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T. MINARD, QUATRE LOGICIELS POUR L’EXÉGÈSE BIBLIQUE
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NOTES ET DOCUMENTS
Quatre logiciels pour l’exégèse biblique :
Accordance, Bible Parser, Bibleworks et Logos
Timothée Minard
Faculté de Théologie Protestante (EA 4378) – Université de Strasbourg.
7 rue Pierre de Coubertin – F-42500 Le Chambon-Feugerolles.
Résumé : La présente contribution présente et compare quatre logiciels informatiques dédiés à l’exégèse biblique : Accordance, Bible Parser, Bibleworks
et Logos. Elle en signale les atouts, les intérêts mais aussi les limites. Même
s’ils sont avant tout de précieux outils pour la philologie, ces logiciels
peuvent aider l’exégète au cours des différentes étapes de son travail, de la
critique textuelle à l’analyse rédactionnelle. Le chercheur fera toutefois preuve
de prudence dans l’usage de ces outils pour la recherche scientifique.
Abstract : This paper introduces and compares four softwares for biblical
exegesis: Accordance, Bible Parser, Bibleworks and Logos. Their assets,
interest and also their limits are reviewed. Even if these programmes are first
and foremost precious tools for philological studies, they can also be useful
in the different steps of the exegetical process, from textual criticism to
redaction criticism. Nevertheless, scholars need to be cautious in the way
they use these tools for their researches.
Les logiciels suivants ont été testés sous Windows 8.1 1 :
Accordance 10 (version 10.4), avec la collection « Original Languages », http://www.accordancebible.com, 299 $.
Bible Parser 2013 (version 5.0.3), version complète (5 DVD),
http://www.bibleparser.fr, 40 €.
Bibleworks 9 (version 9.0.12), http://www.bibleworks.com, 359 $.
—————
1
Étant donné les politiques commerciales différentes selon les éditeurs, les prix indiqués
ici ne rendent pas compte du contenu du logiciel. Pour un contenu similaire, Bibleworks est
moins cher qu’Accordance. En effet, avec la collection « Original Languages », l’utilisateur
d’Accordance dispose d’un nombre fortement inférieur de textes et bases de données : à
l’inverse de l’utilisateur de Bibleworks, il n’aura pas accès aux écrits intertestamentaires
grecs, aux œuvres de Philon ou de Josèphe, aux Targumim, ou aux écrits des Pères
apostoliques. Pour y accéder, l’utilisateur d’Accordance devra acheter ces bases de données
en supplément. La collection « Biblical Languages » de Logos propose quant à elles
davantage de textes que Bibleworks, ce qui justifie son prix élevé.
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Logos Bible Software 5 (version 5.2), avec la collection « Biblical Languages 2 », http://www.logos.com, 525 $.
Les possibilités liées à l’informatisation des données sont sans
limites, et un bon nombre d’outils précieux pour l’exégèse sont
aujourd’hui accessibles en ligne, souvent gratuitement. Toutefois, les
recherches en ligne sont souvent fastidieuses, obligeant l’exégète à
jongler d’un site à l’autre, d’une base de données à une autre.
Certains éditeurs l’ont bien compris en concentrant un grand nombre
des potentialités informatiques au sein d’un même logiciel. Dans ce
domaine, trois noms font aujourd’hui référence : Accordance,
Bibleworks et Logos. Ces trois outils puissants, développés par des
sociétés comptant plusieurs salariés (jusqu’à 360 pour Logos !),
sont désormais tous disponibles sous Windows et sous Mac. À côté
de ces géants américains, il nous a semblé bon de mentionner le
petit poucet français Bible Parser. Certes, il s’agit d’un logiciel
amateur conçu par un seul homme, et sa qualité, d’un point de vue
informatique ou scientifique, sera forcément inférieure à celles des
trois autres. Toutefois, il est doté de fonctions intéressantes pour un
prix défiant toute concurrence.
Emmanuel Tov souligne que les potentiels des outils informatiques pour la recherche biblique sont « grandement sous-exploités 3 ».
C’est le cas, en particulier, pour les logiciels bibliques. Ceux-ci
sont utilisés principalement comme des concordances électroniques.
Il s’agit, certes, d’une des fonctions de ces logiciels. Cependant, en
se restreignant à un tel usage, l’exégète passe à côté de leurs
immenses potentialités. Ce sont, en effet, des outils puissants qui
peuvent aider le bibliste dans toutes les étapes de l’exégèse. La
présente étude essayera de donner un aperçu de ces diverses possibilités. Au lecteur, ensuite, de prendre le temps – il faut y consacrer
plusieurs jours – pour apprendre à utiliser ces outils. Il existe de
nombreux tutoriels – en ligne, ou fournis avec le logiciel – qui
permettent un tel apprentissage.
En lien avec la présente contribution, un comparatif plus détaillé
est disponible en ligne 4. On y trouvera les détails techniques concernant les logiciels, de nombreux tableaux comparatifs, mais aussi des
liens vers des vidéos que nous avons réalisées, et qui permettent de
voir à quoi ressemblent les logiciels et comment ils fonctionnent.
—————
2
Il s’agit d’une collection uniquement disponible pour les étudiants ou professeurs
d’instituts bibliques ou facultés de théologie. Le prix peut varier en fonction des accords
conclus entre l’établissement de l’acheteur et la société Logos.
3
Tov, 2006, p. 337.
4
À l’adresse http://www.rhpr.net/annexes/943D_minard_logiciels_bibliques.pdf.
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Ce comparatif « en ligne » sera, dans la mesure du possible, mis à
jour en fonction des évolutions des logiciels testés.
I. LOGICIEL BIBLIQUE OU BIBLIOTHÈQUE ÉLECTRONIQUE ?
Accordance, Bible Parser, Bibleworks et Logos sont certainement les meilleurs outils informatiques existants pour l’exégèse
biblique, mais ils ne sont pas exactement conçus de la même
manière.
D’un côté, Bibleworks se présente comme un logiciel biblique
ayant pour fonction première de permettre d’effectuer des recherches
plus ou moins complexes parmi les textes grecs ou hébreux. Plusieurs outils supplémentaires ont été proposés au fil du développement du logiciel. Avec Bibleworks, on achète donc un logiciel
complet auquel on peut, si on le souhaite, ajouter quelques textes
ou dictionnaires supplémentaires. Mais le catalogue est volontairement restreint, car l’éditeur n’est pas favorable à l’idée d’une
bibliothèque électronique 5.
À l’inverse, Logos est avant tout conçu comme un logiciel
destiné à gérer une bibliothèque électronique composée d’éditions
de textes anciens, d’ouvrages exégétiques et théologiques. Avec
Logos, on acquiert donc des textes, commentaires, dictionnaires et
ouvrages divers que l’éditeur a préalablement transformés en bases
de données. Le logiciel permet de faire des recherches informatiques parmi ces documents, mais, surtout, il les met en relation
grâce à des liens hypertextes ou par des outils très performants qui
compilent automatiquement les différentes données contenues dans
la bibliothèque que l’on s’est constituée, au sujet d’un passage
biblique, d’un thème ou d’un mot. La bibliothèque Logos peut
s’agrandir au fil du temps, au fur et à mesure que l’on y ajoute
d’autres ouvrages, achetés parmi les milliers de titres disponibles
sur l’immense catalogue de Logos.
Accordance essaye de combiner les deux approches. Le logiciel, comme son nom l’indique, était conçu initialement comme une
concordance électronique, à la manière de Bibleworks. Toutefois, il
propose désormais un bon catalogue de fonctions et d’ouvrages
supplémentaires qui font aussi d’Accordance un vrai logiciel de
gestion d’une bibliothèque électronique exégétique. Le catalogue
d’Accordance est certes plus restreint que celui de Logos. Il n’en
—————
5
Voir les mises en garde à ce sujet, sur le site de Bibleworks, en bas de la page
http://store.bibleworks.com/modules.html [consultée le 10 avril 2014].
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demeure pas moins qu’il propose des ouvrages techniques parmi les
meilleurs en anglais.
Bible Parser est encore différent : d’une part, il compile sous
forme de « modules » des données issues de diverses sources, encore
que, comme il s’agit d’un logiciel amateur, il soit moins performant
dans cette compilation que ses concurrents commerciaux. D’autre
part, il réunit une immense bibliothèque d’ouvrages exégétiques
libres de droit, scannés au format PDF ou DjVu.
Avant de se lancer dans l’achat d’un logiciel biblique coûteux,
le bibliste doit se demander comment il pense constituer sa bibliothèque théologique personnelle : souhaite-t-il investir dans des
ouvrages sur support papier ou dans des ouvrages électroniques ?
Étant donné le fort développement du livre numérique et
l’important investissement des éditeurs dans ce domaine, cette question est d’actualité. Pour y répondre, il peut être pertinent d’évaluer
les avantages et les inconvénients d’une bibliothèque exégétique au
format électronique. À notre avis, les avantages l’emportent sur les
risques liés à l’incertitude concernant l’avenir des sociétés éditant
les logiciels. Certes, à cause de l’évolution rapide du milieu de
l’informatique, nous ne pouvons pas être sûrs de pouvoir encore
lire dans cinquante ans nos ouvrages électroniques au format propre
à Accordance ou Logos. Toutefois, avec une bibliothèque électronique gérée par ces logiciels, l’exégète a, d’une part, une bibliothèque mobile, légère et moins coûteuse. Surtout, sa bibliothèque
est optimisée : ses ouvrages sont transformés en bases de données,
ils sont indexés et mis en relation par des liens hypertextes 6.
Notons enfin que certains outils publiés ces dernières années ne
sont disponibles qu’au format électronique. C’est le cas, par exemple,
de l’apparat critique du Nouveau Testament le plus détaillé à ce
jour pour ce qui concerne les manuscrits grecs – en attendant que
soit complétée l’Editio Critica Maior du Novum Testamentum
Graecum 7 –, celui du H. Milton Haggard Center for New Testament
Textual Studies (CNTTS) 8. Accordance, et surtout Logos, développent également un certain nombre d’ouvrages exégétiques uniquement publiés au format électronique et dont certains ont une
—————
6
Pour une présentation détaillée des avantages et inconvénients, voir mon comparatif
en ligne au paragraphe 1-c) Logiciel biblique ou bibliothèque exégétique électronique ?
(http://www.rhpr.net/annexes/943D_minard_logiciels_bibliques.pdf, p. A4).
7
ECM, 1997.
8
Pour plus d’informations sur cet apparat critique uniquement disponible au format
électronique, voir : http://nttext.org [site consulté le 10 avril 2014]. Le CNTTS travaille également à la réalisation d’un commentaire de critique textuelle consultable en ligne, à l’adresse
http://nttext.org/commentary/. Alors que l’apparat critique couvre l’ensemble du NT, le
commentaire n’est pour l’instant disponible que pour l’épître aux Philippiens.
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valeur scientifique. De telle sorte que, si le chercheur veut tenir
compte de ces publications, il soit obligé d’utiliser les logiciels qui
en permettent la lecture.
II. CRITIQUE TEXTUELLE
Les logiciels bibliques peuvent faciliter la critique textuelle de
deux manières. Premièrement, ils simplifient la consultation de
l’apparat critique. En effet, l’édition électronique n’a pas les
contraintes d’espace liées au format papier. Elle peut donc éviter
les nombreuses abréviations ou sigles de l’édition papier. Si elle ne
le fait pas, il suffit de passer la souris sur le texte pour que les
abréviations ou symboles soient explicités. De plus, le fait de
cliquer sur un numéro de manuscrit permet d’en connaître immédiatement la date et l’étendue.
Deuxièmement, les logiciels bibliques permettent de comparer
rapidement les différents textes (hébreu, grec, latin, syriaque,
copte, etc.) ainsi que certains témoins qui les attestent. Non
seulement il est possible de mettre en parallèle textes ou témoins
d’un même passage biblique, mais il devient possible d’effectuer
des recherches en leur sein.
En ce qui concerne l’Ancien Testament, les catalogues
d’Accordance et de Logos permettent d’inclure à leur logiciel les
meilleurs apparats critiques à ce jour (BHS, BHQ, LXX de Rahlfs
ou de Göttingen, etc.). De même, là où Bibleworks ne donne accès
qu’à un nombre limité de versions anciennes (Vulgate, LXX de
Rahlfs), Accordance et Logos proposent les meilleures éditions des
versions généralement consultées pour la critique textuelle de l’AT,
ainsi que les manuscrits bibliques de la mer Morte. Bible Parser
signale également les divergences entre le texte massorétique et la
LXX. Enfin, pour le Pentateuque, un étonnant module met en parallèle le texte du Pentateuque samaritain, le texte massorétique, et,
quand elles existent, les variantes des manuscrits de la mer Morte.
Pour ce qui est de la critique textuelle du NT, l’apparat critique
le plus intéressant à ce jour est celui du CNTTS, développé sous la
direction de William F. Warren. Cet apparat est inclus dans la dernière
version de Bibleworks, et disponible sur le catalogue d’Accordance 9.
Dans Bibleworks, les manuscrits sont automatiquement classés dans
—————
9
Au 10 avril 2014, le site de Logos indiquait que cet apparat était en cours d’adaptation
pour le logiciel.
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un tableau par siècle et par catégorie 10, et ce, pour chaque variante.
L’apparat du CNTTS est encore en développement, et il se veut, à
terme, le plus exhaustif possible en ce qui concerne les manuscrits
grecs du NT. Dans son état actuel, il mentionne déjà bien davantage
de variantes que celui du NA28 11. De plus, l’apparat du CNTTS
signale les variantes d’un certain nombre de manuscrits que le
NA28 ne signale pas, même s’il s’agit principalement de manuscrits
rédigés en minuscules, et donc assez tardifs. Toutefois, il arrive
aussi que certains manuscrits consultés par les rédacteurs du NA28
n’aient pas encore été consultés par ceux qui travaillent au CNTTS.
De plus, mis à part quelques anciens manuscrits latins, l’apparat ne
tient pas compte des versions anciennes, ni des citations par les
Pères de l’Église. Notons que nous avons repéré quelques erreurs
dans l’apparat du CNTTS, et qu’il convient donc de l’utiliser en
complément au NA28 (ou à l’Editio Critica Maior quand elle existe)
qui reste la référence en matière de critique textuelle pour le NT 12.
—————
10
Selon la classification proposée par Kurt et Barbara Aland en fonction de la qualité
qu’ils reconnaissent aux différents témoins.
11
NA28, 2012.
12
Ces affirmations sont principalement fondées sur la comparaison de l’apparat du
CNTTS sur Bibleworks 9 et du NA28 pour un passage pris au hasard, en l’occurrence
Jacques 5,5. Étant donné que, pour les épîtres catholiques, l’apparat du NA28 est fondé
sur celui de l’Editio Critica Maior (ECM), on peut supposer qu’il est particulièrement
fiable. Pour ce verset, le CNTTS signale sept lieux variants, alors que le NA28 n’en
signale que trois. La variante la mieux documentée consiste en l’ajout ou l’omission de ὡς
devant ἐν ἡμέρα. En faveur de la présence de ὡς, le NA28 signale les attestations
suivantes : « ‫א‬2 Ψ 048vid 5. 81. 307. 436. 442. 642. 1175. 1243. 1448. 1611. 1735. 1739.
2344. 2492 Byz sy ». Le CNTTS propose, quant à lui, la liste suivante : « ‫א‬c Ψ 049 35 69
489 927 945 999 1241 1243 1244 1251 1315 1319 1448 1505 1563 1573 1646 1735 1739
1751 1874 2191 2356 2494 2495 MT TR ». En faveur de l’omission de ὡς, le NA28
indique : « ‫ *א‬A B P 33. 1852 latt co » ; alors que le CNTTS a : « ‫ *א‬A B 1 33 2374
SBL ». Plusieurs remarques s’imposent : (1) On constate que les deux apparats ne
signalent pas les mêmes manuscrits, mais que, dans l’ensemble, ils ne se contredisent pas.
On pourrait donc penser que ces différences s’expliquent principalement par le fait que les
rédacteurs n’ont pas consulté les mêmes manuscrits pour ce passage. (2) Toutefois, nous
avons constaté quelques erreurs de la part du CNTTS. Si on se réfère au supplément de
l’ECM pour l’épître de Jacques, le manuscrit en minuscules 1 fait partie de la liste des
97 manuscrits de la tradition byzantine abrégée en « Byz » dans l’ECM, et reprise par le
NA28 (ECM, 1997, IV/2, p. B8 ; cf. NA28, 2012, p. 53*). Or le NA28, à la suite de l’ECM,
cite cette tradition en faveur de la présence de ὡς alors que le CNTTS cite le manuscrit 1
en faveur de son omission. De plus, le CNTTS cite le manuscrit 2374 en faveur de
l’omission de ὡς, alors que l’ECM le cite en faveur de sa présence. Nous avons vérifié les
images de ces deux manuscrits, et, dans les deux cas, c’est l’ECM qui a raison. Notons enfin
que le CNTTS indique que la leçon ἐν ἡμέρᾳ est attestée par le Codex Alexandrinus (A),
alors que le manuscrit a ἐν ἡμέραις. (3) En ce qui concerne les onciales, le NA28 signale
le témoignage des manuscrits 048 et P, ce que le CNTTS ne fait pas. Cela est dû au fait
que les leçons du 048 sont encore ignorées, dans l’ensemble, par l’apparat du CNTTS,
alors que celles de P (025) ne sont signalées que pour les Actes et Galates. L’absence du
manuscrit 048 au sein de cet apparat n’est pas sans incidence, puisqu’il s’agit là d’un
manuscrit datant du Ve siècle. Notons que le CNTTS signale la lecture du majuscule 049
(IXe siècle), alors que le NA28 l’inclut dans la liste des manuscrits abrégés en « Byz ».
(3) Le CNTTS indique un plus grand nombre de témoins que le NA28 pour ce qui concerne
les manuscrits en minuscules (mais un nombre bien inférieur à l’ECM). Toutefois, les
manuscrits 1, 35, 999, 1251, 1874 et 2494 font partie de la liste des manuscrits abrégés en
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Cependant, l’intérêt principal de la base de données du CNTTS
réside dans le fait qu’il est possible d’effectuer des recherches au
sein même de l’apparat critique. Par exemple, sous Accordance, il
est assez facile de comparer deux manuscrits entre eux sur tout ou
partie du NT : en quelques clics, il est possible de savoir le nombre
de fois où ces manuscrits s’accordent ou sont en désaccord, dès lors
qu’il y a lieu variant. Étant donné l’étendue de l’apparat critique en
question, les résultats des recherches permettent de fournir des
statistiques précieuses en vue de vérifier ou d’établir la probabilité de
l’appartenance de deux manuscrits à une même famille.
Bible Parser inclut un apparat récent, assez complet, et facilement lisible 13. Pour chaque lieu variant, les leçons sont présentées
selon la classification classique – mais discutée – de grandes familles
d’origine. De plus, le siècle auquel remonte le manuscrit apparaît
en passant simplement la souris au-dessus de son numéro.
Accordance et Bibleworks proposent également les images de
plusieurs grands codex grecs, ce qui peut permettre de vérifier soimême une transcription, mais aussi de s’initier à lecture des
manuscrits ou d’inclure l’image à un exposé ou une présentation.
Enfin, les quatre logiciels peuvent inclure les principales versions anciennes du NT (syriaque, copte, latin). Bible Parser s’avère
le plus complet sur ce point en incluant notamment plusieurs
vieilles latines.
III. LECTURE DU TEXTE DANS SON CONTEXTE
Outre qu’ils aident à établir le texte grec ou hébreu, les logiciels permettent d’en faciliter la compréhension. Quand l’utilisateur
est confronté à une forme ou un mot difficile, un simple mouvement
de souris permet d’afficher l’analyse morphologique du terme, ainsi
qu’une première traduction. Ces informations apparaissent en français avec Bible Parser, mais en anglais avec les autres logiciels.
—————
« Byz » par l’ECM et le NA28. Quelques manuscrits cités par le CNTTS (489, 927, 1244,
1315, 1319, 1573, 1646, 2191, 2356) ne font pas partie des manuscrits consultés par
l’ECM : peut-être sont-ils de la famille de manuscrits qui diffèrent de moins de 10 % du
texte majoritaire et donc laissés volontairement de côté (voir à ce sujet l’introduction à
l’ECM, IV/1, 1997, p. 12*). L’inclusion dans le CNTTS d’un grand nombre de manuscrits
de la tradition byzantine peut certes, à première vue, majorer l’importance de ces
manuscrits. Toutefois, les spécialistes apprécieront qu’ils soient inclus dans une base de
données accessible : ils pourront eux-mêmes vérifier si ces manuscrits font effectivement
partie de la tradition byzantine, ou calculer dans quelle proportion ils sont fidèles au texte
majoritaire. (4) On notera que seul le NA28 signale les versions syriaques (sy), latines
(latt) et coptes (co). (5) Le CNTTS ajoute une précision concernant les leçons retenues par
les éditions du Textus Receptus (TR) et du SBL Greek New Testament (SBL).
13
Il s’agit d’une adaptation de l’apparat proposé sur le site : http://laparola.net/greco
[consulté le 10 avril 2014].
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Certains logiciels peuvent fournir d’autres informations utiles
sur le contexte. On peut, par exemple, consulter rapidement un plan
du livre biblique et voir où se situe la péricope que l’on étudie.
Logos propose même un tableau qui met en parallèle les différents
découpages et les titres proposés pour les péricopes, selon les bibles
modernes, ce qui peut attirer l’attention sur des possibilités multiples de délimiter un passage. Bibleworks propose, de son côté,
une analyse statistique des mots employés dans un passage. Cela
permet de repérer rapidement les mots les plus fréquents au sein
d’une péricope donnée. Logos donne accès à un grand nombre
d’informations supplémentaires. Certaines de ses bases de données
précisent le genre littéraire d’une péricope, ou même de différentes
sections en son sein. Elles fournissent également une liste des mots
importants d’un passage, des thèmes qui y sont abordés, des personnages et des lieux qui y sont mentionnés. Ces indications seront
utiles surtout pour l’étudiant, qui se souviendra toutefois qu’elles
peuvent, pour certaines d’entre elles, être discutées.
IV. TRADUCTION
En plus de l’analyse morphologique, Accordance et Logos
peuvent fournir une analyse syntaxique du texte hébreu de l’AT et
du texte grec du NT. Ainsi, il est possible de visualiser graphiquement la syntaxe d’une phrase, ou du moins, celle qui est proposée
par celui qui a réalisé la base de données ! En effet, même si ces
bases de données sont réalisées par des personnes compétentes, et
sont corrigées lorsque des erreurs sont signalées par les utilisateurs,
il ne faut pas oublier qu’elles ne sont qu’indicatives. Dans certains
cas, l’analyse morphologique ou syntaxique peut être particulièrement discutée parmi les spécialistes.
Les logiciels bibliques facilitent également le travail de traduction en intégrant les meilleurs dictionnaires et grammaires de grec
ou d’hébreu biblique. Un simple clic sur un mot permet d’ouvrir le
dictionnaire souhaité à la bonne page. De plus, pour chaque verset,
Bibleworks et Logos indiquent les points de grammaires importants
et permettent d’accéder en un clic à la page concernée d’une
grammaire de référence.
Pour la liste des dictionnaires ou grammaires pouvant être
fournies avec les logiciels, nous renverrons à notre comparatif en
ligne. Signalons tout de même que Bible Parser, malgré son prix
modique, propose une bibliothèque impressionnante d’ouvrages de
référence, certes anciens, mais souvent en français.
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Après avoir élaboré une traduction, il convient de la comparer
aux traductions existantes. Pour cela, les logiciels américains sont
assez limités en ce qui concerne le français. Bible Parser permet,
quant à lui, de mettre en parallèle près d’une trentaine de traductions françaises ! Notons, tout de même, que Logos a conclu un
accord avec les éditions Clé (éditeur du logiciel Bible Online en
français), ce qui devrait rapidement permettre d’avoir accès aux
meilleures traductions françaises avec ce logiciel.
V. PHILOLOGIE
Les logiciels bibliques sont avant tout précieux pour les études
de type philologique. Nos quatre logiciels permettront, à des degrés
divers, de faire des recherches de mots ou de combinaison de mots
dans les textes hébreu ou grec de la Bible. C’est ainsi qu’Accordance,
Bibleworks et Logos permettent de composer des combinaisons particulièrement complexes, ce que Bible Parser ne parvient pas à faire.
On notera également que les logiciels permettent de visualiser
les résultats des recherches sous forme de graphique. Accordance et
Logos sont particulièrement puissants sur ce point : les possibilités
de paramétrage sont très nombreuses. Accordance permet même de
superposer plusieurs graphiques de résultats, ce qui peut s’avérer
utile pour comparer les résultats de plusieurs recherches.
La linguistique a montré que l’étude d’une forme lexicale a ses
limites. En effet, pour exprimer une idée, un auteur emploie généralement plusieurs mots d’un même champ sémantique, mais qui ne
sont pas toujours de la même famille lexicale. Inversement, un
même mot peut avoir divers sens et désigner différentes réalités.
Ainsi, une recherche fondée sur la forme lexicale d’un mot ne
suffira pas pour étudier la manière dont un auteur biblique aborde
une thématique donnée.
Bibleworks fournit sur ce point une fonction intéressante : il
autorise la recherche au sein du texte grec à partir des domaines
sémantiques élaborés par Louw et Nida et présentés au sein du
Greek-English Lexicon of the New Testament Based on Semantic
Domains 14. Toutefois, ces recherches ne tiennent pas compte de la
polysémie d’un mot : le logiciel recherche simplement les mots
associés à un domaine sémantique, quel que soit le sens que
revêtent, selon les cas, les mots en question.
—————
14
Louw – Nida, 1989.
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Logos propose quant à lui des fonctionnalités surprenantes. Il
permet, d’une part, les recherches par domaines sémantiques de
Louw et Nida, et cela, en tenant compte de la polysémie d’un mot.
D’autre part, il offre son propre dictionnaire sémantique incluant
l’AT hébraïque. Mieux encore, la version 5 du logiciel propose une
fonction de recherche par référent. Cet outil permet de ne plus simplement rechercher un mot ou même son synonyme, mais d’inclure
les pronoms ou autres déterminants se référant à un personnage, à
un lieu ou à une notion. Par exemple, il est possible de rechercher
tous les versets qui mentionnent le personnage « Jésus ». Le
résultat inclura tous les titres possibles donnés à Jésus – Christ, Fils
de l’homme, Fils de Dieu, etc. – et même les versets où Jésus serait
le sujet non mentionné d’un verbe, ou encore désigné par un
pronom personnel. Ce type de recherche permet de compléter et de
préciser grandement une recherche classique fondée uniquement
sur la « forme » du mot.
Un autre type de recherche peut intéresser les linguistes : il
porte sur une construction syntaxique donnée. Supposons que l’on
souhaite retrouver toutes les phrases où tel mot est le sujet d’un verbe
au passé dont le complément d’objet est un adjectif substantivé.
Pour le grec, on pourra peut-être y parvenir grâce à une recherche
morphologique, en précisant la forme et le cas de chaque mot.
Cependant, pour l’hébreu, l’absence de déclinaison ne permet pas
une telle recherche. Accordance et Logos permettent d’outrepasser
cette limite, grâce à des bases de données intégrant des informations syntaxiques précises. Les bases de données d’Accordance
sont encore incomplètes, car elles ne couvrent que certains livres de
l’AT et du NT. Logos propose, quant à lui, trois bases de données
syntaxiques pour l’ensemble du NT grec et une pour le texte hébreu
de l’AT. On notera que, pour cette dernière, les informations syntaxiques sont particulièrement détaillées. Cela représente certes un
atout, mais c’est également une contrainte : les recherches syntaxiques
s’avèrent particulièrement complexes à réaliser avec Logos. En effet,
chaque base de données a son propre vocabulaire syntaxique et son
propre découpage des textes. Pour une bonne utilisation, il convient,
dès lors, d’apprendre le langage de celui qui a réalisé la base de
données. Or, plus les informations syntaxiques sont détaillées, plus
l’apprentissage est long.
En ce qui concerne les études sémantiques autour d’un mot,
certains logiciels ouvrent encore d’autres possibilités.
Logos surpasse ses concurrents sur ce point, grâce à sa fonction
« étude de mot ». Cet outil permet de visualiser facilement à quels
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sujets, verbes ou compléments un mot est associé, avec quelles
prépositions il est employé, à quelle famille lexicale il appartient,
mais aussi à quelle famille sémantique il se rattache. L’outil propose également des statistiques sur la manière dont un mot du texte
hébreu est traduit dans la LXX, et inversement. Toutes ces données
sont présentées de manière agréable, avec de nombreux liens vers
les textes grecs ou hébreux.
Enfin, les philologues s’intéresseront peut-être à la manière
dont un mot est traduit. Nous avons déjà mentionné la possibilité,
sur Logos, de voir rapidement la manière dont un mot hébreu est
traduit dans la LXX, et inversement. Les quatre logiciels testés
donnent accès à la base de données élaborée sous la direction
d’Emmanuel Tov, et qui relie chaque mot hébreu du TM à sa
traduction grecque dans la LXX.
Accordance et Bibleworks permettent de faire des recherches
simultanées au sein de plusieurs traductions de la Bible. Il est ainsi
possible de chercher les versets contenant un mot dans une langue
source et un autre mot dans une langue cible. Par exemple, afin
d’étudier les différentes traductions du mot λόγος, on peut chercher
les versets du NA28 dans lesquels ce mot est présent et pour
lesquels le mot « parole » n’est pas présent dans une traduction
française.
Les diverses possibilités évoquées permettent certes d’améliorer
notre compréhension de l’hébreu ou du grec biblique. Cependant,
ceux qui s’intéressent à la critique rédactionnelle pourront également
tirer bénéfice de ces diverses fonctionnalités. En effet, ils pourront
vérifier rapidement si une construction syntaxique particulière ou
un vocabulaire donné est effectivement propre à une source ou un
auteur particulier. Imaginons qu’un exégète de l’AT veuille vérifier
que telle formule hébraïque est effectivement typique de ce qu’on
appelle la source sacerdotale. Pour cela, il lui suffira d’entrer cette
formule dans son moteur de recherche et de vérifier si la liste des
résultats correspond aux passages généralement attribués à cette
source.
Ceux qui s’intéressent à l’évolution de l’hébreu pourront de
même retrouver facilement toutes les occurrences de ce qu’ils pensent
être une construction syntaxique typique de l’hébreu classique ou
de l’hébreu tardif. Ou encore, à l’aide d’une recherche sémantique,
ils pourront repérer les passages dans lesquels un mot hébreu est
utilisé dans un sens particulier.
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VI. INTERTEXTUALITÉ
L’exégète ne peut se passer d’un travail de comparaison entre
le texte qu’il étudie et d’autres textes anciens qui évoquent une thématique similaire. Cette étude de l’intertextualité est facilitée par
les outils fournis par les logiciels bibliques.
Dans un premier temps, on pourra comparer les textes bibliques
entre eux, en particulier s’ils utilisent une même source, ou si un
texte du NT fait allusion à un texte de l’AT. Pour cela, on pourra se
reporter aux listes de références croisées intégrées à chacun des
quatre logiciels. Accordance, Bibleworks et Logos proposent également une fonction « synopse » permettant d’afficher des textes
parallèles côte à côte. Ces synopses sont souvent moins lisibles que
celles sur support papier. Toutefois, elles ont le mérite d’être
rapidement accessibles. De plus, elles permettent à l’utilisateur de
choisir la langue dans laquelle il veut que le texte s’affiche.
Les quatre logiciels testés donnent accès à un certain nombre
de textes anciens pouvant entrer en rapport avec le texte biblique. Il
est souvent possible d’effectuer des recherches morphologiques au
sein de ces textes, de la même manière que pour le texte biblique.
Accordance, Bibleworks et Logos intègrent tous trois une base
de données contenant l’ensemble des manuscrits non bibliques
retrouvés à Qumran et réalisée par Martin Abegg. Accordance est
toutefois le seul à donner accès aux manuscrits non bibliques provenant des autres sites à proximité de la Mer Morte.
En matière de textes anciens, le catalogue le plus fourni est celui
de Logos. Il est particulièrement intéressant en ce qui concerne la
littérature grecque, donnant accès à un plus grand nombre d’écrits
intertestamentaires que ses concurrents. De plus, Logos a adapté
pour son logiciel le millier de textes de la littérature classique
grecque ou latine accessibles gratuitement en ligne sur le site de la
Perseus Digital Library 15. Le catalogue d’Accordance reste assez
complet, avec notamment les meilleures bases de données en ce qui
concerne la littérature rabbinique et targumique. Enfin, on notera
que Bible Parser n’a rien à envier à ses onéreux concurrents. En
effet, il donne accès à un grand nombre de textes anciens, parfois
même accompagnés de leur traduction française. Il s’agit là de véritables bases de données – et non pas d’ouvrages scannés – au sein
desquelles il est possible de faire des recherches lexicales.
—————
15
Voir http://www.perseus.tufts.edu/hopper/ [site consulté le 10 avril 2014].
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Accordance et Bibleworks proposent des outils permettant de
rechercher les allusions éventuelles à un texte donné.
Avec Accordance, la fonction « infer » permettra de rechercher
les allusions à un verset, un chapitre, voire même un corpus donné,
au sein d’un autre texte de la même langue. Par exemple, à partir de
la LXX de Rahlfs, on pourra chercher toutes les allusions à Ésaïe 53
au sein du texte du NA28. Accordance recherchera alors tous les
versets du NT grec contenant au moins un certain nombre de mots
présents dans le texte grec d’Ésaïe 53. Il est possible de paramétrer
la précision de la recherche et de choisir le nombre minimal de
mots en commun.
Bibleworks fait encore mieux, grâce à deux outils. Le premier,
intitulé « Related Verses Tool », est assez similaire à la fonction
« infer » d’Accordance. Il permet, à partir d’un verset donné, de
chercher les autres versets ou paragraphes d’un texte de la même
langue ayant un certain nombre de mots en commun avec le verset
en question. Cependant, Bibleworks peut étendre la recherche à
l’ensemble des corpus d’une même langue. Par exemple, si l’exégète
cherche les allusions à un verset à partir du texte grec de la LXX,
sa recherche pourra porter sur le reste de la LXX, le texte grec du
NT, mais aussi les textes grecs de la littérature intertestamentaire,
de Philon, de Josèphe et des Pères apostoliques. De plus, grâce aux
possibilités de paramétrage, Bibleworks peut ne pas inclure dans sa
recherche les pronoms personnels, les conjonctions ou autres petits
mots non significatifs pour une recherche d’allusion. Un deuxième
outil, intitulé « Phrase Matching Tool », permet de préciser encore
les recherches. Celui-ci ne recherche pas les mots en commun entre
deux textes, mais les membres de phrases similaires.
VII. CONSULTER LA LITTÉRATURE SECONDAIRE
Tout exégète sérieux ne peut achever son exégèse sans la
confronter aux travaux de ses confrères. À part Bibleworks, les
logiciels bibliques testés peuvent faire office de bibliothèque électronique et faciliter ainsi la consultation de la littérature exégétique
secondaire.
Logos est le logiciel idéal pour l’exégète qui souhaite se
constituer une bibliothèque électronique en anglais. Le catalogue
contient tout ce dont il peut rêver, et le logiciel permet une lecture
agréable sur tous les supports informatiques, tablettes et smartphones
inclus. Le catalogue d’Accordance est moins fourni, mais il contient
néanmoins une bonne sélection de commentaires techniques ou de
dictionnaires bibliques en anglais.
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Bible Parser donne accès à des centaines de commentaires
bibliques, dictionnaires et ouvrages exégétiques. On y trouve une
belle sélection des meilleurs ouvrages exégétiques libres de droit,
en français et en anglais. Tous ces ouvrages, le plus souvent au
format PDF, peuvent généralement se retrouver ailleurs sur Internet.
Cependant, Bible Parser les a réunis et indexés en une même
bibliothèque.
CONCLUSIONS
Emmanuel Tov indique que l’on peut utiliser les programmes
informatiques comme des « outils actifs » ou comme des « outils
passifs 16 ». Pour ces deux types d’usage, il conviendra d’être
conscient des limites des logiciels.
Les logiciels bibliques peuvent être utilisés comme des outils
passifs. En effet, ils présentent un certain nombre d’informations,
tout comme le ferait un livre sur support papier : analyse morphologique ou syntaxique, informations sur le sens ou la grammaire,
etc. Ces données seront à utiliser avec le regard critique de l’exégète,
de la même manière qu’il convient de contrôler les affirmations
d’un ouvrage imprimé.
Les logiciels peuvent aussi être utilisés comme des outils
actifs. Ils permettent alors de faire ses propres recherches au sein
d’une base de données. C’est cet usage qui fait le plus avancer la
recherche, en permettant à l’exégète de faire par lui-même de nouvelles découvertes. Pour cela, il devra apprivoiser l’outil afin d’en
utiliser toutes les potentialités. Il devra également en connaître les
limites : les bases de données utilisées peuvent contenir des erreurs ;
elles ne sont pas forcément exhaustives et ne sont pas toujours
élaborées à partir des meilleures éditions critiques de textes
anciens. Sur ce point, on peut regretter un manque de lisibilité
quant à la manière dont une base de données a été constituée. Il
manque souvent une introduction de type scientifique relative à la
méthodologie employée, en comparaison, par exemple, avec ce que
le NA28 ou la BHS proposent. De plus, si certaines bases de données
ont été élaborées par des spécialistes avérés comme Martin Abegg,
Emanuel Tov ou Francis I. Andersen, d’autres l’ont été par des
biblistes peu connus du monde académique. Les éditeurs des trois
logiciels américains parviennent toutefois à se faire recommander
par quelques exégètes de renom. Au-delà de l’aspect commercial
d’une telle opération, ces spécialistes collaborent avec les éditeurs :
—————
16
Tov, 2006, p. 337.
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ils utilisent les logiciels et peuvent donc suggérer des améliorations
ou signaler des erreurs éventuelles.
Les quatre logiciels testés sont de remarquables outils pour
l’exégèse biblique. À ce jour, Bibleworks reste d’un bon rapport
qualité-prix pour celui qui souhaite effectuer des recherches lexicales complexes dans les textes bibliques. Il propose également des
fonctions intéressantes pour la critique textuelle du NT ou pour les
recherches d’intertextualité. En revanche, le spécialiste de la critique textuelle de l’AT ou de l’hébreu biblique aura tout intérêt à
aller voir ailleurs.
Logos est le logiciel idéal pour quiconque souhaite investir
dans une bibliothèque exégétique électronique. Il ouvre aussi à de
grandes possibilités en matière de linguistique biblique. L’inconvénient majeur de Logos est de vouloir faire un peu trop le travail à la
place du chercheur. Il est excellent en tant qu’outil passif ou semiactif, mais lorsqu’il s’agit d’effectuer soi-même des recherches
complexes, l’utilisation s’avère plus malaisée.
Accordance reste un bon compromis entre les deux. C’est avant
tout un logiciel conçu pour le chercheur, mais qui peut aussi gérer
une bibliothèque électronique. Il est particulièrement apprécié par
les spécialistes de l’hébreu. C’est certainement le plus simple à
utiliser en tant qu’outil actif : avec Accordance, il n’a jamais été
aussi facile de faire des recherches complexes ! Toutefois, le prix
élevé des titres de son catalogue le rend plus cher que ses concurrents pour un contenu similaire.
Bible Parser est un excellent pis-aller pour les petits budgets.
Même pour celui qui pourrait s’offrir un des trois autres logiciels, il
peut s’avérer un complément utile. En effet, s’il est particulièrement
limité dans son usage comme outil actif, il est excellent comme
outil passif. Bible Parser regroupe en un même lieu les meilleurs
ouvrages exégétiques libres de droits en anglais et en français. De
même, il permet de consulter facilement les traductions françaises.
Enfin, en matière de critique textuelle, il propose de nombreux
apparats et donne accès à un grand nombre de versions anciennes.
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BIBLIOGRAPHIE
ECM, 1997 : Novum Testamentum Graecum. Editio Critica Maior. Hrsg. vom Institut
für Neutestamentliche Textforschung. Bd. IV : Die Katholischen Briefe, hrsg. von
B. Aland, K. Aland †, G. Mink, und K. Wachtel. Teil 1 : Text. Teil 2 : Begleitende
Materialien. 1. Lieferung : Der Jakobusbrief, Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft,
1997.
Louw – Nida, 1989 : Johannes P. Louw – Eugene A. Nida, Greek-English Lexicon of
the New Testament Based on Semantic Domains, New York, United Bible Societies, 2e éd., 1989.
Tov, 2006 : Emanuel Tov, « The Use of Computers in Biblical Research », in : P. W. Flint
et al. (éd.), Studies in the Hebrew Bible, Qumran, and the Septuagint. Presented
to Eugene Ulrich, Leiden – Boston, Brill, 2006 (Supplements to Vetus Testamentum 101), p. 337-359.
NA28, 2012 : Nestle-Aland. Novum Testamentum Graece. Begründet von Eberhard und
Erwin Nestle. Hrsg. von B. und K. Aland, J. Karavidopoulos, C. M. Martini,
B. M. Metzger, 28e éd., Stuttgart, Deutsche Bibelgesellschaft, 2012.
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