Résumé de la THÈSE DE DOCTORAT GORAN STEFANOVSKI ET
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Résumé de la THÈSE DE DOCTORAT GORAN STEFANOVSKI ET
UNIVERSITÉ D'ARTS „GEORGES ENESCO” – IASSY, ROUMANIE FACULTÉ DE THÉÂTRE Rés u mé de la THÈSE DE DOCTORAT de Nikola Vangeli GORAN STEFANOVSKI ET « LA MALÉDICTION » DES BALKANS Le portrait d'un dramaturge de « l'Est sauvage » Thèse de doctorat en ÉTUDES THÉÂTRALES, réalisée sous la direction de M. le Professeur BOGDAN ULMU Octobre 2012 1 2 MOTS-CLÉS : monographie ; Goran Stefanovski ; théâtre d'idées ; écriture dramatique – art du spectacle ; guerre, souffrance; mort – rennaissance ; les Balkans – l'Europe CONTENU DE LA THÈSE 1. GORAN STEFANOVSKI – L'HOMME ET L'ARTISTE ....... 3 2. LE THÉÂTRE DE GORAN STEFANOVSKI – UN DRAME EN (JUSQU'ICI) TROIS « ACTES » ..................... 10 2.1. « Acte I » : Recherche et accumulation ...................................... 10 2.1.1. Sous le signe de l'expérimentation : Les thèmes de la première période de création .................. 10 2.1.2. Du vaudeville « subversif » au drame d'idées ................. 12 Jane Zadrogaz (1974) .......................................................... La chair sauvage (1979) ................................................... Vol sur place (1981) ......................................................... Hi-Fi (1982) ..................................................................... Double fond (1983) .......................................................... Les âmes tatouées (1985) ................................................. Le trou noir (1987) ........................................................... Long Play (1988) .............................................................. La tour de Babel (1989) ................................................... Černodrinski rentre chez lui (1990-1991) ........................ 3 12 18 25 33 42 55 64 75 83 95 2.2. « Acte II » : La catastrophe ....................................................... 101 2.2.1. Sous le signe de Mars : Les thèmes de la seconde période de création ................... 101 2.2.2. Tragédie collective et drame personnel .............................. 103 Sarajevo (1992-1993) ....................................................... Bacchanales (1996) ....................................................... Ex-You (1996) ................................................................ Casabalcan (1997) ......................................................... 103 117 126 133 2.3. « Acte III » : La catharsis ...................................................... 2.3.1. Sortir des ruines et des cendres – une vie nouvelle après la mort : Les thèmes de la troisième période de création ................. 2.3.2. Entre les Balkans et l'Europe .............................................. Euralien (1998) ................................................................. Hôtel Europe (2000) ......................................................... Tout-homme : immoralité (2002) ................................... L'esprit de la liberté (2003) ........................................... Le démon de Debarmaalo (2006) .................................. Ulysse (2012) ................................................................. 147 147 150 150 157 167 176 179 187 3. EN GUISE DE CONCLUSION : « L'EST SAUVAGE » – CHANCE OU MALÉDICTION ? L'ARTISTE (DES BALKANS) SUR LA SCÈNE DU MONDE ... 193 Explicitation des sigles utilisés pour indiquer les titres des pièces de théâtre écrites par Goran Stefanovski ........................................... 205 Bibliographie .......................................................................................... 209 Annexe: Images des spectacles avec les pièces de théâtre de Goran Stefanovski .... 219 4 RÉSUMÉ Cette thèse de doctorat se propose de présenter, d'une manière monographique, l᾽œuvre de Goran Stefanovski, un remarquable homme de théâtre macédonien, très apprécié dans son pays natal, aussi qu'à l'étranger. Né le 27 avril 1952 à Bitola (la République de la Macédoine), Goran Stefanovski est un créateur extrêmement intéressant, plein d'effervescence, d'imagination, de force, mais en même temps très sensible et vulnérable. Sa personnalité a été influencée non seulement par le climat postmoderne, mais aussi par des circonstances existentielles tout à fait dramatiques. Au début des années 1990, forcé de quitter sa patrie à cause des horreurs d'une guerre fratricide, le dramaturge a trouvé un sanctuaire en Angleterre. Depuis deux décennies (à peu près) il enseigne l’écriture théâtrale et cinématographique au Collège Christ Church (de l’Université de Kent à Canterbury), tout en étant très impliqué dans le mouvement théâtral mondial, aussi que dans des divers débats internationaux sur des problèmes sociaux et politiques, tels que la migration, la transition postcommuniste et l’identité multiculturelle dans les Balkans. Pourtant, malgré tous ses accomplissements remarquables, malgré les maintes honneurs et prix reçus, Goran Stefanovski reste à jamais marqué, au fond de son cœur, par la tragédie yougoslave. Son destin, semble-t-il, est de toujours osciller avec émotion entre deux pôles : 1) « le berceau balkanique », c'est-à-dire sa Macédoine natale et les pays voisins, l'espace culturel qui lui a donné son identité ethnique et spirituelle ; 2) l'Europe occidentale qui l'a adopté, pour ainsi dire, qui a reconnu son talent et l'a rendu célèbre. Nos objectifs principaux sont : - examiner méthodiquement et en détail l'œuvre de Goran Stefanovski, dans le contexte du programme créatif cohérent qui l'a générée ; - identifier et systématiser les traits distinctifs de cette œuvre sur le fond de la problématique actuelle concernant le statut de l'artiste dans la société – statut conditionné, de manière décisive, par des facteurs extraartistiques, tels que les rapports politiques, économiques, culturels entre l'Est et l'Ouest (au niveau européen ou globale), ou entre la tradition et la nouveauté. À cette fin, nous avons essayé de démontrer que Goran Stefanovski est vraiment un artiste digne d'intérêt et représentatif pour l'espace balkanique, mais européen et mondial aussi. 5 À notre avis, dans la carrière dramatique de Goran Stefanovski on peut distinguer (jusqu'à présent) trois périodes majeures ou cycles (à durée inégale), résultant d'une forte réaction (personnelle et artistique) aux défis du contexte extra-artistique : 1) la première période (la plus ample) commence en 1974, avec Jane Zadrogaz, et s'étend sur près de vingt ans, jusqu'à l'éclatement de la guerre sur les territoires yougoslaves ; 2) la deuxième période de création dure environ une décennie, du début (en 1991) de conflits armés dans l'ex-Yougoslavie jusqu'à la fin des années '90 ; 3) la troisième période est inaugurée par l'achèvement de la guerre dans les Balkans ; une fois la paix rétablie, les gens aux vies ravagées par les démons de la belligérance peuvent essayer de se faire cicatrisées toutes les blessures et de se restaurer, autant que possible, la confiance les uns envers les autres. Dans le chapitre intitulé « Acte I » : Recherche et accumulation nous analysons le premier volet de l'activité du dramaturge Goran Stefanovski, période marquée par dynamisme, par le désir impétueux d'expérimenter des formules inédites, par une imagination créative éclatante, qui exploite (d'une façon audacieuse, très originale) des sources très diverses (parfois contraires) : - mythes universels, mais le folklore local aussi ; - l'histoire du peuple de la Macédoine (par extension, des peuples des Balkans) – c'est-à-dire l'histoire rendue par les documents et également l'histoire « apocryphe », fixée dans la mémoire collective ; - la tradition littéraire autochtone et encore celle universelle ; - l'atmosphère dense, suffocante, les pulsions et les explosions passionnelles du théâtre expressionniste, d'une part ; le scepticisme, la lassitude, le sentiment du vide du théâtre de l'absurde, d'autre part ; - l'affirmation orgueilleuse du moi et le défi de l'établissement véhiculés par la musique rock des années '70-'80. Les thèmes les plus fréquentés par Goran Stefanovski pendant ses deux premières décennies d'activité dans le domaine du théâtre sont : - le rapport entre l'individu et l'histoire, entre l'individu et la tradition, entre l'individu et la collectivité ; la différence de perspective (parfois même le conflit) entre générations ; - le rapport entre liberté et contrainte ; le problème du pouvoir, du despotisme, de la manipulation des masses ; 6 - les rapports entre « peuples dominants » et « peuples dominés », entre « cultures majeures » et « cultures mineures » ; - le sens de l'existence humaine, au-delà des circonstances historiques ; - le rapport entre l'aspiration et accomplissement ; le rôle de l'artiste dans le monde. Les dix pièces de cette première période sont : Jane Zadrogaz (1974) – Jane Zadrogaz est un farceur, un personnage intelligent, rusé et facétieux, appartenant à la « famille » internationale des tricksters, aussi bien qu'Hermès/Mercure, Robin Goodfellow/Puck, Till l'Espiègle, Nasr Eddin Hodja, Pacala (le fou sage des récits populaires roumaines) ou Itar Pejo/ Hitar Petar (le héros du folklore bulgaromacédonien). Considérée une pièce postmoderne, qui utilise avec – désinvolture et hardiesse – des textes préexistants, Jane Zadrogaz réunit, dans une synthèse non-conformiste, des éléments populaires traditionnels, des rituels archaïques, mythes et symboles anciens, avec la farce, la perspective parodique et l'humour. La chair sauvage (1979) – Stevo, l'un des personnages du drame, explique ce que la « chair sauvage » signifie : « C'est une expression de vieux. Une superstition. C'est un cheveu avalé par accident et coincé dans la gorge, qui prend racine. Une tumeur – chair sauvage – croît sans cesse autour de ce corps étranger causant l'étouffement. » « La chair sauvage » est le symptôme de la peur : la peur du changement ; la peur de l'Autre – soit-il compatriote ou étranger ; la peur de la cruauté, de la brutalité, de la souffrance flottant dans l'air d'un temps trouble – mauvais présages, car la seconde guerre mondiale va bientôt éclater. Vol sur place (1981) – Dédiée par l'auteur « à tous [ses] ancêtres, connus et inconnus », cette pièce présente des événements ayant lieu pendant la guerre russo-turque de 1877-1878. Les personnages principaux sont deux frères macédoniens en conflit, Evto (un maçon désillusionné et cynique) et Mihajlo (un peintre d'églises idéaliste et rêveur). C'est Mihajlo, le visionnaire indomptable, qui explique la métaphore-titre : « voler sur place » signifie manquer d'ardeur, de la passion, de la vitalité, de la confiance, c'est craindre de donner cours à l'aspiration vers la liberté spirituelle. Hi-Fi (1982) – Pour Matej, un jeune passionné de rock and roll et d'installations de sonorisation, la perspicacité existentielle, la capacité de quelqu'un de comprendre son rôle précis dans l'univers se traduit par l'indication technique « hi-fi », « haute fidélité ». Assumé trop tard et d'une 7 façon erronée, le pari de la fidélité envers ses propres exigences et désirs n'a aucune chance de succès, car il se pervertit et échoue à cause de la négligence, de l'égoïsme, de l'esprit de vengeance, de la tyrannie affective. Double fond (1983) pose, d'une part, le problème du théâtre comme miroir du monde et, d'autre part, le problème du rapport entre l'homme et le pouvoir politique. Le titre métaphorique renvoie à l'ambiguïté gouvernant le monde, mais aussi à la duplicité de l'être faible, vaincu par l'histoire, qui est enclin à accepter des compromis. Le thème central du drame Les âmes tatouées (1985) est le déracinement – en particulier, l'inadaptation des immigrés macédoniens en Amérique. Se sentant des étrangers, des exilés dans « le pays des toutes les possibilités », Terre Promise dont ils ont longuement rêvé avant de traverser l'Atlantique, ces gens malheureux souffrent d'une maladie incurable : la nostalgie de la patrie où ils n'osent pas rentrer. Rongés sans cesse par la mélancolie, ils pensent inlassablement au pays natal qui leur manque tant, jusqu'à ce que l'image de leur paradis perdu se grave à jamais dans leurs cœurs, dans leurs âmes. Le trou noir (1987) signale les abîmes sombres et sordides de l'âme humaine, les grands dangers qui y rôdent perfidement. Déçu et frustré, Siljan (le personnage principal de la pièce), renonce à vivre, mais il reste longtemps suspendu entre la vie et la mort et il assiste, comme un témoin invisible, muet et impuissant, aux tourments subis par ses bien-aimés. Siljan n'arrive à vraiment passer Au-delà qu'au moment où il apprend à aimer. À la fin du texte, on comprend avec lui que l'on ne peut se sauver du « trou noir » que grâce à l'amour et au dévouement. Long Play (1988) montre le drame du désillusionnement vécu par une génération formée dans l'esprit Flower Power, dont les idéaux grandioses succombent à la réalité grise et plate. La pièce est structurée en 16 scènes (placées dans l'intervalle temporel 1946-1977), chacune d'entre elles portant le titre d'un succès pop ou rock des années '60. Les membres de chaque génération adorent leurs propres idoles, écoutent et chantent leur propre LP, mais, en vérité, ils ne font que suivre le même chemin que leurs prédécesseurs. La tour de Babel (1989) – L'effondrement punitif de l'ancienne tour de Babel est une malédiction qui semble être réactivée en pleine contemporanéité, signalant un nouveau péché grave, une nouvelle poussée d'orgueil de l'humanité. Le Babel moderne des Balkans, autour 8 duquel tourne la trame de la pièce, est l'édifice précaire de la vanité yougoslave, la « tour » de l'ambition futile qui est dévastée, démolie, brisée en plusieurs idiomes (« la confusion des langues »), en plusieurs populations non plus capables de dialoguer. L'avertissement du dramaturge est sombre : le manque d'humilité et le refus de communiquer engendrent la ruine d'une telle construction – en fait, de toute construction, quelle qu'elle soit. Černodrinski rentre chez lui (1990-1991) – L'œuvre de Vojdan Pop Georgiev Černodrinski (1875-1951) marque le début du théâtre macédonien moderne. Bien qu'il ne soit pas un personnage dans la pièce de Goran Stefanovski, Černodrinski veille comme une ombre tutélaire sur tous les actants, donnant à toutes les scènes un sens qui peut être encore utile aux gens (des Balkans ou d'ailleurs) qui vivent au XXIème siècle. Le chapitre « Acte II » : La catastrophe s'occupe des changements considérables qui se sont installés dans la vie (tout comme dans la carrière) de Goran Stefanovski au début des années 1990. La transformation de son pays dans un théâtre de guerre oblige l'auteur à partir en exil. En commençant une nouvelle vie en Angleterre, il entre dans une autre phase de sa carrière. C'est une période de deuil, marquée par une douleur accablante et par une vision artistique très sombre. Torturé par le cauchemar de la guerre dévastant l'espace familier maintenant lointain, le dramaturge écrit moins et adopte un style plus restreint, plus sobre, parfois austère. Les thèmes principaux qu'il cultive pendant ces années de chagrin et d'amertume sont : - la perte de la raison et des réflexes civilisés en faveur des instincts bas, sordides ; - la régression de l'être humain vers l'animalité ; - la prolifération de la haine, maladie contagieuse et destructive, qui transforme le frère en ennemi ; - le sentiment d'insécurité et de vide, l'effort de faire face à la peine, la tentation de se refugier dans un espace imaginaire. Les pièces écrites par Goran Stefanovski sous le signe de Mars sont : Sarajevo (1992-1993) – Ayant une structure de kaléidoscope, cette pièce signale « l'engloutissement d'une Atlantide culturelle très spéciale » (Goran Stefanovski) – disparition violente, incompréhensible et inacceptable, ce qui peut fonctionner en tant qu'avertissement pour l'humanité entière. Le dramatisme du texte résulte d'un montage soutenu, impitoyable, d'images 9 intenses, vives, troublantes, qui sont, en fait, des visions tragiques se déroulant au ralenti aux yeux de Sara (symbole de la ville de Sarajevo), avant qu'elle ne meure. « Structurée comme un voyage rituel vers la mort, la pièce est l'histoire de Sara au Pays des Horreurs. » (Goran Stefanovski) Se rapportant explicitement aux Bacchantes/Bakkhai d'Euripide, la pièce intitulée Bacchanales (1996) met en contact : les actants de la tragédie grecque (Dionysos, Tirésias, Cadmos, Penthée, Agavé ; les bacchantes ; le chœur des hommes de Thèbes) ; des gens typiques pour la société macédonienne patriarcale ; les membres d'une troupe théâtrale moderne, qui jouent les Bacchanales sur la scène. Tous les personnages montrent des traits bachiques : un certain penchant vers la violence et l'intolérance ; instabilité affective ; l'oscillation entre la tradition et la nouveauté, entre la foi et le doute, entre la raison et l'irrationalité. Mais Dionysos représente la nature gouvernée par un cycle de morts et résurrections successives. « La leçon dionysiaque » pourrait donc renvoyer un message d'espoir. Pour rétablir l'ordre naturel des choses, on a besoin d'une exorcisation. Tout ce qui est sale et perverti, tous les maux et tous les compromis doivent être démantelés, pour que le monde soit reconstruit avec patience, dévotion et sagesse. Ex-You (1996) joue sur une ambiguïté, sur une ambivalence. Ex-You peut également signifier « l'ancienne Yougoslavie » ou « ton ancienne identité » – celui que tu as été autrefois, mais ne l'es plus, à cause de l'histoire implacable ou des décisions prises sous une pression terrible. Casabalcan (1997) – La mise intertextuelle y est évidente à partir du titre, qui évoque un repère artistique et culturel bien connu : Casablanca, le film américain de Michael Curtiz, réalisé en 1942. Gavro, un contrebandier cruel, avide, qui profite sans scrupules de la guerre aux Balkans, s'identifie avec le personnage macho interprété par Humphrey Bogart. Sur « Casabalcan », son navire de croisière (« un casino flottant » qui ignore la souffrance et les misères des gens pris dans la piège des combats), il y a toute sorte d'êtres humains : des gens aux principes et des immoraux ; des gens cultivés, sensibles, pleins d'affection, tout comme des brutes ; des gens forts et des gens faibles ; des gens qui n'admettent jamais d'être/d'avoir été coupables et des gens qui apprennent à pardonner et à se pardonner pour les erreurs commises. Le chapitre « Acte III » : La catharsis examine la troisième période dans la création de Goran Stefanovski. Le rétablissement de la paix dans 10 l'ancienne Yougoslavie ouvre dans l'activité du dramaturge une époque un peu plus sereine, où, doucement, son appétit pour l'expérimentation théâtrale et son penchant ludique renaissent. Il revisite des sujets abordés auparavant, mais il les reprend d'un point de vue nouveau, modelé par les traumas qu'il a vécus. Maintenant, il contemple les Balkans d'une manière lucide, désenchantée. Le rapport compliqué entre « la forteresse d'Europe » et « l'Est sauvage » devient pour lui un thème obsédant, qui influence ses idées concernant le destin humain et le rôle de l'artiste dans un monde désacralisée, fragilisée, plutôt arbitraire. Les textes dramatiques appartenant à cette période sont : Euralien (1998) – D'une façon ironique, Goran Stefanovski propose une dystopie où les rapports connus entre les pays et les peuples d'Europe sont renversés, pour souligner « l'aliénation politique et sociale, le nationalisme kitsch dans l'Europe vers la fin du XXème siècle ». Tout comme en réalité, le concept directeur y est la différence : l'étranger (l'Autre) est regardé avec soupçon, réserve, mépris ou même dégoût ; on le traite avec indifférence ; on le subi à toutes sortes d'humiliations, de persécutions, d'exploitations, de violences verbales et physiques. Hôtel Europe (2000) revient au thème de la migration dans l'espace européen contemporain, thème associé à d'autres : le déracinement, la solitude, la communication déficitaire ou absente. La « scène » est « le monde minable d'un hôtel de gare » situé entre l'Est et l'Ouest de l'Europe. Le public est divisé en six groupes, qui, guidés par six personnages (le porteur, l'assistante sociale, le maître d'hôtel, le réceptionniste, la fille et l'homme de ménage), visitent, tour à tour, diverses chambres et assistent aux drames des gens qui les habitent. Tout-homme : immoralité (2002) reprend polémiquement le sujet de quelques moralités médiévales (datant de la fin du XVème siècle) : Elckerlijc (Den Spyeghel der Salicheyt van Elckerlijc. Hoe dat elckerlijc mensche wert ghedaecht Gode rekeninghe te doen / Le miroir du salut d'Elckerlijc. Comment chaque personne doit suivre les instructions divines) et Everyman (The Somonyng of Everyman / La Semonce de ToutHomme). Six personnages de Stefanovski représentent allégoriquement six péchés capitaux : la paresse, la gourmandise, la luxure, l'avarice, la colère et l'envie. L'orgueil est un péché que tous ces personnages commettent. Les six fantoches (« représentants typiques de la société de consommation ») ignorent totalement les besoins spirituels. Le septième 11 personnage est la Mort, qui a un rôle ordonnateur dans les moralités médiévales. Parce que les six caricatures humaines refusent de se poser le problème de la salvation de l'âme, la Mort assume volontairement leur tâche. C'est elle qui, portant ici le nom Anastasija (ανάστασις/anástasis signifie « relèvement », « renaissance »), se prépare pour faire le voyage initiatique de Tout-homme. L'esprit de la liberté (2003) – Vojdan Černodrinski, le fondateur du drame macédonien, a écrit en 1905 une pièce intitulée L'esprit de la liberté, où il évoquait un épisode historique très important pour son peuple : la révolte des macédoniens contre les Ottomans (l'Insurrection d'Ilinden, 1903) et l'instauration de la République de Krouchevo (la première république dans les Balkans), qui allait durer 10 jours seulement. Cent ans plus tard, Goran Stefanovski reprends le texte de Cernodrinski et le transforme dans l'Acte I d'une pièce ayant le même titre. Les deux actes ajoutés par Goran Stefanovski répètent les événements et leur chronologie, mais l'histoire est placée dans d'autres périodes et circonstances. Au fur et à mesure, les gens et leurs idéaux changent, se pervertissent, jusqu'à ce que l'esprit de la liberté ne signifie plus rien (ou presque). Le démon de Debarmaalo (2006) – Goran Stefanovski change le contexte d'une histoire sensationnelle épouvantable et dégoûtante, qui a eu lieu au Paris du XIVème siècle et qui est devenue dès lors un mythe urbain. Koce, un barbier de Debarmaalo (un quartier de la ville de Skopje, en Macédoine), devient un meurtrier à cause des injustices qui ont détruit sa vie et dont il veut se venger. Dans sa boutique de barbier il attire des clients qui incarnent la corruption et qui sont coupables de toute sorte de crimes, il les tue et il les transforme en kébabs qui ont un grand succès parmi les gens du quartier. Dans une atmosphère très dense, presque irrespirable, tintée d'humour noir et de grotesque, Koce le criminel devient aux yeux de la communauté un vrai justicier, le héros de la nation. Ulysse (2012) – De plusieurs points de vue, le protagoniste de la plus récente aventure dramaturgique de Goran Stefanovski est, semble-t-il, un réflexe fictionnel auto-ironique de l'auteur toujours à la recherche de son Ithaque. La figure mythique d'Ulysse y apparaît dans un registre parodique, burlesque. L'héroïque, le solennel, le sérieux se transforment en moquerie, échouent en jeux de mots vulgaires, en jurons, en chansons et danses triviales, interprétées par des gens se trouvant dans un état physique et morale lamentable – des réfugiés pauvres, fragiles, mal 12 habillés, qui flottent en dérive sur les vagues de vie, chacun d'eux vivant, peut-être, sa propre « odyssée » insignifiante. Leurs dieux banalisés et minables sont devenus simples objets d'amusement. Notre thèse s'achève par quelques observations présentées En guise de conclusion : « l'Est sauvage » – chance ou malédiction ? L'artiste (des Balkans) sur la scène du monde. De Jane Zadrogaz à Ulysse, des Histoires de l'Est sauvage jusqu'à Dispute avec Kafka, toute l'œuvre de Goran Stefanovski est, en fait, une méditation sur un thème qui est devenu sa devise et sa marque stylistique, le distinguant parmi les auteurs dramatiques des Balkans qui « ont conquis l'Ouest » raffiné de l'Europe : Kole Čašule, Rusomir Bogdanovski, Saško Nasev, Dejan Dukovski, Žanina Mirčevska (Macédoine), Dušan Kovačević, Biljana Srbljanović, Milena Marković (Serbie), Slobodan Šnajder (Croatie), Dušan Jovanović (Slovénie), Stefan Çapaliku (Albanie), Hristo Boicev (Bulgarie). Fortement préoccupé par l'art de l'écriture théâtrale, Goran Stefanovski appelle ce thème singulier, cette obsession qui le hante depuis toujours, « l'expérience du liminal », c'est-à-dire la fascination d'une « limite fluide », « hésitation et incertitude, ambiguïté et contradiction entre apparences et essence, entre ce qu'on dit et ce qu'on déduit », « entre agon et la stase dramatique ». Tout comme Ulysse, Goran Stefanovski est rongé par la nostalgie : sous le signe de l'ambivalence, il erre avec une nonchalance apparente dans le monde qui l'attire et qui le provoque, et qu'il veut conquérir, mais malgré toutes les vicissitudes il porte toujours avec lui le souvenir de son foyer perdu. Symbole puissant de la vie et du temps qui coule inexorablement, la mer qui le sépare pour toujours de la vraie Ithaque ne peut pas empêcher Ulysse de la retrouver intacte, inchangée, dans son cœur et dans sa mémoire affective. 13 BIBLIOGRAPHIE I. L'ŒUVRE DE GORAN STEFANOVSKI I. 1. Dramaturgie Stefanovski, Goran, Sobrani drami (Drames – édition complète), vol. I-II, Tabernakul, Skopje, 2002; vol. III, Tabernakul, Skopje, 2010. Stefanovski, Goran, “Sarajevo (Tales from a City”), in Oko, Makedonska revija za literatura, no. 21, 1997, pp. 59-84. Stefanovski, Goran, Euralien (Script for a Theatrical Event), manuscris de l'auteur, 1998. Stefanovski, Goran, Everyman (An Immorality Play) / Sekoj (a-moralitet), bilingual edition, British Council Macedonia, Skopje, 2004. Stefanovski, Goran, „Živ čoek” („L'homme vivant”), Kulturen Život, Skopje, 4/2004. Stefanovski, Goran, „Duhot na slobodata” („L'esprit de la liberté”), Kulturen Život, Skopje, 3/2005, pp. 122-142. Stefanovski, Goran, „Hotel Europa – scenariu pentru un eveniment teatral”, traducere românească de Ioana Ieronim, in Andreea Dumitru (sous la direction d'), Dramaturgie contemporană din Balcani, antologie, cu o prefață de Ioana Ieronim, Fundația Culturală „Camil Petrescu”, București, 2008, pp. 145-182. Stefanovski, Goran, „Fundul dublu”, „Gaura neagră”, „EX-YU”, „Bacchanalia”, „Demonul din Debarmaalo”, in Povești din Estul sălbatic (Histoires de l'Est sauvage), anthologie, traduction et préface par Ioana Ieronim, Fundația Culturală „Camil Petrescu”, București, 2010, pp. 27-187. *** Stefanovski, Goran, A Little Book of Traps (a scriptwriting tool), Dramatiska Institutet, Stockholm, 2002 / Mala kniga na stapici (pomagalo za pišuvanje drami), Tabernakul, Skopje, 2003. I.2. Écrits en prose ; conférences, essais, entretiens Stefanovski, Goran, „Vo Mala kinga na stapici ne me interesira umetnosta, tuku umešnosta”, entretien avec Liljana Mazova, texte publié dans la revue Teatarski glasnik, no. 53-56/2002, pp. 23-27. Stefanovski, Goran, Konzervirani impresii, Templum, Skopje, 2004. Stefanovski, Goran, „O našoj priči", traduction en serbe par Nenad Vujadinović, Mostovi, Beograd (Srbija i Crna Gora), 2005, pp. 129-130. 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