le quotidien du medecin 26 02 2015

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le quotidien du medecin 26 02 2015
10 Médecine & Santé publique
LE QUOTIDIEN DU MÉDECIN
Jeudi 26 février 2015 – n° 9390
Le µralp, une nouvelle technologie dans la chirurgie ORL
Une interface révolutionnaire pour préserver les cordes vocales
Au cœur des objets connectés et
autres appareils dernier cri, une
nouvelle technologie de microchirurgie fait son entrée dans la
salle d’opération du futur pour
traiter les lésions bénignes et
malignes des cordes vocales.
en sommes au 6e essai », explique le
Pr Tavernier. Les essais sont axés sur
l’insertion de l’endoscope, la visualisation 3D, l’ergonomie du poste de travail et le guidage laser.
●●Le microrobot, µralp (prononcer
« Microralp »), comme l’ont baptisé
ses créateurs, est le plus fruit d’une
collaboration européenne. Trois ans
de recherche et 40 experts pluridisciplinaires, chercheurs, médecins
et ingénieurs de l’institut italien de
technologie, du FEMTO-ST (FrancheComté Electronique, Mécanique,
Thermique et Optique - Sciences et
Technologies) et des universités de
Hanovre (Allemagne), de Gênes (Italie) et du CHRU de Besançon ont travaillé à la conception de cet appareil
sophistiqué.
Préserver la voix et la fonctionnalité des cordes vocales après le
traitement des lésions bénignes ou
cancéreuses, ça serait bientôt possible
grâce à cette microtechnique. Après
une opération des cordes vocales des
suites d’un cancer, les séquelles sont
« quasi systématiques, précise le Pr Tavernier, chirurgien ORL au CHRU de
Besançon, l’un des participants à la
conception du projet, côté français,
dès qu’on enlève une partie de la corde
vocale, on perd une partie de la qualité
vocale ». La technique actuelle utilisée en chirurgie expose à quelques
difficultés : les chirurgiens utilisent
un laser situé à 40 cm de la bouche
et la zone à opérer peut parfois être
difficile d’accès. « Un patient un peu
voûté, une ouverture buccale insuf-
« Le comité de protection des personnes a donné son accord pour tester
la reconnaissance de la pathologie,
par imagerie, de la fluorescence sur
des tissus pathologiques ex-vivo, issus
de nos opérations. Nous n’avons pas
encore de marquage CE pour aller au
bloc opératoire et l’utiliser. Il faudra
encore trois ans de développement »,
précise le Pr Tavernier. Pour chaque
phase de la conception de l’appareil,
deux équipes composées de 4 à 5
chirurgiens du CHRU de Besançon et
de l’hôpital de Gênes ont été sollicitées
pour définir quelles seraient les éventuelles contraintes médicales, chirurgicales, cliniques et réglementaires
relatives au projet microralp. « Ce n’est
plus le même geste », précise le Dr Badet, chirurgien ORL (cervico-faciale)
du CHRU de Besançon, qui a participé à la conception et aux essais. Les
équipes doivent s’habituer à manier
l’écran tactile et le robot, mais pour le
Dr Badet, le microrobot est « bluffant »
et l’outil est « rassurant », notamment
pour les jeunes générations de médecins qui prendront la relève.
DR
Les premiers essais au bloc
attendront...
Le chirurgien dessine d’abord
la zone à opérer sur une tablette
fisante, une réduction mandibulaire chirurgicale…, nous voulions
contourner ces problèmes et développer un outil plus simple et fiable »,
souligne le Pr Tavernier.
Les chercheurs ont donc eu l’idée
d’utiliser un endoscope flexible muni
d’un microrobot qui peut être insèré
à l’intérieur du patient. Le microrobot
est équipé de deux caméras miniatures, qui renvoient une image couleur en temps réel au chirurgien et
d’un laser « chirurgical » se positionnant à 20 mm de sa cible. La précision
atteinte est de l’ordre d’une centaine
de micromètres pour un dispositif
plus ergonomique pour le patient
comme pour le praticien. L’ensemble
du robot est piloté de l’extérieur par
le chirurgien, les réglages préopératoires prenant quelques minutes.
Le praticien s’installe ensuite face
au système de commande, enfile
ses lunettes à réalité augmentée, où
l’ensemble du champ opératoire est
visible en 3D. Muni d’une tablette,
l’opérateur va tracer le parcours
qu’empruntera le laser en fonction
de la pathologie du patient. « J’utilise
un stylet sur tablette, je trace la ligne
de l’intervention chirurgicale, ce qui
permet de créer un dessin autour de la
pathologie et de lancer ensuite le laser
qui exécutera ce que j’ai programmé »,
indique le Pr Tavernier. Le praticien
peut également déterminer des zones
à préserver sur lesquelles le laser ne
sera pas activé ce qui évitera de blesser
une zone à conserver. « Par l’augmentation de la précision du geste, on pourra limiter l’exérèse en diminuant les
marges des cellules saines », poursuitil. Le microrobot possède également
un faisceau bleu permettant d’exciter
la fluorescence naturelle des cellules
cancéreuses qui aideront à déterminer s’il existe une zone cancéreuse ou
non au niveau de la lésion.
« On a eu des autorisations pour
réaliser des tests sur les cadavres, nous
avons commencé en avril 2014 et nous
DR
●●S’il faut commencer le « fast track »
dès que possible, pourquoi ne pas le
faire dès la période pré-opératoire ?
« C’est l’idée du patient debout,
explique le Dr Olivier Untereiner,
anesthésiste réanimateur à l’Institut Mutualiste Montsouris (IMM) et
chef du projet "patient debout". C’est
la première fois que le transfert à
pied du patient au bloc opératoire va
être appliqué à l’échelle d’un établissement entier ». D’ici fin 2015, l’IMM
prévoit que seuls les patients instables ou ayant un handicap moteur
soient brancardés.
L’établissement mutualiste vient
de lancer un programme de travail
pour la mise en place du projet, après
un test réussi en chirurgie ambulatoire depuis octobre 2014. « Sur les
400 patients à qui le transfert debout
a été proposé, aucun n’a refusé, souligne le Dr Untereiner. Le questionnaire de satisfaction a montré que
84 % préféreraient un transfert à pied
à l’avenir. Parmi les 16 % choisissant
le brancard, beaucoup projetaient en
fait la survenue d’un handicap futur ».
Le projet est né au sein de
l’équipe d’anesthésie, qui a voulu
suivre l’exemple du centre de lutte
Le patient reste acteur jusqu’au
bout, ce qui diminue le stress
contre le cancer Léon Bérard à Lyon.
« Le centre lyonnais a poussé les
choses très loin, expose le Dr Untereiner. Là-bas, les patients gardent leur
perruque et leur dentier jusqu’à leur
entrée dans le bloc. La dignité est préservée le plus possible. Les patients
étant acteurs, le stress diminue nettement. »
Des freins du côté du personnel
Le projet n’a pas eu de mal à
convaincre la direction de l’établissement en prise depuis quelques
années à des problèmes organisationnels liés au brancardage. « L’optimisation des blocs opératoires est un
gros enjeu économique pour l’établis-
sement, explique le Dr Untereiner.
Les retards répétés des patients décalent le programme opératoire et se
chiffrent en milliers d’euros. Même si
le nombre de brancardiers nécessaire
reste le même, le transfert debout permet d’optimiser l’occupation des blocs
et de diminuer le temps d’attente. Et
si on sait combien le projet va coûter,
environ 1 euro/patient, les économies
réalisables ne sont pas chiffrées. »
Des freins existent pourtant,
pas tellement du côté des patients
mais plutôt du personnel soignant.
« Les professionnels vivent parfois
le patient debout de façon intrusive,
explique l’anesthésiste. Ce n’est plus
un patient allongé passif mais une
personne debout qui va se faire opérer.
En fait, 50 % du personnel pensent que
c’est bien, 1/4 que cela a peu d’intérêt
et le dernier quart est réticent ».
Les critères des patients à transférer debout seront très restrictifs
au début. « Cela devrait représenter
environ deux tiers des patients », estime le Dr Untereiner. La gestion de
la prémédication occupe beaucoup
le groupe de travail, qui va devoir
convaincre de l’effet anxiolytique
pour le patient de venir en marchant.
« Les études montrent que le souvenir du bloc reste le même, quelle que
soit l’option choisie, placebo, avec et
sans prémédication, précise l’anesthésiste. L’idée serait de donner une
prémédication aux patients qui la
demandent, mais de ne pas la donner
systématiquement ».
Dr Irène Drogou
Un robot primé
L’institut FEMTO-ST a reçu en
septembre 2014, le prix Micronora au salon international
des microtechniques et de la
précision de Besançon, pour
la conception du microrobot
intégré à l’endoscope. L’équipe
MiNaRoB (MicroNanoRobotiqueBiomédicale) dirigée
par Nicolas Andreff a conçu le
microsystème du robot qui permet le guidage du faisceau laser
avec une précision inférieure à
50 µm.
grippe
Transfert à pied au bloc opératoire
L’Institut mutualiste Montsouris prévoit
de généraliser l’expérience du patient debout
Après un test réussi en chirurgie
ambulatoire, l’Institut mutualiste Montsouris prépare la généralisation du transfert debout au
bloc opératoire à l’ensemble de
l’établissement. Élaboré initialement pour le patient, le projet a su
convaincre les décideurs.
« On est dans une vraie vision
d’avenir, dans ce que va être la chirurgie planifiée et assistée », explique le Dr
Badet. Les gestes seront réalisés par
« un intermédiaire qui ne tremble pas,
ne bouge pas et n’est pas sensible aux
émotions. Mais ça n’empêchera pas
qu’en amont comme en aval, le vecteur
de préférence restera le chirurgien »,
commente le Dr Badet. Rien ne remplace l’expertise d’un médecin lors
d’une opération. Sans compter que les
étapes préopératoires comme la rencontre avec le patient pour lui expliquer le déroulement de l’intervention
sont primordiales.
Sophie Martos
INCIDENCE DU 16/02 AU 22/02/15
Syndromes grippaux - Semaine n° 2015s07 - En nombre de cas pour 100 000 habitants
500
350
250
170
120
80
50
25
0
Sentinelles (c)
UMR S 1136
INSERM, UPMC
Carte d’interpolation spatiale des données basée sur les incidences départementales
Le pic épidémique a été franchi, activité en diminution
En 6 semaines d’épidémie, 2 421 000 personnes
auraient consulté un médecin généraliste
▶ Surveillance clinique : en France métropolitaine, la semaine dernière, le taux
d’incidence des cas de syndromes grippaux vus en consultation de médecine
générale a été estimé à 723 cas pour 100 000 habitants, soit 467 000 nouveaux
cas, dont 413 000 attribués à la grippe.
L’incidence des syndromes grippaux est en baisse depuis 2 semaines mais l’activité
reste forte. Le pic a été atteint en semaine 6. L’épidémie est nettement plus forte
que l’an dernier et comparable à celle observée il y a 2 ans.
▶ Au niveau régional, les taux d’incidence les plus élevés sont observés en :
Limousin (1 642), Midi-Pyrénées (938) et Champagne-Ardennes (936).
▶ Surveillance virologique : parmi les prélèvements réalisés avec détection
positive, le A(H3N2) représente 62,7 % et le A(H1N1) 21,9 %.
▶ Prévisions : l’activité des syndromes grippaux va continuer à diminuer dans les
prochaines semaines.
▶ Efficacité vaccinale : elle apparaît plus faible cette année que les années
précédentes, notamment chez les plus de 65 ans.
Source : Réseau Sentinelles, INSERM-UPMC - www.sentiweb.fr