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Dialogues 16 Des lecteurs inquiets Médiatrice Véronique Maurus C ’est dans l’adversité qu’on reconnaît ses amis. Le Monde traverse sans doute la plus grave crise de son histoire depuis celle de 1951 – une crise elle aussi politique, qui avait suivi la tentative de prise de pouvoir d’un parti (le MRP) dans le journal. Aujourd’hui comme hier, les lecteurs sont là, fidèles et inquiets, qui nous soutiennent et nous disent massivement : courage ! « Tenez ! tenez, tenez, écrit Joseph Martin (Compiègne). “Notre” journal est bien, notre journal est bon, notre journal est libre. (…) Nous avons tous besoin des éditoriaux, des analyses, des chroniques, de l’ensemble des informations traitées avec intelligence et concision… ne nous lâchez pas. » Des messages par dizaines, parfois très argumentés, parfois, au contraire, limités à quelques mots, « Tenez bon ! », « Gar- Au courrier des lecteurs Avec une majuscule Les avertissements d’Eric Fottorino à la « une » du Monde me convainquent de la fragilité économique des supports écrits et de la précarité du métier de scribe. Je sais que lire un texte ouvragé de Régis Debray, sourire au dessin de Pessin et au billet de Robert Solé, s’informer de la sortie DVD d’un film méconnu d’Alain Resnais, constituent une grâce du ciel, un privilège menacé dans un monde – le grand, avec une minuscule – constellé d’étoiles aussi criardes qu’éphémères. La lecture quotidienne du Monde, acheté au kiosque du coin, est un acte de foi, une manière rituelle de vérifier à chaque fois la permanence du talent, la pérennité d’un style de journalisme, respectueux des beautés de la langue française. De tout cœur, je souhaite que Le Monde sorte par le haut de l’impasse actuelle, qu’il conserve sa liberté de regard, son souci d’instruire, ses exigences d’écriture. (…) Christian de Maussion Paris Administrateur judiciaire Très anciens lecteurs du Monde et très modestes actionnaires de notre quotidien du soir (…), nous soutenons entièrement la position d’Eric Fottorino de ne pas permettre l’arrivée d’un administrateur judiciaire au journal après l’éventuelle saisine du tribunal de commerce et de refuser une recapitalisation hâtive du groupe qui entraîneraient la perte d’identité et d’indépendance du Monde auxquelles, nous som- dons malgré tout le moral », écrits au dos d’une carte, ou au bas d’un courrier traitant un tout autre sujet : « Au fait, courage pour votre survie. La libre expression est une richesse. La PQN a besoin du Monde – même s’il m’irrite parfois », conclut Nicolas Wszolek (courriel), après avoir étrillé le « style péremptoire » de notre « ligne éditoriale ». Nos correspondants réguliers, même les plus sévères, rappellent leur attachement, comme Jean-François Hagnéré (Creutzwald) – « Nous comptons encore sur vous » –, Lucien Chich (Francheville) – « Juridiquement et moralement, vous incarnez la légitimité » –, ou encore Grégoire Milopoulos (Paris) : « Nous avons besoin peut-être plus que jamais d’une presse “au maximum” indépendante des pouvoirs politiques et financiers, note ce dernier. Cela n’empêche pas d’émettre parfois des critiques ou des réserves, mais “qui aime bien, châtie bien”. » Beaucoup d’autres écrivent pour la première fois, jeunes ou vieux, abonnés ou non, des plus modestes aux plus prestigieux ; des universitaires, des hauts fonctionnaires, des avocats, des gestionnaires mes certains, la majorité de vos lecteurs sont très attachés. La nomination d’Eric Fottorino comme président du directoire ne pourrait que faciliter la suite des négociations nécessaires pour assurer la pérennité du journal dans les meilleures conditions possibles. Gérard et Anne-Marie de Lespinois Lyon Frappé de dépendance Je lis avec beaucoup d’émotion les propos d’Eric Fottorino sur la situation du journal. Je n’ai bien sûr aucune compétence pour préconiser telle ou telle solution. Je veux simplement manifester mon attachement au journal : lecteur régulier depuis plus de quarante ans (…) ; attaché à (et par) la qualité et l’universalité des informations et des analyses dans les différents feuillets qu’il propose ; attentif à l’impartialité et au respect des opinions dont il fait preuve chaque jour ; soucieux de sa réelle indépendance (notamment en ces temps où cette vertu semble insidieusement menacée) ; en quelque sorte je me sens, devant la menace, frappé de la dépendance où je suis devant cette lecture quotidienne, à la fois dans la version papier ou dans les différents apports par Internet ; ce serait pour moi non seulement une grande tristesse, mais aussi la certitude d’un appauvrissement de mon information. (…) René La Borderie Château-la-Ronde (Gironde) Choc La lecture de votre billet en première page du Monde daté 6-7 janvier ne m’a pas seulement inquiété et ému, elle provoque en moi un véritable choc dont les ondes remontent à quelque cinquante années en arrière, c’est-à-dire à l’époque Le salon Masters & Mastères Spécialisés w w w . s a l o n d e s m a s t e r s . c o m 0123 Dimanche 13 - Lundi 14 janvier 2008 comme Hervé Dupont-Nivet (Strasbourg), ou encore Xavier Martin (SaintCloud), lequel nous « encourage » dans nos efforts « visant à rester un des journaux les plus respectés du monde ». U n courrier chargé d’émotion, d’attachement, de gentillesse, très exceptionnel sur le fond comme sur la forme. « Je suis étudiante en 3e année de licence de droit et je suis abonnée au Monde depuis le mois d’octobre, écrit Annabelle Graffard (Le Mans). Je trouverais très dommage que le journal disparaisse. Nous n’en sommes pas là, certes. Vous faites un travail extraordinaire, ce journal est un bijou de culture, de liberté d’expression et de savoir. Alors, à défaut d’un investissement, je tiens à vous apporter mon soutien. » « Ce journal fut celui de mes parents, je le lisais dans ma jeunesse, j’ai continué à le lire pour la valeur de ses articles de fond. Il faut plus que jamais trouver les moyens de garder une presse écrite libre et de qualité. N’y a-t-il pas de mécènes désintéressés ? Que peuvent faire les lecteurs ? », demande Annie Maurens (Ayguesvives). « Je ne gagne que 1 000 euros par mois et je n’ai donc pas les moyens de devenir actionnaire du Monde. Je ne peux dire qu’une chose : “Faites que Le Monde puisse vivre !” Sinon quoi lire de sérieux, pluraliste, fiable et densément documenté ? », s’interroge Colette Georges (courriel). Très peu de notes grinçantes dans ce concert réconfortant – seulement quatre où Claude Julien (…) vint demander au jeune avocat que j’étais d’étudier avec lui un projet « révolutionnaire » qui consisterait à faire entrer dans la Société du Monde une société regroupant les journalistes ! (…) Au long des mois, cette première ébauche, dont je suis fier, devint finalement la première « société de rédacteurs » d’un quotidien français, après que le « patron », « Monsieur » Beuve-Méry eut enfin donné son accord, tout en fronçant un peu les sourcils ! Depuis cette époque, je n’ai cessé de suivre avec passion les « difficultés » qui ont jalonné l’histoire du Monde. (…) Au regard de ces décennies souvent mouvementées, je tiens donc, Monsieur le Directeur, à vous apporter mon approbation : oui Le Monde doit rester un journal de « journalistes ». (…) Tout autre statut, qu’il soit conventionnel ou juridique, défigurerait son image et trahirait sa vocation. Il faut à tout prix écarter la menace de la désignation d’un administrateur judiciaire. Ici, c’est mon expérience professionnelle auprès des tribunaux de commerce qui vous confirme combien vous avez raison de tout mettre en œuvre pour éviter un tel danger ! (…) Jean Talandier Paris Combat vital Fidèle lecteur du Monde depuis l’âge de 18 ans (j’en ai 70), je vous soutiens dans ce combat vital, pour notre journal. Vos sociétés internes ne doivent pas jouer les kamikazes. Cela étant, il conviendrait, dans vos projets de relance, de faire du Monde un quotidien du matin, enfin ! Pensez au potentiel de la province. Je vous donne un exemple de l’absurdité de votre situation. Mardi 8 janvier, Sarkozy fait sa conférence de presse qui se termine à midi. Le lendemain, mercre- courriels sur le thème « Bien fait pour vous ! ». Certains, même, qui nous avaient abandonnés par agacement ou lassitude, reviennent pour l’occasion et s’en expliquent : « La frustration d’un retrait volontaire ne laissait pas de m’affecter d’un malaise diffus, comme peut en éprouver le navigateur de la disparition d’un de ses amers », avoue Serge Pasquer (Saint-Christophe-sur-Brionnais), qui, poursuivant la métaphore maritime, ajoute : « Que Le Monde demeure la vigie de l’esprit et de la dignité des politiques. » Tous expriment le même souci, presque obsessionnel : la liberté et son corollaire, l’indépendance. Valeur première du Monde, « si importante pour la sauvegarde de notre démocratie », précise Suzanne Ruflin (Saint-Secondin, 86350). « Courage, continuez ; par votre combat, vous contribuez à maintenir un espace de liberté de conscience qui ne peut exister qu’à travers la liberté d’expression », ajoute Robert Fargeas (Paris). En fallait-il la preuve ? Ces messages l’apportent : l’indépendance n’est pas une coquetterie de journaliste, elle est consubstantielle à l’identité du Monde, et l’écorner serait non seulement préjudiciable à l’image du titre, mais aussi fort coûteux en termes commerciaux. Les lecteurs sont conscients du danger, à défaut d’en saisir toujours la cause, qu’ils attribuent – à tort – à des difficultés de trésorerie. Beaucoup redoutent, comme Michel Gervais (Paris), « la nomidi matin, scène chez mon marchand de journaux à Cannes : « Plus de Figaro, plus de Parisien, plus de Libé. » En revanche, Le Monde reste invendu en nombre, et pour cause. Il faudra attendre jeudi matin (soit 48 heures après) pour lire les commentaires de « mon quotidien ». (…) Lorsque je lis que Bush se rendra en Israël, Nice Matin commente déjà la visite. (…) Bon courage dans ce combat qui n’est pas gagné d’avance. Victor Lévy-Perrault Courriel Gouvernance ? En première page, Eric Fottorino, directeur du Monde, nous informe que « Le Monde traverse une crise de gouvernance ». Du temps d’Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal, comment s’appelait « la gouvernance du Monde » ? Détails et invitation gratuite sur : www.salondesmasters.com Tant il est vrai qu’on n’arrête pas le progrès. De l’américanisation du monde… Louis Lanoix Dieppe (Seine-Maritime) Soyez offensifs Gens du Monde, tous mes souhaits pour la pérennité de votre quotidien dont je retrouve avec plaisir un souffle certain ; souffle qui gagne à n’être pas trop volumineux comme c’est le cas pendant les fêtes (…) ; qui ne perdrait rien en évitant des légendes inexactes comme celle parue dans vos éditions datées 3 janvier à propos des laboratoires pharmaceutiques (…). Offensifs, soyez offensifs et surtout rappelezvous, c’est une équipe qui gagne et les égotistes qui s’égosillent dans le vide. Jacques Bouvier Ernée (Mayenne) Girardot. Contrairement à ce que nous avons écrit dans le portrait « Hippolyte Girardot, le retour du jeune premier » (Le Monde du jeudi 3 janvier), l’acteur n’a pas trois enfants, mais quatre. « Punir : le casse-tête parental » (Le Monde du 9 janvier), ce ne sont pas 12 pays du Conseil de l’Europe qui ont interdit le châtiment corporel des enfants mais 18. Conseillers de l’Elysée. L’histo- La Pérouse. Nous avons situé l’île de rien Patrick Weil dément avoir pris l’initiative de rencontrer Emmanuelle Mignon, alors directrice des études de l’UMP, en 2004, comme cette dernière l’a affirmé dans un entretien au site nonfiction.fr (Le Monde du 10 janvier). Il affirme au contraire que c’est elle qui l’a approché. Par ailleurs, Claude Guéant n’est pas directeur de cabinet, mais secrétaire général de l’Elysée. Vanikoro, où François de Lapérouse fit naufrage en 1788, aux Nouvelles-Hébrides (aujourd’hui Vanuatu) alors qu’elle fait partie des îles Salomon (Le Monde du 7 décembre 2007). Education. Contrairement à ce que nous avons écrit dans l’article intitulé 4e édition Vous êtes élève d’une Grande École ou Universitaire, venez découvrir les meilleurs Mastères Spécialisés (MS), Masters professionnels (DESS), Masters recherche (DEA). L es organes et structures créés à l’issue de la Libération sont à bout de souffle, malgré de nombreux raccommodages, analysent Claude et France Draillard (Paris) : « La solution de facilité de “repavement” par les grands groupes financiers détruit les équilibres, pour Le Monde comme pour bien d’autres structures. Il convient ici et ailleurs de trouver un juste milieu, pour Le Monde, sans doute par une grande souscription nationale et/ou le soutien d’une fondation indépendante. » « Je sais que nous avons été nombreux, il y a quelque temps, à acheter deux exemplaires du Monde chaque jour, pour qu’une contribution individuelle participe à un effort collectif. Le deuxième exemplaire, nous le laissions le lendemain dans les lieux publics pour gagner d’autres lecteurs… », rappelle Arthur de Oliveira (courriel). A tous, un grand merci, et toutes nos excuses à ceux que, faute de place, nous n’avons pu citer ici. a RECTIFICATIFS ET PRÉCISIONS 31 Janvier Palais Brongniart - Place de la Bourse - Paris 2e - Métro Bourse - 10h à 19h nation d’un administrateur judiciaire, nomination qui compromettrait gravement l’indépendance du journal ». La plupart proposent leur aide, sans savoir comment la manifester concrètement. Quelques-uns, pourtant, font des suggestions : « Rester à 20 ou 24 pages chaque jour soulagerait-il la trésorerie ? Si oui, n’hésitez pas ! », remarque le docteur Jean-Louis Roy (Dijon). Clinton. C’est en 1992 et non en 2000 comme nous l’avons écrit par erreur dans notre édition du 10 décembre 2007 que Bill Clinton a perdu le caucus de l’Iowa avant de remporter les primaires démocrates suivantes, gagnant ainsi le surnom de « comeback kid ».