la si tuation de l`hotellerie en tunisie

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la si tuation de l`hotellerie en tunisie
LA S I T U A T I O N
DE L’ H O TELLER IE
EN T U N I S I E
« L e T ou rism e, c'est des hôtels » disait, un ancien R ésident G én é­
ral cou tu m ier des ellipses ,et en fa it, l'h ô tel, qui à l'origin e doit ser­
vir le capital tou ristiqu e, p eu t fin ir par s'y in co rp o rer. Plus d'un
touriste con serve le souvenir de l'hôtel où il a séjou rn é autant
mi [dus que des paysages ou curiosités visitées. Il p eu t paraître ba­
nal de raconter la visite des Pyram ides au clair de lu n e, mais il
y a un certain snobism e à d écrire le S hepherd. Le succès de la Hau­
te E g y p te, qui avant gu erre avait, drainé n om b re de touristes attirés
autrefois par l'A friqu e du N ord , est dû sans conteste aux VinterPalace de L ou k sor et d'Assouan, autant qu'aux vestiges de Karnak
et de Vile E léphantm e.
De m ê m e , alors que la Tripolitaine et la C yrénaïque n 'offren t que
de bien m aigres séd u ctions, le IVeddad, le M ehari et VAlbergo Berenice de Tripoli et lienghasi y accueillaient som ptu eu sem en t les
voya geu rs, qui trouvaient, de plus au fond du G olfe de S yrte, un co ­
quet g îte d'étape, p erm ettan t im nécessaire repos,
.INVENTA IRE DE L’HOTELLERIE TUNISIENNE
EN QU ANTITE
La Tunisie com pte 70 hôtels, totalisant 2.000 cham bres classées,
dont p'ius de la m oitié sont à Tunis m êm e.
De m anière toute théorique ont peut déjà estimer q u ’avec un taux
de fréquentation de 80 %, en 300 jou rs par an, et u,n© m oyenne de
séjour de 10 jours, la capacité hôtelière totale de la Tunisie ne dé­
passe pas 60.000 voyageurs par an, ce qui peut paraître insuffisant.
P ou r théorique que soit ce m ode de raisonnem ent il correspon d
pragm atiquem ent à la réalité et on convient d ’admettre qu’il fau­
drait disposer d ’un plus grand nom bre de cham bres classées, si l’on
veut p ouvoir accu eillir un plus grand nom bre de touristes.
EN QUALITE
Selon un ancien recensem ent, en coui's de révision, les 70 hôtels
de Tunisie com porteraient :
T rois étoiles : 18 hôtels de 600 cham bres,
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Deux étoiles : 28 hôtels de 1.100 cham bres,
Une étoile : 24 hôtels de 300 cham bres.
Les travaux effectués depuis inciteront peut-être ta com m ission
de l’hôtellerie à proposer une nouvelle répartition.
C’est q u ’en effet les hôtels de Tunisie ont subi au m oins autant
que ceu x de France et p robablem ent plus que ceux d’A lgérie et du
M aroc les m éfaits des années de guerre : réquisitions successives et
d om m ages de guerre.
Aussi, après une enquête h;ïtive en cours de confirm ation, sur les
2.000 cham bres classées, 000 restent encore à remettre à neuf.
De ce bilan rapide on conclu t don c que 'l'hôtellerie tunisienne a
encore besoin d ’ un effort de m odernisation et que la capacité hôte­
lière du pays est encore insuffisante. Or remettre en état et cons­
truire ne pourront se faire que si l ’hôtelier et le capitaliste sont as­
surés d ’une rentabilité certaine.
PROBLEM E DE LA R E N TA B IL ITE
Les hôteliers assurent que leur industrie est
p u isqu ’elle est encore soum ise à la taxation, et
sont à un coefficien t, par rapport à 1939, bien
l’ensem ble des produits ou services qui est de
la plus mal traitée,
que les prix taxés le
inférieur à celui de
20.
Cependant le rapport de la m ission envoyée par l’O.E.C.E. aux
Etats-Unis p ou r y étudier l’état et l’organisation du tourism e a fait
les m êm es constatations, en dehors de toute intervention de l’Etat.
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« Tandis que le revenu national continuait à augm enter, le revenu de l’industrie hôtelière est resté stable et le nom bre des clients
d ’hôtels est allé en dim inuant. A lors que l’indice général du prix
des produits passait de 130 en 1945 (par rapport à 1939 année de
base) à 205, l’indice du p rix m oyen des hôtels passait de 130 à 175.
Le p rix des cham bres d ’hôtel n ’a d on c pas suivi l’augmentation
du niveau général des p rix; s’il s’est produit une certaine hausse
des p rix, le nom bre des clients a quelque peu dim in u é an: dépit
de l ’activité croissante de toutes les autres branches du com m erce
et de l’industrie. D’autre facteurs sont m anifestement entrés en
jeu, qui ont orienté la clientèle virtuelle vers d ’autres m odes de
logem ent ».
Il
y aurait donc là un phénom ène général à l ’ industrie hôtelière.
En principe la taxation ne se ju stifie que par la pénurie. Il s’agirait
d on c de savoir si la dem ande de cham bres d ’hôtel est tellem ent su­
périeure à la dispon ibilité q u ’elle justifie une taxation. Cependant
les hôteliers reconnaissent la nécessité d ’un certain contrôle qui les
prém unit contre les effets de la concurrence en période creuse et les
incite à se m aintenir à des taux analogues à ceux des pays voisins.
Que si, en effet, l’hom m e d ’affaire, ob ligé de ven ir pour quelques
jou rs par an en Tunisie se verra contraint de payer le p rix qui lui
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est im posé, le touriste pur tiendra le plus grand com pte des prix
offerts dans le ch o ix de son voyage. Or des pays concurrents, l’Italie
par exem ple, offren t des p rix très étudiés et aucun facteur déterm i­
nant 'le p rix du séjour ne doit être négligé. Ceci dit il convient ce ­
pendant de rem arquer que, si la part du p rix des cham bres dans
les dépenses totales du touriste est évaluée à 20 %, une augm enta­
tion de 20 % de ce p rix correspondrait à une m ajoration de 4 % de
la dépense totale, soit p our une dépense m oyenne de 20.000 francs
par touriste, une som m e de 800 francs portée à 1.000 francs par le
jeu des m ajorations proportionnelles. On se trouve devant le dilem ­
m e de voir le touriste — qui, il faut le dire, tend à lim iter au m a xi­
m um sa dépense -— choisir le circuit offert au m eilleu r p rix et se
détourner du pays où l’hôtellerie sera chère, ou m aintenir l’ indus­
trie hôtelière .tunisienne dans M'n état de rentabilité précaire et l’em ­
pêcher de m oderniser ses installations, ce qui revient encore à éloi­
gner les touristes en raison de la m édiocrité de l ’ hébergem ent.
Une solution m oyenne doit dan.c être recherchée. Un décret du 12
janvier 1950 a adopté pour la Tunisie les normes de classem ent en
usage en A lgérie et en France et une sous-com m ission de la Com ­
mission de l’H ôtellerie a été chargée de proposer un tableau de clas­
sement des 70 hôtels du pays, ce qui sem ble avoir suscité une ém u­
lation et un désir de prom otion dans l ’ échelle du classem ent et par
conséquent des prix.
En supposant le porblèm e résolu, soit avoir assuré la rentabilité
de l’industrie hôtelière, un program m e d ’am énagem ents et d ’exten­
sion reste à réaliser et à financer.
AM EN AG EM ENTS
Près de six cents cham bres classées touriste restent à. remettre à
neuf; à 100.000 francs la' cham bre, cela représente 60 m illions. A
cette somme vient s’ajouter le p rix de la réfection des hall, salons
etc... En supposant que l’auto-financem ent satisfasse le quart des
besoins, siot 15 m illions, le financem ent du reliquat nécessite la
recherche d ’un m in im u m de 45 m illions.
Le Crédit Hôtelier, qui épuise actuellem ent sa dernière avance
de 10 m illions, est en train de se procurer une n ouvelle tranche de
15 m illion s avec la garantie du P on d de M utualité, Il resterait danc
à trouver 20 autres m illion s que les établissements bancaires, ou la
Caisse Foncière, doivent être en mesure de procurer. Une b o n ifi­
cation d ’intérêt destinée à ram ener l’opération à 4 ou 5 % pourrait
être accordée, à chaque cas particulier; c ’est à cette fin q u ’un cré­
dit a été inscrit au b ud get de l’O ffice Tunisien du Tou rism e.
CON STRU CTION S NOUVELLES
L ’équipem ent hôtelier restant cependant encore insuffisant en
quantité p our satisfaire à un accroissement du m ouvem ent touristi­
que, il y aurait 'lieu d ’envisager des constructions nouvelles à T u ­
nis et dans l ’intérieur.
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A Tunis, on sem ble admettre que la ville ne dispose pas pour le
m om ent d ’hôtel où le touriste, au retour de son périple tunisien,
puisse se reposer, se détendre: la chaleur et le bruit l’incom m odent,
cependant q u ’aucun jardm n ’existe dans les établissements exis­
tants.
Des projets ont été
raît particulièrem ent
rism e de luxe et de
que le projet devrait
m ais bien cependant
élaborés, dont celui du parc du Belvédère pa­
séduisant; en tout état de cause, le grand tou­
séjour paraissant en déclin, il ne sem ble pas
porter sur un palace à la rentabilité précaire,
sur un hôtel de classe très confortable.
Kn dehors des possibilités de financem ent prévues, com portant
ou non la concession des jeu x, il ne sem ble pas exclu que des faci­
lités de crédit pourraient être trouvées auprès des organism es o ffi­
ciels si la décision n ’ intervenait pas trop tardivem ent.
Dans l’intérieur on constate un très gros effort à Bizerte et à Sous­
se qui risquent même peut-être un sur-équipem ent. Il n ’ en est pas
de m êm e à Sfax où la capacité hôtelière correspond à peiine aux be­
soins norm aux.
Mais au point de vue qui nous occupe, les trois points névralgi­
ques sont T ozeur, Gabès et D jerba. Les hôteliers de Tunis ont par­
faitem ent conscience de l’im portance de cette question; ces trois cen­
tres touristiques du Sud doivent tenir lieu de ventouse. Or pour
T ozeur et D jerba il s’agit pratiquem ent de term inus qui ne b é n é fi­
cient pas com m e les hôtels relais sahariens d’A lgérie d ’un certain
courant continu. Et il sem ble bien que dans l’état actuel des choses,
la rentabilité des hôtels de ces centres reste précaire. En Algérie,
l’Assem blée budgétaire a voté pour 1950 une subvention extraordi­
naire de cin q m illion s p our la rem ise en état des hôt'els déficitaires
de la S.V .H .N .A . A u M aroc c ’est le système des constructions en
régie qui a été adopté. En tout état de cause il est certain que, si
dans le cadre local un établissement est déficitaire, le rôle d ’attrait
q u ’il doit jou er b én éficie en fin de com pte à l’écon om ie générale du
p ays et ju stifie ainsi l ’intervention de la collectivité. C’est actuelle­
ment le cas de l’hôtel de Ghadamès, géré par l ’O ffice du Tourism e.
Tout fortuitem ent d’ ailleurs. L ’Etat est aussi propriétaire d ’un hôtel
à Souk-el-A rba.
FO RM A TIO N DU PERSONNEL
La form ation et le perfectionnem ent du personnel hôtelier font
intim em ent partie du capital touristique d ’un pays. Quel n’ est pas le
fâcheux effet prod u it par un concierge qui ne réveille pas à tem ps
le voyageur qui doit prendre l ’avion.
L ’octroi de bourses de stage dans les grands hôtels, ou dans les
écoles hôtelières, paraît devoir être la solution la m oins onéreuse.
En b ref, s ’ il sem ble désorm ais acquis que le Tourism e tient une
place de ch oix dans l’économ ie du pays, rien ne s’oppose à ce que
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l’industrie hôtelière bénéficie, com m e la cimenterie ou la m inoterie
par exem ple, de 'l’aide apportée à l’équipem ent économ ique.
Aussi, est-ce bien la notion d ’équipem ent touristique q u ’ il con ­
vient de faire admettre par les esprits.
PAU L HUBER LE M IRE,
D irecteur de l’Offic-e
Tunisien du Tourism e.
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