Léonard Gianadda - Médiathèque Valais
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Léonard Gianadda - Médiathèque Valais
Médiathèque Valais St-Maurice Vendredi 29 janvier 12.30-13.30 Léonard Gianadda A la rencontre de Léonard Gianadda… « Homme d’action plus que de réflexion, aux apparences bien souvent rugueuses et n’échappant pas toujours aux tentations de l’autoritarisme, Léonard Gianadda a pour lui la séduction de la puissance mais aussi, bien plus, bien mieux que cela, une générosité naturelle, la volonté de partager ses enthousiasmes, une véritable âme de démocrate sous des dehors de prince florentin. Ce qu’il a apporté à son pays est inestimable; je ne parle pas ici de notoriété, mais d’invitation au voyage, d’éveil à la Beauté. Pour tout cela il faut lui dire non pas bravo, mais merci!» Revue musicale de Suisse Romande, 2003 Biographie Léonard Gianadda naît le 23 août 1935, à Martigny. Des origines italiennes… A la fin du siècle passé, son grand-père quitte le Piémont pour le Valais. D’abord maçon il devient entrepreneur. « Mes origines italiennes, le caractère italien qui me reste, et dont je suis fier, ont joué un rôle… » « Mon grand père est parti de son Piémont natal à l’âge de treize ans en 1886, et il a fait le voyage à pied pour deux raisons : tout simplement parce que le tunnel du Simplon n’était pas percé, et si le tunnel avait été percé, il n’aurait pas eu l’argent pour prendre le train. Donc il arrive à treize ans en Suisse et ne parle pas le français. Il sait à peine lire et écrire. Il fait le « botche », c’est-à-dire le manœuvre. Il disait qu’il avait le soir les épaules en sang à force de porter les pierres sur les échafaudages. Et il suit des cours du soir, il apprend à dessiner, à lire et à écrire. Son fils (mon père) est né en 1906. » Des études classiques… 1946, il entre au Collège de l’Abbaye. « A onze ans, mes parents m’ont mis à l’internat de Saint-Maurice, au collège. C’était la mode à l’époque, mais j’ai gardé un souvenir triste de l’internat, de ne pouvoir rentrer à la maison qu’une fois par trimestre. Etre ainsi enfermé un mois et demi, c’est quelque chose ! Les premières années je pleurais tout le temps, je me rappelle que j’allais m’asseoir sur un mur à la sortie du tunnel du chemin de fer à St-Maurice, et je pleurais en regardant passer les trains. Je me rappelle d’avoir vu passer trois fois mon père en voiture sur la route sous le collège. » 1947, Léonard Gianadda a 12 ans. Son maître principal, le chanoine Amédée Allimann, écrit à ses parents… er «Réjouissant progrès : Léonard obtient le 1 rang. Félicitations… Les talents dont Dieu l’a doté exigent de lui un travail proportionné. En conséquence, il n’a pas le droit de faire ses études d’une façon légère et quelconque, mais au contraire avec le plus de perfection possible… Il peut et doit faire de sa vie quelque chose de grand et de beau. » A 15 ans, il découvre les arts… «Je me souviens d’un voyage extraordinaire que j’ai fait à l’âge de quinze ans en 1950… Ma mère nous embarque à Rome, c’était l’Année sainte. On s’arrête à Florence. Je découvre des choses que j’ignorais tout à fait : Michel-Ange, le Palazzo Vecchio, des sculptures. Ensuite, à Rome, la Chapelle Sixtine, les musées, les églises et finalement Naples. J’ignorais que ces choses puissent exister. Tout cela m’a beaucoup marqué, j’imagine…. J’ai refait le voyage l’année suivante, à seize ans ; là, j’ai rencontré un Américain dans un musée, et je l’ai invité à venir à Martigny. Il avait une dizaine d’années de plus que moi. Il travaillait au musée de l’université de Philadelphie en Pennsylvanie. Il jouait du piano. Il est venu à Martigny … Il m’a payé le voyage en bateau. Je suis resté quatre mois aux Etats-Unis. Je suis allé chez des oncles, des tantes, des cousins, des cousines. Parce que la famille de mon grand-père et de ma grand-mère avait émigré partout, y compris aux Etats-Unis, à Détroit et à New-York … » Des études d’ingénieur et parallèlement un travail de journaliste… Après une maturité classique, il entreprend des études scientifiques à l’EPFL où il obtient en 1961, son diplôme d’ingénieur en génie civil. « Ce n’était peut-être pas la voie normale, faire des études techniques après un collège classique, mais je ne savais pas que choisir ; j’ai hésité entre ingénieur, géologue, dentiste et même curé. Alors j’ai presque fait pile ou face et j’ai choisi l’Ecole d’ingénieurs à Lausanne. Parallèlement, je travaillais comme journaliste… En revenant des Etats-Unis, on m’a demandé d’écrire ce que j’avais vu. C’est ainsi que j’ai commencé à faire du journalisme, avec des photos. Dans la presse locale d’abord, puis dans la presse romande. J’étais correspondant de l’Illustré, de Pour Tous et de la Radio, j’ai connu des gens comme CharlesHenri Favrod. Plus tard, je lui ai demandé de faire une exposition sur Henri Cartier-Bresson, notamment. Un jour, je reçois un coup de téléphone de Claude Schubiger, le rédacteur en chef de Radio-je-voistout, qui me dit : -Ecoutez, vous ne voulez pas devenir cameraman à la Télévision Suisse Romande ?... Je suis rentré en Valais avec une caméra Bell-Howell, et c’est ainsi que pendant une année je suis devenu le correspondant de l’émission Carrefour. Premier correspondant de la TSR en Valais. Que reste-t-il de tout cela ? Peu de choses, presque rien… une série de négatifs. » La même année, il épouse Anette Pavid. Deux enfants naissent de cette union. A l’origine de la Fondation, un drame… « Au départ de la Fondation, il y a eu l’accident de mon frère. C’est vrai. Mais en quatre ans, j’avais vécu trois drames. J’ai perdu mon père en 1973. J’étais avec lui dans son bureau, et trois heures après, il mourait d’une attaque. Ses quatre enfants étaient près de lui. L’année suivante, ma mère va au cimetière sur la tombe de son mari, de mon père, et en rentrant elle se fait faucher par le train. Sa voiture est écrasée par un train et elle est tuée sur le coup. Et trois ans après, c’est l’accident de mon frère Pierre. En me remémorant toutes ces tragédies, je pense quand même que l’accident de Pierre a été le catalyseur qui m’a poussé à prendre cette décision. » « C’était en 1976. J’avais 41 ans. Je voulais construire un immeuble locatif, une tour, sur un terrain que je venais d’acquérir. En faisant les fouilles sur cet emplacement, les archéologues ont découvert les vestiges d’un temple gallo-romain. Ce n’était pas le Parthénon, ce n’était pas très spectaculaire. Mais j’ai trouvé que c’était quand même intéressant. Et pourtant, j’ai reçu la permission de l’Etat du Valais de construire cet immeuble, ce qui sous-entendait le permis de les démolir. C’est alors que mon frère Pierre, qui avait 38 ans à l’époque, a eu un accident d’avion au retour d’une expédition en Egypte… Une semaine plus tard, il décédait des suites de ses brûlures. J’ai immédiatement décidé de créer une fondation qui porte son nom en lieu et place de la construction de l’immeuble. » 19 novembre 1978, inauguration de la Fondation Pierre Gianadda « Le 24 juillet 1976, mon frère Pierre était victime d’un terrible accident d’avion à Bari, en Italie. En voulant porter secours à ses camarades, il fut atrocement brûlé et malgré tous les soins prodigués, Pierre décédait quelques jours plus tard, le 31 juillet, à l’hôpital de Zürich, où nous l’avions fait transporter. Mon frère n’avait pas 38 ans. J’étais très proche de lui et sa mort m’a bouleversé. Pour perpétuer son souvenir, j’ai décidé de créer la Fondation Pierre Gianadda.» Livre d’Or de la Fondation « …Je puis vous assurer que la Fondation ouvrira largement ses portes à tous ceux qui désirent y organiser des manifestations culturelles en les favorisant dans la mesure de ses moyens… Je l’offre à cette ville de Martigny que j’aime, cette ville qui a accueilli ma famille, il y a trois générations seulement. Je vous l’offre également à vous tous de tout mon cœur et vous remercie de l’accepter. » Discours d’inauguration de la Fondation Pierre Gianadda Aujourd’hui, la Fondation Pierre Gianadda… «Je ne voulais pas d’un musée écrasant, intimidant, dictant ce qu’il faut admirer, mais bien d’un lieu convivial, vivant, qui permette la véritable rencontre avec l’œuvre, loin de toute sacralisation trompeuse. » Discours prononcé par Léonard Gianadda lors de sa réception à l’Académie des Beaux-Arts, le 4 juin 2003 Une Fondation, de l’Antiquité à nos jours… « Je marche dans l’Antiquité la plus reculée. Je veux relier le passé au présent, reprendre le souvenir, juger et arriver à compléter.» Auguste Rodin « J’ai l’impression qu’une correspondance va s’établir entre mes tableaux et les vestiges romains découverts à Martigny. » Paul Delvaux « Erigée à la mémoire du frère disparu, elle repose sur le postulat que « l’art est précieux pour tout le monde ». A côté de la préservation des vestiges découverts et de la présentation des objets mis au jour un siècle auparavant, Léonard Gianadda mise résolument sur les animations temporaires. Parallèlement aux expositions, Léonard Gianadda privilégie d’abord la musique. Puis, progressivement, il étend les domaines d’activité de la Fondation : il installe le Musée de l’automobile, investit les jardins avec un parc de sculptures, accueille des collections permanentes en dépôt ou en don, rénove le Vieil Arsenal pour d’autres expositions temporaires. En 1994, il s’engage à offrir à la ville de Martigny une série de sculptures monumentales d’artistes suisses contemporains pour qu’elle les place au centre des ronds-points. Des projets communs avec la Médiathèque Valais-Martigny : Chaplin en Suisse (Yves Debraine, 1998) ; L’épopée des barrages (1999), Picasso (David Douglas Duncan 2001), Au fil du temps (2001), Luigi le Berger (Marcel Imsand 2004), L’Egypte (Monique Jacot, 2008) Dépôt à la Médiathèque de la bibliothèque d’art de Léonard Gianadda » J.-H. Papilloud, Léonard Gianadda, D’une image à l’autre, Catalogue de l’exposition de la Médiathèque Valais-Martigny, 14 juin-7 novembre 2008 Entre autres distinctions… Chevalier puis officier de la Légion d’honneur, Commandatore de la République italienne, chevalier de l’Ordre national du Mérite de la République française, membre de l’Académie des beaux-arts… …il est également membre de nombre de conseils de Fondation ou d’administration (I Solisti Veniti, Bibliothèque d’Art et d’archéologie à Paris, Fonds Jacques Doucet, Musée Rodin, Musée ToulouseLautrex à Albi, Fondation Hans Erni à Lucerne, Fondation Balthus, Fondation Henri Cartier-Bresson à Paris) et membre de la Commission des acquisitions du musée d’Orsay.