Assis-debout : l`ergonomie et la rationalité
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Assis-debout : l`ergonomie et la rationalité
SPECIAL ERGONOMIE DOSSIER Mobilier Assis-debout : l’ergonomie et la rationalité Rester assis plusieurs heures de suite quelle que soit la nature du travail d’un professionnel n’est pas une posture ordinaire. Même si le siège utilisé est de la meilleure version, des troubles physiques naissent forcément à un moment ou à un autre, à quoi s’ajoutent des fatigues psychologiques. Depuis plusieurs années, certains pays dans le monde, à commencer par les pays scandinaves en Europe, mettent en avant divers types de postes de travail assis-debout, ce qui implique parallèlement le bureau et le siège. A ce jour, ce type d’installation est encore marginal en France. C’est pourtant la solution ergonomique présentée par les professionnels comme l’avenir incontestable… Travailler seul ou à plusieurs, toute la journée sur le même dossier ou sur différentes interventions… cela exige une organisation efficace du poste de travail. Mais surtout, ne pas risquer de se bloquer physiquement et psychologiquement en restant assis sans bouger plusieurs heures de suite… Tout ceci passe par une solution encore assez peu utilisée : la poste de travail assis-debout (ill. Herman Miller). Q Juin 2006 uel est le principe du poste assisdebout ? Le principe de base, ainsi que l’expliquent les ergonomes et les fournisseurs de mobilier, est que la position assise n’est pas une position absolument naturelle pour l’Homme. Par ailleurs, un poste partagé dans une entreprise est partagé par principe par des utilisateurs de tailles, de morphologies, voire de sexes différents. Ces deux principes sont les principales justifications du poste assis-debout, pour lequel à tout moment l’utilisateur peut faire varier l’installation du poste pendant sa période de travail. Concrètement, Marion Toison (Haworth ) explique qu’il est important pour toute personne au travail de « varier les postures pour s’adapter selon son activité et favoriser les mouvements », en précisant bien qu’il « n’y a pas de posture de prédilection » Une même personne peut partager ses différentes fonctions de travail sur des postes installés différemment. Ce qui implique de disposer d’un espace suffisant. Par ailleurs, dans une même entreprise, plusieurs intervenants peuvent se partager plusieurs postes de travail installés sur des espaces différents en fonction des différents types de fonctions. Ce qui alors n’exige pas forcément que l’espace soit plus grand, mais que les personnes acceptent de partager leurs bureaux. Si cela est possible, les postures de travail sont variées pour chaque intervenant et donc les problèmes physiques résolus. Mais concrètement, ce n’est pas toujours possible dans la possibilité de l’espace ou psychologiquement pour les intervenants qui - 22 n’auraient pas « leur bureau ». Par ailleurs, tout le monde ne fait pas forcément un travail varié ou partagé avec d’autres. Un comptable par exemple peut passer plusieurs heures assis au même siège et devant le même dossier. Dans ce cas il est indispensable de pouvoir faire bouger la façon de se tenir sur son bureau individuel. Thierry Coste, directeur marketing de Steelcase France, résume ainsi le principe du poste assis-debout : « Il est fonctionnel selon les activités pratiquées ; physique pour une meilleure santé de l’utilisateur ; et psychologique en permettant une certaine liberté de l’utilisateur par rapport à son poste de travail. » Quelle est sa place dans les entreprises européennes et françaises ? Si les postes assis-debout sont nés dans les pays nordiques, cela ne doit rien au hasard, ainsi que l’explique Marion Toison (Haworth ) : « Dans les pays du Nord de l’Europe, les populations sont très grandes. Il y a déjà longtemps que les gens utilisent des postes plus hauts, adaptés aux différentes technologies. Ils sont allés jusqu’au bout de cette logique avec les postes assis-debout. » L’ergonomie scandinave s’est ouverte vers les autres pays avec plus ou moins de rapidité. La France en ce domaine n’est pas des plus en avance… Le témoignage de François Bures, directeur marketing Kinnarps : « Le mobilier Assis-Debout est une spécialité de Kinnarps depuis de nombreuses années grâce à l’intérêt des pays scandinaves con- Juin 2006 DOSSIER Mobilier 23 - SPECIAL ERGONOMIE DOSSIER Mobilier Le principe d’un distributeur ergonome Le distributeur Vepi, très impliqué dans le monde de l’ergonomie, justifie ainsi – entre autres améliorations - le poste de travail assisdebout : « Aujourd’hui les experts du monde entier sont unanimes sur les résultats positifs que génèrent les investissements en ergonomie et environnement de travail. L’amélioration du bien-être des employés d’une entreprise permet à court terme de minimiser les coûts liés à l’absentéisme, d’optimiser la concentration de chacun, et par conséquent de générer une augmentation de votre productivité. Avec des espaces de travail plus mobiles et mieux pensés, la qualité de vie dans l’environnement professionnel peut s’améliorer considérablement. Cette évolution exige un siège et un bureau capables de vous suivre. » cernant l’ergonomie. Pas loin de 50% des ventes dans ces pays sont en assis-debout. En février j’étais au salon de Stockholm : l’essentiel des réponses des fabricants étaient pourvues de ce mécanisme. Malheureusement sur le marché français, c’est encore un peu «calme». Sauf quelques sociétés sensibles à l’ergonomie, comme par exemple l’AFP qui depuis dix ans a conscience de la nécessité de l’ergonomie. » Cette analyse est reprise par les autres professionnels du mobilier de bureau. L’expérience passée le prouve : le principe de l’ergonomie a mis plus de temps à être pris en compte par les entreprises françaises que par les autres communautés européennes et surtout nordiques. Petit à petit, elle entre dans les mœurs… Peut-on supposer que les postes assis-debout seront eux aussi, avec le temps, adoptés en tant que principe confortable et donc rentable pour tout type d’entreprise ? La question reste posée. Expliquer les principes et les bienfaits de l’ergonomie aux responsables d’entreprise dépend en grande partie des professionnels de la médecine, des ergonomes, qui se consacrent en grande partie à ces explications. Cela dépend aussi des architectes prescripteurs qui, eux, sont apparemment moins systématiquement convaincus de ce besoin. Sans doute en partie parce que le système assis-debout est moins esthétique que d’autres postes de travail, surtout en ce qui concerne la table, mais aussi parce qu’ils ne sont pas toujours au courant de l’ensemble des critères des postes assis-debout. en fonction de la taille et de la morphologie de l’utilisateur qu’un siège classique. Mais si le plateau reste fixe, on ne va pas au bout de la démarche ergonomique. Y a-t-il des métiers plus concernés que d’autres ? Des personnalités d’utilisateurs plus concernées ? Certains métiers exigent depuis toujours la possibilité de pouvoir adapter le poste de travail selon les éléments en cours. C’est le cas par exemple des bureaux d’études d’architectes. Mais le principe du système assis-debout concerne sur le plan ergonomique tout utilisateur qui passe plus d’une ou deux heures de suite à son bureau. En ce qui concerne les postes de travail partagés, cela touche plus certains métiers comme les équipes de vente, les équipes dites « nomades »… Est-ce un principe beaucoup plus coûteux qu’un poste de travail classique, ergonomique ou non ? La question ne fait aucun doute : la réponse est oui. Un poste assis-debout coûte en moyenne trois fois plus cher qu’un poste professionnel classique. Doit-on en rester à cette considération ? La réponse est non. C’est le principe général de l’ergonomie : une personne qui se sent mal à l’aise à son poste de travail, que ce soit physiquement ou psychologiquement, ne travaille pas avec la même efficacité – sans compter les arrêts de maladie – qu’une personne en pleine forme. Investir dans un mobilier et un matériel, peut être à court terme plus chers mais à moyen et long terme plus confortables et donc plus efficaces, peut conduire à une meilleure rentabilité à tous les niveaux : l’argent et le travail. C’est ce qui est appliqué dans les autres pays où les entreprises ne sont pas forcément plus aisées financièrement sur le principe que les entreprises françaises, mais où elles sont plus ouvertes au principe de l’investissement. Concrètement, quels sont les éléments d’un poste assis-debout ? D’un côté le siège, de l’autre la table. L’un et l’autre s’adaptent à l’utilisateur et s’adaptent entre eux pour choisir les hauteurs à utiliser pour tel ou tel type de travail. Les plateaux ont tendance actuellement à redevenir plus simples depuis que les écrans plats remplacent les matériels informatiques lourds et difficiles à régler visuellement. La table rectangulaire classique redevient la plus recherchée. Ce plateau dans sa version assis-debout se règle en hauteur par des boutons poussoirs faciles à gérer. Il va de soi que le choix du système de réglage est très important, car s’il n’est pas très facile pour tous, il ne sera pas utilisé concrètement plus d’une fois par jour dans le meilleur des cas. La première génération était quelque peu bruyante. Ce n’est plus le cas maintenant, des recherches ont été faites en ce domaine. Juin 2006 Peut-on utiliser un siège seul ? C’est souvent par les sièges que les entreprises entrent dans le monde de l’ergonomie. Mieux vaut un siège assis-debout, donc réglable - 24 La Serie [T] SSH de Kinnarps est la troisième génération de mécanismes assis-debout. « Outre l’esthétique «fine», le mécanisme silencieux, la finition ébénisterie, l’intérêt du produit est d’être évolutif à savoir : un poste traditionnel (mais néanmoins réglable de 620 à 800 en série) peut évoluer en SSH (620 à 1270) en fonction des besoins (même si nous conseillons de choisir tout de suite la réponse assis-debout). » DOSSIER Mobilier La rentabilité est plus rapidement évidente pour les entreprises qui cherchent à partager les postes de travail entre différents utilisateurs : cela devient une alternative économique. L’Hexagon de Haworth dispose de quatre piètements différents pour une plate-forme commune, quatre systèmes de réglage en hauteur, une goulotte horizontale avec ouverture des deux côtés, et un large choix d’options : plateau coulissant, trappe d’accès aux câbles, chant profilé, passe câble multifonctions… Il est à la fois « esthétique, fonctionnel, rassurant, gage de qualité et de longévité. » Tenaro, de Steelcase, se définit comme « astucieusement simple ». L’utilisateur peut choisir des pieds à hauteur fixe ou des pieds télescopiques réglables. L’organisation de l’espace de travail passe par l’écran Orgawall, facile à fixer sur l’arrière du plan de travail, avec un système d’étagères et un affichage des informations, système qui peut également servir de séparation entre deux postes de travail. Du poste le plus simple au plus sophistiqué, pour travail individuel ou en équipe, le système Tenaro a en principe tout prévu, avec les connexions nécessaires pour les ordinateurs et les appareils de télécommunication. Le principe de NF Professionnel Juin 2006 « Rester « scotché » de longues heures à son écran d’ordinateur et à son téléphone, presque immobile dans son siège de travail - aussi confortable soit-il - n’est pas bon pour la circulation sanguine et le soutien musculaire. Que dire lorsque cette position d’assise est reproduite toute la semaine, toute l’année … figée telle une momie ? A l’intérieur de nos entreprises, nombreux sont ces postes de travail « sarcophage ». Comment donc activer le cœur ? Comment solliciter les muscles ? Les sièges assis-debout, détournés de leur usage d’origine (laboratoire, atelier, etc.), sont - pour cette raison - en train de faire leur retour. Associés à des plans de travail haut ou à hauteur variable, ils incitent à un meilleur soutien musculaire et favorisent la circulation sanguine. En outre, travailler à plusieurs autour d’un écran ou d’une maquette est beaucoup plus agréable dans cette position d’assise. Mais n’y a-t-il pas des risques de chutes ? Peut-on y mettre des roulettes pour avoir un peu plus de mobilité sans jouer au casse-cou ? Les fabricants ont très vite été confrontés à ces questions de stabilité. Compte-tenu de l’absence de norme, le référentiel NF Technique a - tout aussi rapidement - apporté des réponses… » 25 - SPECIAL ERGONOMIE DOSSIER Mobilier Le principe d’un fournisseur GDB International a récemment décidé de fournir aux entreprises des postes de travail assis-debout. Pour cela, Pierre Jean Lancina a développé une analyse complète dont voici un petit résumé… « Un être humain a un besoin physiologique de bouger toutes les 1h30 environ. Les ergonomes recommandent une alternance de 2 à 4 positions assis-debout par heure, avec des phases de travail debout inférieures à 20 mn. Il convient d’éviter les positions : debout statiques et assise stationnaires. Les deux positions, assise et debout, comportent des avantages à savoir : en position assise, la coordination motrice et la précision de la vision s’améliore ; en position debout, le taux de réaction augmente et la tension du dos diminue. De bonnes conditions de travail sont le gage de résultats positifs accrus pour l’entreprise et pour l’employé. Pour l’entreprise : augmentation de la motivation et de la satisfaction des salariés ; diminution à long terme de l’absentéisme ; amélioration de la qualité des produits et des services ; amélioration de la communication et de la coopération interne ; impact très positif sur l’image de l’entreprise ; optimisation des coûts grâce au partage d’un bureau ; style de travail plus dynamique et efficace Pour l’employé : réduction des problèmes de santé chroniques ; amélioration de l’environnement de travail ; élimination des positions monotones ; augmentation de la concentration ; disques vertébraux moins sollicités ; réduction de la tension du dos, du cou, des épaules et des maux de tête ; augmentation de la sensation de bien être dans son environnement de travail Les employés étant les facteurs majeurs de production, ils doivent travailler dans des conditions optimales. Il s’avère qu’une mauvaise ergonomie peut entraîner une perte de performance allant jusqu’à 35%, que doit financer l’entreprise. On estime le surcoût total d’un poste de travail ergonomique à plus ou moins 1000 € par rapport à un poste standard. Si l’on calcul le coût pour l’entreprise d’une journée d’absence d’un employé (remplacement par un intérimaire inclus), il s’élève environ à 200 € par jour. Le surcoût d’un poste de travail ergonomique est donc amorti à compter du 5ème jour d’absence du salarié, sachant que les entreprises les plus touchées sont celles du secteur tertiaire. Diverses versions de sièges et mobiliers spéciaux ◄ Siège « selle », le Capisco de Håg est l’un des plus recherchés pour l’installation d’un poste de travail assis-debout. « Le siège à selle explique-t-on chez Håg, est une option parfaite pour les plans de travail élevés. Le siège permet de varier entre les positions basses et les positions plus élevées - allant jusqu’à une position «presque debout» qui donne un parfait équilibre et beaucoup de dynamisme dans le travail. » Concrètement existent différentes options de vérins, avec un vérin standard de 200 mm, un vérin de 265 mm pour des surfaces de travail hautes, et une option de vérin de 150 mm, qui font « que cette solution peut fonctionner aussi bien avec des surfaces de taille normale que de hauteur. » Ce siège est également disponible avec un assis plat. ◄ Deux versions de sièges assis debout proposées par Nowy-Styl : Webstard, siège de caisse et Rodeo, siège dessinateur, tous deux avec repose-pieds. ► « Une ergonomie d’exception pour l’informatique mobile » : ainsi définiton les chariots Style View Ergotron, destinés à répondre aux besoins des médecins et infirmières dans leurs tournées. Ce chariot leur permet d’accéder au dossier de leurs patients (via un PC, un ordinateur portable…) au fur et à mesure de leurs déplacements, et de travailler en position debout ou assise. Il est actuellement utilisé dans des hôpitaux et dans des sociétés industrielles, des laboratoires pharmaceutiques… Juin 2006 ◄ Yoyo, l’une des solutions Steelcase, permet de monter et descendre le bureau en quelques secondes selon les besoins de l’utilisateur. Sont prévus la montée de cables flexibles, le rail porte-accessoires, le support imprimante, l’archivage suspendu, le sac, le rangement CD. « Il offre tout un programme d’éléments d’extension spécialement destinés à l’organisation du poste de travail », précise Steelcase : classeur à chemises rigides pendantes, cadre à pochettes, corbeille à papier, tout ce qui concerne « l’ère de l’information ». - 26 DOSSIER Mobilier ◄ La gamme RH Support permet de composer «un siège assisdebout à la carte» selon les besoins de chacun, avec le siège « Appui-fesses » et le siège « Selle ». Leur point commun : deux manettes de réglage de la hauteur d’assise et de l’angle entre l’assise et le dossier, ainsi que simultanément de la pente d’assise. ◄ ▼ Partant du principe que l’ergonomie est « une science en mouvement », Guilbert Mobilier (groupe Office Dépôt) met en avant le fait que « d’une façon générale, l’organisation dans le domaine tertiaire génère des paradoxes. D’une part le travail à l’écran nous fige à la même position durant de longues périodes et d’autre part le travail en équipe nécessite le partager des équipements. » Conclusion : « Choisir des mobiliers aux normes autant que possible réglables permet une posture adéquate et favorise la communication. » Moyennant quoi, en partenariat avec l’industriel V/S, Guilbert Mobilier propose différents produits adaptés, les Premium 1 100 et Premium 900. Amplitude de réglage en hauteur 65 cm à 117 cm ; version électrique avec mémorisation de plusieurs positions. ► « L’appui-fesses est-il une autre façon de se tenir debout ou d’être assis ? Aussi bien l’un que l’autre. » Le tabouret appui-fesse Conforto System1 présenté par Haworth permet de s’asseoir en conservant « une grande liberté de mouvement ». En balançant de gauche à droite ou d’avant en arrière la colonne vertébrale, « les mouvements soutiennent la circulation et le métabolisme et préviennent les crispations. » Le tabouret dispose d’un coussin d’assise rond ou triangulaire, il est réglable en hauteur par un vérin à gaz comforto-lift. Ses utilisateurs principaux : les architectes, les dessinateurs… Il sert également de siège pour des réunions express autour d’un café. Juin 2006 ▲ « Un style spontané, un concept interactif et stimulant, axé sur la communication, un caractère enjoué et inventif… » ainsi Giroflex présente-t-il son siège G-10 version assis-debout. « La position semi-assise et le principe de basculement soulagent la colonne vertébrale et la musculature dorsale. Ce mouvement dynamique du corps stimule l’activité intellectuelle et génère une vraie sensation de bien-être. Le modèle G-10 accompagne à merveille les moments pleins de vie, les discussions animées, le travail cérébral ou manuel et les instants consacrés au repos et à la détente. Disponible dans divers coloris séduisants, il est pourvu d’un mécanisme de réglage en hauteur. » ◄ La version poste assis-debout pour utilisateur « nomade » de Herman Miller. 27 -