Jurisprudence À quels fonctionnaires le président du conseil
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Jurisprudence À quels fonctionnaires le président du conseil
Jurisprudence Organes des collectivités locales À quels fonctionnaires le président du conseil général peut-il déléguer sa signature ? Résumé L’article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales permet au président du conseil général de donner délégation de signature aux « responsables » des services du département. Cette disposition ne fait pas obstacle à ce que le président délègue sa signature à des agents du département qui, sans avoir la qualité de directeur ou de chef de service dans l’administration départementale, exercent des fonctions de responsabilité au niveau territorial ou Organes du département ■ Président du conseil général ■ Délégations de signature aux responsables des services du département ■ Notion d’agent responsable. CE (3/8 SSR) 29 juin 2005, Département des Hautsde-Seine c/ Mme N., req. n° 266686 – Mme Lemesle, Rapp. – M. Séners, C. du G. – SCP Delaporte, Briard,Trichet, Av. ➥ Décision qui sera mentionnée dans les tables du Recueil Lebon. fonctionnel. Conclusions François Séners, commissaire du gouvernement Retrait d’agrément Mme N. a été agréée en 1975 par le président du conseil général des Hauts-deSeine en qualité d’assistante maternelle. Une succession d’incidents avec des parents et les responsables du service départemental de la protection maternelle et infantile (PMI) ont conduit le président du conseil général à suspendre, le 2 novembre 1999, puis à retirer, le 4 février 2000, l’agrément de Mme N. La décision de retrait de l’agrément a été signée par le médecin responsable de l’antenne territoriale compétente du service de la PMI, agissant sur délégation du président du conseil général. C’est un autre médecin, adjoint au chef du service départemental de la PMI, qui a signé la décision rejetant le recours gracieux de l’intéressée. Ce médecin était titulaire, lui aussi, d’une délégation de signature du président du conseil général. M me N. a attaqué devant le tribunal administratif de Paris ces deux décisions et elle en a obtenu l’annulation, le tribunal ayant soulevé d’office le moyen d’ordre public tiré de l’incompétence des signataires des décisions du fait de l’illégalité des délégations de signature dont ils étaient titulaires. Ce jugement a été confirmé par l’arrêt attaqué de la cour administrative d’appel de Paris qui juge que le président du conseil général ne pouvait, aux termes de la loi, déléguer sa signature qu’au chef du service de la PMI. Le département des Hauts-de-Seine conteste cette analyse et se pourvoit en cassation contre l’arrêt. Il soutient que l’arrêt ne serait pas suffisamment motivé, mais il n’y aurait certainement pas lieu de l’annuler pour ce motif. L’erreur de droit invoquée de façon beaucoup plus sérieuse soulève, en revanche, une question qui est intéressante et qui présente une grande importance pratique pour les départements et les régions, soumis aux mêmes règles en matière de délégations de signature données aux fonctionnaires. L’analyse des juges du fond repose sur les dispositions de l’article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales, qui fixent les règles générales de délégation de signature des présidents de conseils généraux, et sur les dispositions, alors en vigueur, de l’article L. 148 du code de la santé publique fixant l’organisation du service départemental de la PMI. Celles du code général des collectivités territoriales sont déterminantes pour apprécier la légalité d’une délégation de signature, et il est exact qu’elles comportent une part d’imprécision qui ouvre la voie à des interprétations divergentes. Portée de l’article L. 3221-3 L’article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales, qui a son exact pendant à l’article L. 4231-3 du même code pour les présidents des conseils régionaux, rappelle que le président du Bulletin Juridique des Collectivités Locales n° 8/05 515 Organes des collectivités locales conseil général est seul chargé de l’administration de cette collectivité territoriale mais l’autorise à procéder à deux catégories de délégations. Il peut, d’une part, selon une rédaction qui a été modifiée par les lois des 5 avril 2000 et 27 février 2002, déléguer l’exercice d’une partie de ses fonctions aux vice-présidents et à d’autres membres du conseil général. Il peut, d’autre part, selon les termes du dernier alinéa de l’article, qui n’ont pas varié depuis la loi du 2 mars 1982, donner délégation de signature en toutes matières aux « responsables » des services du département. Ces responsables se limitent-ils, comme l’a jugé la cour de Paris, aux chefs des services du département, c’est-à-dire, outre les directeurs généraux et directeurs généraux adjoints, aux directeurs des grandes unités fonctionnelles constituées au sein des services départementaux, ou englobent-ils des chefs d’unités administratives de rang inférieur ? La notion de responsable d’un service n’est pas dépourvue d’ambiguïté et c’est la difficulté de l’affaire. La question est d’autant plus importante que, d’une part, en vertu d’une règle fondamentale, une délégation de signature, comme toute délégation de compétence, n’est légale que dans la mesure où elle est permise par un texte adéquat 1 et que, d’autre part, les subdélégations sont en principe interdites 2. On sait, par ailleurs, que l’illégalité de la délégation entraîne, pour incompétence, celle de tous les actes pris par le délégataire en application de la délégation 3. Notons, pour commencer, que les dispositions applicables aux communes sont substantiellement différentes. Alors que les dispositions de l’article L. 212218, qui fixent le régime des délégations susceptibles d’être données par le maire à ses adjoints, sont en parfaite harmonie 1 CE 25 février 1949, Roncin : Rec., p. 92 ; CE S. 23 janvier 1959, Allotte de la Fuye : Rec., p. 57. 2 Pour une exception, v. article 38 du décret 2004-374 du 29 avril 2004 relatif aux pouvoirs des préfets. CE 3 juin 1953, Consorts Branellec : Rec., p. 256 ; CE 9 février 1955, Université de Paris X Nanterre : Rec.,T., p. 691 ; CE 2 octobre 1985, Bonnain : Rec.,T., p. 465. 3 CE 17 juin 1955, Adjemian : Rec., p. 334 ; CE 20 février 1985, Sebe : Rec., p. 50. 4 Qualifiés de secrétaire général et secrétaire général adjoint avant la loi du 12 avril 2000. 5 CE S. 5 avril 1974, Leroy : Rec., p. 214 ; CE S. 29 octobre 1976, Rouillon, Pommeret et Sion : Rec., p. 453, concl. pdt Massot. 6 CE 11 février 1953, Labelle : Rec.,T., p. 600 ; CE 22 mai 1953, Mlle Comiti : Rec.,T., p. 600 ; CE 20 février 1985, Sebe, préc. 7 CE 11 mars 1998, Préfet des PyrénéesOrientales : Rec., p. 73. 8 CE 8 février 1999, SDIS du Var, req. n° 179862. avec celles qui s’appliquent aux conseils généraux et régionaux, les règles relatives aux délégations de signature aux fonctionnaires municipaux sont précises et restrictives : l’article L. 2122-19 n’autorise en effet le maire à déléguer sa signature qu’à quatre personnes, le directeur général des services, son adjoint 4, le directeur général et le directeur des services techniques. Les dispositions applicables aux départements et aux régions permettent ainsi, en tout état de cause, de donner délégation de signature à un nombre plus grand de fonctionnaires qu’au sein des administrations communales. Il nous semble révélateur, dans ce contexte, que le législateur, fixant ainsi des règles assouplies, ayant pour objet de faciliter la déconcentration au sein des départements et régions, n’ait pas borné la facilité donnée aux exécutifs de ces collectivités par des termes plus précis que ceux de « responsables » des services du département. Il lui était en effet aisé de fixer une liste limitative de responsables de premier plan, comprenant les directeurs généraux des services et leurs adjoints, les directeurs des services immédiatement placés sous l’autorité directe de ceux-ci et, peut-être, les directeurs de cabinet et chefs des services placés immédiatement sous leur autorité. Rien ne faisait non plus obstacle à ce que le législateur précise le champ restrictif qu’il aurait entendu donner aux règles de délégation de signature en mentionnant les directeurs ou les chefs de service, termes plus précis et plus restrictifs que ceux de « responsables des services ». Il faut noter, par ailleurs, que les règles très restrictives fixées, dans les communes, par l’article L. 2122-19 du code général des collectivités territoriales constituent un cas particulier dans notre organisation administrative et que, s’agissant des autorités de l’État, les textes prévoient des possibilités étendues de délégation de signature. C’est ainsi que le décret du 23 janvier 1947 modifié, qui régit les délégations de signature des ministres, permettait, jusqu’à sa modification intervenue en juin 1987, d’en faire bénéficier, outre quelques membres des cabinets, l’ensemble des fonctionnaires d’administration centrale ayant au moins le grade d’administrateur civil ou un grade équivalent, sans condition tenant aux fonctions exercées 5. Dans sa rédaction en vigueur depuis 1987, le texte autorise les ministres à déléguer leur signature, d’une part, aux directeurs, chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs des administrations centrales, ainsi qu’aux autres fonctionnaires de catégo- 516 Bulletin Juridique des Collectivités Locales n° 8/05 rie A en cas d’absence ou d’empêchement des précédents, et, d’autre part, aux chefs des services à compétence nationale ainsi qu’à leurs collaborateurs de catégorie A en cas d’absence ou d’empêchement. S’agissant des préfets, les décrets du 10 mai 1982, dont les dispositions ont été, en substance, reprises par le décret du 29 avril 2004, et qui prolongeaient celles du décret du 10 mars 1964, permettent de nombreuses délégations de signature, non seulement aux secrétaires généraux, directeurs de cabinet, sous-préfets et chargés de mission, mais également aux chefs des services déconcentrés de l’État ou à leurs collaborateurs ainsi qu’à l’ensemble des « agents en fonction dans les préfectures », sans limitation de grade ou de fonction. État de la jurisprudence Ce panorama étant fait, qu’en est-il de la jurisprudence ? Elle n’a que rarement été confrontée à la question des limites du champ des délégataires de signature. Vous jugez, de façon générale, qu’un texte qui énumère les personnes pouvant recevoir délégation de signature fixe une liste limitative 6. Vous n’avez eu, à notre connaissance, que deux occasions de faire application de cette ligne aux présidents de conseils généraux, dans des contextes bien particuliers. La loi du 2 mars 1982 avait prévu, en premier lieu, que des services ou des parties de services déconcentrés de l’État pouvaient être mis à disposition des départements pour l’exercice des compétences transférées à ces collectivités et elle autorisait le président du conseil général à déléguer, dans ce cadre, sa signature au chef du service de l’État concerné, pour l’exercice des compétences transférées. En vous appuyant sur le fait que la loi n’avait mentionné que le chef du service, vous avez jugé illégale une délégation de signature donnée à un fonctionnaire de rang inférieur, alors même qu’il était responsable de la partie du service déconcentré mise à disposition du département 7. Vous avez jugé, en second lieu, que le président du conseil général n’était pas habilité à déléguer sa signature au président d’un établissement public départemental autonome ne pouvant, de ce fait, être regardé comme un service du département au sens de la loi 8. Aucun de ces deux précédents n’apporte un éclairage utile pour la présente question. Vous avez, en revanche, rendu Organes des collectivités locales une décision intéressante dans un contexte juridique extrêmement proche de l’espèce. Il se trouve que la loi du 31 décembre 1982 relative à l’organisation administrative de Paris, Lyon et Marseille, dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 2511-27 du code général des collectivités territoriales, a fixé une règle de délégation de signature des maires de ces trois villes similaire à celle que le code a retenue pour les exécutifs départementaux et régionaux : délégation peut être donnée au secrétaire général 9 et aux « responsables de services communaux » des trois métropoles. Interprétant cette disposition spéciale, vous avez jugé qu’elle ne faisait pas obstacle à ce qu’une délégation soit donnée à un chef de bureau de la ville de Paris et même à un adjoint à un chef de bureau, alors même que ce dernier n’avait que le grade d’attaché d’administration 10. La décision n’est pas fichée sur ce point, mais ses motifs sont aussi clairs que détaillés. Interprétation de la loi Cette analyse nous paraît devoir être confirmée dans le cas des présidents de conseils généraux et régionaux. En renonçant à une énumération limitative et détaillée des personnes pouvant recevoir délégation et en renonçant aux formulations génériques habituelles visant des catégories limitées de hauts responsables administratifs, tels que les directeurs ou les chefs de service, le législateur a, selon nous, clairement manifesté son intention de fixer une règle moins restrictive concernant les départements et les régions. Il n’a pas entendu, pour autant, comme l’a fait le pouvoir réglementaire s’agissant des délégations des préfets, autoriser de donner compétence à tous les fonctionnaires de ces collectivités et il a choisi un moyen terme en visant la catégorie des agents investis de fonctions de responsabilité. Cette notion n’est pas exagérément imprécise et, comme le révèle l’arrêt Sté Parthéna, elle s’applique, dans la chaîne hiérarchique habituelle, jusqu’au niveau des responsables d’unités élémentaires, telles que des bureaux, ainsi qu’aux adjoints de ces responsables. Ce choix du législateur, qui diffère de celui qui a été fait pour les communes, n’est d’ailleurs pas sans logique. Les départements et régions sont aujourd’hui investis de responsabilités très nombreuses et disposent de services étoffés comptant fréquemment plusieurs milliers d’agents. Sauf à vouloir provo- quer la thrombose de ces administrations, il est impossible de concentrer les innombrables signatures de décisions qu’elles sont appelées à prendre sur un trop petit nombre de cadres. L’interprétation de la loi qui a été faite, en l’espèce, par les juges du fond, ne permettrait ainsi au président du conseil général des Hauts-de-Seine de déléguer sa signature qu’à une douzaine de chefs de service de premier rang. Il est vrai que le tribunal administratif de Rennes, par un jugement du 4 mars 1998 11, a considéré qu’un responsable d’une circonscription territoriale de la direction des affaires sociales du département n’avait pas la qualité de responsable d’un service au sens du code général des collectivités territoriales, mais, pour les motifs que nous venons de développer, cette analyse nous paraît erronée. Le ministre de l’Intérieur, quant à lui, répondant à la question d’un parlementaire, a exprimé l’avis que la loi avait entendu donner une portée extensive aux champs des délégations permises 12. Si vous validez cette analyse du code général des collectivités territoriales, il nous paraît exclu de considérer que les dispositions du code de la santé publique relatives à l’organisation des services départementaux de la PMI auraient une portée contraire dans le cas particulier de ces services. Ces dispositions, qui étaient en l’espèce fixées aux articles L. 147 et L. 148 du code et qui ont été reprises depuis aux articles L. 2111-2 et 2112-1, se bornent à imposer de gérer le service en régie directe et d’en confier la responsabilité à un médecin. Ces règles spéciales ne font nullement obstacle à ce que le président du conseil général organise librement le service, pour le reste, notamment en fixant les missions de ses différentes subdivisions et, particulièrement, celles de ses antennes locales qui jouent un rôle important de proximité avec les administrés. Ces règles ne font pas non plus obstacle à ce que, sous l’autorité du médecin chef de service, des responsables subordonnés soient désignés à la tête de ces différentes subdivisions. Nous sommes donc d’avis que la cour a commis l’erreur de droit qui lui est reprochée en jugeant que les deux médecins qui ont signé, respectivement, le retrait de l’agrément d’assistante maternelle et le rejet du recours gracieux de l’intéressée, ne pouvaient pas avoir été légalement habilités à signer ces décisions par délégation du président du conseil général. Si vous nous suivez, vous annulerez l’arrêt attaqué et, statuant au fond, vous constaterez que, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal administratif, les conditions formelles prévues par les dispositions alors en vigueur du code de la famille et de l’aide sociale, donnant compétence au président du conseil général, ont été respectées. Examinant, par la voie de l’effet dévolutif de l’appel, les autres moyens de la demande d’annulation présentée par Mme N., vous ne pourrez que les écarter : les deux décisions contestées sont bien motivées et, au vu des pièces du dossier, elles ne sont pas entachées d’erreurs sur la matérialité des faits, l’intéressée ayant manifesté à plusieurs reprises des signes de fragilité psychologique et de violence, difficilement compatibles avec ses fonctions auprès de jeunes enfants. Vous ne pourrez pas, dès lors, faire droit à la demande de frais irrépétibles présentée par l’intéressée et, par ces motifs, nous concluons à l’annulation de l’arrêt attaqué et du jugement de première instance et au rejet des conclusions de Mme N. ■ 9 Désormais qualifié de directeur général des services depuis la loi du 12 avril 2000. 10 CE 21 décembre 2001, Sté Parthéna SA, req. n° 212987. 11 Mentionné au Recueil Lebon. 12 Rep. n° 15743 à M. Bourg-Broc, JO AN, 15 août 1994, p. 4204. Bulletin Juridique des Collectivités Locales n° 8/05 517 Organes des collectivités locales Décision Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 19 avril 2004 et 19 août 2004 au secrétariat du contentieux du Conseil d’État, présentés pour le département des Hauts-de-Seine, représentée par le président du conseil général ; le département des Hauts-de-Seine demande au Conseil d’État : 1°) d’annuler l’arrêt du 2 février 2004 par lequel la cour administrative d’appel de Paris a rejeté sa demande tendant à l’annulation du jugement du 26 novembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Paris a, à la demande de Mme N., annulé sa décision du 4 février 2000 lui retirant l’agrément d’assistante maternelle, ensemble la décision du 18 mai 2000 rejetant son recours gracieux ; 2°) statuant au fond, de rejeter la demande de Mme N. ; […] Considérant que par un arrêt du 2 février 2004, la cour administrative d’appel de Paris a rejeté la requête du département des Hauts-deSeine tendant à l’annulation du jugement du 26 novembre 2002 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé le retrait de l’agrément de Mme N., assistante maternelle, signé le 4 février 2000 par Mme T., médecin chargé de la subdivision territoriale 6B du service de protection maternelle et infantile du département des Hauts-de-Seine, ensemble la décision du 18 mai 2000 signée du docteur S., sous-directrice, rejetant le recours gracieux formé par l’intéressée ; que le département des Hauts-de-Seine se pourvoit contre cet arrêt ; Considérant qu’aux termes de l’article 123-1 du code de la famille et de l’aide sociale, en vigueur à la date des décisions litigieuses : « La personne qui accueille habituellement des mineurs à son domicile, moyennant rémunération, doit être préalablement agréée comme assistante maternelle par le président du conseil général du département où elle réside. / L’agrément est accordé pour une durée fixée par voie réglementaire si les conditions d’accueil garantissent la santé, la sécurité et l’épanouissement des mineurs accueillis […]. Tout refus d’agrément doit être dûment motivé » ; que l’article 123-1-1 du même code prévoyait que si les conditions de l’agrément cessent d’être remplies, le président du conseil général peut, après avis d’une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l’agrément ou procéder à son retrait et que toute décision de retrait ou de suspension de l’agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée ; qu’aux termes de l’article L. 148 du code de la santé publique, alors en vigueur : « Les compétences dévolues au département par le 3° de l’article 37 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État et par l’article L. 147 sont exercées, sous l’autorité du président du conseil général, par le service départemental de protection maternelle et infantile qui est un service non personnalisé du département, placé sous la responsabilité d’un médecin et comprenant des personnels qualifiés notamment dans les domaines médical, paramédi- cal, social et psychologique. Les exigences de qualification professionnelle de ces personnels sont fixées par voie réglementaire. » ; que le décret du 6 août 1992 précise que le médecin responsable du service départemental de protection maternelle et infantile doit avoir la qualité d’agent titulaire et remplir les conditions de diplômes, certificats et titres posées par l’article L. 356 du code de la santé publique ; Considérant qu’en vertu des dispositions de l’article L. 3221-3 du code général des collectivités territoriales, le président du conseil général est « le chef des services du département. Il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, donner délégation de signature en toute matière aux responsables desdits services » ; Considérant que ni ces dispositions de portée générale du code général des collectivités territoriales, ni les dispositions propres à la protection maternelle et infantile, contenues dans le code de l’action sociale et des familles et le code de la santé publique ne font obstacle à ce que le président du conseil général délègue sa signature à des agents du département qui, sans avoir la qualité de directeur ou de chef de service dans l’administration départementale, exercent des fonctions de responsabilité au niveau territorial ou fonctionnel, en matière de protection maternelle et infantile ; que, dès lors, en estimant qu’en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires particulières autorisant le président du conseil général à déléguer sa signature aux subordonnés du médecin dirigeant le service départemental de protection maternelle et infantile, les signataires des décisions litigieuses n’étaient pas au nombre des agents auxquels le président du conseil général pouvait légalement déléguer sa signature, la cour administrative d’appel a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; que l’arrêt attaqué doit, par suite, être annulé ; Considérant qu’il y a lieu, en application des dispositions de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l’affaire au fond ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que Mme T., signataire de la décision de retrait d’agrément, avait régulièrement reçu délégation de signature du président du conseil général en sa qualité de responsable du service territorial 6B de la protection maternelle et infantile ; qu’il en va de même de Mme S., sousdirectrice, qui a rejeté le recours gracieux de Mme N. ; qu’ainsi qu’il a été dit, ces délégations n’étaient pas illégales au regard des dispositions législatives et réglementaires applicables ; que, par suite, le département des Hauts-de-Seine est fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a fait droit à la demande de Mme N. ; Considérant, toutefois, qu’il appartient au Conseil d’État, saisi de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par Mme N. ; Considérant qu’en précisant, dans sa décision du 4 février 2000, qu’il avait décidé de retirer son agrément à Mme N. au motif que les « conditions de santé de l’intéressée n’apparaissent plus compatibles avec l’accueil de jeunes enfants », l’auteur de la décision de retrait a suffisamment 518 Bulletin Juridique des Collectivités Locales n° 8/05 motivé celle-ci ; qu’il en va de même de la décision par laquelle a été rejeté, le 18 mai 2000, le recours gracieux formé par Mme N., ce rejet étant motivé par le fait que « d’après les éléments recueillis concernant l’état de santé » de Mme N. « la sécurité et l’épanouissement des enfants ne sont plus assurés lors de leur accueil à [votre] domicile » ; Considérant qu’il ressort des pièces du dossier que la décision de retirer l’agrément d’assistante maternelle de Mme N. fait suite non seulement au rapport de l’expertise psychiatrique qu’elle avait elle-même sollicitée, et qui préconisait que soit surveillée l’évolution de l’état psychologique de l’intéressée, mais également à plusieurs rencontres entre Mme N. et le médecin de la protection maternelle et infantile, celui du service territorial et l’équipe de la crèche au cours desquelles celle-ci avait manifesté une attitude agressive ; que, par suite, la décision litigieuse repose sur des constatations de fait qui ne sont pas entachées d’inexactitude matérielle quant à l’état de santé de l’intéressée, alors même que le rapport d’expertise psychiatrique du 27 septembre 1999 mentionnait que celui-ci ne nécessitait, à l’époque, ni hospitalisation, ni traitement, que, dès lors, Mme N. n’est pas fondée à demander l’annulation de la décision du 4 février 2000 lui retirant son agrément, ni de la décision du 18 mai 2000 rejetant son recours gracieux ; Sur les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que les sommes que Mme N. demande soient mises à la charge du département des Hauts-deSeine qui n’est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; DÉCIDE : Article 1er : L’arrêt de la cour administrative d’appel de Paris du 2 février 2004 est annulé. Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Paris du 26 novembre 2002 est annulé. Article 3 : La requête de Mme N. est rejetée. […] ■ Organes des collectivités locales Observations La solution dégagée par le Conseil d’État est d’une grande importance pratique pour le fonctionnement interne des services départementaux et régionaux. Alors que la loi 13 ne permet aux maires de déléguer leur signature qu’à un petit nombre de hauts fonctionnaires limitativement énumérés (directeur général et directeur général adjoint des services, directeur général et directeur des services techniques), les dispositions applicables aux présidents de conseils généraux et régionaux 14 sont moins restrictives : délégation peut être donnée aux « responsables » des services du département ou de la région. Fallait-il entendre cette notion de responsables comme n’englobant que les directeurs généraux, directeurs et chefs de service, ou fallait-il lui donner une portée plus large, englobant tous les agents exerçant, au sein des services régionaux et départementaux, des responsabilités intermédiaires ? Telle était la question soumise au Conseil d’État et qui n’avait jamais été appréhendée de façon globale par sa jurisprudence. Infirmant la position restrictive adoptée par la cour administrative d’appel de Paris, l’arrêt Département des Hauts-de-Seine juge que l’article L. 32213 du code général des collectivités territoriales ne fait pas obstacle à ce que le président du conseil général ou régional délègue sa signature à des agents qui, sans avoir la qualité de directeur ou de chef de service dans l’administration départementale ou régionale, « exercent des fonctions de responsabilité au niveau territorial ou fonctionnel ». La solution, bien explicitée par les conclusions conformes du commissaire du gouvernement, repose en partie sur un précédent relatif au statut particulier de Paris, Lyon et Marseille. La loi du 31 décembre 1982 autorise les maires de ces trois villes à déléguer leur signature aux « responsables de services communaux » et cette disposition, similaire à celle qui concerne les départements et régions, avait été interprétée comme autorisant une délégation à un chef de bureau de la ville de Paris 15. La solution est, de façon plus générale, justifiée par les nécessités du fonctionnement des administrations lourdes que constituent les services de la plupart des départements et régions : limiter les délégations de signature de l’exécutif à un très petit nombre de hauts fonctionnaires aboutirait à une thrombose de ces services et à une déresponsabilisation des cadres intermédiaires. On notera que l’arrêt se garde de fixer un plancher de responsabilité susceptible de justifier une délégation de signature du président. On ne voit cependant pas de motif qui conduirait à s’écarter de la ligne adoptée pour la ville de Paris et à ne pas admettre la légalité d’une délégation donnée à un chef de bureau ou au responsable d’un service d’importance équivalente. En l’espèce, le Conseil d’État valide une délégation de signature donnée au responsable d’un service territorial de la protection maternelle et infantile. ■ 13 Article L. 2122-19 du CGCT. 14 Articles L. 3221-3 et L. 4231-3 du CGCT. 15 CE 21 décembre 2001, Soc. Parthéna, req. n° 212987. Bulletin Juridique des Collectivités Locales n° 8/05 519