La diversité des genres contribue-t-elle à la performance de

Transcription

La diversité des genres contribue-t-elle à la performance de
UNIVERSITE PARIS-DAUPHINE
Master 2 « Management des Ressources Humaines »
Laure PERRET
La diversité des genres contribue-t-elle à
la performance de l’entreprise ?
Année 2007-2008
Sous la direction de Mme Jocelyne Loos-Baroin, Directrice de l’Observatoire
social, Chef de projet Diversité, Direction Générale des Ressources humaines de
Veolia Environnement et de M. Serge Perrot, Enseignant Chercheur, Maître de
conférences, Sciences de gestion.
2
UNIVERSITE PARIS-DAUPHINE
Master 2 « Management des Ressources Humaines »
Laure PERRET
La diversité des genres contribue-t-elle à
la performance de l’entreprise ?
Année 2007-2008
Sous la direction de Mme Jocelyne Loos-Baroin, Directrice de l’Observatoire
social, Chef de projet Diversité, Direction Générale des Ressources humaines de
Veolia Environnement et de M. Serge Perrot, Enseignant Chercheur, Maître de
conférences, Sciences de gestion.
3
« L’admission des femmes à l’égalité parfaite serait la marque la plus sûre de la
civilisation, et elle doublerait les forces intellectuelles du genre humain. »
Stendhal
4
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
I. La contribution de la diversité de genre à la
performance de l’entreprise
1.1. Mixité et performance humaine
1.1.1. Valorisation des qualités féminines et « management au
féminin »
1.1.2. Impact de la mixité sur les travaux de groupe
1.1.3. Opportunités de recrutement, fidélisation et motivation des
salariés
1.2. Mixité et performance commerciale
1.2.1. Salariés à l’image des clients et des consommateurs
1.2.2. Diversité et mixité, sources d’innovation
1.2.3. Effet d’image
1.3. Mixité et performance financière
1.3.1. Impact financier de la féminisation des équipes de direction
1.3.2. Valorisation boursière
1.3.3. Management des risques juridiques
5
II. Une étude de cas : Mixité des genres et performance
chez Veolia Environnement
2.1. Equipes mixtes de salariés cadres et performance
2.1.1. Femmes tops managers : un modèle de réussite adapté aux
hommes ?
2.1.1.1. Modèle « anytime, anywhere »
2.1.1.2. Difficulté de la conciliation entre vie professionnelle et vie
personnelle
2.1.1.3. La maîtrise des codes masculins
2.1.1.4. Une ambition féminine bridée par la conscience des freins
2.1.2. Blog de discussion chez Veolia : le point de vue des tops
managers… sur la féminisation de leurs postes de tops managers
2.1.2.1. Eléments de contexte et justification de la démarche
2.1.2.2. « Mixité des genres et performance de l’entreprise, y a-t-il
un lien ? » Les dirigeants de Veolia Environnement s’expriment…
a. Mixité de genres et performances humaines
b. Mixité de genres et performances commerciales
2.2. Equipes mixtes de salariés non-cadres et performance
2.2.1. Femmes non-cadres dans des professions masculines : une
représentation sexuée des métiers ?
2.2.2. Le sujet en question chez Veolia Transport
2.2.2.1. Illustration par le cas de Sud Car Aubagne, Veolia
Transport France
a. Eléments de contexte et justification de la démarche
b. « Mixité des genres et performance de l’entreprise, y a-t-il un
lien ? » Les salariés de Sud Car Aubagne s’expriment…
2.2.2.2. Illustration par le cas de Veolia Transport Australie
2.2.3. Le sujet en question chez Veolia Propreté
6
CONCLUSION
Bibliographie
Sigles
Table des annexes
Annexes
7
INTRODUCTION
Au moment où les prévisions démographiques annoncent un retournement de tendance
sur le marché du travail, l’égalité professionnelle redevient un sujet d’actualité. C’est la raison
pour laquelle beaucoup d’entreprises adoptent aujourd’hui des politiques actives de
féminisation de leur main-d’œuvre, dans le cadre plus large d’une politique de gestion de la
diversité.
Le sujet de la diversité a été abordé pour la première fois aux Etats-Unis, dans les
années 90, et un courant de recherche y est maintenant associé. Plutôt que de se prévaloir d’un
cadre législatif ou d’arguments en termes de justice, la diversité est considérée dans ces
travaux sous l’angle du lien qu’elle entretient avec le business. En France, une telle approche
managériale a plus de mal à émerger. D’une façon générale, la notion de diversité a peine à
trouver sa légitimité dans le contexte français de l’attachement à une vision uniformatrice et
universaliste de l’égalité entre les individus, quels que soient leur sexe, leur religion, leur
origine, etc.… Par ailleurs, le recours à l’argumentaire économique pour aborder le sujet de
l’égalité professionnelle est une démarche qui peut sembler utilitariste à beaucoup. La
difficulté consiste à éviter de tomber dans une logique de justification de la présence des
femmes en l’entreprise ; en revanche, une approche économique sur le sujet aura
probablement plus de poids auprès des décideurs, pour promouvoir une politique de gestion
de la diversité ou de féminisation de la main-d’œuvre.
Notre réflexion sur la diversité de genre sera donc étudiée sous l’angle de la
contribution des femmes à la performance de l’entreprise, ou pour être plus exact, sous l’angle
du lien entre mixité des équipes et performance de l’entreprise. Précisons, d’entrée de jeu, que
nous utiliserons le terme de mixité tout au long de notre mémoire dans le sens de mixité
hommes-femmes, dans le sens de la diversité de genre. Si les femmes sont minoritaires dans
certaines fonctions ou certains postes, par un jeu de miroir évident, il en est de même des
hommes qui effectuent des métiers dits féminins ou qui travaillent dans des secteurs fortement
féminisés. Notre intérêt consiste donc à étudier les équipes dans lesquelles la parité
hommes/femmes a été rétablie ou du moins, les équipes mixtes.
8
Il serait faux de prétendre que l’argumentaire économique et gestionnaire de la
diversité n’a jamais été appliqué, en France, aux réflexions sur les femmes en entreprise.
Cependant, ce type de réflexion a été essentiellement appliqué aux femmes dans des postes de
top management, aux plus hauts postes de l’entreprise ou dans des postes très qualifiées.
L’intérêt de notre réflexion est de nous intéresser à la contribution des femmes non-cadres à la
performance de l’entreprise, en distinguant les problématiques des femmes cadres et des
femmes non-cadres.
Quelle est la valeur ajoutée économique du travail des femmes en entreprise et de
la féminisation de certains métiers ou fonctions jusque là essentiellement masculins ?
Pour aborder le sujet de la contribution des femmes à la performance de l’entreprise, il
est nécessaire de préciser, avant tout, que c’est en tant que contributives à une diversification
de la main-d’œuvre que les femmes peuvent être considérées comme un élément moteur de la
performance de l’entreprise, au même titre que l’introduction d’autres minorités dans une
communauté de travail uniforme. Le raisonnement sous-jacent est le suivant : des équipes
mixtes et diverses sont à l’origine d’une plus grande performance de l’entreprise. Il est donc
nécessaire de faire un détour par la notion de diversité pour comprendre en quoi la
féminisation des équipes pourrait être en lien avec une plus grande performance de
l’entreprise.
Le terme de diversité est souvent employé comme un mot fourre-tout, dont les
contours sont assez flous. Comment, dès lors, le définir et le préciser ?
Dans le rapport de la DARES d’octobre 2004, La contribution des femmes à la
performance : une revue de la littérature1, on peut lire « la gestion de la diversité doit être
vue comme la capacité d’une entreprise à employer une main-d’œuvre hétérogène en
l’utilisant à son potentiel maximal dans un environnement de travail équitable où aucun
membre, ni groupe n’est avantagé ou désavantagé. »
1
La contribution des femmes à la performance : une revue de la littérature, Sophie Landrieux-Kartochian,
DARES, N° 83, Octobre 2004.
9
Une autre question nous vient alors à l’esprit : selon quelles caractéristiques définit-on
un groupe comme homogène ou hétérogène ? La diversité est-elle fondée sur des attributs
visibles ou sur des éléments sous-jacents, plus significatifs ?
Dans le premier cas, on parle de diversité apparente et on considèrera qu’une équipe
est diverse, par exemple, si elle mixte et qu’elle comprend des personnes de différentes
couleurs de peau. Au deuxième type de diversité, on avance des arguments tels que
l’éducation, le milieu social, la culture du pays d’origine ou la personnalité des membres de
l’équipe. C’est une diversité plus subtile et plus souterraine, dont les fondements sont surtout
d’origine sociale.
Bien évidemment, ces deux types de diversité sont cumulatifs et il est souvent très
difficile de faire la part des choses entre les éléments visibles (on parle de « minorités
visibles ») et les éléments plus profonds, intimement liés. Dans les études qui tentent de faire
un lien entre diversité et performance, la difficulté est donc de savoir de quel type de diversité
il s’agit : est-ce plutôt le multiculturalisme ou encore la mixité des genres qui crée de la valeur
en entreprise ? Dans ces circonstances, les femmes sont effectivement bien un facteur de
diversité en entreprise, dans certains univers masculins, parce qu’elles sont des femmes mais
aussi parce qu’elles auraient une façon différente d’aborder le travail. C’est ce que nous
verrons par la suite.
Pour les entreprises, que signifient alors diversité et mixité et comment parviennentelles à les gérer pour en tirer le meilleur parti ? Selon Thomas et Ely2, les entreprises peuvent
adopter 3 attitudes à l’égard de la diversité.
-
“The discrimination and fairness paradigm”
Cette approche est entièrement basée sur la notion d’égalité des chances. L’entreprise se doit
de recruter des salariés à l’image de la population de la société et de leur assurer un égal accès
à l’emploi, aux évolutions professionnelles et à la formation. C’est cette approche qui a été
privilégiée par Veolia Environnement dans sa politique de diversité « Respect des différences,
2
THOMAS David A. et ELY Robin J., 1996, « Making differences matter : a new paradigm for managing
diversity », Harvard Business Review, sept-oct, 79-90.
10
equal opportunities ». Le graphique ci-dessous atteste de la philosophie sous-jacente à une
telle politique.
Source : Plan d’action VE Diversité/ Egalité des chances 2008-2011.
Pour mieux comprendre le graphique ci-dessus, il est important de savoir que la politique de
diversité chez Veolia repose sur un modèle social d’égalité des chances, qui lui préexistait et
qu’elle conforte. Les campus de formation, par exemple, en sont le symbole et favorisent une
insertion par alternance pour des non-diplômés en leur permettant de préparer 18 formations
diplômantes. Par ailleurs, Veolia organise chaque année des campagnes de recrutement
massives
(6000
à
8000
salariés) pour intégrer des
salariés,
toutes
catégories
socioprofessionnelles confondues. De façon plus précise, que signifie l’égalité des chances
chez Veolia ? D’une part, il s’agit de renforcer l’égalité de traitement, définie comme un accès
non-discriminant à l’emploi, à l’entretien de recrutement, à la formation, aux évolutions
professionnelles ainsi qu’aux instances de gouvernance du Groupe et des Business unit. Par
ailleurs, conforter le modèle « véolien » de l’égalité des chances, c’est faire vivre et gérer la
diversité au quotidien dans le respect des différences. Et enfin, Veolia s’engage à prendre des
engagements en matière de standards sociaux à décliner localement.
11
Voilà donc un exemple d’une politique de diversité, considérée sous l’angle du
Discrimination and fairness paradigm.
-
“The access and legitimacy paradigm”
Une autre démarche adoptée par les entreprises est celle de la célébration des différences.
C’est une autre façon d’envisager la diversité en entreprise ; ici, il ne s’agit plus d’assurer une
égalité de chances à chacun mais plutôt de valoriser certaines différences qui pourraient
conduire à des discriminations. C’est sur ce deuxième paradigme que s’appuient la plupart des
études qui tendent à faire le lien entre mixité et performance.
-
“The learning and effectiveness paradigm”
Enfin, une dernière possibilité est envisagée par les auteurs qui constatent qu’elle reste plutôt
l’apanage des entreprises américaines. Ces entreprises vantent les mérites d’un brassage
systématique social, culturel et ethnique, comme facteur de créativité et d’innovation. Un lien
direct est fait entre diversité et façon différente de travailler, ce qui permet d’intégrer les
perspectives de tous les employés dans la façon de travailler de l’organisation, de définir les
tâches, les marchés, les produits, la stratégie…
Après avoir fait un tour d’horizon rapide des définitions que l’on peut trouver de la
diversité et de sa gestion en entreprise, il est important de préciser ce que nous entendons par
performance de l’entreprise. La notion de performance de l’entreprise est également un
concept très large et assez flou. Pour notre part, nous avons choisi de nous intéresser à
plusieurs facettes de la diversité en distinguant les performances humaines qui relèvent des
RH, les performances commerciales et les performances financières.
Notre démonstration s’articulera en deux temps.
Tout d’abord, nous tâcherons de recenser l’ensemble des arguments théoriques et des
études empiriques qui tendent à faire un lien entre la diversité de genre dans les équipes de
12
travail et la performance de l’entreprise (I). Comme nous l’avons précisé auparavant, nous
articulerons notre pensée autour de trois facettes de la performance : dans un premier temps,
les performances humaines (1.1.), ensuite, les performances commerciales (1.2.) et enfin, les
performances financières (1.3.).
Dans un deuxième temps, nous illustrerons nos propos précédents par une étude de cas
pratique, chez Veolia Environnement (II). En effet, les initiatives se multiplient actuellement
au siège social et dans les divisions du groupe pour promouvoir des femmes à des postes de
tops managers ou pour attirer des femmes sur des métiers « dits masculins ». A l’aide de
travaux menés chez Veolia sur la diversité, nous isolerons la variable « genre » pour la mettre
en relation avec la performance du Groupe. Notre analyse s’articulera autour de deux
problématiques distinctes : les femmes cadres (2.1.) et les femmes non-cadres (2.2.).
13
Partie I
La contribution de la
diversité de genre à la
performance de l’entreprise
Dans cette partie, nous tâcherons de recenser l’ensemble des arguments théoriques et
des études empiriques qui font le lien entre diversité des équipes et performance de
l’entreprise, pour isoler la variable « genre ». Dans cette mesure, nous conviendrons s’il est
légitime d’affirmer que la mixité hommes-femmes en entreprise est un facteur de performance
supplémentaire.
Comme nous l’avons précisé en introduction, nous articulerons notre pensée autour de
trois facettes de la performance : dans un premier temps, les performances humaines (1.1.),
ensuite, les performances commerciales (1.2.) et enfin, les performances financières (1.3.).
14
1.1. Mixité de genre et performance humaine
1.1.1. Valorisation des qualités féminines et management au féminin
Les femmes auraient des qualités spécifiquement féminines, complémentaires de
celles des hommes et permettant une meilleure harmonie des équipes. Il est important de
préciser, d’entrée de jeu, que ce type d’arguments est valable à la fois pour les publics cadre et
non-cadre. C’est vrai pour les équipes de direction et d’encadrement, amenées à gérer des
équipes, mais ça l’est aussi pour les femmes non-cadres, notamment lors de travaux en
équipe. Dans les années 70 déjà, à l’ère de l’industrialisation, il était fréquent d’entendre des
discours sexués sur les qualités de travail d’un genre ou de l’autre, appliqués au public noncadre. C’est le cas dans l’industrie textile, secteur très féminisé, où les femmes « aux doigts de
fée » étaient les compétences les plus recherchées.
En 1975, Bem3 a fait l’inventaire des qualités les plus « désirables » selon les sexes. Hommes
et femmes se sont prononcés à la fois sur les qualités dites féminines et celles dites
masculines. A la lecture du tableau ci-dessous, on comprend donc, par exemple, qu’il est plus
désirable pour une femme d’être « sensible aux besoins des autres ». Par ailleurs, il existe un
certain nombre de qualités neutres, qui ne sont pas apparentées ni à un sexe ni à l’autre.
3
BEM Sandra Lipsitz, 1975. « Au-delà de l’androgynie, quelques préceptes osés pour une identité de sexe
libérée. » Contribution au colloque « Nouvelles directions de recherche sur les femmes », Madison, Wisconsin,
extrait de La différence des sexes, question de psychologie, M.C.Hurtig, et M.F.Pichevin, Tierce Sciences, 1986.
15
Si les femmes ont des qualités et des conceptions du travail distinctes de celles des hommes,
on comprend aisément le discours suivant qui tend à démonter que les femmes exerceraient
un management « au féminin ».
En 1990, Rosener4 affirme qu’il existe un « management au féminin » ; les femmes
partageraient plus largement l’information et le pouvoir et délégueraient plus facilement. Le
« management au masculin », au contraire, est souvent considéré comme hiérarchique et peu
participatif. Sans pour autant privilégier un style de management aux dépens de l’autre, on
comprend aisément que la féminisation des postes de cadres contribuerait à enrichir les modes
et pratiques de management dans l’entreprise, à l’origine de performances supplémentaires.
On note que parmi les entreprises de l’enquête Accenture-GEF 5 qui réfléchissent à la situation
et à la carrière des femmes, 89% le font notamment parce qu’elles considèrent que le style de
management des femmes est différent et complémentaire de celui des hommes.
On peut lire dans une étude de l’ORSE6 sur l’accès des femmes aux postes de décision
en 2004 : « Une entreprise, en favorisant un quotient féminin élevé, développe plus
d’intelligence collective, plus de travail en équipe, plus de motivation des collaborateurs, plus
4
ROSENER Judy B., 1990. « Ways women lead ». Harvard Business Review, Nov-Dec: 119-125. Sargent,
1981. The androgynous manager.
5
Accenture-GEF, 2003, Etude sur la situation des femmes cadres dans les grandes entreprises en France.
6
ORSE, L’accès des femmes aux postes de décision dans les entreprises : entre nécessité et opportunité, une
problématique dans la perspective de la Responsabilité Sociétale des Entreprises, Etude ORSE, février 2004,
n°5.
16
de maîtrise de la complexité... ». Cette citation laisse à penser que des femmes à des postes de
management auront une influence positive sur les équipes qu’elles encadrent mais également
qu’au sein d’un groupe de travail, la mixité aura des effets positifs.
Une nuance, cependant, est à apporter à ce type de discours. La catégorisation des
qualités dites féminines et modes de management correspondant présente le risque d’enfermer
les femmes dans certains rôles prédéfinis dans l’entreprise (GRH, communication...) et de
renforcer les stéréotypes. Il faut évidemment relativiser les discours qui tendent à uniformiser
les caractéristiques d’un groupe de population et se méfier des généralités. Par ailleurs, si la
thèse d’un management « au féminin » peut aider les femmes à percer dans des postes
d’encadrement, il faut faire attention à ce qu’elle ne limite pas les possibilités d’évolution et
de carrière de celles-ci en reproduisant la division traditionnelle sur le marché du travail.
Enfin, à propos de la segmentation féminin/ masculin du marché du travail, une autre
dimension est intéressante à étudier. Il s’agit de la thèse de Geert Hofstede, développée dans
son ouvrage Les différences culturelles dans le management. 7 Selon cette thèse, le masculin
et le féminin représenteraient les deux extrêmes d'un continuum définissant l'importance
accordée aux valeurs de réussite et de possession (valeurs masculines) et à l'environnement
social ou à l'entraide (valeurs féminines).
Par ailleurs, la répartition sexuelle des rôles ne se ferait pas de la même façon dans
toutes les sociétés. Selon cette théorie, plus les rôles sont différenciés, plus la société montrera
des traits qu’on peut nommer masculins ; plus les rôles sont interchangeables, plus la société
montrera des traits féminins. Dans les sociétés dominées par les hommes, la plupart des
femmes sont complices de cette domination.
Parmi les pays où l’indice de masculinité est le plus élevé, on trouve le Japon, les pays
germanophones, les pays caribéens d’Amérique latine (Venezuela, Mexique et Colombie) et
l’Italie. Parmi les pays à culture féminine, on trouve les autres pays latins (France, Espagne,
Portugal, Pérou, Chili), la Yougoslavie et les pays d’Afrique noire, le score le plus élevé étant
pour les pays scandinaves et les Pays-Bas.
7
Les différences culturelles dans le management, Geert Hofstede, Les Editions d’Organisation, 1987.
17
En résumé, on pourrait dire que les habitants des pays masculins " vivent pour travailler ",
tandis que ceux des pays féminins " travaillent pour vivre ".
1.1.2. Impact de la mixité sur les travaux de groupe
Le présupposé de ce second argument est que des équipes diverses ont des points de vue
divers, qui permettent d’enrichir la réflexion collective. Les équipes diverses et mixtes
seraient alors plus créatives et plus efficaces.
Une étude expérimentale8 a tenté de démontrer le lien entre diversité et performance
des groupes de travail. A court terme, les différences seraient susceptibles de rendre les
équipes moins performantes mais à long terme, la diversité aurait un impact positif,
notamment en termes de créativité et de variété de solutions proposées à la résolution d’un
problème. Si la relation entre diversité et performance est négative à court terme, la diversité
devient une réelle source de richesse pour les travaux de groupe, si elle est bien gérée. Le
facteur de succès principal dépend donc du type de management utilisé pour gérer des
équipes. Il semble que dans un environnement homogène, le manager puisse laisser plus de
souplesse à l’organisation du travail alors qu’il vaut mieux structurer, de façon un peu plus
rigide, l’organisation du travail dans des équipes hétérogènes. La diversité est très souvent
vécue comme une contrainte au départ, ce qui explique la moindre performance des équipes
diverses à court terme. C’est une des raisons pour lesquelles les politiques de diversité dans
les entreprises se concentrent aujourd’hui souvent sur la gestion, et non plus la promotion, de
la diversité. C’est le cas de Veolia Environnement dont la population salariée dans les
exploitations est souvent déjà très diverse ; l’enjeu principal devient alors de réussir à mieux
gérer une diversité déjà présente.
Deux autres études sont allées encore plus loin. La première 9 a tenté d’isoler la
variable « sexe » pour faire le lien entre mixité et performance, sur la base d’une étude auprès
8
WATSON Warren E. et al, Cultural diversity’s impact on interaction process and performance: comparing
homogeneous and diverse task groups, Academy of Management Journal, 1993.
9
HOPE Pelled Linda, EISENHARDT Kathleen, XIN Katherine, Exploring the black box: an analysis of work
group diversity, conflict and performance, Administrative Science Quaterly, 1999.
18
de 45 équipes, issues des divisions électroniques des trois grandes entreprises américaines, qui
avaient en charge des projets à réaliser dans un temps limité. Il en ressort notamment que
d’autres variables sont plus facile à isoler et plus significatives que la variable « sexe » : l’âge,
l’ancienneté, l’origine, le parcours au sein des fonctions de l’entreprise... semblent avoir un
impact plus important sur la performance du travail d’équipe.
La seconde étude10 conclut à la plus grande performance des travaux de groupe quand
les équipes sont diverses, à la condition que les différences soient valorisées pour éviter le
conformisme et le phénomène d’assimilation au modèle dominant. Si cette condition est
remplie, alors il est avéré que les équipes diverses font preuve de plus de créativité.
1.1.3. Opportunités de recrutement, fidélisation et motivation des
salariés
Favoriser la mixité pour une entreprise, c’est élargir son vivier potentiel de recrutement,
fidéliser et motiver les salariés déjà présents.
Dans le contexte actuel de départ à la retraite des baby-boomers, il est d’autant plus
important pour les entreprises de prévenir la pénurie de talents à venir. D’ailleurs, en France,
51% des entreprises qui réfléchissent à la situation ou à la carrière des femmes le font
notamment à cause du risque de pénurie à long terme.11 En élargissement le vivier de
recrutement aux candidates féminines, dans certaines fonctions ou certains secteurs
essentiellement masculins, les entreprises auront le choix entre un plus grand nombre de
talents. L’enquête annuelle du cabinet de conseil McKinsey12 va encore plus loin et chiffre le
manque à gagner de la sous-utilisation du « réservoir de compétences féminines », dans un
contexte de guerre des talents. Si le taux d’emploi des femmes reste constant, une pénurie de
24 millions d’actifs est à prévoir en Europe. A l’inverse, si le taux d’emploi des femmes
rattrape celui des hommes, alors cette pénurie sera ramenée à 3 millions de personnes actives.
10
LATTIMER Robert, The case for diversity in global business, and the impact of diversity on team
performance, Competitiveness Review, 1998.
11
Accenture-GEF, 2003, Etude sur la situation des femmes cadres dans les grandes entreprises en France.
12
McKinsey&Company, Women Matter, La mixité, levier de performance de l’entreprise, octobre 2007.
19
D’autre part, les entreprises dont les salariés sont représentatifs de la diversité et de la
mixité sont très souvent considérées comme des entreprises « où il fait bon vivre ». Par ce
biais, on comprend que c’est aussi une façon pour l’entreprise de fidéliser ses salariés et
d’obtenir un retour sur investissement pour les salariés ayant été formés et bénéficiant de
plusieurs années d’expérience. Ainsi, la mixité et les politiques mises en œuvre pour y
parvenir permettraient de réduire le coût du turn-over et le coût du recrutement. L’entreprise
Deloitte a d’ailleurs constaté que sa politique à l’égard des femmes a contribué à la
fidélisation de la population féminine et ainsi à une réduction du turn-over des femmes de 25
à 18% entre 1990 et 1999, générant des économies de recrutement et de formation de près de
250 millions de dollars.
Enfin, la présence de femmes à des postes à responsabilité ou une politique active de
féminisation des équipes au sein de l’entreprise seraient un signal fort à l’égard de la
population salariée féminine en général, signifiant que de réelles possibilités d’évolution
existent dans l’organisation. C’est ainsi une façon de les satisfaire et de les motiver et de
facto, d’augmenter leur productivité. A contrario, une organisation où il n’y a que très peu de
femmes dans le top management et qui n’essaierait pas de renverser la tendance par la mise en
place d’une politique volontariste, induirait un coût de démotivation pour les salariées
20
féminines. Quels que soient leurs résultats, elles pourraient penser que le phénomène du
plafond de verre bloquera, à un moment ou à autre, leur carrière. Selon une étude de la
Commission européenne13, la mise en œuvre de programmes de diversité a eu un impact
positif sur la motivation des employés pour 58% des entreprises qui en ont fait l’expérience.
1.2. Mixité et performance commerciale
1.2.1.
Salariés à l’image des clients et consommateurs
Avoir une population salariée diverse permet de répondre aux besoins de clients et de
consommateurs divers : c’est un des arguments centraux invoqués par les entreprises pour
justifier de leur intérêt pour la carrière des femmes. Selon l’étude Accenture-GEF, 53% des
entreprises en France qui réfléchissent à la situation des femmes en entreprise, le font
notamment parce qu’une part importante et croissante de leurs clients est constituée de
femmes. Par ailleurs, selon une étude de la Commission européenne14, la mise en œuvre de
programmes de diversité a eu un impact positif sur la satisfaction des clients pour 57% des
entreprises qui en ont fait l’expérience.
Dans la même logique, l’intégration de femmes dans des milieux de travail
traditionnellement masculins permettrait de satisfaire les attentes des consommatrices
féminines.
Selon l’enquête d’Altema en 200315, reprise par l’étude Women Matter de
McKinsey, les femmes seraient à l’origine d’environ 70% des décisions d’achat dans les
foyers européens, alors qu’elles ne représentent que 51% de la population. Et même dans les
secteurs industriels traditionnellement masculins, comme la construction automobile ou
13
Cost and Effectiveness of Diversity, Commission européenne, 2003.
Cost and Effectiveness of Diversity, Commission européenne, 2003.
15
Altema, Think tank : marketing to women – The Gender Factor, 2003.
14
21
l’informatique, la part des femmes-consommatrices ne cessent de croître. Selon Nissan, les
femmes influencent 60% des achats de voitures neuves au Japon et les statistiques OCDE de
2007 soulignent que 47% des utilisateurs de PC en Europe sont des femmes.
Même les consommateurs masculins, si l’on en croit l’étude du CREDOC, Le
consommateur sensible à la parité des droits hommes- femmes au travail16, sont loin de se
désintéresser de la question et peuvent être également influencés dans leurs choix de
consommation par des considérations sociales et de mixité en entreprise. En effet, la majorité
des français se disent sensibles à la question de la parité et prêts à la défendre par leur
consommation pour 80% d’entre eux. Dans cette optique, la création du « Label égalité
professionnelle » par le gouvernement, permet aux entreprises de faire reconnaître leur
engagement en faveur des femmes et de la mixité, à leurs clients et partenaires.
Promouvoir la mixité et la diversité au sein de ses équipes, c’est ainsi se donner les
moyens d’attirer une nouvelle clientèle et d’ouvrir de nouvelles perspectives de marchés,
grâce à une meilleure représentativité des personnes qui travaillent au service des
consommateurs et des clients, de plus en plus divers. Et, d’une façon générale, avoir une
population salariée représentative de la diversité de la population mondiale, c’est s’adapter au
nouveau contexte de globalisation de l’économie mondiale et ainsi augmenter sa
compétitivité.
1.2.2. Diversité et mixité, sources d’innovation
Par ailleurs, d’un point de vue commercial et marketing, une équipe diverse et mixte
est plus à même de comprendre les attentes des consommateurs et des clients, eux-mêmes à
l’image de la société dans son ensemble. Comme nous l’avons montré précédemment, il
semblerait, en plus, que des groupes de travail mixtes et divers soient plus créatifs. La
productivité et la capacité d’innovation sont accrues par retour d’expériences, d’idées et des
perspectives nouvelles.
16
Le Queau P., Le consommateur sensible à la parité des droits hommes- femmes au travail, CREDOC,
Consommation et modes de vie, n°142, mars 2000.
22
1.2.3.
L’effet d’image
Une troisième dimension mérite intérêt pour faire un lien entre mixité homme-femme
et performance économique. Il est aujourd’hui demandé à l’entreprise d’assumer ses
responsabilités sociales et sociétales, en plus des traditionnelles responsabilités économiques,
d’où l’apparition du terme de « Responsabilité sociale/ sociétale de l’entreprise » (RSE). Dans
cette optique, l’entreprise doit prendre en considération les attentes des acteurs socioéconomiques directement ou indirectement concernés par son activité. C’est ce qu’on
appellera, par la suite, les parties prenantes ou « stakeholders ».
Dans ce contexte, l’engagement des entreprises dans des politiques de RSE est une
façon de répondre aux sollicitations et pressions extérieures de ses parties prenantes. Les
groupes d’opinion, associations ou ONGs interpellent le public sur les aspects sociaux du
fonctionnement des entreprises, de la même façon que les médias. Les investisseurs et les
marchés financiers sont de plus en plus sensibles au comportement des entreprises lors de
leur choix d’investissement. Du point de vue de l’actionnariat, on parle d’investissement
socialement responsable (ISR) qui consiste à associer des objectifs sociaux et/ou
environnementaux aux objectifs financiers dans toute décision d’investissement. L’ISR a ainsi
progressé de 26% en 2006 en France, atteignant 12 milliards d’euros, selon une étude du
centre de recherche Novethic. Ce sont les agences de notation sociale, telles que Vigeo en
Europe, qui attribuent des notes aux entreprises en fonction de critères sociaux et
environnementaux, sur la base d’une enquête réalisée chaque année. Un engagement de ce
type satisfait également les consommateurs, de plus en plus exigeants, attentifs à la
traçabilité du produit et organisés en associations. Pour les salariés, cela peut renforcer le
sentiment de fierté d’appartenir à l’entreprise ; une entreprise socialement responsable
accordera de l’importance au capital humain par une gestion des ressources humaines
innovante, l’égalité de traitement entre hommes et femmes sera défendue et de bonnes
conditions de travail seront assurées. C’est une très bonne façon pour l’entreprise d’attirer et
de garder les talents, conservant ainsi un niveau de compétences élevé. Enfin, les
gouvernements, également, revendiquent leur implication dans le développement durable et
l’égalité professionnelle hommes- femmes, et d’une façon ou d’une autre, les entreprises sont
parfois amenées à leur rendre des comptes.
23
L’égalité professionnelle fait partie des critères sociaux sur lesquels sont jugés les
entreprises aujourd’hui. C’est pourquoi la présence de femmes à des postes ou fonctions
traditionnellement masculins et/ou la mise en place de politiques de féminisation représentent
un avantage concurrentiel indéniable. La mixité devient alors un atout commercial. Un certain
nombre d’informations rendues publiques et relatives à l’égalité professionnelle permettent
aux parties prenantes de se faire une opinion sur l’image sociale des entreprises. En France,
outre la réalisation du rapport annuel de situation comparée des conditions générales
d’emploi et de formation des femmes et des hommes, les entreprises cotées doivent établir un
rapport Développement Durable. Depuis la loi sur les Nouvelles Régulations Economiques
(NRE) du 15 mai 2001, les entreprises doivent rendre publiques un certain nombre
d’informations sociales et environnementales, notamment sur la féminisation des effectifs et
sa progression.
1.3.
Mixité et performance financière
Le lien entre mixité homme-femme et performance financière est plus délicat que les
précédents. Cependant, si à en croire les raisonnements précédents, les entreprises qui
privilégieraient la mixité homme-femme détiendraient un avantage compétitif en termes
humains et commercial, alors la performance financière de telles entreprises ne serait que la
traduction et la conséquence de cet avantage concurrentiel. Cependant, les études
expérimentales menées sur ce sujet vont encore plus loin, leur seule limite étant qu’elles
s’intéressent exclusivement à l’encadrement et aux équipes de direction. La population
féminine non-cadre est donc exclue d’office de cette analyse.
24
1.3.1.
Impact financier de la féminisation des équipes de
direction
A. Variable 1 : la présence de femmes dans le top management
L’enquête qui fait aujourd’hui référence dans le domaine est celle menée par l’association
Catalyst, en 2004, The bottom line : connecting corporate performance and gender diversity.
Elle porte sur 353 grandes entreprises américaines parmi les 500 grandes entreprises
américaines du Fortune 500, sur la période 1996-2000. Les entreprises ont été regroupées en
quartiles en fonction de la plus ou moins grande présence de femmes dans les équipes de
direction. Selon les résultats de l’étude, il semblerait que les 25% d’entreprises dont les
équipes de direction sont les plus féminisées ont un taux de rendement des capitaux propres
plus élevé de 35.1% et un rendement global pour l’actionnaire supérieur de 34%. Cette
conclusion est intéressante dans la mesure où elle va à double sens : si les entreprises aux
directions les plus féminisées ont de meilleurs résultats financiers que les entreprises intégrant
moins de femmes, en sens inverse, les entreprises les plus performantes ont des équipes de
direction plus féminisées que les entreprises moins performantes.
Une autre enquête réalisée par McKinsey, en partenariat avec Amazone Euro Fund, s’est
intéressée aux 89 entreprises européennes cotées affichant une capitalisation boursière
supérieure à 150 millions d’euros. Ces entreprises ont été sélectionnées selon les critères
suivants : le nombre et la part de femmes présentes au comité exécutif, leur fonction (PDG >
Directeur financier > Directeur de la communication…), et dans une moindre mesure, la
présence de plus de deux femmes au conseil d’administration ainsi que la publication de
données sur la mixité dans le rapport annuel. La performance financière de ces entreprises a
ensuite été analysée par rapport à la moyenne de leur secteur de référence. Une fois de plus,
les résulta2ts vont dans le même sens, comme nous pouvons le voir dans le graphique suivant,
en matière de rentabilité des fonds propres, de résultat opérationnel et de croissance du cours
de bourse.
25
B. Variable 2 : la promotion de femmes dans le top management
L’étude d’Adler, en 2001,17 montre une corrélation entre la promotion de femmes dans le
top management et la rentabilité des entreprises. L’étude, menée auprès de 215 grandes
sociétés américaines issues du Fortune 500, évalue les entreprises en fonction du nombre de
promotions à des postes de direction ou d’administrateurs accordées à des femmes entre 1980
et 1998. L’auteur entend ici par « postes de direction », les 20 postes les plus élevés de
l’entreprise. Le résultat est que les firmes ayant promu le plus de femmes sont celles dont la
rentabilité est la meilleure.
17
ADLER Roy D., Women in the executive suite correlate to high profits, Harvard Business Review, November
2001.
26
1.3.2.
Valorisation boursière
Dans une étude de Theresa Welbourne18, portant sur un échantillon de grandes
entreprises au moment de leur introduction en bourse, le lien semble être fait également entre
le pourcentage de femmes dans le top management et les performances financières à court et
long terme des entreprises. La présence de femmes dans l’équipe dirigeante serait un facteur
susceptible d’augmenter les performances financières à court terme, mesurées par le cours
initial. Cette observation se vérifie à plus long terme (3 ans) par la hausse des cours et de la
rentabilité des entreprises. Ce phénomène peut s’expliquer par le fait que les investisseurs
verraient dans la mixité des équipes de direction un signal de la qualité des recrutements.
Cependant, il faut apporter une nuance à ce type de discours, en précisant que plus que la
mixité, c’est la diversité du top management qui serait à l’origine de bonnes performances
financières de l’entreprise. Par ailleurs, une donnée a pu influencer les résultats de l’étude et
c’est l’auteure elle-même qui le souligne : les entreprises introduites en bourse sont les plus
« entrepreneuriales », soit les entreprises les plus susceptibles d’attirer des femmes parce
qu’elles véhiculent l’image de sociétés socialement responsables et qui favorisent l’égalité des
chances. L’aspect « entrepreneurial » de ces entreprises pourrait ainsi expliquer, à lui tout
seul, les bons résultats financiers de l’entreprise et la présence de femmes dans son top
management sans que ces deux derniers éléments n’aient qu’un lien très indirect.
Enfin, il est intéressant d’étudier le lien entre mixité du top management et le cours de
l’action en bourse sous un autre angle. Comme nous l’avons déjà vu à plusieurs reprises, la
mixité se traduit par la présence de femmes à des postes ou fonctions traditionnellement
masculins et vice-versa mais un autre symbole vis-à-vis des parties prenantes est la mise en
place d’une politique active de féminisation des équipes. Il ne faut pas négliger l’impact de
ces politiques de féminisation sur le cours de bourse des entreprises. Une étude très
intéressante a été menée aux Etats-Unis, entre 1988 et 1992, qui consiste à suivre l’évolution
des cours de bourse d’entreprises qui viennent de recevoir des prix récompensant leurs
initiatives en matière de féminisation ou au contraire, venant d’être mises en accusation pour
des pratiques discriminatoires. Le résultat est sans appel et une fois de plus, on peut en
conclure que les investisseurs reçoivent ce genre d’informations comme un signal d’une
gestion efficace des ressources humaines, les inculpations pour pratiques discriminatoires
18
WELBOURNE Theresa M., Wall Street likes its women: an examination of women in the top management
teams of initial public offerings, Working papers series, CAHRS Cornell University, 1999.
27
faisant, par ailleurs, peser un risque financier aux entreprises condamnées à des dommages et
intérêts.
1.3.3.
Management des risques juridiques
La mise en place de politiques volontaristes à l’égard des femmes est aussi une façon
de prévenir les risques juridiques de plaintes en matière de discrimination sexuelle. Ainsi, la
Commission pour l’égalité professionnelle et l’égalité des chances a enregistré plus de 23 000
plaintes individuelles liées à des cas de discrimination sexuelle aux Etats-Unis et récupéré
près de 100 millions de dollars de dommages et intérêts, lors des médiations et sans compter
les dommages et intérêts perçus au cours des procès. Il est vrai que cet argument est tout
particulièrement valable aux Etats-Unis parce que les cas soumis à la justice sont encore rares
en France, mais c’est un risque que les entreprises ont tout intérêt à prévenir. C’est d’autant
plus vrai en France depuis la création de la HALDE qui surveille de près les pratiques des
entreprises.
En conclusion, il me semble très important de mentionner que notre démonstration du
lien entre mixité des équipes et performance de l’entreprise repose sur une multitude d’études
réalisées dans des environnements culturels différents. Cependant, il ne faut pas oublier que
sur des sujets immatériels comme celui-ci, le raisonnement reste fragile, d’autant que la
plupart de ces études ont un caractère artisanal, tant en termes de méthodes d’analyse qu’en
termes de conclusions. Ce sont des éclairages intéressants qui permettent d’interpeller le
public mais ce ne sont pas des études scientifiques.
28
Partie II
Une étude de cas :
Mixité des genres et
performance chez Veolia
Environnement
A titre indicatif et pour mieux situer le contexte de notre analyse, il faut préciser un
certain nombre d’éléments généraux sur le groupe qu’est Veolia Environnement.
Avec 319 502 salariés travaillant dans 1 488 sociétés et 68 pays, Veolia est le numéro 1
mondial des services à l’environnement, avec 32,6 milliards d’euros de chiffre d’affaires en
2007. Le groupe est structuré en 4 divisions: Veolia Eau, numéro 1 mondial des métiers de
l’eau et de l’assainissement, Veolia Energie, numéro 1 européen sur le marché des services
énergétiques, Veolia Propreté, numéro 1 mondial de la propreté et l’un des leaders mondiaux
dans le domaine des déchets industriels dangereux et enfin, Veolia Transport, premier
opérateur privé européen de transport public.
Cependant, ce sont essentiellement les données sociales qui nous intéressent pour mieux
comprendre, par la suite, le lien qu’entretiennent la mixité hommes-femmes dans les équipes
cadres et non-cadres et la performance globale de l’entreprise. Les graphiques ci-dessous nous
permettent d’avoir une idée de la structure des effectifs salariés chez Veolia Environnement.
29
Structure des effectifs
•
Répartition des effectifs 2007 par division (Graphique n°1)
•
Répartition des effectifs 2007 par zone géographique (Graphique n°2)
30
•
Répartition des effectifs 2007 entre femmes et hommes (Graphique n°3)
Le constat évident auquel on aboutit rapidement est que la population salariée de Veolia
Environnement est très diverse, par ses métiers et ses implantations géographiques
notamment. Cependant, la plupart des métiers du groupe sont considérés comme des métiers
masculins et on le ressent dans la répartition des effectifs entre hommes et femmes. Le sujet
mérite qu’on étudie plus avant les caractéristiques de la population salariée féminine par
rapport
à
la
moyenne
du
groupe,
notamment
leur
répartition
par
catégorie
socioprofessionnelle (Cf graphiques n° 4 et 5).
•
Répartition des effectifs 2007 par catégorie socioprofessionnelle (Graphique n°4)
31
•
Répartition des effectifs féminins 2007 par catégorie socioprofessionnelle
(Graphique n°5)
Répartition des effectifs féminins 2007 par catégorie
socioprofessionnelle, au niveau Monde
Cadres
9%
15%
43%
Agents de maîtrise/
techniciennes
Employées administratives
33%
Ouvrières/ agents
d'exploitation
Après la mise en perspective de la répartition des effectifs féminins par catégorie
socioprofessionnelle avec la moyenne du groupe, on constate très nettement une sousreprésentation des femmes dans la catégorie « Ouvriers/ agents d’exploitation », qui
comprend les métiers « sur le terrain », dans les exploitations et qui font le métier de Veolia :
43% des femmes pour une moyenne de 65%. Cela s’explique par le fait que les métiers de
Veolia sont des métiers de main-d’œuvre, traditionnellement occupés par des hommes. En
revanche, les femmes se retrouvent à 33% dans des métiers d’employées administratives alors
que la moyenne du groupe est de 12%. Cette structure des effectifs féminins est tout à fait
caractéristique des chiffres de la société française.
De la même façon, nous aurions pu analyser la répartition hommes-femmes dans la
population cadre chez Veolia, pour les classifications les plus élevées. Nous aurions constaté
que les hommes sont surreprésentés dans les fonctions de cadres dirigeants, aux dépens des
femmes. Au niveau national, à titre d’illustration, les femmes sont particulièrement sousreprésentées dans les fonctions de management et les organes de décision : en moyenne, 11%
seulement des membres des instances dirigeantes19 des entreprises cotées sont des femmes.
Ce sont deux problématiques différentes que celle des femmes cadres et celle des femmes
non-cadres et c’est la raison pour laquelle nous avons décidé d’étudier les deux enjeux de
façon séparée (2.1. et 2.2.). Dans les deux cas, le raisonnement adopté sera pourtant le même :
19
Statistiques de la Commission européenne – Executive Board, 2006
32
à partir du constat effectué, nous chercherons à en comprendre les raisons théoriques et nous
illustrerons le lien qu’il peut exister entre mixité des équipes et performance globale de
l’entreprise, par le cas de Veolia Environnement. Dans cette partie, nous nous servirons
d’études menées chez Veolia depuis juin 2007, dans le cadre du projet Diversité. Dans cette
mesure, il est important de préciser que l’orientation de ces études est souvent plus large que
celle qui nous intéresse et qu’il m’a été nécessaire de retraiter ces travaux sous l’angle du lien
entre diversité de genre et performance de l’entreprise.
2.1. Equipes mixtes de salariés cadres et
performance
En partant du constat que les femmes étaient très peu représentées dans les postes à
responsabilité chez Veolia, nous avons décidé d’en comprendre mieux les raisons.
Un certain nombre de raisons théoriques sont à noter, notamment sur le mode de
fonctionnement de l’entreprise aujourd’hui. Le modèle d’entreprise qui prévaut actuellement
dans le monde occidental explique, en partie, la faible représentation de femmes à des postes
de tops managers (2.2.1.).
Dans un second temps, nous illustrerons nos propos par le cas de Veolia
Environnement et ce que pensent une centaine de tops managers VE, des 4 divisions et des 5
continents, de la question de la féminisation des fonctions de top managers, sous l’angle
notamment du lien entre mixité et performance (2.2.2.).
33
2.1.1.
Femmes top managers : un modèle de réussite adapté aux
hommes ?
2.1.1.1.
Modèle « Anytime, anywhere »
L’entreprise est un modèle conçu par des hommes et qui a peu changé, malgré les
évolutions économiques et l’arrivée des femmes sur le marché du travail. Dans l’étude
Women Matter de McKinsey, on parle du modèle de performance « anytime, anywhere ». Les
femmes ont souvent du mal à se plier à la règle insidieuse qui veut que responsabilités en
entreprise aillent de pair avec une disponibilité à toute épreuve et une mobilité géographique
totale, à tout moment. Ce modèle est jugé par les femmes comme le principal frein à leur
réussite ou à leur avancement professionnel. Par exemple, les congés de maternité, ainsi
qu’une moindre mobilité, sont vécus comme de sérieux freins : en Europe, 62% des femmes
perçoivent les contraintes familiales ou personnelles comme un obstacle à leur avancement.20
Les diplômées des grandes écoles sont, quant à elles, 96% à considérer le fait d’avoir des
enfants ou d’être en âge d’en faire comme un frein réel ou perçu par les employeurs. 21
2.1.1.2.
Difficulté de la conciliation entre vie professionnelle et vie
personnelle
Cette incompatibilité du modèle dominant avec la carrière des femmes s’expliquent
aussi par le fait qu’en plus de leur carrière professionnelle, les femmes assument l’essentiel
des contraintes familiales (maternité, gestion de la vie domestique, éducation des enfants,
soutien des parents…). Le temps consacré par foyer aux tâches domestiques en est une bonne
illustration. Dans son ouvrage, Le temps des femmes, Dominique Meda note que 80% des
tâches domestiques reposent sur les femmes qui y consacrent 33h/ semaine, contre 16h30/
semaine pour les hommes. Le graphique issu de l’enquête Women Matter de McKinsey
20
« Women in Leadership : A European Business Imperative », Catalyst – Conference Board, 2002.
« Le parcours professionnel des diplômées des Grandes Ecoles : regards croisés hommes/ femmes », IpsosGEF, 2007.
21
34
confirme cette tendance et effectue une comparaison du nombre d’heures consacrées, par jour,
pour les hommes et les femmes, aux tâches domestiques. La comparaison est faite entre les 15
pays de l’Union européenne, en 2005, mais le résultat moyen est lui-même significatif : si les
femmes consacrent 4h 29 minutes par jour aux tâches domestiques, les hommes, eux, y
consacrent 2h 18 minutes, soit deux fois moins de temps.
2.1.1.3.
La maîtrise de codes masculins
Par ailleurs, l’ascension professionnelle passe par la maîtrise d’un certain nombre de
codes masculins, qui constitue un second frein à l’ascension professionnelle des femmes. En
effet, elles doivent faire un plus grand effort d’adaptation pour s’affirmer et se frayer un
chemin vers des postes de direction. Parmi ses codes masculins, on note la capacité à faire sa
propre promotion et à parler sans complexe de sa performance et de ses ambitions. Or, il
apparaît que les femmes ont tendance à minimiser leur contribution, comme le montre une
enquête réalisée auprès d’étudiants de MBA22 : aux Etats-Unis, 70% des femmes interrogées
évaluent leur performance comme équivalente à celle de leurs collègues, tandis que 70% des
hommes s’estiment meilleurs que leurs collègues. Dans cette mesure, on peut aisément
comprendre qu’il soit plus difficile pour les femmes d’affirmer leur talent et de savoir « se
vendre » pour saisir les opportunités professionnelles et gravir les échelons.
Enfin, un dernier élément consiste en la difficulté des femmes à se trouver un mentor dans
l’entreprise. Selon une étude Catalyst23 menée auprès de diplômés de MBA, 33% seulement
des femmes interrogées déclarent qu’il est facile de trouver un mentor contre 42% des
hommes. Or 61% des femmes considèrent l’absence de mentoring comme un frein à
l’évolution de leur carrière. C’est la raison pour laquelle des réseaux de femmes ont fait leur
apparition dans des entreprises à la pointe en terme de gestion de la diversité, comme General
Electric ou Schlumberger. Ces réseaux, « Connected Women » chez Schlumberger, travaillent
notamment sur des programmes de coaching interne et de mentoring, à destination des
femmes en particulier, mais également de l’ensemble de la population salariée. Chez General
Electric, des formations dédiées aux femmes ont été crées sur le leadership et la
compréhension des styles.
22
23
More women at the top : The Impact of Gender Roles and Leadership Style, Alice H. Eagly, 2003.
Women and the MBA : Gateway to opportunity, Catalyst, 2000.
35
2.1.1.4.
Une ambition féminine bridée par la conscience des freins
Le dernier frein qui puisse expliquer la faible représentation de femmes cadres aux postes de
top managers, concerne tout simplement les barrières psychologiques. Les femmes ont plus de
difficulté à se projeter dans la réussite et semblent avoir une ambition moindre que celle des
hommes, ce qui entrave leur évolution professionnelle. L’absence de modèle féminin ayant
réussi, dans leur entourage ou dans leur entreprise, conforte ce déficit d’ambition et ce
manque d’assurance.
« Finalement, la décision de suspendre sa carrière est à la fois une résultante des
freins identifiés et un facteur aggravant du déficit des femmes dans les fonctions de
direction. », comme le conclue le rapport Women Matter du cabinet McKinsey.24
Ainsi, parmi les diplômés de l’enseignement supérieur américain interrogés par Harvard
Business Review25, 37% des femmes ont volontairement arrêté de travailler à un moment de
leur carrière contre 24% des hommes. Entre autres raisons invoquées, le besoin de consacrer
plus de temps à ses enfants pour 45% d’entre elles et l’insatisfaction au travail pour 29%. (Cf
figure suivante).
24
25
McKinsey&Company, Women Matter, La mixité, levier de performance de l’entreprise, octobre 2007.
The Hidden Brain Drain –Off Ramps and On Ramps in Women’s Carreer, Harvard Business Review, 2005.
36
2.1.2. Blog de discussion chez Veolia : le point de vue des tops
managers… sur la féminisation de leurs postes de tops managers
2.1.2.1.
Eléments de contexte et justification de la démarche
En 2007-2008, parmi les différents groupes de travail du projet Diversité « Respect des
différences, equal opportunities », un atelier était consacré à la réflexion sur le thème de
l’internationalisation et la féminisation des profils de top managers chez Veolia
37
Environnement. Le groupe était composé de 9 membres du Séminaire Dirigeants26 2007/2008,
avec le support de l’équipe de l’Observatoire Social VE. Du 4 au 17 décembre 2007, pendant
deux semaines consécutives, une centaine de tops managers issus des « Séminaires
Dirigeants »27 des années précédentes, ont échangé leurs points de vue sur le sujet de la
diversité culturelle et de genre. Les résultats et préconisations du blog ont été présentés le 11
février 2008 devant le Comité exécutif, lors de la cérémonie de clôture du Séminaire
Dirigeant de l’année, et ont permis d’alimenter le plan d’action Diversité 2008-2011, en cours
de validation.
L’initiative de l’Observatoire social VE, dans le cadre du projet Diversité, part du
constat suivant : une politique volontariste est nécessaire pour accroître le nombre de femmes
dans les instances de gouvernance chez VE, élément de modernité nécessaire au
développement du groupe. Par ailleurs, une plus grande diversité de genre permettrait de
refléter la diversité des clients et consommateurs de VE, source d’innovation et de créativité,
permettrait d’attirer et de retenir les talents avec un impact certain en terme d’image de
marque, permettrait d’accroître le pool de talents pour faire face aux retournements de la
courbe démographique en Europe et enfin, permettrait de répondre aux pressions législatives,
des agences de notation et du lobbying de femmes sur les questions d’égalité de traitement et
de promotion des femmes dans l’entreprise.
Les bloggeurs ont été amenés à discuter de leurs points de vue respectifs sur la place
des profils internationaux dans le management de Veolia, la première semaine, et la place des
femmes dans le management VE, la deuxième semaine. C’est ce dernier point qui nous
intéresse et les verbatim qui suivent sont issus des échanges sur ce thème.
26
Le Séminaire Dirigeants (SD) est un séminaire d’intégration organisé sous forme d’expédition apprenante à
travers les 5 continents, à destination des tops managers de VE et à raison d’une promotion de 30 tops managers
par an depuis 1999. Il a pour objectif l’intégration multiculturelle, la création de réseaux, la découverte des plus
grands experts internationaux sur les questions de l’environnement et la découverte de la transversalité des
activités de VE.
38
2.1.2.2.
« Mixité des genres et performance de l’entreprise, y a-t-il un
lien ? » Les dirigeants de Veolia Environnement s’expriment…
Entre discours bien pensant et propos provocateurs, on sent très vite que le sujet est
sensible et qu’il ne fait pas consensus. Tous les points de vue semblent être représentés, du
scepticisme au féminisme, malgré un langage souvent détourné et parfois langue de bois…
« La preuve a été faite des qualités managériales des femmes et de leur singularité dans
certains domaines de compétences. »
« Je relis vos messages et je trouve qu'il se dégage une note d'ambiance bien pensante et un
peu molle. Vous nous dites en substance que vous reconnaissez nos nombreuses qualités, que
vous mêmes recrutez des femmes (on est rassuré !) qu'il y en a déjà beaucoup dans certaines
fonctions et puis que tout ça va s'arranger gentiment quand il y en aura plus dans les écoles
! » (C’est une femme qui parle…)
« Le débat semble présupposer que notre entreprise serait plus performante avec plus de
femmes aux commandes : qu'en savons-nous? Je me méfie des dogmes , et je préfère les
évolutions " naturelles". »
« Le sujet est sensible et ça se comprend. En fait il me semble que, sans parler de l'aspect
moral, et des principes d'égalité, etc. il y a tout simplement un intérêt bien compris de
l'entreprise à retrouver des femmes à des postes de management et de direction, en raison de
la nécessité que peut avoir une entreprise à diversifier les profils de ses cadres pour être
globalement plus réactive, plus intelligente, plus à l'écoute, plus performante, plus
complète. »
Cependant, peu à peu, le débat parvient à s’articuler autour d’un certain nombre de thèmes
centraux, qui rejoignent ceux que nous avons développé dans notre première partie. Si le lien
semble être évident, pour certains, entre mixité homme-femme et performance de l’entreprise,
c’est surtout dans sa dimension humaine et commerciale.
39
a. Mixité de genre et performances humaines
-
Valorisation des qualités féminines et « management au féminin »
L’argument des qualités spécifiquement féminines est celui que l’on retrouve le plus et
qui ne se heurte à aucune contradiction sur le blog.
« Un mode de management plus efficace,....plus subtil, ce qui ne peut qu'améliorer le climat
social :
1.
Elles
sont
meilleures
dans
la
gestion
du
temps
et
des
priorités.
2. Plus douées pour l'organisation, habituées à combiner responsabilités diverses en même
temps
(le
travail
et
la
famille).
3. Plus douées pour l'empathie et les qualités relationnelles ; intelligence émotionnelle plus
développée, habituées à la négociation (convaincre au lieu de vaincre). Management plus
humaniste
en
définitif.
4. Favorisent le travail en équipe (les hommes = plus individualistes), ne perçoivent pas la
participation et la délégation comme une menace pour leur autorité, favorisent l'autonomie.
5.
Favorisent
la
circulation
de
l'information. »
« Arrêtons de nous cacher derrière la forêt : oui à compétence égale, les hommes et les
femmes sont différents et n'ont pas les mêmes aptitudes, moteurs, rapidité, sens du contact ...
Quel est notre droit à ne pas faire bénéficier notre entreprise de toute la richesse humaine,
qu'elle soit féminine ou masculine? »
L’idée du « management au féminin » est sous-jacente à ce type d’arguments mais
pourtant, personne ne franchit explicitement le pas. C’est surtout l’idée d’un management plus
riche par sa mixité, qui émerge.
« Je suppose que l'optimal en matière de management est d'éviter qu'il soit monochromatique
FME
(french
male
engineer). »
Certaines, pourtant, se lancent dans des diatribes féministes… C’est tout au moins le
signe d’un certain mal-être chez ses femmes, trop peu nombreuses dans les hautes sphères de
40
l’entreprise. Rappelons, à titre d’illustration, que parmi les 155 dirigeants des 7 premières
promotions du Séminaire Dirigeants de 1999 à 2007, il n’y a que 8% de femmes.
Graphique n°6
Cartographie des participants au Séminaire
Dirigeants par sexe
8%
Hommes
Femmes
92%
« De mon point de vue, chercher la parité dans une entreprise ou ailleurs est une erreur qui
finalement nuit à la bonne idée d'utiliser les atouts dont disposent naturellement les femmes
pour
manager,
organiser,
planifier
et
décider
dans
une
entreprise.
Pour les femmes, le pouvoir est perçu comme un outil d'action, alors que pour les hommes
c'est essentiellement un statut dont la privation remet en question leur légitimité existentielle.
Délivrées de ce stress, les femmes ont du plaisir à exercer leur métier de responsable, et, si
les contraintes deviennent disproportionnées, elles sont prêtes à faire autre chose, tout en
gardant
les
mêmes
motivations.
Ce sont des championnes de la planification et de la rigueur, mais aussi de la flexibilité et de
la créativité en cas difficultés dans tous les domaines. Ce sont aussi des promotrices de « la
délégation
»
nécessaire
à
un
management
efficace
pour
aller
aux
résultats.
Vigilantes en matière d'organisation du travail, elles refusent la réunionite et prônent
l'efficacité.
Les compétences de gestionnaire familial dont disposent naturellement une femme, sont bien
41
utiles pour l'entreprise, le sens pratique et organisationnel, attention accordée aux autres,
respect des différences, gestion de projets multiples, création de convivialité, aptitude à gérer
la
réalité
quotidienne.
De mon point de vue, la place de la femme dans le management, ce pourrait bien être la
modernité nécessaire au développement du groupe Veolia Environnement. »
-
Impact de la mixité sur les travaux de groupe
Ce second argument découle très logiquement du précédent : si les femmes ont des
qualités propres et complémentaires de celles des hommes, alors la mixité homme-femme
permettrait une meilleure harmonie des équipes. Par ailleurs, des équipes diverses ont des
points de vue divers, ce qui permet d’enrichir la réflexion collective.
« Quelle richesse pour l'entreprise quand dans un groupe de travail nous arrivons à avoir
cette " équilibre " Femme/Homme, et sur le même registre quelle richesse quand nous
mélangeons juniors/seniors et français et autres pays , etc. .... »
« En tant que manager je partage égoïstement ce point de vue simplement pour le confort que
procure dans les prises de décisions un travail en équipe ou toutes les sensibilités sont
présentes. »
« La compétence des hommes et femmes au même niveau est un débat largement dépassé et je
suis certain de l'efficacité complémentaire des femmes et des hommes dans les organisations,
alors
pourquoi
-
Veolia
devrait-il
s'en
passer
?»
Opportunités de recrutement, fidélisation et motivation des salariés
Le dernier argument auquel il a été fait référence et qui fait le lien entre mixité et
performances humaines est celui, selon lequel, favoriser la mixité pour une entreprise, c’est
élargir son vivier potentiel de recrutement pour mieux répondre au re tournement de la courbe
démographique en Europe et à la guerre des talents qui s’annonce.
42
« Au delà de toutes les déclarations de bonnes intentions, l'augmentation de la part des
femmes dans notre management peut aussi être une réponse à nos difficultés à renouveler
notre
vivier
de
managers. »
b. Mixité de genre et performances commerciales
On retrouve, dans notre débat, un certain nombre d’arguments commerciaux assez
classique qui permettent aux tops managers de faire un lien plus direct entre business et
diversité.
-
Salariés à l’image des clients et des consommateurs
Avoir une population salariée diverse permet de répondre aux besoins de clients et de
consommateurs divers ; c’est l’argument commercial principal qui a été évoqué par les
bloggeurs.
« Une efficacité commerciale renouvelée, vis-à-vis des clients, collectivités et industriels. »
« Sur le plan business, est ce que ça fait du sens commercial d'avoir un management
monolithique : nos clients eux, sont en train de se diversifier à vitesse V. Nous risquons de ne
plus être capables de comprendre leurs attentes si nous ne présentons qu'un seul mode
d'écoute. Moi même, en tant que client, lorsqu'un de mes prestataires me présente une équipe
totalement monolithique, je sais que je n'aurai pas le service complet que je suis en droit
d'attendre. Je leur demande donc de diversifier : des profils à dominante éco / des profils à
dominante juridique / des hommes / des femmes / des français / des étrangers ...
Pourquoi Veolia, en tant que prestataire serait elle plus forte en étant mono profil ? »
43
A travers les nombreux verbatim de cadres dirigeants de Veolia, on comprend que le
lien de causalité entre la mixité hommes-femmes des équipes de travail et la performance de
l’entreprise n’est pas un non-sujet. Pour beaucoup, même, la relation entre ces deux variables
semble être positive et c’est ce qu’ils ont souvent retenu de leur expérience de top
management. Cependant, certains restent encore sceptiques…
Une autre question se pose : ce lien de cause à effet semble-t-il aussi évident pour les
équipes mixtes de salariés non-cadres ?
2.2. Equipes mixtes de salariés non-cadres et
performance
Une fois de plus, partant du constat que les femmes non-cadres étaient très peu
présentes dans certains métiers ou secteurs d’activité traditionnellement masculins, nous
avons tenté d’en comprendre les raisons. Il semble que dans l’imaginaire collectif, nous ayons
des représentations sexuées des métiers de main-d’œuvre (2.3.1.).
C’est notamment le cas des métiers de Veolia Environnement, conducteurs de bus ou
ripeurs (éboueurs), où les femmes sont très peu représentées. Ce sont sur ces métiers que se
concentrera notre analyse et sur les initiatives qu’ont pu mettre en place, au niveau local,
Veolia Transport (2.3.2.) ou Veolia Propreté (2.3.3.) pour attirer des femmes sur leurs métiers,
faisant un lien direct entre féminisation des équipes et performance de l’entreprise.
44
2.2.1.
Femmes non-cadres dans des professions masculines : une
représentation sexuée des métiers ?
Dans l’Union européenne des 1528, par exemple, l’emploi féminin est en moyenne plus
concentré que l’emploi masculin et se répartit dans des secteurs et métiers sensiblement
distincts de ceux des hommes. En 2005, selon l’enquête d’Eurostat sur les forces de travail,
84% de l’emploi des femmes se concentre dans les activités de service contre 58% chez les
hommes. Le secteur public est le premier employeur des femmes et regroupe 46% d’entre
elles contre 20% de l’emploi masculin. A l’inverse, le secteur industriel regroupe 37% des
emplois masculins et seulement 13% des emplois féminins. C’est bien le signe d’un
déséquilibre des genres dans la répartition des métiers et nous avons cherché à en comprendre
les raisons.
Les préjugés sexistes, qui nous renvoient une représentation sexuée des métiers, peuvent être
une explication de l’inégale répartition des femmes et des hommes dans les métiers,
notamment de main-d’œuvre. Précisons qu’un préjugé est une attitude négative ou une
prédisposition à adopter un comportement négatif envers un groupe, ou envers les membres
de ce groupe, qui repose sur une généralisation erronée et rigide (Allport, 1954).
A titre d’illustration, il est intéressant de mentionner les enseignements que nous
avons pu retirer de notre étude sur l’intégration des femmes conductrices chez Veolia
Transport à Aubagne. Sur ce sujet, alors même que l’intégration des conductrices dans un
univers d’hommes semble être réussie pour la plupart, le poids des préjugés reste persistant.
Parmi les conductrices interrogées, la seule femme qui, très jeune, a eu pour projet de devenir
conductrice, a dû franchir un certain nombre d’obstacles pour parvenir à ses fins.
Les deux difficultés majeures qu’elle a dû affronter ont été:
28
Le choix de restreindre l’analyse à l’UE des 15 se justifie par une étude comparative portant sur la période
1997-2005.
45
-
Le passage du permis où elle a eu affaire à un examinateur « vache avec les
femmes, qui m’a poussée à pleurer des nerfs » « sans compter les conditions
matérielles d’apprentissage difficiles : plein soleil sur des pistes… »
-
Le conseiller de l’ANPE qui l’a dissuadée de faire ce métier : « Si je n’avais pas
été découragée, ça ferait 10 ans que je ferais ce métier ».
2.2.2. Le sujet en question chez Veolia Transport
En réponse à des pénuries potentielles de main d’œuvre, le secteur du transport de
voyageurs commence à s’intéresser, depuis quelques années, à la féminisation de ses métiers.
En ouvrant le pool de recrutement aux femmes ou plutôt, en mettant en place des actions
spécifiques pour attirer des femmes sur des métiers à connotation masculine, Veolia Transport
espère également faire face au départ à la retraite de ses baby-boomers.
2.2.2.1.
Illustration par le cas de Sud Car Aubagne, Veolia Transport France
a. Eléments de contexte, justification de la démarche et méthodologie
d’enquête
L’étude sur l’intégration des femmes conductrices chez Sud-Car, filiale de la division
Transport du Groupe Veolia, est inscrite dans le cadre du projet Diversité « Respect des
différences, equal opportunities », auquel participent un certain nombre d’exploitations.
Parmi les sujets qu’ont souhaités traiter les exploitations, figure celui de la féminisation des
emplois dits « masculins », en réponse à des pénuries potentielles de main d’œuvre. C’est
dans cette mesure que notre étude s’inscrit dans la problématique du lien entre diversité de
genres et performance de l’entreprise.
46
Sud-Car Aubagne a engagé depuis 2002 une action en faveur de l’emploi des femmes
conductrices. L’opération intitulée « Formation de jeunes conductrices : accès à un métier
d’homme » (appelée aussi « formation SIGMA », du nom de l’organisme de formation) a été
montée en partenariat avec la mission locale et financée par la Région. En 1998, le réseau
Autobus Aubagnais a crée 10 postes d’hôtesses agents d’ambiance dans le cadre des emplois
jeunes. Deux ans plus tard, certaines de ces jeunes femmes ont aspiré à devenir conductrices
de bus. L’entreprise a alors financé le permis D pour deux d’entre elles et en 2002, pour la
première fois, des femmes intégraient les équipes de conducteurs. En 2002, face au succès de
ces deux conductrices, l'opération de formation « Formation de jeunes conductrices : accès à
un métier d’homme » est montée.
Après 5 années de recrutement de conductrices, issues ou non du cycle de formation,
l’entreprise a souhaité dresser un premier bilan et tirer des enseignements de cette expérience
de féminisation des équipes de conducteurs.
L’objectif de l’étude était de recueillir le point de vue de conductrices, de conducteurs
et de l’encadrement sur la féminisation des équipes de conducteurs, par des entretiens semidirectifs d’1h à 1h30. Les 21 entretiens se sont déroulés entre le 25 et le 27 juin 2008 et
étaient repartis de la façon suivante : interviews de 6 conductrices, de 10 conducteurs et de 5
personnes de l’encadrement. Par ailleurs, il s’agissait pour nous de comprendre les raisons qui
pourraient expliquer, plus généralement, la faible proportion de femmes sur les emplois de
conducteurs et éventuellement, d’identifier des leviers potentiels d’amélioration.
Le périmètre de l’étude porte sur 3 sociétés rattachées à la structure plus large de Sud Car
Aubagne : la Société Varoise du Transport, les Autobus aubagnais et Ciotabus. Sur ce
périmètre, la population des conducteurs s’élèvent 164 salariés, en 2007, et la répartition
hommes-femmes se trouve exprimée dans le graphique ci-dessous (Cf graphique n°7).
47
Graphique n°7
Répartition des effectifs de conducteurs-trices, par
sexe
8%
Hommes
Femmes
92%
b. « Mixité des genres et performance de l’entreprise, y a-t-il un lien ? »
Les salariés de Sud Car Aubagne s’expriment…
Au fil de nos entretiens, un certain nombre de thèmes centraux sont ressortis
régulièrement. Sans pour autant que les points de vue soient les mêmes et que les sujets soient
consensuels, conductrices, conducteurs et encadrement ont tenu à se poser la question du lien
entre mixité hommes-femmes dans les équipes, qualité du service et performance de
l’entreprise. Et, si pour certains, le lien existe entre mixité homme-femme et performance de
l’entreprise, c’est surtout dans sa dimension humaine et commerciale.
•
Mixité de genre et performances humaines
La découverte des vertus de la diversité sur le plan professionnel
Les femmes ont amené de la diversité dans les équipes, ont contribué à modifier les
rapports entre conducteurs et plus globalement l’ambiance de travail. C’est un point de vue
qui est défendu par les conducteurs eux-mêmes.
48
« Depuis que les femmes sont arrivées, le comportement de certains conducteurs a changé,
les hommes modèrent leurs paroles, notamment à la radio, je préfère maintenant ».
« Je trouve ça bien qu’il y ait des femmes, ça tempère, j’ai été pompier volontaire et j’ai
connu l’arrivée des femmes dans les casernes, j’ai trouvé ça bien ».
« C’est le top d’avoir des femmes. »
•
L’influence des femmes sur le collectif de travail
Selon l’encadrement, les femmes apaisent et tempèrent l’ambiance du collectif de travail
dans les dépôts de bus.
« Elles arrondissent les angles, adoucissent les mœurs…Elles ont un effet modérateur sur le
comportement des hommes ; même à la radio, les conducteurs contrôlent plus ce qu’ils
disent. »
« Les femmes regardent les choses avec simplicité alors que les hommes compliquent les
choses volontairement. »
« Le contre-pouvoir homme/femme est nécessaire et productif. La mixité permet une meilleure
performance de l’entreprise parce que les idées viennent très souvent des salariés. »
•
Une capacité à gérer « autrement le conflit » ?
La gestion du conflit au féminin : pour les conducteurs, les points de vue oscillent entre
une capacité à gérer « autrement » le conflit et une incapacité à faire respecter son autorité.
Pour certains, les femmes auront plus de mal à faire respecter leur autorité et à régler les
conflits que les hommes alors que pour d’autres, les femmes arriveront plus facilement à
désamorcer le conflit par le dialogue et l’écoute. Autrement dit, sur ce sujet, la relation entre
mixité des équipes et une plus grande performance de l’entreprise n’est pas aussi consensuelle
49
que sur d’autres thèmes. La relation pourrait même être négative parce que les femmes, dans
leur relation au client, ne parviendraient pas à faire respecter leur autorité.
« Les clients sont chiants dès fois, ils parlent fort. Quand il y a un homme, il respecte
l’homme. »
« Le jeune qui ne veut pas payer, je lui dis – t’as des baskets à 150 €, un téléphone portable
et tu peux pas payer ? - En tant qu’homme, il m’écoute. »
« Oui, je crois, pour le temps partiel, les femmes sont bien, mais comme sur les lignes
régulières on tourne, c’est difficile, quand on va dans les quartiers, elles ont un problème
d’autorité. La femme peut se faire agresser. …la pauvre ils vont la manger ».
Interrogées à ce propos, les femmes conductrices, en revanche, se reconnaissent toutes
une capacité à gérer « autrement » le conflit.
« Les femmes ont souvent moins le goût du conflit que les hommes, elles essaieront plutôt de
désamorcer le conflit par le dialogue et la discussion. En termes d’autorité, les hommes
représentent l’image du père, ça calme les gamins mais certains hommes n’ont aucune
autorité. »
« Quand il y a un début de conflit entre un passager et le conducteur, les femmes ont plus
tendance à essayer de comprendre avant de répondre du tac au tac. »
Mixité de genre et performances commerciales
Les deux arguments invoqués sont les plus classiques : la relation au client et les opportunités
en termes de recrutement.
50
•
La relation à la clientèle et au service
La question de la relation des femmes à la clientèle et au service est la moins polémique
de toutes et pour une fois, conducteurs, conductrices et encadrement ont tous le même point
de vue, à quelques nuances superlatives près…
Selon les conducteurs, les femmes seraient plus prévenantes et plus à l’écoute, dans leur
relation à la clientèle, qui serait elle-même induite par des qualités spécifiquement féminines
de douceur et d’écoute.
« Les femmes ont une meilleure approche clients parce que les hommes n’osent pas insulter
les femmes. »
« Les hommes sont plus impulsifs. »
Les conductrices, elles, jugent la clientèle très favorable à la féminisation du métier.
Globalement, les clients/ passagers semblent ravis de voir des femmes conductrices et ils leur
reconnaissent des qualités relationnelles particulières. Il reste encore quelques clients
récalcitrants mais ils sont peu nombreux et leurs remarques amusent plutôt les conductrices.
« La clientèle apprécie qu’une femme soit au volant. »
« Dans le bus, on entend souvent des réflexions des enfants et des femmes âgées qui sont
étonnés et admiratifs qu’une femme puisse conduire un bus. Les hommes aussi sont étonnés,
on le voit dans leur regard. Ils sont d’autant plus surpris de voir une femme mince et menue
conduire un bus ! »
« Les hommes ont moins la notion du service. Moi, j’ai du plaisir à voir mes mémés le
matin. »
« Suite à une manœuvre un peu difficile, un père accompagné de son fils a préféré quitter le
car et attendre le bus suivant ».
51
L’encadrement adopte exactement le même point de vue que les conductrices à ce
sujet.
« Elles ont moins de litiges avec les jeunes, c’est le côté maman. »
« J’ai été étonné de la réaction positive de la clientèle qui a tout de suite apprécié que des
femmes soient au volant. »
« Le personnel féminin est plus à l’écoute d’une façon générale et ça se ressent dans la
relation aux passagers. X, par exemple, est une conductrice en or. Une illustration : les
réclamations voyageur sont mises en place pour les clients donnent leur opinion sur le
service. La plupart du temps, on ne reçoit que des critiques mais dans le cas de X, on a reçu
des louanges à plusieurs reprises. »
•
Une réponse à la pénurie de main-d’œuvre
Les femmes représentent une opportunité de recrutement dans un contexte de potentielles
pénuries de main-d’œuvre. C’est le point de vue de l’encadrement. Auparavant, l’armée
fournissait à Veolia Transport la majeure partie de ses salariés et les candidats arrivaient déjà
avec le permis en poche. Maintenant que le service militaire n’existe plus, il leur est
absolument nécessaire de diversifier leurs canaux de recrutement et les femmes sont une cible
pour l’ouverture du métier à une plus grande diversité.
« Dans 10 ans, dans l’urbain, il y aura plus de femmes que d’hommes. La féminisation sera
une réponse à la pénurie de main d’œuvre. C’est la raison économique qui va se faire
entendre ».
« Auparavant c’était l’armée qui fournissait les conducteurs. Dans quelques années ce seront
les femmes qui ont fait l’armée de métier qui viendront rejoindre les rangs de l’entreprise. »
A travers les nombreux verbatim de conducteurs, conductrices et de l’encadrement de
Veolia Transport, à Aubagne, on comprend que le lien entre la mixité hommes-femmes des
52
équipes de travail et la performance de l’entreprise semble être une évidence pour beaucoup,
notamment en termes humains. Introduire de la diversité, d’une façon ou d’une autre, dans des
équipes de travail exclusivement masculines a été considéré comme tout à fait bénéfique.
2.2.2.2.
Illustration par le cas de Veolia Transport Australie
Filiale du la division Transport du Groupe Veolia Environnement, Veolia Transport
Perth (VTP), en Australie, a mis en place une politique de diversité innovante destinée à
attirer des femmes conductrices de bus.
La société compte une centaine de collaborateurs dont 11% de femmes en janvier 2007
(Cf graphique n°8). Sept mois après la mise en place d’une politique proactive pour attirer des
femmes conductrices, la répartition hommes-femmes s’est un peu rééquilibrée. En août 2007,
on compte 20% de femmes dans les effectifs de l’entreprise (Cf graphique n°9).
Graphique n°8
Répartition hom m es-fem m es des effectifs en janvier
2007
11%
Hommes
Femmes
89%
53
Graphique n°9
Répartition hom m es-fem m es des effectifs en août
2007
20%
Hommes
Femmes
80%
Dans le contexte actuel de pénurie de main-d’œuvre dans le milieu du transport de
voyageurs, une des solutions envisagées par l’entreprise a été d’élargir son pool de
recrutement aux femmes. L’entreprise a monté un groupe de travail composé de 12 salariées
femmes de VTP et mis en place un certains nombre de mesures pour attirer des femmes
conductrices de bus : campagnes publicitaires, spots TV, élargissement de son offre de
contrats…
Il faut rappeler les raisons qui ont motivées Veolia Transport Perth à engager une
démarche volontariste pour attirer des femmes conductrices de bus. Une fois de plus, ce sont
des impératifs économiques d’entreprise qui ont porté le sujet sur le devant de la scène.
En termes de recrutement, l’entreprise se trouvait face à un vrai dilemme : en 2006,
VTP devait renouveler entre 15 et 20 postes de conducteurs et les supports classiques de
recrutement (sites de recrutement, annonces de journaux…) s’avéraient inefficaces. Le pool
des candidats étant trop restreint, les recruteurs peinaient à trouver les profils adéquats
(« Poor candidates from a shallow pool » sont les termes employés par la Direction des
Ressources Humaines de VTP). Par ailleurs, au même moment, l’état d’Australie occidentale,
où se trouve Perth, connaissait un boom économique. Les entreprises minières ont commencé
à chasser les mêmes profils que Veolia et parfois même, les conducteurs déjà présents dans
l’entreprise.
VTP a alors décidé, pour répondre à la pénurie de main-d’œuvre et élargir son pool de
candidats, de se lancer dans une grande campagne de recrutement pour attirer des femmes
conductrices.
54
Par ailleurs, l’entreprise avait recensé plusieurs arguments en faveur de l’intégration
d’un plus grand nombre de femmes dans les équipes. Selon Veolia Transport Perth, les
femmes auraient une influence apaisante et positive sur le milieu de travail dans un dépôt de
bus. Le même argument était défendu par l’encadrement de Sud Car Aubagne. D’autre part,
les femmes seraient plus douces avec les appareils. Et enfin, les clients-usagers préfèreraient
voir des femmes au volant. Ce dernier argument avait également été évoqué à maintes reprises
lors de notre étude sur l’intégration des femmes conductrices à Sud Car Aubagne.
Un plan d’action a alors été mis en œuvre. Parmi les mesures adoptées, on trouve le
lancement d’une grande campagne de recrutement et de publicité par voie d’affiches, créées
avec l’aide d’une agence de publicité. La campagne visait essentiellement un public des
femmes ayant quitté le marché du travail pour élever leurs enfants et qui cherchent à y entrer
de nouveau, une fois les enfants grandis. L’autre cible principale concerne les femmes qui
veulent changer d’orientation professionnelle. Les deux affiches publicitaires ci-dessous ont
été créées et diffusées à cette occasion.
55
Dans le cas de Veolia Transport Perth, l’intérêt de l’entreprise pour le sujet de la
féminisation des équipes de conducteurs et la mixité des équipes de travail, a été uniquement
motivé par des intérêts économiques de performances humaines et commerciales.
Les initiatives de Veolia Transport, en faveur de la féminisation d’emplois
traditionnellement masculins, ne sont pas de bonnes pratiques isolées et c’est ce que nous
allons voir, enfin, avec l’analyse de la démarche originale de Veolia Propreté Aquitaine, en la
matière.
56
2.2.3. Le sujet en question chez Veolia Propreté Aquitaine
Filiale du Groupe Veolia Environnement, Veolia Propreté Aquitaine, dont l’activité est
la gestion des déchets industriels et ménagers, s’est engagée dans une démarche volontariste
de promotion de l’égalité professionnelle hommes-femmes. Un comité de pilotage dédié a été
constitué dès la fin 2006 pour établir un diagnostic de la situation et définir des axes concrets
d’amélioration. En octobre 2007, un accord de principe relatif à l’égalité professionnelle entre
les hommes et les femmes a été signé, définissant un plan d’action pour l’année 2008. Et le 20
décembre 2007, Veolia Propreté Aquitaine est devenue la première entreprise à avoir obtenu
le label Egalité, délivré par l’Afaq-Afnor, à l’échelon régional. Un article a été publié à cette
occasion dans le Supplément d’Objectif Aquitaine, en mars 2008 (Cf annexe n°1).
La société regroupe sur l’Aquitaine environ 700 collaborateurs, dont 80% d’hommes.
Les 20% de femmes présentes dans l’entreprise occupent pour la plupart des emplois
administratifs, et rares sont encore les femmes conducteurs de poids lourd ou d’engin, agents
d’accueil de déchetterie ou encore agents de maîtrise d’exploitation. On peut lire dans
l’accord d’entreprise 29 qu’en termes de catégories socioprofessionnelles, au 8 octobre 2007,
les femmes représentent 4% des ouvriers, 94% des employés, 34% des agents de maîtrise et
35% des cadres.
Rien de surprenant dans un secteur où les métiers traditionnels sont ceux de conducteur poids
lourd, équipier de collecte, agent de tri de collecte sélective, ou encore conducteur d’engin.
L’accord d’entreprise mentionne d’ailleurs cette représentation sexuée des métiers, en tentant
d’expliquer les chiffres ci-dessus : « Les raisons de cet écart constaté entre les hommes et
femmes sont liées au caractère masculin assigné à certains métiers : forte représentativité des
femmes sur des métiers administratifs et à l’inverse il existe une forte représentativité des
hommes sur des métiers physiques tels qu’agent d’exploitation, conducteur de matériel de
collecte,… »
29
Accord de principe relatif à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, Veolia Propreté
Aquitaine, le 8 octobre 2007.
57
Pourtant, soucieuse de promouvoir l’image de son secteur d’activité, dont la représentation
dans les esprits est encore trop souvent associée à l’exécution de tâches physiques et ingrates,
Veolia Transport Aquitaine a souhaité s’engager dans une démarche volontariste en faveur de
l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, en levant les préjugés et les idées
reçues sur les métiers à forte prépondérance masculine. L’objectif est principalement de
promouvoir la mixité au sein des équipes « sur le terrain », en exploitation et de créer les
conditions favorables à leur maintien dans ces fonctions.
Un certain nombre d’actions ont été entreprises en 2008 et leurs objectifs sont
organisés de la façon suivante, dans l’accord de principe sur l’égalité professionnelle entre les
hommes te les femmes chez Veolia Propreté Aquitaine :
1 - L’accès à l’emploi et à la formation professionnelle
1.1 - Le recrutement
1.2 – La formation professionnelle et l’évolution de carrière
2 – Les conditions de travail
2.1 – La rémunération
2.2 – La conciliation temps de vie privée et temps de travail
3 – Actions de sensibilisation dans l’entreprise
A titre d’illustration, on peut citer quelques mesures sur lesquelles se sont mis
d’accord la Direction et les syndicats dans leur accord de principe.
En termes de recrutement, Veolia Propreté Aquitaine « a déjà engagé une démarche
de recrutement non discriminatoire basée sur des critères de sélection objectifs tels que les
compétences, le niveau de qualification et l’expérience professionnelle. Ainsi sur des postes
traditionnellement occupés par des hommes, l’entreprise a décidé d’ouvrir son recrutement à
des femmes. Des femmes ont été recrutées à des fonctions de chauffeur PL, conductrice de
compacteur, agent d’accueil de déchetterie, … »30 En termes de formation professionnelle,
« un effort soutenu sera fait plus précisément auprès des femmes pour les sensibiliser à la
30
Accord de principe relatif à l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, Veolia Propreté
Aquitaine, le 8 octobre 2007.
58
nécessité de se former. La formation vise à améliorer leur niveau de qualification voire à
développer leur polyvalence ou à changer d’orientation. Des aménagements particuliers et
des solutions seront apportés notamment sur la durée, les horaires et lieu de formation afin
de favoriser la participation des femmes qui rencontrent des contraintes d’ordre familial. »31
L’égalité de rémunération est également présentée dans l’accord comme un pilier de
l’égalité professionnelle. D’autre part, pour favoriser de meilleures conditions de travail, des
travaux ont été engagés dans toutes les agences de Veolia Propreté Aquitaine, notamment
pour la construction de vestiaires réservés aux femmes. Enfin, afin de mieux concilier temps
professionnel et familial, l’entreprise veille à ce que l’heure de convocation et la durée des
réunions n’empiètent pas sur la vie privée des salariés. Dans cette optique et pour éviter les
réunions qui s’éternisent, la visioconférence est présentée comme une solution.
Enfin, il est intéressant de rappeler ce qui a motivé l’initiative de Veolia Propreté
Aquitaine en faveur de l’égalité professionnelle hommes-femmes. C’est en partant du constat
préalable que le peu de femmes présentes dans les métiers d’exploitation réussissaient et que
les équipes mixtes étaient plus performantes, que Veolia Propreté Aquitaine a décidé de
s’engager dans cette démarche.
En effet, dans les équipes où existait déjà cette mixité, il a été constaté, selon les termes de la
DRH, une « régulation naturelle » des relations professionnelles tant au sein de l’équipe que
dans les comportements vis-à-vis de la hiérarchie, la mixité induisant un degré de pondération
et de courtoisie plus important que dans les équipes exclusivement masculines.
D’autre part, l’intégration des femmes avec leurs valeurs, complémentaires de celles des
hommes, permet, par un effet d’émulation, d’accroître le niveau de compétence et la qualité
du travail.
Enfin, dans une entreprise de services dont les premiers ambassadeurs auprès des usagers et
clients sont les chauffeurs, le personnel de collecte, les agents d’accueil des déchetteries, …la
31
Idem
59
mixité des équipes sur le terrain correspond à l’image d’une entreprise moderne et
socialement responsable que Veolia Propreté Aquitaine a souhaité promouvoir.
Les arguments eux-mêmes, qui ont motivés l’initiative de la société en faveur de
l’égalité professionnelle hommes-femmes, relèvent de la démonstration que nous avons faite
dans une première partie du lien entre mixité des équipes et performances humaines et
commerciales. C’est une bonne illustration d’une application concrète en entreprise, motivée
par la logique sous-jacente qu’il existe un lien entre mixité des équipes et performance de
l’entreprise.
En revanche, toute la difficulté du sujet consiste à ne pas pouvoir mesurer
concrètement l’apport de la féminisation des métiers d’exploitation à la performance de
l’entreprise, par des indicateurs chiffrés, une fois la mixité introduite dans les équipes sur le
terrain. Un certain nombre d’indicateurs ont pourtant été définis par la société, en partenariat
avec les syndicats, pour mesurer le poids des actions entreprises en 2008 mais il est encore
trop tôt pour pouvoir mesurer les retombées de la démarche de Veolia Propreté Aquitaine. En
effet, en 2007, la société a consolidé un certain nombre de données qu’elle ne suivait pas
jusqu’alors et il n’est pas encore possible de mettre en évidence une quelconque évolution.
60
CONCLUSION
Notre réflexion a le mérite de faire une revue des différentes perspectives qu’on peut
adopter pour répondre à la question des liens entre femmes et performances, et la façon dont
est appliquée la théorie en entreprise. Cependant, il me semble important de préciser que sur
des sujets aussi immatériels que celui-ci, les enseignements des études ne sont pas
scientifiques et les raisonnements restent fragiles. Quand aux enseignements de notre étude de
cas, on notera qu’il s’agit souvent de « sentiments » ou de constats éprouvés lors de son
expérience professionnelle mais qui n’ont, une fois de plus, pas valeur de fait scientifique. Il
n’en reste pas moins que ce sont des éclairages intéressants qui permettent d’interpeller les
entreprises et leurs dirigeants sur le sujet de la contribution des femmes à la performance
économique.
Une autre réflexion critique est à mentionner. Dans cette étude, nous n’avons pas situé
l’analyse au niveau macro-économique, ce qui aurait permis d’avoir des éléments de
compréhension supplémentaires sur la situation des femmes sur le marché du travail. Il aurait
été intéressant, par exemple, de mettre en perspective notre étude de cas Veolia
Environnement avec les pratiques d’autres entreprises du même secteur ou à l’international.
D’autre part, de nombreuses variables dans nos sociétés ont un impact très net sur la situation
actuelle de sous-représentation des femmes dans certains métiers ou fonctions masculins ; il
en est ainsi de la parentalité, du rôle des pouvoirs publics, de l’éducation… Ce dernier
élément, par exemple, mériterait une étude à part entière puisqu’on observe que certaines
filières ont une très faible représentation féminine, ce qui prive les femmes d’un volume
important de postes potentiels. Pour prendre le problème à la source et favoriser l’accès des
femmes à ces filières, il faudrait définir des moyens de renforcer le rôle de l’orientation dans
le secondaire. Mais ces éléments, bien qu’intéressants, étaient à la marge de notre sujet sur les
liens entre diversité de genre dans les équipes de travail et performance de l’entreprise.
61
BIBLIOGRAPHIE
Rapports/ articles universitaires
« Conférence sociale tripartite : égalité professionnelle et salariale hommes-femmes »,
Ministère du Travail, des Relations Sociales et de la Solidarité, lundi 26 novembre 2007.
A statistical view of the life of women and men in the EU-25, Données pour 15 pays, Eurostat,
2006.
Bâtir au féminin, « Une richesse pour nos entreprise s », Fédération Française du Bâtiment du
Val-d’Oise, 1er août 2005.
Cost and Effectiveness of Diversity, Commission européenne, 2003.
Cultural diversity’s impact on interaction process and performance: comparing homogeneous
and diverse task groups, WATSON Warren E. et al, Academy of Management Journal, 1993.
Etude sur la situation des femmes cadres dans les grandes entreprises en France ?,
Accenture-GEF, 2003.
Exploring the black box: an analysis of work group diversity, conflict and performance,
HOPE Pelled Linda, EISENHARDT Kathleen, XIN Katherine, Administrative Science
Quaterly, 1999.
Femmes en formation dans un métier d’homme, Résultats d’une recherche de terrain menée
dans le canton de Vaud en 2002-2003 auprès d’un échantillon d’apprenantes, Corinne
DALLERA et Véronique DUCRET, Le deuxième observatoire, Institut romand de recherche
et de formation sur les rapports sociaux de sexe, Septembre 2004.
L’accès des femmes aux postes de décision dans les entreprises : entre nécessité et
opportunité, une problématique dans la perspective de la Responsabilité Sociétale des
Entreprises, Etude ORSE, février 2004, n°5.
L’intégration des femmes dans les métiers du bâtiment, Fédération Française du Bâtiment du
Val-d’Oise, 13 mai 2005.
La contribution des femmes à la performance : une revue de la littérature, Sophie LandrieuxKartochian, DARES, N° 83, Octobre 2004.
Le consommateur sensible à la parité des droits hommes- femmes au travail, Le Queau P.,
CREDOC, Consommation et modes de vie, n°142, mars 2000.
Le parcours professionnel des diplômées des Grandes Ecoles : regards croisés hommes/
femmes, Ipsos-GEF, 2007.
62
Le parcours professionnel des diplômés des Grandes Ecoles: regards croisés homes/ femmes,
Ipsos – GEF, 2007.
Les femmes sur le marché du travail aux Etats-Unis, Une mise en perspective avec la France
et la Suède, Hélène Périvier, OFCE, N° 2007-07, Février 2007.
Les métiers ont-ils une connotation sexuée ?, Céline LAGENESTE, Marion MANDON,
Olivier MOLLER & Vincent PILLAUD.
Methods and indicators to measure the cost-effectiveness of diversity policies in enterprises –
Final Report, Centre for Strategy & Evaluation Services, Commission Européenne, 2003.
Réduire la segmentation du marché du travail selon le genre et accroître le taux d’emploi
féminin : à court terme, est-ce compatible ?, Centre d’analyse stratégique, Note de veille
n°72, Septembre 2007.
Réduire la segmentation hommes/femmes du marché du travail en Europe : quels leviers
d’action ?, Centre d’analyse stratégique, Note de veille n° 92, Mars 2008.
The bottom line : connecting corporate performance and gender diversity, CATALYST ,
2004.
The case for diversity in global business, and the impact of diversity on team performance,
LATTIMER Robert, Competitiveness Review, 1998.
The Hidden Brain Drain –Off Ramps and On Ramps in Women’s Carreer, Harvard Business
Review, 2005.
Wall Street likes its women: an examination of women in the top management teams of initial
public offerings, WELBOURNE Theresa M., Working papers series, CAHRS Cornell
University, 1999.
Women in Leadership : A European Business Imperative, Catalyst – Conference Board, 2002.
Women in the executive suite correlate to high profits, ADLER Roy D., Harvard Business
Review, November 2001.
Women Matter, La mixité, levier de performance de l’entreprise, McKinsey&Company, 2007,
26 p.
63
Articles de presse
Emploi des femmes : les limites du « modèle » français, Dominique Meda, Les Echos, mardi
11 mars 2008.
En finir avec les métiers d’hommes, Sonya FAURE, Libération, lundi 11 décembre 2006.
Les femmes du CAC 40 franchissent un seuil, Benjamin Jullien, Les Echos, vendredi 27 juin
2008.
Plus de femmes égale plus de performances, Muriel JASOR, Les Echos, 11 octobre 2007.
Pourquoi les femmes n’accèdent-elles pas en plus grand nombre aux postes clés ?, Agenda
social, Février 2008.
Quand les femmes assument leur pouvoir, Sophie FAY, Le Figaro, 12 octobre 2007.
Top women tip the scales, Alison MAITLAND, Financial Times, 11 octobre 2007.
Ouvrages
Faire de la diversité un atout économique, Fondation Nationale Entreprise et Performance,
Pangloss, N°38.
Le temps des femmes, Pour un nouveau partage des rôles, Dominique Meda, Flamarrion.
Les différences culturelles dans le management, Geert Hofstede, Les Editions d’Organisation,
1987.
More women at the top : The Impact of Gender Roles and Leadership Style, Alice H. Eagly,
2003.
Think tank : marketing to women – The Gender Factor, Altema, 2003.
64
SIGLES
AA
Les Autobus Aubagnais
RTM
Régie des Transports Marseillais
SVT
Société Varoise de Transport
UE
Union européenne
USA
United States of America
VE
Veolia Environnement
65
TABLE DES ANNEXES
Annexe 1 : Supplément d’Objectif Aquitaine, N°153, Mars 2008.
Annexe 2 : Accord de principe relatif à l’égalité professionnelle entre les hommes et les
femmes, Veolia Propreté Aquitaine.
66
Annexe 1 : Supplément d’Objectif Aquitaine, N°153, Mars 2008.
67
Annexe 2 : Accord de principe relatif à l’égalité professionnelle
entre les hommes et les femmes, Veolia Propreté Aquitaine.
ACCORD DE PRINCIPE RELATIF A L’EGALITE PROFESSIONNELLE ENTRE
LES HOMMES ET LES FEMMES
Entre la société ONYX AQUITAINE représentée par Mr Thierry BEHEREGARAY,
Directeur général
D’une part,
Et les organisations syndicales représentées par les Délégués Syndicaux Centraux :
-
Pour la CGT : Mr Alain ANGULO
Pour FO : Mr Claude LANDRAGIN
D’autre part,
Il est convenu ce qui suit :
68
PREAMBULE
L’augmentation du nombre de femmes sur le marché du travail modifie considérablement les
pratiques et mode de management à l’adresse de tous les salariés de l’entreprise. Ce constat
remet en question, bouscule de nombreuses inégalités et discriminations notamment dans
l’accès à l’emploi et à la formation professionnelle.
L’égalité professionnelle est devenue un élément incontournable de la négociation collective
depuis la loi du 9 mai 2001. Les accords conclus entre les entreprises et les syndicats fixent
les grandes orientations. Ils définissent également les actions à entreprendre afin d’améliorer
la situation professionnelle des femmes.
La loi sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes du 23 mars 2006 stipule en
référence à l’article L132-27 du Code du travail : « Cette négociation porte notamment sur
les conditions d’accès à l’emploi, à la formation professionnelle et à la promotion
professionnelle, les conditions de travail et d’emploi et en particulier celles des salariés à
temps partiel, et l’articulation entre la vie professionnelle et les responsabilités familiales ».
L’égalité profesionnelle est inscrite à l’article 2 de la Convention Collective Nationale des
Activités du Déchet du 11 mai 2000. Pour ONYX AQUITAINE, l’égalité professionnelle
constitue une valeur de l’entreprise. Elle affirme sa volonté de développer une réelle mixité et
égalité professionnelle, vecteur de dynamisme et de diversité des compétences. Cette
orientation s’inscrit dans une stratégie globale de développement. En outre, l’entreprise
souhaite aller à l’encontre de préjugés discriminatoires et de ce fait participer à l’évolution des
mentalités. Elle entend améliorer la place des femmes dans la société où la majorité des postes
sont traditionnellement occupés par des hommes.
Chez ONYX AQUITAINE, l’égalité des chances et de traitement entre les hommes et les
femmes prend en compte les indicateurs suivants : le recrutement, les conditions de travail, la
rémunération, la formation professionnelle, le déroulement de carrière et une conciliation du
temps de travail avec le temps de vie privée.
ARTICLE 1 – Les objectifs de l’égalité professionnelle
Les objectifs d’égalité professionnelle retenus pour l’année 2008 concernent 3 champs
d’application :
1 - L’accès à l’emploi et à la formation professionnelle
1.1 - Le recrutement
1.2 – La formation professionnelle et l’évolution de carrière
2 – Les conditions de travail
2.1 – La rémunération
2.2 – La conciliation temps de vie privée et temps de travail
3 – Actions de sensibilisation dans l’entreprise
69
1 - Accès à l’emploi et à la formation professionnelle
1.1 - Le recrutement
Les parties signataires rappellent que les recrutements sont effectués en fonction des
compétences professionnelles qui résultent de la formation initiale, continue, et de
l’expérience professionnelle accumulée dans les différentes situations de travail.
Au sein d’ONYX AQUITAINE, 20% des postes sont occupés par des femmes avec de fortes
disparités selon les catégories professionnelles :
4% parmi les ouvriers
94% parmi les employés
34% parmi les agents de maîtrise
35% parmi les cadres
Les raisons de cet écart constaté entre les hommes et femmes sont liées au caractère masculin
assigné à certains métiers : forte représentativité des femmes sur des métiers administratifs et
à l’inverse il existe une forte représentativité des hommes sur des métiers physiques tels
qu’agent d’exploitation, conducteur de matériel de collecte,…
ONYX AQUITAINE a déjà engagé une démarche de recrutement non discriminatoire basée
sur des critères de sélection objectifs tels que les compétences, le niveau de qualification et
l’expérience professionnelle. Ainsi sur des postes traditionnellement occupés par des
hommes, l’entreprise a décidé d’ouvrir son recrutement à des femmes. Des femmes ont été
recrutées à des fonctions de chauffeur PL, conductrice de compacteur, agent d’accueil de
déchetterie, …
Les expériences récentes liées à cette démarche donnent des retombées positives puisque la
mixité au sein d’une équipe a pour effet de réguler les relations professionnelles, de modifier
les comportements. L’intégration des femmes avec leurs valeurs, complémentaires à celles
des hommes, permet, par un effet d’émulation, d’accroître le niveau de compétences, la
qualité du travail, et développe la communication au sein des groupes de travail.
Les prestataires tels que les agences de travail temporaire seront sensibilisés à la politique
d’embauche d’ONYX AQUITAINE. Ainsi, une action de recrutement basée sur les CV
anonymes sera mise en place sur les postes d’agents de maîtrise. Par ailleurs, l’ensemble des
salariés de l’entreprise pourra accéder plus facilement aux postes à pourvoir dans les
différentes agences. Ces offres seront affichées de manière visible sur les panneaux
d’affichage de la Direction et avec une fréquence régulière.
Les parties signataires vont poursuivre de manière continue cette démarche de recrutement
visant à favoriser l’emploi des femmes dans l’entreprise.
Un point annuel d’évaluation sera fait sur cet indicateur entre la direction et les parties
signataires.
70
1.2 – La formation professionnelle et l’évolution de carrière
Chez ONYX AQUITAINE, la formation professionnelle pour l’ensemble des salariés est
perçue comme un facteur de progression personnelle et de performance de l’entreprise. Le
volet formation représente 3,5% de la masse salariale. Ce volume est en augmentation
constante.
Chaque année, l’ensemble des cadres et agents de maîtrise de l’entreprise est reçu en entretien
individuel. A compter de 2007, cette mesure a été étendue à tous les salariés. Cet entretien
permet, entre autres, d’identifier les besoins en formation du salarié. Chaque besoin identifié
est examiné avec la plus grande attention dans le but d’offrir les conditions optimales d’accès
à de nouvelles compétences et de participer à l’évolution de carrière dans l’entreprise.
Un effort soutenu sera fait plus précisément auprès des femmes pour les sensibiliser à la
nécessité de se former. La formation vise à améliorer leur niveau de qualification voire à
développer leur polyvalence ou à changer d’orientation.
Des aménagements particuliers et des solutions seront apportés notamment sur la durée, les
horaires et lieu de formation afin de favoriser la participation des femmes qui rencontrent des
contraintes d’ordre familial. Cette démarche et attention particulière seront poursuivies afin de
lever tous les freins à l’accès à la formation professionnelle.
Les parties signataires s’accordent pour effectuer un suivi particulier de l’accès des femmes à
la formation à partir des informations contenues d’une part, dans les indicateurs spécifiques
du rapport annuel relatif à la situation comparée des hommes et des femmes et d’autre part,
dans les bilans annuels sur la formation professionnelle. Une synthèse sera présentée aux
signataires du présent accord.
Par ailleurs, dans le but de garantir l’évolution professionnelle, le (la ) salarié(e) de retour de
son congé maternité ou parental bénéficiera d’un entretien individualisé pour faciliter sa
réintégration et faire le point avec son supérieur hiérarchique et le service des ressources
humaines sur ses besoins en formation.
2 – Les conditions de travail
Le recrutement des femmes engagé sur des postes majoritairement occupés par des hommes a
été freiné par des conditions de travail inadaptées sur plusieurs sites de la région Aquitaine. Il
s’agit notamment de vestiaires inexistants pour les femmes.
Des travaux conséquents ont été engagés sur toutes les agences que couvre ONYX
AQUITAINE. Ils seront achevés courant 2008.
2.1 – La rémunération
ONYX AQUITAINE entend affirmer le principe d’égalité de la rémunération entre les
hommes et les femmes sur une même fonction. L’égalité de rémunération est un des
fondements de l’égalité professionnelle.
Les parties signataires considèrent notamment que des actions concrètes doivent être menées
pour neutraliser l’impact de la prise de congés maternité et/ou d’adoption et parentaux.
71
En cas de prise de congé parental total d’une durée minimale d’un an ou d’un congé sans
solde de présence parentale total d’une durée d’un an dans une situation de maladie, accident
ou handicap grave établi d’un descendant, la personne concernée bénéficie d’une garantie
d’évolution de sa rémunération correspondant à l’évolution de l’indice INSEE sur la période.
2.2 – La conciliation temps de travail et temps de vie privée
La promotion de l’égalité professionnelle implique une articulation du temps de travail et du
temps de vie privée pour les hommes et les femmes. Les mesures proposées visent à apporter
une attention particulière aux contraintes générées par la vie familiale. Ces mesures sont
appliquées au niveau des horaires de travail, des JRTT … La Direction et le service des
ressources humaines auront le souci de veiller à ce que l’organisation du travail, et notamment
l’heure de convocation et la durée des réunions, préservent une organisation équilibrée entre
la vie professionnelle et la vie familiale. A cet effet, une optimisation du temps des réunions
sera recherchée notamment par l’utilisation du matériel de visio conférence.
Les parties signataires souhaitent développer ces mesures pour parvenir à une meilleure
articulation entre le temps professionnel et familial.
La mobilité géographique et/ou professionnelle des salariés de l’entreprise est un paramètre
qui a d’ores et déjà été pris en compte. Les entretiens individuels annuels permettent
d’identifier les souhaits des salariés en termes d’évolution de carrière, de rapprochement du
lieu de travail avec le lieu de vie … Les demandes des salariés seront examinées au cas par
cas.
3 – Actions de sensibilisation dans l’entreprise
La promotion de l’égalité professionnelle dans l’entreprise nécessite de mettre en place des
actions de sensibilisation et d’information auprès de tous les salariés de l’entreprise. Ces
actions ont pour finalité de contrebalancer les perceptions et faire prendre conscience des
atouts qu’induisent la mixité et la diversité professionnelle.
Des actions concrètes de communication interne seront planifiées pour permettre la
transparence, l’accessibilité à l’information et sa circulation auprès de tous les salariés via les
modes d’affichage, les supports écrits, … une communication ciblée sera réalisée à partir
d’expériences de femmes qui ont réussi dans la société sur le terrain des hommes.
La politique de management de l’entreprise ONYX AQUITAINE, affichée sur tous les sites,
mettra en exergue la démarche entreprise sur l’égalité professionnelle.
Les communications et publications internes notamment celles relatives aux intitulés de
postes contribueront à lever les stéréotypes.
ARTICLE 2 – L’égalité professionnelle et les instances représentatives du personnel
La promotion de l’égalité professionnelle implique également une meilleure représentation
des hommes et des femmes dans les instances représentatives du personnel.
72
Ainsi, il appartient aux organisations syndicales, par exemple dans le cadre des processus
électoraux, de définir les voies et les moyens en vue d’atteindre cet objectif.
ARTICLE 3 – Création d’une commission égalité professionnelle
Cette commission comprend quatre membres ainsi-que le chef d’entreprise ou son
représentant.
Leur désignation est arrêtée par un vote au cours d’une réunion du comité central d’entreprise.
Chacun s’évertuera à faire en sorte que la commission soit composée pour moitié de
personnel féminin.
La commission égalité professionnelle a pour mission de préparer la délibération sur le
rapport annuel relatif à la situation comparée des hommes et des femmes.
Le rapport annuel doit comporter les informations définies par l’article D.432-1 du Code du
Travail.
Sur un plan général, la commission vérifie la cohérence entre l’évolution de carrière du
personnel féminin et celle de l’ensemble des salariés d’ONYX AQUITAINE.
La Commission Egalité professionnelle a également pour rôle d’émettre toutes propositions
relatives aux différents domaines couverts par le présent accord.
ARTICLE 4 – Durée de l’accord
Le présent accord est conclu pour une durée déterminée couvrant l’année 2008.
Il prend en compte le rapport égalité professionnelle entre les hommes et les femmes qui sera
examiné au cours des années 2007 / 2008.
Cet accord prendra fin le 31 décembre 2008. Il sera renouvelé pour une durée déterminée.
Dans les 3 mois qui précèderont le terme de l’accord, les organisations syndicales et la
Direction se rencontreront pour négocier un nouvel accord.
Il fera l’objet des formalités habituelles de dépôt.
73
ARTICLE 5 – Diffusion de l’accord
Cet accord sera largement diffusé et commenté par la hiérarchie d’ONYX AQUITAINE et la
commission égalité professionnelle.
Fait à Floirac, le 8 octobre 2007
Pour ONYX AQUITAINE,
Le Directeur Général
Mr Thierry BEHEREGARAY
Pour la CGT
Mr Alain ANGULO
Pour FO
Mr Claude LANDRAGIN
74

Documents pareils