PLANCHE SUR L`HUMILITE

Transcription

PLANCHE SUR L`HUMILITE
GRAND ORIENT DE FRANCE
PUISSANCE SYMBOLIQUE SOUVERAINE
Planche du F∴
∴ José GOMEZ
« L’humilité
’humilité »
R∴ L∴ « COUPO SANTO »
OR∴ LE CANNET DES MAURES
06/05/2009
« La connaissance de soi engendre l’humilité.
l’humilité » Mère
Térésa
Regard sur l’humilité,
’humilité, sans humiliation,
humiliation sans fioriture
contre l’orgueil des reconnaissances indues.
Dire avoir de l’humilité, c’est déjà ne plus
p
être
humble car l’humilité s’observe dans le silence
gardé.
« L’humilité »
« L’humilité »
Propos liminaires
V∴ M∴ et vous Tous mes FF∴, mes propos d’aujourd’hui portent sur l’humilité,
une des valeurs essentielles cultivée en franc-maçonnerie.
Ainsi, au soir de sa dernière tenue, le Vénérable qui
descend de charge doit, suivant la tradition, assurer la
garde du Temple et passer de l’Orient à l’Occident, du
Levant au Couchant, de la lumière des projecteurs de
la scène à l’ombre des coulisses, des honneurs du
vénéralat à l’humble fonction du couvreur.
Cette rétrogradation apparente dans la hiérarchie peut
être perçue comme une épreuve pour le simple
profane, mais ne doit pas l’être pour le franc-maçon et
ce ne l’est pas pour l’homme empreint d’humilité !
Mais qu’est-ce au juste ?
Selon Confucius, « Honneurs et richesses sont ce que l’homme désire le plus au
monde, et pourtant mieux vaut y renoncer que de s’écarter de la Voie.
Humilité et pauvreté sont ce que l’homme fuit le plus au monde, et pourtant mieux
vaut les accepter que de s’écarter de la Voie.
L’adepte qui rougit d’être mal nourri ou mal vêtu ne vaut pas la peine qu’on
l’entretienne dans la Voie ».
Mais de quelle voie s’agit-il, de la loi des hommes ou de celle des dieux ?
Et si cette voie était la voix des anciens et des sages.
Et si cette fameuse voie représentait le tracé de nos rituels que nos prédécesseurs
nous ont légué.
Dans le rythme de la phrase et son découpage dichotomique, on discerne bien les
opposés honneurs à humilité et richesses à pauvreté. Ainsi est associée à
l’humilité, la pauvreté, pas celle engendrée et subie par la vie sociale mais celle
voulue comme le vœu de chasteté par exemple.
L’humilité, c’est l’état d’esprit d’une
personne consciente de ses faiblesses,
de ses insuffisances, qui se considère
sans indulgence, un être, plein de
modestie et sans prestige !
Humble tire son origine du mot
humus, la terre d’où nous sommes
issus et où nous retournerons tous
sans exception.
Il nous faut être conscient de ce que
nous sommes, de ce devenir, de notre
devenir.
Ce mot est passé directement en français pour désigner la couche superficielle du
sol, très féconde, qui accueille la semence pour lui faire porter des fruits.
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L’humus est donc cette couche de terre qui permet d’ensemencer, de cultiver et
de récolter les fruits. Symboliquement, s’agissant de l’humilité, elle
conditionnerait l’accès à la connaissance, la culture et l’élévation spéculative. Ne
retrouve-t-on pas là, la source même de nos principes. Elle permettrait également
de mieux apprécier le chemin que nous empruntons. D’ailleurs, l’origine latine de
culture est « colere » qui produit trois sens « habiter, cultiver et honorer ». On voit
bien que le sens est lié à l’activité humaine.
Confronté à une quelconque rétrogradation, le profane doit combler le vide créé
par le manque de reconnaissance, apparente, sinon à ses yeux, par sa disparition
de la hiérarchie dans laquelle il était inscrit. Le franc-maçon lui, sait qu’il est et
restera un éternel apprenti. Mais attention, avouer « être un éternel apprenti », ce
n’est pas forcément être humble, c’est ne pas vouloir perdre la face, ne pas
vouloir mettre un genou à terre.
De l’étymologie du mot
Le terme humilité, rapproché du mot humus, qui en est la source étymologique, a
donné par ailleurs le terme homme. A ce niveau, nous pourrions rechercher les
mots commençant par hum : humanité, humanisme, humilité, humble,
humiliation, humeur, humour, etc.
Cela semble signifier que l’humilité consiste, pour l’homme, à se rappeler qu’il est
poussière ou littéralement : « fait de terre », c’est-à-dire de la matière la plus
commune. Cela semble indiquer aussi que l’humilité est une attitude proprement
humaine.
Au-delà de l’image du matériau terre, humus, le
terme d’humilité renvoie en effet à l’idée d’une
provenance étrangère, d’une impuissance à être sa
propre origine ; il paraît impliquer aussi, du même
coup, l’idée d’une incapacité à s’accomplir par ses
seules forces ; en un mot, il s’agirait d’avouer qu’il
n’est rien en nous, hormis peut-être nos fautes et nos
manquements, que nous puissions nous attribuer à
nous-mêmes, à nous seuls. Or cette double
impuissance n’est pas facile à admettre ; elle semble,
à certains, incompatible avec la dignité de l’être
humain, et sa reconnaissance constituerait à leurs
yeux une intolérable humiliation.
Mais justement, est-ce une même chose d’être humble et d’être humilié ? Etre
humble, est-ce se rabaisser, se manquer de respect à soi-même ? Cela doit-il
conduire, en particulier, à accepter que les autres nous traitent comme « moins
que rien » et nous trainent « dans la boue » ?
Humilier quelqu’un consiste à nier sa dignité, ou du moins à mettre en exergue
uniquement ses défauts, ses pauvretés et ses déficiences ; concrètement, cela
revient souvent à le réduire à son animalité ou à sa dimension purement
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physique : rien de plus humiliant pour un homme, par exemple, que de voir
l’accomplissement de ses fonctions organiques privé du secret ou de l’habillage
qui l’humanisent à entendre ce qu’en disent les prisonniers concernant leur
intimité par exemple. Mais refuser cette humiliation, serait-ce manquer
d’humilité ?
Et inversement, faudrait-il refuser d’être humble pour
échapper à l’humiliation ? Non pas, si humilité et
affirmation de sa dignité sont, en vérité, compatibles,
voire indissociables. Tel est du moins le point de vue que
je m’efforce de préciser.
En effet, d’une part, l’humilité ne consiste pas à se croire
dépourvu de dignité, mais à se savoir incapable d’en être
soi-même la source, et à se reconnaître impuissant à
résoudre une situation donnée par exemple.
En qualité d’être humain, je suis bien plus qu’un peu de
boue ou d’humus, contrairement à ce que suggère
l’étymologie prise au pied de la lettre.
Mais ce que je suis de plus, je ne me le suis pas donné à moi-même ; en outre,
par mon comportement envers moi-même comme envers les autres, sans doute je
le trahis bien plus souvent que je ne l’honore. Ainsi, autant le refus de ma dignité
ne serait pas une vraie humilité mais au contraire, quelque chose qui pourrait
être de l’ordre d’une profonde ingratitude, autant l’humilité véritable se manifeste
par l’acceptation du fait que l’aide d’autrui m’est absolument indispensable.
L’aide dont j’ai besoin pour tenter de ne pas être trop indigne de ma dignité a
quelque chose d’infini et d’absolu, qui fait de son plein respect une tâche audessus de mes forces, voire des forces humaines en général. Ainsi se préciserait
la conciliation évoquée plus haut : être humble, ce n’est pas se considérer comme
sans valeur, c’est au contraire voir sa propre grandeur et se sentir petit devant
elle.
D’autre part, l’humilité ne saurait conduire à se laisser traiter comme un être
sans valeur et, a fortiori, à accepter toutes les humiliations. Nulle incompatibilité
donc entre être humble et exiger le respect. En demeurant effacé et discret, je
mets en avant ma dignité d’être humain.
L’humilité est la vertu qui s’oppose à
l’orgueil, à la suffisance et à l’arrogance.
Etre humble, c’est donc reconnaitre ses
limites et ses fragilités. L’humilité,
c’est le combat contre les certitudes
et les vérités toutes faites.
La maladie, les épreuves, les échecs
nous apprennent l’humilité. Et, face à la
montagne de la connaissance que nous
devons gravir pour approcher le sommet
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qui, paradoxalement, s’éloigne de plus en plus, parce que la connaissance n’est
pas immuable ou figée, c’est monter vers les cieux, c’est tutoyer les Dieux.
Il est vrai que l’humilité est associée au dépouillement, à la nudité et à la
pauvreté, ne dit-on pas une humble demeure s’agissant d’une masure. Selon moi,
l’humilité est faussement associée au verbe avoir, elle devrait l’être davantage au
verbe être puisqu’il s’agit d’une qualité et d’une vertu humaines.
L’humilité pensée par quelques philosophes
Etre humble, c'est accepter les
lois naturelles qu'on ne peut
contrôler et nous oblige à ne pas
tricher avec ces lois là. Utiliser à
bon escient et avec bienveillance
les diverses ressources mises à
notre disposition devient donc un
impératif moral. La conscience
d'être le dépositaire de telles
ressources éveille en nous la
fugacité de la vie, mais attention,
il ne s’agit que d’un prêt, il nous
faudra tout restituer à l’heure de
notre mort. La conscience d'être un « gardien » nous pousse à reconsidérer notre
relation avec nous-mêmes et avec le reste du monde.
Etre humble, c'est lâcher prise et laisser faire les choses.
L'humilité est donc un signe de grandeur. L'humilité rend digne de confiance et
capable de s'adapter. Devenir humble permet de grandir dans le cœur de chacun.
Une personne incarnant l'humilité s'efforcera d'écouter les autres et de les
accepter. L'humilité colore l'attitude, le regard, les paroles et les relations de celui
qui l'exerce.
Une personne humble peut effacer la colère de quelqu'un en quelques mots. Un
mot prononcé avec humilité a plus de sens que mille autres, parce qu’aux flots
des mots, le silence observé est expression plus remarquable.
Par-delà les flots des relations humaines, l'humilité est le phare qui nous montre
la voie. Pour reconnaître ses signaux, l'écran de l'esprit doit être clair. L'humilité
confère la faculté de percevoir les situations, d'identifier les obstacles ainsi que
leurs causes, et de rester donc silencieux. Exprimer une opinion avec humilité
implique un esprit ouvert, qui reconnaît ses qualités, ses forces et sa sensibilité,
ainsi que celles des autres.
L’humilité est fort recommandée dans le quatrième livre des Lois de Platon; il ne
veut point d’orgueilleux, il veut des humbles.
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Épictète en vingt endroits prêche l’humilité. « Si tu passes pour un personnage
dans l’esprit de quelques-uns, défie-toi de toi-même. Point de sourcil superbe. Ne
sois rien à tes yeux. Si tu cherches à plaire, te voilà déchu. »
Descartes, dans son Traité des passions de l’âme, met dans leur rang l’humilité
en disant d’elle : « Elle ne s’attendait pas à être regardée comme une passion. »
Il distingue l’humilité vertueuse et la vicieuse. Voici comment Descartes
raisonnait en métaphysique et en morale :
« Il n’y a rien en la générosité qui ne soit compatible avec l’humilité vertueuse ni
ailleurs qui puisse changer. »
Voici maintenant comme il parle de l’humilité vicieuse :
« Elle consiste principalement en ce qu’on se sent faible et peu résolu, et comme si
on n’avait pas l’usage entier de son libre arbitre. On ne peut s’empêcher de faire
des choses dont on sait qu’on se repentira après, ainsi elle est directement opposée
à la générosité. »
L’humilité ne pouvait pas empêcher Rameau de croire qu’il savait plus de
musique que ceux auxquels il l’enseignait; mais elle pouvait l’engager à convenir
qu’il n’était pas supérieur à Lulli dans le récitatif.
En maçonnerie
En haut, j’étais hier, en bas, je suis
aujourd’hui.
En bas, je suis maintenant, en haut, je
serais demain.
Cette hiérarchie, qui génère chez
certains des comportements exacerbés,
contre-valeurs
omnipotentes
de
l’humilité, nous fait insidieusement
dériver vers la griserie du pouvoir, cette
drogue de laquelle, lorsqu’on y a
goutté, on a du mal à se défaire ;
passer de l’ombre au soleil, quelle ivresse, mais retourner à l’ombre, quelle
punition, mais aussi quelle leçon d’humilité !
La recherche constante des honneurs et du pouvoir qui séduisent l’homme, est
dans notre nature ; elle est nécessaire pour donner un sens à notre vie profane.
Selon Marx : « ce n’est pas la conscience des hommes qui détermine leur être, mais
leur être social qui détermine leur conscience ».
Pour inverser cet état, fonctionnement classique du profane, il nous faut travailler
la pierre brute, la marteler sans répits à coups répétés de maillet sur le ciseau
afin de la transformer et d’influer sur notre raisonnement pour ouvrir grand les
yeux et distinguer le vrai du faux.
C’est notre démarche de Maître qui nous invite à être et non paraître, éternelle
lutte intérieure entre orgueil et humilité où l’orgueil prend trop souvent le pas sur
l’humilité.
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« L’humilité »
C’est notre démarche de Maître qui nous permettra de tendre vers ce but.
Nous paraissons et il nous faut être, mais pour y arriver combien d’efforts pour
vaincre cette dualité, mourir et puis renaître afin que l’orgueil cède le pas à
l’humilité. N’est-ce pas la première leçon que nous enseigne la maçonnerie,
quand, confinés dans un réduit obscur, on demande la mort du vieil homme pour
que puisse naître le nouvel initié, de l’ombre à la lumière, le chemin va être semé
d’embûches que nous devrons enjamber pour être humble et éviter l’humiliation
de la chute.
Mais qu’est ce donc que l’humilité ?
Lorsque, entre les colonnes, une fois le bandeau enlevé, on
nous enjoint de vérifier que l’assemblée ne comporte pas
d’ennemi profane alors qu’on nous avons promis peu avant,
sous le bandeau, de pardonner à nos ennemis si nous en
trouvions. Leçon première d’humilité, le culte de l’amour loin
de l’esprit revanchard qu’anime la haine.
Lorsque, entre les colonnes, une fois le bandeau enlevé, nous
retournant, on découvre notre visage dans le miroir, nous
devinons, car la compréhension viendra plus tard que nous
tenons là, la clef de l’énigme, de notre énigme.
La simple contemplation de notre image de façon complaisante, nous entraîne
comme Narcisse, à nous noyer dans l’eau de la fontaine, victime de l’illusion de
cette image, globalement satisfait de nous-mêmes. Seconde leçon d’humilité, « tu
vois la paille qui est dans l’œil de ton voisin, tu ne vois pas la poutre qui est dans le
tien », ton ennemi principal, c’est toi, il va te falloir beaucoup de travail pour
dépolir cette pierre brute.
L’homme face au miroir qui voit au-delà de son
image, se voit tel qu’il est, identique aux
autres, à égalité avec chacun, avec ses qualités
et ses défauts, il a rompu le lien qui le rendait
esclave des vices et des vertus.
Lorsque, conduits en tête de la colonne du
Nord, on nous demande une participation
alors que nous avons été dépouillés de nos
métaux, troisième leçon d’humilité, ne promet
pas ce que tu ne peux tenir, annonce ce que tu
peux réaliser pour aider tes proches.
Lorsqu’est formée la chaîne d’union, après
notre initiation et qu’on est sommé de ne pas y
entrer, un grand moment de solitude nous
envahit, très vite on est invité à intégrer cette
première chaîne d’union. Quatrième leçon d’humilité, le partage conditionne nos
actions, la fraternité, les échanges et la communication.
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« L’humilité »
Ainsi, en fin d’initiation, nous sont dévoilés les principes maçonniques majeurs,
ceux qui sous-tendent encore les valeurs de la République. L’humilité nous aide à
fraterniser par le partage, à nous libérer de nos propres jougs et à considérer
l’autre comme notre égal, notre pendant.
La vanité, l’amour de soi, tendent un voile pudique sur ce que nous sommes
vraiment. Regardons au-delà de ce simple reflet, pénétrons à l’intérieur du miroir,
acceptons de voir la réalité de notre âme, de ce que nous sommes réellement.
Ce n’est pas simple, il est vrai, de se débarrasser de son ego, et l’interprétation
duale du drame du légendaire Narcisse nous apprend aussi que celui-ci serait
mort, désespéré de ne pouvoir saisir cet autre lui-même.
Plus tard, Freud et Lacan vont soutenir la thèse du stade du miroir chez l’enfant
qui, dès ses premiers jours, ne se distingue pas de sa mère, sa mère c’est lui. Le
cordon ombilical symbolique ne sera coupé que lorsqu’il sera en âge de faire la
différence entre les autres et lui.
En outre, c’est le miroir qui sera l’outil de
cette différenciation comme jadis le reflet
dans l’eau. Difficile de concevoir que ce
que nous voyons, c’est nous, certes à
l’envers alors que les autres nous voient à
l’endroit. Et cet envers, ne serait-il pas,
au fond, le fond de nous-mêmes, notre
personnalité
réelle,
humaine,
insaisissable à l’état brut. Ce n’est que
par le travail sur soi, non réalisé par
Narcisse, qui nous conduira à nous
connaître nous-mêmes et à faire ce fameux travail de polissage car, à quoi bon se
connaître, si l’on ne va pas au-delà de la simple image du miroir, du simple
reflet… N’a-t-on pas besoin des autres, qui sont nos miroirs, pour construire en
toute humilité notre réalité ? On perd cette humilité dès qu’on pense pouvoir se
dispenser du regard de l’autre. C’est peut-être à ce moment précis qu’on a besoin
de se ressourcer en soi-même, de rouvrir cette porte rarement ouverte après
l’initiation, celle du cabinet de réflexion.
C’est lorsque nous aurons effectué ce chemin que nous pourrons connaître notre
juste place dans l’univers. Et, symboliquement, notre place dans cet antre qu’est
le Temple, représente cet espace que nous partageons en toute humilité avant de
rejoindre l’humidité de la salle où nous partagerons les nourritures terrestres
après avoir partagé les savoirs, nourritures spirituelles et intellectuelles.
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« L’humilité »
Conclusion
L’altruisme
c’est
désirer
authentiquement pour autrui ce que
l'on veut pour soi-même, c’est réaliser
cela en reconnaissant humblement ses
limites, sans toutefois les exagérer,
c’est rejeter tout asservissement et
manipulation,
c’est
refuser
d'exercer ou de subir toute
domination, c’est tout simplement
l’estime de soi.
Trop
souvent,
l'enthousiasme
altruiste cède la place aux appétits d'influence. Récupérée et policée,
psychologique autant que physique, ainsi revient la violence. On voit bien que
sortir ou faire sortir chaque personne, chaque être vivant, de l'humiliation,
c’est faire preuve d’humilité.
Ne plus rester objet, mais naître, voire ressusciter en tant que sujet et susciter ou
re-susciter le « je » et le « tu » dans les dialogues et les relations, relations
« unifiantes » mais non fusionnelles, qui font tomber murs, clôtures, frontières,
séparations, pour que s'harmonisent et s'embellissent les différences réciproques.
Unir sans confondre et distinguer sans séparer.
Démonter, déconstruire, dé-modéliser des idoles et des idées préconçues, c'est
œuvre de dignité et d'humilité ; ou, si l'on veut, de justice et de vérité.
Discours, belles paroles... Pouvons-nous espérer, en toute humilité, dire,
transmettre, écouter, ou bien lire et écrire quelque parole libérée du
discours ?
Ce qui importe avant tout, c'est le message, plus que la forme, et je ne veux pas
me laisser aller au verbiage et au remplissage.
Dans ce contexte, révolte et respect forment mes perspectives.
Car méditation et action, distanciation critique et
engagement, toutes différentes et complémentaires
qu'elles sont, n'ont que faire de l'ostentation, elles
ne s'épanouissent vraiment que dans la discrétion.
Si j'essaie de m'exprimer humblement, je
tiens surtout à communiquer humainement.
Loin de se contredire, de s'annihiler l'un l'autre,
RÉVOLTE et RESPECT devront s'harmoniser, mieux
mutuellement.
encore
se
fortifier
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« L’humilité »
Silences du taciturne, discours du beau parleur sont, me semble-t-il, des
parodies de l'humilité.
Et pour quelles raisons d’ailleurs taciturne ou beau
parleur, encore des liaisons dangereuses et iniques, en
ce sens qu’on associe la parole à la beauté et le silence à
la laideur.
Comment vivre heureux personnellement et en fraternité,
comment survivre en tant qu'humanité et en tant que
vivants, comment respecter soi-même, autrui, notre mère
la terre, comment lutter contre les violences, les
ignorances, les injustices et les parjures... sans sobriété
volontaire ?
Comment acquérir et transmettre le savoir sans de
radicales remises en question, sans courageuse
persévérance, sans soif de liberté, sans désir de
changement ?
Pour fuir la réalité, pour nous créer une personnalité ou une identité, nous,
paradoxaux humains, oublions trop souvent notre dignité et nos limites. Nous
nous réfugions dans le rêve, nous nous blottissons dans les bras de la foule parce
que l’inconnu est étrange et fait peur, parce que épouser les idées d’autrui n’est
pas se singulariser et n’oblige pas à faire l’effort de penser par soi-même. Bientôt,
notre cercle sera un des derniers remparts des réflexions sur l’humanité.
Tous les jours, nous abandonnons ou pervertissons notre rationalité pour ne
retenir de notre animalité que la loi du plus fort, le marquage et les disputes de
territoires, la constitution des hiérarchies, la distinction entre dominants et
dominés. Quand est-ce que cela cessera ! Jamais puisque la nature humaine est
ainsi faite. Qui plus est, conduite par l’argent et la possession !
Et pourtant sobriété, connaissance, respect, fraternité, liberté... Pas
d'esclaves, pas de chefs absolus, pas de frontières, pas de censure, ... c’est
quand même plus simple…
... voilà ce à quoi aspire la noble humilité, voilà ce à quoi j’aspire en qualité de
franc-maçon.
J’ai dit
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