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SOMMAIRE
3 Jean-Claude Pacitto.
Éditorial.
5 Coralie Damay, Nathalie Guichard.
Présentation des prix dans les catalogues de jouets et
traitement cognitif des prix induits chez les enfants.
23 Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni.
Les marques sont mes amies sur Facebook : vers une
typologie de fans basée sur la relation à la marque et
le sentiment d’appartenance.
35 Sylvaine Castellano, Vincent Dutot.
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste
avec la réputation : une approche par les médias
sociaux.
Actualités
53 Sylvain Mbongui-Kialo.
Le brevet comme instrument de veille technologique et
d’innovation : une application au secteur automobile.
63 Agenda.
67 Actualités Juridiques :
Le projet de « Class Action » à la française : réparation
collective ou arme de dissuasion ?
71 Vient de paraître.
73 À lire sur le net.
79 La RFM a lu pour vous :
Brève critique de la responsabilité marketing.
Rénover un magasin : une stratégie réellement rentable ?
Le Category Management (et son « capitaine de catégorie ») : un intérêt réel pour le revendeur ?
83 Bulletin d’abonnement à la R.F.M.
84 Note aux auteurs.
CAHIER 243
SEPTEMBRE 2013
Photo de couverture : iStockphoto
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ÉDITORIAL
Le thème de l’enfant consommateur est en marketing souvent évoqué et étudié. Pour
autant, deux questions se posent : si l’on admet que le prix est un élément fondamental dans les choix que pose le consommateur, quel que
soit son âge, quelle stratégie adopter en la matière lorsque l’on s’adresse aux plus jeunes d’entre eux ? Et, seconde question liée à la précédente, comment les enfants traitent-ils les informations relatives au prix ?
Le premier article intitulé « Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants » apporte, concernant ces
deux questions, des éclairages intéressants. D’une part, cet article révèle une forte hétérogénéité dans la manière de positionner le prix de la
part des enseignes qui reflète, bien entendu, pour une bonne partie leur
positionnement primordial. Mais, d’autre part, elle n’en rend pas toujours la lecture aisée de surcroît lorsque l’on s’adresse à des consommateurs très jeunes d’où la difficulté pour ces derniers à traiter l’information-prix dans les catalogues de jouets qui leur sont destinés. L’auteure
de l’article formule, de ce point de vue, des recommandations que beaucoup d’enseignes auraient intérêt à prendre en compte.
L’irruption des réseaux sociaux ne pouvait pas être sans conséquences dans la définition des stratégies marketing. Même si l’utilisation de ces réseaux peut
être ambivalente pour les marques, il n’en demeure pas moins qu’ils
constituent des outils privilégiés pour construire des relations privilégiées avec les clients. Les marques ne peuvent plus les ignorer et
Facebook est devenu un acteur incontournable dans la construction de
ces liens nouveaux.
Une stratégie marketing ne peut, pour autant, s’élaborer sur des généralités, car ce qu’il
importe de connaître pour les marques c’est le profil de leurs « fans », comment ils utilisent le réseau social et quelle est, via Facebook, leur relation particulière à la marque.
Le second article intitulé « Les marques sont nos amies : vers une typologie de fans
basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance » révèle des résultats qui permettront aux marques de mieux affiner leurs stratégies dans la construction d’une relation toujours plus personnalisée
avec leurs clients. Car, et comme le montrent les auteures, il existe des
profils de fans très différenciés qui n’induisent pas du tout les mêmes
stratégies de la part des marques. La relation à la marque via Facebook
est plus complexe parce qu’hétérogène. Entre le fan Passif et le fan
Intéressé, les motivations sont très contrastées de même que leur relation à la marque. Le fan idéal-type pour les marques, à savoir le fan
Modèle, reste minoritaire. De ce point de vue, les recommandations
faites par les auteures pour transformer le maximum de fans en fans
Modèle montrent comment la connaissance des processus, quels qu’ils
soient, constituent toujours le préalable à une action en profondeur sur
les comportements.
La montée en puissance des médias sociaux pose la question de l’impact qu’ils peuvent avoir sur la réputation des entreprises. L’e-réputation a fait son
apparition et est devenue de plus en plus un centre de préoccupation
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
pour les entreprises car plus difficile à circonvenir. Quelle relation entretient dès lors l’e-réputation avec la réputation en général, les deux sontelles aussi éloignées que la littérature le prétend, ou est-il possible de les
intégrer ?
L’article intitulé « Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la
réputation : une approche par les médias sociaux », s’est intéressé au secteur du tourisme. Les auteurs montrent que, d’une part, l’e-réputation est
perçue comme un tout et que les entreprises ne peuvent donc pas s’engager sur un seul facteur ou sur quelques facteurs et que, d’autre part,
même si les points de convergence entre réputation et e-réputation sont
nombreux, on est face à deux réalités différentes, deux réalités pour
autant interdépendantes. La gestion de l’e-réputation nécessite donc des
stratégies différentes et, par là même, des outils différents. C’est un des
mérites de l’article que de donner des recommandations précises qui
seront utiles aux entreprises de plus en plus confrontées aux défis de l’eréputation et à ses conséquences. Dans la construction de leur e-réputation, les entreprises ne sont pas impuissantes pour autant qu’elles sont
en mesure d’en appréhender toutes les facettes. On comprendra aussi
que la gestion de l’e-réputation va être au centre de nombre de stratégies d’entreprise et, qu’à ce niveau, les entreprises auront de moins en
moins le droit à l’erreur.
Pour conclure et dans notre rubrique Fenêtre sur, l’article intitulé « Le brevet comme
instrument de veille technologique et d’innovation : une application au
secteur automobile » révèle comment l’attention portée aux brevets des
tiers peut être bénéfique tant pour les performances générales de l’entreprise que pour sa propension à innover.
Comme le souligne l’auteur, il ne faut jamais perdre de vue qu’avant d’être un instrument juridique, le brevet est « une véritable source d’informations
scientifique et technologique » et que l’information ainsi captée peut
déboucher sur de l’innovation. De ce point de vue, le brevet ne doit plus
être considéré comme un seul output mais comme un input fondamental, nécessaire à la réalisation de stratégies fondées sur la performance et
l’innovation. Dans cette perspective, il intéresse les sciences de gestion.
Enfin, la veille technologique appliquée aux brevets aide à la résolution des problèmes auxquels sont confrontés les industriels et ce n’est pas le
moindre de ses mérites.
En vous en souhaitant une bonne et fructueuse lecture.
Jean-Claude Pacitto
Rédacteur en chef adjoint de la RFM
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
PRÉSENTATION DES PRIX
DANS LES CATALOGUES
DE JOUETS
ET TRAITEMENT COGNITIF
DES PRIX INDUITS
CHEZ LES ENFANTS
Coralie DAMAY(1)
Enseignante-chercheur de Marketing,
ISC Paris
Nathalie GUICHARD(2)
Maître de conférences – HDR,
Laboratoire PRISM-Sorbonne,
Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
Les auteures remercient Annie Llorca, Directrice de l’Observatoire des Enfants et des Jeunes, pour l’entretien
qu’elle nous a accordé et pour avoir ainsi partagé son expertise sur la conception des catalogues de jouets.
Résumé
Dans cette recherche, nous nous intéressons aux différentes présentations de prix dans des catalogues de
jouets. Nous nous focalisons tout d’abord sur le processus de « rédaction » de la liste de Noël chez les enfants
et, en particulier, leur recours au catalogue et aux prix qu’il comporte. Une analyse circonstanciée de l’affichage des prix dans ces différents supports permet ensuite de déterminer les processus cognitifs induits chez
les enfants suivant les différentes techniques de présentation des prix.
Mots clés : Enfant - Prix - Catalogue de jouets - Traitement cognitif - Noël.
PRICE DISPLAY IN TOYS CATALOGUE AND
CHILDREN’S COGNITIVE PROCESS DUE TO THIS PRESENTATION
Abstract
This research deals with the different ways to present price in a sample of toys’ catalogues. It first
focuses on the writing process of Christmas list by children and more precisely on their use of catalogues.
If they use catalogues we wonder if children pay attention to prices. Secondly, an elaborate analysis of price
display in catalogues allows determining cognitive processes infer on children depending on the various
price presentation technics.
Key w or ds : Children - Price - Toys catalogue - Cognitive process - Christmas.
(1)
Courriel : [email protected]
(2)
Courriel : [email protected]
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ADETEM
sir la vitesse de transmission de l’information. En
particulier, chez les plus jeunes enfants, les médias
imprimés favorisaient la connaissance et la restitution des prix (Stephens, Moore, 1975). Le catalogue
de jouets est, de surcroît, un support particulièrement
impliquant, notamment à l’approche du 25 décembre.
INTRODUCTION
Si la situation de crise que connaissent de nombreux pays européens affecte incontestablement les
dépenses des consommateurs, la Fédération
Française du Jouet confirme la bonne santé du secteur du jouet en France(3). Les jouets apparaissent
ainsi comme une catégorie de produits préservée
que les consommateurs-adultes ne sont pas encore
prêts à sacrifier et la période de Noël est, à cet égard,
un moment crucial pour l’activité du secteur(4).
L’enfant, cible directe de cette catégorie de produits(5), est depuis longtemps au cœur de différents
travaux de recherche, tant son rôle d’acteur économique est aujourd’hui indiscutable (McNeal, 1992 ;
Roedder John, 1999 ; Brée, 2012). Pourtant, parmi
l’ensemble des études consacrées à cette cible particulière, celles qui concernent sa relation au prix ne
sont pas légion et sont, pour la plupart, relativement
récentes (Damay, 2008 ; Damay, Guichard et
Clauzel, 2011).
La complexité croissante des stratégies de prix
des entreprises ciblant les adultes(6) invite à s’interroger sur la façon dont cette variable est considérée
lorsque ces dernières visent plus particulièrement les
enfants. Plus précisément, différents travaux (e.g..
Schindler, Wiman, 1989 ; Schindler, Kirby, 1997 ;
Gueguen, Legoherel, 2004) ont permis de mettre en
exergue l’impact de la présentation des prix (prix
rond versus avec décimales, différentes terminaisons
du prix) sur l’image qu’ils renvoient et leur impact
sur la demande. Or, si l’attitude des enfants à l’égard
de différents formats de prix a déjà été envisagée en
recherche marketing (Damay, Guichard et Clauzel,
2011), le traitement de l’information-prix des catalogues n’a, lui, pas été considéré.
Or l’enfant, parce qu’il est aujourd’hui de plus
en plus souvent en prise directe avec des situations
d’achat variées, est exposé à de nombreuses informations commerciales, dont le prix. Parmi ses différentes occasions d’être confronté à cette information
numérique, la lecture du catalogue de jouets est sans
doute l’un des moments privilégiés. Pour les jeunes
enfants, le catalogue, contrairement aux spots publicitaires télévisés, « constitue un support tangible »
(Elmanssouri, 2010). L’enfant peut feuilleter le catalogue et traiter l’information qui y figure à son rythme, sélectionner des images, les découper, etc. Si le
catalogue de jouets pâtit des mêmes défauts que la
presse magazine adressée aux enfants qui « offre
beaucoup moins de possibilités d’exécution (statique
versus dynamique, muet versus sonore…) que la télévision » (Guichard, Pécheux, 2012), il est un pourvoyeur d’idées et sert de matériau à l’élaboration de
nombreuses lettres envoyées au Père Noël. Le catalogue de jouets, comparé au magasin par exemple,
permet à l’enfant d’avoir une vision holiste et synthétique de l’offre produits de l’enseigne et il est,
quel que soit son format, facilement manipulable
et/ou transportable. Les linéaires des magasins,
même s’ils apportent leur lot de rêves aux enfants,
par l’exposition directe avec les packagings des
jouets, ne permettent pas une telle synthèse. Par
ailleurs, les médias de l’écrit permettent une élaboration cognitive plus grande car le lecteur peut choi-
Si la plupart des catalogues de produits ne
ciblent pas les enfants, ceux de jouets les concernent
au premier chef – principalement les enfants de
maternelle et de primaire(7) –, notamment à l’approche de la fête de Noël. Ces catalogues sont nombreux et divers tant dans leur format que dans leur
contenu. Parmi les nombreuses informations qu’ils
renferment, figurent fréquemment les prix, présentés
de manière non uniforme. Dès lors, il est légitime de
s’interroger sur ce que cette présentation hétérogène
(3)
En 2011, 243,3 millions de jouets ont été achetés en France (+3 %
versus 2010), soit un marché total de 3,329 milliards d’euros (+5%
versus 2010) (source : fjp.fr/actus/actualites).
(4)
Les Français dépensent en moyenne 242 € par an et par enfant de
moins de 15 ans. Le quatrième trimestre 2011 a représenté 60 %
des ventes de l’année (source : fjp.fr/actus/actualites).
(5)
Plus de 12 millions d’enfants de moins de 15 ans en France, 34 %
sont âgés de 7 à 11 ans.
(6)
« Les prix n’ont plus de valeur », Enjeux Les Échos, février 2010, p.
24-30.
(7)
Considérant que le traitement du prix ne s’opère que lorsque l’enfant a appris les nombres, notre travail concerne les enfants de
primaire (6-11 ans).
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Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
génère comme mode de traitement du prix chez les
enfants, notamment en termes de difficultés des
tâches cognitives requises. L’identification de ces
processus devrait permettre de mieux comprendre
comment les prix sont potentiellement traités par les
enfants et la place qu’ils peuvent dès lors prendre
dans leurs choix. De surcroît, le rapport enfant-prix
qu’instaure le distributeur via le catalogue joue vraisemblablement un rôle dans la construction de l’image-prix de l’enseigne aux yeux des enfants. L’étude
devrait également permettre de proposer des pistes
aux managers pour l’élaboration de leurs catalogues
du point de vue de l’information-prix.
LE CADRE CONCEPTUEL
DE LA RECHERCHE
Le prix chez les enfants
L’ensemble des recherches n’aboutit pas à des
résultats concordants sur le rôle dévolu aux prix par
les enfants lors de leur processus d’achat (i.e. Mc
Neal, 1992) ni sur leur niveau de connaissance des
prix (e.g. Stephens, Moore, 1975). La majorité d’entre
elles cependant, notamment les plus récentes, permet de conclure à une prise en compte de cette
information lors du processus de choix des enfants,
plus ou moins déterminante selon différents de scénarios (variant suivant le destinataire, la source d’argent…) et à une relative connaissance des prix par
les plus jeunes (Damay, Guichard, 2007 ; Damay,
2008).
Dans ce contexte, et afin d’appréhender le traitement du prix dans les catalogues de jouets par les
enfants, une première étude, de nature exploratoire,
a été conduite afin d’étudier le processus de « rédaction » de la liste de Noël chez les enfants de primaire. Il s’agissait de vérifier, dans ce processus, le
recours par les enfants au catalogue, d’une part, leur
utilisation d’informations – notamment les prix –
figurant dans ces supports, d’autre part. Une étude
portant sur les prix dans les catalogues pour enfants
n’est en effet pertinente que si cette information est
d’une façon ou d’une autre mobilisée par les enfants
lors de la construction de la liste. Dans un deuxième
temps, nous avons mené une analyse circonstanciée
de la présentation des prix dans différents catalogues
de jouets, pour tenter de déterminer les processus
cognitifs induits, chez les enfants, par les différentes
techniques de présentation des prix.
Le traitement cognitif des prix induit
par leur forme et leur terminaison
Les recherches qui portent sur le traitement des
prix par le consommateur concernent principalement l’adulte. Mais, elles méritent d’être présentées
car elles permettent une première compréhension
des processus cognitifs liés au traitement des prix.
Différents chercheurs se sont intéressés au traitement des prix par le consommateur en fonction de
leur forme (ronde ou décimale) et de leur terminaison, prenant appui sur le constat d’une surreprésentation des terminaisons en 0, 5 et 9 dans les prix
observés (e.g. Martin, Védrine, 1991 ; Schindler,
Kirby, 1997). Il semble ainsi que la terminaison du
prix ne soit pas neutre dans le traitement des prix.
Selon Schindler et Wiman (1989) en effet, les individus font davantage d’erreurs de rappel quand le prix
se termine par 9 que lorsqu’il se finit par 0. Les
répondants ont, en outre, tendance à produire
davantage de prix à terminaison nulle dans leur
tâche de rappel.
L’article comporte une première partie qui présente de façon synoptique les résultats des principaux travaux relatifs à la relation au prix des enfantsconsommateurs. Elle évoque également la diversité
des traitements cognitifs induits par des présentations différentes du prix (typographie, terminaison…). Ce premier développement est aussi l’occasion de souligner la place particulière de la liste de
Noël dans la vie de l’enfant-consommateur et de présenter les travaux qui ont porté sur les catalogues de
jouets. La deuxième partie de l’article expose la
méthodologie adoptée pour cette recherche tant lors
de la phase exploratoire, que lors de l’étude des
catalogues. La présentation des résultats et leur discussion font l’objet des deux parties suivantes.
L’article se termine par l’évocation des principales
limites, des voies de recherche et des implications
managériales qui découlent de l’étude.
Les effets du format des prix sur la propension
des consommateurs à acheter les produits (que ce
soit en termes d’intention d’achat ou d’achat effectif)
ne sont pas attestés et les résultats des recherches ne
sont pas convergents (e.g. Ginzberg, 1936 ; Wagner,
Beinke, 2006). Selon Schindler et Kibarian (1996),
une terminaison en 99 d’un prix de forme décimale
conduirait à une augmentation des ventes compara-
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tivement à une terminaison en 00 alors qu’un prix se
terminant par 88 ne produirait aucune différence
significative.
mieux comprendre le traitement de cette variable
par les enfants. Une étude récente (Damay,
Guichard et Clauzel, 2011) a par ailleurs montré que,
conformément aux présupposés issus des travaux de
cognition numérique, les enfants préfèrent les prix
ronds ou les terminaisons en 00 lorsque les prix ont
une forme décimale.
D’autres travaux ont permis d’identifier un lien
entre la présentation du prix et l’image qu’il produit
(Schindler, 2006). La mémorisation d’une terminaison en 0 étant plus simple, elle entraîne une perception plus favorable de l’offre et peut, dès lors,
conduire à la formation d’un prix de référence. Une
terminaison en 9 induit, quant à elle, soit une perception du prix plus basse que ce qui était attendu
par le consommateur (Schindler, Kirby, 1997), soit
une association aux soldes (Hawkins, Hoch, 1992).
Le catalogue et la liste
de Noël des enfants
Choisir le catalogue de jouets comme matériau
d’études du traitement des prix par les enfants
amène à considérer les travaux de recherche qui ont
porté sur les pratiques de consommation liées à la
période de Noël d’une part, au contenu des catalogues d’autre part.
Par ailleurs, la métaphore de la ligne mentale
numérique a été mobilisée dans différentes
recherches pour décrire le processus automatique au
cours duquel le nombre est d’abord considéré dans
son intégralité puis transformé en une quantité
approximative située sur une ligne de forme logarithmique (Dehaene, 1992)(8). En conséquence, les
nombres sont traités de manière approximative, et ce
d’autant plus qu’il s’agit d’un nombre élevé
(Dehaene, Marques, 2002). Ce concept, issu de la
cognition numérique, est ainsi mobilisé pour tous les
nombres, y compris les prix (Dehaene, Marques,
2002 ; Damay, 2008).
Au sein du premier groupe de ces recherches,
certaines ont ainsi permis d’élaborer des typologies
de cadeaux reçus à Noël, notamment selon le développement cognitif de l’enfant (Schaaper, 2006). La
constitution de la liste de Noël, activité à laquelle de
nombreux enfants s’attèlent avec bonheur, a également été appréhendée en tant que moment clé de
cette période, que ce soit sous l’angle expérientiel
ou sous celui des compétences, variables, de l’enfant-consommateur (Ezan, Roederer, 2006). Dans
une perspective plus managériale, l’analyse structurelle des listes de Noël permet de mieux comprendre
les représentations du Père Noël et de proposer « des
actions commerciales respectueuses de l’imaginaire
et des valeurs de l’enfant » (Roederer, 2008).
Enfin, la culture occidentale conduit à adopter
un sens de lecture de gauche à droite. Cette imprégnation culturelle, qui débute dès l’enfance, n’est
évidemment pas neutre dans notre façon de lire les
prix : elle induit qu’une attention plus grande est
portée au(x) premier(s) chiffre(s) d’un nombre
(Thomas, Morwitz, 2005). Par extension, l’attention
accordée à la partie entière d’un prix de forme décimale est plus élevée et sera ainsi mieux mémorisée
(Guéguen, Legoherel, 2004).
Le second groupe de ces recherches est centré
sur les catalogues de jouets. De nombreuses études
en sociologie et psychologie ont ainsi eu pour objet
d’étudier le contenu des pages, principalement sous
l’angle de la sexualisation des enfants par les jouets
et la représentation sociale des deux sexes (e.g.
Chaumier, 2004). En marketing, c’est l’attitude des
enfants à l’égard du catalogue qui a été envisagée du
point de vue des préférences à l’égard des marques
de jouets (Elmanssouri, 2010). Le prix, en tant que
tel, a rarement été considéré, encore moins dans le
contexte de la liste de Noël. Ainsi, l’étude sur les
Le traitement de l’information-prix
chez les enfants
selon leur présentation
De nombreux chercheurs (à l’instar de Piaget et
Inhelder (1966)) ont souligné la place prépondérante de la perception visuelle chez les enfants, notamment les plus jeunes. Cette prégnance des caractéristiques visuelles chez la population enfantine a
déjà été mise en parallèle avec la constitution numérique des prix (Damay, 2008) ; elle a ainsi permis de
(8)
Des recherches, à l’instar de Chillier (1999), ont permis d’attester
l’existence de cette ligne chez les plus jeunes ; elles soulignent
cependant que la ligne mentale des enfants est plus compressée
que celle des adultes.
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Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
Tableau 1
Composition de l’échantillon des enfants(9)
CP
Filles
Garçons
2
CE1
1
1
CE2
1
1
CM1
1
CM2
2
2
aux enfants qui avaient pour seule instruction de
réaliser leur liste de Noël. En particulier, la consultation des catalogues n’était pas imposée. La durée de
l’exercice a fortement varié selon les enfants : de 10
mn à 2 h 30 sans que l’on puisse établir de lien entre
l’âge et le temps de réalisation de la liste.
catalogues de jouets de Noël menée par FèvrePernet (2005), qui vise à mettre au jour les mécanismes de la communication persuasive dans ces
supports, passe en revue l’ensemble des productions
polysémiotiques (textes + images) des catalogues
mais occulte totalement le prix. Ezan et Roederer
(2006) soulignent cependant que les enfants sont
aujourd’hui bien informés et qu’il n’est pas rare qu’ils
comparent les prix des différents catalogues entre
eux.
Pendant cette activité, les enfants n’étaient pas
contraints au silence. Bien au contraire, ils pouvaient
à tout moment faire partager les idées qui leur traversaient l’esprit lors de la constitution de la liste. Les
chercheurs s’appuyaient sur ces déclarations spontanées pour approfondir le processus d’élaboration de
la liste. Par ailleurs, un petit guide d’entretien, comportant 6 questions, permettait de compléter les
commentaires des enfants et d’expliciter les raisons
de leurs choix. Aucune question du guide ne portait
spécifiquement sur le prix. Cette variable n’a été
abordée qu’à l’initiative des enfants.
MÉTHODOLOGIE
Notre recherche comporte deux étapes. Dans un
premier temps, une étude exploratoire qualitative a
été conduite afin de comprendre les éléments pris en
compte par les enfants lors de l’élaboration de la liste
de Noël. À cet effet, onze enfants de primaire âgés de
6 à 11 ans (tableau 1) ont été invités à l’approche de
Noël 2011 à établir la liste des jouets qu’ils souhaitaient recevoir puis à la décrire et à la commenter.
Dans un second temps, nous avons étudié la
présentation des prix dans vingt catalogues de jouets
afin de faire émerger plus spécifiquement les processus induits par des approches de prix variées.
Nous avons ainsi procédé à une analyse de contenu
de différents types de catalogues de jouets pour
enfants édités pour Noël 2011 correspondant à différents formats de magasin situés en Ile de France,
ou à des fabricants de jouets (tableau 2).
La borne supérieure de cette tranche d’âge se
justifie par le fait qu’une fois entrés au collège, les
enfants voient leurs goûts évoluer et considèrent une
palette de produits sans doute plus large que la
simple catégorie « jouets ». Le procédé de la liste de
Noël pour manifester ces vœux est alors moins
mobilisé. En sens inverse, il apparaît qu’en dessous
de 5-6 ans, les enfants sont encore trop « petits » pour
concevoir une liste renseignée, c’est-à-dire recourant
à des éléments textuels (nom du produit, âge requis,
prix…) car cet exercice suppose de savoir à peu
près lire et écrire. Ils peuvent certes se faire aider
mais la rédaction de la liste est alors sans doute moins
spontanée du fait de l’intervention d’un adulte.
Une grille d’analyse a été constituée par les
chercheurs à l’issue d’une première lecture de l’ensemble des catalogues. Cette grille a ensuite servi de
base à une analyse systématique – menée individuellement par chacun des chercheurs – de la présentation des prix dans chacun des catalogues. Les
analyses ont ensuite été comparées, complétées le
cas échéant, puis fusionnées afin de disposer d’un
matériau unique.
Pour constituer leur liste, les enfants avaient à
leur disposition différents catalogues de jouets, des
feuilles blanches, des feutres, des ciseaux, de la
colle… Une totale liberté de réalisation était donnée
(9)
Seuls un garçon en CP et un garçon en CE1 croyaient encore à
l’existence du Père Noël.
9
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ADETEM
Tableau 2
Origine des catalogues étudiés
ENSEIGNES
Grands distributeurs
Auchan, Monoprix, E. Leclerc, Carrefour
Grands magasins
Le Bon Marché, BHV, Galeries Lafayette
Enseignes spécialisées
La Grande Récré, Oxybul Éveil et Jeux, Joué Club, Nature &
Découvertes, FNAC
Enseignes moyennes
123 familles, Le petit bonhomme de bois
MARQUES
Fabricants de jouet
Lego, Playmobil, Djeco, Schleich, Papo, Sylvanian Families
recherche : les prix.
Cette grille comprend un premier thème relatif
à la description des catalogues (taille, volume,
nombre et intitulés des univers, couleurs des
rubriques et des pages, etc.). S’agissant des prix, une
première arborescence distingue les catalogues suivant le type d’affichage : classes de prix versus prix
précis. Sont ensuite reportées dans la grille toutes les
caractéristiques de leur présentation. Dans le cas des
prix présentés sous forme de fourchettes, tous les
éléments constitutifs de ces classes de prix sont
répertoriés : nombre de classes, amplitude, format et
terminaison des limites inférieures et supérieures,
nature de la légende, couleurs, etc. Le même travail
d’inventaire a été réalisé sur les prix précis : emplacement dans la page et position par rapport au
visuel du jouet, nombre de produits/prix par page,
taille de police, couleur du prix versus couleur du
fond le cas échéant, format, terminaison, place du
signe €, taille respective des parties entières versus
décimales, juxtaposition éventuelle de plusieurs prix,
différences possibles de polices entre le descriptif du
jouet et le prix.
Il faut tout d’abord souligner que tous les
enfants (qu’ils croient encore ou non au Père Noël)
ont établi leur liste de Noël comme un exercice
allant de soi. Aucun enfant n’a paru contraint et
chaque enfant s’est plié à l’exercice avec plaisir.
Tout d’abord, l’analyse des résultats fait émerger trois types de relation au prix lors de l’élaboration de la liste de cadeaux. Un premier groupe d’enfants ne semble pas concerné par cette variable
(aucune mention orale, aucune indication écrite
dans leur liste). Un deuxième groupe évoque les
prix lors de la sélection de produits mais ne les
signale pas dans sa liste. L’information est recherchée et certains produits sont même comparés sur la
base de cette variable : « c’est un peu bizarre que les
talkies walkies coûtent aussi cher que le télescope.
Normalement, un télescope ça coûte plus cher »
(G(10). CM2). Mais, au final, aucune mention de prix
ne figure sur la liste une fois achevée : « je mets pas
les prix, je regarde pas vraiment les prix mais je me fais
une idée dans ma tête. Je me dis c’est pas trop cher car
une copine m’a déjà offert presque le même » (F. CM2).
Enfin, le dernier groupe d’enfants évoque les prix
lors de la réalisation de la liste et les fait figurer sur
la liste en les découpant avec la photo du produit
qui les intéresse ou en les écrivant : « J’entoure et
marque le nom de la chose et ensuite j’écris et je mets
LA PLACE DU PRIX
DANS LA LISTE DE NOËL
L’étude exploratoire a permis de collecter un
grand nombre de données, les enfants étant plutôt
diserts concernant Noël et ses préparatifs, parmi lesquels figure la liste de Noël. Nous ne mentionnons
ici que ceux ayant directement trait à notre sujet de
(10)
G. pour garçon et F. pour fille.
10
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Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
fie alors sur la légende (de 75,01 à 100 €). Au cours
de l’exercice, il s’est en effet plusieurs fois reporté à
la légende et il est capable de préciser immédiatement qu’elle se situe « page 7 ». Un autre enfant (garçon de CE2) va s’étonner de l’absence de mention
des prix au sein de certains catalogues « Dans Lego
il y a pas les prix… ! » démontrant ainsi l’importance
que revêt cette information à ses yeux.
le prix » (G. CE2).
Le deuxième résultat est que la plupart des
enfants ont mentionné, d’une façon plus ou moins
explicite, une forme de contrainte budgétaire, y
compris ceux qui croient encore à l’existence du
Père Noël : « je vais faire plaisir au Père Noël, je vais
pas en prendre hyper beaucoup. Ça c’est trop énorme, je peux pas le prendre (…) ça va être trop dur
pour le Père Noël, il y a trop de choses » (G. CE1).
Chez les enfants qui ne croient pas au Père Noël, ce
sont les parents qui sont évoqués, soit comme censeurs, soit comme décideurs ultimes : « Je mets ce qui
me plait le plus et pas trop cher. Je les mets et après
maman me dit on verra » (G. CE2).
L’ensemble des résultats de cette étude exploratoire confirme que cette variable sert d’une manière ou d’une autre à une majorité d’enfants lors de
l’élaboration de leur liste de Noël. Certes, la mention
des prix n’est-elle pas toujours apparente dans les
listes mais l’information-prix est incontestablement
saillante pour nombre d’entre eux (ne serait-ce qu’en
termes de contrainte budgétaire). Ces premières
conclusions justifient de s’intéresser au traitement
des prix figurant sur les catalogues par les enfants.
Deux approches du prix doivent être distinguées selon le type de liste, longue ou réduite.
Certains enfants élaborent une liste qui comporte un
ensemble de propositions dans lequel les cadeaux
offerts seront piochés. L’enfant ne s’attend pas à
obtenir l’intégralité de sa liste. Dès lors, c’est la
valeur unitaire de chaque produit qui est considérée
« je ne sais pas si je le prends car il coûte vraiment
cher » (G. CM1). D’autres enfants construisent une
liste plus réduite avec l’espoir qu’elle sera parfaitement respectée. C’est alors le niveau de prix global
qui est évalué : « Sur ma liste j’ai mis moyen, entre
deux et trois, parce que je sais que le « Père Noël » ne
va pas m’apporter tout ce que je mets. Mais si j’en
mets moins, peut-être qu’il va tout m’apporter » (F.
CM2).
Une cacophonie
dans la présentation des prix
L’analyse de contenu des catalogues menée
dans un deuxième temps permet de constater l’absence d’harmonie dans l’affichage des prix inter catalogue. Mais, avant d’aller plus avant, une première
observation permet de remarquer qu’ils diffèrent
tous selon deux variables : leur taille (de 13,8 x 21
cm à 21 x 29,5 cm) et leur volume (de 23 à 730
pages). Si les catalogues sont fréquemment scindés
en univers fondé sur l’âge des enfants, certains
adoptent d’autres découpages basés sur le sexe du
destinataire du jouet ou encore sur la nature des jeux
présentés, voire superposent deux ou trois classements. Le nombre de jouets présentés au fil des
pages est également sujet à variation. Aucune règle
ne semble non plus dominer quant à la couleur des
pages du catalogue. Certaines enseignes optent pour
des pages blanches ou majoritairement blanches, sur
lesquelles les produits se distinguent aisément. Pour
d’autres, c’est la couleur de l’univers de référence
qui prime. Les pages apparaissent de fait parfois
avec un fond uni parfois avec un fond dégradé. Au
final, le design des pages est plus ou moins clair et
le contenu en termes d’informations des pages plus
ou moins chargé.
Finalement, différentes réactions spontanées
relatives au prix ont été relevées chez certains
enfants, démontrant un intérêt pour cette variable, et
notamment pour sa présentation. À titre d’exemple,
un garçon de CM1 s’interroge sur la multiplicité des
prix indiqués pour un produit : « cela veut dire quoi
cagnotte déduite(11) ? ». Lorsque l’enquêteur lui
demande la raison de cette question, il répond : « Je
regarde pas tout de suite les prix mais après quand je
vais regarder les prix j’ai besoin de savoir lequel
mettre ». Un autre enfant (garçon de CM2) indique
explicitement avoir intégré la présentation sous
forme de fourchettes de certains catalogues. Ainsi,
lorsque pour rebondir sur ses propos, l’enquêteur
l’interroge sur le prix du jouet – qu’il semble hésiter
à inscrire sur sa liste – sa réponse fuse : « 75 € ».
Quand des précisions lui sont alors demandées sur
l’origine de cette information il répond « G ». Il véri-
D’une façon globale, les fabricants de jouets
(11)
Dans le catalogue Auchan.
11
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ADETEM
Tableau 3
Synthèse des catalogues dans lesquels les prix sont présentés sous forme de fourchette
Organisation
du catalogue
Type de légende
Position
de la légende /
récurrence
Nombre
et amplitude des
classes de prix
171 pages
5 univers
Présentée sous
forme de tableau
9 lettres (A à I)
59 pages
5 univers
Formes étoilées de En bas de chaque
couleurs différentes page de gauche
sous les noms des
jouets et leurs descriptifs
5 classes :
. - 15 €
. de 15 à 30 €
. de 30 à 50 €
. de 50 à 75 €
. 75 € et plus
Galeries Lafayette 65 pages
4 univers
Icônes de couleurs Une fois par double
différentes
page (le plus souvent en bas de la
page)
5 classes :
. - de 15 euros
. de 15 à 30 euros
. de 30 à 50 euros
. de 50 à 75 euros
. de 75 euros et +
La Grande Récré
Le BHV
Monoprix
31 pages
7 univers
1ère page gauche de 9 classes :
chaque
univers, . de 0 à 15€
(soit à 5 reprises)
. de 15,01 à 25€
. de 25,01 à 35€
. de 35,01 à 45€
. de 45,01 à 60€
. de 60,01 à 75€
. de 75,01 à 100€
. de 100,01 à 125€
. + de 125€
Disques de couleurs En bas de chaque 4 classes :
. moins de 15 €
différentes
page gauche
. entre 15 € / 25 €
. entre 25 € / 40 €
. plus de 40€
enseignes appartenant au même groupe (à l’instar de
Monoprix et des Galeries Lafayette).
(tels Lego ou Playmobil(12)) ne font jamais mention
des prix dans leurs propres catalogues, ce qui
semble logique du fait de la différence de prix qui
découle de la diversité des canaux de distribution de
leurs produits. En effet, la présentation des prix, lorsqu’elle existe, ne semble pas relever d’une habitude
liée aux formats et aux natures d’enseigne mais plutôt d’un choix propre à chacune d’elles. On trouve
donc tout aussi bien des fourchettes de prix ou des
prix précis dans les différents formats d’enseignes
(magasin de jouets, distributeur…). On remarque
seulement une présentation assez proche chez les
L’affichage des prix
sous forme de classes
L’analyse des catalogues qui expriment les prix
sous forme de fourchettes permet de constater l’ab(12)
Le catalogue Playmobil comporte un catalogue intérieur dans
lequel figurent les articles complémentaires et leur prix, voir plus
loin dans l’encadré.
12
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Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
sont variables d’un catalogue à l’autre mais, dans
tous les cas, le prix dispose le plus souvent d’une
police d’une taille plus importante que la description
du jouet et les diverses informations qui l’accompagnent (jamais de taille moindre).
sence de consensus dans les approches (tableau 3).
Dans certains cas, la fourchette est matérialisée par
des lettres majuscules, d’en d’autres par des icônes
colorées, plus ou moins figuratives. L’emplacement
même de la légende n’est pas constant : il peut varier
selon les pages au sein d’un même catalogue et
n’apparaît pas avec la même fréquence dans tous les
catalogues. Le nombre de classes dans la légende
change également d’un catalogue à l’autre et l’amplitude des fourchettes de prix n’est pas non plus
identique, au sein d’une même légende et selon les
catalogues ; elle est généralement croissante à mesure que les prix augmentent mais, là non plus, pas de
façon systématique. La plupart des catalogues ont
recours à des limites de classes entières, excepté La
Grande Récré qui utilise une forme décimale pour la
limite inférieure de la classe. La légende peut apparaître d’une couleur uniforme (en noir par exemple)
ou changer suivant les classes de prix : elle peut
alors être rédigée en noir, seule l’icône figurant
chaque classe change de couleur, ou encore varier
de couleur à chaque classe.
S’agissant du format des prix, on observe là
encore des variations d’un catalogue à l’autre. Si tous
les catalogues cumulent des prix de forme ronde et
de forme décimale, cette dernière l’emporte largement. Certains catalogues n’adoptent pas la même
taille de police pour la partie entière du prix et sa
partie décimale, cette dernière étant plus petite.
Le visuel du prix est aussi variable selon les
enseignes : dans certains cas, le signe € apparaît
entre la partie entière et la partie décimale, d’en
d’autres à la fin, exceptionnellement en début.
Finalement aucune harmonie ne se dégage quant à
la terminaison des prix, qu’ils soient de forme ronde
ou décimale, si ce n’est un recours plus fréquent
(quantitativement variable suivant les catalogues)
aux terminaisons 0, 5 et 9.
L’affichage de prix précis
L’analyse des catalogues qui ont recours à des
prix précis (tableau 4) conduit elle aussi à constater
l’absence totale de concordance entre les enseignes.
Chacune opte pour un style de présentation unique.
UNE COMPLEXITÉ DES TÂCHES
COGNITIVES REQUISES
POUR TRAITER LES PRIX
L’absence d’harmonisation de la présentation
de la tarification relevée lors de l’analyse de ses différents catalogues amène à un premier constat : les
enfants qui ont recours à plusieurs catalogues pour
constituer leur liste ne peuvent pas capitaliser sur
une première expérience de traitement des prix
puisque chaque catalogue est une nouveauté de ce
point de vue. Par ailleurs, la tarification des jouets
présentée sous forme de fourchette ou suivant des
prix précis n’implique pas le même type de traitement chez les enfants.
La présentation des prix peut être abordée suivant les éléments graphiques qui les constituent ou
les accompagnent, leur format et leur terminaison
mais également suivant le nombre d’informations
auquel se trouve confronté l’enfant et qu’il a à traiter, parmi lesquelles le prix.
Tous les catalogues diffèrent sur leur façon de
mobiliser les éléments graphiques pour « dessiner »
leurs prix. Certains catalogues optent pour une couleur unique de prix (le noir par exemple), d’autres
pour une couleur des prix en accord avec la couleur
de l’univers auquel appartiennent les jouets considérés, d’autres enfin ont recours à différentes couleurs
pour signifier les prix sans logique apparente.
Finalement, certains catalogues font apparaître le
prix sur un fond, de forme variable (étoile, carré,
etc.) et de couleur différente, plus ou moins contrastante avec celle du prix.
Les processus cognitifs induits
par des prix sous forme de fourchette
Le recours à une présentation des prix sous
cette forme pose un certain nombre de questions
s’agissant d’une cible enfantine. Tout d’abord, l’absence de prix à proximité du jouet détourne l’attention de l’enfant des problématiques financières et
concentre son attention sur le jouet lui-même. En ce
sens, cette pratique permet de supposer que l’infor-
Les polices dans lesquelles sont écrits les prix
13
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Tableau 4
Synthèse des catalogues dans lesquels les prix apparaissent précisément
Informations
générales
Playmobil
(articles
complémentaires)
Oxybul Éveil
et Jeux
34 pages
23 univers
241 pages
12 univers
Joué Club
730 pages
30 univers
1. 2. 3. Famille
97 pages
9 univers
Le bonhomme
de bois
65 pages
14 univers
Nature &
Découvertes
108 pages
3 univers
FNAC
Le Bon Marché
Carrefour
Auchan
E. Leclerc
23 pages
4 univers
10 sous univers
62 pages
4 univers
111 pages
7 univers
91 pages
4 univers
24 sous univers
91 pages
9 univers
Prix avec décimales
Prix ronds
(les lettres X, Y, W, Z peu- (les lettres X, Y, W, Z peuvent, pour
vent, pour certains prix, être certains prix, être similaires)
similaires)
Forme majoritaire
« € XY,00 »
Pas de terminaison particulière
« € XY,WZ(13) »
Terminaisons majoritaires 90, 50
Forme majoritaire
« XY€,WZ »
« XY € »
Partie entière légèrement plus grande
que la partie décimale
Terminaisons majoritaires 50, 90, 99
« XY € »
« XY,WZ € »
Partie entière plus importante que partie décimale
« XY € »
Forme majoritaire
Terminaisons majoritaires 0, 5
« XY,WZ € » ou « XY,WZ € »
« XY € »
Forme majoritaire
Terminaisons majoritaires en 0, 5
« XY,WZ € »
Terminaisons majoritaires 9, Forme majoritaire
5
Terminaisons majoritaires 95
« XY € »
« XY,WZ€ »
Terminaison majoritaire 9
Forme majoritaire
« XY € »
Majoritairement terminaisons 0, 9, 5
« XY€wz »
Forme très majoritaire
Majoritairement terminaison en 0
Terminaisons majoritaires 0, « XY,WZ € »
5 et 9 pour prix supérieurs à
10 €
« XY € »
Terminaisons majoritaires 0, Forme majoritaire
5, 9
Partie entière plus importante que par« XY € »
tie décimale
Majoritairement terminaisons 0, 5, 9
« XY€WZ »
Terminaisons majoritaires 0, Forme très majoritaire
5, 9
Terminaisons majoritaires 0, 5, 9
€
« XY € »
XYWZ
»
Partie entière plus importante que partie décimale
« XY € »
Forme très majoritaire
Terminaisons majoritaires 5, 0
« XY€,WZ »
Partie entière plus importante que partie décimale
(13)
Cette forme correspond à la présentation du prix dans le catalogue étudié.
14
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Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
mation s’adresse principalement aux parents.
Cependant, si l’enfant recherche cette information,
ce qui n’est pas exclu compte tenu de la place de
cette variable dans ses choix (Ezan, Roederer, 2006 ;
Damay, Guichard, 2007), sa tâche est parfois rendue
très complexe, notamment lorsque la légende des
fourchettes ne figure pas à toutes les pages. Dans le
catalogue de La Grande Récré par exemple, la légende ne figure que cinq fois dans l’ensemble du catalogue, à chaque début de rubrique. Un enfant qui
feuillette le catalogue de façon non linéaire, ce qui
est le cas le plus fréquent, peut ne jamais rencontrer
cette légende. Une présence à toutes les pages,
même si elle peut alourdir le design de la page, simplifie incontestablement le travail de recherche du
prix.
Guichard, 2007 ; Damay, 2008), c’est-à-dire leur
capacité à ordonner les produits en fonction de leur
prix. Les fourchettes aident à réaliser cette hiérarchisation tant qu’une trop grande précision n’est pas
recherchée.
Au-delà des éléments identifiants des classes, il
convient de considérer la présentation numérique de
ces fourchettes et les traitements cognitifs qu’elle
implique chez les enfants. Lorsque l’enfant
recherche un produit précis, il est alors confronté,
non pas à un prix mais à plusieurs suivant le nombre
de classes – soit au minimum 8 pour 4 classes – ce
qui alourdit sa tâche comparativement au traitement
d’un prix unique. En revanche, si l’enfant aborde le
catalogue avec une contrainte de budget à respecter,
la présentation des prix sous forme de fourchettes
peut lui simplifier le travail. En effet, son ensemble
de considération est restreint car il connaît la fourchette de prix en rapport à son budget et peut dès
lors s’en tenir aux jouets qui lui correspondent.
S’agissant de la représentation de la légende,
différentes pratiques cohabitent. Lorsque les classes
sont figurées par des lettres (l’ordre alphabétique
croissant évoquant des classes de prix croissant), la
logique de présentation devrait théoriquement aider
l’enfant. En pratique, cela suppose que l’enfant a
bien fait le lien entre la lettre majuscule à proximité
du visuel et la notion de prix, ce qui relève d’une
certaine maturité cognitive dont les jeunes enfants
ne disposent probablement pas. Une présentation
sous forme d’icônes colorées ne renvoie à aucune
logique sous-jacente mais peut finalement s’avérer
plus facile à traiter : l’enfant retenant par exemple
que le orange est lié à telle classe de prix abordable
et peut alors se concentrer sur cette couleur pour
faire son choix. Les parents peuvent également faire
une première lecture du catalogue et conseiller à
leur enfant, dès lors qu’une limite budgétaire est
imposée à la liste de Noël, de considérer uniquement les jouets assortis d’un éclair bleu ou d’une
étoile rouge (correspondant par exemple à des prix
inférieurs à 30 € dans le catalogue Galeries
Lafayette). Le recours à une forme imagée des prix
permet aussi aux plus jeunes de « concrétiser une
variable prix qui est encore souvent abstraite pour
eux » (Damay, Ezan, 2010). Si l’enfant s’impose luimême une contrainte financière qui correspond à ce
qu’il perçoit des limites budgétaires, cela l’aide à
identifier plus facilement les produits envisageables,
produit par produit (Damay, Ezan, 2010), sous réserve que sa contrainte coïncide avec la borne supérieure d’une des classes. Enfin, cette présentation
peut être rapprochée des travaux sur la connaissance relative des prix par les enfants (Damay,
Le recours aux bornes avec des prix ronds est la
présentation la plus fréquente dans les catalogues ;
c’est sans conteste une option recommandable car
les enfants préfèrent les prix ronds ou qui ont une
terminaison nulle (Damay, Guichard et Clauzel,
2011).
Les processus cognitifs induits
par une présentation de prix précis
L’absence de concordance dans les présentations de prix précis interroge sur les processus
cognitifs générés chez les enfants par telle ou telle
présentation et, en corollaire, pose la question de la
présentation la plus adaptée pour une cible enfantine.
Il apparaît d’abord que, dans la plupart des
catalogues, la police utilisée pour le prix est de taille
plus importante que la description du jouet et les
diverses informations qui l’accompagnent. De fait, le
prix est donc une information rendue plutôt visible
dans le catalogue. Il est probable que c’est ce qui est
recherché par les enseignes.
Bien que l’on constate d’importantes variations
quant au format des prix utilisé, la forme décimale
est la plus courante, alors même qu’elle est moins
facile à traiter pour les enfants (Damay, Guichard et
Clauzel, 2011). Très souvent dans ce cas, la partie
15
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Tableau 5
Impact de la présentation des prix sur différentes étapes de la constitution de la liste
Prix sous forme de classes
Repérage de l’information-prix
Prix précis
Complexe (d’autant plus si la Facile
légende ne figure pas sur toutes
les pages)
Comparaison des produits sur la Possible mais approximative (clas- Possible
base du prix
se à classe)
Choix
de
produits
contrainte budgétaire
sous Facile si la contrainte coïncide Possible mais requiert une confronavec la borne supérieure d’une des tation systématique du prix catalogue à la contrainte budgétaire
classes
Évaluation de la valeur globale Complexe car difficultés pour som- Possible et facilitée si les prix ont
une forme ronde
mer des classes de prix
de la liste
Mémorisation des prix
Nuit au rappel
Bonne connaissance relative
Favorise le rappel
des difficultés aux enfants. L’analyste lui-même peut
s’interroger sur le type de lecture du prix généré par
des positions différentes du signe € dans le prix. Si
la troncature du prix à la virgule (qui minimise l’impact de la partie décimale) est la plus courante
(Schindler, Kirby, 1997), la présence du signe € à des
endroits différents (en fin de prix ou entre les parties
entière et décimale) n’implique sans doute pas le
même traitement chez les enfants. Quoi qu’il en soit,
cette variation dans l’écriture du prix complique la
tâche des enfants et ne permet aucun apprentissage
utilisable d’un catalogue à l’autre.
entière dispose d’une taille de police plus importante que la partie décimale : l’attention est donc volontairement orientée sur la partie entière du prix. Or,
comme nous l’avons évoqué supra, influencé par sa
culture et le sens de lecture communément admis, le
consommateur occidental a tendance à accorder une
plus grande importance, voire à ne mémoriser que la
partie entière du prix (Guéguen, Legoherel, 2004 ;
Thomas, Morwitz, 2005). On peut donc supposer,
qu’à l’instar de leurs aînés, les enfants mémorisent
davantage la partie entière, d’autant plus si la partie
décimale est moins visible du fait d’une taille de
police plus modeste.
Le tableau 5 propose une vision synoptique de
l’impact de la présentation des prix (sous forme de
classes versus sous forme de prix précis) suivant différentes étapes de constitution de la liste.
Les terminaisons de prix 0, 5 et 9 apparaissent
les plus fréquentes dans les catalogues étudiés, à
l’instar de ce qui observé en magasin (cf. supra). Les
rares travaux de recherche sur cette question
concluent sur le plébiscite des enfants pour les prix
de forme ronde d’une part, de terminaison nulle
d’autre part, plus simples à traiter du point de vue
cognitif (Damay, Guichard et Clauzel, 2011). Si cette
simplification est effectivement intégrée par certains
catalogues, elle est loin d’être systématique (cf.
supra).
Implications managériales
À l’issue de cette analyse, il apparaît qu’aucun
mode de présentation des prix ne se dégage majoritairement, tant au niveau de la forme que du contenu des catalogues. À chaque lecture d’un nouveau
catalogue, c’est un recommencement pour l’enfant.
Il ne lui est pas vraiment possible de dégager une
quelconque expertise, si ce n’est d’une année sur
l’autre, puisqu’il semble que les formats de chaque
L’absence de standard sur la place du signe €
dans la présentation des prix peut également poser
16
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
enseigne soient reconduits. Cette cacophonie des
prix montre qu’aucune concertation n’a lieu entre les
différentes parties prenantes à l’univers du jouet.
Cette absence de constance dans la présentation des
prix se retrouve également dans certains catalogues.
Elle n’est sans doute pas à préconiser car elle
empêche les enfants de se constituer des repères au
sein d’un même catalogue.
l’affichage prix est moins contraint à une forte visibilité et peut être traité comme les autres informations fournies par le catalogue.
Le choix d’opter ou non pour une présentation
sous forme de classes de prix est en partie dicté par
la recherche d’une certaine souplesse dans l’ajustement des prix. En effet, les catalogues sont édités à
l’automne, bien avant le 25 décembre et les prix sont
le plus souvent garantis jusqu’à une certaine date
(parfois avant Noël). Dès lors, des prix indiqués sous
forme de fourchette permettent à la firme de modifier ses prix le cas échant sans changer le catalogue.
Le catalogue est par nature un outil de communication de proximité très puissant. Celui du jouet
en période de Noël représente de surcroît un enjeu
majeur pour les firmes distributrices de jouets. Sa
constitution est cependant mal aisée en raison
notamment de la nécessité de concilier des
contraintes diverses : multiplicité des cibles (enfants,
parents, entourage familial, comité d’entreprise,
etc.), positionnement de l’enseigne et contraintes
éditoriales imposées par les marques reprises dans le
catalogue, etc.
L’option des classes de prix conduit également,
intentionnellement ou non(14), à fournir une information prix discrète. La dimension mercantile de
cette période est alors minimisée au profit de la
magie de Noël.
Notre analyse permet de constater l’absence de
cohérence de la stratégie prix des distributeurs qui
rendent l’information-prix visible (par un effet taille)
mais qui en compliquent la lecture en raison du format retenu. La visibilité des prix sert en effet les
enfants mais leur format semble davantage s’adresser aux parents. Cette dualité des cibles amène finalement à une présentation des prix relativement
confuse pour la jeune population. Or, à l’heure où
les entreprises cherchent à construire une image
positive et durable, il paraît souhaitable pour les distributeurs de jouets de transmettre une image-prix
simple et cohérente dans l’esprit des jeunes consommateurs, notamment dans l’optique d’une fidélisation.
S’agissant plus spécifiquement des enfants,
trois groupes peuvent être identifiés du point de vue
de leur traitement du prix figurant sur le catalogue :
1) les tout-petits (moins de 5 ans) qui consultent le
catalogue comme un livre d’images et qui de fait ne
considèrent pas les prix en tant qu’information
numérique mais plus comme un pictogramme parmi
d’autres ; 2) les 5-6 ans (grande section de maternelle / CP) qui sont d’une certaine manière dans une
phase transitoire en ce qu’ils commencent à savoir
compter et lire tout en, pour certains, continuant de
croire à l’existence du Père Noël ; 3) Les enfants âgés
de 7 ans et plus qui comprennent les prix et qui peuvent même les utiliser comme argument afin d’optimiser les cadeaux reçus. Pour l’enseigne à l’origine
du catalogue, concilier ces trois perceptions est forcément complexe.
Dans la perspective de construire une imageprix favorable, une enseigne qui, en lien avec son
positionnement et sa stratégie prix, opterait pour des
prix précis, aurait donc tout intérêt, au sens marketing comme du point de vue éthique, à utiliser une
présentation des prix favorisant les formes rondes ou
de terminaison nulle dès lors qu’elle s’adresse aux
enfants. Des travaux ont ainsi montré que la mémorisation chez les adultes d’un prix doté d’une terminaison en 0 étant plus simple et qu’elle conduisait à
En parallèle, l’enseigne doit élaborer un catalogue qui soit également le reflet de ses valeurs et de
son positionnement. L’affichage prix n’est en effet
pas neutre dans l’image qu’il renvoie (tableau 6).
Cherche-t-elle à faire du prix un argument – à l’instar de certains grands distributeurs (comme Auchan,
Carrefour et Leclerc étudiés ici) ? Dans ce cas, le prix
peut être une valeur d’appel et doit alors être précis
et visible, de façon à permettre un affichage proche
d’une tête de gondole en magasin. Si l’enseigne
considère le prix comme une information au même
titre, par exemple, que les caractéristiques du jouet,
(14)
Chez La Grande Récré, les catalogues de jouets édités au cours de
l’année comportent des prix précis. Certains des catalogues de
Noël proposent uniquement des classes de prix, à l’instar de celui
étudié.
17
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Tableau 6
Traitements cognitifs induits : réponses de la littérature et implications managériales
Présentation prix
Traitement cognitif induit chez les enfants
Implications managériales
Réponses de la littérature
⋅ Suppose une capacité à ordonner chez les enfants ⋅ L’information-prix concerne alors surtout les parents.
Prix sous forme
de fourchettes
(sériation acquise à partir de 7 ans) (Piaget, Inhelder, ⋅ Détourne les enfants de l’information-prix.
⋅ Permet de conserver le secret de Noël.
1966).
⋅ Les fourchettes aident à la hiérarchisation des prix si
une précision n’est pas recherchée.
⋅ Permet aux managers de faire varier les prix sans
modifier le catalogue.
⋅ Légende présente seulement sur
⋅ L’enfant peut ne pas la voir.
⋅ Pose la question de la visibilité que l’on souhaite don-
quelques pages
ner à la légende et, donc, de l’accessibilité que l’on
souhaite donner à l’information prix.
⋅ Classes figurées par des lettres
⋅ Lien supposé établi entre l’ordre alphabétique et le ⋅ Complexifie la tâche.
⋅ Peut réduire la place du prix dans le processus de
niveau de prix.
⋅ Nécessité d’une mémorisation associative (Graham et
choix.
Campbell, 1992).
⋅ Classes figurées par des icônes
colorées
⋅ Plus faciles à traiter car prégnance des caractéris- ⋅ Permet aux enfants d’intégrer facilement une éventueltiques perceptuelles (Roedder John, 1999).
⋅ Concrétisent une variable prix parfois perçue comme
abstraite par les enfants (Damay, Ezan, 2010).
le contrainte budgétaire transmise par les parents s’ils
ont à choisir un produit.
⋅Permet aux managers de positionner clairement les produits du point de vue du prix.
⋅ Nombre de classes élevé
⋅ Augmentation de la complexité de la tâche cognitive ⋅ L’amplitude choisie est fonction du degré de précision
⋅ Bornes des classes décimales
⋅ Complique la tâche cognitive des enfants.
requise.
recherché.
⋅ Préférence pour des prix ronds et une terminaison
⋅ Opter pour des bornes rondes et de terminaison nulle
si on veut simplifier l’accès aux prix.
nulle (Damay, Guichard et Clauzel, 2011).
Prix précis
⋅ Taille de police du prix plus élevée
⋅ Facilite l’accès à l’information-prix.
⋅ Visibilité accrue des prix.
⋅ Focalise l’attention sur l’information-prix.
⋅ L’emphase est mise sur le prix comme argument de
que les informations relatives au
vente.
produit
⋅ Forme décimale des prix
⋅ Moins facile à traiter pour comparer les prix des pro- ⋅ L’information-prix concerne alors davantage les
duits et pour mémoriser les prix.
parents.
⋅ Troncature (Schindler, Kirby, 1997) et sens de lecture ⋅ Information transparente sur le prix.
⋅ La partie décimale peut ne pas être considérée du fait
(Thomas, Morwitz, 2005).
de la troncature et du sens de lecture.
⋅ Partie entière de taille de police
supérieure à la partie décimale
⋅ Focalise l’attention sur la partie entière.
⋅ Troncature (Schindler, Kirby, 1997) et sens de lecture
quentes
tie décimale et qui favorise une perception de prix plus
faibles.
(Thomas, Morwitz, 2005).
⋅ Terminaisons 0, 5, 9 les plus fré-
⋅ Pratique commerciale qui minore la visibilité de la par-
⋅ Terminaison en 0 plus facile à traiter et à mémoriser ⋅ Le choix d’une terminaison permet de jouer sur l’image
(Damay, Guichard et Clauzel, 2011).
prix que l’on veut transmettre.
⋅ Terminaison en 9 conduit à percevoir le prix comme
plus bas que ce qui est attendu chez les adultes
(Schindler, Kirby, 1997).
⋅ Position centrale du signe €
⋅ Focalise l’attention sur la partie entière.
⋅ Troncature (Schindler, Kirby, 1997) et sens de lecture
⋅ Pratique commerciale qui minore la visibilité de la partie décimale et qui favorise une perception de prix plus
faibles.
(Thomas, Morwitz, 2005).
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Présentation des prix dans les catalogues de jouets et traitement cognitif des prix induits chez les enfants
Coralie Damay, Nathalie Guichard
une perception plus favorable de l’offre (Schindler,
Kirby, 1997). L’attrait des enfants pour les terminaisons nulles est donc à considérer dans ce contexte.
De même, les travaux relatifs à la ligne mentale
numérique (cf. supra) montrent que les nombres, et
par conséquent les prix, sont traités de manière
arrondie et/ou approximative, et ce d’autant plus
qu’il s’agit d’un nombre élevé (Dehaene, Marques,
2002 ; Damay, 2008). Cela signifie dès lors que la
partie décimale est peu traitée, que ce soit par des
adultes ou par des enfants.
LIMITES ET VOIES DE RECHERCHE
Si la période de Noël est propice à la consultation du catalogue de jouets, ce support, même s’il est
moins présent le reste de l’année, reste pertinent à
étudier compte tenu, d’une part, de l’implication
qu’il génère chez les enfants et, d’autre part, du très
grand nombre de catalogues distribués en France.
Malgré d’inévitables limites, relatives notamment à la
non-exhaustivité des catalogues étudiés, cette étude
sur la présentation des prix apporte un premier
éclairage sur le traitement cognitif des prix par les
enfants et permet également d’amorcer une première réflexion, de nature managériale, sur la place à
donner au prix, du point de vue de l’enfant, dans les
catalogues de jouets.
Au-delà même des prix, aucune ligne directrice
ne semble se dégager quant à la constitution des
catalogues, que ce soit du point de vue des univers,
de leurs couleurs, de leurs classes d’âge, etc. Chaque
enseigne ou fabricant semble utiliser le catalogue
comme un moyen de se différencier, même si la
trame de ces positionnements n’est pas aisément
perceptible. De fait, si l’analyse conduite montre une
tendance des enseignes à se singulariser par leur
présentation des prix, c’est également vrai sur les
autres aspects du catalogue. Dès lors, si notre étude
tend à préconiser une certaine harmonisation de la
présentation des prix dans le souci de simplifier la
tâche cognitive des enfants, elle amène également à
s’interroger sur le bien-fondé d’une standardisation
des autres variables des catalogues. Certains repères
peuvent ainsi être rassemblés par les enfants, à l’instar du classement fréquent des jouets, par âge du
plus jeune au plus âgé ou encore par univers(15)
(l’un n’excluant pas l’autre). Sans doute n’est-il pas
souhaitable que les catalogues s’uniformisent dans
leur organisation ou dans les couleurs utilisées. Ils
sont en effet le reflet d’un travail de mise en valeur
de l’offre de l’enseigne, basé notamment sur une stimulation sensorielle et émotionnelle (par le biais de
couleurs ou d’icônes diverses propres à générer une
imagerie mentale). Le prix est, lui, une information
objective, rationnelle et particulièrement importante
à l’heure où le pouvoir d’achat des ménages est en
mauvaise passe. Elle est donc saillante chez les
adultes mais aussi chez enfants comme le montre la
première partie de notre étude. Il paraît donc cohérent d’en simplifier l’accès pour que l’enfant puisse
concentrer son effort sur le choix des produits, source de plaisirs futurs.
Différentes voies de recherche découlent de ce
travail. L’absence totale d’harmonisation dans la présentation des prix au sein des catalogues étudiés
pose question. Sans doute, l’enfant n’est-il pas toujours la cible de cette information-prix. De même, le
prix n’est-il pas toujours l’argument principal de l’enseigne. Mais, si l’enfant recherche l’information-prix,
son traitement cognitif est rendu particulièrement
difficile. Il est probable que l’inverse – i.e. une présentation plus uniforme –, favoriserait un meilleur
repérage des prix par les enfants et, donc, une
meilleure connaissance.
Différentes études (i.e. Schaeffer, Eggleston et
Scott, 1974) ont montré que le processus cognitif des
enfants se complexifiait à mesure que le nombre
d’informations à traiter augmentait. Les descriptions
des catalogues révèlent de nombreux éléments périphériques au prix qui peuvent venir interférer dans
le traitement du prix par les enfants. Une voie de
recherche est sans doute d’étudier l’impact du bruit
causé par les informations figurant sur les pages du
catalogue (marques, nombre de produits, couleur(s)
mobilisées sur la page, logo de l’enseigne, description du produit, etc.). Le recours à un logiciel d’eyetracking pourrait à cet égard permettre d’analyser
plus finement le traitement de ces différents éléments par les enfants. À propos de l’affichage des
(15)
Ce classement des jouets en univers est très fréquent (tableaux 3
et 4). Pourtant Elmanssouri (2010) a montré que l’attitude favorable à l’égard du catalogue n’était pas plus forte lorsque le catalogue était organisé suivant une logique d’univers plutôt qu’une
logique produits.
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
prix lui-même, la conduite d’une expérimentation
exposant les enfants à différentes présentations des
prix permettrait sans doute d’évaluer celle à privilégier dans l’optique de faciliter le repérage de l’information-prix par les enfants, de générer une bonne
connaissance des prix ou une « bonne » image prix
ou, plus généralement, de manière à satisfaire les
objectifs de la politique de prix de l’enseigne ou de
la marque.
Finalement, une étude plus approfondie des
modes de consultation de catalogues de jouets par
les enfants mérite-elle sans doute d’être entreprise,
afin notamment d’identifier si, comme chez les
adultes, cette consultation est de deux natures :
hédonique et expérientielle d’une part, utilitaire
d’autre part (Stell, Paden, 1999), ce qui permettrait
de mieux inscrire la place du prix dans cette consultation.
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21
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
LES MARQUES SONT
MES AMIES SUR FACEBOOK :
VERS UNE TYPOLOGIE
DE FANS BASÉE SUR
LA RELATION À LA MARQUE
ET LE SENTIMENT
D’APPARTENANCE
Agnès HELME-GUIZON(1)
Maître de Conférences,
IAE Université Grenoble-Alpes
Fanny MAGNONI(2)
Maître de Conférences,
IAE Université Grenoble-Alpes
Les auteures remercient les étudiants du M2 Le Quanti : métiers des études marketing (promotion 2011-2012)
pour leur participation à la collecte et à l’analyse des données.
Résumé
Facebook est considéré aujourd’hui par les marques comme le média social incontournable pour instaurer une relation intime avec leurs fans. Pour mieux comprendre ce phénomène, une typologie de fans
obtenue grâce à une approche qualitative combinant trois méthodes de collecte de données est présentée.
Cinq profils de fans qui se distinguent selon la force et la nature de leur relation à la marque et de leur sentiment d’appartenance à Facebook ont été identifiés. Des recommandations managériales générales mais également spécifiques à chaque profil sont proposées pour intensifier la relation fan-marque et activer les communautés virtuelles de marque.
Mots clés : Facebook - Fans - Relation à la marque - Typologie de fans de marque - Sentiment d’appartenance - Communauté de marque.
BRANDS ARE MY FACEBOOK FRIENDS : TOWARDS A TYPOLOGY OF FANS BASED
ON BRAND RELATIONSHIP AND BELONGINGNESS
Abstract
Facebook is now considered by brands as the main social media to establish an intimate relationship
with their fans. To better understand this phenomenon, a typology of fans achieved through a qualitative
approach combining three methods of data collection is presented. Five profiles of fans, distinguished by
the strength and nature of their relationship with the brand and their belongingness on Facebook, have been
identified. General and specific managerial recommendations are proposed to enhance fan-brand relationships and activate virtual brand communities.
Key w or ds : Facebook - Fans - Brand relationship - Brand fan typology - Belongingness - Brand community.
(1)
Courriel : [email protected]
(2)
Courriel : [email protected]
23
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
INTRODUCTION
CADRE THÉORIQUE
ET QUESTIONS `DE RECHERCHE
Considéré comme le réseau social préféré des
Français dans leur relation avec les marques(3),
Facebook présente aujourd’hui un intérêt majeur
pour les entreprises. En raison de la valeur des fans
pour les marques(4), leur recrutement et, surtout,
leur maintien sur les pages fan sont des préoccupations managériales clés dans la gestion des marques
sur les médias sociaux et, plus précisément, sur
Facebook. Cependant, la nature même de ces
réseaux (tout particulièrement leur dimension sociale) est susceptible de modifier les stratégies des
marques envers leurs consommateurs (communication à double sens et entre les fans, etc.) et leurs
conséquences (relation à la marque et comportements en relation avec la marque). Facebook, conçu
à l’origine comme un espace d’échanges entre amis,
pose de plus la question de la place de la marque
(avec ses visées commerciales) dans cet environnement.
Afin de formuler des questions de recherche
précises, nous avons mobilisé la littérature sur la
relation marque-consommateur et les communautés
virtuelles de marque.
La relation marque-consommateur
et ses facettes
Pour mieux comprendre la fidélité à la marque,
Fournier (1998) et Fournier et Yao (1997) comparent
la relation marque-consommateur aux relations
interpersonnelles en considérant la marque comme
un partenaire actif au sein de la relation. Fournier et
Yao (1997) mettent en évidence qu’il existe en réalité une diversité de relations de fidélité à la marque
qui se distinguent par leur force et leur nature.
Fournier (1998) poursuit dans cette voie en proposant de rendre compte de la qualité, de la force et de
la profondeur des relations aux marques, au travers
d’un construit nommé Brand Relationship Quality
(BRQ). Cet indicateur regroupe six facettes pouvant
être de nature cognitive (intimité et qualité du partenaire de la relation), affective (amour/passion et
connexions à la marque) et conative (interdépendance et engagement). Plus exactement, l’Intimité
renvoie à la richesse de la connaissance sur la
marque, des significations associées à la marque. La
facette Qualité du partenaire de la relation fait quant
à elle référence à la performance de la marque dans
son rôle de partenaire et, plus précisément, à la
notion de confiance. La facette Amour/passion traduit l’éventail de sentiments amoureux ressentis
pour la marque alors que les Connexions à la
marque correspondent à l’identification à la marque,
c’est-à-dire le degré auquel la marque reflète l’identité du consommateur. Enfin, l’Interdépendance est
liée au nombre d’interactions avec la marque
(nombre d’occasions de consommation par
exemple) et l’Engagement témoigne d’une volonté
de maintenir durablement la relation dans le temps.
Si les marques sont de plus en plus nombreuses à créer des pages fan sur Facebook dans le
but de tisser des relations intimes et durables avec
leurs fans et créer des communautés virtuelles de
marque forte, cette pratique récente est encore peu
étudiée d’un point de vue empirique. Les recherches
académiques sur la relation des consommateurs aux
marques se sont multipliées ces dernières années
mais à notre connaissance, aucune n’a investigué
cette relation dans le contexte spécifique des médias
sociaux et de Facebook en particulier. L’objectif de
cette recherche est donc de contribuer à une
meilleure compréhension de la relation entre une
marque et ses fans sur Facebook. Aussi, une
approche qualitative alliant trois méthodes de collecte de données et une analyse de contenu est mise
en œuvre. Elle permet, sur le plan théorique, de
conceptualiser la relation à la marque dans le
contexte spécifique de Facebook et sur le plan managérial, de proposer une typologie de fans conduisant
les praticiens à mieux cibler leurs actions en fonction
des profils de fans, les fidéliser et les rendre plus
actifs.
(3)
Selon l’étude CMB Constant contact intitulée « 10 quick facts you
should know about consumer behavior on Facebook » (chiffres
2011, USA).
Le cadre théorique et les questions de
recherche sont tout d’abord présentés. La méthodologie de l’étude est ensuite précisée. Enfin, les résultats sont exposés et discutés afin de proposer des
recommandations stratégiques.
(4)
Selon une étude Syncapse 2010, la valeur moyenne d’un fan pour
une marque est évaluée à 136$ et un fan dépense en moyenne
72$ de plus chez une marque qu’un non fan.
24
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Les marques sont mes amies sur Facebook :
vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance
Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni
Si ce construit ajoute une dimension affective forte à
la relation de fidélité à la marque, ces travaux constituent aussi un point de départ des recherches sur les
communautés de marque.
à une marque : la co-création (être partie intégrante
du système de création de valeur), la puissance (sentiments de pouvoir, de contrôle et d’influence), la
communauté (désirs d’interactions sociales,
d’échanges, de partage de connaissances) et le
concept de soi (l’expression de soi aux autres par le
partage d’idées).
Les communautés virtuelles de marque
Une communauté de marque peut être définie
comme « une communauté spécialisée, mais non
géographiquement limitée, fondée sur un ensemble
structuré de relations sociales entre admirateurs
d’une même marque » (Muniz, O’Guinn, 2001,
p.412). L’étude des communautés de marque revient
non plus à décrire la relation entre un consommateur et une marque mais les relations entre consommateurs autour d’une marque (McAlexander et al.,
2002 ; Muniz, O’Guinn, 2001). Outil puissant pour
les praticiens, les communautés de marque contribuent à l’acquisition de nouveaux clients, l’accroissement de la fidélité à la marque et à ses produits, le
renforcement du capital-marque et la meilleure
connaissance des besoins et désirs des consommateurs (Cova, Pace, 2006 ; McAlexander et al., 2003 ;
Muniz, O’Guinn, 2001 ; Muniz, Schau, 2007).
L’avènement d’Internet a largement facilité le développement des communautés de marque
(McWilliam, 2000). Les communautés virtuelles de
marque sont un moyen de communication privilégié
avec les consommateurs actuels mais aussi futurs.
Elles favorisent également l’échange d’information,
l’interaction sociale, l’engagement dans la communauté et la fidélité à la marque (Jang et al., 2008 ;
Shang et al., 2006). Selon Fournier et Lee (2009), les
communautés sur Internet sont les plus fortes et les
plus stables puisque les individus sont liés entre eux
par une multitude de relations diverses et variées.
L’essor des communautés virtuelles de marque s’est
accéléré plus récemment avec le développement des
réseaux sociaux (Facebook, Twitter, MySpace,
LinkedIn, etc.). À titre d’exemple, vingt millions de
personnes dans le monde deviennent tous les jours
fans d’une marque sur Facebook(5). Sans compter
les “amis” des fans qui étendent l’influence sociale
des fans (Lipsman et al., 2012). Qu’elles soient
créées par les consommateurs ou les entreprises, les
communautés virtuelles de marque requièrent une
participation active de leurs membres à des activités
liées à la marque (ex : création de contenu, partage
de photos, vidéos et informations). Christodoulides
et al. (2012) recensent d’ailleurs quatre facteurs incitant les consommateurs à générer du contenu relatif
Questions de recherche
L’objectif de cette recherche étant d’explorer et
d’analyser en profondeur la relation entre une
marque et ses fans sur Facebook, dans la mesure où
les études sur le sujet sont encore rares, des questions de recherche, plutôt que des hypothèses à tester, sont formulées. Faisant suite à la littérature exposée précédement, les questions suivantes sont
posées. Quelles sont les facettes de la relation
marque-fan sur les pages fan ? En d’autres termes, la
relation à la marque (et ses facettes) est-elle modifiée sur les médias sociaux puisqu’elle intègre une
dimension sociale ? Peut-on identifier différents profils de fans sur cette base ? Autrement dit, cette relation varie-t-elle selon les fans ? Quelles sont les raisons qui conduisent les fans à rejoindre ces pages ?
Quel est leur degré d’activité sur ces pages ? Quelles
sont leurs attentes et attitudes envers ces communautés, d’une part, et envers la marque, d’autre part ?
MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
En raison de son caractère exploratoire, une
étude qualitative a été conduite auprès d’un échantillon de convenance. La méthodologie de collecte et
d’analyse des données est décrite dans ce qui suit.
Collecte des données
La constitution de l’échantillon, en plus de se
fonder sur la recherche de variété en termes de profils socio-démographiques, s’est appuyée sur deux
critères : être fan de plusieurs marques et actif(ve)
sur au moins une marque. L’échantillon, en vertu du
critère de saturation sémantique (Roussel, Wacheux,
2005), se compose de 22 répondants. Leurs profils
sont variés en termes d’âge (de 18 à 29 ans), de
genre, de marques « likées » (grande consommation,
luxe, etc.) et de produits (alimentaire, chaussures,
(5)
Source : Facebook, www.facebook.com, janvier 2011.
25
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
automobile, services, etc.). Au total, 19 marques différentes ont été citées par les répondants (marques
avec lesquelles ils sont actifs).
• les stratégies de la marque sur sa page
Facebook ;
• les caractéristiques socio-démographiques du
fan ;
Les données ont été collectées selon trois
méthodes différentes, selon le principe de triangulation. Premièrement, dans une approche netnographique, les traces présentes sur le mur Facebook de
chaque répondant ont été collectées. On remontait
sur le mois précédent le jour de l’entretien. L’objectif
était d’identifier les activités de la marque sur le mur
et les réactions des fans. En parallèle, une recherche
documentaire a permis de retracer de manière
exhaustive les actions des marques et d’identifier
leur stratégie sur les médias sociaux. Puis, il a été
demandé aux répondants de remplir un journal de
bord (un par semaine durant les 4 semaines précédant l’entretien) pour compléter la collecte de traces
laissées sur Facebook. Enfin, des entretiens semidirectifs ont été conduits entre le 20 et le 30
décembre 2011. Le guide d’entretien abordait les
thèmes suivants : leur perception et leur utilisation
de Facebook en général (ancienneté, fréquence de
connexion, usages, etc.), leur relation à la marque
choisie (évocations liées à l’univers de la marque,
affect, attitudes envers la marque et ses actions, comportements en relation avec la marque, etc.), leurs
activités sur la page fan de cette marque (like, commentaires, partages, recommandation, interaction
avec d’autres fans, participation aux « événements »
de la marque, etc.), leur relation à cette marque sur
Facebook (récit de leur relation avec la marque
depuis ses débuts, rôle de Facebook dans sa
construction, consultation de la page, etc.) et, finalement, les effets du statut de fan sur leur relation à
cette marque (achat, fidélité, etc.).
• l’activité du fan sur Facebook en général ;
• les facettes de la relation à la marque de
Fournier (1998) pour la marque aimée ;
• le sentiment d’appartenance à la communauté de la marque aimée ;
• l’attitude et les comportements du fan envers
la marque et envers ses actions ;
• l’interaction du fan avec les autres fans ;
• les comportements d’achat du fan, sa fidélité,
etc.
Les allers-retours entre la théorie et le corpus
ont permis d’affiner la définition des concepts issus
de la littérature dans le cadre spécifique de la relation à la marque sur Facebook. Puis, au cours de la
phase d’exploitation du matériel, les 22 entretiens
ont été codés par des chercheurs indépendants. Les
désaccords ont été résolus par la discussion
(Roussel, Wacheux, 2005). Enfin, la phase de traitement des résultats, d’inférence et d’interprétation a
consisté à identifier les éléments structurants de profils, c’est-à-dire ceux permettant de discriminer entre
les individus. L’analyse a été guidée par la double
préoccupation de la rigueur scientifique (lien avec la
théorie) et l’utilité managériale (lien avec la réalité et
possibilité de déployer des stratégies différentes).
Elle a abouti à la mise en évidence de cinq profils de
fans de marque sur Facebook.
Analyse des données
Les entretiens ont été intégralement retranscrits
(226 pages, Times New Roman, 12) et soumis à une
analyse de contenu manuelle. La procédure préconisée par Bardin (2003) a été scrupuleusement suivie.
Ainsi la phase de pré-analyse, au moyen de la lecture flottante, a abouti à l’identification et à la définition des catégories pertinentes. Une grille d’analyse
a été construite en s’appuyant à la fois sur la revue
de littérature et sur la thématisation en continu
(Bardin, 2003). Cette grille comportait notamment les
catégories suivantes :
RÉSULTATS DE LA RECHERCHE
Les résultats mettent en évidence cinq types de
fans qui diffèrent en fonction de la force et de la
nature de leur relation à la marque sur Facebook. Les
six facettes de la relation à la marque proposées par
Fournier (1998) apparaissent de façon plus ou moins
marquées selon les types. Ces profils se distinguent
aussi par la force du sentiment d’appartenance à un
groupe, une dimension émergente des données et
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Les marques sont mes amies sur Facebook :
vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance
Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni
nouvellement identifiée pour définir la relation à la
marque sur les médias sociaux. Les cinq profils de
fans sont détaillés ci-après.
entretient avec la marque un lien fort : « Il est plutôt
fort puisque oui j'aime bien cette marque » ; « Un peu
plus sérieux que du flirt ». « C’est une relation fidèle,
solide et vieille » [Femme, H&M]. Il souhaiterait pouvoir l’exprimer sur Facebook. Au final, le fan
Délaissé décrit sa relation à la marque de manière
assez négative car il se sent noyé dans la masse des
fans. Par conséquent, il interagit peu avec la marque
sur Facebook (« à quoi bon ? ») : « Non, non ça sert à
rien, personne les lira. En fait comme il y a vingt millions de personnes qui aiment cette marque, je trouve ça inutile d’ajouter un commentaire de plus »
[Femme, Converse] ; « Vu le nombre de commentaires
qui sont déjà laissés sur chaque publication à chaque
fois. On se dit que c’est pas un de plus qui va faire la
différence » [Femme, H&M]. De fait, il interagit peu
avec les autres fans : il ne se perçoit pas comme
appartenant à un groupe (facette Appartenance au
groupe) : « Avec les autres fans, ben j’en ai pas spécialement de relations. Je t’avouerais que du fait que
j’commente pas, je donne pas mon point de vue,
donc ça parait difficile d’échanger avec eux. Je
m’identifie pas du tout » [Homme, Ralph Lauren]. Au
final, bien qu’attaché à la marque (facette
Amour/passion) : « Ralph Lauren, parce que Ralph
c’est vraiment la marque avec laquelle je m’habille le
plus souvent et que j’aime le plus » [Homme, Ralph
Lauren] et souhaitant maintenir la relation avec la
marque (facette Engagement) : « Ouais, mes
Converse on a toujours été ensemble, dans plein de
moments. Quand j’ai eu mon premier mec, même
quand je mettais des robes, c’est pour dire ! Donc
fidélité ! » [Femme, Converse], le fan Délaissé est actif
de manière superficielle sur la page fan : « je regarde les photos, j’regarde les vidéos et ça m’arrive des
fois quand y’a des jeux concours de rentrer dans le
truc » [Femme, H&M] alors qu’il est en quête de sens.
Le fan Passif (8 individus sur 22)
Le fan Passif est, le plus souvent, une femme,
utilisateur régulier de Facebook, qui consulte occasionnellement et rapidement la page fan de la
marque, ses posts ainsi que les commentaires des
autres fans. Il est peu actif : « Je regarde et puis c’est
tout » [Femme, Jimmy Choo] ; « Je mets très très peu de
commentaires » [Femme, Victoria’s Secret]. Tout au
plus, il like de temps à autres : « Je vais pas forcement
commenter mais appuyer sur le bouton c’est plus
simple » [Femme, Quechua] et plutôt sur les posts de
la marque que sur ceux des autres fans : « Je suis plus
attentive à ce que met la marque sur sa page qu’à ce
qu’écrivent les fans » [Femme, Adidas]. Parfois également, il partage des vidéos. Il n’a pas le sentiment
d’appartenir à une communauté : « Ah non pas du
tout ça n’a rien à voir. Je suis fan pour la marque pas
pour les fans. On a juste la marque en commun mais
c’est pas la marque qu’on aime qui va faire de nous
des amis, il y a des choses bien plus fortes qui pourraient faire en sorte que l’on devienne « affiliés »
comme une passion ou quoi mais pas une simple
marque » [Femme, Adidas]. Il ne cherche donc pas à
interagir avec les autres fans ni avec la marque sur
Facebook (facette Interdépendance) : « Je cherche pas
à débattre avec des gens que je connais pas sur la
page d’une marque » [Femme, Quechua] ; « Y’a beaucoup de commentaires où c’est n’importe quoi
aussi... Ça parle plus du tout de la marque les gens
sont là juste pour se contredire » [Homme, Audi]. Il
ne défend pas la marque lorsque d’autres fans postent des commentaires négatifs. De manière globale,
il tend à utiliser un vocabulaire relevant d’un registre
négatif quand il s’exprime à propos de la marque. Il
considère dans certains cas que la marque ne cherche
pas suffisamment à créer du lien, ne favorise pas suffisamment les occasions d’interactions : « J’aimerais
bien un peu plus d’interaction » [Femme, Quechua].
Pourtant, il aime la marque (facette Amour/Passion)
et connaît son univers, ses valeurs (facette Intimité) :
« Elégance, sportivité, design et avance technologique »
[Homme, Audi].
Le fan Intéressé (5 individus sur 22)
C’est le plus souvent un homme, utilisateur
occasionnel de Facebook, qui entretient avec la
marque une relation pragmatique, intéressée
(dénuée d’affect) : « J’aime bien la marque mais j’ai
pas de relation j’trouve avec la marque » [Homme,
Air France]. Le fan Intéressé interagit avec elle seulement quand il est à la recherche d’informations de
qualité : « Pour moi la page a une vocation informative » [Homme, Apple] ou de promotions : « Je cherche
des promotions, des jeux, ce qui peut surtout me rapporter ». « Le but est de vraiment avoir des promo-
Le fan Délaissé (3 individus sur 22)
Utilisateur régulier de Facebook, le fan Délaissé
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
interagit assez peu avec les autres bien qu’ayant
pour certains le sentiment d’appartenir à une communauté (facette Appartenance au groupe) : « Même
si ce n'est que virtuel, on se regroupe tous au même
endroit sur Facebook donc sur la page et on peut
communiquer tous ensemble sur la page « [Femme,
M&M’s] ; « C’est vrai qu’Oasis reflète une certaine
communauté car c’est drôle, donc je pense faire partir d’une petit tribu, la tribu Oasis. » [Femme, Oasis].
En revanche, ses actions nombreuses à destination de
la marque sur Facebook (facette Interdépendance)
sont un moyen de maintenir la proximité avec la
marque : « Ah, oui c’est sûr que je me sens plus proche
d’Oasis que d’une autre marque : c’est une marque
que j’aime bien, et avec Facebook, il y a plein de
trucs en exclusivité ; si on n’est pas fan, on n’a pas
ces informations. » [Femme, Oasis].
tions, jeux concours qui font gagner des trucs »
[Homme, Fnac]. Il ne défend pas la marque et a tendance à utiliser pour en parler un vocabulaire
connoté négativement. Il a le sentiment d’appartenir
à un groupe (facette Appartenance au groupe) mais
qui se fonde sur un intérêt commun (le service
après-vente) : « Le plus souvent, je rentre en contact
avec eux si j’ai eu un problème par rapport à l’utilisation de mon Mac ou de mon iPhone » [Homme,
Apple] et non pas sur un affect (facette Amour/passion) partagé pour la marque : « Une relation ponctuelle et satisfaisante […] très pragmatique » [Homme,
Motorola].
Le fan Fun(6) (3 individus sur 22)
C’est une femme qui de manière générale mène
une variété d’activités sur Facebook : « Retrouver des
gens, garder le contact. J'aime bien regarder les photos des autres, regarder leurs profils. Je l'utilise pour
dire ce que je fais, mettre des photos » [Femme, Oasis].
Le fan Fun est fortement attaché à la marque et fidèle (facettes Amour/Passion et Engagement) : « J'adore
cette marque, c'est pour ça que je l'ai cherchée sur
Facebook » [Femme, M&M’s]. La marque fait partie de
sa construction identitaire (facette Connexion au soi) :
il adhère et se reconnait dans le socle de valeurs de
la marque, souvent fondées sur l’humour et l’autodérision : « Je pense être drôle et dynamique ; après je
ne pense pas ressembler aux personnes d’Oasis qui
sont en fait des fruits humanisés. » [Femme, Oasis].
Sur la page fan de la marque, le fan Fun recherche
avant tout le divertissement, le jeu : « Oasis me fait
rire et j’attends toujours avec impatience une nouvelle publication » [Femme, Oasis]. Il cherche à être
surpris, stimulé par un contenu riche à chacune de
ses visites (quotidiennes pour certaines fans) : « Je
cherche une page plutôt vivante, dynamique ; par
exemple, il faut que la marque publie souvent des
nouveautés sinon je ne trouve pas ça intéressant. Il
faut que ce soit dynamique euh... il faut euh... qu'il
y ait des couleurs euh... un peu vives pas euh... pas
une page sombre. Avec un peu de fantaisie, c'est pas
mal et par exemple, M&M’S, ils font beaucoup d'humour et je trouve ça plus attrayant qu'une autre page
fan avec euh... des euh... avec une marque un peu
monotone » [Femme, M&M]. La lecture des commentaires des autres fans participe de son plaisir à visiter la page fan de la marque : « Ça peut être intéressant, et c’est drôle parfois de lire ce que mettent les
autres » [Femme, Oasis]. Pour autant, le fan Fun
Le fan Modèle (3 individus sur 22)
Régulièrement connecté à Facebook, le fan
Modèle entretient avec la marque une relation profonde et sincère (facette Amour/Passion) qui le
mène à défendre la marque : « j’réagis, j’leur dis que
si il y en a qui parlent mal alors qu’ils ont pas essayé
le matériel il faudrait qu’ils essayent d’abord »
[Homme, Line], voire à être son ambassadeur : « ça
m'arrive d'aller sur la page pour leur montrer certaines photos qui peuvent être marrantes ou intéressantes. » [Homme, Nike Football], preuve de son
engagement fort envers la marque (facette
Engagement). Ainsi, il est actif sur la page fan : il
donne son avis sur les produits, poste des commentaires… positifs la plupart du temps : « Soit j’peux
aimer une vidéo, je la regarde, quand j’aime, je la
like, j’peux la commenter mais j’le fais pas trop, je
regarde les commentaires et qui a aimé, j’peux la
partager sur mon mur. J’peux aller voir d’autres
informations en lien » [Homme, Aston Martin]. Le
fan Modèle est à l’affût des dernières publications de
la marque et s’en réjouit : « Quand j’suis au courant
des produits qui vont sortir, j’suis content comme ça »
[Homme, Line]. Il a le sentiment d’appartenir à une
communauté de personnes réunies autour des
valeurs partagées de la marque (facette
(6)
Deux des trois entretiens portent sur la marque Oasis ce qui
explique le nombre de citations en liens avec cette marque.
Soulignons que c’est en France la 2ème page la plus visitée avec
1 512 365 fans le 20 janvier 2012 (loin devant le suivant) ;
(http://www.neowebmag.com/rework/reseaux-sociaux/facebookles-20-pages-les-plus-populaires, consulté le 21 juillet 2012).
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Les marques sont mes amies sur Facebook :
vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance
Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni
Tableau 1
Typologie de fans basée sur la relation à la marque sur Facebook
Types de fans
Facettes de la relation à la marque sur Facebook
Passif
Délaissé
Intéressé
Fun
Modèle
Intimité
Qualité du partenaire
Amour/ passion
Connexion
Interdépendance
Engagement
Sentiment
d’appartenance
Légende : Force de la facette de la relation à la marque sur Facebook : nulle
moyenne
; élevée
.
; faible
;
C’est la facette Interdépendance. Ainsi pour le fan
Modèle, toutes les facettes du BRQ de Fournier ainsi
que le sentiment d’appartenance à un groupe se
retrouvent fortement dans sa relation à la marque.
Appartenance au groupe) : « J’pense que les autres
fans oui sont des gens qui me ressemblent, qui sont
similaires à ce que moi je suis » [Homme, Line]. Le
fan Modèle se sent proche de la marque et, notamment, grâce à la page fan perçue comme actualisée,
vivante : « Ça montre que Aston Martin c’est quand
même vivant parce que y’a pas mal d’infos ; tous les
deux jours y’a des infos » [Homme, Aston Martin]. Il
trouve que la marque est bien à l’écoute de ses fans
mais émet des doutes quant à la prise en compte de
son avis : « Bon j'peux donner mon avis, après je sais
pas si Nike le prend en compte » [Homme, Nike
Football]. Dans l’ensemble, il a le sentiment d’être
privilégié par la marque tout en ayant conscience de
ne pas être unique : « Donc y’a toujours ce sentiment,
un petit peu d'être privilégié par rapport aux autres,
d'être au courant de c’qui se passe, d'être un petit peu
le confident de la marque » [Homme, Nike Football].
Les cinq profils de fans, envisagés sous l’angle
de leur relation à la marque et de leur sentiment
d’appartenance à une communauté, sont résumés au
tableau 1.
DISCUSSION
Les résultats mettent en évidence que le profil
prédominant est le fan Passif (36% des répondants),
suivi du fan Intéressé (23%) et, enfin, des fans
Modèle (14%), Délaissé (14%) et Fun (14%). Ces cinq
profils de fan identifiés peuvent être positionnés
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Figure 1
Positionnement des fans selon leur activité et la nature de leurs
motivations
Motivations liées aux bénéfices recherchés (extrinsèques)
Intéressé
23%
Délaissé
14%
Modèle
14%
Inactif
Actif
Fun
14%
Passif
36%
Motivations liées à l’univers de la marque (intrinsèques)
Légende : la taille du rectangle est proportionnelle au poids du profil
RECOMMANDATIONS MANAGÉRIALES
selon deux axes (figure 1). Le premier axe correspond à l’activité du fan sur la page (fan actif vs. fan
inactif) et le deuxième axe renvoie à la nature des
motivations de visite du fan sur la page (motivations
intrinsèques vs. motivations extrinsèques). Le fan
Passif est relativement inactif sur la page et ses motivations sont essentiellement liées à l’univers de la
marque (motivations intrinsèques). À l’inverse, le fan
Intéressé est avant tout motivé par les avantages disponibles sur la page comme des informations, des
gains, des promotions, etc. (motivations extrinsèques). Son degré d’activité dépend d’ailleurs de
l’intérêt qu’il accorde à ces bénéfices. Les fans
Délaissé, Modèle et Fun sont plutôt actifs sur les
pages mais la nature de leurs motivations les distingue. En effet, le fan Modèle tend à être autant
motivé par l’univers de la marque que par les bénéfices qu’il peut retirer de la page. Le fan Fun est
quant à lui surtout intéressé par la marque ellemême et par son caractère ludique (divertissement)
alors que le fan Délaissé agit plus en fonction des
avantages que la page peut lui procurer (bons
L’analyse détaillée des profils et de leur positionnement suggère des recommandations managériales générales et spécifiques à chaque profil.
Recommandations générales
En raison de la qualité de sa relation à la
marque, de son sentiment d’appartenance à la communauté et de son activité sur la page, le fan Modèle
apparait indéniablement comme le type de fan idéal
pour les marques. Bien qu’il ne soit pas le profil
dominant selon notre étude, quatre recommandations générales pourraient être suivies par les
marques pour convertir le maximum de fans en
Modèle.
Premièrement, stimuler. Pour stimuler leurs
fans, il est nécessaire que les marques offrent de l’information à travers la publication de photos, vidéos,
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Les marques sont mes amies sur Facebook :
vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance
Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni
etc. Le développement et la gestion de contenus de
qualité, ludiques, attractifs et spécifiques sont des
éléments clés pour stimuler les fans. Les surcharges
de contenu et le manque d’actualisation sont à éviter. L’enquête(7) réalisée en 2011 par le Syndicat
National de la Communication Directe (SNCD)
montre en effet qu’un contenu intéressant (42%) et
un contenu amusant (22%) constituent des raisons
pour devenir fan. Plus de la moitié des membres des
réseaux sociaux déclarent également s’être déjà
désinscrits d’une page Facebook à cause du manque
d’intérêt du contenu (56%) et d’une quantité trop
importante de publications (65%). Enfin, 82% des
fans attendent des informations exclusives.
réductions commerciales, des invitations à des événements, un service client plus réactif.
Au-delà de ces préconisations managériales
générales, des recommandations adaptées à chaque
type de fan sont proposées ci-dessous.
Recommandations spécifiques
à chaque profil
La typologie proposée suggère que les
marques devraient gérer leurs pages en fonction du
profil dominant de leurs fans, dans le but ultime de
les rapprocher autant que possible du fan Modèle.
C’est pourquoi des stratégies propres à chaque type
de fan sont avancées.
Deuxièmement, échanger. Pour réunir les fans,
la construction d’une véritable relation à double sens
est indispensable. En tant que partenaires actifs, les
marques doivent être présentes sur les pages en
montrant qui elles sont, ce qu’elles font, injecter du
contenu, être à l’écoute, répondre aux questions,
commenter les retours, etc. Le recours à un
Community Manager s’impose donc pour gérer l’eréputation de la marque, garder le contrôle sur son
propre support de communication ainsi qu’assurer
un dialogue de qualité et créateur de valeur entre la
marque et ses fans. Les premiers fans de la marque
ou des professionnels du secteur pourraient être sollicités pour endosser ce rôle. À la Caisse d’Épargne
par exemple, des experts sont également mobilisés
pour répondre aux questions techniques(8).
Le fan Passif est sensible à l’univers de la
marque mais est inactif. La force de sa relation à la
marque est modérée sur les facettes de nature cognitive (Intimité et Qualité du partenaire de la relation)
et affective (Amour/passion et Connexions à la
marque) et nulle sur les facettes de nature conative
(Interdépendance et Engagement). De plus, il n’a
pas le sentiment d’appartenir à la communauté de
marque. Ainsi, afin d’impliquer le fan Passif, la
marque pourrait tout d’abord renforcer l’univers de
la marque et jouer davantage sur la dimension affective. Concrètement, la marque peut optimiser son
image de marque grâce à la nouvelle mise en page
(Timeline) des pages fan Facebook. Celle-ci met en
valeur les contenus visuels et offre de nouvelles possibilités comme publier une photo “de couverture”
(équivalent d’un en-tête) et une photo “de profil”
(souvent le logo) attrayantes et cohérentes avec
l’identité de marque, raconter l’histoire de la marque
et ses “moments clés”, etc. Ensuite, la marque pourrait surtout inciter le fan à agir et à interagir avec les
autres fans pour développer le sentiment d’appartenance à la communauté en ajoutant des boutons sur
la page (“Partager”, “J’aime”, “Service-client”), en
publiant régulièrement du contenu attractif (lien,
commentaire, photo, vidéo, live), en encourageant
les fans à publier du contenu, en posant des questions ou en sollicitant des avis, en mettant en avant
Troisièmement, fidéliser. Pour maintenir les
fans sur une page, il est important de conserver une
cohérence entre la stratégie de marque et la stratégie
digitale. Autrement dit, la page doit refléter l’image
de marque. Il est essentiel que le fan puisse retrouver l’univers de la marque sur la page, ses valeurs.
L’enquête du SNCD montre d’ailleurs que 72% des
fans recommandent une page à leurs amis par sympathie pour la marque et ses valeurs. La qualité de
relation fan-marque pourrait s’affaiblir en cas de non
congruence entre les valeurs de la communauté (ou
les valeurs de la marque véhiculées sur la page) et
les valeurs du fan.
(7)
Enquête intitulée : « Social CRM : Qu’attendent vraiment les
consommateurs des marques ? ».
Quatrièmement, concrétiser. Il s’agit pour une
marque de proposer aux fans des bénéfices réels en
termes d’information (ex : service après-vente) et
d’achat (ex : promotions). À l’heure actuelle, les fans
souhaitent obtenir prioritairement de ces pages des
(8)
Méot V. (2009) - Conversation, les marques, s'invitent dans le
débat, Marketing Direct, n°134 - 01/12/2009 -
31
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
des publications de fans, en utilisant les messages
privés comme nouveau canal de relation-client.
trer qu’il y a des « vraies » personnes derrière la
marque (répondre aux questions, commenter un
retour, etc.). Par ailleurs, les solutions proposées
pour le fan Passif visant à renforcer l’univers de la
marque et sa dimension affective par l’optimisation
de l’image de marque à l’aide de la nouvelle mise en
page Facebook sont tout à fait adaptées au fan
Intéréssé. L’histoire de la marque peut être présentée
dans le “journal”. Cette biographie interactive peut
aider les fans à mieux comprendre la marque, ses
valeurs, sa philosophie. Enfin, il est indispensable
que la marque continue à offrir des avantages
concrets (offres, informations, service après-vente,
etc.) pour conserver le fan Intéressé.
Le fan Délaissé entretient une relation forte
avec la marque mais il ne se sent ni considéré par
la marque ni appartenir à la communauté. Se
jugeant « inutile » ou « invisible », il est actif de façon
superficielle (regarde des photos par exemple) mais
interagit peu avec la marque et les autres fans. Pour
que le fan Délaissé ait le sentiment que la marque le
considère à la hauteur de son amour pour elle, il
conviendrait de communiquer spécifiquement à des
sous-groupes de la communauté et de leur renvoyer
que leur avis a été pris en compte. Les solutions proposées pour inciter le fan Passif à agir et à interagir
avec les autres fans valent aussi pour le fan Délaissé
comme en témoigne le commentaire suivant : « Ben
justement, poser des questions sur sa page, nous
demander notre avis sur certaines actions, ce qui
nous intéresserait » (Femme, H&M). De plus, pour
développer une proximité avec le Délaissé, le faire
participer afin qu’il se sente écouté et reconnu, la
marque peut organiser des jeux concours participatifs sur sa page où les fans sont invités à déposer
leurs contributions (photo, vidéo, lien, quizz, etc.).
La chaîne de pizzerias américaine Papa John’s a
organisé, par exemple, un concours de la meilleure
recette de pizza. Par ailleurs, toujours dans le but
d’animer et d’engager les communautés, la marque
peut diffuser des coupons de réduction, de promotion et organiser ensuite des ventes privées pour
créer un lien unique avec les fans. La communauté
de marque est ainsi récompensée et le trafic en point
de vente augmenté. Enfin, sans cesse à la recherche
de « bons plans », le fan Délaissé est sensible aux
promotions autour des nouveaux produits et aux
offres qui lui sont spécialement dédiées.
Le fan Fun entretient une relation très forte
avec la marque. Celui-ci connait bien l’univers de la
marque et y est très attaché. Sur la page de la
marque, le fan Fun cherche avant tout un contenu
riche, du divertissement, de l’amusement, des surprises. Un moyen de renforcer son sentiment d’appartenance à la communauté serait de proposer une
offre variée de divertissements et davantage de jeux
impliquant une interaction, une collaboration entre
fans (concours et jeux collectifs) et non plus entre le
fan et la marque uniquement. L’émission musicale
Taratata a organisé pour Noël, sur Facebook, un
concours participatif sur le thème de la musique
pour récompenser la fidélité de ses fans(9). Ils
étaient invités à créer des playlists et à les partager
entre amis. Les auteurs des playlists qui avaient reçu
le plus de votes gagnaient des abonnements sur le
service de streaming musical Spotify.
La relation à la marque du fan Modèle est riche
et profonde. Véritable ambassadeur et membre actif
de la communauté, le fan Modèle est très attaché à
la marque. Il s’identifie à elle, lui fait confiance et la
défend. Il connait parfaitement son univers et ses
valeurs. Pour maintenir et renforcer son rôle actif
voire militant, la marque pourrait récompenser les
meilleurs fans par des gratifications en privé mais
également en public (ex : fan du mois, parrainage,
invitation à des évènements, etc.). De plus, la
marque pourrait identifier et recruter ses meilleurs
ambassadeurs. C’est le cas de SmartPak Equine
(équipement équestre) qui a sélectionné ses fans les
plus actifs pour les engager en tant qu’experts dans
Le fan Intéressé n’a pas de véritable relation
avec la marque. Il ne connait pas vraiment l’univers
de la marque et n’a pas de réels sentiments pour
elle. Il interagit avec la marque et avec les autres fans
uniquement lorsque les bénéfices concrets proposés
sur la page l’intéressent (informations, gains, offres,
etc.). Pour développer une relation plus affective et
moins pragmatique avec le fan Intéressé, il serait
souhaitable de développer la confiance et les occasions d’interaction davantage basées sur les valeurs
de la marque et les émotions qu’elle suscite. La
marque pourrait donc plus « s’humaniser ». Lorsque
les fans interagissent, il est important de leur mon-
(9)
Source : Livre blanc intitulé « La Timeline : une nouvelle approche
marketing sur Facebook », Tigerlily avril 2012.
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Les marques sont mes amies sur Facebook :
vers une typologie de fans basée sur la relation à la marque et le sentiment d’appartenance
Agnès Helme-Guizon, Fanny Magnoni
Tableau 2
Quelles pratiques pour convertir un fan en fan Modèle ?
Fans
Passif
Intéressé
Fun
Délaissé
Modèle
Attentes
Comment se rapprocher du fan Modèle ?
« Prends-moi par les sentiments.
Fais-moi découvrir ton univers ! »
- Intensifier la connaissance et les sentiments
pour la marque
- Susciter plus d’interactions avec la marque et
la communauté
« Prodigue-moi de petites attentions ! »
- Offrir plus de bénéfices concrets
- Créer une relation plus affective avec la
marque
« Fais-moi rêver. Tu sais ce que j’aime ! » - Proposer plus de divertissements
- Susciter plus d’interactions avec la communauté
« Sois plus démonstratif ! »
- Offrir plus de privilèges
- Susciter plus d’interactions avec la marque et
la communauté
- Offrir des récompenses
- Renforcer le rôle d’ambassadeur
« Laisse-moi te montrer à quel point
je t’aime ! »
marques-fans et l’activité des membres de la communauté. Celles-ci s’inscrivent dans le prolongement
des pratiques proposées par Schau et al. (2009) pour
renforcer les communautés de marque en créant de
la valeur.
la création de campagnes sur Facebook(10). Les
meilleurs fans Modèle pourraient même être recrutés
comme Community Managers. Le tableau 2 résume
les actions qu’une marque peut mettre en œuvre
pour que ses fans deviennent des fans Modèle.
Cette recherche comporte toutefois des limites
inhérentes à la méthodologie qualitative (taille et
profil de l’échantillon, généralisabilité des résultats).
Elle devrait être complétée par une étude quantitative sur un large échantillon (en nombre et diversité
de profil notamment d’âge) permettant de confirmer
les types identifiés et de quantifier leur poids mais,
également, de mettre en relation des types de fans
avec des types de marques caractérisées par des
natures (produit vs. service), des secteurs d’activités
(habillement / chaussures, high-tech, alimentaire,
sport, etc.), des images (utilitaires vs. hédoniques),
des positionnements (bas de gamme vs. haut de
gamme) variés. Soulignons que dans cette recherche
Conclusion, limites
et voies de recherche
Cette recherche a permis de mettre en évidence cinq profils de fans sur les pages Facebook des
marques (Passif, Délaissé, Intéressé, Fun et Modèle),
caractérisés par la force et la nature de leur relation
spécifique à la marque. Cette relation se fonde sur
les dimensions identifiées par Fournier (1998) mais
comprend une dimension supplémentaire : le sentiment d’appartenance à un groupe (Long et al.,
2012). Il semblerait que, sur Facebook, la marque
soit humanisée et que la relation à la marque soit
empreinte d’une dimension sociale, résultant de la
nature même du média social. Ancrée au sein de
préoccupations managériales fortes, des recommandations générales puis spécifiques à chaque profil de
fans ont été suggérées afin d’intensifier les relations
(10)
Source : document intitulé « Five killer strategies to dominate social
media’s big 3 : Facebook, Twitter and Youtube », Awareness social
marketing software, juin 2012.
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
qualitative les profils de fans les moins intéressants
pour les marques (Passif et Intéressé) sont les plus
nombreux (60% de l’échantillon). Cela montre que la
relation fans-marques sur Facebook pourrait être largement améliorée et qu’avoir une page fan n’est pas
suffisant pour créer une communauté virtuelle de
marque composée de fans actifs et défenseurs de la
marque. Ces éléments appellent donc à des
recherches complémentaires afin de guider les
marques dans la définition et la mise en œuvre de
leurs stratégies et pratiques sur Facebook.
BIBLIOGRAPHIE
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
UNE ANALYSE
DE L’E-RÉPUTATION PAR
ANALOGIE OU CONTRASTE
AVEC LA RÉPUTATION :
UNE APPROCHE PAR LES
MÉDIAS SOCIAUX
Sylvaine CASTELLANO(1)
Professeure associée,
ESG Management School
Vincent DUTOT(2)
Professeur associé,
ESG Management School
Les auteurs sont présentés par ordre alphabétique, ils ont contribué également à la réalisation de cet article. Les
auteurs tiennent à remercier Madeline Delcourt, Sarach Loichot, Hélène Méziat, Jennifer Trabelsi et Bopha Vann
Yen pour leurs contributions à cette recherche.
Résumé
Les médias sociaux ont favorisé le développement de l’e-réputation. Cet article vise à comprendre ce concept
en le comparant à la notion traditionnelle de réputation au travers d’une double étude. Une enquête qualitative auprès de professionnels du tourisme montre ainsi que ces deux notions sont interdépendantes. Une
enquête quantitative suggère ensuite que les consommateurs perçoivent l’e-réputation comme un tout. Un
modèle intégrateur de ces deux notions est enfin présenté.
Mots clés : Réputation - E-réputation - Comportement consommateur - Média social - Grille de mesure.
ANALOGIES AND CONTRASTS BETWEEN E-REPUTATION AND REPUTATION :
A SOCIAL MEDIA PERSPECTIVE
Abstract
The Internet and social media led to the development of e-reputation. This article aims at analysing
this growing concept, specifically by comparing it with the traditional view of reputation. An exploratory
study among tourist professionals highlights that both concepts are interdependent. Additionally, a quantitative study shows that consumers perceive e-reputation as a whole and that each element taken alone is
not sufficient to carry an effective e-reputation strategy. An integrated model is presented as a final contribution.
Key w or ds : Reputation - E-reputation - Customer behaviour - Social media - Measurement grid.
(1)
Courriel : [email protected]
(2)
Courriel : [email protected]
35
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
des médias sociaux, véhicule principal de la réputation en ligne.
INTRODUCTION
L’analyse du concept de réputation est récente
et de nombreuses questions restent posées (Rindova
et al., 2005). En marketing, la réputation résulte des
efforts engagés par une organisation dans le but de
générer un achat et de créer la loyauté du consommateur (Keller et Aaker, 1998). Elle se comprend
comme « l’histoire » de la marque (Belkamel et al.,
2012). Cette histoire est la plupart du temps contrôlée et générée par la marque.
Les approches théoriques de la réputation
La réputation, concept multi-disciplinaire
(Einwiller, 2001), contribue à créer un avantage
concurrentiel.
En économie, dans la théorie des jeux, la réputation consiste pour les organisations à utiliser leurs
actions passées pour signaler aux parties prenantes
leurs caractéristiques (attributs, qualités) réelles
(Rindova et al., 2005) et, ainsi, créer une perception
de fiabilité (Dawar, Parker, 1994) quant à leurs
actions futures.
Cependant, le Web 2.0, porté notamment par
les notions de partage et de présence sociale
(réseaux sociaux, communautés virtuelles), a donné
la possibilité aux consommateurs d’influencer l’image d’une marque, jouant ainsi sur sa réputation
(Belkamel et al., 2012). Les consommateurs deviennent alors des porteurs de la marque et peuvent
modifier la perception d’une entreprise. Ces
consommateurs assureront la réussite ou l’échec des
firmes quant à leur réputation et leur e-réputation
(Chun, Davies, 2001).
En marketing, la réputation résulte des efforts
engagés par une organisation dans le but de générer
un achat et d’assurer la loyauté du consommateur
(Keller, Aaker, 1998). Ainsi, la réputation se crée à
travers des mécanismes d’identification entre le
consommateur et l’entreprise. Selon l’approche organisationnelle/ éthique, la réputation émane de la culture et des valeurs de l’organisation, à travers l’utilisation d’un logo ou d’une marque, et se rapproche
du concept d’authenticité (Fombrun, 2001).
Cette recherche appréhende et représente les
liens entre la réputation et l’e-réputation afin de
combler les vides théoriques et managériaux existants. Cette étude propose la présentation d’une
approche globale de la réputation en enrichissant le
concept de nouveaux éléments de mesure influencés par les médias sociaux. Elle vise à mieux comprendre le concept d’e-réputation au travers des
deux objectifs suivants : (1) identifier les analogies et
contrastes entre l’e-réputation et la réputation, et (2)
analyser l’influence des médias sociaux sur l’e-réputation du point de vue des consommateurs.
Dans l’approche sociologique, la réputation est
un construit social. Les parties prenantes évaluent les
firmes (Rao, 1994) et examinent les signaux envoyés
par l’organisation et/ou recourent à des intermédiaires (analystes du marché, investisseurs professionnels, média, etc.) qui leur permettent de détenir
des informations réduisant l’asymétrie potentielle
(Abrahamson, Fombrun, 1994). Ce processus permet
de classer ou d’ordonner la réputation des différentes entreprises.
Dans un premier temps, nous présentons les
concepts théoriques en relation étroite avec ce
champ de recherche avant de détailler, dans un
second temps, les deux analyses menées (entretiens
et questionnaire). Dans un troisième temps, les
résultats seront présentés et discutés. Enfin, les principales implications (scientifiques et managériales)
clôturent la recherche.
Revue de la littérature
Enfin, selon l’approche stratégique, la réputation résulte de deux mécanismes. D’une part, cette
ressource dérive des caractéristiques internes spécifiques (uniques) à l’organisation. D’autre part, la
réputation est une perception externe de l’organisation. Une perception positive est alors la source d’un
avantage concurrentiel. Le tableau 1 synthétise l’ensemble des approches de la réputation.
Nous présentons ici les approches théoriques
des concepts de réputation et d’e-réputation. La
dimension sociale est abordée par l’intermédiaire
En intégrant ces approches, on remarque que
la réputation est un construit subjectif et social qui,
d’une part, met en avant l’asymétrie d’information
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
Tableau 1
Les approches théoriques de la réputation
Approches
Définition
Caractéristiques
Économique
La réputation crée une perception de fiabilité et de prédictibilité. Trait ou signal.
Stratégique
La réputation est issue des caractéristiques internes uniques Perçue comme un actif.
de l’organisation et est perçue extérieurement.
Sociologique
La réputation est un construit social qui permet d’établir des Classements.
classements et ordonner les firmes.
Marketing
La réputation est le résultat des efforts des firmes pour inciter Loyauté.
les consommateurs à effectuer des achats et construire la
loyauté du consommateur.
Organisation /
éthique
Les firmes développent des réputations comme une expression Identité.
d’elles-mêmes (logo, marques, croyances, culture).
Authenticité.
mix » se compose de 3 niveaux. Le premier niveau
est l’e-character de l’entreprise. Il s’apparente à la
personnalité de la marque elle-même. Le second
présente l’e-identity qui fait référence à la structure
du site, l’aspect graphique, ergonomique et esthétique. Le troisième niveau est l’e-expérience. Il insiste sur la cohérence de ce qui est promis par la
marque en ligne et l’expérience physique. Cette
approche a pour intérêt majeur de positionner l’eréputation selon une échelle d’intensité.
entre le consommateurs et les entreprises
(Deephouse, Suchman, 2008) et, d’autre part, réduit
les incertitudes des consommateurs.
L’e-réputation
L’e-réputation peut être définie comme la « réputation construite à partir de l’ensemble des perceptions
que les parties prenantes auront de l’objet, à partir de
tout élément d’information circulant sur le Net »
(Paquerot et al., 2011). L’e-réputation apparait donc
a priori comme un élément de la réputation ellemême, émanant spécifiquement de toutes les formes
de contacts électroniques (Chun, Davies, 2001).
Cette approche est renforcée par les propos de
Frochot et Molinaro (2008) : « L’e-réputation appelée
cyber réputation, réputation numérique ou encore
web réputation est l’image que les internautes se font
d’une entreprise ou d’une personne en fonction des
informations diffusées à son sujet sur le Web, de ce
qui est dit par les autres sur soi, des messages diffusés
par les divers internautes (clients, concurrents, salariés, etc.) ou encore des traces laissées involontairement ».
Au travers des perspectives présentées, l’e-réputation semble posséder des mécanismes propres.
L’observatoire de recherche sur l’e-réputation
Blueboat (2009) synthétise bien cette logique : « L’eréputation est composée par l’image que se fait l’internaute d’une entreprise en fonction de l’ensemble
des contenus qui sont accessibles sur le web à travers
différentes sources blogs, forums, réseaux sociaux,
site d’avis de consommateurs. Elle passe par des prescripteurs qui donnent des avis positifs ou négatifs. Il
est important pour une entreprise de surveiller ce qui
se dit afin d’intervenir si besoin ».
Réputation versus e-réputation
Peu de travaux académiques ont pris pour sujet
d’étude l’e-réputation uniquement. Parmi ceux-ci,
Chun (2004) qui propose un outil de mesure de l’eréputation en prenant en compte les multiples parties prenantes d’une organisation. L’« e-réputation
La littérature a donc mis en avant les éléments
qui rapprochent réputation et e-réputation (notamment l’implication des parties prenantes, la perception et l’image à propos d’une entreprise). Il est aussi
37
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Tableau 2
Synthèse des critères de mesure de la réputation et de l’e-réputation
Critères
Outil(s)
Réputation
E-réputation
Critère applicable
ou non applicable
Fiabilité
Processus de certification.
X
X
Applicable : via
l’existence de systèmes de certifications
Benchmark
Comparaison entre
les organisations :
jugement + classement.
X
X
Applicable : via la
récupération des
commentaires et
leur classement
Personnalité
5 dimensions
d’Aaker (1997).
X
X
5 dimensions :
(1) Sincérité,
(2) Compétence,
(3) Excitation,
(4) Rugosité et
(5) Sophistication
E-expérience
Mix de l’e-réputation
(Chun, 2004).
X
5 dimensions
(1) Sécurité,
(2) Vitesse,
(3) Interactivité,
(4) Contenu et
(5) Cohérence
Image
7 dimensions de la
personnalité d’une
marque (Davies et
al. 2003).
Sociabilité
Outils de gestion du
social web.
Veille/ évaluation/
participation
X
7 dimensions
(1) Amabilité,
(2) Compétence,
(3) Chic,
(4) Esprit d’entreprendre, initiative,
(5) Machisme,
(6) Cruauté, rudesse,
(7) Ambiance
X
Applicable
sont rapportés les outils permettant de le mesurer, le
degré d’applicabilité à notre recherche et, enfin, sa
prise en considération pour mesurer la réputation et
l’e-réputation d’une organisation.
nécessaire de montrer en quoi elles diffèrent (le rôle
des médias sociaux, la co-création avec les parties
prenantes par exemple). Une synthèse des critères
de mesure de la réputation de l’e-réputation peut
ainsi être réalisée (tableau 2). Pour chaque critère
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
Si chaque concept a été mesuré de manière
séparée, peu de recherches ont cherché à identifier
les liens entre réputation et e-réputation. Cet article
tend à combler ce vide en identifiant et en présentant la frontière entre ces deux concepts à travers
une étude des médias sociaux et de leur influence
sur la perception de la réputation d’une entreprise.
Dorénavant, les entreprises perdent le contrôle
une fois que le message est diffusé car celui-ci est
récupéré par les consommateurs qui le commentent,
partagent et questionnent (Divol et al., 2012). Le
consommateur peut ainsi « discuter » directement
avec la marque et les autres consommateurs
(Mangold, Faulds, 2009). Au final, comme souligné
par Kabla et Gourvennec (2011), « les médias sociaux
sont un véritable accélérateur social de l’Internet,
avec la mise en relation d’individus dont les centres
d’intérêts sont communs et ils construisent le web
ensemble ». La perception de chacun est mise en
avant, les avis partagés et commentés, le tout pouvant ainsi faire ou défaire l’image d’une marque.
« Social media »
L’émergence des médias sociaux a changé le
rôle des consommateurs dans la gestion d’une
marque, rendant plus essentielle la compréhension
de la notion d’e-réputation. Ces derniers sont maintenant des acteurs, créateurs et vecteurs d’influence
sur le Web. L’entreprise doit donc intégrer la contribution des consommateurs au travers de nouveaux
outils que sont les médias sociaux.
Il apparaît donc, au travers de cette revue de la
littérature, que les concepts de réputation et d’eréputation présentent des analogies et des contrastes
accentués par l’apparition des médias sociaux
comme relais d’influence pour les consommateurs.
Examiner de manière empirique les relations entre
ces concepts présente donc un intérêt majeur, permettant ainsi de renforcer le corpus scientifique. La
section suivante s’attache donc à examiner notre
question de recherche à travers une approche exploratoire qualitative puis quantitative.
Le terme de « social media » a été utilisé dans
de nombreux contextes liés aux différentes technologies et à ce qu’elles peuvent accomplir. Il peut se
définir comme la production, la consommation et
l’échange d’informations au travers de plateformes
d’interactions sociales. Dans une approche similaire,
Greenberg (2009), sans définir explicitement le « social
media », avance l’idée que tous les consommateurs
sont maintenant des « consommateurs sociaux » et
que chaque interaction est une part intégrante d’une
nouvelle collaboration entre la compagnie et le
consommateur : le CRM 2.0 (Andzulis et al. 2012 ;
Nair, 2011). Ils permettent de développer les conversations ainsi que les interactions sociales. Les médias
sociaux deviennent alors un support pour communiquer, toucher, sensibiliser et également observer les
retours des consommateurs (O’Leary, 2011).
Méthodologie
Afin de répondre directement à notre objectif
de recherche qui consiste à mieux comprendre le
concept d’e-réputation, une double analyse a été
réalisée. La première, auprès de professionnels du
secteur du tourisme, a pour but de cerner le concept
d’e-réputation, en termes de définition et de manifestations, en particulier en le confrontant au
concept de réputation. Elle permet l’identification
des analogies et des contrastes entre l’e-réputation et
la réputation. La seconde vise à confronter trois propositions de recherche auprès de consommateurs et
permet l’analyse de l’influence des médias sociaux
sur l’e-réputation.
Plus récemment, Proulx et al. (2012) ont défini
les médias sociaux comme des « supports médiatiques
logiciels permettant aux usagers de maintenir une présence, de communiquer et d’interagir en ligne ».
L’internaute a besoin d’intégrer une communauté et de
communiquer autour d’un sujet ou d’une marque en
particulier. Les médias sociaux ont progressivement
permis aux individus de s’appuyer sur Internet pour
communiquer, s’exprimer, consulter et commenter
(O’Leary, 2011), influençant directement la réputation
d’une marque sur les supports digitaux. Avant le développement des réseaux sociaux, les entreprises avaient
le contrôle sur les messages qu’elles diffusaient et sur
le moment où le consommateur y aurait accès.
Étude qualitative
L’étude qualitative a pour objectif de confronter
la réputation et l’e-réputation à travers leurs analogies et leurs contrastes. Pour ce faire, nous nous
sommes intéressés à un secteur influencé fortement
par la réputation et l’e-réputation : le tourisme. Neuf
entretiens semi-dirigés, d’une durée de 60 à 90
39
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
minutes, ont été réalisés (cf. annexe 1 pour le profil
des répondants) en face-à-face ou par Skype. Les
unités d’analyse ont été regroupées en catégories
cohérentes avec le sujet de notre recherche (Glaser,
Strauss, 1967), exhaustive et exclusive (Evrard et al.,
2009).
affirme que les avis des consommateurs doivent faire
l’objet d’une gestion à part entière car « une entreprise touristique ne peut plus fermer les yeux sur ce qui
se dit d’elle sur Internet, surtout avec tous les sites
d’avis qui existent ». D’autant plus que, comme A.
DeL. (Accor) le pense, les clients insatisfaits ont tendance à poster plus facilement leur avis que les
clients satisfaits. N. F. (Free Lance), E. G. (Accor) et
L. E. (Accor) nous parlent d’une nouvelle tendance
qui devient de plus en plus courante : le recours par
les internautes aux faux commentaires négatifs dans
le but d’obtenir un geste commercial de l’entreprise.
Présentation des résultats qualitatifs
La sous-section suivante présente les résultats
des entretiens semi-dirigés en trois points : la différence de perception entre la réputation et l’e-réputation, l’importance de l’avis des consommateurs et la
gestion de l’e-réputation.
Gestion de l’e-réputation
La gestion de l’e-réputation est indispensable
pour nos experts. J. C. (eHotelmarketing.fr) et A.
DeL. (Accor) nous confient qu’une entreprise du tourisme qui ne fait pas attention à son e-réputation
risque une perte de chiffre d’affaires causée par une
perte de clients. Sa pérennité est alors en danger.
Elle doit donc opter pour « une gestion pro-active de
sa e-réputation » (J. C, eHotelmarketing.fr).). S. A.
(Nomao) est du même avis et affirme que « l’e-réputation a un impact direct sur les revenus d’une entreprise dans le sens où une bonne e-réputation
engendre un meilleur revenu ».
Différence entre la réputation et l’e-réputation
Pour l’ensemble de nos répondants, il apparaît
que la réputation et l’e-réputation ne sont pas aussi
éloignées que ce que la littérature puisse le laisser
prétendre, dans la mesure où l’e-réputation est le
prolongement de la réputation sur le Web. L’e-réputation est la « transposition écrite de ce que les gens
pourraient se dire à l’oral » (J. C., eHotelmarketing.fr)
et se construit grâce à de nombreux avis cumulés. La
réputation peut s’appréhender comme une rumeur
et l’e-réputation comme la preuve de la rumeur, servant de « certificat d’authenticité » (D. B., Accor)
d’une information.
Il faut également être capable de suivre en
temps réel toute information sur la marque et la faire
remonter à la direction sous peine de perte de compétitivité. D. B. (Accor) parle justement de ces problèmes opérationnels soulevés par des mauvais
commentaires qui lui sont remontés et font partie de
son travail quotidien.
Le second point souligné est le champ d’influence de chaque réputation. La réputation reste
limitée, que ce soit géographiquement ou temporellement. L’e-réputation touche plus de personnes, du
fait de l’accessibilité à l’information permise par le
Web, comme le dit N. F. (Free lance) « c’est d’autant
plus difficile car avant la réputation était locale,
aujourd'hui elle est nationale voire mondiale ».
« On a le retour du client pendant son séjour
donc si on est assez malin pour veiller à la qualité des
informations qui sont émises sur nos hôtels, on peut
anticiper et alerter sur les problèmes et, là, les outils
classiques prennent le relais, on a des audits qualité,
mais cela va être complémentaire aux alertes qu’on
a sur le Web. On vérifie si l’on a de véritables problèmes ou si le client est de mauvaise foi et cela nous
permet de corriger et redresser le niveau de satisfaction de l’hôtel » (D. B., Accor).
Elle note ainsi que l’e-réputation a pour différence d’être durable dans le temps, puisque les données partagées ou publiées sur le Web n’ont pas de
durée de vie limitée : « les écrits restent sur Internet,
il y a un historique ».
Avis des consommateurs
Concernant les avis des consommateurs, les professionnels sont d’accord sur un point : ils contribuent
entièrement à la construction ou la destruction de l’eréputation d’une marque. J. C. (eHotelmarketing.fr)
Synthèse des critères qualitatifs
À partir des entretiens réalisés, il a été possible
de confronter les avis d’experts sur les critères d’e-
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
Tableau 3
Synthèse des critères retenus par les professionnels
Critères
Outil(s) cités en revue de
littérature
Retenu comme
critère de mesure
de l’e-réputation
OUI
Outil(s) préconisé(s) par les
professionnels
Fiabilité
Processus de certification
Benchmark
Comparaison entre les NON
organisations : somme des
jugements puis classement
Personnalité
Modèle des 5 dimensions OUI
de la personnalité d’une
marque (Aaker, 1997)
• Mesure d’image et de notoriété
• Mesure de notoriété et de
marque employée en interne ou
externe (recrutement, etc.)
E-expérience
Mix
de
l’e-réputation OUI
(Chun, 2004).
• Mix Chun (2004)
• Actualisation fréquente des sites
vitrine et e-commerce
• Référencement du site (Google
Analytics)
Image
7 dimensions de la person- NON
nalité d’une marque (Davies
et al. 2003).
Sociabilité
Outils de gestion du social OUI
Web, Veille, évaluation, participation.
• Outils de veille pour mesurer la
présence de la marque sur les
réseaux sociaux :
- Redtigger
- ScoopIt
- Netvibes
- Ethority
• Contrôle des tweets et commentaires Facebook
• Fréquence d’actualisation de la
page Facebook
Transparence
Non cité.
• Référencement sur les sites
comparateurs certifiés (ex : vinivi.com) spécialisés ou non dans
le tourisme
• Qualité du discours de la marque
(évaluation de son unité et de sa
véracité)
OUI
Contrôle des avis consommateurs
sur les sites comparateurs
Référencement sur les sites comparateurs certifiés (ex : vinivi.com)
spécialisés ou non dans le tourisme
41
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
réputation à ceux issus de la littérature (cf. tableau
3). S’il apparaît que la majorité des critères sont jugés
pertinents et applicables, deux d’entre eux ont
cependant été rejetés.
PR2 : L’utilité de l’information trouvée sur
médias sociaux par les consommateurs
influence leur perception de l’e-réputation.
Le premier est la notion de benchmark. Selon
les experts, l’analyse de la concurrence sur le support digital ne doit pas être intégrée dans la mesure
de l’e-réputation, mais plutôt dans la stratégie online
de l’organisation. Cette notion ne peut pas être
réduite uniquement à l’analyse de l’e-réputation.
Par ailleurs, bien que les firmes tentent d’influencer leur réputation au travers de mécanismes
tels que l’envoi de signaux sur les médias sociaux
(Standifird, 2001), l’e-réputation est finalement établie par les parties prenantes. Or, ces dernières ont
un usage différent des médias sociaux (Castronovo
et Huang, 2012). On peut donc formuler la proposition de recherche suivante :
Le second critère non retenu est l’image, car
trop difficile à juger dans sa globalité en ligne. Les
experts auraient préféré voir l’idée du buzz présenté. Enfin, un nouvel élément a été cité par l’ensemble des experts rencontrés, à savoir la transparence. Il regroupe l’idée du référencement en ligne
et de la capacité de la marque à présenter un discours unique et cohérent peu importe le canal de
communication utilisé (hors ligne ou en ligne).
PR3 : L’objectif d’utilisation des médias sociaux
par les consommateurs influence leur
perception de l’e-réputation.
Nous avons recours dans cette recherche à la
formulation de propositions pour deux raisons : (1)
les recherches antérieures sur le concept d’e-réputation n’ont pas encore aboutit à des conclusions
claires et (2), le caractère innovant et exploratoire ne
permet pas d’établir de lien causal entre les variables
(Evrard et al., 2009, p.50).
Cette première analyse a permis de mieux comprendre les frontières entre la réputation et l’e-réputation et de présenter un modèle global de mesure
de l’e-réputation pour les professionnels. Pour
autant, les consommateurs appréhendent-ils la
notion d’e-réputation de la même manière ?
Étude quantitative
Afin de confronter les propositions de
recherche énoncées, une analyse quantitative a été
menée auprès de 148 consommateurs actifs sur les
médias sociaux. Nous nous sommes focalisés sur la
vision qu’ont les consommateurs des objectifs et des
priorités poursuivis par les entreprises sur les médias
sociaux. Un questionnaire a été administré en ligne
durant les deux premières semaines de juin 2012. Le
profil des répondants est présenté en annexe 2.
Alors que les travaux précédents avaient mis en
avant la notion de « media reputation » comme l’évaluation générale de la réputation présentée dans les
médias (Deephouse, 2000), le développement des
médias sociaux sur Internet représente l’un des facteurs clé de la spécificité de l’e-réputation et de son
impact sur les firmes. En effet, les médias sociaux
influencent la perception et les opinions que se font
les parties prenantes, notamment les consommateurs, des entreprises. Or, l’e-réputation se construit
par l’interaction entre les parties prenantes et l’entreprise via les médias sociaux. Ainsi, le contenu
créé et l’information diffusée sur les médias sociaux
vont influencer la perception des consommateurs
(Deephouse, 2000), encourager une interaction ainsi
qu’un engagement envers la firme (Murdough,
2009). On peut donc formuler les propositions de
recherche suivantes :
Mesures des variables
Le questionnaire compte 22 questions, réparties
entre le comportement sur Internet et vis-à-vis des
réseaux sociaux, le type de médias sociaux, la sphère d’utilisation, le contexte d’utilisation des médias
sociaux, l’utilité de l’information, l’objectif d’utilisation et l’e-réputation. Le détail des mesures est présenté en annexe 3. Du fait du caractère exploratoire
de cette recherche, les échelles de mesure utilisées
ont un caractère empirique et n’ont pas été validées
par un processus systématique de construction (fiabilité et validité).
PR1 : Le contexte d’utilisation des médias
sociaux par les consommateurs influence
leur perception de l’e-réputation.
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Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
Tableau 4
Matrice de corrélation
1.contexte_1
SD
1
3,387097
1,2669
1,0000
4
3
2
Moy
7
6
5
8
12
11
10
9
2.contexte_2
2,370968
1,164989
0,4362
1,0000
3.contexte_3a
1,572581
0,8280979
0,2830
0,3764
1,0000
4.contexte_3b
2,725806
1,351535
0,4376
0,1632
0,4683
1,0000
5.contexte_3c
3,193548
1,40659
0,6556
0,3081
0,3089
0,4387
1,0000
6.satisfacti~s
3,145161
1,194115
0,5053
0,4227
0,3017
0,4279
0,3994
1,0000
7.obj_ms_1
4,266129
0,9379867
0,1110
0,1916
0,0639
0,1414
0,1517
0,1757
1,0000
8.obj_ms_2
4,169355
0,917063
0,1950
0,1081
0,0212
0,2542
0,2391
0,2892
0,6371
1,0000
9.obj_ms_3
3,83871
0,9575298
0,2529
0,1634
0,1174
0,1791
0,1743
0,2980
0,4012
0,4295
1,0000
10.obj_ms_4
3,983871
0,9709929
0,3290
0,1563
-0,059
0,0895
0,1868
0,2194
0,4422
0,4048
0,5918
1,0000
11.obj_ms_5
3,41129
1,059315
0,2439
0,1586
0,2113
0,3122
0,2572
0,2416
0,3226
0,3545
0,4507
0,3069
1,0000
12.Obj_MS_6
4,314516
0,7689813
0,1327
0,1319
-0,068
0,1228
0,1612
0,1889
0,5706
0,5810
0,3455
0,4315
0,3489
1,0000
13.Obj_MS_7
3,943548
1,053854
0,0957
0,0636
-0,018
0,0575
0,0239
0,3102
0,4430
0,4811
0,1923
0,2613
0,1229
0,6140
Tableau 5
Analyses de régressions multivariées
e-reputation
comp_2
comp_3
comp_4
ms_utiliss
sphere_ms
contexte_1
contexte_2
contexte_3a
contexte_3b
contexte_3c
satisfacti~s
obj_ms_1
obj_ms_2
obj_ms_3
obj_ms_4
obj_ms_5
Obj_MS_6
Obj_MS_7
genre
age
csp
salaire
_cons
F
Prob>F
Adj. R-squared
Modèle 1
Coef.
t
Modèle 2
Coef.
t
-0,2980 0,156
-0,3708 0,039
-0,1246 0,124
0,4275 0,018
-0,0039 0,962
Modèle 3
t
Coef.
-0,0496
0,1429
-0,279
0,0772
0,09002
0,0543
Modèle 4
t
Coef.
0,617
0,106
0,016
0,334
0,281
0,541
-0,1175
0,1629
-0,0196
0,0577
-0,0307
0,6709
0,1916
-0,1418 0,426
-0,0737 0,450
0,175
0,760
0,0092 0,903
4,449
0,000
0,34
0,853
0,0101
4,606
0,000
3,59
0,00
0,1237
3,7598 0,000
1,68
0,00
0,0751
0,202
0,094
0,817
0,487
0,646
0,000
0,014
0,2685 0,488
18,70
0,00
0,5197
43
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Modèle 5
t
Coef.
-0,2377 0,182
-0,0924 0,584
-0,0350 0,597
0,3367 0,028
0,0269 0,705
-0,0555 0,479
0,0505 0,493
-0,0687 0,492
0,0488 0,443
0,0227 0,722
-0,0672 0,354
-0,0951 0,350
0,1391 0,178
-0,0093 0,918
0,0709 0,450
-0,0149 0,844
0,5889 0,000
0,2676 0,002
-0,3816 0,009
0,1007 0,224
-0,0164 0,703
-0,0688 0,280
0,8508 0,329
0,00
0,6111
ADETEM
Ainsi, pris individuellement, chaque facteur ne
peut influencer la perception que les consommateurs ont de l’e-réputation des firmes. Nous pouvons
donc conclure que l’e-réputation est perçue comme
un tout (F significatifs). Les firmes ne peuvent donc
s’engager sur un facteur uniquement ou sur
quelques facteurs. Au contraire, elles doivent
conduire un ensemble d’actions afin d’influencer la
e-réputation perçue par les consommateurs.
Résultats et discussion
Le tableau 4 présente la matrice des corrélations. Les résultats nous amènent à penser que la
multicollinéarité n’est pas problématique dans la
mesure où la plupart des coefficients de corrélation
sont inférieurs à la valeur 0,30.
À partir de cette première analyse, nous avons
testé cinq modèles de régressions pour la variable
dépendante de notre recherche (e-réputation). Le
premier (modèle 1) intègre uniquement les variables
de contrôle. Le second (modèle 2) se focalise uniquement sur le comportement vis-à vis des médias
sociaux (le comportement, la satisfaction et la sphère d’utilisation). Le troisième (modèle 3) s’intéresse
aux effets du contexte et de l’utilité de l’information.
Le quatrième (modèle 4) se tourne vers l’objectif
d’utilisation des médias sociaux. Enfin, le dernier
modèle testé regroupe l’ensemble de variables
(modèle 5). Les tests F multivariés montrent l’effet
total des variables indépendantes sur la variable
dépendante (tableau 5).
IMPLICATIONS MANAGÉRIALES
Au travers de cette double analyse, nous avons
cherché à mieux appréhender le concept d’e-réputation, que ce soit du point de vue des professionnels
(du secteur du tourisme) ou de celui des consommateurs présents sur les réseaux sociaux.
L’analyse exploratoire auprès de professionnels
du tourisme permet de mettre en avant plusieurs
enseignements liés à notre premier objectif de
recherche. Pour les professionnels interrogés, il existe a priori de nombreux points de convergence entre
réputation et e-réputation. La deuxième ne serait
que le « prolongement » de la première ou encore sa
« transposition » sur les réseaux sociaux. Toutefois,
les professionnels ont intégré les spécificités de la
sphère virtuelle mettant en avant les divergences
entre ces deux concepts. Elles se caractérisent par
l’instantanéité, l’omniprésence, l’accessibilité et la
persistance dans le temps.
Tous les modèles sont significatifs sauf le
modèle 1. Dans le modèle 3, la variable contexte_3a
est statistiquement significative.
Bien que cela puisse sembler contre-intuitif, les
consommateurs peuvent prêter plus d’attention aux
produits de tous les jours, pour lesquels il est plus
difficile de juger de la réputation « réelle » des firmes.
La proposition 1 n’est donc pas rejetée. En revanche,
la proposition 2 l’est. Dans le modèle 4, le test F est
significatif. La proposition 3 n’est ainsi pas rejetée.
Un tweet posté trop rapidement, une décision
désapprouvée sur Facebook (par exemple, GAP a dû
retirer son logo suite à une désapprobation de followers sur le réseau social) peuvent instantanément se
diffuser et détruire l’e-réputation établie dans le
temps. Les managers doivent donc identifier et
déployer de nouvelles stratégies afin de gérer efficacement leur e-réputation.
Plus particulièrement, la variable obj_MS_5 est
statistiquement significative. Il semble donc que plus
l’objectif affiché semble « honnête » plus l’e-réputation
perçue croît. Dans le modèle 5, les variables obj_MS_6
et obj_MS_7 sont statistiquement significatives. L’eréputation augmente lorsque l’entreprise cherche à
développer sa communication on-line et à recruter des
fans. Le modèle le moins performant est le 3, qui s’intéressait au contexte d’utilisation des réseaux sociaux.
Ceci peut paraître surprenant car nous analysions ici la
consultation et le partage d’avis sur les médias sociaux,
notamment dans une perspective d’achat. Il apparaît
que le modèle 5 a le plus fort pouvoir explicatif
(R2=0,61), même, si dans le détail, chaque variable
n’est pas significative (valeurs des t<0,1).
Ce processus passe par un ensemble d’outils qui
peuvent être regroupés selon quatre grands blocs.
- Le premier est la gestion de la marque en
ligne. Par gestion, nous entendons la définition de l’identité virtuelle de la marque, la
prise en compte de la personnalité de l’entreprise et son relais sur le canal digital.
44
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
- Le second est la prise en considération de la
fiabilité des informations en ligne et, plus précisément, les avis ou la présence sur certains
supports. Comme mentionné ci-dessus, les
faux avis sont de plus en plus présents et
peuvent nuire ou tout au moins influencer, la
perception d’une entreprise par un consommateur. La gestion de ces éléments devient un
enjeu majeur pour les entreprises.
prises ont recours à des moyens peu scrupuleux pour se construire une image valorisante
auprès de leurs clients. Dans le cas où les
impostures sont révélées, les clients peuvent
alors se sentir trompés. Les avis des consommateurs sont bien souvent, aux yeux des
autres consommateurs, les plus objectifs. Les
entreprises doivent ainsi, si elles se lancent
sur le Web et décident d’intégrer l’ensemble
des dimensions de l’e-réputation, être prêtes
à accepter le bon et le moins bon de la part
des consommateurs.
- Le troisième ensemble d’outils touche la présence sur les médias sociaux. Comme mentionné durant notre recherche, une stratégie
de gestion de l’e-réputation devient indispensable sur les médias sociaux pour les entreprises. En effet, nous avons pu constater à travers notre étude que les consommateurs qui
consultent les avis sont nombreux (57%) et
qu’ils tiennent compte globalement des avis
partagés avant d’effectuer un achat. Il est
donc primordial pour une entreprise de
veiller à son e-réputation. En effet, les avis
négatifs auront tendance à influencer négativement les futurs acheteurs et les avis positifs
auront tendance à les influencer positivement.
Ces propos doivent être nuancés car les
consommateurs restent méfiants et comparent
plusieurs avis pour se faire une idée.
Cependant, les entreprises doivent établir une
stratégie de gestion de leur e-réputation qui
semble primordiale surtout en B-to-C. La gestion de crise (ou de rumeurs) doit être efficace et rapide dans ce cas car les médias
sociaux véhiculent les messages à grande
vitesse et peuvent détruire l’image d’une
entreprise ou d’une marque si l’entreprise
n’est pas assez réactive.
Pour les consommateurs, la réputation en ligne
tourne autour des médias sociaux dans l’interaction
avec une entreprise. Les résultats montrent que les
consommateurs perçoivent l’e-réputation comme un
tout. Les entreprises se doivent donc d’adopter une
approche intégratrice du concept.
Selon les consommateurs, l’e-réputation
dépend du contexte d’utilisation des médias sociaux
(consulter ou partager son avis, type de bien acheté) et des objectifs que l’entreprise affiche. L’e-réputation importe surtout dans un contexte de communication on-line et dans un objectif de recrutement
de fans. Ces premiers facteurs apportent des éléments de réponse à notre second objectif de
recherche.
Par ailleurs, les entreprises doivent prendre en
considération leurs cibles dans leur stratégie d’eréputation. Ainsi, par exemple, les femmes sont plus
sensibles aux messages envoyés par les entreprises,
pourquoi donc ne pas adapter le message à cette
cible. Au-delà d’une « media reputation »
(Deephouse, 2000), il existe donc une « social media
based e-réputation ».
- Le quatrième et dernier élément est la notion
de transparence. Cette composante, un des
éléments soulevés lors de l’analyse qualitative, regroupe les notions de comportement sur
les médias (partage ou consultation d’avis) ou
d’objectif d’utilisation (communauté, fidélisation de la clientèle). Peu importe ce qui arrive, une entreprise se doit de réagir mais, dans
un souci de réalité. Il ne faut ainsi absolument
pas chercher à démentir les propos ou ajouter des avis positifs, car les consommateurs
s’en rendront compte et n’auront plus
confiance en cette entreprise. Certaines entre-
CONCLUSION
ET FUTURES RECHERCHES
L’objectif de cet article a été de réunir au sein
d’une même recherche les concepts de réputation et
d’e-réputation. Alors que le premier a fait l’objet de
nombreuses études tant au niveau théorique qu’empirique, les travaux sur l’e-réputation sont encore
rares tant en marketing qu’en management. Une
revue de la littérature nous a permis de mettre en
avant les points de convergence de ces deux
45
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Figure 1
Modèle de réputation et d’e-réputation
(2)
(1)
Entreprise
Consommateur
Entreprise
Réputation
Consommateur
e-réputation
contributions au niveau académique mais aussi
managérial. D’un point de vue académique, cette
recherche apporte un nouvel éclairage sur les
concepts de réputation et d’e-réputation. L’e-réputation intègre un ensemble de critères tels que la fiabilité du message, la stabilité et la constance des
informations véhiculées, la personnalité de la
marque, l’e-expérience, la sociabilité et la transparence. Cette réputation en ligne semble se forger et
évoluer principalement sur les réseaux sociaux pour
lesquels une entreprise doit être en mesure de
contrôler son comportement en ligne, définir un
objectif précis et réfléchir au contexte d’utilisation
par rapport à sa stratégie globale.
concepts (notamment l’envoi d’un signal à des parties prenantes). Elle a aussi été l’occasion d’identifier
dans quelle mesure l’e-réputation se différencie de la
réputation (contrastes). En effet, au-delà de l’entreprise, ce sont les consommateurs et autres parties
prenantes qui participent à l’envoi de signaux de
qualité sur la sphère virtuelle.
Par ailleurs, un mécanisme de veille se crée sur
les réseaux sociaux. Comme le représente la figure
1, nous pouvons voir que l’e-réputation est coconstruite et les liens sont intensifiés (1), elle connaît
une forme d’existence hors de l’entreprise (ex : création d’une page Facebook non officielle par des fans)
et elle échappe d’une certaine manière au contrôle
de l’entreprise (2).
Par ailleurs, les gestionnaires trouveront dans
cette étude les éléments à suivre lorsqu’il est question de leur réputation en ligne. Ils pourront notamment identifier sur quels facteurs insister ou investir
leurs ressources. Plus précisément, cette recherche
montre que la réputation et l’e-réputation ne peuvent être abordées de la même manière par les
entreprises et qu’il faut donc mettre en place des
outils différents pour appréhender ces deux notions.
Il semble également essentiel de considérer la présence sur les médias sociaux (Facebook et Twitter en
priorité), car ce sont sur ces plateformes que les
consommateurs interagissent et se forgent leur opinion d’une marque. Mettre en place une stratégie
sociale, en s’appuyant sur des ressources spécifiques
(le community manager notamment) peut donc
s’avérer payante pour une organisation soucieuse
d’être à l’écoute de ses consommateurs.
Afin de confronter empiriquement les deux
concepts, nous avons eu recours à une étude exploratoire dans le secteur du tourisme, secteur qui repose fortement sur la réputation des « bricks-and-mortars » et des pure players comme sur le caractère
expérientiel de l’achat. Les professionnels interrogés
ont confirmé les similarités et les différences qui
existent entre les deux concepts. De plus, ils ont
validé la majorité des critères identifiés afin de mieux
capter l’e-réputation.
Une étude quantitative en ligne auprès de 148
personnes nous a permis de préciser la vision qu’ont
les consommateurs des objectifs et des priorités
poursuivis par l’entreprise dans leur stratégie d’eréputation. Les résultats montrent que l’e-réputation
se construit de manière globale. Selon les consommateurs, chaque élément pris individuellement ne
peut à lui seul influencer l’e-réputation d’une
marque ou entreprise.
Limites et voies futures de recherche
Malgré ses résultats significatifs, cette recherche
présente plusieurs limites. Tout d’abord, si la réputation est une variable classique dans la littérature, l’e-
Cette recherche ouvre la voie à plusieurs
46
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
bancaire dans le cadre d’investissements financiers,
ou encore dans le secteur du luxe, permettra de
mieux appréhender le concept d’e-réputation et de
le confronter à celui de la réputation classique.
réputation a fait l’objet d’un nombre limité d’études.
Le modèle de Chun (2004) représente un travail fondateur qu’il convient de compléter et d’enrichir.
Ainsi, bien que nos résultats quantitatifs soient significatifs, assez représentatifs de l’e-réputation, il se
peut que les mesures de la e-réputation ne reflètent
pas totalement sa complexité et sa multi-dimensionnalité. L’intensification de l’utilisation des médias
sociaux ne fera que renforcer cet aspect.
Concernant l’étude quantitative, les échelles de
mesure n’ont pas été validées par un processus systématique de construction. Une étude confirmatoire
permettra d’assurer la fiabilité et la validité des
échelles de mesure. Par ailleurs, l’étude a été réalisée dans le cadre d’un contexte français. Il serait
intéressant de mener une étude comparative et répliquer l’enquête dans un autre pays afin de gagner en
validité externe. En effet, le comportement des
consommateurs sur les réseaux sociaux varie en
fonction du pays étudié. Enfin, ces premiers résultats
peuvent orienter de futures recherches vers un
modèle intégrateur des perceptions de l’e-réputation
en un modèle complet.
De plus, la généralisation des résultats de l’étude peut être rendue difficile pour plusieurs raisons.
Le recours au secteur du tourisme réalisé dans l’étude qualitative peut contextualiser et biaiser les
réponses. En effet, le choix du secteur peut influencer certaines des conclusions de la recherche, de
part le poids des réseaux sociaux dans le cadre d’un
achat purement expérientiel. Une nouvelle investigation dans un autre secteur, par exemple le secteur
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
ANNEXES
Annexe 1 : profil des répondants, entretiens semi-dirigés
Entreprise
ACCOR
ACCOR
ACCOR
ACCOR
GO Voyages
NOMAO
EHOTELMARKETING.FR
Free lance
Professionnel (Nom/fonction)
Armel De Laage, General Manager (Directeur d’hôtel) du MGallery Cabourg
Damien Buisson, Directeur Marketing Etap Hôtel/HotelF1
Emmanuel Guinot, Journaliste Interne Web
Lauren Espié, Chef de projet Web
Sophie Atlan, Community Manager Junior
Serge Alleyne, Créateur et dirigeant de Nomao
Julien Chapillon, Consultant SEO-SEM-SMO/Travel industry/Hospitality
Nathalie Fourey, Consultante e-tourisme, Chef de projets Web et Community
manager free lance
Annexe 2 : profil des répondants, analyse quantitative
Âge
Année
15–25
26-35
36-45
46-55
55+
CSP
%
41
37
12
4
2
Catégorie
Étudiant
Cadre
Employé
Autre
Nombre d’heures par semaine
sur les réseaux sociaux
Nb heure
%
<1h
14%
1h - 5h
43%
5h -15h
24%
15h -30h
15%
30h+
4%
Salaire
%
31
32
26
11
Catégorie
-12 000
12 001 – 24 000
24 001 – 36 000
36 001 – 48 000
48 001 +
Présence sur le réseau social
Réseau social
Facebook
Viadéo
LinkedIn
Twitter
Forums
Blogs
Instagram
Google+
Pinterest
Slideshare
%
94%
51%
45%
39%
29%
27%
23%
21%
17%
8%
49
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
%
31
21
25
13
7
ADETEM
Annexe 3 : questionnaire quantitatif (et lien avec entretiens)
Toutes les variables ont été mesurées selon une échelle de Likert à 5 niveaux (de tout à fait en désaccord à tout à fait
en accord).
Variables indépendantes
Dimension de
l’étude qualitative
Transparence
Quantitatif
Variables
Question
Objectif
Comportement sur
Internet et vis-à-vis
des réseaux sociaux
Comp_1
Utilisez-vous des réseaux
sociaux ?
Prenez-vous en considération les informations qui circulent sur Internet à propos
des entreprises et de leurs
produits ?
Avez-vous déjà donné un avis
positif ou négatif sur un produit ou sur une entreprise ?
Combien d’heures par
semaine passez-vous sur les
médias sociaux ?
Quels médias sociaux utilisez-vous le plus souvent ?
Pourquoi utilisez-vous les
médias sociaux ?
Profils des répondants
en lien avec l’objectif de
recherche (comportement lié aux réseaux
sociaux)
Comp_2
Comp_3
Comp_4
Sociabilité
Type médias sociaux
utilisés
Sphère d’utilisation
des médias sociaux
E-expérience
Stabilité et
Constance
Personnalité
Sphere_MS
Je consulte les avis sur les
médias sociaux avant d’effectuer un achat
Je partage mon avis sur les
Contexte_2
médias sociaux après avoir
effectué un achat
J’utilise les médias sociaux
Contexte_3
pour des achats concernant
des biens de premières
nécessités / des biens intermédiaires / des biens supérieurs
Utilité de l’information Satisfaction_MS Les informations que je
trouve sur les médias
sociaux m’apportent une
satisfaction supplémentaire
sur mes actes d’achat
Créer une communauté
Objectif d’utilisation
Obj_MS_1
autour du nom de la marque
des médias sociaux
ou de ses produits
Créer une image de moderObj_MS_2
nité
Acquérir des clients
Obj_MS_3
Fidéliser les clients
Obj_MS_4
Augmenter les ventes & CA
Obj_MS_5
Développer la communicaObj_MS_6
tion on-line
Recruter des fans
Obj_MS_7
Contexte d’utilisation
des médias sociaux
Fiabilité
MS_utilisés
Contexte_1
50
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Médias sociaux
utilisés
Sphère privée, professionnelle, ou transaction commerciale
Pré-achat
Post-achat
Type de bien (primaire,
intermédiaire, supérieur)
Utilité de l’information
Comprendre pourquoi les
entreprises communiquent
sur les médias sociaux
Une analyse de l’e-réputation par analogie ou contraste avec la réputation :
une approche par les médias sociaux
Sylvaine Castellano, Vincent Dutot
Variables dépendantes
e-réputation
e-réputation
Les entreprises doivent commu- Perception de l’importance de l’eniquer sur les médias sociaux réputation par les répondants
pour maîtriser leur e-réputation
Variables d’identification
Genre
Âge
Question
1-Homme
2-Femme
15 à 25 ans
26-35
36-45
46-55
+55
Question
Catégorie Socio-professionnelle Étudiant
Cadres
Employés
Autre
Salaire annuel
< 12 000€
12 001 – 24 000€
24 001 – 36 000€
36 001 – 48 000€
+ 48 000€
51
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
INSTRUMENT DE VEILLE
TECHNOLOGIQUE
ET D’INNOVATION :
UNE APPLICATION AU
SECTEUR AUTOMOBILE
Sylvain MBONGUI-KIALO(1)
ATER à l’Université Jules Verne de Picardie
Doctorant en Sciences de Gestion
ISM - Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines
Résumé
L’approche que nous présentons dans cet article vise à montrer comment la prise en compte des brevets
des tiers dans une démarche de veille technologique peut être bénéfique pour l’entreprise en termes de performance et d’innovation. Plusieurs travaux (Lesca, 1989 ; Koenig, 1996 ; Burkhart, 2001), ont permis d’apprécier l’importance de la veille technologique, mais, à notre connaissance, l’utilisation du brevet comme instrument de veille n’a pas fait l’objet d’études approfondies (Jakobiak, 1994 ; Walker, 1995), ou tout au moins
n’a pas été suffisamment relatée dans les publications académiques. Basée sur une étude de cas, l’étude
montre que l’analyse des brevets peut aider les entreprises dans la résolution des problèmes industriels et
concurrentiels auxquels elles sont confrontées.
Mots clés : Brevet - Veille Technologique - Innovation - Processus d’innovation - Automobile.
PATENT AS A TOOL FOR TECHNOLOGY WATCH AND INNOVATION :
AN APPLICATION TO THE AUTOMOTIVE INDUSTRY
Abstract
The approach we present in this paper aims at showing how the integration of third-party patents in a
process of technology watch can be beneficial for the company in terms of performance and innovation.
Several studies (Lesca, 1989 ; Koenig, 1996 ; Burkhart, 2001), helped to appreciate the importance of technology watch, but to our knowledge, the use of patent as a tool for technology watch has not been extensively studied (Jakobiak, 1994 Walker, 1995), or at least is not enough presented in the literature. Based on a
case study, the study shows that patent analysis can help companies in the resolution of industrial and competitive problems.
Key w or ds : Patent - Technology watch - Innovation process - Innovation - Automotive.
(1)
Courriel : [email protected]
53
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
FENÊTRE SUR ...
LE BREVET COMME
ADETEM
la prise en compte des brevets des tiers dans une
démarche de veille technologique peut être bénéfique pour l’entreprise en termes de performance et
d’innovation. Plusieurs travaux (Lesca, 1989 ;
Koenig, 1996 ; Burkhart, 2001), ont permis d’apprécier l’importance de la veille technologique mais, à
notre connaissance, l’utilisation du brevet comme
instrument de veille n’a pas fait l’objet d’études
approfondies (Jakobiak, 1994 ; Walker, 1995) ou,
tout au moins, n’a pas été suffisamment relatée dans
les publications académiques(2). Or, du point de vue
pratique, nombreuses sont les entreprises qui souscrivent à cette démarche. Notre recherche veut donc
contribuer à enrichir la littérature sur ce domaine et
donner toute sa place aux analyses et aux retours
d’expériences sur la veille technologique dès lors
qu’elle s’intéresse aux brevets des tiers.
INTRODUCTION
Si le brevet a fait l’objet d’un intérêt croissant
des chercheurs en sciences de gestion et, plus précisément, en management stratégique, ce phénomène
est relativement récent et très peu développé. C’est
pourquoi cet article se positionne davantage dans
une optique stratégique que marketing pour comprendre un peu mieux l’utilisation du brevet comme
outil de veille technologique. Car, le renforcement
de la concurrence et la rapidité d’évolution de l’environnement technologique des firmes obligent
celles-ci à évoluer dans un contexte d’instabilité
continuelle, dans lequel ce qui semble acquis est
rapidement remis en question. Savoir maîtriser l’information scientifique et technique contenue dans
les brevets pour acquérir un avantage compétitif,
apparaît dès lors comme une nécessité pour assurer
de manière durable le développement de l’entreprise. Dans ce contexte, la veille technologique trouve
une résonnance particulière dans la mesure où elle
peut aider à mieux maîtriser son environnement
externe. D’après Jakobiak (2005, p.125), la veille
consiste à exploiter de manière systématique l’information collectée via l’observation et l’analyse des
environnements scientifique, technique, technologique et économique d’une entreprise, pour déduire
les menaces et les opportunités de développement
qui la concerne, c’est-à-dire pour l’aider à prendre
des décisions à caractère stratégique. Selon Lesca
(1989) et Burkhart (2001), l’une des missions de la
veille est de favoriser l’innovation. Les résultats
attendus sont assurément la mise en avant de savoirfaire, l'identification d'usages nouveaux valorisables
par le marché ou, encore, l'identification d'informations sources de meilleures performances (CaronFasan, 2008).
Notre papier est structuré en trois parties. La
première partie revient tout d’abord sur le lien entre
brevet, veille technologique et innovation. Nous y
présentons des travaux portant sur l’articulation
entre veille technologique et innovation. Cela nous
permet de montrer le lien entre innovation et veille
technologique, ensuite nous identifions les apports
potentiels du brevet dans un tel dispositif. La deuxième partie présente la méthodologie utilisée dans le
cadre de cette recherche. Enfin, la troisième partie
présente les principaux résultats qui sont par la suite
discutés au regard de la littérature existante.
BREVET, VEILLE TECHNOLOGIQUE
ET INNOVATION
Selon Libmann (2011), l’information est le premier ingrédient du pouvoir, et la veille constitue
donc une des toutes premières mailles du processus
d’innovation. Celui-ci présente la veille comme un
élément important pour l’innovation. Les travaux de
Vera et Lellis (2007) ont montré qu’un travail approfondi sur les bases de données des brevets peut
aider à identifier des thèmes prioritaires pour un
programme de développement technologique et,
partant, à favoriser l’innovation.
Selon Brockhoff (1992), la veille sur l’état de la
technique contribue à la recherche des solutions
pour créer des améliorations des inventions déjà
protégées ou saisir une opportunité technologique.
Ceci permet d’identifier les acteurs les plus actifs en
R&D, d’évaluer les positions et les priorités technologiques des concurrents. Ce type de veille peut
concerner les publications de brevets qui contiennent des informations de nature technologique et
concurrentielle susceptibles d’aider à mieux
connaître ses concurrents et favoriser l’innovation à
l’intérieur des organisations. L’approche que nous
présentons dans cet article vise à montrer comment
(2)
Corbel et Raytcheva (2010) dans leur travail sur la hiérarchisation
des rôles du brevet, avaient identifié ce rôle sans toutefois l’approfondir.
54
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Le brevet comme instrument de veille technologique et d’innovation :
une application au secteur automobile
Sylvain Mbongui-Kialo
garantir son succès : « Il serait intéressant qu'elle élargisse l'étendue de sa collecte aux acteurs pertinents
de son environnement et, ainsi, avoir une compréhension beaucoup plus globale des acteurs en présence mais aussi des acteurs potentiels » (CaronFasan, 2008). Les travaux de Lesca (1989) et de
Bukhart (2001) ont ainsi montré que l’une des missions de la veille est d’innover, au sens de West et
Farr (1989, p. 16), c’est-à-dire que l’innovation est
perçue comme l’introduction volontaire au sein
d’une activité, d’un groupe, d’une organisation,
d’idées qui soient à la fois nouvelles et pertinentes,
et dont l’adoption a pour objectif d’augmenter de
manière significative la performance de l’organisation. Cette réalité est en « phase » avec Marquer
(1985, p. 19) qui conçoit le brevet comme « un
moyen d’explorer le gisement technologique, d’en
transmettre la connaissance, de formuler et de stocker l’information de manière telle qu’elle soit facile à
retrouver […] et à évaluer sur tous les plans, d’en
faciliter l’exploitation maximale… ». Pour ce dernier,
il est clair que le brevet peut être un élément essentiel en veille technologique, puisque son utilisation
permet d’explorer les « gisements technologiques »
des tiers en vue d’innover sans risquer d’être bloqué
au moment de développer des nouveaux produits.
Innover par la veille technologique
La veille technologique est une activité mise en
place par un individu ou un groupe d’individus « pour
suivre les évolutions susceptibles d’influer sur le devenir de son métier » (Rouach, 1996, p. 17). Werner et
Degoul (1994) la définissent comme « le moyen pour
l’entreprise de faire émerger les éléments stratégiques
de la masse d’information disponible aujourd’hui. Ni
espionnage industriel, ni réalisation d’un état de
l’art purement spéculatif dans un domaine technique restreint, la veille est avant tout destinée à
éclairer les responsables de l’entreprise dans la résolution des problèmes industriels auxquels ils sont
confrontés ». Elle repose sur une démarche de
recherche, de recueil, de traitement, d’analyse, de
mise en perspective et de diffusion de l’information
scientifique et technique auprès des entités compétentes pour faciliter la prise des décisions appropriées. Dans le même sens, Behohlav et Sussman
(1983) indiquent qu'un des objectifs centraux de la
veille est de faciliter l'identification rapide des
opportunités et des menaces pour l'entreprise. Cela
se traduit par une exploitation et une analyse systématique de l’information collectée pour déduire les
menaces et les opportunités de développement qui
la concerne (Jakobiak, 2005, p.125). Finalement, la
veille technologique permet, entre autres, de mesurer le potentiel technologique du marché (mieux
connaître les concurrents) et de fournir de l’information technique pouvant aider à la mise en place et à
la réalisation des projets d’innovation.
Apports potentiels du brevet
pour la veille technologique
et l’innovation
Généralement considéré comme un output du
processus d’innovation, le brevet constitue une des
matérialisations des résultats des projets de
recherche et développement qui, dans certains cas,
permet d’apprécier la capacité d’innovation d’une
organisation. Cependant, l’évolution rapide de l’économie pousse les entreprises vers une utilisation du
brevet de plus en plus « stratégique » (Corbel,
Raytcheva, 2010). Ce faisant, il ne s’agit plus seulement d’un output, mais d’un input au regard de l’information technologique et scientifique qui font sa
spécificité. D’après Lombard (1998), le portefeuille
de brevets renforce le pouvoir de négociation, facilite les coopérations, assure le succès d’une technologie et convainc les partenaires techniques et commerciaux. La littérature présente le brevet comme un
signal permettant de favoriser la recherche de partenaires industriels. Il joue alors un rôle de « signal de
compétences » (Pénin, 2005). Il devient un véritable
moyen de négociation appelé à jouer un rôle impor-
Selon Ahituv et al. (1998), il existe une corrélation entre la capacité des entreprises à faire de la
veille et leur capacité d'innovation. Ce dernier
indique que la surveillance de l'environnement technologique faciliterait la mise au point et l'introduction d'innovations sur les marchés. C’est une
démarche globale qui offre la possibilité de détecter
les technologies émergentes, de recueillir l’information permettant d’anticiper les innovations et d’identifier les techniques ou les technologies mises en
œuvre par les tiers. Dans le même ordre d’idées,
Caron-Fasan (2008) montre que l’association de la
veille et de l’innovation, « conduit le plus souvent les
entreprises (grandes et moyennes) à mettre en place
une activité d'intelligence économique et, plus spécifiquement, un processus de veille technologique ».
Cependant, celle-ci demande d’adopter une vision
plus ou moins large de la veille technologique pour
55
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
tant parce qu’il facilite les interactions entre acteurs
(Bureth et al., 2006). Ce moyen de négociation
encore appelé « legal bargaining chip », permet de
mettre en commun au moins deux acteurs hétérogènes. Ainsi, il favorise la recherche de partenaires
industriels en R&D et met un « peu d’ordre dans le
développement de larges perspectives technologiques »
(Mazzoleni, Nelson, 1998).
décourager les attaques juridiques des concurrents
ou tout simplement de « déminage » (éviter qu’un
concurrent ne bloque l’accès à une technologie), ou
encore vecteur d’une image d’entreprise innovante ».
Il nous semble alors important d’aller plus loin dans
la compréhension de son utilisation effective dans le
processus de veille technologique. Ce papier nous
donne la possibilité d’approfondir ce rôle classé
numéro 4 par Corbel et Raytcheva (2010) dans leur
étude. Ahituv et al. (1998), cité par Caron-Fasan
(2008), montre une corrélation entre la capacité des
entreprises à faire de la veille et leur capacité d'innovation. Il indique à ce titre que les entreprises qui
réussissent le mieux à introduire de nouveaux produits sur leurs marchés, sont celles qui ont une activité de veille qui n'est ni focalisée, ni étroite mais
qui, au contraire, se modifie et s'adapte en permanence à l'environnement.
Il existe un consensus largement partagé : le
brevet joue un rôle stratégique, à la fois comme protection d’une compétence particulière, comme
garant d’un avantage concurrentiel et comme outil
de création de valeur (Breesé, 2002 ; Penin, 2005 ;
Corbel et al., 2007 ; Lallement, 2008). En sus, enregistrant l’innovation technologique souvent avant
tout autre support de communication, il est potentiellement un formidable outil de veille (voir par
exemple Corbel, Raytcheva, 2010). Chaque brevet
rappelle l’état antérieur de la technique et cite souvent des brevets ou autres publications antérieures
ayant été rendus publics. On peut ainsi remonter la
filière complète d’une technologie donnée (Marquer,
1985, p. 151). Se définissant comme « une solution
technique à un problème technique », le brevet
représenterait un puissant stimulant de la recherche
de solutions innovantes. Selon Kabla et Guellec,
(1994, p. 86), il est un facteur d’accélération des progrès techniques, car il obéit à un processus interactif et cumulatif dans la mesure où il doit obligatoirement comporter les citations d’antériorités. L’analyse
de l’information brevet aide à trouver des solutions
nouvelles et à ne pas être bloqué par un concurrent :
« Rien de tel que de buter sur des brevets des concurrents, de les évaluer et de chercher, en équipe, à les
contourner et à mieux faire, pour stimuler les idées
de tous » (Kermadec, 2001, p. 58).
Face à cette situation, nous proposons dans la
suite de cet article, d'apporter un regard critique sur
l’utilisation des brevets des tiers comme instrument
de veille technologique au sein des bureaux
d’études de PSA Peugeot-Citroën.
MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Dans le prolongement des travaux portant sur
la veille technologique, notre recherche traite de
l’utilisation des brevets comme instrument de veille
technologique. La méthodologie de recherche mobilisée s'appuie sur une démarche qualitative fondée
sur une étude de cas à dominante exploratoire, réalisée chez PSA Peugeot-Citroën. Nous avons privilégié une démarche visant à obtenir un échantillon
représentant le mieux possible la diversité des positions au sein du processus de conception d’un véhicule automobile et de ses principaux organes. Nous
n’avons pas cherché à obtenir un échantillon représentatif du personnel des bureaux d’études au sens
statistique du terme, mais nous voulions interroger
des personnes au profil suffisamment diversifié pour
obtenir un panorama global. Le recueil des données
a été possible grâce à une vingtaine d’entretiens qui
ont été menés sur un mode semi-directif, dans le
cadre d’un guide d’entretien structuré autour de trois
grands thèmes (activité du bureau d’étude, rôle du
brevet et ses différentes utilisations dans le processus d’innovation). Chaque entretien a duré entre 45
minutes et 1 heures 30 minutes, avec une moyenne
Si plusieurs travaux (Marquer, 1985 ; Penin,
2005 ; Corbel, et al., 2007 ; Le Bas, 2007 ; Corbel,
Raytcheva, 2010) insistent sur le rôle stratégique du
brevet, peu sont ceux (Jakobiak, 1994 ; Walker,
1995) qui le considèrent comme un véritable outil de
veille technologique. Or, cette dimension est intimement liée à la nature même du brevet, un outil efficace offrant non seulement la possibilité d’être informé des avancées technologiques des concurrents
mais aussi, comme l’indique Corbel, (2006) un actif
dont « les rôles potentiels sont encore plus nombreux
: instrument de motivation des ingénieurs d’études
ou des chercheurs, outil de dissuasion destiné à
56
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Le brevet comme instrument de veille technologique et d’innovation :
une application au secteur automobile
Sylvain Mbongui-Kialo
d’une heure. Ils ont été intégralement retranscrits de
manière à pouvoir travailler sur le verbatim original.
Les données collectées ont fait l’objet d’une analyse
thématique sous deux approches : analyse verticale
et analyse horizontale.
vet permet de voir où est le concurrent ou le fournisseur en termes de développement technique. Une lecture approfondie des brevets des concurrents peut
aussi permettre d’identifier les futures voies de développement technologique des concurrents. Le brevet
permet d’orienter notre innovation ». Le recours aux
brevets des tiers est assurément une option intéressante, puisqu’il aide à l’acquisition des connaissances nouvelles, à gagner du temps sur la
recherche et le développement, à connaître le droit
des tiers, à être sûr de la liberté d’exploitation d’une
invention et à orienter et affiner le raisonnement des
ingénieurs : « Lorsque j’ai déposé mon brevet c’était
pour protéger un modèle de calcul plus complet [….]
et lorsque mon analyse d’antériorité est arrivée, je me
suis rendu compte qu’il y avait déjà un certain
nombre de briques de l’ensemble de ce que je voulais
protéger qui étaient protégés sans que cela puisse
affecter mon idée car j’avais une approche différente. Mais du coup, je ne pouvais plus protéger ce que
je voulais protéger initialement et ça m’a réorienté
vers la partie d’initialisation du calcul qui n’avait
pas du tout été protégée. Cette démarche a affiné
mon raisonnement car les études d’antériorité permettent d’affiner les idées ».
PRÉSENTATION ET DISCUSSION
DES RÉSULTATS
D’une façon générale, l’utilisation des brevets
des tiers offre des informations capitales sur l'évolution de l’environnement technologique et juridique,
en vue de mieux s'adapter aux changements de
celui-ci. Ce faisant, l'une de ses missions est d’alimenter le processus d’innovation en apportant des
informations intéressantes : « Les brevets de concurrents qu’ils soient en vigueur ou déchus, disons, tout
document de propriété industrielle peut être une
source intéressante d’informations ».
Présentation et Analyse des résultats
Le premier rôle identifié est celui de la protection : « On a intérêt à déposer le maximum de brevet
pour nous protéger ». « La réflexion de la protection
nous permet de rentrer dans le brevet. La deuxième
façon de rentrer dans le brevet c’est la veille technologique. La troisième façon c’est de tenter de faire un
état de lieux brevet sur un projet véhicule complet.
C’est-à-dire, qu’on cherche à savoir : quels sont les
sujets nouveaux (protégés ou non) ; comment les
contourner le cas échant. Ça permet de cartographier la situation des brevets sur un projet de véhicule donné. C’est un point d’entrée possible dans les
phases amont ». In fine, le brevet représente, pour
bon nombre de bureaux d’études, un instrument
permettant, non seulement d’être informé des avancées technologiques des concurrents mais aussi un
actif au service de l’innovation permettant d’identifier
les failles technologiques des concurrents : « Quand
on utilise le brevet comme input, on n’a pas de choix
si ce n’est chercher les failles dans les brevets des tiers.
L’identification et l’exploitation de ces failles peut
effectivement générer des nouvelles idées, qui seront
à l’origine d’une invention brevetable. Car il est
essentiel de voir ce qui se fait dans la concurrence.
Cela permet de se positionner par rapport à ce que
font les autres ». Il aide à repérer les « points chauds »,
c’est-à-dire les domaines où il y a une « accumulation de demandes de brevets ». Plus encore, « le bre-
Les résultats font apparaitre trois types de veille :
veille ponctuelle, veille réactive et veille anticipative.
La veille brevet ponctuelle porte sur un sujet très
précis. Elle est spontanée parce que menée de façon
naturelle pour répondre à une préoccupation immédiate, correspondant à un besoin explicitement formulé : « Dans notre entité, la veille n’est pas régulière. Enfin, je veux dire que nous la faisons un peu de
manière spontanée dès lors que nous sommes
confrontés à un problème et que nous souhaitons
regarder dans les brevets des autres pour trouver une
solution, […..] ou tout simplement pour vérifier si
l’idée a déjà été brevetée ». La veille brevet réactive
permet de détecter les opportunités et les menaces
en révélant les événements sensibles et tendances
prévisibles : « Chez nous, la veille brevet permet de
préparer et d’identifier les technologies susceptibles
d’être utilisées dans le domaine automobile ». Par
ailleurs, la veille dans les bases de données brevet
aide à « interpréter les grandes tendances scientifiques au sens large, c’est-à-dire toutes les tendances
scientifiques en rapport avec l’automobile dans le
monde… ». Enfin, la veille anticipative contribue à la
recherche d’une certaine vision du futur sur un horizon de temps probabiliste et de lever l’indétermina-
57
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Figure 1
Les différentes phases d'utilisation du brevet avant son intégration dans le processus de
décision
se décline en sept étapes (figure 1), visant à « préparer » l’information brevet en vue de son intégration
dans le processus d’innovation.
tion sur le sens de l’évolution. Elle permet « …d’anticiper les grandes découvertes scientifiques, […],
voire détecter d’éventuelles opportunités dans les
sciences de l’ingénieur ».
Cette démarche est soit pilotée par un individu,
soit par un réseau d’acteurs qui s’appuie sur des processus d’animation et des outils afin de construire de
nouvelles connaissances, de nouveaux savoirs et des
nouvelles stratégies pour dynamiser l’innovation.
Ainsi, les préoccupations décisionnelles en matière
d’innovation et d’acquisition d’informations technologiques, confèrent au brevet une place centrale
dans les bureaux d’études. D’après la plupart des
interviewés, l’analyse et l’interprétation de l’information brevet donnent la possibilité de prendre une
diversité de décisions tout au long du processus d’innovation, soit pour créer des améliorations des
inventions existantes, soit pour saisir des opportunités technologiques nouvelles. Cependant, bien que
la grande majorité exploitent les bases de données
brevets, il n’existe pas de démarche ou de méthode
préalablement établie pour le faire : « Je regarde les
revendications du brevet en fonction de ce que l’on
cherche. Je regarde les brevets cités » ; « La méthode
n’est pas clairement définie. Chaque expert ou ingénieur la fait à sa manière ». Dans la majorité des cas,
le recours aux brevets des tiers est dicté soit, par la
culture brevet présente dans le bureau d’études, « On
nous encourage à faire des dépôts de brevets et utiliser la créativité des personnes », soit par l’expérience
antérieure du salarié. Il existe dans certains bureaux
d’études des sous-structures dénommées « cellules
d’intelligence technologique » ou « réseau concurren-
Avant toute démarche de veille, il est plus
qu’essentiel de circonscrire le périmètre de
recherche afin de collecter les brevets les plus pertinents ou ceux ayant un lien avéré avec le problème
à résoudre. La veille technologique permet de passer
d’une information brute à une « information intelligente » afin de la rendre plus exploitable et diffusable auprès des autres. Plus précisément, il s’agit,
d’une part, d’identifier l'intérêt de contenu informationnel du brevet et, d’autre part, d’analyser et d’interpréter les technologies usitées par les tiers. C’est
un exercice offrant la possibilité de retrouver la
trace d’idées existantes et de repérer les points
chauds : « En intelligence technologique, l’essentiel
c’est de savoir où il se passe des choses c’est-à-dire
savoir repérer les points chauds. Le plus important c’est
de détecter (le domaine ou secteur) où il y a une accumulation de demandes de brevets (point chaud) ».
Toutefois, pour que ce raisonnement soit bénéfique,
une grande partie des répondants reconnaissent qu’il
faut se poser de bonnes questions. Parmi les questions qui viennent, nous pouvons citer : « Que veuton surveiller ? » ; « Comment se procurer l’information correspondante ? » ; « Comment interpréter cette
information ? » ; « Quelles connaissances nous apporte-t-elle ? » et « Comment l’incorporer dans le processus d’innovation ? ». Une analyse plus fine des résultats permet de mettre en évidence une démarche qui
58
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Le brevet comme instrument de veille technologique et d’innovation :
une application au secteur automobile
Sylvain Mbongui-Kialo
ce » qui s’occupent de surveiller la concurrence : « Ce
qui est intéressant c’est qu’on a mis en place depuis
cette année dans notre service un réseau concurrence. C’est-à-dire qu’au lieu de déléguer le pilote projet
de recueillir les informations sur la concurrence,
nous avons mandaté une personne qui fait de la
veille concurrentielle en temps plein. Ça devient une
bible qui contient plusieurs informations sur la
concurrence….. ».
d’une démarche de veille technologique. Ils évoquent plusieurs raisons. La première raison est celle
relative à l’absence d’outils pour effectuer des
recherches dans les bases de données : « si j’avais à
ma disposition des outils simples, quand j’ai un peu
du temps libre je chercherais à savoir ce qui a été
déposé et/ou ce qui ne l’a pas été dans un domaine
technique précis, c’est vrai que ça pourrait m’aider ».
« On n’a pas ces outils-là. Donc à mon avis, ça fait
du travail en plus pour le service brevet ». Néanmoins,
il convient de préciser que le nombre de personnes
évoquant cette raison reste très insignifiant par rapport à l’ensemble des non utilisateurs du brevet, soit
un répondant sur les six répondants non utilisateurs
de veille brevet. La deuxième raison évoquée est liée
à la difficulté d’utilisation de l’outil dédié à la
recherche dans les bases de données. Bien que
constitué de deux interfaces (une interface « guidée »
pour un nouvel utilisateur ou utilisateur occasionnel)
et une interface dite performante, il est perçu par certains comme un outil difficile à utiliser : « Je sais qu’il
existe un lien intranet sur les recherches dans les bases
de données brevets. Je ne l’ai pas trouvé convivial car
je n’ai pas pu trouver ce que je cherchais ». « On a
énormément besoin de l’aide du service brevet ». La
troisième raison est celle liée à la complexité du brevet aussi bien dans la lecture que dans la compréhension de son contenu. « Ce n’est pas toujours facile car le vocabulaire utilisé n’est pas facile à comprendre. Lorsqu’on lit un brevet, il faut bien comprendre ce qui est protégé, or ce n’est pas toujours
évident ». Le langage n’est pas celui qui est employé
habituellement. Cet exercice devient plus difficile
lorsqu’il faut lire des brevets écrits dans une langue
autre que le français. La quatrième raison est la perte
de temps. Rien ne permet de penser que l’utilisation
de brevets de tiers accélérera le processus d’innovation. Pour d’autres, le brevet inhiberait la capacité à
innover et à créer : « …, c’est plutôt une problématique qui n’est pas de trouver des solutions en regardant un tout petit peu ce que les autres font, mais
plutôt en partant de nos besoins identifiés. À partir de
ce moment, on voit si on peut breveter l’idée ». Enfin,
une raison plus surprenante a été identifiée : l’implication forte du service brevet. Cette dernière raison
présente le service brevet comme un frein à l’utilisation des brevets des tiers : « j’ai eu besoin de vérifier
certains éléments sur […], je fais la demande au sein
du service brevet via l’interface prévue pour ça. C’est
le service brevet qui fait ces types de recherches ». En
d’autres termes, « nous nous appuyons sur le service
Par ailleurs, la recherche dans les bases de données brevets est un travail délicat et parfois difficile
à effectuer. S’il existe des cas simples où la recherche
est effectuée à partir du nom d’un inventeur, les
interviewés
reconnaissent
toutefois
qu’une
recherche basée sur le nom d’un inventeur permet
de découvrir une famille de demande de brevets
dont l’analyse peut s’avérer complexe. Cette complexité s’intensifie « quand on n’a pas de noms d’inventeurs ni de société, et qu’on travaille sur des mots
clés thématiques. Et là, il faut se méfier parce qu’il y
a plusieurs synonymes. Certaines personnes en charge de rédiger les brevets vont utiliser par exemple le
terme « numérique », alors que d’autres utiliseront les
termes « digitale et électronique » pour exprimer la
même chose ». Ainsi, un ingénieur qui utilise la terminologie « numérique » pour effectuer ses
recherches, peut passer à côté de plusieurs brevets pertinents. « C’est la même chose pour le terme
« moteur », un malin qui rédige la demande de brevet d’une société peut bien utiliser le mot « convertisseur d’énergies thermo-mécanique » pour dire
moteur. Il peut le faire pour que le mot moteur n’apparaisse pas dans les résultats de recherche dans les
bases brevets ». La veille technologique à l’aide des
brevets constitue de ce point de vue, un couteau à
« double tranchant ». La prudence est donc de mise :
« la lecture d’un brevet des tiers donne forcement des
idées, après, il est toujours délicat de l’utiliser au
risque de ne pas reproduire la même chose » ou de
passer à côté d’une information capitale.
Enfin, inscrits dans une démarche intéressante,
les bureaux d’études ont su intégrer aisément les
brevets des tiers dans leur problématique d’innovation. Ils sont tous convaincus de l’apport effectif du
brevet, à l’exception d’une infime partie des répondants qui restent sceptiques par rapport à l’utilisation
des brevets des tiers comme input dans le processus
d’innovation. En effet, certains ingénieurs ne jugent
pas utile d’utiliser les brevets des tiers dans le cadre
59
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
brevet » pour faire la veille technologique.
des thèmes prioritaires pour un programme de développement technologique et, partant, à favoriser l’innovation. Cela est conforté par l’analyse empirique
qui voudrait que la veille dans les bases de données
brevets puisse orienter l’innovation et la créativité.
Par ailleurs, la littérature présente le brevet comme
un signal permettant de favoriser la recherche de
partenaires industriels (Pénin, 2005). Il devient un
véritable moyen de négociation appelé à jouer un
rôle important parce qu’il facilite les interactions
entre acteurs (Bureth et al., 2006). Bien que très éloignée, cette situation est tout de même repérable
dans les résultats de notre étude. Ces derniers montrent de façon indirecte que le brevet peut être un
moyen de s’approprier les bénéfices liés à une innovation, certes, mais aussi de signaler une compétence et de faciliter les négociations entre plusieurs
acteurs.
Discussion des résultats
Le rôle de protection est le plus couramment
cité et, par conséquent, le plus important (voir
Corbel, Raytcheva, 2010). Nonobstant ce rôle de protection, notre étude permet de comprendre que le
brevet est une source d’information efficace dans la
mesure où il permet d’être d’informé des avancées
technologiques des tiers. Ce besoin qui sous-tend
l’acquisition de l’information brevet repose particulièrement sur un objectif de minimisation de risque
et de réduction de l’incertitude liée à la prise de
décisions en matière d’innovation. Et cela est en adéquation avec la plupart des répondants qui estiment
que l’industrie automobile est confrontée à des
risques réels, et que le brevet à ce titre, apparait à
leurs yeux comme étant, à la fois, un instrument de
protection de leurs inventions et un moyen pour
suivre et contrôler les stratégies d’innovation des
tiers (rejoignant ainsi Kabla et Guellec, 1994). Notre
étude montre qu’il est extrêmement important
d’avoir une bonne connaissance des technologies
détenues par les tiers, de leur valeur en termes de
points forts et de faiblesses. Ce qui se rapproche,
d’une part, des travaux de Marquer (1985, p.19) pour
qui le brevet est un moyen d’explorer le gisement
technologique et, d’autre part, de ceux de Brockhoff
(1992) qui présente la veille sur l’état de la technique
comme la recherche des solutions pour créer des
améliorations des inventions déjà protégées ou saisir
une opportunité technologique. Cela s’inscrit dans
une vision purement stratégique donnant l’opportunité de voir ce qui se fait dans la concurrence : « le
brevet permet de voir où est le concurrent ou le fournisseur en termes de développement technique », et
de se positionner par rapport à l’environnement
externe pour mieux répondre aux attaques des
concurrents. Cela rejoint les conclusions issues de
l’étude de Werner et Degoul (1994). Pour ces deux
auteurs, la veille est le moyen pour l’entreprise de
faire émerger les éléments stratégiques destinés à
éclairer les responsables de l’entreprise dans la résolution des problèmes auxquels ils sont confrontés.
Dans ces conditions, et en accord avec Libmann
(2011) et Ahituv et al. (1998), la veille est présentée
comme un élément important pour l’innovation.
Dans le même ordre d’idées, les travaux de Vera et
Lellis (2007) ont montré qu’un travail approfondi sur
les bases de données brevets peut aider à identifier
Plus généralement, la mise en place d’une
démarche de veille brevet permet d’alimenter un
réservoir de données dont l’objectif est, soit de faire
émerger des idées, soit de choisir celles qui ont le
potentiel le plus important et pour lesquelles des
ressources vont être allouées. Ces résultats corroborent les recherches de Lesca (1989) et de Bukhart
(2001) qui ont ainsi montré que l’une des missions
de la veille est d’innover. Toutefois, pour que le brevet soit un véritable instrument de veille technologique, il est primordial que « le service brevet vienne
dans tous les métiers y compris ceux qui ne sont pas
forcément en ligne directe avec l’innovation pour
expliquer la démarche ». Une sensibilisation s’avère
donc utile pour vulgariser l’utilisation du brevet au
sein des bureaux d’études.
CONCLUSION
Nous avons souhaité montrer que le brevet
pouvait être considéré comme un instrument de
veille technologique au service de l’innovation. Une
approche basée sur l’analyse des brevets des tiers
semble être une piste intéressante. Le succès d'une
telle démarche requiert davantage une sensibilisation et une adhésion des parties-prenantes aux rôles
du brevet comme élément permettant de s’adapter à
la variabilité de l’environnement technologique. Cet
article permet également, mais de manière plus éloignée, de voir que l’utilisation des brevets des tiers
peut permettre de négocier et de collaborer plus
60
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Le brevet comme instrument de veille technologique et d’innovation :
une application au secteur automobile
Sylvain Mbongui-Kialo
facilement avec les autres acteurs du marché. Il
démontre ainsi que, loin d’être uniquement un instrument juridique, le brevet est une véritable source
d’informations scientifique et technologique pouvant
impacter positivement le processus d’innovation.
firmes de mieux contrôler leur environnement externe d’un point de vue holistique. Nous montrons à ce
titre que l’utilisation des brevets des tiers peut apporter des solutions concrètes à cette situation, grâce
notamment à l’information scientifique et technologique contenue dans les documents brevets. La
démarche de veille brevet ci-dessus développée
pourrait, si elle s’inscrit dans une démarche de veille
technologique rigoureusement menée, contribuer à
éclairer les « veilleurs » dans la résolution des problèmes industriels et concurrentiels auxquels ils sont
confrontés.
Enfin, l’examen de la littérature a révélé qu’il
existe encore, dans le champ du management stratégique des droits de la propriété industrielle et de
celui du marketing, certains domaines à approfondir,
concernant notamment la compréhension du rôle du
brevet dans la stratégie industrielle d’une firme. Les
études sur le sujet sont rares, sans doute parce que
le brevet est avant tout considéré comme l’un des
résultats du processus d’innovation, c’est-à-dire
comme un output. Pourtant, les rôles du brevet identifiés dans la littérature, renchéris par les résultats de
notre étude, montrent que ce sujet est loin d’être
négligeable. En conséquence, la présente investigation nous fournit un apport intéressant sous deux
angles : théorique et empirique. Du point de vue
théorique, elle a tenté de contribuer à enrichir la littérature en sciences de gestion. Un des apports principaux de notre recherche présente le brevet non
pas comme un output, mais comme un input qui
peut constituer un moyen d’améliorer les performances d’une organisation en se basant sur une
démarche de veille brevet. Du point de vue pratique,
cet article met en avant des apports managériaux de
différentes natures. En effet, si la variabilité et les
mutations économiques et technologiques constituent une des préoccupations centrales des opérateurs économiques, force est de constater la difficulté de trouver des outils capables de permettre aux
Cette recherche offre plusieurs avantages mais
également plusieurs limites. Une des limites de cette
étude réside assurément dans notre positionnement
qui est davantage stratégique que marketing. Même
si, il faut le reconnaitre, le brevet est une arme stratégique comme le souligne Lallement (2008), un
positionnement marketing du sujet serait d’une grande utilité en sciences de gestion eu égard à la rareté
de recherche dans ce domaine. On pourra par
exemple reconduire la même investigation dans une
perspective « marché » en mettant l’accent soit sur
l’articulation brevet – veille concurrentielle, soit sur
l’innovation en marketing. Par ailleurs, reposant sur
une étude de cas unique, notre recherche mérite
d’être affinée et vérifiée sur un large échantillon qui
offrirait une diversité de caractéristiques. Cette
réflexion appelle donc des prolongations en termes
de recherche pour confronter les résultats de cette
recherche à d’autres recherches sur des secteurs
d’activité différents.
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62
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Organisateurs
Manifestation
Les Échos
Les 10ème
Assises
du Marketing.
Esomar
Congrès 2013.
Omyagué
Thèmes
Dates
17
septembre
2013
Informations pratiques
Lieu : Paris.
www.lesechos-conferences.com/
Du 22
au
25 septembre
2013
Lieu : Istanbul.
www.esomar.org
Salon
Omyagué
2013.
Du 24
au
25 septembre
2013
Lieu : Pavillon Cambon Capucine, 75001
Paris.
www.omyague.com/cadeaux-motivationsalon.htm
Ediatilis
Factory
Les Enseignes
de l’année
2013.
25 septembre
2013
Lieu : Paris.
www.enseignes-annee.fr
Reed
Expositions
Viscom Paris.
Communication visuelle et
Industrie graphique.
Du 24
au
26 septembre
2013
Lieu : Paris Nord Villepinte, Hall 8.
www.viscom-paris.com
Reed
Expositions
IFTM Top Resa
2013.
Salon du tourisme et des
voyages en France.
Du 24
au
27 septembre
2013
Lieu : Paris, Porte de Versailles, Pavillon
7.2.
www.iftm.fr
Reed
Expositions
VAD et ECommerce.
Think Big.
1er
Octobre
2013
Du 1er
au
03 octobre
2013
ERP
Les Salons
Solutions.
Association
des Anciens
Élèves
de l’ACI
Colloque.
Les seniors managers en
période de crise.
Hub Institute
Hub Forum.
Return on innovation.
GL Events
Jeudi 3
octobre,
15h00, 18h00
http://www.vad-ecommerce.com
[email protected]
Lieu : CNIT - Paris La Défense.
www.salons-solutions.com/
Lieu : Palais du Luxembourg, Salle Gaston
Monnerville, 26 rue Vaugirard, 75 006 Paris
Du 10
au
11 octobre
2013
Lieu : Paris 8, Espace Pierre Cardin.
VAD Conext
2013.
Du 22
au
24 octobre
2013
Lieu : Grand Palais, Lille.
www.vadconext.com
Luxe Pack
Monaco 2013.
Du 23
au
25 octobre
2013
Lieu : Monaco, Grimaldi forum.
www.luxepack.com
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ACTUALITÉS
AGENDA : conférences, formations et séminaires
ADETEM
Organisateurs
Editialis
Manifestation
Dates
Thèmes
Conférence
Relation Client
Magazine.
Webdeux.Conn
ect 2013.
Communication, Médias,
Multimédia Site Internet.
Informations pratiques
6 novembre
2013
Lieu : Paris.
http://conferences.relationclientmag.fr
6 et
7 novembre
2013
Lieu : Paris.
http://connect.webdeux.info
Esomar
Qualitative
2013.
Du 17
au
19 novembre
Lieu : Valence.
www.esomar.org
Esomar
The future of
mobility 2013.
Du 19
au
20 Novembre
2013
Lieu : Valence.
www.esomar.org
Salon
E-commerce
Tunis 2013.
21 et
22 Novembre
2013
Lieu : siège de l’UTICA, Tunis (Tunisie).
http://www.ecommercetunis.com
26 novembre
2013
www.adetem.org
Adetem
Journée
nationale
du marketing.
IFM
41èmes Journées
annuelles.
Du 26
au
28 novembre
2013
Lieu : Paris.
www.ifm.asso.fr
MLG
9ème DevCom
Midi-Pyrénées
2013 + Planète
e-commerce.
29 Novembre
2013
Lieu : CCI, Toulouse.
www.devcom-midipyrenees.com/
MLG
7ème DevCom
Nantes Grand
Ouest 2013 +
Planète
e-commerce
4 Décembre
2013
Lieu : CCI Nantes-St Nazaire, Nantes.
Leweb Paris
2013.
du 10
au
12 décembre
2013
Lieu : Paris.
www.leweb.co/
Du think-tank au do-tank.
Adetem
Journée
Nationale des
Études.
23 janvier
2014
www.adetem.org
Reed
Expositions
MPV - Salon
Marketing Point
de Vente.
Du 1er avril
au
3 avril
2014
Lieu : Paris expo, Porte de Versailles.
http://www.mpv-paris.com
[email protected]
64
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Agenda : conférences, formations et séminaires
Organisateurs
Manifestation
Comexposium
Salon du retail,
de la distribution et du point
de vente.
Dates
Thèmes
Du 16
au
18 septembre
2014
Informations pratiques
Lieu : Paris expo, Porte de Versailles.
www.equipmag.com
Rubrique rédigée par
Estelle Burget, Adetem
65
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
LE PROJET DE « CLASS ACTION » À LA FRANÇAISE :
RÉPARATION COLLECTIVE OU ARME DE DISSUASION ?
Pendant plus de quarante ans, les associations de consommateurs ont revendiqué son introduction dans le
droit français, les entreprises s’y sont toujours opposées. L’action de groupe, action collective ou « class action »,
en dépit de multiples projets, promesses électorales, amendements parlementaires, en est restée au stade du serpent de mer.
Les détracteurs de l’action de groupe avaient un discours bien rodé. Juridiquement, l’action de groupe qui
permet à un grand nombre de consommateurs d’engager une action commune en réparation devant les tribunaux en ayant un représentant, heurte notre système juridique selon lequel nul ne plaide par procureur. Les
dévoiements américains, avec, parfois des actions de groupe conduites par des avocats s’enrichissant sur le dos
des entreprises et des victimes, étaient utilisés comme repoussoir.
Pour les partisans de l’action collective, la protection des consommateurs justifiait une modification du régime. Si, seul le préjudice individuel peut être réparé et que c’est à chaque consommateur qu’il incombe de rapporter la preuve, non seulement de la faute du professionnel, mais aussi de son préjudice et du lien de causalité, aucune action ne pourra être sérieusement engagée, le montant individuel de chaque litige rend improbable des milliers ou des millions de procédures. Les obstacles procéduraux, pour limiter l’action en représentation conjointe par laquelle un consommateur donne mandat à une association agréée de consommateurs qui
existe déjà dans le Code de la Consommation, rendent indispensable l’introduction d’un recours collectif.
Fraichement nommé, Monsieur Benoît Hamon, Ministre délégué chargé de l’Économie sociale et solidaire
et de la consommation, a saisi en octobre 2012 le Conseil National de la Consommation (CNC) sur le champ
d’application de l’action de groupe, le mode de constitution du groupe, le déroulement de la procédure et les
modes d’indemnisation. L’avis a ouvert la porte à une « class action » réservée aux associations de consommateurs et permettant de filtrer les procédures. L’avis du CNC recommandait la mise en place d’une action de groupe pour la seule réparation des dommages matériels subis par les consommateurs et proposait de réserver
l’exercice de l’action de groupe aux seules associations de consommateurs agréées représentatives au plan
national. Il prônait l’instauration d’un cadre juridique qui permet d’empêcher les actions infondées ou abusives
contre les entreprises.
La consultation auprès du grand public, organisée en novembre 2012 par la Direction générale de la
concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), a également fait ressortir un appétit des consommateurs pour cette défense collective.
Le serpent de mer fait finalement sa mue et adopte une peau plus lisse.
Un projet s’inscrivant dans le cadre proposé par le CNC a été élaboré, limitant les dérives des actions de
groupe et réduisant le nombre potentiel de dossiers. Le projet, par certaines de ces options, pourrait laisser croire que l'objectif est non d'adopter une loi d'affichage, mais de poser le principe d’une action. L’action de groupe existera, mais ses modalités de mise en œuvre en rendront l'application quantitativement peu importante, en
dépit de dispositions destinées à simplifier l'indemnisation.
67
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ACTUALITÉS
Actualités juridiques
ADETEM
La première précaution consiste à accorder en exclusivité aux associations de consommateurs agréées (16
à ce jour) le monopole de représentation en justice, au grand dam des avocats qui se voient éliminés et ne pourront pas constituer des associations ad hoc. L’objectif consiste à disposer d’un filtre indépendant et sérieux permettant d’éviter les actions trop téméraires destinées à simplement contraindre le professionnel à transiger.
La deuxième précaution consiste à circonscrire le champ de l’action de groupe aux préjudices matériels
des consommateurs personnes physiques, à l’exclusion des dommages corporels et préjudices moraux et à l’exclusion des professionnels et des entreprises. Ainsi, le préjudice découlant du risque médical sera écarté.
La troisième précaution consiste à privilégier le mécanisme, dit d’ « opt-in », (les membres potentiels doivent indiquer s’ils souhaitent être représentés dans le cadre de l’action engagée). L’ « opt-out » intègre par défaut
toutes les victimes potentielles d’un comportement identifié, celles-ci ayant la faculté de s’exclure, si elles ne
souhaitent pas être partie à l’instance engagée.
L’enjeu était de taille, car il est bien évident que toute formalité exigée du consommateur soit pour s’associer, soit pour se dissocier de l’action, est peu suivie d’effet. Si l’inaction du consommateur déclenche son
adhésion ou son exclusion du groupe, le nombre de participants à l’action sera radicalement différent.
Le choix de l’ « opt-in » est donc un gage donné aux entreprises pour que les actions de groupe à la françaises ne rassemblent pas des millions de victimes. L’affaire de la téléphonie mobile a d’ailleurs révélé que les
millions de victimes des pratiques anticoncurrentielle sanctionnées par le Conseil de la concurrence se sont traduites par seulement une dizaine de milliers de plaignants qui ont d’ailleurs, pour des raisons procédurales, été
déboutés.
Le principe de l’ « opt-in » est posé par l’article L 423-3 alinéa 5 du Code de la Consommation qui prévoit
une adhésion du consommateur au groupe pour obtenir l’indemnisation de son préjudice, traduisant ainsi
l’adoption d’un système d’ « opt-in ». Dans ce cas, pour obtenir réparation de leur préjudice, les consommateurs ayant fait acte d’adhésion au groupe verront d’abord un juge, statuant sur la responsabilité du professionnel, choisir entre deux modalités de réparation :
• soit, il permettra au consommateur de réclamer son indemnisation directement auprès du professionnel ;
• soit, il chargera l’association de cette tâche, cette dernière répartissant par la suite l’indemnisation au profit des consommateurs.
Le projet d’article L 423-4 du Code de la Consommation dote le juge d’une faculté supplémentaire consistant en la possibilité de désigner un « tiers » aux frais du professionnel. En l’absence de précision, l’on peut penser que ce tiers sera un mandataire. Le juge pourrait recourir à ce dernier afin de mettre en œuvre l’indemnisation des consommateurs, notamment lorsque cette mission excède le champ des intérêts de l’association ou
bien lorsqu’une partie significative des consommateurs n’a plus de liens contractuels avec le professionnel ou,
encore, lorsque l’exécution par le professionnel des condamnations semble incertaine.
Les rédacteurs de ce projet de loi ont cependant inclus un système de quasi « opt-out » au sein de la procédure de l’action de groupe (articles L423-5 du Code de la Consommation) en vue de permettre une gestion
plus automatique dans le cadre d'une procédure simplifiée.
Ainsi, « lorsque le montant des préjudices individuels subis par chaque consommateur est identique et que
le nombre de ces consommateurs est connu », il ne sera nul besoin d’adhérer au groupe pour obtenir réparation
de son préjudice si le texte est adopté en l’état. En effet, le juge pourra décider de charger l’association de percevoir la totalité des sommes dues et de les attribuer à chaque consommateur qui en fera la demande et, à
défaut, reversera cette somme au professionnel. Il peut aussi décider que le professionnel indemnisera « direc-
Actualités juridiques
tement et individuellement » chaque consommateur « identifiable ». La particularité de cette dernière hypothèse
est qu’en cas d’inexécution du professionnel, ce processus basculera alors, soit vers l'option précédente (versement à l'association de l'intégralité du préjudice avec restitution éventuelle du non distribué), soit vers le système d’ « opt-in » de l’article L 423-3 alinéa 5 du Code de la consommation, impliquant ainsi la nécessité pour le
consommateur d’adhérer au groupe afin d’être indemnisé.
L’action de groupe, même limitée, aura un impact pour les entreprises qui devront évaluer le risque de
telles actions et anticiper ces éventuelles procédures comme la publicité qui y sera attachée. L’impact de cette
innovation législative attendue depuis si longtemps par les représentants des associations de consommateurs et
appréhendée par les entreprises aura aussi inévitablement un effet sur la gestion des contentieux de masse.
Toutefois, si la Loi est promulguée, elle obligera toutes les entreprises à être significativement plus attentives aux petits contentieux isolés qui pourraient être utilisés comme un test avant une action de groupe.
La réparation élargie et la facilité des litiges de consommateurs pourraient alors être un moyen de prévention. Les détails de procédure renvoyés à des décrets, devront être examinés attentivement pour apprécier
si l’action de groupe peut devenir une arme de dissuasion contribuant ainsi à une meilleure protection des
consommateurs et concrétiser un proverbe persan selon lequel, « Le serpent change de peau, non de nature »…
Jean-Louis Fourgoux
Avocat
Barreaux de Paris et de Bruxelles
69
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Le plan de communication - Définir et organiser
votre stratégie de communication. 4ème édition.
Auteur : Thierry Libaert.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Mai 2013
Les nouveaux défis du Brand Content : au-delà du
contenu de marque.
Auteurs : Thomas Jamet, Benjamin Richard
(Collaborateur).
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Juillet 2013
Leadership. L’art et la science de la direction d’entreprise.
Auteur : Valérie-Claire Petit.
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Pour une interprétation littéraire des controverses
scientifiques.
Auteur : Yves Citton.
Éditeur : Éditions Quæ, Versailles.
Site : www.quae.com
Référencement mobile. Web analytics & stratégie
de contenu.
Auteurs : Isabelle Canivet-Bourgaux, Jean-Marc
Hardy (préface).
Éditeur : Eyrolles, Paris.
Site : www.eyrolles.com
Juin 2013
100 principes fondamentaux de l’identité visuelle
des marques - Du logo à la communication multisupports.
Auteurs : Kevin Budelmann, Yang Kim, Curt
Wozniak.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Août 2013
Créez la tendance ! Du bouche à oreille au marketing viral.
Auteur : Jonah Berger
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
140 outils pour optimiser sa communication.
Auteur : Joyce Beranger.
Éditeur : Vuibert, Paris.
Site : www.vuibert.com
Le marketing bancaire et de l’assurance.
Auteurs : Michel Badoc, Elodie Trouillaud.
Éditeur : La Revue Banque, Paris.
Site : www.revue-banque.fr
Marketing.
Auteurs : Luc Cardin et Stéphane Durocher.
Éditeur : Chenelière Éducation, Montréal (Québec).
Site : www.cheneliere.ca
L’essentiel du marketing.
Auteur : Collectif.
Éditeur : Studyrama, Levallois-Perret.
Site : www.studyrama.com
Le Marketing en ligne.
Auteurs : Jon Reed, Christine Balagué.
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Les panels.
Auteurs : Thierry Saint-Martin,
Décaudin.
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Business Communication Tool Box.
Toutes les situations pro en anglais, à l’écrit comme
à l’oral !
Auteurs : Joselyne Studer-Laurens (sous la direction de), Elvis Buckwalter, Patricia Levanti.
Éditeur : Eyrolles, Paris.
Site : www.eyrolles.com
Jean-Marc
Septembre 2013
Marketing : remède ou poison ? Les effets du marketing dans une société en crise.
Auteurs : Patrick Bourgne et Collectif.
Éditeur : EMS, Cormelles le Royal.
Site : www.editions-ems.fr
Community management : fédérer des communautés sur les médias sociaux.
Auteurs : Loïc Le Meur (Préface), Cédric Deniaud
(Postface), Paul Cordina, David Fayon.
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Infodesign : le management visuel de l’information
à l’heure du Big Data.
Auteur : Yann Guilain.
Éditeur : Ellipses Marketing, Paris.
Site : www.editions-ellipses.fr
E marketing et E commerce. 4ème édition.
Auteurs : Pascal Lannoo, Corinne Ankri.
Éditeur : Vuibert, Paris.
Site : www.vuibert.com
71
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ACTUALITÉS
Vient de paraître
ADETEM
Marketing Management. 14ème édition.
Auteurs : Kevin Keller, Philip Kotler,
Manceau.
Éditeur : Pearson, Paris.
Site : www.pearson.fr
Management transversal de la marque. Une exploration au cœur des marques.
Adaptateur : Géraldine Michel (coordonné par).
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Delphine
Le merchandising. Points cardinaux, ratios, stratégies. 7ème édition.
Auteur : Alain Wellhoff.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Le street marketing - quand le buzz est là !
Auteur : Marcel Saucet.
Éditeur : Editions Diateino, Paris.
Site : www.diateino.com
Marketing mobile - Les clés pour intégrer efficacement le mobile dans sa stratégie marketing.
Auteurs : Jérôme Stioui, Thierry Pires.
Éditeur : Eni, Saint Herblain.
Site : www.editions-eni.fr
Communication(s) 20 ans d'articles de référence.
Auteur : Thierry Libaert.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Marketing international. 2ème édition.
Auteur : Anne-Gaëlle Jolivot.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
L'e-merchandising un atout pour l'e-commerce.
Améliorer la performance de son site marchand.
Auteur : Paul-Emile Cadilhac.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Luxe et Retail. Le point de vente, lieu d'excellence.
Auteurs : Michel Chevalier, Michel Gutstatz.
Éditeur : Dunod, Paris.
Site : www.dunod.com
Rubrique rédigée par Corinne Ruchaud,
Adetem et Nadine Brosseau, Philéas Info.
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
TENDANCES
Digital Detox :
marché porteur
Le « Do it yourself », une opportunité
pour les marques
la
déconnexion,
http://www.laposte.fr/lehub/-Le-Do-it-yourself-uneopportunite-
un
http://lentreprise.lexpress.fr/marketing-etvente/digital-detox-la-deconnexion-un-marche-porteur_41515.html
11 idées clés pour l’avenir
Par le Comité Prospective de Communication &
Entreprise. http://www.communicationetentreprise.com/linstitut/le-comite-prospective/11-idees-clespour-lavenir.html#c1427
Le « digital detox », nouveau symbole
du luxe
http://www.laposte.fr/lehub/Le-digital-detox-nouveau-symbole
12 entretiens pour mieux comprendre
les grandes mutations de la société
Millénaire
La perception des riches en France
http://www.ifop.com/?option=com_publication&typ
e=poll&id=2291
Comment répondre
shopper connecté ?
aux
attentes
La revue de prospective du Grand Lyon publie un
très stimulant hors série composé de 12 entretiens
pour comprendre les grandes mutations de nos
sociétés.
http://www.millenaire3.com/uploads/tx_ressm3/M3
-HS_1.pdf
du
La digitalisation des points de vente physiques et le
shopper connecté étaient le thème du second Retail
Club organisé par Publicis Shopper, en partenariat
avec le JDN. http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/les-attentes-du-shopperconnecte.shtml
TENDANCES CONSOMMATEURS
Les seniors « connectés » entretiennent
plus
de
relations
sociales
et
consomment plus (Credoc)
Trends refresh
http://www.trendwatching.com/briefing/
http://www.credoc.fr/publications/abstract.php?ref=
CMV261
Les cinq mythes sur les Influenceurs
http://www.influencia.net/fr/actualites1/tendances,
cinq-mythes-sur-influenceurs,31,3601.html
TENDANCES MARKETING
Le multi-écrans adopté par tous : une
aubaine pour les marketers
Le nudge marketing ou comment vendre
sans contraindre
http://www.influencia.net/fr/actualites1/etudes,mult
i-ecrans-adopte-par-tous-aubaine-pour-marketers,24,3595.html
http://lentreprise.lexpress.fr/marketing-et-vente/lenudge-marketing-ou-comment-vendre-sanscontraindre_42141.html
Changer d’ère
L’état du marketing en 2013
La 1ère Édition du Forum « changer d’Ère » a eu lieu
le 5 juin 2013 à la Cité des sciences et de l’industrie.
Vidéos des interventions et synthèses des présentations sur le site.
http://www.forumchangerdere.fr/
http://www.so-xperts.com/blog/performance-marketing-b/management-marketing/letat-du-marketingen-2013/
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ACTUALITÉS
@ lire @ voir @ écouter sur le net
ADETEM
Étude : les Français et la publicité sur
Internet
JEUNES CONSOMMATEURS
/www.blogdumoderateur.com/etude-ifop-publiciteinternet/
Marketing enfants : de la cour de récré
au tout digital
http://www.e-marketing.fr/Breves/Marketingenfants-de-la-cour-de-recre-au-tout-digital-53628.htm
Grande consommation : les limites du
mass marketing traditionnel
http://lecercle.lesechos.fr/entrepreneur/marketingcommunication/221172808/grande-consommationlimites-mass-marketing-traditionn
ÉTUDES MARKETING
Esomar fait le point
mondial des études
sur
le
marché
http://www.e-marketing.fr/Breves/Esomar-fait-lepoint-sur-le-marche-mondial-des-etudes-53190.htm
COMPORTEMENT D’ACHAT
McKinsey analyse le parcours d’achat
multicanal du consommateur
Études de marché : méthode
questionnaire en 12 points
http://www.offremedia.com/voir-article/mckinseyanalyse-le-parcours-dachat-multicanal-du-consommateur-/newsletter_id=168180/
du
http://visionary.wordpress.com/2013/06/05/etudesde-marche-methode-du-questionnaire-en-12-points/
Zoom sur les 7 familles de shoppeuses
françaises
BULLETIN BOARD
http://www.offremedia.com/media/deliacms/media/
1232/123243-a9ac8f.pdf
Le livre blanc du Bulletin Board
http://www.bulletinboard.fr/
Omniretail : les habitudes et canaux
d’achat des Français décryptés
http://www.ecommercemag.fr/Breves/L-evolutiondes-habitudes-d-achat-des-Fran-ais-entre-2012-et2013-53119.htm
INNOVATION
La consommation collaborative gagne
progressivement les Français
http://www.rue89.com/2013/07/07/les-100-bonnesidees-a-importer-france-1-a-10-244010
http://www.atelier.net/trends/articles/consommation-collaborative-gagne-progressivement-francais_420488
CROWDSOURCING
Les 100 bonnes idées à importer en
France
Du crowdsourcing pour la grande
distribution : les clients choisissent les
produits qu’ils consomment
TENDANCES MÉDIAS
http://www.creads.org/blog/nouvelle-societe-startup/crowdsourcing-grande-distribution-suissemigros/
Médias : inventer le modèle économique
de demain
L’association « Communication et entreprise » des
grands Dircom vient de publier un manifeste intitulé
« 11 Idées clés pour l’avenir ».
http://www.influencia.net/fr/actualites1/media,medi
as-inventer-modele-economiquedemain,40,3619.html
L'économie
collaborative
se
fait
doucement une place dans l'écosystème
http://www.atelier.net/trends/files/economie-collaborative-se-doucement-une-place-ecosysteme_421027
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
@ lire @ voir @ écouter sur le net
20 exemples de plateformes de co création avec les consommateurs de la
marque
STRATÉGIE DE PRIX
Comment sortir de l’argument prix en
période de baisse du pouvoir d’achat ?
http://fr.slideshare.net/boardofinnovation/how-tokickstart-your-cocreation-platform-20-examples
http://www.laposte.fr/lehub/-Comment-sortir-de-largument-prix-
Le crowdfunding sur le point d'exploser ?
http://fr.slideshare.net/boardofinnovation/how-tokickstart-your-cocreation-platform-20-examples
STRATÉGIES DIGITALES
MARQUES
Les 7 canaux prioritaires pour les
directions marketing sont sur le Web
L'INA
s'intéresse
au
audiovisuel des marques
http://www.offremedia.com/voir-article/les-7canaux-prioritaires-pour-les-directions-marketingsont-sur-le-web/newsletter_id=169084/
patrimoine
http://journaldunarchiviste.fr/comptes-rendus/seminaire-de-lina-300513/
L'invasion du numérique
aménager le parcours client
oblige
à
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/multicanal-enjeux-ecommerce.shtml
Les « marques coach » ont-elles un
avenir ?
http://fr.slideshare.net/agencedagobert/les-marques-coach
DISTRIBUTION
RELATION CLIENT
Quelles grandes tendances de la promo ?
Les dix-neuf impacts de la Satisfaction
client
dans
la
Rentabilité
des
Entreprises
http://www.retail-distribution.info/article-le-zoomdu-mois-n-35-quelles-grandes-tendances-de-lapromo-4-118135192.html
http://lecercle.lesechos.fr/entrepreneur/marketingcommunication/221173491/dix-neuf-impacts-satisfaction-client-rentabilite-entr
Le futur du commerce par Gregory Pouy
SERVICE CLIENT
Retail : les marques innovent au Japon
Cultures de service – les trois piliers par
Christophe Bénavent
http://www.e-marketing.fr/Breves/Retail-lesmarques-innovent-au-Japon-53244.htm#xtor=RSS1&utm_source=Rss&utm_medium=Rss&utm_campaign=ACTUS_EMKG
http://fr.slideshare.net/gregfromparis/the-future-ofcommerce-real-roi-inside
http://christophe.benavent.free.fr/?p=790
Les hypers en bout de course(s)
http://www.terraeco.net/Les-hypers-en-bout-decourse-s,49939.html
STRATÉGIE
L'occasion, nouvelle stratégie d'Ikea
http://business.lesechos.fr/directions-generales/strategie/0202832885581-l-occasion-nouvelle-strategied-ikea-7521.php
Dans les
Nestlé
coulisses
du
marketing
Des enseignes revisitent l’accueil des
clients
http://www.laposte.fr/lehub/-Des-enseignes-revisitent-l-accueil-
de
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/grandeconsommation/actu/0202848757541-dans-les-coulisses-du-marketing-de-nestle-579118.php
75
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
E-COMMERCE
Le m-commerce est en tête
priorités des e-commerçants
Les
stratégies
gagnantes
de
l’ecommerce en 2014 par Emailvision
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/mobile-enjeux-ecommerce.shtml
http://www.pressmyweb.com/actualites-duweb/evenements/strategies-ecommerce-2014/
E-commerce
l’abonnement.
:
la
déferlante
des
M-commerce : la tablette davantage
sollicitée que le smartphone dans
l'achat en ligne
de
http://www.atelier.net/trends/articles/commercetablette-davantage-sollicitee-smartphone-achatligne_419875
Le point en vidéo par Alexandre Boulègue Directeur d'études Xerfi
http://www.xerficanal.com/emission/AlexandreBoulegue_E-commerce-la-deferlante-de-l-abonnement_978.html
PUBLICITÉ – MÉDIAS
Chiffres-clés
2013
les
principaux
chiffres, indicateurs et études sur le ecommerce et la vente à distance réunis
dans un même et seul document par la
Fevad
Le nouveau paradigme publicitaire
http://www.fevad.com/etudes-et-chiffres/chiffrescles-2013
Les 10 points clés de l'Observatoire de
l'e-pub
Pourquoi
les
enseignes
l'engagement client mobile ?
http://www.latribune.fr/blogs/strategie-marketingen-1min30/20130716trib000775952/le-nouveau-paradigme-publicitaire.html
http://www.e-marketing.fr/Infographie/Les-10points-cles-de-l-Observatoire-de-l-e-pub-53582.ht
adoptent
http://lecercle.lesechos.fr/entreprises-marches/hightech-medias/internet/221175569/pourquoienseignes-adoptent-lengagement-clie
La vidéo sociale incontournable pour la
pub ?
http://www.influencia.net/fr/actualites1/etudes,vide
o-sociale-incontournable-pour-pub,24,3655.html
Le e-commerce profite aux ventes du
commerce de détail
La fin du massmedias et l’avènement de
moimedia
http://www.atelier.net/trends/articles/e-commerceprofite-aux-ventes-commerce-de-detail_422135
Les
internautes
français
compétents mais plus méfiants
http://www.influencia.net/fr/actualites1/media,finmassmedias-avenement-moimedia,40,3660.htm
plus
http://www.laposte.fr/lehub/Les-internautes-francais-plus
PUBLICITÉ ON LINE
La publicité en ligne dérange et agace
les Français
Les 10 e-commerçants américains qui
grossissent le plus vite
http://fr.slideshare.net/cedricbuisson/etude-adyoulikeifop
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/top-10-croissance-ecommerce-usa/
Le publicitaire doit désormais discuter
avec
le
DSI,
pour
Maurice
Lévy,
Président de Publicis
Sites d'e-commerce : les leviers de la
rentabilité
Une
étude
de
CCM
Benchmark pour Webloyalty fait le point
http://www.cio-online.com/actualites/lire-le-publicitaire-doit-desormais-discuter-avec-le-dsi-pour-maurice-levy-president-de-publicis-5162.html
http://www.journaldunet.com/ebusiness/commerce/leviers-rentabilite-e-commerce/
76
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
@ lire @ voir @ écouter sur le net
La pub sur
cartonner
mobile
va
continuer
de
RÉSEAUX SOCIAUX
http://www.latribune.fr/technos-medias/publicite/20130618trib000770962/la-pub-sur-mobile-vacontinuer-de-cartonner.html
Classement et statistiques
réseaux sociaux
http://www.outilsduweb.com/etude-relations-blogueurs
le
des
http://business-on-line.typepad.fr/b2b-leblog/2013/07/classement-et-statistiques-2013-desreseaux-sociaux.html
Une étude pour comprendre la relation
entre les marques et les blogueurs
Quelques statistiques sur
content avec 100% Media
2013
10 chiffres sur la réalité des usages des
internautes
Quelle utilisation les gens font-ils d'Internet ?
Comment y ont-ils accès et par quel biais les startups sont-elles en train de modifier progressivement
notre comportement sur la toile ?
http://www.journaldunet.com/ebusiness/le-net/realite-des-usages-des-internautes/
brand
http://testconso.typepad.com/brandcontent/2013/05/quelques-statistiques-sur-le-brandcontent-avec-100-media.html
La norme Afnor sur les avis clients mise
sur la transparence, la fiabilité et la
pédagogie
BIG DATA
http://www.journaldunet.com/developpeur/outils/le
s-solutions-du-big-data/
http://www.journaldunet.com/ebusiness/expert/547
19/la-norme-afnor-sur-les-avis-clients-mise-sur-latransparence--la-fiabilite-et-la-pedagogie.shtml
Big Data : les valeurs analytiques et
opérationnelles au cœur de l’avantage
concurrentiel
Les annonceurs, peu satisfaits de leurs
tactiques marketing sur les réseaux
sociaux ?
http://www.atelier.net/trends/articles/big-datavaleurs-analytiques-operationnelles-coeur-de-avantage-concurrentiel_422600
http://www.atelier.net/trends/articles/annonceurssatisfaits-de-leurs-tactiques-marketing-reseauxsociaux_422525
Deux
leviers
sont
nécessaires
à
l’amélioration de la qualité des Big Data
Les 7 péchés capitaux du social media
Panorama des solutions de Big Data
http://www.blogdumoderateur.com/les-7-pechescapitaux-du-social-media/
http://www.journaldunet.com/solutions/expert/5432
0/deux-leviers-sont-necessaires-a-l-amelioration-dela-qualite-des-big-data.shtml
INTERNET
Big data : comment passer de la donnée
à l’information
Étude
La
dynamique
Prospective2030.
http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/bigdata-comment-passer-de-la-donnee-a-linformation18731/#.Ua3SLYKIWUc
d'Internet.
Selon le Commissariat général à la stratégie et la
prospective, un document de 200 pages.
http://www.strategie.gouv.fr/content/etude-dynamique-internet-2030
DATA MARKETING
Tendances et prévisions de l’internet
2013 : la rapport de Mary Meeker
Infographie. Le traitement des données
marketing de 1960 à 2012
http://fr.slideshare.net/kleinerperkins/kpcb-internettrends-2013
http://www.e-marketing.fr/Infographie/Le-traitement-des-donnees-marketing-de-1960-a-201253609.htm
77
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
ADETEM
Chiffres : L’Observatoire des sites
Internet professionnels français
par
1min30 et DataPublica
2013 : le mobile au cœur du commerce
connecté. Trop de prix bas tue le prix
bas !
http://www.1min30.com/qui-sommes-nous/observatoire
Étude : les comportements numériques
des Français
La mobilité numérique entraîne des mutations
rapides et profondes dans les échanges entre la
marque et le client : les smartphones et les tablettes
permettent non seulement de chercher et de dénicher des bonnes affaires, mais aussi d'effectuer des
achats.
http://www.e-marketing.fr/Breves/Trop-de-prix-bastue-le-prix-bas--53662.htm
http://www.blogdumoderateur.com/etude-comportements-numeriques-france/
FONCTION MARKETING
USAGES NUMÉRIQUES
Que se passe-t-il
Internet ?
en
1
minute
sur
BYOD : restaurer la confiance entre
salariés et départements IT devient
nécessaire
http://www.vanksen.fr/blog/que-se-passe-t-il-en-1minute-sur-internet/
http://www.atelier.net/trends/articles/byod-restaurer-confiance-entre-salaries-departements-it-devientnecessaire_422712
Consommation digitale : 5 tendances
européennes (McKinsey)
http://www.choblab.com/marketinginternet/consommation-digitale-5-tendances-europeennes-mckinsey-6999.html
Baromètre
Internet
des
50
ans
et
plus
Les directions marketing perdues dans
le digital selon Accenture
http://www.duperrin.com/2013/07/08/marketingdigital-accenture-cmo-insight/
sur
Les responsables marketing alloueront
http://www.capitaine-commerce.com/2013/05/27/3
4473-barometre-des-50-ans-et-plus-sur-internet/
un quart de leur budget au numérique
l’an prochain, selon une étude mondiale
d’Accenture Interactive
http://www.offremedia.com/voir-article/les-responsables-marketing-alloueront-un-quart-de-leur-budget-au-numerique-lan-prochain-selon-une-etudemondiale-daccenture-interactive/
MOBILE MARKETING
3 infos clés sur la publicité mobile en
2013
http://www.influencia.net/fr/actualites1/pas-manq u e r, 3 - i n f o s - c l e s - s u r - p u b l i c i t e - m o b i l e 2013,48,3646.html
Rubrique rédigée par Corinne Ruchaud
Adetem
78
REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
Nous vous proposons, dans ce numéro de la RFM, trois articles issus de l'European Marketing Confederation
dont l'Adetem est membre, articles de synthèse qui apportent des éclairages intéressants parce que nouveaux sur
des sujets souvent débattus.
BRÈVE CRITIQUE DE LA RESPONSABILITÉ MARKETING(1)
Malcolm MCDONALD
Cranfield School of Management, Royaume-Uni
Journal of Business and Industrial Marketing, 5 juin 2010
marketing selon leur capacité à créer ou annihiler de
la valeur pour les actionnaires. Cette mesure se réalise en prenant en compte la valeur temps de l’argent, le coût du capital et les risques associés aux
trois composantes de la stratégie. Celles-ci incluent
le marché lui-même, la stratégie à employer sur le
marché et les prévisions relatives aux profits qui en
résultent.
La société Deloitte a publié en 2007, un rapport
particulièrement préoccupant : il met en lumière la
frustration des chefs de la Direction et des directeurs
marketing concernant le manque des responsabilité
des directeurs marketings sur leur budgets, bien souvent très conséquents.
Cet article propose une grille de lecture et une
méthodologie pour mieux aborder les mesures marketing et s’en servir de façon plus responsable vis-àvis du conseil d’administration.
Le second niveau de mesure détaille la façon
dont on relie individuellement toutes les dépenses
liées aux « 4 P », au chiffre d’affaires et aux objectifs
de bénéfice. Cependant, le second niveau ne réalise
pas de calculs de retour sur l’investissement sur tous
les éléments du mix marketing, ce qui reviendrait à
exiger un retour sur investissement sur les ailes d’un
avion !
Pour cela toutefois, il convient de définir le
marketing. On envisage, dans l’article, le marketing
comme un procédé abordant la question des marchés davantage sous l’angle de la demande que de
celui de l’offre. Il vise en premier lieu à segmenter
ces marchés selon des groupes de consommateurs à
la demande similaire, puis à comprendre les besoins
de ces groupes. Chaque segment fait ensuite l’objet
d’un classement par priorité en termes d’organisation
des forces et selon sa capacité à accroître ses bénéfices sur les trois dernières années.
Enfin, l’article met en évidence la différence
entre les dépenses de « maintenance » marketing,
c’est-à-dire effectuées pour la conservation des
affaires, et les dépenses dans le cadre de « l’investissement » marketing qui visent à la croissance des
affaires. L’article illustre également comment l’exécution correcte de calculs de la valeur nette actuelle
peut aboutir à différents résultats financiers.
On développe ensuite pour ce segment des
propositions de valeur, parallèlement à des objectifs
et stratégies marketing. Enfin, on rassemble un budget entièrement justifié par les stratégies et les objectifs développés.
En conclusion, l’article met en place un programme pour de plus amples recherches académiques dans le domaine de la responsabilité marketing, en se concentrant tout particulièrement sur le
véritable sens de l’expression « valeur ajoutée ».
Une fois une stratégie mise en place, on peut
envisager les mesures de l’activité marketing. L’article
entreprend d’exposer trois niveaux de mesure.
Les premier et second niveaux sont le fruit de
plusieurs années de recherches menées par un
auteur de l’Université de Management de Cranfield.
(1)
Copyright © 2012. Article produced by the Academic Group of
the European Marketing Confederation (EMC).
The full reference for this study : A Brief Review of Marketing
Accountability, and a Research Agenda by Emeritus Professor
Malcolm McDonald., Journal of Business and Industrial
Marketing, Volume 25, Issue 5, 2010.
Le premier niveau de mesure est stratégique : il
met en place une méthode d’évaluation des plans
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ACTUALITÉS
La R.F.M. a lu pour vous
ADETEM
LE CATEGORY MANAGEMENT
(ET SON « CAPITAINE DE CATÉGORIE ») :
UN INTÉRÊT RÉEL
POUR LE REVENDEUR ?(1)
Kitty KOELEMEIJER
Nyenrode Business University, Pays-Bas
Journal of Marketing, Septembre 2011
fournisseurs principaux sur le Category Management
(même s’ils peuvent posséder eux-mêmes les ressources internes suffisantes pour le pratiquer). Les
revendeurs ont tendance à sous-gérer leurs propres
catégories or, l’usage d’un « capitaine de catégorie »
peut, à cet égard, s’avérer utile. La recherche a également relevé que les revendeurs inclus dans l’étude,
autorisaient les principaux fournisseurs à être plus
influents dans les catégories stratégiques, leur
ouvrant l’accès aux ressources nécessaires pour
générer des bénéfices.
Les commerçants revendent des dizaines de
milliers de produits répartis en centaines de catégories. Le Category Management consiste à gérer l’attribution des ressources entre un grand nombre de
marques complémentaires et/ou concurrentes, dans
le but de maximiser les résultats attendus.
Cette pratique soumet les ressources et les
capacités du revendeur à de lourdes exigences, en
particulier dans un contexte de marchés de plus en
plus compétitifs. Nombreux sont les revendeurs qui
manquent de moyens pour réaliser une gestion
approfondie de toutes les catégories. D’autres
emploient les ressources et les capacités de leurs
fournisseurs principaux pour renforcer leurs catégories voire pour désigner un « capitaine de catégorie »
chargé de la gestion de catégories spécifiques.
L’étude n’a trouvé aucune manifestation d’un
éventuel repli des autres fournisseurs à la suite d’une
collaboration privilégiée entre revendeur et fournisseur principal. Mieux, elle a montré que les fournisseurs sont moins susceptibles de se montrer égoïstes
s’ils sont inclus dans la pratique de la gestion de
catégories.
Seulement, les revendeurs peuvent redouter
qu’une collaboration étroite avec les fournisseurs les
plus influents d’une catégorie donnée, ne leur attire
les rejets des autres fournisseurs de cette même catégorie. Or, cela sous entendrait par exemple, de prévoir des compensations commerciales ou de retarder
l’accès à de nouveaux produits. De plus, certains
craignent qu’en s’appuyant sur un « capitaine de
catégorie », ils ne fassent obstacle à la concurrence,
portant ainsi atteinte à l’intérêt même du consommateur.
L’étude sur ces trente-cinq supermarchés américains a permis de formuler les recommandations
suivantes. Les revendeurs ont tout intérêt (1) à développer leurs capacités marketing internes et (2) à
rechercher activement des « capitaines de catégorie »
parmi leurs fournisseurs.
Mais, tout en restant prudent : bien que les
bénéfices de performance du Category Management
collaboratif permettent en effet de compenser l’opportunisme des fournisseurs (intéressés par des
bénéfices à court terme), les revendeurs doivent
cependant surveiller efficacement ce type de comportement égoïste. Il s’agit d’éviter tout impact néfaste sur le marché en question.
Une étude a été réalisée sur trente-cinq catégories dans des supermarchés américains : elle évalue
l’impact de l’intensité du Category Management et
de l’influence du fournisseur principal sur la performance de sa catégorie ainsi que sur celle du revendeur.
(1)
Copyright © 2012. Article produced by the Academic Group of
the European Marketing Confederation (EMC).
The full reference for this study : Gooner R.A., Morgan N.A. and
Perreault Jr. W.D. (2011) - Is Retail Category Management Worth
the Effort (and Does a Category Captain Help or Hinder)?, Journal
of Marketing, Vol. 75, September, 18-33.
Les résultats de l’étude montrent qu’une pratique intensive et collaborative du Category
Management peut être bénéfique à la fois pour le
revendeur et pour le producteur. Les résultats des
revendeurs progressent quand ils collaborent avec les
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
La R.F.M. a lu pour vous
RÉNOVER UN MAGASIN : UNE STRATÉGIE RÉELLEMENT RENTABLE ?(1)
Magnus SÖDERLUND
Stockholm School of Economics, Suède
Journal of Marketing, Septembre 2011
L’étude a démontré qu’à court terme, la perception de l’image et de la valeur de la boutique par
les clients s’améliore, ce qui prouvait que la rénovation a eu des effets positifs sur eux. Cependant,
après six mois, l’amélioration de cette perception
décline tandis que les réactions des clients retrouvent les mêmes taux de départ. Les clients se familiarisent en effet avec les nouveaux intérieurs.
Il est depuis longtemps prouvé que l’environnement physique (c’est-à-dire l’espace) d’un magasin
a une influence considérable sur les consommateurs
et leurs habitudes d’achats. Après tout, l’environnement a un impact sur les cinq sens et représente un
rayon d’influence de 360°. Il n’est donc pas surprenant que les commerçants décident d’investir sur cet
aspect là du marketing. Nombre d’entre eux se sont
tournés vers la rénovation de leur magasin où le
design intérieur évolue tandis que l’offre (par
exemple, le produit) reste la même.
Cette observation est identique pour les autres
mesures de performance, telle que la durée moyenne passée au sein du point de vente par chaque
client, dont les croissances initiales sont finalement
reparties à la baisse. Quant à la fréquentation de la
boutique, elle décroît en fait sur le long terme.
Mais ces rénovations ont-elles un quelconque
impact positif ? Jusqu’à maintenant, le milieu universitaire ne s’était pas intéressé à la question.
L’analyse de la pratique des rénovations révèle un
aspect majeur : tandis qu’elles produisent effectivement
des effets positifs sur le court terme, ces mêmes effets
s’épuisent avec le temps. Selon les chercheurs chargés
d’interpréter les résultats, le fait d’ignorer la variabletemps sur les effets d’une rénovation peut conduire à
un usage inadéquat des ressources marketing.
Une étude récente d’une chaîne de fast-food américaine en Europe a révélé quelques indices sur les
effets de la rénovation d’une de ses boutiques sur les
clients. Dans ce cas précis, la rénovation incluait plusieurs changements significatifs de l’aspect physique
des points de vente : un éclairage plus chaleureux, des
peintures murales mises en valeur par des spots lumineux intégrés, de nouvelles couleurs pour les murs, le
plancher, les tables, les chaises, mais également de nouvelles séparations de l’espace restaurant en plusieurs
zones et une plus large variété d’options pour s’asseoir.
Dès lors, le premier effort dans la recherche
des effets des rénovations de magasin sur des perspectives de marché, est justement de ne pas surestimer ces effets.
Pour être en mesure d’évaluer efficacement les
effets de ces changements, d’autres éléments comme
la nourriture elle-même, sont demeurés inchangés.
De plus, il faudrait réaliser une évaluation prudente des effets de la rénovation sur les boutiques
intégrées à une chaîne. On éviterait ainsi la mise en
place de designs inefficaces sur toute une série de
points de vente. On peut envisager de se servir d’un
point de vente pilote dont on suivrait les évolutions
à travers le temps, avant d’en analyser les résultats
pour décider ou non de la mise en place d’un design
efficace sur chacun des autres points de vente.
Tous les points de vente de la chaîne n’ont pas
été soumis à ces changements au même moment.
Ceci a permis aux chercheurs de conduire une étude
expérimentale : les points de vente re-modélisés
pouvaient être comparés avec ceux non rénovés. Les
chercheurs ont également pu procéder à une collecte de données auprès des clients (qui étaient soumis
à des études) et de données de performance (telle
que la moyenne de fréquentation de la boutique ou
encore la durée moyenne passée dans le magasin par
client). Ils ont procédé ainsi à différents stades de la
rénovation. Ainsi, ils étaient en mesure de présenter
des résultats sur le court comme sur le long terme.
(1)
Copyright © 2012. Article produced by the Academic Group of
the European Marketing Confederation (EMC).
The full reference for this study : Bruggen E.C., Foubert B. and
Gremler D.D. (2011) - Extreme Makeover : Short- and Long-term
Effects of a Remodeled Servicescape, Journal of Marketing, Vol.
75, September, 71-87.
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REVUE FRANÇAISE DU MARKETING - Septembre 2013 - N° 243 - 3/5
NOTE
AUX
AUTEURS
La Revue Française de Marketing publie des articles de chercheurs en marketing, d’enseignants et de responsables d’entreprises ou d’organisations.
La Revue Française de Marketing publie cinq numéros par an.
Les articles sont répartis en rubriques, par exemple :
- nouvelles méthodes ou approches originales avec, de préférence, un ou plusieurs exemples d’application réelle (« Méthode ») ;
- exposés de cas concrets présentant un intérêt général, par exemple par l’utilisation d’outils d’étude ou
d’enquête en interaction ou encore peu diffusés (« Expérience ») ;
- résultats de recherches ou de réflexions sur les concepts et la stratégie marketing ayant des implications managériales (« Recherche ») ;
- synthèses sur un problème marketing en évolution, s’appuyant sur une analyse critique de la bibliographie et/ou sur les pratiques actuelles (« Synthèse ») ;
- opinions ou réflexions pour nourrir un débat d’actualité (« Actualités »).
1 - PROCESSUS DE SÉLECTION
Tout article soumis à la RFM pour publication est évalué de manière anonyme par deux lecteurs, membres du
Comité ou parfois experts extérieurs. Lorsque les avis divergent, l’article est soumis à un troisième lecteur. Le
Comité des Publications prend la décision finale.
Les critères de sélection des propositions d’article correspondent à la vocation de la RFM. Les principaux sont les
suivants :
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- nouveauté, originalité et qualité de l’apport scientifique et méthodologique ;
- apport managérial et utilité pour les décisions ;
- clarté et lisibilité de la forme et du style ;
- respect de la déontologie professionnelle (indication des emprunts à d’autres auteurs ou à des publications antérieures de l’auteur) ;
- critique objective des propositions faites ;
- absence de discours à vocation commerciale.
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faites et procéder aux modifications demandées dans un délai raisonnable dont il informera le secrétariat de
rédaction s’il souhaite que le processus d’évaluation se poursuive. En cas de refus, l’auteur est informé des raisons ayant motivé cette décision.
2 - PARUTION
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s’interdit de proposer l’article à un autre support et s’engage à ne pas publier son article ou un article proche
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- de modifier le titre de l’article pour le rendre conforme à son contenu.
Chaque auteur recevra un exemplaire du numéro de la RFM auquel il a contribué, ainsi que le fichier pdf de
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3 - PRÉSENTATION DES ARTICLES
Les propositions d’article devront être adressées sous format électronique (fichier Word) au secrétariat de rédaction [email protected], en français ou, dans certaines conditions, en anglais.
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Il sera, sauf cas particulier, d’une longueur maximale de 40 000 signes, non compris tableaux, figures et résumés.
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page très propre pour le scanner qui fera foi. Les notes de bas de page seront numérotées de 1 à n. Les références bibliographiques seront rédigées selon les modèles suivants :
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tiret et du titre de l’ouvrage en italique, ville de publication, nom de l’éditeur.
Exemple : Antoine J. (1991) - Les sondages, outil de marketing, 2ème édition, Paris, Dunod.
- Article : nom de l’auteur, initiale de son prénom, date de publication entre parenthèses, suivi d’un tiret
et du titre de l’article, nom de la revue en italique, numéro et pages.
Exemple : Bachelet D. (2000) - L’élaboration des objectifs marketing produit dans les cahiers
des charges des produits futurs, Revue Française du Marketing, n°179-180, p.184-206.
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suivi d’un tiret et du titre de l’article, puis de l’intitulé du colloque en italique, du numéro du volume,
de la date et du lieu de la publication, du nom de la société d’édition et du numéro des pages.
Exemple : Maignan I., Swaen V. (2000) - Responsabilités sociales des entreprises et bienveillance des consommateurs: Une étude comparative, Actes du 16ème Congrès de l’Association
Française du Marketing, Volume 1, 19-20 Mai, Montréal, Canada, p. 667-679.
Chaque auteur apportera un soin tout particulier aux références bibliographiques, souvent incomplètes ou ne
respectant pas les normes RFM. La bibliographie comportera 30 références au maximum.
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