le cancer colo-rectal d`emblée métastatique - Chirurgie

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le cancer colo-rectal d`emblée métastatique - Chirurgie
LE CANCER COLO-RECTAL D'EMBLÉE MÉTASTATIQUE
Le Cancer colo-rectal d'emblée métastatique
René ADAM
Centre Hépato-Biliaire
Hôpital Paul Brousse
Villejuif
Les métastases hépatiques synchrones surviennent dans 20 à 25% des cas de cancer colô -rectal. Elles posent à la fois le
problème de leur valeur pronostique, et de leur approche thérapeutique. Celle-ci reste en effet controversée dans la
réalisation simultanée ou en deux temps de l'exérèse de la tumeur primitive puis des métastases hépatiques.
L'influence pronostique du caractère synchrone des métastases sur la survie à long terme après résection des métastases
est controversée. Certaines études révélent une survie abaissée (1 -3), d'autres (4,5) dont la série multicentrique de l'AFC
(4) ne révélent pas d'influence significative sur la survie après résection (15% contre 14% à 5 ans pour les métachrones).
Le choix entre chirurgie en un temps ou en deux temps fait intervenir plusieurs critères : la sélection des patients, la
faisabilité technique, le risque et les résultats à long terme. Il est sûr que la résection en un temps présente pour le patient
l'avantage de traiter d'un seul tenant la tumeur primitive et ses localisations métastatiques. Cette approche se heurte
néanmoins au problème de la faisabilité technique (voie d'abord, expertise chirurgicale) et au plan carcinologique à celui de
proposer une intervention lourde à des patients qui peuvent etre en progression tumorale et pour lesquels une
chimiothérapie néo-adjuvante serait susceptible de mieux sélectionner les indications de la résection hépatique.
La faisabilité de la résection en un temps a pu être démontrée par plusieurs équipes chirurgicales ( 6 -12). Il ressort de ces
expériences que seuls 25 à 40% des malades ayant des métastases hépatiques synchrones font l'objet dans ces équipes
d'une résection en un temps. Cet élément fait donc apparaître une sélection des patients les moins à risque pour la
résection en un temps.
La mortalité et la morbidité de cette approche sont dans la plupart des études, comparable à ceux de la résection en deux
temps, sauf dans la série de l'AFC (4) où la mortalité opératoire était comparable en cas de résection hépatique limitée
(2,2% contre 0,5%, p= NS) mais devenait significativement supérieure en cas de résection hépatique majeure (6,1%
contre 2,4%, p=0,005). Ces éléments ont conduit lors de la conférence de consensus sur les cancers coliques (13) à la
recommandation logique de ne proposer la résection en un temps qu'aux malades devant faire l'objet d'une résection
hépatique limitée.
Un deuxième paramètre qui intervient dans l'indication est le contexte de l'urgence : la résection hépatique d'emblée est en effet contre-indiquée dans le contexte
de l'urgence du fait de l'absence fréquente d'une imagerie hépatique optimale et surtout en raison du risque septique majeur lié à la pathologie colô-rectale
compliquée.
En terme de résultats, la plupart des équipes pronant l'exérèse en un temps concluent à une survie après résection
équivalente de celle de la résection hépatique en deux temps. Néanmoins certaines font état d'une meilleure survie à cinq
ans dans les exérèses séquentielles (2,9) que dans les exérèses combinées, conduisant ces auteurs à recommander une
période d'attente dite " période de maturation "(3 à 6 mois) pour sélectionner les malades les plus à même de bénéficier
réellement de la résection hépatique.
En raison des progrès considérables de la chimiothérapie dans les cancer colô -rectaux une attitude de plus en plus usité,
surtout en cas de métastases multiples, consiste à traiter par une chimiothérapie première l'ensemble de la maladie
tumorale (tumeur primitive et métastases) avant de recourir à tout geste chirurgical. Cette attitude présente l'avantage de
proposer l'intervention à des malades dont la maladie tumorale est le plus souvent contrôlée par la chimiothérapie. Elle
permet parfois en cas de cancer du rectum de faciliter la conservation sphinctérienne. Enfin dans le contexte des
métastases hépatiques, elle permet de n'opérer que les patients répondant à la chimiothérapie en évitant une opération
inutile chez ceux dont les métastases échappent à tout traitement. Cette attitude présente néanmoins l'inconvénient
d'exposer le patient au risque d'une occlusion et dans ce cas de devoir conduire à une intervention en urgence parfois dans
un contexte d'aplasie. Néanmoins lorsque la tumeur est occlusive la mise en place actuellement de prothèses par voie
endoscopique permet, dans une certaine mesure, de prévenir ce risque.
En pratique la chirurgie première reste la plus utilisée en cas de métastases hépatiques limitées en taille et en nombre. La
chimiothérapie première se justifie surtout en cas de métastases hépatiques multiples bilatérales et lorsque l'indication
d'une radiothérapie s'impose pour un cancer du rectum localement avancé.
En conclusion, l'ensemble de ces éléments ont fait émettre les recommandations suivantes lors de la conférence récente
sur le traitement des métastases hépatiques de cancer colo-rectal (RPC Janvier 2003) :
1°) La résection en un temps peut être faite lorsque le geste hépatique est limité, la voie d'abord suffisante et l'équipe
experte dans les deux gestes d'exérèse. Néanmoins, il est difficile de valider complètement cette recommandation (niveau
de preuve faible) sans intégrer tous les facteurs en relation avec les deux lésions.
2°) En cas de tumeur colo -rectale avancée et/ou de métastases hépatiques multiples ou nécessitant une hépatectomie
majeure, il est recommandé de ne pas faire la chirurgie en un temps (accord professionnel)
3°) Dans les autres cas, les données de la littérature étant encore controversées et n'intégrant pas l'efficacité nouvelle des
chimiothérapies récentes, la résection en un temps est à ce jour laissée à l'appréciation du chirurgien. Une étude contrôlée
serait, à ce titre, très hautement souhaitable.
Références
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Génétique du cancer colorectal
Les règles de l'examen anatomo-pathologique
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Le cancer colique en occlusion
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