Le Conseil d`Etat valide le bricolage dominical

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Le Conseil d`Etat valide le bricolage dominical
Le Conseil d’Etat valide le bricolage dominical
Source : Libération_24 février 2015
DÉCRYPTAGE
Les bricoleurs du dimanche pourront désormais se procurer vis et perceuses ce jour-là. Mais
à quel prix ? Le Conseil d’Etat a en effet validé mardi l’ouverture le dimanche des magasins
de bricolage, autorisée par décrets. Alors que le projet de loi Macron comporte un volet sur
les ouvertures dominicales, on pourrait minimiser cette décision. Ses implications sur un
sujet très politique sont pourtant capitales.
Rappel des faits
Pour satisfaire les magasins de bricolage, qui hurlaient à la distorsion de concurrence
(l’ameublement bénéficie d’une dérogation permanente le dimanche depuis 2008), et
enrayer les nombreux contentieux, le gouvernement a publié un premier décret
le 31 décembre, suspendu par un juge du Conseil d’Etat, puis un deuxième, à peine modifié,
le 7 mars. Les deux textes ont été attaqués par les syndicats du commerce (CGT, FO, SUD et
le Seci-Unsa). Recours rejetés définitivement mardi.
Bricoler : un «besoin» ?
Le Conseil d’Etat juge que «l’ouverture dominicale d’une catégorie d’établissement est
"nécessaire" à la satisfaction des besoins du public» dès lors «qu’ils permettent la réalisation
d’activités de loisir correspondant à la vocation du dimanche, jour traditionnel de repos». Il
glisse ainsi du besoin essentiel au besoin du public. «Il donne un signal favorable au travail
dominical en assouplissant la notion de besoin du public pour une dérogation
permanente, dit Cédric Uzan-Sarano, avocat des syndicats. Sans avoir besoin de légiférer,
l’autorité réglementaire peut demain rajouter la vente de produits culturels ou sportifs.»
Des vannes ouvertes
C’est une victoire pour les grosses enseignes, surtout en Ile-de-France. «Le conseil d’Etat
banalise la notion de besoin du public sans l’avoir contrôlée», estime Vincent Lecourt, qui a
introduit un recours au nom de FO devant l’OIT. En attendant, l’arrêt du Conseil d’Etat peut
permettre au gouvernement de s’affranchir de la loi Macron sur le travail du dimanche,
toute demande de dérogation s’avérant désormais légitime. Quant aux salariés, les décrets
les ont oubliés dans l’histoire, ne prévoyant ni contreparties ni volontariat à leur emploi
dominical
Frédérique ROUSSEL