Le patrimoine culturel pris pour cible : quelle évolution de la justice
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Le patrimoine culturel pris pour cible : quelle évolution de la justice
Le patrimoine culturel pris pour cible : quelle évolution de la justice pénale internationale ? par M. Vincent Négri Dominique Misigaro : Merci beaucoup. De la même façon que pour la première intervention, si vous avez d'autres questions qui vous viennent à l'esprit, n'hésitez pas à la fin de la table-ronde de les soumettre à nos intervenants. Nous allons passer à la troisième intervention en remerciant encore une fois Laurence Lepetit. On a donc parlé de protection du patrimoine par des cas d'évacuation des œuvres, par éventuellement l'aide que peuvent apporter les médias sociaux. On va se tourner maintenant vers les droit en essayant de voir ce que le droit peut faire, ce que la justice pénale internationale peut faire dans le domaine de la protection du patrimoine. Pour cela, nous avons Vincent Négri avec nous. Vincent Négri est chercheur au CNRS. Il est également membre du groupe de recherche internationale sur le droit du patrimoine culturel et le droit de l'art, et expert auprès de l'Unesco, ce qui nous permettra également d'avoir cette vision d'un organisme international. Il a écrit un certain nombre d'ouvrages sur les notions de droit et de droit du patrimoine. Peut-être qu'il vous en parlera, je ne sais pas... Et peut-être qu'il y en a d'autres en préparation. Voilà. Je vais le laisser intervenir. Vincent Négri : Merci beaucoup. Donc il me revient de clore cette matinée par un sujet un peu aride peutêtre parce qu'on va quitter les questions précédentes qui étaient plus philosophiques ou plus doctrinales, pour aborder la question du droit qui n'est pas forcément, vous allez le voir, je dirais qui est peut-être un peu plus dense ou plus aride. Mais bon je vais essayer... Donc en plus en fin de matinée, il me revient de vous maintenir en attention dans cette période (rires) pré-apéritive ou apéritive. Donc je vais m'y employer. La justice pénale internationale est un sujet un peu compliqué. Donc déjà je vais aborder deux blocs distincts : d'une part, il y a des conventions (M. Bouchenaki en a parlé ce matin), des conventions internationales qui interviennent dans cette matière-là. La convention-clef, la convention-phare est celle par l'Unesco en 1954 qui assure une protection de certains biens culturels - on verra, pas de tous - en cas de conflits armés. Et puis il y a par ailleurs des institutions judiciaires avec notamment des institutions judiciaires internationales. Et comment se noue ce dialogue entre d'une part des conventions internationales qui posent des principes à portée universelle et puis par moment où les choses se figent où l'affaire arrive devant un tribunal qui a à statuer sur un cas précis ? Comment finalement ce cas précis est-il appréhendé, est-il jugé au regard des principes internationaux qui assurent la protection du patrimoine culturel ? Et puis le droit a pour principe de procéder par qualification. C'est-à-dire qu'on a tous une idée de ce qu'est le patrimoine, le droit en a une autre. Il y a un moment donné où on va devoir se demander si l'on est bien dans le champ d'application du texte. Il y a aussi ces questions qui interviennent quand on parle de la matière juridique. Et puis le droit il joue aussi avec le temps c'est-à-dire que une notion que vous connaissez bien c'est la prescription : à un moment donné, c'est fini. Le fait s'est produit mais le temps s'est écoulé et on ne peut plus le caractériser par le droit, on ne peut plus le juger. Et donc on va se trouver confronter avec ces questions-là ce qui va me permettre d'aborder la façon dont finalement on juge aujourd'hui. On juge aujourd'hui des actions récentes, des destructions récentes dont on a eu quelques exemples. Mais c'est un processus relativement ancien. On n'est pas sur un phénomène relativement nouveau qui serait apparu comme ça soudainement en 2010 ou en 2012 : on voit qu'il y a une certaine antériorité. Donc pour aborder ces questions-là je vais partir de deux dates : ce sont deux événements de destruction du patrimoine culturel qui ont déjà été notés. Le premier bombardement du pont de Mostar, je dis premier parce qu'il y en a eu un second le 9. En fait le coup fatal a été porté le 9. Mais la première salve date du 8 novembre 1993. Et puis le 19 mars 2001, fin, je dis bien fin parce que ça a pris plusieurs semaines, fin du dynamitage du Grand Bouddha de Bamiyan. Je dis bien dynamitage car les grands bouddhas ont résisté aux tirs à l'arme lourde quand même. Donc il a fallu que les Talibans se transforment en alpinistes pour aller installer des charges de dynamite dans le Grand Bouddha. Voilà. Je vais essayer de partir de ces deux cas. Alors, je pars de ces deux cas aussi et ça veut dire que je vais élargir le propos parce que ce matin j'ai entendu dire que : « destruction en temps de guerre des Bouddhas ». Les Bouddhas non. Il n'y avait pas la guerre en Afghanistan quand les Bouddhas ont été dynamités. L'Afghanistan est un état souverain, il était chez lui, les Talibans étaient chez eux en quelque sorte aussi contrariant que ça puisse être pour nous. Il n'y avait pas de guerre en 2001 en Afghanistan, tout au moins le 19 mars 2001 il n'y avait pas de guerre en Afghanistan. Nous sommes donc sur ce qui s'appelle une crise interne, c'est-àdire que les Afghans étaient en colère entre eux et les Bouddhas en ont fait les frais. Enfin, ils étaient en colère contre nous, mais nous n'étions pas en conflits avec eux, tout au moins de manière armée. Donc je vais partir de ces deux cas pour poser quelques éléments de réflexion. Et pour poser ces éléments je vais faire un détour par l'Histoire. Je pense qu'il faut... Pour bien comprendre comment aujourd'hui on juge les destructions intentionnelles, on va faire un petit détour par l'Histoire. Et on va aborder à la fois l'histoire des destructions pour vous montrer que finalement, ça n'est pas si récent que ça, ça s'est pratiqué de tout temps, en temps de conflits j'entends, en temps de guerres. Et puis on va faire aussi un petit détour par l'histoire du droit international : comment ce droit a progressivement capté les enjeux de protection du patrimoine culturel y compris en cas de conflit ou en cas de crise ? Un premier détour par l'Histoire avec un bas-relief conservé au British Museum. Donc je vous laisse lire... Et vous voyez bien qu'ils n'y vont pas avec le dos de la cuillère, si vous me permettez l'expression. Finalement quand vous lisez la fin du texte « ils répandent du sel sur la terre pour que plus rien ne repousse » : vous voyez bien qu'après avoir détruit les monuments, après avoir détruit les ziggourats et ainsi de suite, vous voyez les temples « disperser aux vents les dieux et les déesses », vous voyez bien : je veux dire on fait table rase. Et on est quand même en 647 avant J.-C. Donc la violence s'exprime dans le conflit, elle est intrinsèque au conflit. Ne soyons pas surpris qu'elle s'exprime encore aujourd'hui. Les conflits sont aussi un moyen de s'emparer des richesses ennemies. Si vous allez à Rome, sur l'Arc de Titus, vous verrez un exemple de spoliation c'est-à-dire que c'est le butin ramené par les armées romaines de Jérusalem avec la menorah donc portée en tête de cortège : c'est la symbolique du trophée que l'on place en tête de l'armée victorieuse pour signifier la soumission du peuple vaincu, et donc la soumission culturelle aussi du peuple vaincu. Un exemple plus récent. Une gravure de Goya dans Les désastres de la guerre où on voit un soldat napoléonien qui, après avoir assommé le desservant de l'église, s'empare des ciboires et autres objets religieux. Donc nous sommes au XIXème siècle. Et puis je ne vous présente pas l'homme au bicorne, caricature parue à Londres en 1814, donc les spoliations napoléoniennes. J'emploie ce terme spoliation à dessein car c'est ainsi que cela fut qualifié à l'époque. Donc le terme « spoliation » n'est pas une notion contemporaine qui serait liée à la Seconde Guerre mondiale. On verra que les auteurs illustres et anciens utilisent ce terme y compris pour décrire les actions de Napoléon en Italie. Et puis bien sûr on pense plutôt aux spoliations de ce type-là. Donc ça j'y reviendrai tout à l'heure. Et puis, Mounir Bouchenaki en a parlé tout à l'heure : donc là nous sommes à Angkor, on voit que la statue a été physiquement prise pour cible. Vous voyez les impacts de balles sur la statue. D'ailleurs je voulais m'en servir comme première diapo mais c'était difficile. Mais vous voyez bien je trouve... Et là on a une vraie symbolique. C'est-à-dire que l'on a tiré vraiment sur la statue. Vous voyez les impacts de balles dans le temple d'Angkor. Donc vous voyez bien une certaine historicité dans le processus. Nous sommes ici à Sarajevo, à la bibliothèque nationale, donc avant que n'arrive le drame, le 25 août 1992, et que vous voyez là effectivement l'amoncellement de livres sur la photo de droite. Donc guerre dans les Balkans. Donc je vais revenir tout à l'heure puisque le pont de Mostar bien évidemment fait partie du propos. Et puis l'iconoclasme, alors l'iconoclasme on n'est pas forcément en temps de guerre. Donc là nous sommes au Népal. Donc vous pouvez imaginer que la décapitation de la tête a provoqué une extraction de la tête vers le marché illicite. On est aussi dans ce contexte-là c'est-à-dire que la guerre alimente le trafic illicite. Et nous savons aujourd'hui avec certains objets qui apparaissent sur le marché de l'art de manière tout à fait inattendue en provenance d'Afghanistan. Les circonstances sont assez étranges on va dire... au-delà de ça il y a d'autres types d'atteintes : il y a aussi des guerres coloniales. Alors est-ce qu'on est dans le champ, vous voyez... ? On peut aussi se demander : est-ce-que toutes les guerres se valent ? Et est-ce-que finalement le droit traite de manière égale toutes les atteintes au patrimoine culturel lors des conflits ? Guerre coloniale : alors nous sommes ici avec une gravure qui représente le Palais d'été à Pékin avant l'intervention conjuguée des Français et des Britanniques. Une illustration de l'offensive. Et après l'intervention, un état un peu plus vous voyez enfin... La photo a été prise en 1860 et donc elle retrace l'état de 1860 ou plutôt elle illustre. Donc des destructions qui ont été opérées et c'est l'occasion aussi de montrer que l'on va avoir une élite intellectuelle qui s'exprime, qui proteste. Donc je vais en parler encore plus longuement tout à l'heure, mais on a cette fameuse lettre que Victor Hugo adresse au capitaine Butler en 1861, le capitaine Butler qui demande à Victor Hugo ce qu'il en pense puisque le capitaine Butler est persuadé des bienfaits de la Guerre de l'Opium puisque nous sommes bien dans ce contexte-là. Et vous voyez effectivement ce que lui raconte Victor Hugo donc à la Victor Hugo, si vous me permettez, c'est-à-dire que, alors je ne vous ai mis qu'un extrait parce que comme c'est du Victor Hugo ça prend trois pages... Mais bon voilà. Alors vous ne voyez pas effectivement la fin parce que l'écran le mange mais vous voyez quand même. Ce qui précède est quand même assez clair pour vous montrer que finalement, il y a avait quand même des réprobations qui s'exprimaient. Alors vous voyez que le capitaine Butler, il est dans une posture où il pense avoir bien fait, parce qu'en fait il y a une théorie, il y a une doctrine en droit international qui est la doctrine de « la guerre juste ». Il y a la guerre juste. Les deux tenants de la guerre juste, les plus contemporains dirons-nous, vous allez trouver qu'ils sont quand même anciens mais bon, ce sont saint Augustin et saint Thomas d'Aquin. Ils prônent la guerre juste tous les deux. Et donc le capitaine Butler il est dans cette filiation, c'est-à-dire qu'au XVIIIème et au XIXème, on est encore dans cette filiation en partie. Il y a des guerres qui sont justes : on doit les mener. Alors ce n'est pas ce qu'on pense aujourd'hui en droit international. La notion de la guerre juste telle que la définissait saint Thomas d'Aquin, fort heureusement n'est plus d'actualité mais quand même. Et puis, autre guerre coloniale, les fameux manuscrits de la BNF qui ont été « prêtés » à la Corée, juridiquement, ils sont prêtés, j'ai un doute moi sur le fait qu'ils reviennent un jour, mais bon voilà. C'est pour ça que je mets des guillemets à « prêter ». Je pense qu'ils ont été restitués mais on préfère dire prêter. On préfère habiller la restitution sous une forme de prêt. Vous n'imaginez pas qu'ils reviennent. Enfin, psychologiquement, c'est un petit peu compliqué à concevoir du côté coréen surtout. Et donc, en fait, c'est lors d'une guerre. Alors les Coréens apprécient modérément l'invasion ou l'intrusion française. Et bien évidemment vous savez qu'en pareilles circonstances, on envoie d'abord les missionnaires pour évangéliser et les autochtones avaient trucidé neuf missionnaires. Donc contre-mesure (contre-mesure une notion juridique) menée par l'Amiral Rose que vous voyez sur sa canonnière là en bas. Donc il bombarde l'île de Gangwa et s'empare des manuscrits coréens conservés depuis... enfin qui étaient conservés depuis à la BNF. Autre exemple de guerre coloniale : l'expédition punitive britannique contre le royaume de Benin, contre la ville de Benin plutôt, donc au Nigéria. Ce n'est pas l'état du Bénin, c'est la ville de Benin au Nigéria. Et vous voyez, voilà, on s'empare... La symbolique du trophée, on en est là quand même fin XIXème. Les objets que vous voyez au premier plan notamment les deux léopards, celui dont on voit juste l'arrière-train et celui que l'on voit en entier, sont au British Museum pour l'un et à Glasgow pour l'autre aujourd'hui. Donc vous voyez bien on est aussi dans ce contexte-là. Alors autres guerres, les guerres de conquête coloniale. Vous voyez devant vous le sultan des Mamounes au Cameroun qui est debout fièrement à côté du trône qui justement : il rend la justice. Ça nous renvoie à notre propos. Et le trône aujourd'hui se trouve au musée de Berlin. Nous sommes effectivement début XXème : guerre coloniale menée par l'Allemagne au Cameroun. Il y a des guerres, il y a des atteintes au patrimoine, il y a des déplacements aussi. Mon propos je ne vais pas le situer dans ce contexte-là car je pense... Mais pensez qu'il y a aussi ces questions-là en suspens. Alors comment les traite-t-on ? Par exemple, comment a-t-on traité la question de la Vénus de Cyrène prise par les troupes italiennes en 1913 en Tripolitaine ? Donc guerre coloniale, conquête coloniale du nord de la Libye par l'Italie en 1913. Et donc extraction sur un chantier de fouilles, enfin sur un site archéologique de cette très belle statue dit la Vénus de Cyrène. Donc, la justice internationale, elle ne traite pas ces questions-là : on ne sait pas les traiter, elles sont trop anciennes. Question de prescription. Et ça veut dire aussi que la justice internationale, quand elle traite des atteintes au patrimoine culturel, elle se situe sur le terrain de la sanction, et non pas de la réparation. Or, vous voyez bien qu'en principe le procès pénal, il a deux vertus : à la fois de sanctionner les agissements coupables et de réparer. La réparation elle est quand même globalement absente des mécanismes internationaux en matière judiciaire. Comment est-ce qu'on répare ? C'est très simple. On prend, on fait un accord bilatéral et on restitue. Donc ça c'est un collector, vous ne la reverrez plus. (rires car photo de la restitution de Berlusconi à Kadhafi) Donc elle a été restituée mais en dehors de toutes procédures judiciaires, par Berlusconi à son ami de l'époque Kadhafi. Alors autre exemple, 1937. Une autre guerre coloniale menée par la Libye en Ethiopie. Donc nous sommes sur les prémices de la Seconde Guerre mondiale et donc, l'enlèvement de l'obélisque puis son installation à Rome. Vous voyez que ce fut assez festif quand même. Donc vous voyez bien la guerre est un moment où le patrimoine est victime. Ça ça me semble assez évident et on va avoir différents types de guerres. Et donc parallèlement à cette historicité des atteintes au patrimoine culturel, nous allons avoir des paroles, nous allons avoir une doctrine qui va s'affirmer pour lutter contre la dispersion du patrimoine culturel, contre la destruction du patrimoine culturel lors des conflits. Le premier recensé en la matière c'est Cyrus qui a gravé la conquête de Babylone sur un cylindre d'argile. Il mentionne qu'en conquérant Babylone, il a ordonné à ses soldats de ne pas détruire la cité, au contraire de respecter les sanctuaires, de reconstruire les remparts et de restaurer les temples. Donc c'est le premier protecteur. Ce cylindre est souvent présenté comme le premier texte annonçant ou préfigurant les droits de l'homme, à tel enseigne qu'il est reproduit dans l'enceinte des Nations-Unies, dans le hall des Nations-Unies à New York, comme étant effectivement le premier texte fondateur d'une culture commune, et du respect des peuples en quelque sorte. Au-delà de Cyrus, nous avons Polybe par exemple qui stigmatise quand même l'action des armées grecques en disant : « Attention ! Je dirais que la conquête c'est une chose, mais la destruction des temples est une action de fous » Et puis Cicéron qui s'en prend à Verrès et qui stigmatise les pillages faits par Verrès. Donc on va avoir une doctrine qui va se former progressivement. Donc n'ayons pas une vision unilatérale : il y a la guerre, on détruit, on pille, on disperse. Et puis parallèlement, il y en a qui essaient de lutter. Cicéron, Polybe... Et puis d'autres auteurs musulmans : le premier calife de l'Islam, après la mort du prophète, … Vous voyez bien se met en place la revendication d'une immunité dont devrait bénéficier le patrimoine culturel en temps de guerre. Un autre texte dans la même lignée d'un historien marocain, Abu Youssouf Yacoub, dans le livre de l'impôt foncier : « Il faut respecter la religion, les cultes, les évêques, les moines, les temples et toutes les possessions ». Une doctrine va se développer. Et puis Quatremère de Quincy aussi. C'est-à-dire que Napoléon pille et pendant ce temps-là, Quatremère de Quincy écrit à Miranda en disant que ça n'est pas possible. Et donc Quatremère de Quincy vous voyez ce qu'il écrit notamment à Miranda. Alors ce qui m'intéresse particulièrement dans cet extrait c'est que Quatremère de Quincy met en évidence la notion de propriété collective. Vous voyez il dit « tout ce qui peut concourir à cette fin [c'est-à-dire le bonheur, le plaisir, l'instruction et ainsi de suite], donc le patrimoine, les biens culturels] appartient à tous les peuples. Nul n'a le droit de se l'approprier ou d'en disposer arbitrairement. » On est bien sur la construction intellectuelle d'une responsabilité collective qui nous incombe à tous au-delà de nos nationalités pour protéger le patrimoine d'autrui. C'est ce que revendique Quatremère de Quincy et qui, finalement, sera théorisé plus tard dans le droit international. Et théorisé notamment par Joseph Renao. Ça va me permettre de rebondir sur ce que vous avez dit sur l'évacuation du patrimoine du Prado et la protection du patrimoine artistique espagnol. Renao était un des acteurs de cette évacuation de 1936 à 1939. Il demande un organisme. Il faut qu'il y ait un garant. C'est bien beau qu'il y ait une responsabilité collective mais qui va porter cet enjeu ? Et il demande effectivement que l'on crée un organisme spécialement dédié à cette question-là. Et puis le premier juriste, si on quitte la théorie et que l'on regarde du côté du droit, c'est Émer de Vattel. C'est celui qui cogne le plus fort, si vous me permettez l'expression. Il publie en quatre tomes un traité sur le droit des gens, sur le droit de la guerre. Et dans ce traité, il dit qu'il faut épargner les édifices qui font honneur à l'humanité. On est dans la mouvance de cette immunité que va accorder le droit international au patrimoine culturel ultérieurement. Ça pose aussi une question : qu'est-ce-que la guerre ? C'est bien beau mais dans quels cas cette immunité va-t-elle s'appliquer ? Alors je me suis dit... Dans le droit international il doit bien y avoir quelque part une définition de la guerre... Il n'y en a pas. Il y a eu une tentative de définition en 1874, date de l'adoption à Bruxelles d'une déclaration qui tente de poser des règles en matière de conflits armés. Y participant, les Russes demandent à ce qu'il y ait une définition de la guerre. Leur proposition est rejetée. Et il n'y a pas de définition de la guerre dans le droit international. Par défaut, il y en a une dans la jurisprudence, dans une décision de justice internationale. Dans un procès qui oppose Duskotavic au procureur, au TPIY (Tribunal pénal international pour l'Ex-Yougoslavie) vous avez une définition de la guerre ou plus exactement du conflit armé. Finalement on nous y dit que le conflit armé s'étend au-delà de la cessation des hostilités, c'est-à-dire jusqu'à la conclusion générale de la paix, jusqu'à ce qu'on ait soldé définitivement la question. La fin des hostilités ne neutralise pas la responsabilité des auteurs de destructions puisque juridiquement la guerre ne s'éteint qu'à la conclusion générale de la paix. On va donc poursuivre sur le fondement du droit de la guerre les auteurs d'exaction y compris après la fin des hostilités. Le premier texte permettant ces poursuites est, dans les Conventions de La Haye, les articles 47 et 56. Ce sont les premières conventions internationales où apparaissent des dispositions protectrices du patrimoine culturel, surtout l'article 56. L'article 47 est un peu générique c'est-à-dire qu'il concerne le patrimoine culturel mais pas seulement, c'est le pillage dans sa globalité. L'article 56 est spécialement dédié à la question de l'immunité des biens culturels en temps de guerre. Alors ne pensez pas que ce texte est ancien, qu'il n'est plus en application. Il est toujours en vigueur. Il fait partie du droit international coutumier. Et c'est sur le fondement de l'article 56 qu'ont été condamnés certains généraux ou certains commandant serbes, bosniaques, ou croates pour avoir délibérément bombardé qui Dubrovnik, qui Sarajevo, qui Mostar. C'est un texte fondateur pour la protection des biens culturels en temps de conflits. Le pacte conclu en 1935 ne trouvera pas une grande application. Il va même rester lettre morte pendant la Seconde Guerre mondiale. Son intérêt est qu'il revendique une neutralité pour les biens culturels. Cette neutralité signifie que les biens culturels doivent être exempts de tout dommage lors de conflits armés. Ce principe figé dans le pacte ne sera jamais mis en œuvre. Statut du Tribunal de Nuremberg en 1945. Très intéressant parce que finalement c'est la première fois qu'on institue un tel outil de justice internationale. L'article 6 qualifie les différents types de crimes répréhensibles. Il intègre dans les crimes de guerre les pillages de biens publics ou privés, les destructions sans motif des villes, des villages ou la dévastation etc. Aucune référence culturelle. Alors il faut dire que les exactions étaient d'une telle ampleur sur d'autres plans que le patrimoine culturel est évoqué dans certains actes d'accusation mais il n'est jamais retenu comme étant un motif de condamnation. Les crimes contre l'humanité ont emporté toute l'attention du tribunal de Nuremberg. Donc le patrimoine culturel n'apparaît pas dans les condamnations en 1945, enfin en 1946 après que le Tribunal ait été institué. Après la convention c'est celle de 1954 dont Mounir Bouchenaki a parlé qui institue une protection des biens culturels en cas de conflit armé, neuf ans après la fin du second conflit mondial. Je ne vais pas vous détailler cette convention ce serait beaucoup trop long. Souvenez-vous de Quatremère de Quincy, il disait que le patrimoine appartenait à tous. Le principe de cette convention est que le patrimoine culturel transcende les nations, transcende les souverainetés, et revêt une importance pour tous les peuples du monde. Et donc il faut lui assurer une protection internationale : c'est tout l'enjeu de cette convention. Et lorsqu'il y a infraction aux principes de cette convention, vous avez l'article 28 qui pour la première fois met en place une protection pénale individuelle des auteurs de ces exactions. Le fameux fanion dont parlait Mounir Bouchenaki ce matin vous l'avez sous les yeux et c'est ce fanion qui a en principe la vertu de protéger les biens culturels en temps de conflits armés. Dans le conflit des Balkans, ça a permis de cibler au contraire. C'est tout le paradoxe. Quand vous avez une guerre qui repose sur des critères identitaires, l'identité d'un peuple c'est son patrimoine, donc si on veut détruire un peuple, on détruit son patrimoine, et on cible les édifices qui revêtent ce fanion. La condition sine qua non pour qu'un patrimoine bénéficie de l'immunité que lui accorde ce fanion, c'est que celui-ci ne soit pas utilisé à des fins militaires. Vous avez ici un minaret à Samarra (Irak) : des snippers de l'armée américaine s'en sont servis comme base de tirs et on les comprend aisément (c'est un point de contrôle assez intéressant) sauf que, de fait, l'utilisation du minaret par les militaires prive le minaret de sa protection. Et le minaret devient à son tour un objectif militaire. Il y a donc des limites qui sont posées à la protection. Protocole aux conventions de Genève, adopté en 1977. Convention de Genève adoptée en 1949 qui institue un droit pour les victimes des conflits, un droit pour les réfugiés notamment. Et donc les protocoles 1 et 2 contiennent des dispositions sur le patrimoine culturel. Deux articles donc c'est assez marginal. Sauf qu'ils insèrent de manière forte la protection du patrimoine culturel dans le droit international humanitaire. Et donc depuis 1977 la cause est acquise : la protection du patrimoine culturel fait partie du corpus du droit international humanitaire. Le Tribunal pénal international pour l'Ex-Yougoslavie en 1993, une étape clé : c'est quand même la première fois qu'on institue un tribunal pénal international. Alors certes il y a eu Nuremberg mais je vous rappelle que Nuremberg était un tribunal militaire mais là c'est un tribunal civil. Surtout c'est la première fois que seront condamnés des chefs militaires pour avoir délibérément détruit du patrimoine culturel. En 1998 on pourrait dire que ça y est on tient le bon bout puisque nous avons le statut de la Cour pénale internationale adopté à Rome le 17 juillet 1998. L'article 8 de ce statut définit le crime de guerre parmi lesquels les attaques délibérées contre des bâtiments. On pourrait se dire « Ça y est ! » on a enfin un texte qui instaure une sanction pénale. Et on pourrait comparer comment ces textes fonctionnent avec les Conventions de la Haye de 1899. Entre temps on a eu les Conventions de l'UNESCO sur les trafics illicites qui sont des dispositions marginales mais il y a des sanctions pénales prévues. Et puis il y a la fameuse déclaration de l'UNESCO de 2003 suite à la destruction des Bouddhas de Bamiyan, une déclaration, vous allez le voir, nous sommes dans le domaine de l'incantation en la matière. Et oui, je vous le rappelle, ils étaient chez eux. C'est contrariant mais c'est ainsi. Comparons les deux textes puisque finalement c'est un aboutissement de dire que la destruction du patrimoine culturel en temps de guerre est un crime de guerre et est donc susceptible de peines prévues à cet effet. Si on compare les deux conventions on se rend qu'il y a quand même une source d'inspiration assez forte en 1998 sur le texte initial et donc on peut en déduire que le champ d'application est à peu près le même. Et je pense que c'est tout à fait vrai : le champ d'application est assez proche. Donc ça pourrait être décourageant. On pourrait se dire qu'on n'a pas fait de progrès finalement puisqu'on désigne le même type de biens susceptibles d'être protégés en temps de conflit. On peut poursuivre l'analogie avec un autre article. Là c'est encore plus probant, on a un renvoi de l'un à l'autre. L'un a capté l'autre. Ce qui change en 1998 c'est qu'on a une vraie responsabilité pénale individuelle qu'on n'avait pas avant. C'est là tout le changement du dispositif depuis 1998. Si je reviens, pour finir ma présentation, sur mes deux cas initiaux (Bamiyan et les Balkans). Cette fois je vais quitter Mostar pour aller à Dubrovnik. Regardons d'abord Bamiyan. Alors je vous ai dit déclaration de 2003. Mais finalement les Bouddhas ont été bombardés à la suite d'une décision officielle. Vous avez sous les yeux le décret du Mollah Omar bien connu pour avoir fui en mobylette et vous voyez quand même qu'il a pris un décret et que la messe est dite pour les Bouddhas, si vous me permettez l'expression. Leurs jours sont comptés à comptés du 26 février 2001. Ce qui est intéressant c'est de se dire : est-ce qu'il n'y avait pas de textes avant, parce qu'il y avait peut-être des textes en Afghanistan qui protégeaient le patrimoine ? Les Talibans ont pris le pouvoir en 1999. Donc ça faisait quand même deux ans qu'ils dirigeaient l'Afghanistan. Quand ils sont arrivés au pouvoir ils ont pris des textes effectivement protégeant le patrimoine, y compris les Bouddhas. Et pourquoi ont-ils protégé les Bouddhas en 1999 par un acte officiel ? Simplement parce que les Bouddhas sont une source de revenus touristiques. Donc il faut un peu décloisonner notre regard sur ces questions-là. Sauf qu'entretemps la communauté internationale fait pression sur le régime taliban, les stigmatise et donc la stigmatisation internationale a produit le décret du 26 février 2001. Finalement quand vous lisez les textes en 1999 et 2001, vous voyez bien qu'il n'y aurait pas eu... Alors c'est peut-être un prétexte aussi, ne soyons pas dupes. Quoi qu'il en soit, les résolutions successives du Conseil de sécurité mettant sous pression et sous embargo le régime des Talibans ont peu ou prou contribué à ce que ces Bouddhas disparaissent des falaises de Bamiyan. À mon sens je pense que cette donnée est assez importante finalement dans la généalogie de cette destruction. Alors on adopte une déclaration en 2003. Et qu'est-ce qu'une destruction intentionnelle ? Je vous dis le droit a toujours besoin de qualifier, pour savoir si on est ou non dans le champ d'application. Vous voyez que la définition est assez générique. Quelles sont les conséquences ? Vous avez une responsabilité de l'État qui peut en découler. Mais finalement il n'y a pas de sanction. L'UNESCO s'est employée en six lignes à indiquer que l'on doit prendre des mesures appropriées pour intervenir et prévenir mais il n'y a aucune sanction qui puisse intervenir. Responsabilité individuelle ? Peut-être mais uniquement si un Etat ou une autre organisation a fixé des sanctions pénales adéquates appliquées à ces personnes. Il n'y en a pas ! On est bien dans l'incantation. Alors certes ce texte a le mérite d'exister mais il n'a qu'une portée juridique très faible. Alors, Dubrovnik pour poursuivre et finir. Bombardé en novembre 1991. Vous avez le statut du Tribunal pénal international dont on parlait tout à l'heure. Dans les violations qui sont susceptibles d'être jugées par le tribunal pénal international vous avez le d) saisie, destruction, endommagement (vous lisez le texte). Et donc c'est sur ce fondement-là qu'a été condamné Miodrag Jokic le 18 mars 2004. Alors là c'est le jugement de la Chambre de première instance. Il a fait appel mais la Chambre d'appel a confirmé le jugement de première instance. Il est condamné pour avoir, entre autres choses... Ses exactions sont beaucoup plus nombreuses que celles qui sont mentionnées ici mais je vous ai mis l'extrait qui nous concerne tous aujourd'hui. Ce qui m'intéresse dans cet extrait c'est finalement la fin. Il est dit que ce crime constitue une atteinte à des valeurs spécialement protégées par la communauté internationale. Ainsi si nous retraçons le fil depuis Quatremère de Quincy jusqu'à ce jugement du Tribunal Pénal International de 2004, on est dans cette logique qui imprègne le droit international et les mécanismes de sanction : le fait qu'il y ait des valeurs qui transcendent les nationalités, qui transcendent les États et qui, peu ou prou, doivent être prises en compte lors de la fin des hostilités. Alors je vous ai dit réparation et je conclurai là-dessus. Alors je vous ai dit « la réparation elle est absente ». Alors on va revenir sur Mostar pour conclure et puis on fera juste un petit détour sur le Mali. Le pont de Mostar. Mounir Bouchenaki a expliqué après reconstruction du pont et donc c'est l'image que l'on conserve. Reconstruction du pont mais, lors du conflit, le clocher de l'église avait subi quelques dommages et le minaret aussi. Donc les premiers à reconstruire sont sur la rive chrétienne, donc ils refont le clocher plus haut que le minaret en face. Je rappelle que le pont a été reconstruit donc la concorde devait régner. Du coup, le minaret est reconstruit, plus haut que le clocher. Et d'après vous qu'est-ce qu'il se passe ? Parce qu'ils ne vont pas remonter le clocher plus haut que le minaret. Et donc, il y a une colline au-dessus de Mostar et donc là on met une croix. Et le pont quand même célèbre la concorde entre les deux communautés. Vous voyez bien la réparation est au-delà... Elle est compliquée la réparation. Je veux dire que la sanction ne répare pas toutes les cicatrices, loin s'en faut. Concernant le Mali, on a tous vu ces images de destructions. Sachez juste que finalement le Conseil de sécurité a été saisi et s'est saisi de cette question-là. Et il y a quelques semaines de ça, le 20 décembre 2012, a été adoptée cette résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations-Unies. Je vous rappelle que certains états ont un droit de veto et que là donc elle a été adoptée à l'unanimité des états membres du Conseil de sécurité. Finalement c'est la première fois que dans une telle résolution du Conseil de sécurité sont mentionnée les atteintes au patrimoine culturel. « Ceux qui s'en rendent coupables doivent absolument en répondre » Et donc ce sera la Cour pénale internationale qui sera éventuellement amenée à juger des exactions au Mali. À mon sens, alors... on peut en discuter... Mais l'action de la Communauté internationale n'a pas joué en faveur des Bouddhas de Bamiyan. On s'est posé la question à travers certains écrits, à travers certains reportages si l'action de l'Unesco n'avait pas avivé l'ardeur destructrice. Et je pense qu'il y a eu un peu de ça quand même quelque part. C'est toute l'ambiguïté. Quand on met sous les projecteurs, détruire permet à ces gens-là d'être encore plus sous le projecteur. Dominique Misigaro : Merci beaucoup Vincent Négri. Nous avons un petit peu dépassé l'horaire mais s'il y a une ou deux questions à l'intention de Vincent Négri, n'hésitez pas. C'est le moment. Non ? Tout le monde a envie d'aller manger peut-être. Laurence Lepetit : En fait je peux poser une question ? En fait je voudrais revenir sur le principe des réparations parce que lorsque l'on est dans un conflit civil finalement qui est coupable ? On peut désigner des chefs de guerre qui sont coupables et qui peuvent être condamnés mais on n'a pas de payeur, on n'a pas d'Etat payeur qui permet finalement de réparer et de restaurer le patrimoine. Finalement c'est la communauté internationale dans certains cas qui finance la reconstruction et évidemment après qui y met le symbole qu'elle doit y mettre. Par exemple à Sarajevo, le fait que le pont soit un symbole de réconciliation, c'est un discours externe au pays. C'est pas du tout un discours interne. Et quelque part comment imaginer... ? Il n'y a pas de possibilités d'imaginer des sanctions pour la restauration ? Vincent Négri : Il y a eu sanction pécuniaire vis-à-vis de l'Allemagne en 1945 puisque les dommages de guerre versés par l'Allemagne bon... Pour la petite histoire, sachez qu'une des dernières utilisations des dommages de guerre versés par l'Allemagne a été utilisé par la mairie de Caen pour restaurer une église dans les années 1990. Donc ça a perduré. Mais on voit bien qu'on ne veut pas reproduire ce système-là parce que quand vous imposez des dommages de guerre et le paiement de dommages de guerre à un pays, finalement vous prolongez l'acrimonie éventuelle, vous prolongez les tensions. Donc on préfère effectivement punir et mobiliser d'autres moyens pour réparer aujourd'hui. Mais moi je m'interroge... Pourquoi punit-on aussi à un moment donné ? Laurence Lepetit : D'accord. Je suis désolée. En fait je connais bien la Bosnie. Là où je m'interroge c'est en fait je pense que si ça avait été reconstruit par les habitants de Mostar le pont aurait probablement eu une valeur bien plus importante en terme de réconciliation que si l'argent été venu de l'extérieur. Vincent Négri : Oui tout à fait. Mais c'est toute l'ambiguité de... Laurence Lepetit : … d'un conflit civil. Oui ça c'est clair. Vincent Négri : Oui d'un conflit civil. Et puis de l'intervention de la communauté internationale. La population locale va-t-elle arriver à se réapproprier des monuments ou un patrimoine réhabilités par un tiers ? C'est la question clé à mon sens. Mme X : Oui, pour le cas de Mostar il me semble qu'il y a eu un programme participatif. C'était un atelier de pierres de taille qui a été initié pour permettre à la population locale de participer à sa reconstruction. Mais bon... Après je ne sais pas si ça a eu un impact direct. Voilà c'est juste une petite... Vincent Négri : Oui. Non non mais il faut. Mais vous voyez bien que la décision de construire le financement de la reconstruction et la maîtrise d'ouvrage, elles étaient externes. Dominique Misigaro : Ah ! Il y a encore une question devant. Ça sera la dernière avant qu'on ne conclue. Mme X : Bonjour. Alors ça n'est pas une question mais c'est juste que par hasard hier je lisais cela. Donc vous connaissez peut-être l'ampleur des destructions du patrimoine tibétain et je lisais hier quelque chose de curieux. Lorsque la Chine s'est rouverte dans les années 1980 et qu'ils ont financé la reconstruction des temples, certains Tibétains ont perçu ça comme un aveu des Chinois d'être responsable des destructions. Et, du coup, ça n'a pas du tout eu l'effet attendu par les Chinois de montrer qu'ils voulaient arranger quelque chose qui avait été détruit. Donc c'est étonnant de voir comment une destruction et une réparation entraînent des choses difficiles. Dominique Misigaro : Donc merci à tous d'être venus. Je voudrais encore remercier nos intervenants d'avoir participé à cette seconde table-ronde. Nous allons recommencer et conclure cette journée à partir de 14h avec deux interventions : l'une qui parlera de reconstruction très concrète qui est le cas de Dresde, et puis nous parlerons ensuite de muséologie. Merci à tous.