le point de vue du sociologue
La force du modèle d’esthétique corporelle de minceur : il y a autant
de personnes maigres et de poids normal qui veulent maigrir que de
personnes en surpoids et obèses !
On voit ici que la pression du modèle d’esthétique corporelle de minceur
touche massivement la population, très au delà des groupes en surpoids
qui pourraient avoir intérêt à maigrir pour des raisons de santé.
1 Les traitements statistiques étaient déjà réalisés lorsque le seuil officiel de la maigreur est passé
de 20 à 18.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Le point de vue du nutritionniste
Besoin et désir
En chiffres absolus, les enquêtes d’opinion montrent qu’il y a plus de
sujets sans problème de poids qui se préoccupent de leur corpulence et
veulent maigrir que de sujets obèses.
La surmédicalisation des problèmes de poids est une tendance que traduit
la place occupée par la minceur dans les media. La sous-médicalisation
des obésités est une constante dans tous les pays à forte prévalence
d’excès de poids.
Cette situation n’est pas sans poser problème car la prescription itérative
de restrictions alimentaires chez des sujets de poids normal génère des
effets secondaires préoccupants sous forme de troubles du comportement
alimentaire.
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VI. Quelques caractéristiques sociodémographiques des personnes
en surpoids et obèses
Mise en évidence d’un lien e ntre la dégradation de la situation
économique individuelle et surpoids et obésité
Age, sexe, diplômes,
catégories
socioprofessionnelles, revenus
et poids
Poids inférieur à la normale
(IMC inférieur à 20)
Sont sur-représentés dans cette
catégorie :
- Les tranches 18/24 et 25/34
ans
- Les femmes, les célibataires,
et la région parisienne
- Les employés et les cadres
parmi
les
personnes
interviewées,
les
cadres
supérieurs,
les
cadres
moyens et les employés pour
les chefs de foyer
- Les BTS
- Les personnes dont le revenu
n’a pas changé au cours des
dernières années
Poids normal (IMC entre 20 et
25)
Toutes les catégories sont
représentées ici en termes de
sexe, âge, diplômes et
catégories socioprofessionnelles,
et en ce qui concerne les revenus
aussi bien des personnes dont
les revenus ont baissé de 20%
que des personnes dont les
revenus ont augmenté de 10 à
20%.
Surpoids (IMC entre 25 et 30)
Sont sur-représentées dans cette
catégorie :
- Les tranches d’âge 45/54 et
55/65 ans
- Les hommes
- Les personnes ayant un CAP
ou un BEP
- Les personnes dont les
revenus ont baissé de 20% au
cours des dernières années
Obésité (IMC supérieur à 30)
Sont sur-représentés dans cette
catégorie :
- Les tranches d’âge 45/54 et
55/65 ans
- Les personnes mariées ou
remariées
- Les ouvriers parmi les
personnes interviewées, et à
la fois les cadres supérieurs
et les ouvriers pour les chefs
de foyer
- Les régions est, Nord et SudOuest
- Les personnes dont les
revenus ont baissé de 20% au
cours des dernières années.
La carte de l’obésité et du
surpoids en France issue de
l’étude DGAL/OCHA
La carte du surpoids et de l’
obésité (IMC supérieur à 25)
porte sur 358 personnes. Elle
montre :
- que le Nord (+11) et l’Est (+8)
sont les régions les sur-
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
2001
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représentées, suivies par le
Sud-Ouest (+4) et l’Ouest (+3)
que la région parisienne est le
bon élève de la classe
(différentiel de -12), suivie du
Sud-Est (-4) et du Centre-Est
(-1)
que un écart de 8 points
sépare le Sud-Est du Sud-
Ouest, deux
régions à
« régime
méditerranéen »,
avec le Sud-Ouest dans une
situation paradoxale puisque
cette région s’illustre par
ailleurs par la longévité de sa
population
et
sa
faible
incidence en maladies cardiovasculaires. (Graphique 4)
Le point de vue du sociologue
Les dimensions sociales de l’obésité
La sur-représentation des personnes dont les revenus ont baissé de 20%
depuis quelques années chez les personnes en surpoids et obèses peut
s’expliquer de deux façons.
La première s’inscrit dans la théorie classique de la stigmatisation et voit
l’obésité comme un frein à la progression socioprofessionnelle. En effet,
depuis une vingtaine d’années, les données s’accumulent pour montrer
que les obèses sont victimes, dans les sociétés développées, de
discriminations qui affectent leur évolution professionnelle. Ils sont, par
exemple, moins bien notés par les différents évaluateurs du système
social. Mais une seconde lecture est possible qui voit dans les coups
d’arrêt d’une évolution sociale et professionnelle, ou dans des ruptures
bibliographiques, des situations qui peuvent générer des pratiques
alimentaires compensatoires débouchant éventuellement sur l’obésité.
Le point de vue du nutritionniste
L’obésité est une maladie chronique et évolutive. Il n’est donc pas
surprenant de retrouver la plus forte prévalence dans les âges supérieurs.
Les régions du Nord et de l’Est, comme dans les études
épidémiologiques, sont particulièrement affectées par l’obésité. les taux
élevés dans le Sud- Ouest sont à noter. Les relations entres bas revenus
et obésité sont connues.
La donnée très originale de cette étude est la mise en évidence de la
relation entre dégradation de la situation économique et
développement de l’obésité. Cette notion était suspectée, elle est ici
documentée.
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Attitudes, comportements et représentations en relation avec le poids et l’obésité,
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Graphique 1
Graphique 2
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Graphique 3
Graphique 4
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