L`empereur d`Ethiopie va vendre sa villa de Vevey

Transcription

L`empereur d`Ethiopie va vendre sa villa de Vevey
32 La der
24 heures | Vendredi 13 mai 2016
Simon Brunisholz, ingénieur
Ce marin est
prêt à déplacer
des montagnes
Claude Béda Texte
Chantal Dervey Photo
M
ême à terre, son regard
perçant scrute toujours
l’horizon. En l’observant,
on subodore le sel de
l’aventure qu’il vient de
vivre. Simon Brunisholz ne se démonte
pas, contrairement à l’océan Atlantique
qu’il a traversé en solitaire, de Douarnenez à Pointe-à-Pitre, sur un voilier de
6,50 m. Mais le Blonaysan bouillonne:
«J’aime partir d’une idée, d’un rêve. Et
tout mettre en œuvre pour que celui-ci se
réalise. Avec de la volonté et de l’énergie,
il est possible de vaincre des montagnes.»
A la Mini Transat 2015, cette formule
lui a plutôt réussi, puisqu’il s’est montré
le meilleur représentant de la nouvelle
vague de skippers suisses. Pas mal pour
un marin d’eau douce qui a, certes, commencé la voile à l’âge de 6 ans, mais n’a
goûté au grand large salé qu’en 2011.
L’automaticien de formation, désormais
ingénieur, a couvé durant quatre ans le
projet de traverser l’Atlantique en solo.
«J’ai la niaque, mais je la disperse sur le
long terme. Cela permet de tenir la distance», concède le navigateur du Cercle
de voile de Villeneuve.
Rien ne prédestinait Simon Brunisholz
à devenir un loup de mer: enfance à Blonay – presque à la montagne –, scolarité à
La Tour-de-Peilz, puis apprentissage
d’automaticien chez Bobst. Une formation stricte qui l’a structuré, lui apportant
des valeurs et des modes de fonctionnement utiles pour son avenir.
Alors qu’il entame des études à l’Ecole
d’ingénieurs d’Yverdon-les-Bains, Simon
est encore plus proche des sommets et du
Léman que de la mer: il s’active au sein du
collectif Orgiride, des hauts de Montreux,
qui met sur pied des manifestations liées
aux sports de glisse. Il se retrouve ainsi en
2008 avec ses amis de l’association à dé-
verser 300 m3 de neige au centre-ville,
pour que les intéressés puissent y skier.
L’événement attire 8000 personnes sur
la place du Marché. L’organisation de
cette animation d’envergure a constitué
«une expérience fondamentale» pour la
suite de son parcours. D’autant que, l’année suivante, Simon Brunisholz prend
encore des responsabilités en devenant
président du Ski nautique et wakeboard
Club de Montreux. «J’aime tous les sports
de glisse et l’eau sous toutes ses formes,
en flocon, congelée ou liquide.»
Pour son travail de bachelor, il s’est
mis à la recherche d’une activité en relation avec les bateaux. C’est en collaborant
aux parties électriques du «60 pieds» de
Bernard Stamm pour le Vendée Globe, en
2011, que le futur hauturier prend résolu-
«J’ai la niaque, mais
je la disperse sur le long
terme. Cela permet
de tenir la distance»
ment le goût du grand large. A Brest, puis
à Lorient, la Mecque de la voile, il fait la
connaissance d’autres navigateurs suisses, Loïc Forestier, Simon Koster, Justine
Mettraux. Et décide de suivre leur sillage:
en 2013, il se porte candidat pour la Mini
Transat 2015. Dès lors, il se découvre une
détermination sans faille: «J’aime entreprendre des projets, me surpasser sans
cesse. C’est ce qui fait avancer. Embarqué
dans une aventure qui me passionne, je
laisse peu de choses au hasard. Je suis un
ingénieur, j’ai appris à calculer.»
L’aventurier a bien cru avoir atteint
ses limites dès les courses de qualifications et ses premières expériences en solitaire sur l’océan. C’est là qu’il s’est aperçu
de son besoin vital d’être entouré dans les
moments difficiles. Seul face aux défer-
Carte d’identité
Né le 27 janvier 1987 à Vevey.
Cinq dates importantes
2002 Début de son apprentissage
d’automaticien chez Bobst.
2008 Fait partie de l’équipe qui organise
le Montreux Jib, transformant la place
du Marché en piste de ski.
2009 Elu président du Ski nautique et
wakeboard Club de Montreux.
2011 Prépare le voilier de Bernard
Stamm pour le Vendée Globe 2012.
2015 Termine 9e, 1er non-Français, de la
Mini Transat en solitaire, de la Bretagne à
la Guadeloupe en 24 jours et 10 heures.
lantes de l’Atlantique, il s’est retrouvé
parfois avec le moral à marée basse. Et
s’est aperçu qu’un petit somme était le
meilleur compagnon du marin solitaire,
contraint de prolonger de dix minutes ses
rares siestes d’une demi-heure par jour
pour retrouver de la lucidité. «Sur
l’océan, face au stress et au risque de
burn-out, il est essentiel de se focaliser sur
ce que l’on fait et d’évacuer tout ce qui est
bloquant, pour ne pas laisser l’angoisse
prendre le dessus.»
Le Vaudois a aussi connu des moments
de grâce, en phase totale avec son voilier.
«Là, tout est simple et limpide, on est
dans une bulle.» Au final, l’expérience
océanique ne l’a pas laissé intact: «J’ai
appris à relativiser, à lâcher prise. Et à
prendre conscience que, sur la Riviera
vaudoise, la vie est vraiment exceptionnelle.»
De retour au pays, près de sa compagne, il n’entend pas se lancer dans une
nouvelle compétition dans l’immédiat:
«Le sport d’élite vous prive d’une part de
votre existence, de vos amis notamment.» Le Blonaysan concocte cependant
plusieurs projets, comme la création
d’une régate entre les îles du Léman. Il
veut aussi œuvrer pour l’aménagement
du territoire afin de préserver sa région.
«Créer des espaces verts, ce sera peutêtre autrement plus difficile que traverser
l’Atlantique…» Simon Brunisholz a en effet plusieurs centres d’intérêt. Et de nombreuses cordes à son arc: «J’ai surtout du
caractère. Ce qui est à double tranchant.
Mais, dans le fond, je suis un bon gars.»
Histoire
Réseautage
Il fait l’actualité le 13 mai… 1936
Amazon lance la charge
contre YouTube
En 1923, Hailé Sélassié
avait acquis en toute
discrétion une résidence
au bord du Léman
«L’Ethiopie est italienne!» s’exclame à Rome Benito Mussolini, le
9 mai 1936 – en l’an 14 de l’ère
fasciste, disait-il. L’armée italienne occupe le pays et Hailé Sélassié Ier, empereur d’Ethiopie,
dit «le Négus», part en exil. Sur la
rive du Léman, on apprend alors
que ledit empereur possède une
villa à Vevey. Choisira-t-il pour résidence la Suisse, où siège la Société des Nations (SdN)? A Genève,
un de ses délégués vend la mèche:
il ne viendra pas, «il vend sa maison des bords du Léman».
Un reporter, Robert de la
Pierre, se rend sur place. La bâtisse est entourée de verdure. Sur
la grille du jardin, un écriteau:
«Villa à vendre – 13 pièces – tout
confort – 6000 m2 – chauffage central.» Le 13 mai, la Feuille d’Avis de
Lausanne publie son reportage:
«La vieille femme, gardienne de la
maison, raconte qu’Hailé Sélassié
acheta cette villa il y a treize ans
(…) pour en faire cadeau à sa fille,
VC5
Contrôle qualité
La villa Praz-Fleuri à Vevey,
dans les années 1930. DR
la princesse Tsahai. «En vérité,
elle s’appelle Yeshimabet, mais
nous l’avons nommée Tsahai, ce
qui veut dire tache de soleil… (…)
La princesse est devenue une
grande dame. Ici, elle grimpait
par-dessus les haies et sur tous les
arbres fruitiers. Avec la petite fille
du pasteur de Saint-Légier qui,
autrefois, avait été missionnaire
en Abyssinie, elle inventait toutes
sortes de gamineries. Chez la petite du pasteur, la princesse a appris plus de français qu’avec son
professeur et, finalement, elle parlait comme moi, je vous l’assure.»
De la Pierre est invité à l’intérieur de la villa, baptisée PrazFleuri. «Elle n’est pas chère, lui dit
la gardienne. Tous les meubles
compris… et en hiver nous avons
le chauffage central…» Dans le salon, un grand tableau représente
Hailé Sélassié vêtu de brocard, un
manteau d’hermine sur les épaules. «On a l’impression que les habitants ne l’ont quittée que pour
quelques mois. Ils ont laissé derrière eux des objets les plus divers. (…) Une énorme carte de
géographie est étendue sur la table à écrire. Les localités sont marquées en français et en langue
amharique. C’est la carte de l’empire du Négus. Addis-Abeba est
souligné en rouge. Aujourd’hui, il
semble que le rouge du crayon
soit un feu. (…) A côté se trouve un
parchemin: un plan français avec
les dessins d’un canal passant à
travers l’Erythrée, chargé de fertiliser les déserts de Danakil avec de
l’eau de mer.» Le dernier résident
de Praz-Fleuri fut l’envoyé du Négus aux négociations de Genève.
Le reporter poursuit sa visite.
«Je les vois toutes, les treize pièces, et même la cuisine. Elle me
montre une imitation en petit du
téléphérique de la Zugspitze, qui
va de la cuisine à la salle à manger.
Puis je visite la chambre à coucher
de la petite princesse. Le lit bleu
ciel à baldaquin est découvert.
Une petite chemise bleue d’enfant
est étendue. «Le Négus a écrit plusieurs fois, poursuit la vieille
femme, mais il n’est jamais venu
ici… Croyez-vous qu’il viendra
maintenant?» demande-t-elle à
son visiteur. Il ne viendra pas,
choisissant l’Angleterre pour lieu
d’exil. En mai 1941, les Italiens
chassés par les Britanniques, il retrouvera son trône. La belle maison passera ensuite dans les mains
d’un chirurgien de l’Hôpital du
Samaritain, tout proche. Elle
existe toujours, à l’avenue de
Blonay. Gilles Simond
Article paru le 13 mai 1936 dans
la Feuille d’Avis de Lausanne.
Archives consultables sur
scriptorium.bcu-lausanne.ch
Cette semaine, le site de vente
en ligne amazon.com fait
les gros titres de l’actualité
high-tech. Il a d’abord annoncé
le rachat des droits du dernier
film de Woody Allen (Café
Society) et sa diffusion en
ouverture à Cannes, puis son
action a dépassé pour la
première fois la barrière des
700 dollars (permettant à son
patron, Jeff Bezos, de gagner
virtuellement 18 milliards en
trois mois). Mardi enfin, le site
annonce qu’il s’attaque à
YouTube sur le terrain de la
vidéo en ligne. Et il met le
paquet! Si Amazon a déjà
dépensé 3 milliards de dollars
en 2015 dans les productions
cinématographiques, il promet
désormais une récompense
de 1 million de dollars par mois
à se partager entre les
100 vidéos les plus vues sur
son service Amazon Video
Direct (AVD). Si, sur YouTube,
le créateur reçoit de l’argent
grâce à la publicité, chez
Amazon, ce sont les 50 millions
d’abonnés au service
de fidélisation du site (Prime)
qui permettent de toucher
un peu de cash. Chaque fois
que sa vidéo est vue pendant
soixante minutes, le réalisateur
touche entre 0,15 US$
(aux Etats-Unis) et 0,06 US$
(ailleurs). De quoi encourager
les cinéastes amateurs! P.W.
AP
L’empereur d’Ethiopie va vendre sa villa de Vevey
Amazon a lancé sa télé connectée en 2014. Keystone