Créée en 1861 - Institut Français de la Mer
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Créée en 1861 - Institut Français de la Mer
LA REVUE MARITIME Créée en 1861 Revue trimestrielle de l’Institut Français de la Mer (IFM) Sous le patronage de : • • • • • • La Marine nationale L’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (IFREMER) L’Institut de recherche pour le développement (IRD) La Chambre syndicale des Constructeurs de Navires Armateurs de France L’Union des Ports autonomes et des Chambres de Commerce et d’Industrie maritime Sommaire n°464 - février 2003 00 00 00 00 xxx xxx xxx xxx 2 3 La Revue Maritime n°463 Éditorial Sécurité maritime : risque d’overdose ? Sur bien des points « curatifs », le consensus semble acquis en matière d’efficacité de la lutte anti-pollution aprés-naufrage : qu’il s’agisse par exemple de la notion de zones d’accueil de navires en difficulté, ou encore de la nécessité de mise en œuvre de véritables plans de réponse terrestres, ou enfin de l’intérêt d’utiliser à l’avenir de vrais navires dépollueurs comme l’OSH 1 français, encore virtuel mais dont tous les tests effectués par le CEDRE 2 ont démontré l’efficacité 3. Il n’en est à l’évidence pas de même pour ce domaine de la prévention qu’est « la sécurité maritime » proprement dite. Ici ou là des voix, provisoirement timides sauf dans les cénacles professionnels, commencent même à craindre - parfois benoîtement qu’en matière de sécurité le mieux soit l’ennemi du bien 4 (l’accumulation et la complication des précautions constituant en elle-même une source de dangers supplémentaires). Il faut bien reconnaître qu’en certaines circonstances, les faits paraissent justifier ce souci, quelque difficile qu’il soit à exprimer publiquement à l’heure de l’aprés-Prestige. Il suffit de citer par exemple, l’accumulation inutile et redondante des inspections à bord des navires pétroliers en opérations commerciales en escale (alors qu’une inspection bien faite de temps à autre devrait à l’évidence être suffisante et moins peser sur la tension et la fatigue des équipages), ou encore le danger que constitue la tentation - pour compréhensible et justifiée qu’elle soit parfois en certaines circonstances - de légiférer unilatéralement sur la sécurité maritime tant au niveau national que régional. Certains invoqueront aussi, avec quelque raison, le flou d’application de mesures étatiques non seulement unilatérales mais mises en œuvre dans l’urgence et/ou sans suffisamment de coordination internationale, même régionale. D’autres s’attacheront plus aux dangers que recèle l’accumulation parfois irréfléchie de mesures dites « objectives », c’est-à-dire de ces mesures (par exemple les limites d’âge fixées « arbitrairement » pour 1 - Oil Sea Harvester difficilement traduisible en français. Toute interprétation proche de la finalité tombe rapidement dans le scatologique. 2 - Centre de documentation, de recherche et d’expérimentation sur les pollutions accidentelles des eaux. 3 - Voir l’article de présentation de ce projet dans ce numéro. 4 - Voir à ce sujet « Sécurité maritime et tiers-monde : la leçon du Joola » dans ce numéro. 4 Éditorial l’exploitation de tel ou tel type de navire, ou la double-coque comme dessin exclusif pour l’avenir) de ces mesures donc, qui font trop fi du critère primordial de qualité de gestion de l’armateur, c’est-à-dire de celui qui est maître et théoriquement responsable du choix des équipages, de la politique d’entretien, et de celle de l’assurance. Or là aussi il faut savoir reconnaître la valeur fondamentale de certains des arguments invoqués : par exemple le mauvais armateur cessera d’entretenir son/ses navire (s) correctement quelques années avant la fin de vie « légale » des unités concernées, ou encore ne fera pas les suppléments de contrôles de corrosion et à fortiori de dépenses que nécessite la structure complexe des double-coque (même si la mise en œuvre de ces dernières a eu et a des avantages, au-delà même du rajeunissement de la flotte qu’elle a généré). Quand on sait par exemple que n’importe quelle atmosphère humide et salée peut en un an « attaquer » en profondeur tout navire mal construit, mal revêtu, « peint » ou insuffisamment entretenu, le risque est réel que les mauvais opérateurs se retranchent derrière ces règles dites objectives tandis que les bons opérateurs - assimilés aux mauvais par ces mesures objectives - finiront par se décourager et chercher sous d’autres cieux ou dans d’autres activités des conditions d’exercice et de responsabilité plus légitimes et mieux reconnues. Or beaucoup d’entre eux (y compris gérant des navires de plus de quinze ans, il faut avoir l’honnêteté de le dire) jouent un rôle économique utile, voire indispensable, dans des conditions de qualité irréprochable. Sait-on assez que les exemples sont nombreux d’armateurs indépendants totalement fiables ayant commencé à exercer leur métier avec un soin extrême mais sans pouvoir « démarrer » autrement qu’avec de bons navires d’occasion armés par d’excellents équipages ? Sait-on que les mêmes sont bien souvent devenus aujourd’hui les tout meilleurs du monde et exploitent les flottes très récentes qu’ils ont pu constituer étape après étape sans jamais transiger sur la fiabilité ? Autrement dit, il y a bien un risque de « pollution » ou de perversion de marché par le cumul de ces fameuses règles objectives, risque dû aussi très largement au fait que les sanctions des manquements « subjectifs » (qui sont bien souvent des actes délictueux voire criminels) ne sont ni assez lourdes ou sévères, ni surtout ne différencient suffisamment les comportements qui sont complaisants de ceux qui refusent la complaisance. L’important est donc que les organes compétents (dont l’Agence européenne de Sécurité maritime) étudient, en liaison avec les États et les professionnels fiables, en profondeur et vite, mais sans précipitation : - si les excès constatés ci-dessus génèrent plus d’inconvénients et de risques qu’ils n’apportent de sécurité à terme, - s’il est de toutes les façons possible, et vraisemblable, d’en diminuer l’impact, voire de les éviter, - s’il est possible de « équilibrer » ces mesures objectives par une fiabilité accrue des mesures que l’on qualifiera de « subjectives » faute de mieux, 5 La Revue Maritime n°464 Éditorial telles que les contrôles PSC 1, le suivi du code ISM 2, les ESP et CAP schemes 3, la surveillance et la responsabilisation des sociétés de classification etc. toutes procédures ou opérations de suivi du « management » des compagnies ou des navires, en plus, encore une fois, de l’alourdissement harmonisé des sanctions civiles et pénales en cas de contravention. D’accord, me dit-on, mais regardez les États-Unis, ils ne se sont pas posé toutes ces questions, et ça marche ! La preuve ? Depuis l’Oil Pollution Act (OPA 1990), adopté avec une rapidité exemplaire et qui est un « total concept », il n’y a plus eu de grandes marées noires, plus de naufrages prés des côtes. Il n’y a donc qu’à faire de même ! Tout cela est en partie vrai, mais c’est oublier quatre considérations essentielles: 1°) Les navires ne naviguent dans les eaux américaines quasiment que pour charger et/ou décharger dans les ports américains, d’où un contrôle infiniment plus dissuasif, plus général et plus aisé par les autorités américaines, et aussi un régime juridique unique, et contrôlé par eux seuls, facilitant grandement leurs interventions. Pas ou quasiment pas de navires traversant les eaux territoriales ou les zones économiques américaines vers une destination tierce, comme le font à l’inverse en Europe les navires - tel le MT 4 Prestige - chargeant dans un État non-membre de l’Union européenne (UE), et longeant ensuite les côtes des différents pays de l’Union pour passer Gibraltar « à ordres 5 » et décharger finalement leur cargaison en Afrique du Nord ou en Asie. 2°) Les États-Unis sont un État continent fédéral disposant d’une « arme » homogène, les United State Coast Guards, relevant d’un commandement unique, dotés de moyens très puissants, couvrant toutes les côtes du pays, et qui sont aussi bien une force de proposition que d’harmonisation et de coercition, alors que l’UE est à l’heure actuelle un assemblage, même pas encore confédéral de 15 (bientôt 25) États nations voisins devant surmonter leurs divergences naturelles ou historiques pour s’harmoniser, ce qui prend incontestablement du temps dés lors que des transferts de souveraineté sont nécessaires. C’est d’ailleurs à cet égard aussi qu’il faut saluer l’étape importante que constitue la mise en route de l’Agence précitée. 1 - Port State Control ou contrôle par l’État du port. 2 - International Safety Management code. 3 - Enhanced Survey Program & Condition Assessment Program schemes. 4 - Motor tanker. 5 - Signifie que le navire a instruction de l’armateur de naviguer vers un point où il recevra d’autres instructions concernant sa destination finale. 6 Éditorial 3°) Les États-Unis, par l’homogénéité et par la dimension de leur puissance comme par le peu de cas qu’il leur arrive de faire de la communauté internationale - voire des traités qu’ils promeuvent, signent mais ne ratifient pas - pouvaient imposer facilement et sans vergogne n’importe quelle règle au monde entier (en particulier aux armements pétroliers dont aucun ne peut faire l’impasse de travailler pour/avec le plus gros importateur de pétrole du monde). NB : C’est ainsi que, contrairement aux idées reçues, a pu naître un texte confédéral, l’OPA 90, salué dans le monde entier mais en fait assez mal connu, voire totalement déformé par nos médias sur certains points qui sont pourtant à terme d’indéniables faiblesses : confer la décision unilatérale d’un Washington soumis aux lobbies, selon laquelle les compagnies pétrolières affréteuses n’ont plus aucune responsabilité, encore moins une responsabilité illimitée. Oui, pour la première fois depuis des siècles (quelle régression !) la cargaison ne contribue plus au règlement des dommages : Exxon ne serait plus tenu de payer pour le Valdez en Alaska au titre de la loi fédérale, pas plus que n’aurait dû le faire Total après l’Erika (c’est si vrai et si choquant que plusieurs États ont corrigé la loi fédérale sur ce point) ; confer aussi la fameuse responsabilité des armateurs qui contrairement à ce qu’on croit n’est pas du tout automatique ; ou encore la double-coque dont tous les techniciens savent qu’elle est inférieure, en termes de sécurité1, au concept E32 européen, tué dans l’œuf par le législateur américain qui n’en voulait pas, et ce pour des raisons essentiellement politiques. De même les plus vieux simple coque qui naviguent encore aux États-Unis (30 ans et plus !) , et qui ne commenceront à être bannis qu’à partir de 2004 au plus tôt, sont les navires américains, y compris transportant des produits lourds et persistants, etc. 1 - Le problème est traité avec célérité, mais pas à proprement parler avec raison comme le souligne William O’Neil, secrétaire général de l’OMI à Southampton le 24 mars 1997 : « La principale réponse au désastre du pétrolier Exxon Valdez a été de rendre obligatoire la double-coque pour tous les pétroliers alors même que l’accident était le résultat d’une erreur de navigation et qu’une double-coque n’aurait en tout cas probablement pas empêché le pétrole de se répandre. » 2 - Les cinq chantiers navals européens réunis dans Euroyard proposent un pétrolier de sécurité dit Trois E (européen, écologique, économique) à cuves superposées. La cuve inférieure d’un tiers de la hauteur constitue un volume de protection. Les simulations d’accident démontrent la validité du concept meilleur que celui de la double coque. Par ailleurs le chargement hydrostatiquement équilibré est une réponse pour les anciens pétroliers.Il consiste à limiter la hauteur du pétrole dans les cuves à un niveau inférieur à la ligne de flottaison.En cas de perforation de la coque, l’eau de mer plus lourde pénètre dans le navire repoussant le pétrole dans l’espace supérieur des cuves laissé libre. L’OMI homologue en mars 1992 ces procédés au même titre que le double-coque. Après quelques hésitations, les Coast Guards américains disent qu’ils pourraient les accepter au cas par cas. Mais les armateurs craignant à juste titre l’insécurité juridique ne commandent plus que des pétroliers double-coque. 7 La Revue Maritime n°464 EDITORIAL 4°) Enfin les États-Unis ont eu - et c’est tant mieux - de la chance depuis 12 ans. Pas de double coque crevée ou de collision importante (malgré un système portuaire souvent peu performant), mais on ne peut malheureusement en inférer que la mer est domptée et que cette chance perdurera éternellement. Il y aura, hélas, un jour ou l’autre un événement « américain », ou un naufrage de double coque, qui mettra en relief les faiblesses précitées et qui démontrera l’arrogance de quelques appréciations portées aujourd’hui, en même temps que la supériorité de principe de certains mécanismes internationaux de responsabilité par rapport à la loi américaine. oOo Est-ce à dire que l’UE et certains États, dont la France, ont tort de se revêtir de probité candide et de lin blanc, et qu’en fait, s’arrêter en chemin (voire annuler certaines règles récentes) pour éviter certains dangereux ou irritants excès et perversions, serait plus approprié ? Est-ce à dire que le « tout sécuritaire », comme le principe de précaution poussé à l’extrême, est contestable ? Est-ce à dire que le zèle avec lequel se battent les nouveaux convertis ou les responsables souvent soucieux de flatter l’opinion publique est à condamner ? En un mot l’overdose aveugle et contreproductive nous menace-t-elle, et courons nous le risque que le remède devienne un jour pire que le mal 1 ? Répondre à ces questions requiert de regarder avant tout les faits, et d’avoir par rapport à eux l’humilité trop souvent oubliée que devrait toujours inspirer la mer. Or les faits sont clairs : le commerce maritime ne cesse de s’accroître tandis que diminuent drastiquement les volumes de pollution maritime et en particulier les pollutions accidentelles. C’est méconnu et difficile à rappeler après de grandes et scandaleuses catastrophes, mais c’est vrai 1 - Jusqu’en 1995, les accidents de pétroliers transportant du fuel lourd sont très rares. Et pour cause, les raffineries vendent sur place leurs produits à des électriciens locaux. La vague écologiste en Europe du nord conduit à interdire de brûler ce combustible dans les centrales de la zone. Il générait dans les conditions de production des fumées non lavées des années 80 trop d’acides sulfurique et nitrique (d’où les pluies acides). Dorénavant les raffineries de cette zone produisent – malgré la progression des techniques de raffinage vers la conversion profonde – des fuels lourds en excédent pour le marché local. Ils sont exportés à bas prix à des électriciens éloignés par voie maritime. Les transports de fuel lourd produit dans ces conditions dépassent en 2000 les 10 millions de tonnes. Mais tant que du fuel lourd longera nos côtes, le zéro accident ne peut être atteint. Un navire de ce type même neuf et s’il le faut à triple coque peut comme tout autre être la victime d’une collision fatale, voire d’un attentat dûment programmé pour une nuisance maximale par des terroristes au pied marin. Ne faudrait-il pas envisager de revoir les règles d’interdiction de brûler du fuel lourd en Europe du nord en imposant des normes draconiennes de purification des gaz de combustion ? 8 EDITORIAL et c’est bien. C’est même remarquable en cela que l’efficacité de l’existence de règles, même insuffisamment appliquées comme c’est le cas aujourd’hui, est démontrée, tandis qu’est ridiculisée l’attitude des tenants du laisserfaire absolu au nom du sacro-saint principe de liberté des mers. Ainsi en est-il aussi de l’étude approfondie de l’évolution des naufrages et de leurs causes, démontrant bien souvent que c’est le non-respect de règles de construction ou d’exploitation qui est responsable. Il n’en reste pas moins que : - Même si le pire n’est pas toujours sûr, la mer elle-même ne permet pas d’envisager sérieusement le risque zéro, d’où d’ailleurs l’attention permanente et bien plus vigoureuse qui doit être portée aux mesures curatives et de limitation des conséquences d’accidents rappelées au début de cet article. - La litanie est encore trop longue des désastres écologiques et humains causés par les défaillances de notre « système maritime », et particulièrement par les lacunes coupables de nos méthodes d’élaboration, d’application, de contrôle, et de sanctions de nos propres règles (rappelons qu’il s’agit là des quatre domaines d’harmonisation sur lesquels portera la vraie mission de l’Agence européenne). - Les conséquences de ces manquements sont de plus en plus spectaculaires et insupportables pour tous comme pour l’équilibre écologique des zones concernées - Et surtout, il n’y a plus d’excuses à la répétition d’événements douloureux et scandaleux dont la survenance relève de notre volonté. Les pollutions bien sûr, mais aussi et peut-être surtout les morts du Herald of Free Enterprise, du Scandinavian Star, de l’Estonia, de nombreux ferries philippins, du Joola1, sans oublier ceux des nombreux minéraliers qui ont coulé ces dernières années, pour ne rien dire du lourd tribut payé à la mer par les pêcheurs européens2. Tous ces faits sont même si clairs que la réponse aux questions précédentes s’impose. Il paraît évident en effet qu’il vaut mieux dorénavant pêcher par excès que par défaut, et que l’enjeu majeur que constitue l’application universelle et incontournable des règles de sécurité maritime peut « excuser » - au moins pendant un temps et en veillant aux ajustements nécessaires - peut excuser donc, l’émergence intermédiaire de situations frustrantes et parfois injustes pour ceux qui n’ont pas attendu la peur du gendarme pour faire leur devoir. En ce sens il faut se réjouïr, plutôt qu’ergoter, de l’attitude nouvelle des plus hautes autorités françaises et des responsables gouvernementaux de notre pays, quitte bien sûr à apporter toutes critiques constructives permettant de résoudre au mieux telle ou telle difficulté pratique... 1 - Voir à ce sujet « Les causes du naufrage du Joola » dans ce numéro. 2 - Voir à ce sujet « Libres propos sur la pêche maritime » par Georges Tourret dans le numéro 463 de la Revue Maritime. 9 La Revue Maritime n°464 EDITORIAL Certes on objectera que la reconnaissance des bons n’est pas assez au rendez-vous (la fameuse question des règles objectives !), mais on peut répondre : - que cela vaut le coup si la victoire contre les comportements de complaisance est à ce prix - et qu’à long terme ce sont bien les bons qui récolteront les fruits de cette victoire car a) ils ont par définition une longueur d’avance sur le plan de la qualité et b) ils verront ainsi disparaître peu à peu la concurrence déloyale qui est leur principale ennemie à tous égards, y compris sur le plan économique. Et puis il y a l’humilité face à la mer, qui nous enseigne que rien n’est jamais gagné, mais aussi que la mer elle-même se respecte et ne se défie pas impunément. S’il en était besoin, on pourrait sur ce point se référer à l’exemplarité négative de l’aventure des multicoques pendant la dernière Course du Rhum (15 trimarans cassés sur 18). De fait malgré les prouesses technologiques des architectes et constructeurs, malgré le courage admirable des navigateurs, grands sportifs de l’extrême, malgré l’apport indispensable de ceux qui ont la foi permettant de repousser toujours les limites du possible, malgré les retombées positives que nous tous retirerons un jour - y compris sur le plan de la sécurité - des avancées de toutes sortes ainsi permises, il y a eu dans cette course une grande leçon qui doit nous faire réfléchir et agir. Et cette leçon, au moins pour l’Institut Français de la Mer, est toute simple : le vrai marin, le marin « humble » soucieux avant tout de sécurité, celui dont la recherche de l’exploit n’est pas l’objectif premier, ne doit prendre et faire prendre la mer que sur des navires aptes à traverser les imprévus et les tempêtes.... avec un bon équipage et un bon « pied de pilote ». Tout le reste peut être merveilleux et digne d’admiration, mais n’a en fait rien à voir avec les questions soulevées par la sécurité maritime immédiate et par la protection de notre environnement, qui constituent un tout sur lequel il va enfin devenir impossible de transiger. e XXI lon u o T J o u r n é e s Nationales de la Mer 7 et 8 n e ov m b re 2 0 02 avec le concours de l’Institut Méditerranéen des Transports Maritimes (IMTM) • Comité de parrainage • • Conseil régional Provence-Alpes - Côtes-d’Azur • Conseil Général du Var • Ville de Toulon • Chambre Régionale de Commerce et d’industrie de Provence-Alpes - Côtes-d’Azur, Corse • Chambre de Commerce et d’Industrie du Var • Marine nationale (Préfecture maritime de Méditerranée INSTITUT et Centre d’Enseignement Supérieur de la Marine) • Direction des Transports Maritimes, des Ports et du Littoral • FRANÇAIS Direction des Affaires Maritimes et des Gens de la Mer • DE LA MER • Armateurs de France • Barry Rogliano Salles (BRS) • Brittany Ferries • Bureau Véritas • Cap-Marine • Cetam • Chambre syndicale des Constructeurs de navires • CMA- PUB ? CGM • Corsica Ferries • Emeraude Lines • Festival Croisières • Fouquet-Sacop • Gazocéan Armement • Green Tankers • Groupama-transport • Louis Dreyfus Armateur • Mafret • Méridionale de Navigation • Orrick • Pétromarine • Port ifm.free.fr autonome du Havre • Seafrance • SNCM • SNSM • Socatra • Sudcargos • 10 Les XXIe journées nationales de la mer : Dossier Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer Les XXIe journées nationales de la Mer Intervention du Secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer Francis Vallat Dominique Bussereau, la première fois que je l’ai rencontré dans le cadre de nos fonctions respectives, m’a dit : « J’ai trois raison de m’intéresser à la mer, la premiére est que je suis un homme libre, “Homme libre tu chériras la mer”, la deuxième est que je suis un homme politique charentaismaritime et la troisième raison est que je suis en charge de la mer et que je compte bien mettre ma passion au service ce ce dossier, malgré mes antériorités passionnées pour le ferroviaire et l’aérien ». Or Dominique Bussereau a mis au point une méthode : 1- affirmer une volonté politique forte pour aider à ce que la politique choisie par le gouvernement se fasse, 2- mettre en place une structure forte au niveau de son cabinet pour répondre au défi de la situation maritime française. Ce sont ces raisons qui, entre autres, font que j’ai intitulé l’éditorial du dernier numéro de la Revue Maritime qui se trouve dans vos dossiers : « Lueurs dans la nuit ». En fait, nous comptons sur vous Monsieur le Ministre pour que le travail fait rue du Bac ne soit pas défait ailleurs et vous pouvez compter sur nous pour que dans les combats que vous menez, vous soyez plus qu’accompagné. D’ailleurs, comme vous le savez un certain nombres d’institutions présentes ici, sont en train de travailler pour vous aider à faire entrer dans les faits un certain nombre de mesures que vous avez annoncées. Le Président de la République avait pris des engagements lors de la campagne pour l’élection présidentielle, rappelés d’ailleurs dans votre Revue Maritime, qui ont été relayés par la majorité parlementaire. Nous pensons qu’un grand pays moderne comme la France en plein cœur de la construction européenne et de l’élargissement de l’Europe doit avoir une vraie politique de la mer. C’est une nécessité absolue pour les pouvoirs publics. Ceux-ci ne sont pas seuls, il y a les entreprises du monde maritime, l’action des ports et bien d’autres aspects très importants. Je ne vais pas vous développer un programme, mais vous dire sur quoi nous travaillions depuis six mois et ce que le Premier Ministre a défini clairement en recevant les Armateurs de France et en me demandant de lire un message, lors de leur dîner annuel, sur ce qu’il souhaitait être la politique maritime de la France. Notre région Poitou-Charentes est une région avec une façade maritime, avec des ports : La Rochelle, Rochefort, Tonnay-Charente. Le Premier Ministre a toujours manifesté dans ses fonctions de président de région un intérêt important pour les problèmes portuaires et maritimes. En ce qui concerne le cabotage, le gouvernement voit bien les potentialités qu’il représente. D’ailleurs des événements d’actualité nous le démontrent, nous ne sommes pas très loin de Bordeaux et quand il s’est agi de construire l’Airbus 380 et d’apporter des morceaux d’avions d’Allemagne, d’Espagne et de Grande-Bretagne pour construire le plus gros avion du monde à Toulouse, c’est la voie maritime qui a été choisie. On sait bien qu’il y a là des possibilités et des priorités. Plusieurs arcs nous intéressent : l’arc méditerranéen où nous sommes et l’arc atlantique d’où je viens. L’arc méditerranéen est un enjeu important pour la France, l’Espagne et l’Italie et vous savez que la Grèce présidera l’Union européenne dans deux mois. Nous avons bien vu lors d’un entretien avec notre homologue grec et Gilles de Robien que la Grèce souhaitait avoir une présidence très maritime et s’occuper de ces questions et notamment des possibilités de développement du cabotage. En outre, le gouvernement soutiendra naturellement toutes les discussions bilatérales qui peuvent exister. Nous y travaillons déjà avec mes collègues italien et espagnol. Nous instruirons aussi les dossiers entre ports français et italiens et nous nous efforcerons ensemble de diminuer les procédures administratives trop lourdes qui souvent s’opposent au développement du cabotage. Vous avez, 12 13 Dominique Bussereau La Revue Maritime n°464 Les XXIe journées nationales de la mer : Les XXIe journées nationales de la mer : Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer je le sais, évoqué le projet de cabotage entre Fos et Savone. Cette idée de route maritime côtière sur la façade méditerranéenne a notre agrément et aura le moment venu, si cela est nécessaire, notre soutien. Un mot sur l’arc atlantique. Hier j’étais à Poitiers à la demande du Président de la République et du Premier Ministre pour réconforter les familles et les blessés du fantastique carambolage autoroutier, sanctionné par un bilan particulièrement dramatique. Élu de cette région, je vois bien le terrible « flot de camions » qui remonte d’Espagne et du Portugal par l’autoroute A 10 ou la RN 10 et se dirige soit vers la France, soit - le plus souvent d’ailleurs - vers les ports de l’Europe du nord. Tout cela est absurde. Il y a de la place sur la route, mais à côté il y a le ferroviaire et il convient de développer également le transport par la voie maritime. Je ne comprends pas qu’entre l’Espagne et l’Europe du nord nous n’ayons pas plus de routes maritimes côtières avec liaisons sur les lignes maritimes transcontinentales ou bien sur les lignes triangulaires avec les pays insulaires. C’est vrai que la façade atlantique n’a pas toujours la démographie de la façade méditerranéenne et que la proximité n’est pas la même. Cela veut peut-être dire qu’en termes de rentabilité, ces liaisons apparaissent comme moins rentables. Mais nous devons avoir dans ce domaine une politique particulièrement volontariste. Les collectivités territoriales doivent s’impliquer. Il faut que nous bâtissions un véritable réseau de villes portuaires autour des liaisons maritimes. Mais, pour ce faire il faut entrer dans une logique de « subventions intelligentes », c’est-à-dire qui soient d’une durée correcte et cessent quand la ligne a trouvé son équilibre économique dans un délai raisonnable. Nous devons avoir une réflexion sur la capacité des collectivités à intervenir, sur la durée de cette intervention, sur la pérennité de cette intervention, c’est là tout le travail du sénateur Henri de Richemont. Mais si l’on veut que le système fonctionne, on sait déjà qu’il faut une synergie des acteurs professionnels, armateurs, logisticiens, transporteurs routiers et pourquoi pas des sociétés d’autoroutes et des collectivités de façon à parvenir à une situation qui permette de dégager un profit normal pour des entreprises. Il ne faut évidemment pas en effet que le cabotage sur ce type de liaison, je pense à l’arc atlantique en particulier, soit subventionné à vie. Ne pas en faire une condition serait montrer que ce système n’a pas de pertinence économique et je pense que ce n’est pas ce que vous souhaitez. En matière d’aides publiques, il existe un système d’assistance au lancement de lignes mis en place par l’État en complément des aides européennes. Des crédits, certes modestes, sont inscrits au budget 2003. Nous allons faire en sorte que dans le budget 2003, les aides au transport combiné ne soient plus uniquement distribuées à la SNCF. Ce n’est pas pour être désagréable ou négatif vis-à-vis de cette dernière, mais bien pour permettre que le transport combiné se développe. Pour cela nous allons faire en sorte que les aides au transport combiné profitent à tout le monde dont la voie maritime naturellement sans aller au-delà des règles communautaires qui sont des règles contraignantes. De fait, il faut à mes yeux se fixer pour objectif, même si c’est très optimiste, pour les trafics intracommunautaires, que les coûts du maritime soient similaires voire plus intéressants que ceux des autres modes de transport. Sachant évidemment que ce coût comprend non seulement le transport mais aussi ce qui vient en aval et en amont, les formalités administratives - qu’il faut simplifier pour les marchandises intracommunautaires à l’arrivée au port, les aspects de responsabilité spécifique au transport, etc. Nous comptons beaucoup sur le travail de la mission Richemont pour nous bâtir dans ces domaines des propositions, entendre l’ensemble des professionnels, des collectivités et nous apporter des idées nouvelles pour développer le cabotage. Dans la mission que le Premier Ministre a confiée à Henri de Richemont, il y a en effet en premier lieu un travail d’analyse à faire sur le cabotage, travail qui a déjà été réalisé en grande partie par M Liberti, député de l’Hérault, mais qu’il convient maintenant d’actualiser pour en sortir des propositions innovantes. Mais il y a aussi dans cette « mission Richemont », la tâche très importante de définition de propositions pratiques, pragmatiques, concrètes et efficaces sur ce qui devrait être un véritable pavillon bis, ceci en prolongeant et en sortant de ce qui est engagé depuis 1987 avec le registre des TAAF et quelques autres registres des Territoires d’outre-mer, pour aboutir à un véritable pavillon bis à la Française, qui soit acceptable socialement. Cela nécessite à l’évidence un vrai dialogue social et devra permettre à la marine marchande française de sortir de cette affreuse 29e place mondiale à laquelle un pays comme la France ne peut pas se résoudre. Le gouvernement, avec le concours d’Henri de Richemont, de Jean-Yves Besselat et de tous nos collègues qui travaillent sur ce sujet, va donc essayer d’apporter des avancées significatives dans les domaines du cabotage et du second pavillon. Mais il convient aussi que la France ait des armements. Pour ce faire, le gouvernement met en œuvre l’engagement majeur du Président de la République qu’est l’instauration en 2003 de la taxe au tonnage. Nous sommes encore en discussion avec la profession pour définir son fonctionnement qui apparaîtra dans le collectif de fin d’année. Nous allons également mettre en œuvre une mesure de simplification qui consiste à passer d’une mesure de remboursement de la taxe professionnelle à un dégrèvement, avec simultanément un remboursement total de la part patronale des cotisations d’assurance maladie et vieillesse, ainsi qu’un remboursement partiel de la part patronale des ASSEDIC et des cotisations familiales. Bien sûr, les armateurs présents et je le lis sur leurs visages, attendent en outre que soient tenues les promesses particulières du gouvernement précédent concernant certains remboursements spécifiques (promesses qui n’engageaient que ceux qui les faisaient, puisqu’ils promettaient d’un côté et de l’autre ne mettaient rien dans la loi de finances, ce qui permet de beaux discours et peu de réalisations). Le gouvernement actuel a en effet 14 15 1 - Ces dispositions existent sur le trafic transmanche. peuvent-elles s’appliquer à l’ensemble du trafic intracommunautaire ? Ndlr. La Revue Maritime n°464 Les XXIe journées nationales de la mer : Les XXIe journées nationales de la mer : Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer trouvé sur sa feuille de route des engagements mais aucun crédit correspondant. À l’heure qu’il est, nous n’avons toujours pas pu dégager les moyens budgétaires, mais nous savons l’importance pour la profession de tout cela. Nous continuons donc les discussions internes pour voir si nous pouvons tenir au moins partiellement ces « engagements ». Sachez que ce n’est pas facile. Je voudrais dire enfin qu’il est évident que le « second pavillon » sur lequel nous travaillons doit également aider le cabotage et que donc nous lions de manière forte cabotage et pavillon. Un mot sur les ports maintenant, qui ont une très grande importance pour moi ! Nos trafics se maintiennent, avec une progression des marchandises diverses et des conteneurs, mais en regardant de plus près nous constatons que nos taux de progression sont inférieurs à ceux de nos concurrents. Nous voyons bien qu’en termes de compétitivité, de réactivité, et de comportement entrepreneurial, nous pourrions mieux faire. Des réflexions sont en cours, tel le rapport Smagghe, actuellement en débat et à l’étude dans les places portuaires. Par ailleurs, en recevant cette semaine la fédération des dockers, je n’ai pas senti de leur part un blocage complet, il y a donc fort probablement possibilité de faire évoluer les choses. C’est ce que nous voudrions faire rapidement en utilisant le levier de la décentralisation pour faire évoluer nos ports. Dans le cadre de cette décentralisation, actuellement en cours de discussion, nous souhaitons en effet donner la responsabilité des ports d’intérêt nationaux aux collectivités qui le souhaiteront et cela sous forme expérimentale avec tous les montages possibles (une ou deux régions, un ou deux départements, les communautés de communes avec une région ou/et un département, etc.). À l’issue de cette expérimentation, il y aura deux ouvertures possibles, soit un bon modèle qui sera le modèle national unique, soit plusieurs modèles. En ce qui concerne les ports autonomes, j’ai la ferme intention que cela bouge, peut être en remplaçant la structure des ports autonomes par des sociétés à capitaux publics. Le gouvernement ne se satisfait en tout cas pas de la situation actuelle. Ceci se fera soit de la même manière expérimentale que les ports d’intérêt général, soit d’une autre manière à laquelle nous travaillons actuellement, mais ce qui est sûr est que nous ferons bouger la mécanique des ports autonomes. Mon ami et voisin Alain Juppé a une très belle expression quand il parle du port de Bordeaux : « le port de Bordeaux, c’est formidable, mais je le trouve vraiment trop autonome ». Vous sentez bien nos préoccupations : le cabotage, le pavillon national, le second pavillon, la modernisation des ports, tout cela dans le dialogue social, car il ne s’agit pas d’imposer mais de convaincre, de faire bouger notre monde maritime dans ce qui est du ressort de l’État. En ce qui concerne la sécurité maritime, la France n’est pas très bonne en la matière. Nous sommes loin du taux de contrôle de 25 % des navires dans nos ports. Pendant que nous recrutons et formons et que nous continuons de recruter et de former de nouveaux inspecteurs, nous devons pallier le manque de bras et de têtes pour ses missions. Aussi le gouvernement a décidé, à partir du 1er janvier, de recruter, ce que la presse a parfois appelé des papys.. Pour parler plus sérieusement, il s’agit de jeunes anciens officiers navigants, de capitaines, en fait de tous ceux et toutes celles qui connaissent vraiment le fonctionnement d’un bateau et qui sont capables, forts de leur expérience, de voir tout de suite ce qu’il faut voir et ce que ne verront pas aussi bien et aussi rapidement les inspecteurs plus jeunes tout juste sortis de l’école. Je voudrais à cet égard remercier Francis Vallat et l’IFM ainsi que l’ensemble de ceux qui nous aident pour recruter celles et ceux que nous recherchons pour assurer ces missions de contrôle et je lance un appel pour que l’ensemble de la profession se tourne vers le ministère de la mer pour continuer de nous faire des propositions de recrutement. Pour résumer, nous voulons que cela bouge. On ne peut pas juger un gouvernement au bout de six mois. L’État a dans le domaine de la mer des missions régaliennes qu’il doit assurer et qu’il assure sous la coordination du secrétaire général de la Mer. C’est donc un travail d’hommes et de femmes de toute nature, un travail qui doit réunir les représentants de l’État, des armements, de l’ensemble des professions liées à la mer, de l’ensemble des professions portuaires et de leurs partenaires et… des collectivités qui sont prêtes à bouger. Tout simplement car quand les choses sont gérées de près, les élus sont plus attentifs et plus responsables que lorsque la gestion se fait de loin. 16 17 Francis Vallat Merci Monsieur le Ministre, votre style vigoureux et votre ton correspondent bien au fond de l’action que vous voulez mener. Permettez-moi de revenir sur les points forts que j’ai retenus de votre intervention : - cabotage : un soutien marqué des initiatives que vous jugerez intelligentes, dès lors que l’intérêt général est clairement impliqué, je pense au soutien que vous avez annoncé de la ligne Fos – Savone. - notion de subvention intelligente : c’est-à-dire une aide qui pourrait être sur la durée, importante en montant sur de bons projets et pourquoi pas assortie d’une clause de retour à bonne fortune. - pavillon : volonté de quitter la 29e place. Nous l’avions entendu du gouvernement antérieur, mais vous commencez à le concrétiser d’une part, par la mise en œuvre de la taxe au tonnage d’autre part par la mission Richemont. En ce qui concerne le pavillon, permettez-moi de faire une petite correction de sémantique, ce n’est pas un nouveau et vrai pavillon bis qu’il faut, mais disons, un pavillon français de statut européen - expérimentation portuaire : souci convaincant d’être pragmatique et résolu tant pour les ports d’intérêt national que pour les ports autonomes. - enfin en ce qui concerne la sécurité dans les ports, je tiens à vous dire La Revue Maritime n°464 Les XXIe journées nationales de la mer : Les XXIe journées nationales de la mer : Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer Intervention du secrétaire d’État aux Transports, et à la Mer que depuis la publication de notre communiqué IFM, j’envoie chaque jour à vos services des candidatures absolument excellentes de marins qualifiés qui sont prêts à travailler pour vous aider sous la houlette de l’administration compétente. disant lobby pétrolier, la vérité est que la force de la route est son extraordinaire souplesse et sa capacité d’aller de point en point. C’est d’abord pour cela que dans un pays comme la France, la route représente 80 % du transport. Or la route est la plus pratique parce que les autres modes de transport n’ont pas toujours eu la bonne réponse. Ainsi s’agissant du fret ferroviaire, quand les entreprises demandent à la SNCF des acheminements, elle n’a dans certains cas, ni la capacité pour le faire, ni la capacité pour répondre aux besoins, ni les locomotives pour tirer les trains, ni les conducteurs pour conduire les locomotives, ni les wagons pour le transport. Nous sommes devant une entreprise qui a une demande de clients et qui leur dit, je ne peux pas vous transporter dans les délais. Quand elle le fait, le fret est maltraité. Au niveau maritime, la situation est à l’heure actuelle tout aussi confuse et bloquée. C’est l’organisation globale du transport, avec des problèmes de régularité, de rentabilité, qui pose de réels problèmes aux entreprises. La route a su s’affirmer, mais il y a aussi des avantages dans l’offre d’autres modes de transport, et je souhaite que dans l’Europe que nous sommes en train de construire, nous ayons un meilleur équilibre. La route sera certainement toujours le mode de transport le plus pratique, le plus rapide et probablement le moins cher. On aura toujours besoin de la route pour les acheminements. Mais à partir du moment où l’Europe s’élargit, en particulier, vers l’est, nous entrons dans le domaine de la grande distance. Et dans la grande distance, les modes de transport plus lourds que sont le mode de transport maritime, le fluviomaritime, le fluvial et le ferroviaire ont de nouvelles pertinences. C’est le moment pour le maritime en trafic intracommunautaire de prendre des parts de marché. Dominique Bussereau (sur différents points ou questions posées pendant le débat qui a suivi l’intervention du ministre) Sur le Canal Rhin-Rhône : Concernant sa construction, le gouvernement s’est trouvé à sa prise de fonction devant un amoncellement de projets, preuves de la santé intellectuelle du gouvernement précédent et des élus. Des projets ferroviaires fret, de nouvelles autoroutes, la poursuite de projets portuaires et de projets fluviaux, etc. Ce qui nous a conduit à demander un audit budgétaire et financier à l’inspection générale des finances et au conseil général des ponts et chaussés sur leur pertinence. À l’issue de ce travail, avec la DATAR, nous allons savoir : - si ces projets sont bons pour l’aménagement du territoire et pour la France ; - si ces projets ont une dimension européenne et prennent bien en compte les grands flux européens ; - si ces projets ont bien une dimension intermodale, c’est-à-dire s’articulent bien avec les autres modes de transport. À l’issue de ce travail, le gouvernement prendra ses responsabilités en présentant une liste de travaux qui sera soumise au vote du Parlement pour que les décisions soient prises dans la plus grande transparence. Nous n’avons à ce jour pas retenu Rhin Rhône, mais un projet qui correspond mieux à nos critères : Seine Nord, c’est-à-dire le canal à grand gabarit entre l’Île-de-France et les réseaux fluviaux du nord. Cela ne veut pas dire que Rhin Rhône ne nous intéresse pas. Nous pensons seulement que plutôt que de repartir dans un projet pharaonique Rhin Rhône, serpent de mer depuis plus de 20 ans, il convient d'essayer de voir comment des aménagements plus réalistes des voies existantes permettraient de mieux relier le bassin rhodanien à l’est de la France et de l’Europe. Sur l’intermodalité et la prédominance de la route : dans l’Europe qui est en train de se bâtir, l’harmonisation sociale 2 est au cœur des choses et cela concerne les modes de transport et le transport routier en particulier. Quant à la prédominance du transport routier qui serait soutenu par un soi 1 - L’harmonisation des conditions de travail est en cours, mais pas les salaires qui sont du ressort des États. Avant fin 2003, les conventions internationales du travail devraient être intégrée dans le droit communautaire. Remarque de Fortis Karamitsos. 18 19 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer Monsieur le Préfet du Var, Amiral, Mesdames et Messieurs les élus, Messieurs les officiers généraux, Mon cher Président, Mesdames et Messieurs, Allocution d’accueil et d’ouverture Contre-amiral (2S) Gérard Gachot Conseiller municipal de Toulon, adjoint au maire à la mer la çais de ut fran L’Instit anise Mer org RNÉES R Ie JOU X X S LA ME LE ES DE L A N O NATI eu ront li qui au LON à TOU 02 mbre 20 8 nove ndredi 7 et ve TUNE Cédex is NEP Toulon au Pala 01 - 83 070 P 12 : gne - B a es B discutés e aités et Place d ront tr i les jeud ts mais fféren èmes di Deux th LES X e XI iels se essent JNM jeudi 7 novem br e TOULO E: ARITIM AGE M ope ? ABOT ur l’Eur - LE C ation po e oblig dent Une ar : ERCE COMM TS DE T POR E E T ns . ientatio de la France - FLOT ières or ent m em Les pr uverne eau go du nouv chure Cette bro c l’aide lisée ave a été réa du CESM Le cab otage m une ar aritim dente e obligati on pou Tout le m r s. on ion l’ de est Europe eserct une nous rem nécessité conscient,enf e) que la Marin in ! qu , un eur de Supéri ement d’Enseign (Centre e vraie e Certain solution le transport m s s’e ariti d’avenir de l’env n réjouissent, pour l’E me à courte di iro les prof es urope… stance ou d’autres nnement ou ceux qu sionnels du m n’accept TMCD ariti e concer s’y oppo ent l’idé ne la sé me bien sûr, m e se curité de ais auss savent pa r publiquemen de cette « cont i les rain s t s dans ce très bien ce qu ne serait pas ra te » que parc personnes et de défenseurs e qu’ils qu’ils sa ’ils doive isonnab s bi en se s vent être le, ou m etc. ; nt renden Et pour t al une évol souhaiter ou ta redouter compris. Enfin comptes que ution in le cabo nt, malgré cette pour leu éluctabl beauco tage mar up prise de e dictée rs iti du doss par l’int intérêts particu ne conscien ier inqu me doit impé ér lie ce êt rs gé gé ra iè questio néral… ns sans tent, frustrent tivement se dé nérale - enthou répons , désarç velopp Les déci es : er, les re siaste ou subi onnent de e , tandis ta de visio urs, au niveau que sem rds et la com - que n de plex blent se des obje ? Sont-ils à la ha l’État ou de l’U multiplie ité ct uteur du E comm r les l’Union ifs affichés ta e à celu défi ? Y-a nt (d i publique ont la France par l’Europe -t-il manque d’ des entreprise s, co am au manquen pour qu mmunau bition, y premie les proj ’el t-i r ta le co ls ch ire jo m ef ue ets pr qu ) faut-il po les plus porte son rôle mobilis ? Comment fa e par les État is au niveau s-membr ut-il utili urs ateu ur « aide es de mieux ser ou r » ? qu ? Comment, co r et multiplic placé(s) orienter at el m eu (s bi r ) en ? m pour fai Co l’aide politique re boug étier(s) dans , quand et pend mment sélec europé la er toute tio ant com enne ? Or l’urg la chaîn chaîne de tra bien de nner en e elle-m ns ême ? Pe ports est (son temps Polo ou ce commande ut-il y av autre ch , prolon t) le(s) oir une et quan ge os véritable titativem e, il faut main r le temps de s tenant ent ! faire de rapports sera s choix, it décider irresponsable . et agir, qualitativ Marco ement 20 N 2002 C’est un honneur pour la ville de Toulon d’accueillir les journées nationales de l’IFM et Hubert Falco, notre Maire, aurait été heureux de vous le dire lui-même, d’autant que jusqu’au dernier moment il comptait être parmi nous pour inaugurer cet événement, mais des obligations ministérielles de dernière minute l’ont retenu dans la capitale. Il espère cependant pouvoir nous rejoindre dans le courant de la matinée. C’est donc en son nom que j’accueille ce matin l’aréopage particulièrement relevé que vous constituez et que je vous souhaite la bienvenue dans notre bonne ville de Toulon. Je tiens tout particulièrement à remercier l’lFM et son Président M. Francis Vallat, d’avoir fait le choix de Toulon pour la tenue de ces journées, choix qui nous honore et correspond parfaitement à notre engagement municipal. Le marin que j’ai été, et que je reste, est tout spécialement sensible à l’importance que revêt la réflexion que nous allons conduire ensemble pendant ces deux journées. Et j’y suis d’autant plus sensible qu’en tant qu’adjoint au maire, j’ai pour mission de conduire au sein de la municipalité la délégation à la Mer. Cette mer qui, pour citer M. Falco “ constitue une richesse incomparable pour notre Région et pour le Var en particulier ” et sur laquelle il fonde largement l’espoir de renouveau de sa Ville à laquelle il souhaite redonner toute sa vocation maritime, et ce dans le cadre de la jeune communauté d’agglomérations qu’il préside. Ouvrir Toulon sur la mer c’est tout d’abord protéger et valoriser le formidable atout que constitue la Méditerranée, avec ses retombées touristiques, patrimoniales, environnementales. C’est aussi tout mettre en œuvre pour rechercher, avec une judicieuse exploitation du potentiel maritime, les moyens d’assurer le développement économique d’un territoire qui regarde vers la mer. Parmi les moteurs identifiés de ce développement, j’en retiendrai deux qui me paraissent primordiaux : la réaffirmation de la vocation portuaire de Toulon et de sa rade ; le développement des transports maritimes. Je ne m’attarderai pas sur nos activités portuaires qui doivent évoluer, dans un souci de cohérence et de complémentarité, entre le trafic de fret, qui doit utiliser à plein les ressources que lui confère la situation géographique de Toulon en Méditerranée, l’accueil des paquebots de croisière - en croissance rapide - et celui des car ferries, également en forte augmentation grâce à l’investissement de l’opérateur privé Corsica Ferries. 21 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe Les transports maritimes, et notamment le cabotage auquel nous allons plus particulièrement consacrer notre réflexion, sont tout à la fois un sujet d’inquiétude et d’espoir. Une inquiétude nourrie par l’apathie traditionnelle de notre opinion publique vis-à-vis de la chose maritime et le cabotage en particulier, source de nombreux travaux et réflexions, souvent de qualité, mais qui ont du mal à se concrétiser. Mais c’est aussi un espoir fondé sur une prise de conscience nationale de la chance qu’a notre pays de disposer d’une façade maritime exceptionnelle face au développement constant des échanges internationaux. Le cabotage maritime nous paraît une alternative sûre et économe en infrastructures, face à la saturation des transports routiers et dans la perspective d’un doublement des échanges européens dans les 20 années à venir. Mais le cabotage traîne une image de mode de transport suranné, conforté par le petit nombre et la vétusté des navires qui le pratiquent encore sur nos côtes. Pourtant il présente nombre d’avantages : adaptabilité des petites structures portuaires, souplesse d’adaptation, productivité accrue (les coûts ont baissé de 30 % en 10 ans), automanutention, etc. Il est par ailleurs l’occasion de redynamiser les ports secondaires tout en présentant une alternative crédible à un transport routier saturé et polluant, utilisant un réseau routier littoral inadapté et soumis aux aléas d’une circulation souvent difficile. La complémentarité avec le mode ferroviaire doit être recherchée et développée, comme le fait d’ailleurs avec efficacité et conviction le port de Marseille. Le micro-cabotage, en particulier la desserte maritime des communes littorales, mérite également d’être pris en compte dans la réflexion, en s’appuyant sur le maillage portuaire. Il constitue un palliatif intéressant des difficultés de circulation en bord de mer, notamment en été. Les problèmes de météo sont certes importants, mais ne paraissent pas insurmontables, à condition de choisir un type de bateau adapté. Je ne doute pas que durant ces journées une contribution active sera apportée au traitement des préoccupations que je n’ai fait qu’effleurer et que s’ouvriront de réelles perspectives d’avenir. Pour enrichir votre réflexion vous aurez également le privilège d’entendre M. Dominique Bussereau, Secrétaire d’État aux Transports et à la Mer, vous présenter les nouvelles orientations maritimes du gouvernement français. J’emprunterai, Si vous le permettez, ma conclusion à notre Président, M. Jacques Chirac, qui déclarait, il y a quelques mois, dans La Revue Maritime de Juillet 2002 : “ La France est une grande nation maritime ouverte sur le monde grâce à ses façades maritimes en Métropole et Outre-Mer. Elle a une vocation maritime, qu’elle doit défendre et mieux promouvoir, car c’est une source de richesse et d’emplois ”. Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter de fructueux travaux, un bon congrès et un excellent séjour à Toulon. Je vous remercie. 22 Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer Introduction aux XXIe journées nationales de la Mer Francis Vallat Président de l’Institut Français de la Mer Monsieur le maire, Monsieur le Préfet maritime Mesdames, messieurs les parlementaires, Mesdames, messieurs, Merci ! Merci d’être là pour ces XXIe Journées Nationales de la Mer… Avant toute chose, au-delà des phrases rituelles et protocolaires, j’adresse ce grand merci du fond du cœur plus particulièrement à plusieurs d’entre vous : merci d’abord à nos parrains, à nos sponsors du comité de parrainage, non seulement pour l’aide matérielle qu’ils apportent, mais pour la confiance qu’ils ont bien voulu nous faire, parrains tant publics que privés dont la liste figure sur les affiches disposées dans le hall et dans cette salle du palais Neptune. Et puis ce colloque matériellement est une grosse machine et cette machine n’aurait pas fonctionné sans l’engagement de la ville de Toulon, du département du Var, de la région Provence Alpes Côte d’Azur, des chambres de commerce et d’industrie et sans l’apport déterminant des nombreuses sociétés maritimes qui ont soutenu ces XXIe Journées Nationales de la Mer sans barguigner. Oui, le monde maritime est prêt à bouger, à vouloir que ça bouge, et je pense que c’est ce que prouve aussi cet engagement de nos parrains ! Un salut et un remerciement particuliers au service maritime de la chambre de commerce et d’industrie du Var dont le dévouement et l’efficacité ont été précieux pour le comité de l’Institut Français de la Mer du Var et naturellement un merci très amical et chaleureux pour le travail accompli avec nous par ce comité de Toulon sous la houlette du commandant Dupuis et du professeur Wolff (ceci dans la grande tradition des précédentes Journées Nationales de la Mer de Toulon, naguère placées sous les auspices de Lucien Grandmanche, dont je salue d’ailleurs la présence). Voilà une tradition toulonnaise bien respectée. Merci encore de leur présence (dans le désordre, l’Institut Français de la Mer n’est pas le roi du protocole) à Jean-René Garnier, Secrétaire Général de la Mer, dont c’est l’une des premières sorties dans le monde 23 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe une ardente obligation pour l’Europe maritime, au conseiller technique de Dominique Bussereau, François Marendet, à Henri de Richemont, sénateur et parlementaire en mission, à Jean-Yves Besselat, député rapporteur du budget de la mer, dont les déclarations récentes tout azimut font chaud au cœur. Merci à mon ami Philippe Louis-Dreyfus, qui a su maintenir avant tout entre nous et nos organisations, l’esprit de coopération si indispensable pour faire bouger un monde maritime qui a besoin au moins de l’union de ses acteurs professionnels. Merci à cet autre ami qu’est Marc Chevallier, vice-président du comité de l’Institut Français de la Mer du Languedoc-Roussillon, voisin de Toulon, armateur qui a souffert pour faire bouger le cabotage en Méditerranée et dont la présence est à son image, courageuse et rassurante sur le sens du combat à mener. Merci à tous les confrères et acteurs du monde maritime, Fernand Bozzoni, Alain Wills et beaucoup d’autres qui ont répondu présent. Enfin merci à notre président fondateur Jean Morin, jamais en retard d’un soutien juvénile pour faire avancer la France maritime. Pourquoi Toulon ? D’abord, il faut bien le dire, parce que les Toulonnais l’ont vraiment voulu, ensuite parce que le comité de l’Institut Français de la Mer du Var fête son vingtième anniversaire (oui, il y a 20 ans que Paul Rielle, bientôt centenaire, créait notre comité local entre de brillantes analyses de la chose maritime), ensuite parce que Toulon a des atouts spécifiques pour le cabotage et a souvent illustré le nécessaire mariage des marines nationale et marchande, ce qui est important symboliquement et pratiquement. Et d’ailleurs si Toulon est cher à mon cœur, Monsieur le Préfet maritime (et cela a bien joué un peu dans notre choix !) c’est parce que, c’est ici qu’était basé le Port-Vendres premier pétrolier ravitailleur civil intégré dans l’escadre, qui appartenait à l’armement Soflumar que j’avais l’honneur de présider. C’est aussi parce que c’est d’ici que partaient, que sont partis les navires de la marine marchande dont le Dock Express France (du même armement Soflumar) pour l’opération Daguet. Mais le sujet du jour est le cabotage, un cabotage que tout le monde veut ou pour certains fait semblant de vouloir (mais ce n’est pas grave car comme le disait La Rochefoucault « l’hypocrisie est un hommage que le vice rend à la vertu. ») Oui, tout le monde veut que le cabotage s’impose. Je voudrais me référer à cet égard aux quatre pages extrêmement brillantes à mon avis tant au niveau de la problématique que des propositions de solutions, éditées récemment par « Armateurs de France ». Or malgré tout, il s’agit d’un cabotage pour lequel le discours devient dramatiquement incantatoire et insuffisant. Il faut maintenant entrer dans le concret. Plusieurs idées circulent. Je ne suis pas un expert, mais, compte tenu de ces Journées Nationales de la Mer, je ne laisse rien passer de ce qui est dit ou écrit sur le cabotage depuis quelques mois, et il y a une ou deux idées qui semblent se dégager… Je les lance comme le ferait un Béotien ! Il s’agit de sélectionner les lignes qui peuvent être exemplaires, qui sont véritablement viables et de les « faire aider » par les pouvoirs publics, beaucoup plus longtemps et sans saupoudrage. En un mot, 20 % et 3 ans, ça n’est pas assez. De telles aides devant se faire naturellement avec contreparties ! L’autre idée est de privilégier le rôle des intermédiaires de transport. Que ces idées soient bonnes ou mauvaises, il faut maintenant avancer, décider. Les pistes sont connues. Le rapport de l’Institut Français de la Mer - qu’il serait plus exact d’appeler le rapport Vigarié - est à cet égard une contribution tout à fait importante. Or dans ce contexte où le cabotage s’impose et où les voies sont connues, il y a de quoi être inquiet quand on voit finalement ce qu’est le programme Marco Polo de l’Union européenne, c’est-à-dire une sorte de saupoudrage dont on ne sait même pas aux dernières nouvelles si la Commission arrivera à le mettre en œuvre. Et puis, comment se satisfaire d’une ambition se limitant à rétablir pour 2010 l’équilibre des modes de transport tel qu’il existait en 1998 ? et de ne voir progresser, significativement la part du cabotage qu’à l’horizon 2030 ? Oui il y a vraiment de quoi être inquiet ! En déclarant ouvertes ces XXIe Journées Nationales de la Mer, je forme le vœu que nous contribuions à lever cette inquiétude et à faire entendre un message clair : Revoyez vos ambitions à la hausse et dégagez « maintenant » les moyens nécessaires. Le reste n’est que littérature. Tout a déjà été écrit et dit. L’heure n’est plus au diagnostic mais à l’action. Beaucoup d’acteurs privés sont prêts à prendre des risques, mais au regard des contraintes d’intérêt général, les échecs passés montrent que l’engagement des pouvoirs publics doit être fort, clair et stable pour que ces risques soient raisonnables. Mesdames, Messieurs, c’est sur ces mots que j’ai l’honneur de déclarer officiellement ouvertes les XXIe Journées Nationales de la Mer de Toulon. 24 25 e XXI J o u r n é e s Nationales de la Mer lon u o T 7 et 8 n e ov m b re 2 0 02 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer La place du Transport maritime à courte distance dans la politique européenne des transports Fotis Karamitsos Directeur de la direction Transport maritime et intermodalité Quelle heureuse initiative de la part de l’Institut Français de la Mer d’organiser une manifestation publique spécialement consacrée à un mode de transport qui est aussi vieux que l’homme, mais dont un nombre croissant de transporteurs démontrent qu’il est loin d’être vieux et qu’au contraire, il est même particulièrement moderne et efficace. De plus, la navigation à courte distance peut être encore davantage développée de manière assez rapide et économique : les infrastructures existent déjà ou peuvent être mises en place relativement facilement, les conséquences sur l’environnement sont limitées, les inconvénients sociaux seraient moindres que pour d’autres modes de transport. une ardente obligation pour l’Europe la politique européenne des transports à l’horizon 2010 », récemment publié, propose de mettre progressivement un terme au parallélisme qui existe entre croissance économique et croissance de la demande de transports, de trois manières principalement : en modifiant à long terme la répartition entre les différents modes de transports ; en éliminant les goulets d’étranglement et en s’attaquant au problème de la saturation du trafic; en mettant la sécurité et la qualité au cœur de la politique des transports. Le transport maritime à courte distance devra jouer un rôle clé dans ces changements d’orientations politiques. Les goulets d’étranglement géographiques les plus sérieux en Europe, notamment les Alpes, les Pyrénées et les régions frontalières entre les actuels membres de l’UE et les pays candidats à l’adhésion, exigent une attention particulière : ils risquent en effet d’entraîner une détérioration irréversible du réseau de transport, voire une paralysie temporaire et récurrente, sans parler de la dégradation de l’environnement. La navigation à courte distance peut soulager le problème beaucoup plus d’ailleurs qu’elle ne le fait déjà aujourd’hui. Chacun de nous sait que la navigation à courte distance est un mode de transport sûr et l’un des moins préjudiciables pour l’environnement. Pourquoi le transport maritime à courte distance n’occupe-t-il pas encore une première place incontestée ? Je vous rappelle que la réunion des ministres du Transport, dédiée spécialement et exclusivement au transport maritime à courte distance fin mai 2002 à Gijon, a donné un soutien politique du plus haut niveau aux initiatives de toutes les instances politiques en Europe en faveur du transport maritime à courte distance. Tous les pays en Europe soutiennent cette conclusion ; tous les ministres se sont promis de soutenir des actions en faveur du short sea. En ce qui concerne la Commission Européenne, nous sommes en train d’élaborer un programme d’action pour les années à venir. Je pourrais me limiter à louer les vertus de la navigation à courte distance comme mode de transport alternatif, mais je voudrais aller plus loin. En réalité nous en avons besoin, désespérément besoin. Le « Livre blanc sur Malgré un soutien politique continu et les efforts du secteur maritime, la navigation à courte distance connaît un certain nombre de problèmes qu’il faut commencer par cerner, puis attaquer avec détermination. En premier lieu, le transport maritime à courte distance ne semble pas donner l’image d’un moyen efficace d’acheminement porte-à-porte des marchandises, et n’est pas parvenu à une intégration totale dans la chaîne intermodale. Or, contrairement à cette perception, la navigation à courte distance peut dorénavant offrir un niveau très élevé de rapidité, de fiabilité, de régularité et de sécurité des marchandises. D’ailleurs, de plus en plus de conteneurs abandonnent la route au profit des navires. Mais les utilisateurs des transports ont encore besoin d’être convaincus de ce nouveau dynamisme du transport maritime à courte distance, pour pouvoir prendre leurs décisions en se fondant sur des faits actuels et non sur des clichés éculés. En deuxième lieu, il faut reconnaître que le transport maritime à courte distance est relativement complexe sur le plan administratif. Nous devons donc tirer parti des possibilités d’alléger les procédures. Dans l’idéal, les choses devraient être aussi simples pour les transporteurs maritimes à courte distance que pour les exploitants d’autres modes de transports. Les procédures documentaires et administratives en vigueur dans la navigation à courte distance sont lourdes, notamment parce que les exigences diffèrent grandement d’un État membre à l’autre au sein de l’Union européenne (UE). 26 27 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe une ardente obligation pour l’Europe Le troisième point difficile pour les transports maritimes à courte distance est lié à l’efficacité des ports et à la relative absence de flexibilité des fournisseurs de services portuaires, notamment en ce qui concerne leurs pratiques de facturation. La durée d’immobilisation au port, les contraintes liées à l’infrastructure et le manque de transparence de la tarification dans certains ports sont des problèmes qu’il faut examiner. Les services portuaires devraient être exploités selon les principes de gestion commerciale dans un environnement libéralisé, tout en offrant les niveaux de service requis à tous les utilisateurs. Comment pouvons-nous résoudre le problème? Que fait la Commission européenne ? Commençons avec la complexité administrative. Tout récemment, l’UE vient d’adopter, à une allure impressionnante, des règles qui imposent l’utilisation, dans tous les ports de l’Union et d’une manière uniforme, des formulaires de la convention FAL de l’OMI. Cette harmonisation permettrait d’éliminer l’immense diversité des formulaires que doit remplir un navire chaque fois qu’il arrive dans un port de l’UE ou qu’il en sort. Ces formulaires concernent les formalités générales de déclaration concernant le navire, les provisions de bord, les effets et marchandises de l’équipage, la liste de l’équipage et, dans le cas des navires de charge, la liste des passagers. Dans peu de temps, tout opérateur intéressé sera en mesure de downloader 1 ces formulaires dans toutes les langues communautaires. Puis, la question de douane. La réaction immédiate, c’est que les questions de douane sont trop compliquées et que leur existence même dissuade les éventuels usagers de la navigation à courte distance. Mais cette réaction ne nous satisfait pas. La Commission vient de publier un guide douanier consacré aux règles en vigueur pour le transport maritime à courte distance. Ce document nous sert actuellement à étudier, avec nos collègues des services douaniers, avec les transporteurs et avec toute personne souhaitant coopérer, quelles sont les nécessités, quels sont les impératifs et quelles sont les possibilités. Nous ne pouvons pas renverser le régime douanier de la communauté pour le motif qu’il ne correspond pas aux particularités de la navigation à courte distance, mais nous allons essayer, dans les limites du possible et du raisonnable, d’alléger le fardeau qu’impose notre système douanier, comme tout système douanier d’ailleurs. Ce document montre également que le règlement douanier connaît déjà certaines facilités pour le transport maritime à courte distance. Un armateur peut obtenir l’agrément d’une « ligne maritime régulière agréée », ce qui lui procure des avantages pratiques considérables. Cette possibilité est-elle utilisée assez fréquemment ? Si non, pourquoi non ? 1 - Télécharger. Ndlr. 28 Le transport maritime à courte distance nécessite des ports efficaces et propices à ce mode de transport Lorsque vous discutez avec les transporteurs et les chargeurs dans le secteur de la navigation à courte distance, ils soulignent que cette activité doit pouvoir compter sur des ports efficaces et propices à ce type de transport, sur des délais d’immobilisation raisonnables et sur des procédures et systèmes de tarification transparents. Seuls les ports qui fonctionnent sans aucune interruption de la chaîne intermodale peuvent permettre à la navigation à courte distance de développer son véritable rôle et de retrouver son importance. Et vous entendrez également que ces préalables sont loin d’être satisfaits. Sans vouloir entrer dans les détails, suffit-il de dire que les développements récents, à savoir et surtout l’adoption d’une position commune du Conseil, représentent un pas important vers l’adoption des règles plus modernes pour le marché des services portuaires – et ceci vaut aussi bien pour les règles de procédure que pour ceux de substance. L’argent apporte un plus, bien sûr Le programme PACT s’est achevé à la fin de 2001. Le succès attesté qu’il a globalement remporté appelle un nouveau programme pour lui succéder. Nous lui avons déjà donné un nom, « Marco Polo », et nous espérons qu’il sera opérationnel dès 2003. Nous devons effectivement maintenir notre crédibilité auprès du public : nous - nous tous - ne pouvons pas rendre hommage au transport maritime à courte distance, nous devons également faire des contributions – cela veut dire dépenser de l’argent. Beaucoup de gens sont déçus que la proposition Marco Polo n’a pas mieux progressé, mais je reste optimiste. Rappelons que nous proposons en effet un accroissement notable de son volume ainsi qu’une ou deux modifications essentielles. Première modification, nous ne souhaitons pas que le nouveau programme se cantonne au seul transport combiné, c’est-à-dire essentiellement le transport par conteneurs. De nombreux projets prometteurs, en 29 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe navigation à courte distance notamment, ont dû être refusés parce qu’ils ne concernaient pas le transport combiné. La deuxième modification, quant à elle, visera tout particulièrement à retirer les cargaisons des routes saturées, les idées innovatrices constitueront un atout pour les candidats, mais ne seront plus une condition indispensable. Dans le même contexte, je vous rappelle l’aide d’État spécifique pour ce mode de transport pour lequel le gouvernement français a créé le cadre juridique. Cette initiative, appliquée avec sagesse, devrait également apporter un plus au transport maritime à courte distance. Toutes ces initiatives devraient aboutir à de véritables « autoroutes de la mer ». Cette notion requiert encore des réflexions approfondies et je vous invite à y participer. Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer Cabotage dans l’armement français : idées forces Philippe Louis-Dreyfus Président des Armateurs de France L’initiative des opérateurs Ce n’est pas la Commission européenne, ni les gouvernements, ni les régions, ni les ports, ni les instituts et organisations qui acheminent les marchandises par l’eau, mais les opérateurs du marché. Cela est vrai. Il n’est pas réaliste de croire qu’un service de transport maritime à courte distance sera viable seulement parce que deux régions ou deux ports le veulent. Il faut le support du marché. Permettez-moi une question directe au public : Qui parmi vous est un affréteur, importateur ou exportateur ? [réponse probable : nombre extrêmement limité] Mon message est clair : un événement sur le transport maritime à courte distance aura d’autant plus de succès, de conséquences voulues pratiques que le plus grand nombre d’affréteurs seront présents. Vous tous avez l’intention et la capacité de les convaincre des avantages du transport maritime – mais ils doivent être là. Je félicite les « Bureaux de promotion du short sea » de créer ces contacts de façon quotidienne. Le bureau français qui joue un rôle important dans le réseau européen de ces bureaux nationaux, est présent ici et son travail est particulièrement apprécié. L’industrie maritime, le « cluster maritime », à savoir tous les acteurs dans toutes les industries ont une obligation morale et commerciale de soutenir – pas seulement avec les mots mais aussi avec de l’argent – leurs bureaux nationaux. Je suis sûr que vous le faites avec le vôtre – il faut le faire pour permettre à chaque bureau d’entamer la deuxième étape de sa vocation après l’accomplissement de la création d’un véritable centre d’information pour tout utilisateur potentiel du transport maritime à courte distance. Cette deuxième étape serait un travail individuel entre le bureau de promotion et des affréteurs individuels pour leur développer des solutions individuelles de transport sur base d’une utilisation accrue du maritime. Les résultats d’une telle approche sont extrêmement encourageants. La Commission est persuadée qu’elle peut apporter quelque chose. Cela étant, l’administration au niveau européen n’est pas la seule à devoir agir, il faut également une action à tous les autres niveaux. Il faut que les autorités, à n’importe quel niveau, créent un environnement propice au transport maritime à courte distance. Et il faut des initiatives pratiques qui trouveront le support du marché. 30 Je tiens d’entrée à saluer l’initiative de l’Institut Français de la Mer. Les Armateurs de France ne peuvent que s’associer à ces travaux qui sont d’une grande importance pour l’armement français. La situation des transports intérieurs est préoccupante en Europe en raison tant de la saturation des axes routiers et du coût des infrastructures terrestres que surtout des coûts sociaux induits par les accidents de la route dont le gouvernement français a parfaitement conscience. Le « livre blanc » de la Commission met en avant les modes de transport alternatifs pour accompagner la croissance du transport en Europe (« développement durable »). Aujourd’hui il existe un vrai discours politique de promotion du cabotage en France tant chez le Premier ministre que chez le ministre chargé des Transports et de la Mer. Il reste à l’appliquer. Les avantages du cabotage Le cabotage est relativement peu coûteux en infrastructures et extrêmement flexible. Les navires sont redéployables à volonté. Ils ne sont pas vraiment spécifiques à une liaison. Le cabotage est fiable, rapide et économique. Les navires naviguent les week-ends. Ils sont peu polluants. Les coûts externes sont très faibles. Les armateurs français disposent d’un savoir-faire indéniable en matière de cabotage. Ce mode de transport est créateur d’emplois qualifiés à l’échelle de toute une région. 31 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : Le cabotage dans l’armement français Les faiblesses Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer Elles sont de trois types, culturelles, financières et réglementaires. Les transitaires doivent apprendre à avoir confiance dans le cabotage et être lucides sur les difficultés présentes et futures du transport terrestre (accidents, congestion, investissements en infrastructures engendrant un coût économique important). Les passages portuaires sont à améliorer quant aux procédures, aux tarifs et aux temps de transit. Des investissements sont quand même nécessaires même s’ils sont sans rapport avec ceux que demandent les autres modes de transport intérieur (réseau ferré, réseau routier, réseau canalisé à grand gabarit) Les difficultés de coopération entre les pays de l’Union européenne ne peuvent être ignorées (pavillons non-éligibles aux trafics de cabotage interne, …). Le cabotage est victime de ce que j’appelle la « culture réglementaire ». Sur l’arc méditerranéen, certains pays ne jouent vraiment pas le jeu. Conclusion Les obstacles au développement du cabotage demandent des solutions. Le premier constat à faire est celle d’une équation à peu d’inconnues certes, mais néanmoins délicate à résoudre. D’un côté, les armateurs n’investiront qu’avec la certitude d’avoir un fond de cale suffisant, de l’autre, les transitaires n’opteront pour le cabotage que dans la mesure où le nombre de navires et de départs par semaine sur une liaison sera suffisant. Il n’est pas facile de concilier ces deux postulats. Plusieurs tentatives récentes ont illustré ces difficultés. Donc, a priori, l’intervention des pouvoirs publics et particulièrement des collectivités locales sera déterminante pour « décoincer » une situation difficile. Il faudra en conséquence des arbitrages qui ne feront pas plaisir à tous les acteurs du transport intérieur. Le second constat auquel nous devons faire attention est que le cabotage est un sujet « à la mode » et donc la meilleure et la pire des choses. La meilleure parce que l’alternative maritime correspond à une vraie préoccupation et est une vraie solution à beaucoup de problèmes. La pire parce que si le sujet est trop débattu, il risque de lasser ou de démotiver en ne portant pas de message nouveau Le risque comme on dit dans le Centre : « Gros parleux, petit faiseux », est qu’on parle beaucoup et qu’on agisse peu, voire plus grave qu’on en parle tellement qu’on croit que c’est fait. Or, le cabotage n’est pas seulement un problème à résoudre en termes économiques chiffrés de flux financiers mais aussi et d’abord en termes de changement d’habitudes et de mentalités des parties concernées, voire de culture. Et cela, c’est le plus difficile. 32 Une grande région maritime Robert Allione Vice-Président du Conseil régional Provence - Alpes - Côtes d’Azur, délégué à la mer C’est avec un grand plaisir que je représente, ce matin, ici à Toulon, Michel Vauzelle, Président de la Région, aux XXIe Journées nationales de la Mer. En son nom, je vous souhaite la bienvenue dans notre région. Lorsqu’il y a quelques mois, le Commandant Dupuis est venu me rencontrer au Conseil régional, c’est tout naturellement que j’ai appuyé sa demande de voir la Région contribuer à la tenue de ces rencontres dont l’importance n’échappe pas à tous ceux qui s’intéressent au développement du transport maritime. Les deux thèmes qui vont être traités et discutés : le cabotage maritime et la situation de la flotte et des ports de commerce, ont une grande incidence pour la politique maritime française et aussi pour notre région Provence - Alpes - Côtes d’Azur (PACA) et plus généralement la façade méditerranéenne de l’Europe. L’espace littoral et maritime constitue l’un des axes essentiels du développement régional. Il est parfois utile de rappeler qu’avec nos 800 kilomètres de côtes, nos ports, notre histoire, notre culture nous sommes une grande région maritime. La vocation maritime de la région PACA Les ports de Marseille - Fos, Toulon - La Seyne Brégaillon et Nice sont très actifs et si Marseille - Fos, premier port français et troisième port européen, demeure l’acteur principal de notre région, en matière de transport de marchandises, une véritable complémentarité émerge avec les ports de Toulon et de Nice concernant le transport de passagers. Soucieuse de la qualité de la mission de service public de continuité territoriale avec la Corse assurée, depuis des années maintenant par la Société Nationale Corse Méditerranée et la Compagnie Méridionale de Navigation qui ont leur siège à Marseille, la Région a milité pour le nécessaire renouvellement de la flotte avec notamment, la commande de deux nouveaux navires le Danielle Casanova et le Pascal Paoli, ce dernier mis à l’eau, il y a quelques semaines. La recapitalisation, décidée à l’époque par le gouvernement, va permettre à la société nationale d’assurer ses missions et de se déployer pleinement en Méditerranée. 33 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe Dossier Les XXIe journées nationales de la Mer Une grande région maritime Albert Bessudo Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie du Var Dans le cadre du contrat de plan État - Région 2000/2006, de nombreux investissements sont programmés sur les ports de Toulon, Nice et Marseille. Ils ont tous pour finalité l’amélioration des infrastructures portuaires afin d’améliorer l’activité de frets, et aussi, l’accueil des passagers avec une activité de croisière qui connaît, ces dernières années, une croissance continue. Concernant le cabotage maritime, outre la signature d’accords de coopération avec les régions italiennes et espagnoles pour le développement du transport maritime en Méditerranée, la Région Provence – Alpes - Côtes d’Azur et les Régions Languedoc - Roussillon et Ligurie ont travaillé dans le cadre du programme Interreg IIC, afin d’évaluer l’offre et la demande de cabotage en Méditerranée. Nous partageons pleinement les propositions émises par le Conseil économique et social régional de Provence - Alpes Côtes d’Azur faites en juin de cette année. Celui-ci insiste sur le nécessaire développement des liaisons côtières permettant l’accès à des remorques routières et, des transports purement maritimes à courte distance. Les ports de commerce de notre région devraient être reliés par cabotage maritime pour le transport de fret avec l’ensemble des ports de l’arc méditerranéen depuis Gioia Tauro jusqu’à Algesiras. La relance du transport maritime à courte distance passe par la création de véritables autoroutes de la mer. Ce maillage route, rail, mer, avec ce que certains nomment le mer-routage est un élément de l’aménagement équilibré du territoire régional, national et européen. Il y a quinze jours, lors des biennales de la Mer, à Naples, les rencontres que j’ai eues avec les autorités portuaires ont confirmé cette attente d’une coopération beaucoup plus forte sur l’ensemble de l’arc Méditerranéen. Dans la plaquette programme de vos journées, Monsieur le Président, il est écrit que « les retards et la complexité du dossier cabotage maritime inquiètent, frustrent, désarçonnent tandis que semblent se multiplier les questions sans réponse. » Permettez-moi de souhaiter aux XXIe Journées nationales de la Mer, par la qualité des intervenants et donc sans nul doute, du travail qui va être produit, de répondre aux questions posées et d’aider ainsi les décideurs économiques et politiques à faire les choix qui s’imposent. En ce qui la concerne, la Région Provence – Alpes - Côtes d’Azur puisera dans vos travaux afin de conforter une politique régionale de la mer ambitieuse et cohérente axée sur la coopération en Méditerranée et dans le monde entier. 34 Le choix de Toulon pour l’organisation d’un colloque sur le cabotage maritime en présence de personnalités prestigieuses est pour nous, Chambre de Commerce et d’Industrie du Var, concessionnaire du port d’intérêt national, un honneur et un encouragement. En effet, nous nous intéressons au cabotage roulier depuis 3 ans. C’est pour la CCI et les services de l’État, un axe stratégique fort pour le développement du port. Nous sommes convaincus, en effet, que Toulon est en position d’avoir une place déterminante dans le développement du cabotage, notamment roulier, compte tenu de ses nombreux atouts : sa position géographique, l’accessibilité de sa rade par tout temps qui permet un trafic régulier sans aléas météorologiques, les accès directs aux réseaux routiers et ferrés européens, les surfaces de terre pleins encore disponibles, une flexibilité importante du fait de sa taille moyenne, un contexte social stable et de qualité qui constitue un atout indéniable pour des trafics dont le succès repose essentiellement sur la régularité de la desserte. Dans ce cadre, un partenariat très formalisé a été signé dès septembre 2000 avec l’autorité portuaire de Livourne et toutes les dispositions tarifaires particulières prévues au code des ports ont été prises pour créer une attractivité maximale en faveur de ce trafic. La tentative de création d’une ligne entre Toulon et Livourne en octobre 2000, malheureusement très éphémère comme la majorité des nouveaux services de liaison maritime à courte distance créés ces dernières années, nous a permis de tirer un certain nombre d’enseignements. 35 La Revue Maritime n°464 Le cabotage maritime : une ardente obligation pour l’Europe Il ne suffit pas d’avoir un port doté de nombreux atouts. Il ne suffit pas de mettre un navire en ligne pour qu’il se remplisse. Il ne suffit pas que l’armement ait négocié des subventions. Si le marché n’a pas été précisément identifié et sollicité, si les donneurs d’ordre et les transporteurs n’y trouvent pas leur avantage et n’ont pas été préalablement convaincus, l’expérience ne peut pas être concluante à court terme. C’est pourquoi, en partenariat avec l’État, l’ADEME 1, le conseil régional Provence Alpes Côte d’Azur, le conseil général du Var, les villes de Toulon et de La Seyne, la CCI du Var mène actuellement une étude dont les objectifs sont d’identifier le marché - ce qui suppose de cibler les donneurs d’ordre, leurs besoins et leurs attentes -, d’élaborer des préconisations en matière de simplifications des procédures portuaires et de tarifs afin de rendre attractifs, pour les chargeurs et les transporteurs routiers, le trajet combiné. L’objectif final étant de disposer d’un plan de précommercialisation destiné aux opérateurs maritimes afin de susciter l’initiative. Les résultats de cette étude confiée pour partie à un cabinet français et pour partie à un cabinet italien, seront mis à la disposition des armateurs qui le souhaitent, début 2003. Je reste convaincu, pour ma part, que l’avenir du cabotage maritime est devant nous et que le Port d’intérêt national de Toulon sera, un jour, un acteur régional dans le secteur du cabotage roulier. Le cabotage est une alternative, sans aucun doute partielle, mais en tout cas rapide à mettre en place, qui ne nécessite pas, pour la collectivité, d’investissements lourds à réaliser et qui répond au souci de plus en plus pressant d’inscrire le développement économique dans une perspective de développement durable. 1 - Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie. 36