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CAMERON MONTGOMERY
Conceptions initiales de futurs enseignants au primaire et au secondaire à
l'égard de l'enseignement
Mémoire
présenté
à la faculté des études supérieures
de l’université Laval
pour l’obtention du grade de maître ès arts (M.A.)
Département de didactique, psychopédagogie et technologie éducative
FACULTÉ DES SCIENCES DE L’ÉDUCATION
UNIVERSITÉ LAVAL
AVRIL 1998
ii
© CAMERON MONTGOMERY, 1998
iii
Résumé
Devant les exigences resserrées pour les candidats au baccalauréat en enseignement primaire
(BEPP) et en enseignement secondaire (BES), on peut supposer que les étudiants sont meilleurs,
que leurs motifs sont plus sérieux, que leurs conceptions de l'enseignement sont plus réalistes et
qu'elles sont de nature plus professionnelle. L'intérêt d'étudier ces conceptions préalables vient
de ce qu'elles apportent des renseignements essentiels à l'ajustement des interventions des
formateurs universitaires et des maîtres associés au cours de la formation initiale des enseignants.
Cette recherche vise à examiner le niveau de confiance des futurs enseignants du primaire et du
secondaire à l’entrée de leur programme de formation, leurs motifs de choix de carrière et leurs
préconceptions à l'égard du métier d'enseignant.
À l'automne 1994 et 1995, trois groupes
d'étudiants (N=431) au BEPP et au BES ont répondu, au début de leur formation, à un
questionnaire comportant plusieurs questions ouvertes ainsi que des échelles de type Likert. Les
résultats obtenus montrent que les étudiants au BEPP justifient leur orientation dans
l'enseignement principalement par l'amour des enfants alors que les étudiants au BES
mentionnent plus souvent des aspects reliés à la matière.
Ils suggèrent également que les
étudiants des deux programmes ont un sentiment d'efficacité personnelle élevé à l'égard des
tâches des enseignants. D'autre part, une analyse de regroupements hiérarchiques a permis de
dégager quatre types de conceptions de l'enseignement. Enfin, la recherche montre que les motifs
et les conceptions exprimés par les étudiants ne prédit d'aucune façon leur réussite scolaire
ultérieure.
iv
Avant-propos
Je tiens à remercier en premier lieu mon directeur de recherche Frédéric Legault qui m’a permis
de découvrir le monde de la recherche. Je remercie ensuite mon conseiller Nérée Bujold qui m’a
fait découvrir le monde des colloques internationaux. La liste des personnes qui m’ont aidé dans
mes démarches de rédaction serait trop longue à énumérer, mais je tiens à remercier mon amie
Karine David pour son aide précieuse. En dernier, je tiens à remercier le fond pour la formation
de chercheurs et l’aide à la recherche (FCAR) d’avoir subventionné le projet.
v
Table des matières
Résumé
Avant-propos
Table des matières
Liste des tableaux
Liste des figures
ii
iii
iv
vi
vii
CHAPITRE 1 : CONTEXTE THÉORIQUE
INTRODUCTION
2
PROBLÉMATIQUE
3
I ANTÉCÉDENTS SOCIO-SCOLAIRES DES FUTURS ENSEIGNANTS AU PRIMAIRE
ET AU SECONDAIRE
5
1.1 ÂGE, SEXE
5
1.2 ANTÉCÉDENTS SCOLAIRES
7
1.3 APPARTENANCE SOCIALE ET SCOLARITÉ PARENTALE
8
II LES MOTIFS DU CHOIX DE CARRIÈRE
9
2.1 LA NATURE DES MOTIFS DE CHOIX DE CARRIÈRE
13
2.1.1 Le degré d’engagement dans l'enseignement
13
2.1.2 La nature altruiste des motifs
14
2.1.3 Les enjeux socio-psychologiques
15
2.2 UN REGARD SUR UNE ÉTUDE CANADIENNE
16
2.3 CONCLUSION
17
III LES PRÉCONCEPTIONS DES STAGIAIRES
18
3.1 ORIGINE DES PRÉCONCEPTIONS DES ÉTUDIANTS EN FORMATION
19
3.2 CHANGEMENT ET STABILITÉ DES CONCEPTIONS
21
3.3 LA DIFFÉRENCE ENTRE L'ÉTUDIANT EN FORMATION ET L'ENSEIGNANT EN ACTIVITÉ
QUANT À LA DÉFINITION D'UN ENSEIGNANT EFFICACE
22
vi
3.4 L'INFLUENCE DES PRÉCONCEPTIONS SUR LES APPRENTISSAGES DES FUTURS ENSEIGNANTS
26
3.5 ATTITUDES ENVERS LA PROFESSION ENSEIGNANTE
27
3.6 SENTIMENT D'EFFICACITÉ
28
3.7 RÉTICENCES VIS-À-VIS DE LA FORMATION PÉDAGOGIQUE
30
3.8 CONCLUSION
31
IV OBJECTIFS DE RECHERCHE
33
CHAPITRE 2 : ARTICLE EMPIRIQUE
ARTICLE EMPIRIQUE
35
CHAPITRE 3 : CONCLUSION
CONCLUSION
73
BIBLIOGRAPHIE
74
vii
Liste des tableaux
Contexte théorique :
Tableau 1
Les motivations des candidats se dirigeant vers l'enseignement primaire
versus ceux qui se dirigent vers le secondaire
9
Article :
Tableau 1
Grille de catégorisation relative aux motifs du choix de carrière
64
Tableau 2
Grille de catégorisation des caractéristiques d’un-e bon-ne enseignant-e
65
Tableau 3
Motifs des étudiant-e-s au BEPP et au BES (pourcentages de sujets)
66
Tableau 4
Sentiment d'efficacité personnelle à l'égard de certaines tâches
67
Tableau 5
Caractéristiques d’un bon enseignant selon le programme et selon
le sexe (pourcentages de sujets)
68
Caractéristiques d’un bon et d’un mauvais enseignant ainsi que d’un
enseignant idéal et réel (pourcentages de sujets)
69
Résultat de l'analyse typologique avec moyennes de groupe, valeur de F et
de p
70
Tableau 6
Tableau 7
viii
Liste des figures
Contexte théorique :
Figure 1
Les cinq motivations principales à enseigner selon Lortie (1975)
12
CONTEXTE THÉORIQUE
2
Introduction
Nous reconnaissons tous la nécessité pour les formateurs des maîtres de bien connaître leur
clientèle pour adapter leur enseignement aux besoins des étudiants.
Plusieurs recherches
indiquent que les attitudes et les croyances des enseignants influencent leurs perceptions et leur
compréhension des événements en classe. Dans le but de mieux connaître les caractéristiques des
futurs enseignants, la présente recension vise à examiner:
-les antécédents socio-scolaires de ces futurs enseignants au primaire et au secondaire,
-leurs motifs de choix de carrière
-leurs préconceptions à l’égard du métier d’enseignant
Ce travail de recherche peut s'avérer utile pour toute personne qui intervient dans un programme
de formation des maîtres ou qui, comme étudiant, se dirige vers une carrière dans le domaine de
l'enseignement. Il ne sert pas de guide mais nous espérons toutefois donner quelques pistes aux
formateurs qui interviennent dans le cadre d’un programme de formation des maîtres.
La
recherche comprend les parties suivantes:
- Une recension d’écrits dans laquelle nous ferons un survol des trois thèmes mentionnés
ci-dessus.
- Un article empirique qui porte sur les facteurs relatifs aux motifs du choix de carrière, au
sentiment d’efficacité des candidats à l’entrée du programme et aux conceptions initiales
des étudiants à propos des qualités requises pour bien enseigner.
- Une conclusion.
3
Problématique
Notre capacité à réagir face au nouveau contexte d’enseignement constitue l’un des défis sociaux
majeurs de cette fin de siècle (Goodlad, 1990). Le cheminement académique des étudiants en
enseignement secondaire et primaire est caractérisé par un décrochage persistant et élevé (Joseph
et Green, 1986).
La sélection et la formation des maîtres constituent certes des éléments
essentiels des réformes envisagées.
En effet, le groupe Holmes (1986) a réorienté les
programmes de formation des maîtres aux États-Unis en créant des écoles associées qui visent les
six objectifs suivants:
- Enseigner et apprendre pour comprendre;
- Créer des communautés d’apprentissage;
- Oter les barrières sociales;
- Enseigner aux enfants ainsi qu’aux adultes;
- Promouvoir la réflexion et la recherche;
- Créer une structure organisationnelle différente.
Au Québec, de nouveaux programmes, soumis à un comité d’agrément, sont également implantés
dans toutes les universités et la place de la formation pratique s’accroît substantiellement. À
l’université Laval, les programmes de baccalauréat en enseignement secondaire (BES) et de
baccalauréat en enseignement au préscolaire et au primaire (BEPP), d’une durée de quatre ans,
s’inspirent de plusieurs principes: une "orientation axée sur la professionnalisation", dont la
finalité est "l’apprentissage des élèves", et qui repose sur une "synergie entre la théorie et la
pratique". Les différences entre les anciens et les nouveaux programmes sont nombreuses. En ce
qui concerne le baccalauréat en enseignement secondaire, il n’y avait auparavant qu’un an de
pédagogie et de formation pratique qui complétait une majeure ou un baccalauréat spécialisé,
alors qu’actuellement il comprend quatre ans de formation intégrée.
Quant au nouveau
programme d'enseignement préscolaire et primaire, il comporte des différences par rapport à
4
l’ancien programme dans la mesure où sa durée est allongée et les stages sont augmentés.
L'université Laval a mis en place de nouveaux critères de sélection qui stipulent que "le diplôme
d'études collégiales, la preuve de la connaissance du français et une séance d'appréciation par
simulation" sont obligatoires pour l'admission du candidat aux programmes de baccalauréat en
enseignement secondaire et en enseignement préscolaire et primaire. Après examen de ceux-ci,
on constate qu'ils sont plus exigeants qu'auparavant. Par exemple, en 1995, 15% des demandes
d’admission au BES ont mené à des inscriptions en bonne et due forme. A priori, on peut penser
que les étudiants sont meilleurs, que leurs motifs sont plus sérieux et de nature plus
professionnelle. En effet, les caractéristiques des nouveaux programmes, qui favorisent une
implication initiale plus importante de la part des candidats, associées à des procédures de
sélection plus sévères, devraient avoir un impact sur la composition de la clientèle. Il devient
alors intéressant d'examiner chez celle-ci ses motifs du choix de la carrière et ses conceptions
initiales à l'égard de la profession enseignante.
Il a été démontré qu'il y avait des différences considérables quant aux antécédents scolaires entre
les étudiants qui sont admis dans des programmes en éducation secondaire et primaire et ceux
d'autres domaines (Book et Freeman, 1986). Apparemment, les candidats sont représentés en
grande partie par des femmes et un pourcentage élevé d’entre eux est issu d'un milieu défavorisé
(Violato et Travis, 1990). On note également des différences importantes entre les candidats des
deux programmes de l'enseignement secondaire et primaire quant aux antécédents scolaires et
aux expériences relationnelles avec les enfants (Book, Byers et Freeman, 1983). Pour celles et
ceux qui se dirigent vers l'enseignement primaire, la formation est marquée par une carence de
cours en sciences et en mathématiques. De la même manière, les étudiants se dirigeant vers
l'enseignement secondaire semblent manquer d'expérience avec des jeunes. Les conséquences de
ces deux lacunes ne sont pas négligeables dans la mesure où elles peuvent influencer la formation
ultérieure de ces futurs enseignants.
5
Les recherches sur les préconceptions des futurs enseignants révèlent que celles-ci ont un impact
certain sur leur formation à tel point que les formateurs doivent prendre en compte la possibilité
qu'elles interfèrent avec les savoirs enseignés. Ces recherches fournissent des renseignements
essentiels à l'ajustement des interventions des formateurs universitaires et de ceux qui encadrent
les stagiaires au cours de la formation initiale. Ces informations nous amènent à nous demander
quels candidats démontrent les compétences nécessaires pour supporter les vicissitudes du monde
de l'enseignement.
Afin de répondre à ce questionnement, nous avons réalisé une étude
descriptive qui visait à connaître le profil des étudiants en enseignement primaire et secondaire au
début de leur formation universitaire.
En d'autres mots, notre recherche vise à essayer de
comprendre les motifs, les attentes et les conceptions de ceux et celles qui se destinent à
l'enseignement secondaire et primaire. Pour ce faire, nous aborderons, dans une recension des
écrits, les antécédents socio-scolaires des étudiants, les motifs de leur choix de carrière et leurs
préconceptions à l’égard de la profession.
I Antécédents socio-scolaires des futurs enseignants au primaire et au
secondaire
Dans cette section nous examinerons les variables suivantes: l'âge et le sexe, les antécédents
scolaires, l'appartenance sociale et la scolarité des parents des étudiants en enseignement. Il faut
noter qu'il s'agit essentiellement d'études américaines.
1.1 Âge, Sexe
Pour ce qui se rapporte à l'âge moyen des étudiants en enseignement, on retrouve dans plusieurs
études une forte proportion de personnes dont l'âge se situe entre 19 et 22 ans. Par exemple, ce
groupe d'âge constitue 42% des étudiants de l'étude de Joseph et Green (1986). Les étudiants
âgés de 23 à 34 ans représentent 43%. Le troisième groupe d'âge est composé d'étudiants âgés de
35 ans et plus, ce qui représente 15% du total. Ce dernier groupe d'âge est en général composé de
6
personnes qui avaient un emploi dans un autre domaine durant une certaine période avant
d'entreprendre leurs études en enseignement.
En ce qui concerne le sexe des personnes
impliquées dans cette étude, il y a 75% de femmes contre 25% d'hommes dans l'ensemble.
En se penchant sur une autre étude effectuée par Violato et Travis (1990), on trouve, parmi les
583 candidats en enseignement primaire, secondaire et au deuxième cycle, 217 hommes (37.2%)
et 366 femmes (62.8%). L'âge des candidats varie entre 18 et 49 ans : l’âge moyen est de 23.4
ans. Cent soixante-quatorze (29.8%) ont 20 ans et moins, 284 (48.7%) ont entre 21 et 25 ans, et
125 (21.4%) ont 26 ans et plus.
Les résultats d'une recherche faite par Bontempo et Digman (1985) révèlent que les femmes
constituent les deux tiers des étudiants en enseignement primaire et secondaire.
On peut
également constater qu'il y a un très grand écart entre le nombre des hommes (11) et les femmes
(115) au niveau primaire alors que les proportions sont relativement égales au secondaire (66
hommes et 68 femmes) dans leur étude. En fait, on retrouve le même écart entre les hommes et
les femmes dans une étude faite par Weinstein (1988), qui rapporte 105 femmes pour 14
hommes, programmes confondus. Cet écart entre les sexes est semblable à l'université Laval
puisqu'en automne 1995, il y avait 775 hommes pour 2,053 femmes, soit un pourcentage de
femmes de 72.1%. En ce qui se rapporte à l'âge des étudiants, 23% ont 20 ans et moins, 40% ont
entre 21 et 24 ans, 21% ont entre 25 et 35 ans et 16% ont 36 ans et plus.
Brookhart et Freeman (1992), concluent pourtant que la proportion homme/femme varie d'une
université à l'autre. Par exemple, dans leur analyse de recherches faites dans quatre universités
différentes, la proportion homme/femme varie entre 75% et 80% de femmes dans trois
universités alors que les femmes ne représentent que 52% dans une quatrième université.
En résumé, on peut constater que le pourcentage de femmes est généralement plus élevé que celui
des hommes dans l'ensemble des programmes de formation des maîtres, tout en tenant compte du
fait que cet écart est moins marqué au niveau secondaire.
La majorité des candidats aux
7
programmes de formation des maîtres ont moins de 24 ans, alors que ceux qui sont âgés de 25 ans
et plus constituent approximativement un quart du nombre total d'étudiants inscrits. Aucune
étude à notre connaissance n’a cherché à répondre à la question de savoir si les motifs de ces
derniers sont différents de ceux de leurs camarades de cours à cause de leur décision tardive et de
leurs expériences antérieures.
1.2 Antécédents scolaires
En général, les auteurs s'entendent sur le fait que le niveau de qualification des candidats qui
entrent dans les programmes de formation des maîtres est très bas. Ceci est évident lorsqu'on
regarde les résultats des examens nationaux des étudiants nouvellement admis en enseignement
au niveau universitaire comme le Student Achievement Test (SAT) et le Grade Point Average
(GPA) aux États-Unis (Bontempo et Digman, 1985).
Book et Freeman (1986) rapportent une nette différence entre le bagage scolaire des étudiants au
baccalauréat en enseignement primaire (BEPP) et celui des étudiants au baccalauréat en
enseignement secondaire (BES) en ce qui concerne le nombre de cours relatifs aux sciences et
aux mathématiques, à l’avantage des derniers. Toutefois, ceux qui se présentaient au primaire
avaient plus d'expérience d'enseignement, plus de pratiques diversifiées avec des groupes
d'enfants en dehors de la famille. En revanche, il faut mentionner que Book, Byers et Freeman
(1983) n'ont trouvé aucune différence majeure en comparant les notes moyennes à l'école
secondaire des étudiants en éducation et celles d'étudiants dans d'autres domaines universitaires.
Ils maintiennent que les étudiants en enseignement sont plus intéressés par les cours d’éducation
physique tandis que les étudiants dans les autres domaines s'intéressent plus aux cours de
sciences. Enfin, les étudiants en enseignement estimeraient qu'ils mettent plus d'efforts pour
obtenir leurs notes que ceux des autres domaines.
8
Andrew (1983) relate qu’il existe un programme d'enseignement à l'université du New
Hampshire qui admet des étudiants capables et engagés. Ce programme a une durée de cinq ans
et comporte dès la première année des stages en milieu scolaire. Ce programme diffère des autres
programmes de formation des maîtres dans la mesure où il exige des notes élevées de ses
étudiants et où il y a une plus grande participation sur le terrain de la part des candidats. En
conséquence, le taux de réussite de ces étudiants semble être supérieur à ceux d'autres
programmes d'enseignement, étant donné les niveaux d'exigence à l'entrée et durant le
programme.
Pour conclure, il existe un écart entre les candidats du secondaire et ceux du primaire quant à la
qualité de la formation antérieure. Cependant, les candidats au primaire semblent avoir plus
d'expériences avec les enfants que ceux qui se dirigent vers un programme d'enseignement au
secondaire. Enfin, on peut constater que les étudiants qui se destinent vers l'enseignement
secondaire et primaire ont, du moins dans les programmes peu sélectifs, une formation antérieure
qui est marquée par des notes plus faibles que la moyenne des étudiants des autres facultés.
1.3 Appartenance sociale et scolarité des parents
Violato et Travis (1990) constatent que presque la moitié de leurs sujets canadiens ont une mère
qui n'a pas d'emploi rémunéré. Parmi celles qui travaillent, peu d'entre elles exercent une
profession libérale. En ce qui concerne les pères des candidats en enseignement, la plupart
travaillent comme ouvriers ou comme employés. Les résultats indiquent que 39.7% des sujets
viennent de milieux défavorisés. Apparemment, cette situation décrite précédemment est très
semblable à celle de l'Angleterre et des États Unis (Lomax, 1972). Selon le "national survey of
American teachers" de 1961, 37.6% des gens étaient dans cette catégorie sociale, et ceci a
augmenté à 39.6% en 1972.
Il est nécessaire de souligner des différences entre les hommes et les femmes par rapport à
l'appartenance sociale. En effet, selon Lortie (1975), l'enseignement est un moyen plus important
9
pour les hommes de monter dans la hiérarchie de la société que pour les femmes. De plus, 64.1%
des femmes appartiennent à un groupe familial favorisé tandis que seulement 52.2% des hommes
y appartiennent. Parmi les candidats qui viennent d'une famille ouvrière on retrouve 35.9% de
femmes et 47.9% d'hommes. Plus des trois quarts des pères (76.8%) et mères (83.8%) des sujets
n'ont pas fait leurs études universitaires. En fait, seuls 4.8% des étudiants en enseignement ont
leur père et leur mère qui ont fait d'études universitaires. Ainsi, une très grande majorité de
candidats représente la première génération de leur famille à poursuivre des études de niveau
universitaire puisqu'ils sont issus à 70.5% de foyers où aucun des parents n'en a poursuivi. Il en
est de même dans les études de McIntire et Pratt (1985), et Pigge et Marso (1986), où près des
deux tiers des parents des candidats n'ont pas de diplôme universitaire. Folsom et Lucy (1970)
ont révélé que les pères des candidats en enseignement ont un niveau de formation moins élevé
que ceux des candidats dans les autres domaines et qu'on retrouve un nombre moins élevé de
livres chez eux. Toutefois, les résultats peuvent varier d'une étude à l'autre. Selon West et
Brousseau (1987), la plupart des parents des sujets étudiés ont un diplôme universitaire, et 57%
des pères des candidats ont obtenu au moins un baccalauréat.
On peut donc constater que les candidats se dirigeant vers l'enseignement primaire et secondaire
sont en grande partie les premiers dans leur famille à choisir un emploi qui exige une formation
universitaire. En outre, cette situation d'appartenance sociale est même plus marquée chez les
hommes dans la mesure où ils viennent des familles encore plus défavorisées que les femmes.
II Les motifs du choix de carrière
En premier lieu, nous ferons un survol des études afin d'identifier les principaux motifs du choix
de carrière des futurs enseignants. Par la suite, nous examinerons plus en détail la nature même
de ces motifs. Dans un troisième temps nous présenterons les résultats d’une étude réalisée au
Canada, le tout suivi par une conclusion.
10
Book et Freeman (1986) ont administré un questionnaire auprès de 174 étudiants en
enseignement au niveau primaire et 178 au niveau secondaire dans le cadre d’un programme de
formation des maîtres à l’université du Michigan. Leurs réponses ont été résumées dans une liste
des motivations ou de raisons de choisir la carrière d'enseignant, comme l'illustre le tableau 1:
11
Tableau 1: Les motivations des candidats se dirigeant vers l'enseignement primaire et vers
l'enseignement secondaire
Les motivations des candidats
dirigeant vers le primaire:
se Les motivations des candidats
dirigeant vers le secondaire:
se
• le désir de travailler avec les enfants
• le désir d'appliquer les connaissances de
la matière choisie au collège
• le désir d'aider d'autres moins fortunés
• le désir d'aider les élèves à acquérir des
connaissances
• le désir d'aider les élèves à développer • une compréhension des matières qu'ils
une appréciation des autres cultures
estiment importantes
• l'enseignement est une étape en vue
d'aller vers d'autres rôles professionnels
Book et Freeman avancent que la façon dont les étudiants perçoivent l'excellence en
enseignement montre que les candidats se dirigeant au secondaire favorisent fortement une
orientation qui concerne l'enseignement d'une matière. En revanche, ceux qui se dirigent vers le
primaire ont tendance à choisir l’enseignement par amour des enfants.
En résumé, nous
mentionnerons quelques éléments que les étudiants ont ciblés comme étant importants lorsqu'ils
enseignent sur le terrain. Il s'agit d'abord de la connaissance comme élément le plus important
pour les étudiants en enseignement au secondaire alors que pour les étudiants en enseignement
primaire il s'agit de la sensibilité à la dynamique sociale de la classe. Il est utile d'ajouter que
cette étude ne rejoint pas l'idée populaire que les enseignants vont vers la carrière d'enseignement
parce qu'ils ne peuvent pas choisir d'autre carrière.
Pourtant, un pourcentage significatif
d'hommes (21%) qui veulent enseigner au secondaire affirment avoir choisi l'enseignement parce
qu'ils n'avaient pas réussi certains cours préparatoires dans d'autres domaines que l'enseignement.
Les résultats de cette étude vont dans le sens de ceux de Lortie (1975), Jantzen (1981), et NEA
(1972) qui suggèrent qu'une forte "motivation de service" est une raison principale pour choisir
une carrière dans l'enseignement.
12
Book et Freeman (1986) soulignent que l'influence d'un enseignant dynamique contribue aussi au
choix de carrière de plusieurs individus (21% des candidats se dirigeant vers l'enseignement au
primaire et 32% de ceux qui se dirigent vers le secondaire). Ils constatent également que
majoritairement les hommes, ainsi qu'un pourcentage élevé de femmes veulent entrer dans
l'enseignement pour une courte durée, c'est-à-dire moins de dix ans. Deux raisons motivant le
choix de carrière sont également avancées: la première est relative au développement de l'estime
de soi des élèves, la seconde a trait au développement du goût d'apprendre chez les élèves.
Bontempo et Digman (1985) ont fait passer un questionnaire dans le cadre d'un cours intitulé
"Introduction to Education", auprès de 186 étudiants. Leur étude essaie d’identifier les attitudes
et le degré d’implication des étudiants en enseignement primaire et secondaire à l’entrée d’un
programme de formation des maîtres à l’université de Virginie. Les résultats montrent que 50%
"aiment travailler avec les enfants et les gens", et "désirent aider les autres". Vingt pour-cent
(20%) s'intéressent à enseigner une matière.
Quatorze pour-cent (14%) trouvent que c'est
stimulant d'être enseignant, qu'ils ont de l'habileté naturelle à enseigner et que leurs expériences
antérieures les mènent à l'enseignement. Notons aussi que 7.3% ont des modèles qui les ont
influencés vers une carrière en enseignement (famille ou professeur). En fait, plus précisément,
25% des sujets ont un membre de la famille qui est enseignant. Il faut dire que les motivations
de ceux-ci sont semblables à celles des autres répondants.
Lortie (1975) recueille les motivations du choix de carrière d’enseignants américains par des
entrevues. Il identifie cinq motivations principales à enseigner, qui se présentent comme suit:
13
Motivation reliée
aux bénéfices matériels
Motivation à avoir
des horaires intéressants
Motivation relative
à la continuité
Motivation à rendre
service
Motivation interpersonnelle
Motivations principales à
enseigner
Figure 1 Les cinq motivations principales à enseigner selon Lortie (1975)
Afin de clarifier ces motivations selon Lortie, nous les définirons toutes.
La motivation
interpersonnelle est éprouvée par quelqu'un qui obtient une satisfaction intrinsèque à l'acte
d'enseigner. La motivation relative à la continuité se traduit par le désir d’être dans un processus
continuel d’apprentissage. La motivation reliée aux bénéfices matériels se résume par le désir de
toucher un bon salaire. La motivation à avoir des horaires intéressants s'explique par les congés
et la possibilité d’horaires peu contraignants.
En fin de compte, la dernière motivation
correspond au désir d’aider les autres dans leurs apprentissages, ce que Lortie appelle la
motivation à rendre service.
Marc Jantzen (1981) a fait un survol de cinq études (de 1946 à 1979) menées dans des collèges
américains et portant sur les motivations à l'enseignement. Pour ces cinq études, un comité avait
préparé une liste de 16 raisons du choix de la profession d'enseignant. Ce même questionnaire a
été présenté à des étudiants en formation tout au long de cette période. Quant aux résultats de ces
cinq études, pour les hommes et les femmes, "l'intérêt pour les enfants" est la principale
motivation exprimée.
14
Enfin, Goodlad (1984) dans "A Place Called School," a mené une étude auprès de 1,350
enseignants. Goodlad établit huit raisons principales d'enseigner dans son étude, dont les cinq
identifiées par Lortie antérieurement, auxquelles se rajoutent la stimulation (le besoin d'une
carrière absorbante et le désir de créativité), l'influence d'autrui (parents, époux, enseignants
antérieurs), les motivations psychologiques (être en position d'autorité, avoir l'affection des
enfants, être l'animateur, le point de mire) et être dans une position de non-compétitivité.
2.1 La nature des motifs de choix de carrière
Sauf pour quelques études pionnières, les auteurs commencent à s’intéresser aux motifs du choix
de carrière à partir de 1960. Richards (1960), par exemple, a réalisé une étude sur ce sujet à
l’université d’Ohio State en 1958. Ses résultats suggèrent que la raison principale pour laquelle
les enseignants choisissent une carrière en enseignement dénote une satisfaction intrinsèque
différente du salaire, soit celle d’aider les enfants. La deuxième raison la plus fréquente est une
bonne préparation pour une vie de famille. Depuis cette étude, il y a eu certains changements
qu'il sera possible d'investiguer.
Pour cela, nous aborderons trois thèmes: le degré de
dévouement à l’enseignement, la nature altruiste des motifs et les enjeux socio-psychologiques
des candidats en enseignement primaire et secondaire.
2.1.1 Le degré d’engagement dans l'enseignement
Bontempo et Digman (1985) tentent d'identifier le degré d'implication des étudiants en quatrième
année à l'égard de la profession enseignante. On constate que plus de la moitié sont encore
certains de leur choix, 36% sont plutôt favorables, 5.6% sont neutres, 4.5% ont des doutes et 2%
ne sont plus intéressés.
En ce qui a trait au degré d'engagement par niveau d’étude, il y a peu de changements durant les
trois premières années, dans la mesure où la plupart des étudiants sont favorables ou très
15
favorables au choix de la carrière d'enseignant. Toutefois, seulement 21% des étudiants en
quatrième année ont cette certitude. Ceci amène les auteurs à se questionner sur le changement
tardif des étudiants, c'est-à-dire pourquoi les étudiants en quatrième année ne considèrent pas
l'enseignement comme étant un cheminement professionnel désirable lorsqu'ils sont sur le point
de terminer leurs études. Nous pouvons nous demander si cette incertitude est due à une
immersion trop tardive dans la pratique supervisée.
2.1.2 La nature altruiste des motifs
Joseph et Green (1986) comparent les étudiants en enseignement et les enseignants en pratique.
Ils avancent que la plus grande motivation de ces deux groupes vient du désir de travailler et
d'aider les jeunes. Selon eux, les deux principales motivations sont de nature altruiste: le désir de
travailler avec les enfants et les adolescents et le désir de communiquer des connaissances.
D’autres motivations moins saillantes que les deux précédentes sont aussi évoquées: l'opportunité
de continuer à s'instruire, le désir d'être au service de la société, l'attrait pour une matière,
l'expérience de travail avec des jeunes et la possibilité de quitter l'enseignement et d'y retourner
ultérieurement.
Selon Andrew (1983), le facteur le plus important dans le choix de carrière pour les étudiants
inscrits dans un programme d'enseignement se résume par "aider autrui". Viennent ensuite le
plaisir de vivre avec des enfants, puis le plaisir d'enseigner une matière de leur choix et cela, de
manière égale pour les hommes et pour les femmes. En revanche, les étudiants inscrits dans ce
programme parlent très peu de facteurs négatifs face à leur choix de carrière. Le salaire, un
facteur considéré comme étant négatif, est mentionné seulement par 4.7% de l'échantillon.
Chandler, Powell et Hazard (1971), ont fait une étude en 1965 au Montana et ils ont obtenu
comme première motivation: "l'enseignant rend un service précieux à la société", comme
seconde, "un enseignant peut travailler avec des jeunes", et en troisième, "l'enseignement peut
16
conduire à d'autres carrières". Selon Sharp (1975), il existe trois types de motivations à l'égard
du choix de carrière: aider les personnes en difficulté, la créativité et le besoin de sécurité.
Brookhart et Freeman (1992) examinent aussi les motifs du choix de la carrière à partir de
questions à choix de réponses par ordre d'importance. Ce qui ressort également le plus souvent
malgré la diversité des énoncés est un modèle altruiste et une orientation vers des buts de service.
2.1.3 Les enjeux socio-psychologiques
Nous soulèverons quelques raisons psychologiques qui sont parfois problématiques lors du choix
de carrière des futurs enseignants.
Par exemple, on constate que les gens choisissent
l'enseignement pour des raisons altruistes, mais certains auteurs expriment leur scepticisme
devant de telles raisons. Willcox et Beigel (1953), suggèrent que l'altruisme peut cacher d'autres
raisons provenant de besoins émotionnels.
Par exemple, dans l'expression de l'amour des
enfants, il peut y avoir un désir de supériorité et de recherche d'estime de soi de certains
enseignants. La Fevre (1965) identifie plusieurs motivations d'ordre psychologique dans le choix
de la carrière, dont le fait de se sentir plus à l'aise avec les enfants qu'avec les adultes, le désir de
donner et de recevoir de l'affection, le besoin d'imiter un adulte respecté, le désir d'être l'élève
modèle et une attitude de rébellion. Rothman (1977) avance que plusieurs enseignants sont peu
conscients de leurs motivations et de leurs comportements envers les jeunes. Elle craint que les
enseignants échouent au début de leur carrière parce qu'ils ne sont pas en contact avec leurs
motivations psychologiques.
En se penchant sur les enjeux sociaux, Lortie (1975) a mis en évidence des raisons associées aux
gains matériels à l'égard du choix de carrière des futurs enseignants. Selon lui, il existe d'autres
motivations qui sont liées à la mobilité; c'est-à-dire, parmi d'autres exemples, de pouvoir se
déplacer d'un état à l'autre avec le brevet d'enseignement ou de retourner ultérieurement à la
profession d’enseignant après une pause. De plus, selon Rothman (1977), il est moins difficile
d'entrer dans le programme d'enseignement comparativement à d'autres professions. Le motif
17
caché pourrait être que le cheminement de carrière dans les autres professions est parfois
socialement bloqué pour les femmes et pour les minorités. Pour lui, la recherche qui porte sur
les motivations est complexe parce qu'il faut considérer de nombreux facteurs tant économiques
que sociaux ou psychologiques. Lortie maintient que les hommes et les femmes abordent la
profession de manière différente et que le statut lié à la profession a des implications différentes
pour les deux sexes. De plus, il souligne que l'enseignement a souvent été choisi par des
candidats aux États-Unis parce que les frais de scolarité étaient moindres. En revanche, le fait
qu'il y ait peu de différences dans les raisons évoquées par les femmes et par les hommes peut
laisser supposer que la profession est devenue plus androgyne en comparaison de ce qui ressort
de l'étude de Lortie quelques neuf ans plus tôt (Joseph et Green, 1986).
2.2 Un regard sur une étude canadienne
Une étude conduite par Violato et Travis (1990) à travers le Canada indique cinq raisons
principales dans le choix de carrière des futurs enseignants. Le thème interpersonnel était choisi
par la plus importante proportion de candidats dans l'échantillon (43.6%). Ensuite, toujours en
ordre d'importance, les bénéfices matériels tels que les vacances d'hiver et d'été sont la deuxième
raison la plus importante (32.4%). En troisième lieu se trouve la possibilité de continuer à
apprendre dans un milieu scolaire (23.2%). Quatrièmement, il ressort le fait qu'on peut rendre
service à la société (22.5%). La dernière raison principale est la flexibilité des horaires qu'offre
l'enseignement (9%). On constate aussi que la variable sexe a un impact quant aux choix des
motifs de carrière. Par exemple, les femmes mettent plus d'accent sur l'aspect interpersonnel que
les hommes. Également, il ressort que les femmes au niveau secondaire apprécient plus un
emploi du temps flexible que les autres étudiants en enseignement primaire et secondaire. En
revanche, les hommes qui choisissent l'enseignement au niveau primaire valorisent plus les
bénéfices matériels que les femmes et plus que les hommes et les femmes au secondaire. On
peut en partie attribuer ce motif financier au fait que ces hommes vivent majoritairement dans
18
des milieux défavorisés. De plus, les hommes qui se destinent à l'enseignement primaire mettent
moins d'accent sur le thème de la continuité (faire passer leurs connaissances et intérêts aux
élèves) que les femmes et que les candidats canadiens du secondaire. Il est à noter que les
hommes et les femmes qui se destinent à l'enseignement au secondaire mettent plus d'accent sur
la continuité que ceux du primaire et ces derniers accordent une moindre importance à la matière
(notons que la province de Québec ne fait pas partie de cette recherche).
2.3 Conclusion
En résumé, nous pouvons faire quelques constatations à l’égard du choix de carrière des futurs
enseignants. D’abord, on peut observer que les étudiants qui se destinent vers l’enseignement
primaire sont plus centrés sur les enfants alors que ceux du secondaire sont plus concentrés sur la
matière (Book et Freeman, 1986). Quant aux différences entre les sexes, ces derniers ont
constaté qu'en quatrième année, presque un quart des hommes dans les deux programmes ne sont
plus convaincus de leur décision de se diriger vers l’enseignement. En général, nous pouvons
remarquer que "rendre service" et "travailler avec les gens" se révèlent comme étant importants
pour la plupart des candidats lors de leur décision de poursuivre des études en enseignement
(Lortie, 1975; Jantzen, 1981; NEA, 1972). Au point de vue psychologique, les motifs de choix
de carrière peuvent être problématiques dans la mesure où le candidat choisissant l’enseignement
préfère s’évader du monde adulte en travaillant avec les enfants (La Fevre, 1965). En ce qui a
trait aux facteurs sociaux, l’enseignement peut apparaître comme étant plus accessible aux
minorités et moins coûteux si l'on compare aux frais de scolarité inhérents à d’autres domaines
(surtout aux États-Unis), (Rothman, 1977).
Enfin, mentionnons brièvement qu’une grande
majorité de candidats canadiens choisissent l’enseignement pour l’interaction avec les gens et les
avantages sociaux (Violato et Travis, 1990).
19
III Les préconceptions des stagiaires
Afin de justifier brièvement notre intérêt à examiner les préconceptions des futurs enseignants,
nous prendrons appui sur un auteur québécois (Jacques Tardif, 1992) qui examine les effets de
celles-ci chez les adultes en éducation primaire et secondaire. Il se pose les questions suivantes:
“Qu’est-ce qui explique que, après avoir reçu un enseignement et
avoir été informés d’une façon spécifique et, théoriquement,
adéquate au regard d’un champ de connaissances, des adultes
conservent essentiellement la même représentation que des élèves
qui n’ont pas participé à ces démarches d’enseignement et
d’apprentissage? Les adultes dont il est question ont, il ne faut pas
l’oublier, une formation universitaire. Qu’est-ce qui explique la
permanence de telles représentations de la connaissance, la
prédominance de conceptions spontanées sur des conceptions
scientifiques?”
(Tardif, p.32)
En effet, ces questions font partie intégrante de notre investigation. Il faut toutefois clarifier ce
que nous entendons par préconceptions avant de procéder à la recension d'écrits. Dans le cadre
de notre recherche, elles se définissent par les attentes personnelles, les préoccupations et les
représentations d’un enseignant efficace chez les étudiants en formation.
Dans cette section nous aborderons les variables suivantes: l'origine des préconceptions des
étudiants en enseignement, le changement et la stabilité des conceptions, la différence entre
l'étudiant en enseignement et l'enseignant en exercice, l'influence des préconceptions sur les
apprentissages des futurs enseignants, les attitudes envers la profession enseignante, le sentiment
d’efficacité et la réticence vis-à-vis de la formation pédagogique.
20
3.1 Origine des préconceptions des étudiants en enseignement
Les sources des croyances font partie intégrante des conceptions actuelles des futurs enseignants.
Plusieurs auteurs avancent que les préconceptions des étudiants en enseignement sont induites
plus par leurs expériences en tant qu’élèves que par leur formation universitaire (Lortie, 1975;
Goodlad, 1984). Pour d’autres en revanche, c’est la coopération avec un enseignant durant la
formation qui constitue la principale influence (Yee, 1969).
Bird, Anderson, Sullivan, et
Swindler (1993) étudient l’origine des préconceptions en cours dans le cadre d’un programme de
formation des maîtres. Le but de leur étude est d’analyser les efforts d’un professeur au niveau
universitaire en vue de changer les croyances des étudiants en enseignement. Ils concluent que
les aspirants-enseignants arrivent au cours d'éducation en tant qu'acteurs expérimentés, c’est-àdire que dans les écoles qu'ils ont fréquentées, dans les communautés où ils ont vécu et dans la
société qui les a vus grandir, ils ont élaboré des croyances à propos de l'école, de l'enseignement
et de l'apprentissage qui varient selon leur histoire personnelle. Les chercheurs qualifient ces
croyances de différentes façons; il s’agit de "théories laïques" selon Knowles et Elliott-Reynolds,
(1991), de "constructions" selon Mertz et McNelly, (1990), "d’images" selon Calderhead et
Robson, (1991), de "métaphores" selon Carter, (1990) et de "toile de fond" selon McDiarmid,
(1990). Selon Bird, Anderson, Sullivan, et Swindler (1993), ces croyances peuvent inclure des
catégories conceptuelles, des dictons empiriques, des ordonnances guides (par exemple,
l'enseignant doit traiter chaque élève individuellement) et des valeurs éducatives.
Kagan (1992) a réalisé une recension d'écrits comprenant de nombreuses recherches sur l’origine
des préconceptions des enseignants et elle fait état de plusieurs résultats. Elle se base sur 40
publications entre 1987 et 1991 dont 27 ont trait aux étudiants en enseignement et 13 aux
enseignants dans la pratique.
Les résultats de cette recherche sont très signifiants au regard de l’origine des préconceptions.
Par exemple, Kagan estime que les étudiants débutent leurs études avec des croyances
21
personnelles concernant "le bon enseignant". Ils perçoivent également des images personnelles
comme enseignant et des souvenirs d'eux-mêmes comme élèves en classe. En outre, elle observe
que chez les débutants, il y a une obsession pour le contrôle de la classe. Ceux-ci ne se
préoccupent pas de promouvoir l'étude, mais plutôt de décourager les mauvais comportements.
Elle relève l'idée que les débutants stagiaires se font une conception des élèves qui est irréaliste
parce qu'ils s'imaginent au départ que ceux-ci ont les mêmes méthodes d'apprentissage, aptitudes,
intérêts et problèmes qu'eux. Kagan insiste sur le fait que les images de soi des stagiaires en tant
qu'enseignants sont fondées principalement sur leur vie et leur histoire, c'est-à-dire sur leurs
propres expériences d'élèves en classe, leurs relations avec les enseignants et autres figures
d'autorité et la mémoire ou la reconstitution de leurs expériences d'élève en classe.
Perry et Rog (1992) poussent plus loin en étudiant les croyances des étudiants à différents
niveaux de leur formation (123 étudiants au début et 59 à la fin) ainsi que 35 enseignants qui ont
3 ans d’expérience. Leur étude explore les sources des croyances en demandant aux sujets de
décrire les facteurs qui les ont influencés dans leurs conceptions d'un enseignant efficace. Pour
les trois groupes, le souvenir des enseignants qui leur ont enseigné dans le passé constitue une
importante influence pour définir un enseignant efficace et selon eux ceci peut être porteur d’une
image idéalisée.
Les autres influences comprennent les professeurs actuels, le bilan des
expériences personnelles, la formation théorique, les stages et les élèves à qui ils ont enseigné.
Perry et Rog (1992) avancent que beaucoup de ce qui caractérise un enseignant efficace est
d'ordre intuitif et émotionnel à l'opposé de ce qui est de l'ordre du concret et du conscient. Par
exemple, un enseignant efficace "prend soin", "comprend", est "créatif" et "souple". Seulement
le tiers des sujets indique sa formation d'enseignant comme source de ses croyances. Environ un
sixième décrit un enseignant efficace comme étant celui qui sait enseigner (a de la pédagogie) et
possède plusieurs stratégies et modèles d'enseignement. Perry et Rog (1992) suggèrent que la
manière dont les enseignants perçoivent les élèves et l'enseignement est conditionnée par leurs
attitudes et leurs croyances antérieures, qui en retour conditionnent leur conception de
l'enseignement. Ils résument que les croyances des enseignants ont été acquises par leurs propres
22
expériences à titre d'élèves et pour certains par leurs propres expériences initiales comme
enseignants. Selon eux, ces préconceptions peuvent être ou non en conformité avec ce qu'est un
bon enseignant tel que rapporté dans la recherche et tel qu'enseigné en cours de formation.
3.2 Changement et stabilité des conceptions
Selon Shapiro (1991), il existe quatre types de changements conceptuels vécus par les étudiants
en enseignement qui démontrent leur manque d'expérience dans le domaine de l'éducation.
Premièrement, les préconceptions qui viennent de leur expérience en tant qu'élèves restent
intactes. Deuxièmement, ils acquièrent une nouvelle technique de transmission du savoir lors des
stages d'enseignement, qui se traduit par des expressions telles que: "j'ai appris à organiser une
leçon et mes questions logiquement". Troisièmement, ils découvrent de nouvelles façons de
catégoriser l'expérience après l'action. Ce changement se traduit par des expressions telles que:
"Dans mon esprit, les plans des leçons ne sont pas seulement une autre façon d’enseigner. Je les
vois maintenant comme un guide pour impliquer l'élève". Quatrièmement, ils acquièrent une
nouvelle perception d'eux-mêmes. Ce changement peut se traduire par une expression telle que:
"Je me voyais comme étudiant. Maintenant, je me vois comme enseignant". Shapiro (1991)
avance également qu'à la suite de ces changements conceptuels éprouvés par des étudiants en
formation, il y a émergence de nouveaux dilemmes comme la pertinence du programme de
formation par rapport à leurs besoins ressentis, ainsi que l'apprentissage d'une nouvelle façon de
réfléchir par rapport à la profession enseignante. Strahan (1990), avance également que les
étudiants en formation passent par trois étapes dans le processus de croissance: ils ont d'abord
une confirmation d'eux-mêmes dans leur rôle d'enseignant, leur statut d'enseignant est ensuite
établi par les élèves et leurs succès sont enfin validés par l'effort et la réussite des élèves.
Dans le même ordre d’idées, Kagan (1992) avance l’idée que le peu de flexibilité et la stabilité
des croyances antérieures sont attribuables, en partie, à l’inadéquation des contenus des cours
conçus pour répondre aux besoins des élèves. Elle constate davantage qu'il y a un changement
23
dans les perceptions des stagiaires à mesure que la formation et le contact avec les élèves
progressent. Roth (1985) et Clark (1988) rapportent que les préconceptions inadéquates peuvent
être difficiles à changer même si le contenu est bien transmis, tant qu'un travail ne sera pas fait
pour modifier ces mauvaises conceptions. Ces deux chercheurs avouent que peu d'études se sont
penchées sur le changement et l’évolution des préconceptions des étudiants en formation. Selon
Brousseau et Freeman (1988), les universités ne font pas d'efforts pour changer ni étudier ces
croyances. Les professeurs ne questionnent donc pas les croyances des étudiants, et plus encore,
ils ne s'entendent même pas sur les croyances désirables à propos de l'éducation.
Selon McDiarmid (1990), les futurs-enseignants croient que les jeunes élèves ne comprennent
pas beaucoup et qu'ils ne sont pas capables d'assimiler des idées compliquées. Il s’avère en plus
que ces futurs-enseignants résistent à toutes sortes de changements de ces croyances. De façon
similaire, Feiman-Nemser et Buchmann (1985) avancent que des étudiants plus avancés dans le
programme continuent à se référer à leurs expériences antérieures en dépit d'efforts de la part des
professeurs universitaires pour qu'ils changent.
Kalaian et Freeman (1989) trouvent
parallèlement que les croyances à l’égard de l’enseignement ne changent pas entre le début et la
fin d’un programme de formation des maîtres. Pourtant, ils n'ont pas démontré que ceci est dû à
une résistance de la part des étudiants.
3.3 La différence entre l'étudiant en enseignement et l'enseignant en exercice
quant à la définition d'un enseignant efficace
Arrichi et Young (1987), comparent les perceptions de 224 étudiants en enseignement à celles de
379 enseignants en exercice. Le but de cette étude est de recueillir les considérations faites par
les enseignants sur ce qui constitue un enseignement efficace et les facteurs qu'ils associent à une
bonne réussite dans l'enseignement. Dans les deux groupes, les descriptions d’un bon enseignant
font référence dans vingt-cinq pour-cent (25%) des cas aux caractéristiques personnelles, dans
trente pour-cent des cas (29.8%) aux activités d'enseignement. La gestion et l'organisation
24
représentent trente pour-cent des réponses (31%) et les facteurs concernant les points sur lesquels
les sujets sont satisfaits montent à quatorze pour-cent (14.3%) . Quant aux différences entre les
deux groupes, les facteurs identifiés par plus de 60% des étudiants en enseignement
comprennent: l’habileté à communiquer, le temps d'apprentissage, la connaissance des habiletés,
la planification et l'observation des habiletés. Chez les stagiaires en quatrième année ayant
terminé leurs études, les réponses reflètent davantage des préoccupations d'ordre administratif ou
sont orientées vers la discipline et des préoccupations concernant le plaisir, les méthodes
d'enseignement et la réussite de l'élève. En revanche, plus de 60% des enseignants en exercice
ont identifié la connaissance des habiletés pédagogiques, les qualités de gestion, la sécurité et des
aspects du temps d'enseignement comme caractéristiques d'un enseignant efficace. Arrichi et
Young (1987), suggèrent donc un modèle de socialisation quant aux rôles de l'enseignant. Ceuxci maintiennent que la différence entre les étudiants en formation et les enseignants en fonction
suggère une réorganisation des conceptions à l'entrée dans la profession et une adaptation rapide
des comportements à la réalité. Enfin, ils suggèrent que les étudiants en enseignement ont des
préconceptions inadaptées à la réalité de l'enseignement car elles sont directement reliées aux
buts et objectifs décrits dans le programme d'enseignement.
Weinstein (1988) examine également les prévisions et les attentes des étudiants en enseignement
et des enseignants en exercice. Son étude a pour but d’examiner les origines possibles des
attentes et prévisions des étudiants en enseignement, afin de fournir un cadre théorique pour
l’analyse de celles-ci par l’application des idées développées dans l’étude sur "l’optimisme
irréaliste" (Kulik & Mahler, 1987; Larwood, 1978; Perloff & Fetzer, 1986; N. Weinstein, 1980
cités dans Weinstein 1988), et de rapporter, pour la première fois, les découvertes dans une étude
empirique sur le sujet. Son objectif est de déterminer la prévalence de l’optimisme "irréaliste"
chez ces premiers. Nous ferons une présentation sommaire de l’étude afin de mieux cerner le
contexte. Par exemple, il ressort que:
25
- les enseignants ont de la difficulté durant leur première année de carrière parce qu’ils sont mal
préparés aux exigences de leur travail;
- les "étudiants en enseignement " et les enseignants débutants sont préoccupés par "eux-mêmes"
ou par leur survie. En revanche, les enseignants d’expérience sont plus orientés vers les
résultats liés aux tâches d’enseignement et à leur influence sur les élèves;
- les intérêts des "étudiants en enseignement" s’identifient plus à ceux des enseignants
d’expérience qu’à ceux des "enseignants débutants";
- les étudiants oublient de considérer le fait que les facteurs liés à la spontanéité, les dimensions
multiples et l’imprévisibilité font de la classe un environnement complexe. Ils associent les
buts de l’enseignement à ceux que l’on retrouve en service social, c'est-à-dire aider les
étudiants qui ont des problèmes, ou à d’autres expériences auprès des enfants comme se
développer personnellement, psychologiquement et socialement.
En outre, dans cette étude, les implications du biais optimiste pour la formation des enseignants et
la prévention du "choc de la réalité" que subissent, le plus souvent, les enseignants débutants sont
examinées. Pour ce faire, Weinstein demande aux futurs-enseignants de faire des prédictions dans
trois domaines: l'enseignement, l'organisation et l'administration et les relations interpersonnelles.
L'étude examine également les explications des étudiants quant à leur tendance optimiste, se
demandant si les étudiants font valoir les qualités qu'ils possèdent déjà, en minimisant
l'importance de certains attributs qu'ils ne possèdent pas. Les conceptions des étudiants en
enseignement sont comparées à celles des enseignants-coopérants expérimentés. Il ressort que
les étudiants en enseignement sont très optimistes en ce qui concerne leurs performances futures
comme enseignant.
Par exemple, les sujets semblent croire qu'ils éprouveront moins de
difficultés que les autres enseignants débutants quant aux tâches d’enseignement. De plus,
l’étude révèle des différences de conceptions entre les deux programmes de formation des
maîtres. Les étudiants se dirigeant au primaire citent le plus souvent "la capacité à prendre soin
26
de", suivie de "l'habileté à entrer en relation avec les enfants" et "la patience". Pour les étudiants
se dirigeant vers l'enseignement secondaire, les réponses qui reviennent le plus souvent sont "la
connaissance approfondie de la matière" et "un haut niveau d'éducation". Weinstein avance que
les aspects social et affectif ressortent très souvent (relation élève/enseignant), alors qu’il y a une
minimisation des dispositions associées aux habiletés d’ordre cognitif (aimer apprendre,
curiosité, motivation).
Elle souligne aussi qu’une bonne performance académique et
l'intelligence sont peu nommées par les candidats en enseignement.
En comparant ces réponses avec les enseignants experts, on constate que ces derniers insistent sur
l'organisation des tâches et sur la créativité. Ils insistent davantage sur l'imagination et l'habileté
pour orchestrer des activités d'une façon imprévisible dans l’environnement complexe qu'exige la
fonction d'enseignant. Les deux groupes (enseignants en pratique et étudiants en enseignement )
notent la nécessité de "prendre soin" et la notion de "chaleur" ainsi que l'importance de "motiver
les enfants," de "les comprendre" et de "se montrer enthousiaste" et "prendre plaisir à la tâche".
Les enseignants-experts font rarement référence aux connaissances scolaires, mais insistent plutôt
sur l'importance de bien connaître la matière enseignée.
De plus, ils mentionnent peu
l'importance de développer le sens critique, la capacité de solutionner les problèmes, ou encore la
variété des stratégies d'enseignement et d'apprentissage. Ils insistent plutôt sur les attributs ayant
trait à l'éducation générale de l'enseignant (culture générale).
Dans les deux cas, le bon
enseignant est décrit comme étant une personne chaleureuse, intéressée par les autres et par le fait
de travailler avec les enfants, ce qui se démarque des notions mentionnées par les chercheurs et
par ceux qui créent les politiques en éducation.
Ogden, Chapman et Doak (1994) ont interrogé des enseignants en exercice afin de connaître les
caractéristiques qu’ils attribuent à un enseignant efficace et ont examiné les différences selon le
degré d'expérience et selon le sexe. Pour les enseignants qui débutent, la "compréhension" est ce
qui caractérise le mieux un enseignant efficace. En revanche, pour les enseignants en exercice
"répondre aux besoins" est la principale caractéristique. De plus, on constate que les facteurs
27
"compréhension, enthousiasme, créativité et organisation" apparaissent beaucoup plus souvent
chez les femmes.
Inversement, les facteurs tels que juste, bon communicateur, capable de
prendre des responsabilités et un sens de l'humour ressortent plus souvent chez les hommes.
Selon Perry et Rog (1992), les étudiants au tout début de leur formation décrivent l’enseignant
efficace comme un enseignant qui prend soin, qui connaît la matière, qui est créatif (dans son
style d'enseignement) et dynamique et qui rencontre les besoins des élèves. En revanche, à la fin
de leur formation, ils le décrivent comme étant celui qui prend soin, applique la discipline et
connaît sa matière. Les enseignants expérimentés mentionnent le plus souvent le besoin
d'organisation, le fait de prendre soin et d'écouter les enfants, d'être créatif et la connaissance de
la matière. Perry et Rog soulignent que les réponses des enseignants expérimentés diffèrent donc
de celles des finissants dans huit catégories. Les étudiants se font une image d'un enseignant
efficace toute dénuée d'expérience pratique récente. L'étude démontre que cette image correspond
à celle avancée par d'autres chercheurs et se résume à plusieurs aspects: aimer les enfants, être
compétent dans sa matière et avoir une personnalité (correspondante) qui rend la classe
intéressante.
Finalement, les étudiants qui commencent à prendre de l'expérience dans
l'enseignement adhèrent à ces images idéalistes et simplistes, mais principalement dans un but de
contrôle et de gestion de la classe et non de pédagogie. Les premières expériences apportant la
désillusion et font en sorte que le stagiaire se tourne vers le contrôle et l'atteinte de résultats. Il se
crée alors une mentalité de survie telle que soulignée par Fuller (1969). Ce dilemme peut éroder
la confiance de l'étudiant et le rendre incertain de sa capacité à établir de bonnes relations avec les
élèves (Lampert,1981).
3.4 L'influence des préconceptions sur les apprentissages des futurs
enseignants
Bird, Anderson, Sullivan et Swindler (1993), étudient l’efficacité d’un cours d'introduction à
l'enseignement conçu de façon à éveiller l'attention des étudiants en enseignement quant à leurs
28
croyances. Bien qu’il ait été souvent satisfait de la performance des étudiants inscrits au cours, il
lui était difficile d'établir une relation de travail satisfaisante avec ses étudiants, d'organiser une
interaction productive entre leurs croyances actuelles et des alternatives possibles, de les aider à
faire le travail intellectuel que représente une telle interaction et d'organiser les ambiguïtés et le
risque qu'un tel cours représentait pour ces étudiants. Les préconceptions amènent les futurs
enseignants à lire les situations et à interpréter l'information donnée avant de décider ce qui est
possible. Ces chercheurs avancent que ces différentes préconceptions (énumérées par HoltReynolds et le National Center for Research on Teacher Education, 1991) viennent se heurter aux
perspectives présentées dans les cours d'éducation à l'enseignement, à savoir que l'on apprend par
des constructions personnelles actives et signifiantes qui permettent de relier nos nouvelles
connaissances à celles que nous possédons déjà.
3.5 Attitudes envers la profession enseignante
Bontempo et Digman (1985) rapportent certaines attitudes vis-à-vis de l’enseignement réalisées
auprès de 186 étudiants à l’université de West Virginia. Il ressort de leur étude que 43% des
étudiants en formation décrivent l'enseignement comme une profession importante, 39% comme
une profession gratifiante et 28% constatent qu'il y a un manque de reconnaissance accordé aux
enseignants. À l’égard de ce que les étudiants désirent accomplir comme enseignants, 25%
souhaitent préparer les élèves pour la vie et à fonctionner dans le monde (intérêt pour le bien être
des élèves), 17% veulent faire le meilleur travail possible, 13% aimeraient développer de l'intérêt
pour les jeunes et une seule personne à répondu qu'elle veut gagner sa vie.
Quant à leurs attentes, 31% s'attendaient à mieux connaître les élèves, 22% à les aider à
apprendre, 15% à avoir du respect mutuel, 12% à observer le développement des élèves, 9% à
enrichir la vie des élèves et 2% à promouvoir des expériences enrichissantes. Deux principaux
facteurs ressortent des perceptions des étudiants sur ce que doit être l’attitude de l’enseignant
envers ses élèves: une attitude positive dans 47% des cas (être chaleureux, près des enfants,
29
ouvert, préoccupé par les jeunes) et établir un respect mutuel pour un autre 45% (respectueux,
juste, ayant de la considération pour les jeunes). Ils notent que les étudiants en formation voient
l'enseignement comme le fait de "donner de l'information". Il faut toutefois noter qu'il y a des
évidences contradictoires à propos des attitudes envers la profession enseignante des futurs
enseignants au cours du programme dues aux variables telles que l'expérience et le sexe.
3.6 Sentiment d’efficacité
Le sentiment d’efficacité réfère, selon Bandura (1997), aux croyances en ses propres capacités à
organiser et à exécuter les actions nécessaires à la réussite d’objectifs donnés. Les croyances des
personnes en leur efficacité sont liées étroitement aux décisions de persister dans un domaine
donné, à la persévérance dans les situations difficiles, au niveau de stress et de dépression auquel
elles sont confrontées dans des milieux exigeants et au niveau d’accomplissement qu’elles
réalisent. En résumé, selon qu’elles sont positives ou négatives, ces croyances et ces sentiments
peuvent aider ou nuire aux personnes.
En effet, Bandura constate que les personnes qui doutent de leurs capacités dans certains
domaines évitent les tâches complexes de ces mêmes domaines. Dans de telles situations, ces
personnes ont du mal à se motiver si bien qu’elles diminuent leurs efforts, voire renoncent
rapidement devant les obstacles. Leurs aspirations sont peu élevées et leur engagement est faible.
Dans des situations éprouvantes, ces personnes ne retiennent que les aspects négatifs comme, par
exemple, les conséquences défavorables appréhendées. De telles pensées amoindrissent leurs
efforts et à la suite d’un insuccès, il est alors difficile pour ces personnes de recouvrer rapidement
un sentiment d’efficacité. Comme elles associent une non-performance à une non-aptitude, elles
perdent très facilement confiance en leurs capacités. Ce sont des personnes sujettes au stress et à
la dépression. En revanche, les personnes qui ont un sentiment d'efficacité positif abordent les
tâches complexes comme des défis à relever. Leur niveau d’intérêt est élevé et leur engagement
ne cesse de croître au fur et à mesure du déroulement de l’action. Leur effort est proportionnel à
30
leur engagement et elles intensifient celui-ci en situation d’échec appréhendé ou de contretemps.
Elles attribuent leur échec à des efforts insuffisants et retrouvent rapidement foi en leurs
capacités. Ceci leur permet de mettre en valeur la réussite en réduisant leur anxiété et en les
rendant moins vulnérables à la dépression.
Ce sentiment d’efficacité a été étudié auprès des enseignants. Les études montrent que les
croyances de ces derniers quant à leur efficacité à enseigner affectent leurs attitudes envers l’acte
d’enseignement aussi bien que la nature des activités en classe.
Les enseignants ayant un
sentiment d’efficacité élevé ont une vision plus optimiste des étudiants et de leurs capacités à
enseigner. Ces enseignants se centrent principalement sur des activités scolaires. Ils proposent à
leurs élèves des tâches plus complexes, tout en leur fournissant le soutien et l’aide nécessaire à
leur réussite et en les félicitant de leurs efforts. En revanche, ceux dont le sentiment d’efficacité
est faible ont une vision plus négative de la motivation de leurs élèves. Ils mettent l’emphase sur
le contrôle de la classe, délaissent les étudiants qui n’obtiennent pas rapidement des résultats
satisfaisants et recourent à diverses sanctions pour les contraindre à travailler.
Cependant, Weinstein (1988) maintient qu’il existe une tendance à un "optimisme irréaliste" chez
les enseignants au début de leur formation, qui se manifeste par une très grande confiance en eux
en rapport avec leurs habiletés à enseigner. Ils ont notamment l’intime conviction qu’ils auront
beaucoup moins de difficultés que les autres enseignants débutants, ce qui s’avère généralement
faux. Weinstein qualifie ce phénomène de "choc de la réalité". Ces constatations remettent un
peu en question les conclusions de Bandura, pour qui le sentiment d’efficacité aide les gens à
performer. Toutefois, il faut noter que ces étudiants minimisent les habiletés professionnelles au
profit des valeurs sociales et affectives dans leur évaluation des modalités d’exercice de la
profession.
On peut penser que le sentiment d’efficacité personnelle, pour être associé
positivement à la performance, doit être fondé sur une appréciation réaliste des tâches requises
pour atteindre les objectifs.
31
Book et Freeman (1986) révèlent d'importantes différences dans les antécédents scolaires et les
expériences d'enseignement antérieures entre les candidats au primaire et au secondaire qui
influencent leur sentiment d’efficacité.
Par exemple, les candidats se dirigeant vers
l'enseignement au secondaire ont une attitude de grande confiance dans leurs habiletés à
enseigner (surtout les hommes) à l'entrée du programme. En outre, lorsqu'ils demandent aux
candidats s'ils sont capables de travailler avec des élèves ayant des besoins spécifiques, 28% des
candidats des deux groupes disent que oui. Quand ils posent la question à savoir s'ils ont une
parfaite confiance pour faire comprendre la matière, 23% des hommes et 11% des femmes ont
cette confiance.
Dans le même ordre d’idées, Book, Byers et Freeman (1983), demandent aux étudiants en
enseignement de classer leur niveau de confiance dans leur performance dans six rôles différents
dans le contexte d'une classe. Ces futurs enseignants, au début de leurs études, expriment un
niveau relativement élevé de confiance à l'égard de leurs habiletés à enseigner immédiatement
(quelque 24% le croient). Cela rejoint l'idée que beaucoup d'étudiants ne sentent pas le besoin
d'acquérir des connaissances professionnelles pour réussir dans l'enseignement. Cette confiance
est exprimée autant par les hommes que par les femmes et à tous les niveaux (enseignement au
primaire et secondaire). Par exemple, 34% des étudiants mentionnent "créer un environnement
(en classe) dans lequel les participants peuvent apprendre les uns des autres". "Favoriser la
meilleure compréhension possible" arrive en second rang. "Établir un contact avec les élèves qui
ont des besoins spéciaux" et "gérer une classe avec peu de problèmes de discipline" arrive en
troisième et en quatrième position. En résumé, cette étude met donc en évidence trois aspects
importants à l’égard du sentiment d’efficacité des étudiants en formation: le manque
d'importance accordée par les futurs-enseignants à la maximisation des efforts pour assurer la
réussite de l'élève, leur degré élevé de confiance dans leur habileté à enseigner et la dévaluation
qu'ils font de leurs cours de formation en pédagogie. Enfin, les résultats démontrent que les
futurs enseignants ne reconnaissent pas que l'estime de soi puisse être lié étroitement aux succès
scolaires.
32
3.7 Réticences vis-à-vis de la formation pédagogique
Selon Brousseau et Freeman (1988), les étudiants en enseignement considèrent l’aspect de
"prendre soin de" et les aspects "interpersonnels" dans le rôle d'enseignant comme étant plus
importants que les aspects scolaires. Dans une étude intitulé Student Expectations and Teacher
Education Traditions with Which We Can and Cannot Live, Book, Byers et Freeman (1983)
étudient les préconceptions de 473 étudiants en enseignement primaire et secondaire à
l’université de Michigan State. Ils avancent que les futurs enseignants ne ressentent pas un grand
besoin d'acquérir des connaissances pédagogiques de base pour devenir des enseignants
efficaces. Ceux-ci conçoivent l'enseignement comme étant une extension du rôle parental ou
bien quelque chose qui s'apprend instinctivement. En fait, cette dernière croyance arrive en
premier lieu quant aux sources de connaissances nommées par des futurs enseignants suivis par
les cours de psychologie en éducation, leurs propres expériences comme élèves, les lectures
dirigées en éducation et les cours de philosophie sociale sur les fondements de l'éducation. En
outre, les étudiants qui croient que promouvoir le concept de soi des élèves est le but le plus
important à atteindre en éducation sont considérablement plus nombreux que ceux qui ont choisi
la promotion de la réussite scolaire, de même que ceux qui ont sélectionné l'établissement d'un
bon climat d'apprentissage.
3.8 Conclusion
En résumé, nous pouvons dégager quelques tendances relatives aux préconceptions des étudiants
en enseignement.
En premier, les auteurs s’accordent sur le fait que les étudiants en
enseignement arrivent dans les programmes avec des images personnelles enracinées en tant
qu’enseignants et des souvenirs d’eux-mêmes en tant qu’élèves (Bird, Anderson, Sullivan et
Swindler, 1993). De plus, mentionnons que ces images sont souvent irréalistes et idéalistes
(Kagan, 1992). Bird, Anderson, Sullivan et Swindler (1993) avancent également l’idée que les
33
préconceptions des étudiants demeurent relativement stables et les amènent à analyser les
situations et à interpréter l’information donnée avant de décider ce qu'il est possible, réaliste ou
acceptable de faire.
D’une manière problématique, les préconceptions des étudiants en
enseignement peuvent s’avérer difficiles à changer même si les auteurs avancent que celles-ci
changent à mesure que la formation et le contact avec élèves progressent (Roth, 1985; Clark,
1988).
Ensuite, les étudiants en enseignement diffèrent des enseignants en exercice. Les premiers sont
très préoccupés par le côté social et affectif alors que les derniers insistent plus sur l’imagination
et l’habileté à orchestrer des activités d’une façon imprévisible (Weinsten, 1988). Toutefois cette
dernière souligne que les étudiants en enseignement sont très positifs vis-à-vis de la profession
enseignante à n’importe quel stade de leurs études. Les interprétations de Weinsten (1988) à ce
sujet contredisent les arguments de Bandura, pour qui le sentiment d’efficacité aide les gens à
performer.
Enfin, il ressort que les étudiants en enseignement ne ressentent pas le besoin
d’acquérir des connaissances pédagogiques pour bien enseigner (Book, Byers et Freeman, 1983).
IV OBJECTIFS DE RECHERCHE
Avant de passer aux objectifs spécifiques de notre recherche, nous délimiterons quelques liens
théoriques entre les motifs du choix de carrière et les préconceptions des étudiants inscrits en
enseignement. D'après notre recension des écrits, nous avons constaté que les deux principaux
motifs du choix de carrière des futurs enseignants sont celui "d'aider" et celui "d'instruire". On
peut penser que ces motifs sont liés à leurs conceptions des tâches, des rôles, des attitudes et des
pratiques inhérentes à la profession enseignante. De plus, on peut supposer que les conceptions
des étudiants en formation diffèrent selon le type de motif.
Ensuite, comme nous l'avons souligné au tout début de notre recherche, les nouveaux
programmes en enseignement secondaire et primaire, en exerçant une meilleure sélection lors du
34
processus de recrutement et en proposant des objectifs plus clairs, attirent des étudiants plus
qualifiés et plus engagés dans leur choix de carrière. Ces derniers sont susceptibles d'avoir des
motifs et des conceptions plus professionnels ainsi qu'un plus fort sentiment d'efficacité à l'égard
du métier. Il devient donc intéressant d'examiner chez les étudiants à l'université Laval les
aspects suivants:
1.
les principaux motifs du choix de carrière des étudiants au baccalauréat en enseignement
secondaire (BES) et au baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire (BEPP).
2.
le sentiment d’efficacité des candidats à l’entrée du programme du BES et du BEPP.
3.
les conceptions initiales des étudiants à propos des qualités requises pour bien enseigner.
Nous tenterons notamment de comparer les conceptions des qualités d'un enseignant idéal
(description d’un bon enseignant fictif) avec celles d'un bon enseignant réel (description d’un
enseignant marquant); nous voulons aussi comparer les conceptions relatives à un bon
enseignant par rapport à un mauvais enseignant; enfin, par une analyse typologique basée sur
les fréquences des catégories de réponse à ces quatre questions, nous tenterons de dégager
différents profils d’étudiants au début de leur formation.
Ces résultats seront présentés en détail dans l’article empirique.
35
ARTICLE EMPIRIQUE
36
CONCEPTIONS INITIALES ET ATTITUDES FACE À L’ENSEIGNEMENT CHEZ DES ÉTUDIANTES ET
DES ÉTUDIANTS INSCRITS EN FORMATION DES MAÎTRES
37
Introduction
La capacité de réagir face aux problèmes qui touchent le monde de l’enseignement constitue l’un
des défis sociaux majeurs de cette fin de siècle (Goodlad, 1990). En ce sens, l'implantation de
nouveaux programmes de formation des maîtres dans diverses universités en Amérique du Nord
représente une réponse pertinente à ce défi. Parmi les mesures mises de l'avant dans ces réformes
des programmes de formation des maîtres, notons un accent plus prononcé sur la sélection des
candidats à l'enseignement et l'accroissement sensible de la formation pratique.
En se penchant sur la situation au Québec, on peut observer que les responsables des programmes
qui s'adressent aux futurs enseignants du secondaire et du primaire ont entrepris aussi de revoir
leurs pratiques de formation. Au secondaire, les anciens certificats en pédagogie qui
complétaient une formation disciplinaire d’une durée de deux ou de trois ans sont remplacés par
un programme global intégré de quatre ans. À l’université Laval, de nouvelles procédures de
sélection ont été mises en place, qui stipulent que "le diplôme d'études collégiales, la preuve de la
connaissance du français et une séance d'appréciation par simulation sont obligatoires pour
l'admission du candidat aux programmes de baccalauréat en enseignement secondaire et
primaire" (Université Laval, 1993). Après examen de ces procédures, il apparaît que les critères
de sélection sont plus exigeants qu'auparavant. Il est donc permis de penser que désormais les
étudiants seront meilleurs, que leurs motifs seront plus sérieux et que leur engagement s’avérera
de nature plus professionnelle.
Or, ces changements institutionnels suscitent diverses interrogations au sens où plusieurs
recherches contemporaines montrent que les préconceptions des futurs enseignants ont un impact
non négligeable sur leur formation et, par conséquent, nécessitent une réflexion qui va au-delà de
la seule réforme des programmes ou des procédures de sélection; elles entraînent une
transformation des pratiques de formation. Prenant appui sur ces travaux, le but de notre
recherche consiste à examiner les conceptions initiales d’étudiants nouvellement inscrits en
38
formation des maîtres. Plus précisément, les objectifs de cette étude consistent à identifier les
principaux motifs du choix de carrière de ces étudiants, à analyser leurs sentiments d’efficacité
personnelle à l’égard de différentes tâches éducatives et à examiner leurs conceptions relatives à
un bon exercice de la profession.
Problématique
Les motivations des futurs enseignants par rapport à leur choix de carrière ont fait l’objet de
nombreuses études descriptives. Book et Freeman (1986), tout comme Joseph et Green (1986) et
Sharp et Hirshfeld (1975) avancent que c’est principalement par amour pour les enfants que les
candidats choisissent l'enseignement primaire ou secondaire, alors que pour Richards (1960),
Andrew (1983) et Jantzen (1981), c’est le fait de pouvoir aider les autres qui motive de nombreux
étudiants. Goodlad (1984), ainsi que Brookhart et Freeman (1992) caractérisent ces motifs en les
décrivant comme idéalistes ou altruistes. Cependant, d'autres chercheurs s’accordent sur le fait
que l’expérience d’avoir connu un enseignant marquant peut fortement influencer le choix de
carrière des étudiants (Jantzen, 1981; Bontempo et Digman, 1985; Goodlad, 1984). D’autres
motivations sont aussi évoquées régulièrement, soit la possibilité de continuer à s'instruire,
l'attrait pour une matière, des expériences passées de travail avec des jeunes et la possibilité de
quitter l'enseignement et d'y retourner ultérieurement (Joseph et Green, 1986), alors que le salaire
est mentionné par un très petit nombre (Jantzen, 1981).
Du point de vue psychologique, les motifs altruistes peuvent s'avérer problématiques dans la
mesure où ils cachent diverses raisons d’ordre affectif telles que la recherche de pouvoir, le
besoin de rehausser son estime de soi ou de donner et de recevoir de l'affection, le fait de se sentir
plus à l’aise avec des enfants qu’avec des adultes ou le désir d'être un modèle (La Fèvre, 1965).
Selon Rothman (1977), le faible degré de conscience de leurs propres motivations est un facteur
important qui explique l'échec de plusieurs enseignants au début de leur carrière. Quant aux
enjeux sociaux, Lortie (1975) rapporte des raisons associées aux gains matériels, à la mobilité
géographique et à la relative facilité d'accès aux facultés d'éducation. En effet, le cheminement
39
de carrière dans plusieurs professions est parfois socialement bloqué pour les femmes et pour les
minorités. Enfin, Lortie (1975) avance aussi que les hommes et les femmes abordent la
profession différemment et que le statut lié à la profession a des résonances différentes pour les
deux sexes. En revanche, des études plus récentes font ressortir le peu de différences dans les
raisons évoquées par les femmes et par les hommes, ce qui laisse supposer que la profession
serait devenue plus androgyne (Joseph et Green, 1986).
De nombreuses études établissent un lien direct entre le sentiment d'efficacité d'un enseignant et
ses capacités à favoriser la réussite de ses élèves (Ashton, 1984; Denham et Michael, 1981;
Roeser, Arbreton et Anderman, 1993). Le sentiment d’efficacité réfère, selon Bandura (1997),
aux croyances en ses propres capacités à organiser et à exécuter les actions nécessaires à l'atteinte
d’objectifs donnés. Ces croyances seraient liées étroitement aux décisions de persévérer dans un
domaine donné, à la ténacité face aux exigences du milieu, au degré de stress et de dépression
dans les situations difficiles et au niveau d’accomplissement personnel.
En effet, Bandura constate que les personnes qui doutent de leurs capacités dans certains
domaines évitent les tâches complexes associées à ces mêmes domaines. Dans de telles
situations, elles ont du mal à se motiver, si bien qu’elles diminuent leurs efforts, voire renoncent
rapidement devant les obstacles. Leurs aspirations sont peu élevées et leur engagement est faible.
Dans des situations éprouvantes, elles ne retiennent que les conséquences défavorables
appréhendées. De telles pensées contrecarrent leurs efforts et, à la suite d’un insuccès, il est alors
difficile pour elles de recouvrer rapidement un sentiment d’efficacité. Comme elles associent
souvent une faible performance à un manque d'aptitudes, elles perdent plus facilement confiance
en leurs capacités. En revanche, les personnes qui ont des attitudes positives quant à leur
sentiment d’efficacité abordent les tâches complexes comme des défis à relever. Leur niveau
d’intérêt est élevé et leur engagement ne cesse de croître au fur et à mesure du déroulement de
l’action. Leur effort est proportionnel à leur engagement et elles intensifient celui-ci en situation
d’échec appréhendé ou de contretemps. Elles attribuent plutôt leur échec à des efforts
40
insuffisants, retrouvent rapidement foi en leurs capacités et vivent moins d'anxiété, ce qui les rend
moins vulnérables à la dépression.
Ce sentiment d’efficacité a été étudié auprès des enseignants. Les études montrent que les
croyances de ces derniers quant à leur efficacité à enseigner affectent leurs attitudes envers l’acte
d’enseignement aussi bien que la nature des activités en classe (Ashton et Webb, 1986). Les
enseignants ayant un sentiment d’efficacité élevé ont une vision plus optimiste des étudiants et de
leurs capacités à enseigner. Ces enseignants se centrent principalement sur les activités scolaires.
Ils proposent à leurs élèves des tâches plus complexes tout en leur fournissant le soutien et l’aide
nécessaires à leur réussite et en les félicitant de leurs efforts. En revanche, ceux dont le sentiment
d’efficacité est faible ont une vision plus négative de la motivation de leurs élèves. Ils mettent
l’emphase sur le contrôle de la classe, délaissent ceux qui n’obtiennent pas rapidement des
résultats satisfaisants et recourent plus souvent à diverses sanctions et menaces pour les
contraindre à travailler.
En contrepartie cependant, Weinstein (1988) maintient qu’il existe une tendance à un "optimisme
irréaliste" chez les enseignants au début de leur formation, qui se manifeste par une très grande
confiance en eux en rapport avec leurs habiletés à enseigner. Ils ont notamment l’intime
conviction qu’ils éprouveront beaucoup moins de difficultés que les autres enseignants débutants,
ce qui s’avère généralement faux, d'où le phénomène bien connu du "choc de la réalité" lors de
leurs premières prises en charge durant les stages ou au début de leur carrière. Il faut noter aussi
que les étudiants ont tendance à minimiser les habiletés professionnelles au profit des valeurs
sociales et affectives dans leur appréciation des enjeux liés à l’exercice de leur profession. Ces
constatations remettent donc un peu en question les conclusions de Bandura, pour qui le
sentiment d’efficacité aide les gens à performer. Il est permis de penser que, pour être associé
positivement à la performance, ce sentiment doit tout au moins être fondé sur une appréciation
réaliste des tâches requises pour atteindre les objectifs.
41
Plusieurs recherches portent sur les croyances et sur les conceptions initiales relatives à un bon
exercice de la profession chez les étudiants en formation des maîtres (Weinstein, 1989; Kagan,
1992). Selon Kalaian et Freeman (1989) et McDiarmid (1990), les croyances issues des
expériences initiales demeurent assez stables et favorisent une acquisition sélective des notions
enseignées durant la formation universitaire. Les représentations construites précocement
seraient enracinées profondément dans les expériences passées en tant qu'élève et s’avéreraient
même en quelque sorte inscrites dans la personnalité des individus (Louden, 1991; Cohen, 1986).
Selon Cohen (1986), le style d'enseignement adopté vient au moins autant des expériences
sociales déjà vécues que de l'étude des principes de pédagogie qui se fait à l'université. Il
maintient que les étudiants en enseignement commencent leurs études universitaires avec des
croyances déjà établies à l’égard du métier, lesquelles marquent fortement leur identité
professionnelle émergente.
Bird, Anderson, Sullivan et Swindler (1993) soulignent aussi que les aspirants enseignants
arrivent au début de leur formation universitaire en acteurs expérimentés. Dans les écoles qu'ils
ont fréquentées, dans les communautés où ils ont vécu et dans la société qui les a vus grandir, ils
ont élaboré des croyances à propos de l'école, de l'enseignement et de l'apprentissage qui varient
selon leur histoire personnelle. Ces croyances peuvent inclure des catégories conceptuelles, des
dictons, des prescriptions ou des valeurs éducatives. Weinstein (1988) rapporte que les étudiants
se dirigeant en enseignement primaire expriment le plus souvent des conceptions comme "la
capacité à prendre soin de", "l’habileté à entrer en relation avec les enfants" et "la patience".
Pour les étudiants qui se destinent à l'enseignement secondaire, les réponses les plus fréquentes se
rapportent à "la connaissance approfondie de la matière" et à "une formation de spécialiste". Ces
croyances les amènent à lire les situations et à interpréter l'information donnée afin de décider ce
qui est possible, réaliste ou acceptable (Bird et al., 1993). En plus, les nouveaux enseignants
conservent ces croyances qui sont parfois peu adaptées à l'enseignement (Calderhead, 1991, cité
dans Bird et al., 1993), et qui limitent le champ des idées et des actions qu'ils peuvent prendre en
considération. Enfin, les différentes croyances viennent se heurter aux perspectives présentées
42
dans les cours de formation à l'enseignement, telles le fait que l'on apprend par des constructions
personnelles actives et signifiantes qui permettent de relier les nouvelles connaissances à celles
que l’on possède déjà.
Dans une recherche portant sur l'évolution des conceptions relatives à l'enseignement, Anderson
et Bird (1992) ont décrit un cours d'introduction à l'enseignement conçu de façon à éveiller
l'attention des étudiants face à leurs croyances et ils ont relevé certains problèmes éprouvés par le
professeur. Bien que celui-ci se soit montré satisfait de la performance des étudiants inscrits au
cours, il lui fut difficile d'établir une relation de travail satisfaisante, d'organiser une interaction
productive entre les croyances actuelles des étudiants et les alternatives possibles, de les aider à
accomplir le travail intellectuel qu’exige une telle interaction et à faire face aux ambiguïtés et au
risque qu'un tel cours représente pour eux. Dans le même ordre d'idées, Kagan (1992) relève que
le peu de flexibilité et la stabilité des croyances antérieures sont attribuables, en partie, à
l'inadéquation des contenus des cours conçus pour répondre aux besoins des étudiants. Elle
constate qu'il y a un changement dans leurs perceptions à mesure que la formation progresse et
que les contacts avec les élèves se multiplient. En outre, elle observe que chez ces débutants, il y
a une obsession pour le contrôle de la classe, c'est-à-dire qu'ils se préoccupent moins de faciliter
les apprentissages que de décourager les mauvais comportements.
Les recherches sur les préconceptions des futurs enseignants ont donc un impact non négligeable
sur leur formation dans la mesure où les formateurs doivent prendre en compte la possibilité que
celles-ci interfèrent avec les savoirs qui sont enseignés. Ces recherches peuvent procurer des
renseignements essentiels à l'ajustement des interventions des formateurs universitaires et de
ceux qui encadrent les stagiaires au cours de la formation initiale. Or, la plupart des études qui
sont faites dans le domaine ont un caractère essentiellement descriptif. Brookhart et Freeman
(1992) concluent, suite à leur recension de 44 études, que la plupart d’entre elles se contentent de
décrire les particularités des groupes à l’étude et qu’aux mieux elles se bornent à comparer divers
groupes. Aucune de ces recherches ne tente de vérifier empiriquement si les conceptions des
43
étudiants peuvent être associées à différents niveaux de performances. En tenant compte de cette
optique, trois objectifs ont retenu notre attention:
1.
identifier les principaux motifs du choix de carrière des étudiants au baccalauréat en
enseignement secondaire (BES) et au baccalauréat en enseignement préscolaire et primaire
(BEPP) et examiner quels motifs sont plus associés à leur réussite scolaire.
2.
analyser le sentiment d’efficacité personnelle des candidats à l’entrée du programme du BES
et du BEPP et examiner les différences intergroupes.
3.
étudier les conceptions initiales des étudiants à propos des qualités requises pour bien
enseigner et vérifier si certaines conceptions sont associées particulièrement à leur réussite
académique. Nous tenterons notamment de comparer les conceptions des qualités d'un
enseignant idéal (description d’un bon enseignant fictif) avec celles d'un bon enseignant réel
(description d’un enseignant marquant); nous voulons aussi comparer les conceptions
relatives à un bon enseignant par rapport à un mauvais enseignant; enfin, par une analyse
typologique basée sur les fréquences des catégories de réponse à ces quatre questions, nous
tenterons de dégager différents profils d’étudiants au début de leur formation et de vérifier
s’ils peuvent être associés à différents niveaux de performance.
Méthodologie
Sujets et procédure
Un questionnaire a été administré auprès de deux cohortes d'étudiants de première année du
baccalauréat en enseignement secondaire (N=214) et du baccalauréat en enseignement
préscolaire et primaire de l'université Laval (N=217), pour un total de 431 sujets. L’échantillon
était composé de 77% de femmes et aucun étudiant étranger ne faisait partie d’une des trois
cohortes. L’âge moyen était de 20.77 ans avec un écart-type de 3.20 années. Plus de 70% de
44
l’échantillon était âgé de moins de 21 ans. Les questionnaires ont été administrés durant la toute
première semaine de cours de la première session universitaire. Les assistants de recherche
expliquaient que l'étude portait sur les croyances des futurs enseignants et sur leurs attentes
relatives à leur formation d’enseignant. La durée de passation était en moyenne de 40 minutes.
Instruments
Le questionnaire comportait, en plus de certaines questions d'ordre personnel, trois questions
ouvertes auxquelles les sujets pouvaient répondre en utilisant un espace dont la dimension
couvrait les trois quarts d’une page, deux phrases à compléter et une échelle de Likert. Les trois
questions ouvertes et les deux phrases à compléter étaient les suivantes:
1.
Pour quels motifs choisissez-vous la carrière d’enseignant-e ?
2.
Quelles sont les caractéristiques que doit posséder un-e enseignant-e pour accomplir sa
tâche?
3.
Connaissez-vous dans votre histoire scolaire un-e enseignant-e qui vous a marqué-e? Que
faisait-il ou que faisait-elle de particulier? Que savait-il ou que savait-elle? Quelles
attitudes avait-il ou avait-elle envers les élèves, la matière?
4.
Un-e enseignant-e efficace serait un-e enseignant-e qui...
5.
Un-e mauvais-e enseignant-e serait un-e enseignant-e qui...
Les réponses des sujets ont fait l’objet d’une analyse de contenu qui a permis d’élaborer deux
grilles. La première porte sur les motifs du choix de carrière (question 1). Le processus inductif
de construction de la grille était le suivant: les réponses des sujets ont tout d’abord été
répertoriées, examinées et regroupées en fonction de thèmes similaires, puis une étiquette, une
définition et des exemples ont été attribués à chaque catégorie. Deux codeurs ont confronté leurs
versions respectives au fur et à mesure que la grille prenait forme. Les différences étaient
discutées et les sources d'ambiguïtés clarifiées. Une fois que les codeurs eurent considéré que la
45
grille était pratiquement terminée, ils ont commencé à procéder au calcul de la fidélité interjuge.
Dès que celle-ci a dépassé régulièrement la barre des 85%, les codeurs ont pu commencer à
catégoriser individuellement l'ensemble des réponses. La version finale de la grille qui est
présentée au tableau 1 comporte douze catégories auxquelles s’ajoute une catégorie résiduelle où
ont été rassemblés les énoncés ambigus ou inclassables. Ces énoncés comptent pour moins de
2% de tout le corpus.
Insérer le tableau 1 ici
La deuxième grille qui comprend dix-huit catégories porte sur les caractéristiques d’un bon
enseignant et s’applique aux questions 2 à 5. Nous avons utilisé la même procédure de
construction que pour les motifs du choix de la carrière. Il faut noter que pour la question se
rapportant au mauvais enseignant, il a fallu prendre en compte le fait que la formulation des
énoncés par les sujets était souvent négative ou inversée par rapport aux catégories de la grille. La
version finale de cette grille est présentée au tableau 2.
Insérer le tableau 2 ici
Ensuite, nous nous sommes servis d'une échelle de Likert afin de déterminer le sentiment
d’efficacité personnelle des candidats au BES et au BEPP. Pour cette échelle, les étudiants ont
répondu à la question suivante: "D’après ce que vous connaissez de vous, en vous comparant
avec un-e enseignant-e qui débute, comment évalueriez-vous votre compétence actuelle dans
divers domaines, sur une échelle allant de 0 à 10". La légende va de 0 (compétence nulle), à 10
(très grande compétence), avec le chiffre 5 au milieu (compétence moyenne, équivalente à celle
46
d’un-e enseignant-e moyen-ne qui débute). L’échelle comporte 15 items avec des énoncés tels
que motiver les élèves, planifier les activités dans une classe, connaître la matière, être sensible
aux besoins des élèves, etc. Une analyse en composantes principales de cette échelle suggère que
la solution à un seul facteur est la meilleure. D'ailleurs, la consistance interne de cette échelle est
de .94 et la corrélation item total moyenne est de .69. Cette forte corrélation suggère qu'il est
possible d'utiliser les scores globaux comme indice unique du sentiment d'efficacité des sujets.
Résultats
Motifs du choix de carrière
À la question: "Est-ce que l'enseignement constitue votre premier choix de carrière?", 82% des
étudiants du BES et 90% des étudiants du BEPP ont répondu oui, ce qui contribue à renforcer la
véracité des motifs du choix de la carrière enseignante. Le tableau 3 présente les fréquences des
réponses, selon le sexe et le programme, à la question portant sur ces motifs. Tout d'abord, nous
avons regroupé les douze catégories de réponses en quatre grands thèmes. Le thème de la
réalisation de soi, qui comprend des catégories comme s’enrichir au contact des jeunes, continuer
à apprendre et se réaliser, a été mentionné par une forte majorité de sujets. Le deuxième thème
en importance, celui du service, comprend le désir de transmettre des connaissances, d'aider les
jeunes et de contribuer à améliorer l'enseignement. En troisième, le thème de la continuité des
expériences rejoint un peu plus de la moitié de l'échantillon. Il comprend la possibilité d’exercer
ses compétences, de répéter des expériences antérieures de travail avec les jeunes, de suivre les
traces d'un modèle et de réaliser une très vieille ambition. Les raisons plus matérielles, liées au
statut social et aux conditions de travail sont mentionnées par un plus petit nombre de sujets.
Insérer le tableau 3 ici
47
On peut noter quelques différences significatives entre les étudiants des deux programmes. Les
motifs des étudiants du BES sont plus liés à la réalisation de soi sur le plan intellectuel, comme
de continuer à apprendre ou de relever le défi d'enseigner dans une classe, alors que ceux des
étudiants du BEPP concernent plus le contact enrichissant avec les enfants et la possibilité
d’obtenir un bon statut social. Les tests de chi carré suggèrent aussi plusieurs différences selon le
sexe. Les femmes mentionnent plus souvent l'occasion de s’enrichir au contact des enfants et de
transmettre des connaissances, alors que les hommes font plus référence aux conditions de travail
et à la possibilité de se réaliser.
Enfin, nous avons comparé les réponses des étudiants qui avaient obtenu leur diplôme dans les
délais réguliers (N=160) avec celles des étudiants qui avaient abandonné le programme ou qui
avaient eu des échecs qui ont retardé leur diplômation (N=90). Des analyses de variance portant
sur chacune des douze catégories de motifs n’ont révélé aucune différence significative entre les
groupes d’étudiants.
Sentiment d’efficacité personnelle
L’analyse factorielle de l'échelle qui mesure le sentiment d'efficacité personnelle révélant que la
solution à un seul facteur était la meilleure, nous avons calculé, pour chaque sujet, un score
global pour l’échelle entière. Il ressort que 5.8% des étudiants ont le sentiment d’être en dessous
de la moyenne contre 94.2% qui s’estiment globalement plus compétents qu’un enseignant
débutant. Ceci dénote une très grande confiance en soi chez les étudiants avant même qu’ils
n’aient eu de formation théorique ni d’expérience pratique dans le domaine de leur choix.
Insérer le tableau 4 ici
48
Lorsque l’on examine le tableau 4, on constate que ce sont les habiletés liées aux relations avec
les élèves (avoir de bonnes relations, être sensible aux besoins, savoir motiver les élèves) qui
reçoivent les meilleurs scores. Ceux-ci sont plus modestes lorsqu’il s’agit d’activités qui
demandent un savoir-faire plus spécialisé comme analyser ses pratiques pédagogiques, gérer
efficacement la classe, évaluer les apprentissages, agir avec des élèves difficiles et planifier les
activités d’apprentissage.
Conceptions pédagogiques
Nous avons demandé aux sujets de décrire un bon enseignant en leurs propres termes. Pour ce
faire, ils ont employé entre une et onze catégories différentes sur dix-huit possibles, avec une
moyenne de 5,16 concepts différents pour chacun. Le tableau 5 présente les pourcentages de
sujets, selon le programme et le sexe, qui ont mentionné des caractéristiques qui entrent dans
l'une ou l'autre des dix-huit catégories. Plusieurs catégories apparaissent avec un poids très
important pour les étudiants des deux programmes, telles que celles qui sont résumées sous
l’étiquette être proche des jeunes. La patience, la pédagogie et l’autorité constituent les autres
catégories dominantes.
Insérer le tableau 5 ici
On remarque aussi qu’il y a des différences entre les deux programmes: au BEPP, les étudiants
favorisent plutôt les qualités personnelles telles que aimer les jeunes et être créatif et imaginatif
et être bien organisé. En revanche, chez les étudiants du BES, ce sont les qualités liées au savoir
qui sont privilégiées. Ainsi, la connaissance de la matière, l’attrait pour la matière, les bonnes
relations avec les élèves et une vaste culture sont des qualités plus souvent invoquées que chez
les étudiants du BEPP. En ce qui concerne les différences entre les deux sexes, elles sont peu
49
nombreuses. On remarque seulement que les femmes insistent plus sur l’autorité. Il faut donc
noter qu’il y a plus de ressemblances que de différences entre ces deux groupes.
50
Bon enseignant et mauvais enseignant
Ensuite, les sujets étaient conviés à décrire un enseignant efficace et un mauvais enseignant par
l’entremise de phrases à compléter. Une moyenne de 2,43 catégories étaient utilisées dans le
premier cas et 2,06 dans le second cas. Le bon enseignant est décrit par la majorité des sujets
comme quelqu’un qui est proche des jeunes et qui est un bon pédagogue. Dans une moindre
mesure, c’est une personne qui est tolérante, qui a de l’autorité et qui aime enseigner. Le
mauvais enseignant n’est pas proche des jeunes et s’avère un mauvais pédagogue. En plus, il ne
travaille pas fort, se montre injuste ou peu respectueux de ses élèves et peu motivé. Les
fréquences de certaines catégories de réponses diffèrent selon la question. Les catégories comme
prendre soin des élèves, être bon pédagogue, avoir de l’autorité et connaître la matière sont plus
souvent mentionnées dans les descriptions du bon enseignant. D’autre part, dans la description
du mauvais enseignant, ce sont les catégories liées à l’effort, au dynamisme et aux qualités
morales qui s’avèrent plus fréquentes. Ces différences dans les descriptions des étudiants
suggèrent que les conceptions relatives à un bon et à un mauvais enseignant ne sont pas
nécessairement opposées. Par exemple, on peut déduire du dépouillement des réponses qu’il est
relativement important d'avoir de l'autorité pour être un bon enseignant, mais que les mauvais
enseignants ne se caractérisent pas nécessairement par le manque d'autorité.
Enseignant réel et enseignant idéal
Un autre objectif de la recherche consistait à comparer les conceptions des étudiants à l’égard
d’un enseignant remarquable qu’ils ont connu dans le passé avec celles d’un enseignant idéal,
théorique. En ce qui concerne les descriptions d'un enseignant réel ou idéal, le tableau 6 indique
que les descriptions de l'enseignant idéal sont plus exhaustives que celles de l'enseignant réel. En
effet, une moyenne de 5,16 catégories différentes sont utilisées dans le premier cas, alors que
pour l’enseignant réel, ce sont 2,79 catégories différentes qui sont employées. Les étudiants ont
51
donc plus tendance à élaborer lorsque l'objet est abstrait que lorsqu'il s'agit d'une personne qu'ils
ont connue.
Insérer le tableau 6 ici
Analyse typologique
Le but de cette analyse était de voir si les étudiants du BEPP et du BES pouvaient être regroupés
en fonction de leur profil de réponses aux questions ouvertes. Pour ce faire, nous avons utilisé
une méthodologie de type Q, soit une analyse de regroupements hiérarchiques fondée sur les
distances euclidiennes et utilisant la méthode de Ward (cluster analysis, Ward method). À cette
fin, nous avons utilisé les réponses aux quatre questions ouvertes portant sur l’enseignant
efficace, le mauvais enseignant, l’enseignant réel et l’enseignant idéal. Pour chaque catégorie,
nous avons attribué la cote 1 si l’énoncé y figurait et la cote 0 s’il n’y figurait pas. Nous avons
ainsi obtenu un profil composé de dix-huit scores pour chacune des quatre questions. Enfin, nous
avons additionné les quatre séries de scores pour obtenir un profil composé de dix-huit scores
s’étendant de zéro à quatre. C’est à partir de ces données que se sont faites les analyses
typologiques. La solution la plus facilement interprétable regroupait les sujets en quatre
catégories.
Le tableau 7 présente ces quatre groupes d’étudiants avec leurs moyennes pour chaque catégorie.
Le premier groupe se caractérise par des étudiants dont les préoccupations sont axées sur la
pédagogie. Ils utilisent plus que les autres les catégories comme bon pédagogue (2.73) et
organisé (0.47); l’élément humour (1.01) apparaît également chez ce groupe, qui comprend près
de 36% de l’échantillon. Le second groupe, qui comprend 20% des sujets, se caractérise par des
étudiants dont les descriptions reflètent les qualités d’un leader, avec des catégories comme
entretenir de bonnes relations (2.35), avoir de l’autorité (1.05) et posséder des qualités morales
52
(1.13). À l’inverse, la catégorie prendre soin est sous-représentée (.78). Le troisième groupe est
caractérisé par des étudiants qui font ressortir de l’énergie et de la passion à l’égard de la
profession. Les enseignants y apparaissent comme des personnes qui sont dynamiques (1.90),
travailleuses (1.12) et qui aiment leur métier (0.83). Il regroupe près de 30% des sujets. Le
dernier groupe d’étudiants, qui comprend 15% de l’échantillon, définit un enseignant
principalement comme celui qui prend soin des élèves (2.56), qui est patient (1.76). Autrement
dit, ce quatrième groupe d’étudiants privilégie en grande partie des qualités liées au soin des
personnes pour bien enseigner.
Insérer le tableau 7 ici
Dans un deuxième temps, nous avons cherché à connaître les caractéristiques de chaque groupe
d’étudiants. Tout d’abord, nous avons examiné les proportions d’étudiants des deux programmes
dans chaque groupe. Nos résultats suggèrent qu’une plus grande proportion d’étudiants du BES
font partie du premier groupe alors que les étudiantes du BEPP sont proportionnellement plus
nombreuses dans le groupe quatre (chi carré = 13,71, p<.01). De plus, les étudiants de sexe
masculin se trouvent en plus grande proportion dans les groupes un et trois alors que les
étudiantes sont proportionnellement plus nombreuses dans les groupes deux et quatre (chi carré =
11,16, p=.01).
Ensuite, aucune différence significative entre les quatre groupes n’a été trouvée au regard du
sentiment de compétence et au regard des motifs du choix de carrière. Dans le premier cas, il
apparaît que le sentiment de compétence des étudiants est relativement équivalent d’un groupe à
l’autre. Dans le second cas, il n’y avait qu’une réponse significative parmi les douze motifs
(aider). Il est donc impossible d’élaborer sur ce résultat qui pourrait très bien avoir été obtenu par
chance.
53
Enfin, nous avons tenté de dégager un lien entre les conceptions des sujets et leur niveau de
réussite. Tout d’abord, le nombre d’étudiants de chaque type selon qu’ils avaient obtenu ou non
leur diplôme a été compilé, mais le test de chi carré n’a pas révélé de différences entre les
effectifs des différents sous-groupes. De plus, des tests T ont permis de vérifier si les
conceptions des étudiants qui ont réussi différaient de celles des étudiants qui ont échoué. Aucun
de ces tests ne s’est avéré significatif.
Discussion
Cette étude poursuivait trois objectifs, soit d'identifier les principaux motifs du choix de carrière
d'étudiants à l'entrée de leur programme de formation en enseignement, d'analyser leur sentiment
d'efficacité par rapport aux tâches reliées à l'enseignement et d'étudier leurs conceptions relatives
aux qualités requises pour bien enseigner. Pour chacun de ces objectifs, nous voulions aussi
savoir s'il y avait des différences selon le sexe, selon le programme de formation et selon le
niveau de réussite des études.
Motifs du choix de carrière
Les motifs exposés par les étudiants ont été regroupés en quatre grands thèmes, soit la réalisation
de soi, le service, la continuité et les bénéfices matériels. Les occasions de développement
personnel qu’offre la profession enseignante, comme le fait de s’enrichir au contact des jeunes,
de continuer à apprendre et de se réaliser constituent les motifs privilégiés par les sujets de notre
étude. C'est donc le thème de la réalisation de soi qui prime chez les sujets de l’étude. Suivent
les motivations liées au service, comme le fait de pouvoir transmettre des connaissances et d'aider
les jeunes. Ensuite, le désir de répéter les expériences antérieures, d’exercer ses compétences et
de suivre les traces d’un modèle, des motifs qui se regroupent sous le thème de la continuité, sont
exprimés par un peu plus de la moitié de notre échantillon. Enfin, les bénéfices matériels, comme
54
l'amélioration de son statut social et de bonnes conditions de travail, sont mentionnés par un plus
petit nombre de sujets. Les grandes lignes de ces résultats confirment ceux retrouvés chez
Brookhart et Freeman (1990), Andrew (1983) et Joseph et Green (1986) qui mettent l’accent sur
la nature altruiste des motifs. Elles indiquent également que la tendance idéaliste identifiée dans
les études de Richards (1960), Lortie (1975), Jantzen (1981), Weinstein (1988 et 1989), Goodlad
(1984) et Brookhart et Freeman (1992) est perceptible aussi chez nos sujets. À aucun moment,
les étudiants ne font spontanément référence aux difficultés auxquelles ils pourraient s’exposer.
Même si elle va dans le sens de nombreuses études antérieures, la vigueur de cette orientation
peut surprendre dans le contexte actuel. On peut évidemment questionner la sincérité de ces
propos comme le mentionnent Joseph et Green (1986), en alléguant qu'ils cachent possiblement
des motifs plus terre-à-terre, quoiqu'inconscients. Cette explication ne nous satisfait cependant
pas, connaissant les difficultés notoires qui assaillent actuellement la profession enseignante. Un
deuxième constat touche la prééminence du thème de la réalisation de soi dans la présente étude,
ce qui n’est pas aussi évident dans les autres recherches sur le sujet (Violato et Travis, 1990;
Book et Freeman, 1986; Bontempo et Digman, 1985). Ceci suggère que les réponses que nous
avons obtenues semblent moins stéréotypées que ce que l’on a rapporté jusqu'à maintenant. La
clientèle des nouveaux programmes, plus jeune, plus motivée et sélectionnée de façon plus
marquée qu'avant, semble avoir moins usé des clichés habituels, pour faire étalage de motivations
plus intrinsèques que par le passé.
Les résultats révèlent aussi que les étudiants qui se destinent à l'enseignement primaire
choisissent cette orientation en plus grande partie pour le contact avec les enfants et pour les
bénéfices matériels, tandis que les étudiants qui se dirigent vers l'enseignement secondaire sont
plus attirés par la possibilité de se développer sur les plans intellectuel et professionnel. Ces
différences confirment les résultats de plusieurs études et correspondent bien aux exigences
différentes de ces deux tâches. Les femmes mentionnent plus souvent le contact avec les enfants
et le désir de leur transmettre des connaissances, alors que les hommes cherchent plus à se
réaliser et à obtenir de bonnes conditions de travail. Ces résultats corroborent ceux de Violato et
55
Travis (1990), de Rothman (1977) et de Lortie (1975). Enfin, les étudiants qui réussissent
semblent avoir des motifs assez similaires à ceux qui vivent des échecs, ce qui suggère que la
réussite semble plutôt liée à des facteurs proximaux comme les habitudes de travail qu’à des
facteurs distaux comme les motifs ou les convictions préalables.
Sentiment d’efficacité des étudiants
En ce qui concerne le sentiment d'efficacité personnelle, nos résultats montrent que les étudiants
se sentent bien outillés à l'égard des tâches d'enseignement, à tel point qu'on peut se demander,
comme Weinstein (1988 et 1989), si leurs réponses sont teintées d'un fort "optimisme irréaliste".
En effet, quatre-vingt-quatorze pour-cent (94.2%) des sujets croient qu’ils se situent un peu, assez
ou très au dessus de la moyenne par rapport à un enseignant qui débute. D'une part, ce fort
sentiment de confiance en soi augure bien dans la mesure où il peut être le gage d'attitudes
positives et de stratégies proactives efficaces lorsque surgissent les problèmes inhérents à la
tâche. D'autre part, poussé à l'extrême, ce sentiment peut s'apparenter à une forme de pensée
magique, soit la conviction que les problèmes qui affligent les autres nous épargneront. Lorsque
l'on examine les résultats en détail, on voit que ce sont les habiletés relatives aux relations
humaines comme celles de maintenir de bonnes relations avec les élèves et de se montrer sensible
aux besoins des élèves qui remportent la palme. À l'inverse, ce sont des habiletés plus techniques
comme l'évaluation des apprentissages, la gestion de la classe, la planification des activités
d'apprentissage et l'intervention avec les élèves difficiles qui donnent lieu à des auto-évaluations
plus modestes. Ceci contribue, à notre avis, à tempérer un peu le jugement de Weinstein, mais
seule une étude longitudinale nous permettrait d’examiner les circonstances précises qui font
fluctuer ces sentiments.
Conceptions pédagogiques
56
Soulignons d’abord que dans l’ensemble des résultats, il y a une primauté des aspects
interpersonnels dans les descriptions des étudiants. Ceci s'avère conforme à de nombreuses
recherches qui révèlent une conception de l'enseignement construite autour des notions de soins
et de relations positives (Weinstein, 1989). Ce résultat confirme le phénomène selon lequel les
étudiants au BEPP et au BES perçoivent l’enseignement avant tout comme une profession axée
sur le contact humain et minimisent en quelque sorte ses aspects pédagogiques. Ceci est vrai
autant pour les étudiants en enseignement secondaire que primaire et tant pour les hommes que
pour les femmes. Nous pouvons constater également que les qualités professionnelles sont
mentionnées assez régulièrement, mais dans une mesure plus faible. Les qualités personnelles
comme l'engagement, la confiance en soi et la culture sont aussi mentionnées assez
régulièrement. En revanche, les caractéristiques liées à la réflexion sur l'action et à la
planification sont quelque peu négligées. De même, on constate qu’il y a peu de références à des
approches novatrices, à des méthodes nouvelles ou à une démarche de développement
professionnel. Autrement dit, tout se passe dans l’immédiat de la classe.
Nos résultats relatifs aux différences selon le sexe et le programme sont congruents avec les
études antérieurement réalisées dans ce domaine. En effet, la nature du programme discrimine
plus nos étudiants que ne le fait la variable sexe. Ces différences ne font que souligner les
différences de représentations sociales de l'enseignant du primaire et du secondaire. Par exemple,
les étudiants du BES favorisent tout ce qui est lié au savoir alors que ceux du BEPP privilégient
des aspects personnels et parentaux. De plus, nos résultats confirment ceux de Kagan (1992) et
Perry et Rog (1992) pour lesquels les débutants ont une obsession du contrôle de la classe et ce
phénomène est particulièrement accru chez les femmes.
Dans un deuxième temps, notre analyse de regroupements hiérarchiques a permis de dégager
quatre grands types caractérisés par des façons différentes de concevoir l'enseignement en début
de carrière. Le premier groupe se caractérise par des étudiants dont les propos sont axés sur la
pédagogie alors que le second groupe privilégie les qualités de leadership. Le troisième groupe
57
d’étudiants mentionne plutôt le dynamisme, le travail et l'amour du métier, alors que le dernier
groupe privilégie la maîtrise des tâches apparentées au rôle de parent, comme la patience et le
soin aux enfants. Plus d'étudiants du BES se retrouvent dans le premier groupe, alors que ceux
du BEPP sont majoritaires dans le quatrième groupe, ce qui s'avère conforme aux résultats
antérieurs. De plus, aucun groupe ne se distingue des autres en ce qui concerne la réussite dans
les études universitaires, ce qui suggère que les conceptions, telles qu’elles ont été recueillies, ont
une influence très limitée sur la qualité du parcours académique des étudiants. Il restera, dans le
cadre d'une prochaine recherche, à voir si ces représentations sont associées à des habiletés ou à
des pratiques particulières lors des stages d'enseignement.
Conclusion
Les implications de ces résultats pour la formation des maîtres sont non négligeables. Le peu
d'importance accordée par les étudiants aux aspects pédagogiques et à ceux qui concernent le
développement professionnel, de même que l'ignorance des nouvelles approches et méthodes
posent un défi pour leurs formateurs qui devront développer des pédagogies favorisant les
changements conceptuels de leurs étudiants. L'immersion rapide des étudiants dans la pratique
supervisée pourrait faire rapidement disparaître certaines illusions, agir comme déclencheur du
besoin d'une formation théorique plus poussée et stimuler la pensée réflexive nécessaire à un
développement professionnel continu.
Limites
Le questionnaire que nous avons soumis était composé de questions ouvertes. En n'offrant pas
d'éventail de réponses, nous souhaitions offrir aux sujets une plus grande liberté d'expression
dans le choix du contenu et de la forme des réponses. En effet, cette forme de question permet
d'obtenir des informations plus riches que ne le permettraient des questions semi-ouvertes ou
fermées. Cependant, le dépouillement n'en est que plus complexe dans la mesure où les réponses
peuvent être ambiguës. Nous avons rencontré cette difficulté lors de la codification de certaines
58
des réponses qui auraient demandé à être plus explicites. Par exemple l'énoncé «un bon
enseignant répond aux besoins des élèves» pouvait être interprété selon la dimension affective ou
scolaire. De plus, un questionnaire écrit ne permet pas aux sujets d'aller jusqu'au bout de leur
pensée. Ceux-ci ont le temps d'exprimer quelques idées spontanées mais pas de réfléchir une
deuxième fois à leurs réponses. Par conséquent, ce n'est pas parce qu'ils n'ont pas exprimé
certaines idées qu'ils sont forcément en désaccord avec elles.
C'est pourquoi il est préférable d'utiliser des entrevues individuelles qui permettent aux sujets de
s'exprimer librement sur les questions posées, mais également d'obtenir des précisions sur ce qui
est dit. En ce qui concerne notre étude, nous souhaitions obtenir les réponses du plus grand
nombre de sujets et la passation d'entrevues individuelles aurait entraîné des coûts trop
importants.
Enfin, cette recherche ne permet de juger que superficiellement de la validité prédictive des
réponses des sujets. Une prochaine étude pourrait mettre en relation ces réponses avec divers
indices comportementaux en stage ou durant les études et permettrait de juger de la pertinence de
notre méthode de recueil des données pour prédire les cheminements des étudiants.
59
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61
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62
APPENDICE 1
Échelles utilisées
63
Questions ouvertes et phrases à compléter utilisées dans le questionnaire
1.
Pour quels motifs choisissez-vous la carrière d’enseignant-e ?
2.
Quelles sont les caractéristiques que doit posséder un-e enseignant-e pour accomplir sa
tâche?
3.
Connaissez-vous dans votre histoire scolaire un-e enseignant-e qui vous a marqué-e? Que
faisait-il ou que faisait-elle de particulier? Que savait-il ou que savait-elle? Quelles
attitudes avait-il ou avait-elle envers les élèves, la matière?
4.
Un-e enseignant-e efficace serait un-e enseignant-e qui...
5.
Un-e mauvais-e enseignant-e serait un-e enseignant-e qui...
64
Sentiment d'efficacité personnelle
D'après ce que vous connaissez de vous, en vous comparant avec un-e enseignant-e qui
débute, comment évalueriez-vous votre compétence actuelle dans divers domaines, sur une
échelle allant de 0 à 10?
1. Planifier les activités dans une classe.
2. Assurer une bonne gestion de classe.
3. Motiver les élèves.
4. Avoir de bonnes relations avec les élèves.
5. S'exprimer de façon articulée.
6. Être sensible aux besoins des élèves.
7. Analyser sa pratique pédagogique.
8. Savoir comment agir avec les élèves difficiles.
9. Bien communiquer avec les parents.
10. Organiser des activités parascolaires.
11. Connaître la matière.
12. Évaluer les apprentissages.
13. Intervenir dans des moments de crise.
14. Collaborer au sein de l'équipe des enseignantes et des enseignants.
15. Tenir compte des besoins particuliers de certains élèves.
65
APPENDICE 2
Tableaux descriptifs
66
Tableau 1
Grille de catégorisation relative aux motifs du choix de carrière
Catégorie
Brève description
S’ENRICHIR AU CONTACT DES JEUNES
Les enfants m’apportent beaucoup. J’aime les
enfants.
TRANSMETTRE DES CONNAISSANCES
J’aime communiquer mes connaissances aux
autres. Je veux faire acquérir des choses
nouvelles aux enfants.
CONTINUER À APPRENDRE, À SE FORMER
L’enseignement est un processus d’apprentissage
continuel. J’aime les matières que je vais
enseigner.
AIDER
Je veux aider les enfants à bien démarrer dans la
vie.
SE RÉALISER
L’enseignement m’attire par les défis à relever.
J’aime parler devant les autres, faire un show en
avant.
EXERCER SES COMPÉTENCES
J’ai de la facilité à enseigner. Je pense avoir les
qualités pour être un bon enseignant.
ACCÉDER À UN BON STATUT SOCIAL
La liberté professionnelle: personne pour me
dicter quoi faire en classe. Il s’agit d’une carrière
valorisante.
RÉPÉTER SES EXPÉRIENCES ANTÉRIEURES
J’ai une bonne expérience auprès des enfants.
SUIVRE LES TRACES DE QUELQU’UN
Je veux faire comme certains enseignants qui
m’ont marqué.
PAR VOCATION
C’est par vocation que je suis ici. Faire ce que
j’ai toujours voulu.
AVOIR DE BONNES CONDITIONS DE TRAVAIL
J’aime les vacances d’été qu’offre
l’enseignement.
AMÉLIORER QUALITÉ DE L’ENSEIGNEMENT
Les écoles ont besoin d’un changement de
personnel.
67
Tableau 2
Grille de catégorisation des caractéristiques d’un-e bon-ne enseignant-e
Catégorie
Brève description
PROCHE DES JEUNES
a) Aime les jeunes
Aime les enfants, les adolescents. (sans aucune autre
précision).
b) Prend soin des élèves
Aide les enfants à évoluer. À l’écoute des jeunes et des besoins
des enfants. Bon guide pour les enfants.
c) Bonnes relations
Se met à la hauteur de ses élèves. Est accessible. Prend le
temps de parler avec les élèves.
PATIENT, TOLÉRANT
Patience. Patience et tolérance.
BON PÉDAGOGUE
Clair dans ses explications. Sait faire passer la matière.
Excellent vulgarisateur.
Utilise différentes techniques
d’enseignement. Anime bien.
A DE L'AUTORITÉ
A une bonne dose d’autorité. Est assez ferme. Fermeté quand
c’est le temps. Un peu autoritaire.
HUMOUR Un peu comédien. Sens de l’humour. Drôle. Est souriant, jovial. Rit avec nous pour détendre
le cours.
DYNAMIQUE, MOTIVÉ
Communique sa passion. Dynamique. Leader.
TRAVAILLE FORT, SE DÉVOUE
Persévérant. Ne compte pas ses heures et ses énergies. Se
donne à 100%.
CONNAÎT LA MATIÈRE
Connaît à fond sa matière.
POSSÈDE DES QUALITÉS MORALES
Respectueux des différences. Pas d’orgueil mal placé (accepte
ses erreurs). Se montre juste, équitable.
CONFIANT
Sûr de lui. Bonne maîtrise de soi.
AIME ENSEIGNER
Désire communiquer son savoir aux autres.
l’enseignement. Aime l’enseignement.
BONNE FORMATION , CULTIVÉ
Avide de connaissances. Possède une vaste culture.
CRÉATIF, IMAGINATIF
Spontané.
A de l’imagination pour apprendre tout en
s’amusant. Ingénieux. Imagination fertile.
ORGANISÉ, MÉTHODIQUE
Est structuré et organisé. Prépare ses cours à l’avance.
Mordu de
68
AIME SA MATIÈRE
Aime sa matière. Veut toujours apprendre.
RÉFLÉCHIT SUR SA PRATIQUE
Veut toujours se développer. Se questionne sur ses méthodes.
Esprit critique.
69
Tableau 3
Motifs du choix de carrière des étudiantes et des étudiants
du BEPP et du BES (pourcentages de sujets)
TOTAL
BEPP
THÈMES
Catégories
BES
F
M
87.0
91.5
88.0
85.0 76.7
S’enrichir au contact
71.7
86.8
84.0
60.0 46.7
47.28*** 10.48**
Continuer à apprendre
33.3
26.6
20.0
45.3 32.8
11.53*** 0.89
Se réaliser
22.0
16.1
32.0
22.9 34.4
4.29**
8.65**
67.0
64.6
68.0
72.9 60.7
0.82
0.86
Transmettre connaissances 52.6
55.7
48.0
55.0 39.3
0.88
5.04*
Aider
32.8
31.8
20.0
36.4 32.8
1.14
0.67
5.5
3.1
8.0
8.2
2.86
1.45
56.6
58.9
56.0
56.8 49.2
0.69
1.30
21.9
20.8
20.0
26.1 16.4
0.34
1.25
Répéter expériences antér. 20.6
24.5
20.0
15.0 21.3
3.17
0.01
Suivre traces d’un modèle 19.6
21.9
24.0
18.6 13.1
1.79
0.77
Vocation
18.4
21.4
20.0
16.4 13.1
2.32
0.79
BÉNÉFICES MATÉRIELS
30.1
35.9
48.0
17.9 32.8
11.06*** 2.57
Accéder statut social
21.1
27.1
32.0
13.6 14.8
11.82*** 0.11
Conditions de travail
11.5
12.5
20.0
4.3 21.3
RÉALISATION DE SOI
SERVICE
Améliorer enseignement
CONTINUITÉ
Exercer ses compétences
* p<.05
** p<.01
*** p<.001
F
Valeur du Khi 2
7.1
M
Prog.
Sexe
6.78**
4.56*
1.57
9.51**
70
Tableau 4
Sentiment d’efficacité personnelle
à l’égard de certaines tâches
Attribut
Score moyen
(sur 10)
Maintenir de bonnes relations avec les élèves
Se montrer sensible aux besoins des élèves
Avoir une bonne expression orale et écrite
Être habile à motiver les élèves
7.3
7.1
6.7
6.3
Organiser des activités parascolaires
Diagnostiquer les besoins particuliers
Intervenir dans des moments de crise
Bien communiquer avec les parents
Collaborer au sein d’une équipe
Connaître la matière
Évaluer les apprentissages
Analyser ses pratiques pédagogiques
Avoir une gestion de la classe efficace
Bien planifier les activités d’apprentissage
Savoir comment agir avec les élèves difficiles
6.1
5.9
5.9
5.8
5.6
5.5
5.4
5.4
5.3
4.9
4.8
71
Tableau 5
Caractéristiques d’un bon enseignant selon le programme et selon le sexe (pourcentages de
sujets)
BEPP
ItemFemmes
BES
Valeur du Khi 2
Hommes
Femmes
Hommes Programme
Sexe
- Aime les jeunes
29.7
24.0
14.3
11.5
15.03 ***
2.64
- Prend soin
44.8
48.0
49.3
44.3
0.28
0.05
- A de bonnes relations
43.8
36.0
56.4
42.6
3.68 *
1.93
Patient, tolérant
59.9
52.0
52.9
52.5
1.65
0.59
Bon pédagogue
45.8
56.0
45.7
54.1
0.07
2.15
A de l'autorité
40.1
18.4
41.4
18.0
0.41
Humour
37.0
26.3
27.1
29.5
2.18
0.00
Dynamique, motivé
32.8
28.0
27.1
32.8
0.57
0.03
Travaille fort, se dévoue
25.0
36.0
33.6
36.1
3.22
1.79
Connaît la matière
21.9
24.0
34.3
29.5
6.04 **
0.02
Possède des qualités morales 22.9
28.0
26.4
19.7
0.04
0.20
Confiant
21.4
40.0
22.9
19.7
0.15
0.50
Aime enseigner
24.0
24.0
22.1
19.7
0.39
0.20
Bonne formation, cultivé
18.2
12.0
25.7
29.5
5.32 *
0.37
Créatif, imaginatif
24.5
32.0
11.4
8.2
15.57 ***
0.68
Organisé, méthodique
19.3
16.0
12.1
8.2
5.15 *
1.80
Aime sa matière
8.9
12.0
18.6
13.1
5.50 *
0.01
Réfléchit sur sa pratique
2.1
0.0
5.0
4.9
3.16
0.01
Proche des jeunes
* p<.05
** p<.01
*** p<.001
16.00 ***
72
Tableau 6
Caractéristiques d’un bon et d’un mauvais enseignant
ainsi que d’un enseignant idéal et réel (pourcentages de sujets)
Itemenseignant
Bon
enseignant
Mauvais
idéal
Enseignant Enseignant
réel
Proche des jeunes
- Aime les jeunes
- Prend soin des élèves
- Bonnes relations
9.3
34.2
24.9
6.0
24.9 **
26.8
22
45
47
5.3 **
20.6 ***
37.8 *
Bon pédagogue
Patient, tolérant
A de l'autorité
Dynamique, motivé
Travaille fort, se dévoue
Connaît la matière
Possède des qualités morales
Bonne formation, cultivé
Confiant
Aime enseigner
Humour
Créatif, imaginatif
Organisé, méthodique
Aime sa matière
Réfléchit sur sa pratique
54.8
20.3
15.8
8.4
10.3
11.2
8.6
5.0
3.6
13.4
8.9
3.8
7.2
4.5
0.7
35.6 ***
17.5
6.5 **
13.2 *
20.8 **
6.2 *
15.8 *
2.2
1.9
11.0
5.7
3.1
5.3
3.1
2.6
50
56
36
31
30
27
24
23
23
23
18
18
15
13
3
55.3
12.7 ***
25.1 *
17.5 **
12.4 **
12.4 **
19.4
8.1 **
3.3 ***
8.4 **
25.8
5.0 **
2.9 ***
7.4 *
0.0
* p<.05
** p<.01
*** p<.001
73
Tableau 7
Résultats de l’analyse typologique avec moyennes de groupe,
valeurs de F et de p
Catégorie
Aime jeune
Prend soin
Bonnes relations
Patient
Bon pédagogue
Autorité
Humour
Dynamique
Travailleur
Connais. matière
Qualités morales
Confiant
Aime métier
Bonne formation
Créatif
Organisé
Aime matière
Réfléchit
Moyennes
Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4
n = 149
n = 83
n = 123
n = 63
0.40
1.13
1.05
0.93
2.73
0.86
1.01
0.62
0.51
0.64
0.45
0.32
0.47
0.35
0.28
0.47
0.23
0.07
0.35
0.78
2.35
1.18
1.70
1.05
0.55
0.58
0.57
0.51
1.13
0.34
0.48
0.52
0.41
0.25
0.37
0.11
0.50
1.07
1.09
0.79
1.47
0.65
0.50
1.90
1.12
0.63
0.67
0.28
0.83
0.39
0.27
0.19
0.27
0.06
0.43
2.56
1.38
1.76
1.25
0.84
0.67
0.27
0.76
0.38
0.62
0.35
0.32
0.21
0.29
0.21
0.29
0.03
F
0.80
52.15
42.51
16.87
52.19
3.32
10.61
15.60
13.34
2.02
12.56
0.33
7.94
3.33
1.08
5.49
1.19
1.24
Contrastes significatifs: a=1 et 2, b=1 et 3, c=1 et 4, d=2 et 3, e=2 et 4, f=3 et 4
p<
.50
.000 acef
.000 ade
.000 cdef
.000 abce
.02 d
.000 abc
.000 bcdf
.000 bdf
.11
.000 adf
.80
.000 bdf
.02e
.36
.001 bc
.31
.29
74
CONCLUSION
75
CONCLUSION
En résumé, nous avons fait passer un questionnaire auprès de trois cohortes d’étudiants en 1994
et en 1995 au BES et au BEPP pour un total de 418 étudiants. Les réponses des sujets ont fait
l’objet d’une analyse de contenu qui a permis d’élaborer deux grilles communes aux questions
dont une sur les caractéristiques d’un bon enseignant, qui comprend vingt catégories, et l’autre
sur les motifs du choix de carrière qui comprend douze catégories. Nos résultats indiquent
plusieurs tendances intéressantes à l’égard des motifs du choix de carrière, du niveau de
confiance et des préconceptions des étudiants en enseignement à l’Université Laval.
En ce qui à trait à l’ensemble des résultats, nous pouvons confirmer l’hypothèse de Weinstein
(1989), qui affirme qu’il y a toujours une primauté des aspects interpersonnels dans les
descriptions d’un bon enseignant chez les étudiants en formation. Nos résultats confirment
également l'hypothèse de Kagan (1992), qui stipule que les étudiants au BEPP et au BES
choisissent l’enseignement pour le contact humain en premier et qu’ils minimisent en quelque
sorte les aspects pédagogiques. Ce phénomène est plus marqué pour nos sujets en enseignement
secondaire que primaire et pour les garçons que pour les filles. Il faut toutefois noter que pour les
étudiants au BES et au BEPP, les habiletés pédagogiques sont importantes même si cet aspect
apparaît de manière plus importante pour le premier groupe d’étudiants.
Une analyse de
regroupements hiérarchiques portant sur les sujets a permis de dégager quatre types de
conceptions de l'enseignement en début de carrière.
Cette recherche montre que la formation des maîtres pose un défi pour les acteurs impliqués en ce
qui concerne la conception des cours pour satisfaire les nouveaux besoins des étudiants. Les
prochaines étapes de cette recherche nous permettront d'analyser l'évolution des croyances au
cours des stages et si ceux-ci stimuleront la pensée réflexive nécessaire à un développement
professionnel continu.
76
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