Actualité - La Gazette du Palais

Transcription

Actualité - La Gazette du Palais
Ac tu a l it é
283y8
283z3
La phrase
“ 283p1
Le chiffre
Un tiers du barreau de
Paris est en dessous du SMIC,
bien en dessous du SMIC
”
Marie-Aimée Peyron, bâtonnier
désigné du barreau de Paris, dans
« L’Invité du 5/7 » sur France Inter,
le 4 janvier 2017
283y8
L’indiscret
10,5
C’est le nombre
de juges professionnels
pour 100 000 habitants
en France en 2015,
contre 10,7 en 2010
(source : Références
Statistiques Justice 2015,
janv. 2017)
283p1
283z3
Professions
Laurent Fabius parrain de la promotion 2017 de l’EFB : le bâtonnier
Sicard assume ! 283z6
L’EFB a fait sa rentrée le 3 janvier au Palais des congrès de Paris. Plus de 2 000 élèves s’apprêtent à
embrasser la profession, sous le parrainage du président du Conseil constitutionnel Laurent Fabius.
Récit.
observations de l’ordre m’est apparue conforme aux
« Nous sommes en audience, aucune manifestation
règles républicaines, explique le bâtonnier de Paris,
n’est autorisée sous peine d’annulation ! » tonne le
Frédéric Sicard, suite à l’événement. Depuis 2015, le
bâtonnier de Paris alors que surgissent quelques timides
barreau de Paris a adopté
applaudissements lorsque
une règle selon laquelle le
les membres du conseil de
costume de l’avocat ne doit
l’ordre de Paris descendent
pas exprimer de conviction
les marches de la grande
religieuse ». La rentrée de
salle du Palais des Congrès.
l’EFB est l’occasion de
Voici plusieurs années que
prendre la température de
les promotions de l’École de
la profession. Pas étonnant
formation professionnelle
donc que s’y invite en 2017
des barreaux de la cour
la polémique qui agite
d’appel de Paris (EFB)
depuis quelques mois les
sont trop nombreuses pour
avocats sur la compatibilité
le palais de Justice et que
du voile avec la robe.
leurs rentrées se déroulent
2 074 élèves-avocats ont prêté le petit serment
Celle-ci a ressurgi au niveau
donc à l’extérieur.
national
l’an
dernier
alors
qu’une avocate de Bobigny
Il est 16 heures 30, la nouvelle promotion de l’EFB
revendiquait
l’an
dernier
la
possibilité de se coiffer de la
s’apprête à prêter le petit serment : « Je jure de
toque – depuis longtemps tombée en désuétude – pour
conserver le secret de tous les faits et actes dont j’aurai
remplacer le port du foulard islamique à l’audience. La
eu connaissance en cours de formation ou de stage ».
Conférence des bâtonniers a adopté une résolution le
Une avocate membre du conseil de l’ordre fait signe
18 novembre 2016 au terme de laquelle elle a constaté
discrètement à une jeune élève de l’EFB dont le visage
« le caractère obsolète du port de la toque », et appelé
est entouré d’un voile islamique de se découvrir.
les autorités à réglementer le costume d’audience en
Celle-ci libère son cou et coiffe le tissu autour de sa
proscrivant les signes distinctifs et en précisant que les
chevelure relevée en chignon à l’arrière de son visage.
avocats se présentent tête nue (Gaz. Pal, 29 nov. 2016,
« Je l’ai repérée depuis la scène et j’ai demandé au
n° 281r0, p. 42).
moment de l’audience solennelle qu’elle le retire. La
manière dont elle l’a noué après avoir entendu les
© Philippe Cluzeau
283z6
Alors que son mandat
initial de deux ans arrive à
son terme, Stéphanie Fougou,
l’actuelle présidente de l’Association
française des juristes d’entreprise,
devrait poursuivre ses fonctions
pendant encore un an à l’issue de
l’assemblée générale du 31 janvier
2017.
G A Z E T T E D U PA L A I S - m a r d i 1 0 ja n v i e r 2 0 1 7 - N O 2
5
Les magistrats des cours d’appel réunis en formation d’audience
sur la scène
Apprendre à être bref. De l’incident du foulard, les
magistrats de la cour d’appel de Paris installés sur la
scène en formation d’audience n’ont sans doute rien vu,
noyée qu’était la jeune fille au milieu des 2 073 autres
élèves dans la salle. La procureure générale Catherine
Champrenault a pris la parole pour les féliciter de leur
réussite et leur rappeler l’importance de la déontologie.
De son côté, la Première présidente Chantal Arens les
a initiés aux sujets qui lui sont chers : l’amélioration du
dialogue entre avocats et magistrats, le développement
des modes amiables de règlement des différends et la
dématérialisation accomplie à la cour mais qui reste à
parfaire au TGI. « La valeur des écritures ne s’évalue
pas au nombre de pages », a-t-elle souligné. Un peu
plus tôt lors de la cérémonie, leurs pairs leur avaient
déjà expliqué qu’ils n’auraient souvent que quelques
minutes pour plaider. Ainsi va la justice : elle court
après le temps, la jeune génération est prévenue. Après
les discours des deux magistrates et à l’invitation de la
cour, les quelque 2 000 élèves se sont levés, ont entendu
lecture du serment et ont répondu d’une seule voix en
levant la main droite « Je le jure ». Leurs dix-huit mois
de formation à la profession d’avocat ont alors débuté.
La poignée de recalés devient brassée. Entrer dans
l’école est un challenge, en sortir une simple formalité,
dit-on. Lors de la première partie de la cérémonie, le
président délégué de l’EFB, Jean Néret les a mis en
garde avec humour : « que ceux qui ont repéré que
seule chaque année une poignée d’élèves est recalée
se méfient. La poignée devient brassée ! » Inutile
donc, a-t-il souligné, de miser sur les « techniques
de potaches » éventuellement utilisées avec succès à
l’Université. Sur le métier qu’ils s’apprêtent à exercer,
Jean Néret a résumé en une phrase le bouleversement
né des nouvelles technologies : « hier on allait voir un
avocat parce qu’il connaissait la règle, aujourd’hui pour
son analyse et son éclairage ». Son école ? Il la qualifie
d’école « de combat » car ses membres passent leur
temps à se combattre. Il ne suffit pas d’être bon, ni
même d’être le meilleur, a-t-il prévenu. Et de conclure
par cet appel à la modestie : « Aussi talentueux soit-il,
283g3
6
G A Z E T T E D U PA L A I S - m a r d i 1 0 ja n v i e r 2 0 1 7 - N O 2
l’avocat ne laisse rien derrière lui, il n’est que l’architecte
du vent ».
Mettre l’avocat à l’abri des attaques. Plus politique, le
bâtonnier de Paris Frédéric Sicard a axé son discours sur
la protection des valeurs qu’incarne l’avocat et profité
de la présence du président du Conseil constitutionnel
Laurent Fabius, parrain de la promotion, pour réclamer
sa constitutionnalisation. Précisément, ce choix a
suscité la curiosité, voire les critiques sur les réseaux
sociaux. Le bâtonnier Frédéric Sicard assume : « C’est
moi qui ai choisi comme parrain Laurent Fabius. Je
l’ai fait en raison de son engagement tout au long de sa
vie, mais aussi pour souligner que le prochain combat
sera de mettre l’avocat à l’abri des attaques législatives
et réglementaires en inscrivant dans la Constitution
la liberté d’avoir un avocat ». Laurent Fabius s’est
gardé de répondre au bâtonnier sur cette question. Il a
simplement indiqué que le rôle des avocats était appelé
à se développer devant le Conseil constitutionnel via la
QPC et que l’institution elle-même travaillait à rendre
ses décisions plus compréhensibles.
© Philippe Cluzeau
© Philippe Cluzeau
A ct u al i t é
Frédéric Sicard, Laurent Fabius et Jean Néret
Plus généralement, il a exprimé son intention d’ouvrir
l’institution sur l’extérieur – démarche largement initiée
par son prédécesseur Jean-Louis Debré – et annoncé à
ce titre l’organisation au dernier trimestre 2017 d’une
fort mystérieuse « Nuit du droit », sans préciser de
quoi il s’agissait. Aux jeunes avocats, il a dit, citant le
discours de Jean Jaurès à Albi que le bâtonnier de Paris
avait également évoqué avant lui : « Le courage, c’est
de chercher la vérité et de la dire ». Nul n’a cependant
eu le cœur de gâché la fête des élèves ce jour-là en leur
avouant le chiffre révélé par Marie-Aimée Peyron,
bâtonnière désignée de Paris le lendemain sur France
Inter : un tiers des avocats à Paris vivent en dessous du
SMIC.
Olivia Dufour
283z6