Claude Michelet à l`ARES : paysans, une longue histoire

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Claude Michelet à l`ARES : paysans, une longue histoire
Claude Michelet à l'ARES : paysans, une longue histoire
Mis à jour Lundi, 07 Décembre 2015 23:56
C'était le 3 décembre 2015 au Centre socio-culturel du Lardin-Saint-Lazare. Devant une salle
comble, l'auteur Claude Michelet était l'invité de l'ARES (Atelier de Réflexion Ethique et Social).
Aux participants habituels de l’ARES se sont joints des lecteurs fidèles de l’auteur et des
personnes directement concernées par le sujet du soir « Paysans : une longue histoire ». Un a
griculteur-écriveur et non paysan-écrivain : c’est ainsi que se présente l’invité. Il ne se trouve
pas digne de porter le titre de paysan. « Etre paysan est une noblesse » dit-il. Et pour avoir le
droit de porter ce titre, il faut être issu d’une longue lignée ayant travaillé, amélioré la même
terre ». Ce qui n’est pas son cas. Il a eu, très jeune, une vocation agricole « attiré par la liberté
totale de cette profession ». Après des études agricoles (il a eu entre autres René Dumont
comme professeur), il s’est installé à Marcillac, sur une petite ferme de 19 ha, comme éleveur
de bovins. Pour son activité littéraire, le terme d’écrivain ne lui semble pas adapté. Il définit
l’écrivain comme un littérateur reconnu comme tel après son décès. « Je serai écrivain si, après
ma mort, des lecteurs ouvrent un livre de Claude Michelet ». En attendant, il se considère plutôt
comme un
"écriveur"
. C’est par la rédaction d’éditoriaux hebdomadaires que sa carrière littéraire a commencé, dans
un but militant agricole mais surtout alimentaire. Il reste « atypique dans le microcosme de
l’édition littéraire, du V° et VI° arrondissements », ce petit monde superficiel et coupé des
réalités où il ne se reconnait pas. Il a longtemps mené de front ces 2 activités. L’écriture lui
permet de faire vivre sa famille (6 enfants), « de mettre du beurre dans les épinards ».
L’élevage de limousines la journée et l’écriture la nuit, le conduisent au surmenage et à un
accident de santé. Après 36 ans d’activités agricoles, il doit cesser cette activité et se consacrer
exclusivement à l’écriture (plus de 30 ouvrages, romans et études).
La longue histoire de l’agriculture commence il y a 7000 ans au Proche Orient. Elle est une
quête inlassablement renouvelée d’une amélioration des rendements et d’extension des
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surfaces cultivées. Par exemple, au début de l’ère chrétienne, en Gaule, un grain de blé planté
donnait 1,5 grain récolté. Au Moyen Age, 1 grain en produisait 10 et maintenant on produit 70 à
80 quintaux à l’hectare. Il suffisait d’une ou deux années de mauvais climat pour entraîner une
famine ; la dernière date de 1845, ce qui n’est pas très ancien. Lors de la dernière guerre
mondiale, par manque d’engrais et de matériel, les rendements agricoles ont dramatiquement
baissé ; ce furent « les restrictions » pendant et après guerre. Avec, « ne l’oublions pas des
gens qui crevaient de faim dans les villes si ils n’avaient pas de cousins à la campagne ».
Après la dernière guerre, l’Etat a demandé aux agriculteurs de produire plus afin de nourrir les
hommes. L’agriculture a répondu présent par un surcroît de travail et d’innovations jusqu’à,
dans les années soixante, la surproduction. C’est le début des « primes », le début d’une
nouvelle ère, sans liberté véritable. « Si mon voisin ne déclare pas la naissance d’un veau dans
les 8 jours, il ne touche pas de prime. Or, sans subvention, le prix de vente, le même depuis 20
ans, ne couvre pas le coût de revient ». Le parcours professionnel de Claude Michelet illustre
cette évolution : quand il s’est installé, il
fallait 20 bêtes,
puis 30, maintenant 100, et demain combien ? « Avant on appelait chaque bovin par
son nom. Maintenant il est un numéro ». « Pour juste conserver ses revenus, il faut toujours
augmenter son cheptel. C’est une course perpétuelle. Avec les emprunts au Crédit Agricole qui
vous
poussent ».
Cette course en avant vers toujours plus grand, toujours plus d’emprunts a entraîné un brutal
bouleversement : « il y avait 57 fermes alentour, maintenant il y en a 0 ». C’est bien une
disparition des paysans qui a eu lieu. Pour Claude Michelet, après la cessation de son activité
agricole, il n’y a pas eu de reprise familiale ; ce sont 2 voisins, en GAEC, qui ont repris les
terres avec élevage en extérieur ; leur passage sur les terres est épisodique. Dans paysan, il y
a pays : c’est aussi un changement brutal de la vie locale qui est apparu. Changement accéléré
par l’arrivée de nouveaux habitants, les « rurbains », avec de nouvelles habitudes et de
nouvelles exigences. Ce sont des choix politiques qui ont entrainé cette révolution, la disparition
d’un monde. « C’est l’Europe agricole qui a tué l’agriculture française. Il fallait que les deux tiers
des exploitations disparaissent. Il fallait faire une saignée. La France était le leader mondial
agricole et les Etats-Unis ne le supportait pas ». « La France était un jardin, favorisé par des
conditions idéales ». De puissants lobbys européens ont organisé une régression agricole qui
fait que la France est dépassée par les allemands pour le porc, concurrencé par les Pays Bas
pour l’élevage ou les espagnols pour le maraîchage. « En gros il était prévu de faire disparaitre
l’agriculture au Sud de la Loire ». Des terres y compris les meilleures, ont été gelées, en
jachère. Exemple « scandaleux, Disneyland installé en Brie, sur les meilleures terres du monde,
avec 7m d’épaisseur de terre arable » ; ici de nombreuses terres sont en jachère, y compris les
excellentes terres alluviales de la vallée de la Vézère quand
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d'A.
Rassat.
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droite
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Claude
Michelet
et
Patric
Chouzenoux.
Henri
Delage
co-responsable
de
l'ARES,
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