Quel dispositif de prévoyance pour les mandataires sociaux ?

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Quel dispositif de prévoyance pour les mandataires sociaux ?
Date : 08/04/2014
Pays : FRANCE
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Quel dispositif de prévoyance pour les mandataires sociaux
?
Les mandataires sociaux, bien qu'assimilés pour certains à des salariés en ce qui concerne
leur affiliation au régime général de Sécurité sociale, ne sont pas, pour autant, titulaires d'un
contrat de travail. Comment, alors, s'organise leur protection sociale complémentaire?
L'article L. 911-1 du code de la Sécurité sociale , fixant les modalités de mise en place au sein des entreprises des
garanties collectives en protection sociale complémentaire, s'applique uniquement aux personnes titulaires d'un
contrat de travail . Dès lors, un mandataire social, qui ne cumule pas valablement un contrat de travail et un
mandat social, ne pourra pas bénéficier, de plein droit, des couvertures de prévoyance complémentaires ou de
retraite supplémentaire mises en place dans l'entreprise au bénéfice des salariés.Ces mandataires sociaux peuvent
néanmoins se voir attribuer le bénéfice de ces avantages à condition de respecter un formalisme lié aux
caractéristiques de l'avantage. Ce formalisme varie selon que le mandataire exerce ses fonctions au sein d'une
société dont les titres sont admis ou non aux négociations sur un marché réglementé, ci-après désignée sous le
vocable "société cotée", et selon les caractères de cet avantage. Dès lors que ce formalisme est respecté, le
dirigeant peut être rattaché aux contrats de prévoyance ou de retraite liant l'entreprise à l'organisme assureur, mais
la question se pose alors du traitement social du financement de l'entreprise à ces régimes, pour les mandataires
sociaux.Formalisme de mise en placeDans une société non cotée , pour qu'il ne constitue pas un complément de
rémunération, l'avantage accordé doit remplir les critères suivants :* être la contrepartie de services particuliers
rendus à la société pendant l'exercice de ses fonctions ;* être proportionné aux services rendus ;* ne pas constituer
une charge excessive pour l'entreprise ( Com., 3 mars 1987, n° 84-15.726 ; Com., 10 février 1998, n° 95-22.052 ;
Com., 24 octobre 2000, n° 98-18.367 ).Dans une telle hypothèse, l'attribution de l'avantage au mandataire relève
de la décision du conseil d'administration ( C. com., art. L. 225-47 et L. 225-53 ; Com., 27 février 2001 n°
98-14.502 ) ou du conseil de surveillance ( C. com., art. L. 225-63 ) pour la SA, de l'assemblée générale (sauf
disposition contraire des statuts) pour la SARL, de l'instance désignée par les statuts pour la SAS, et enfin d'une
disposition statutaire ou d'une décision de l'assemblée générale ordinaire avec l'accord unanime des commandités,
pour les SCA. L'organe compétent doit donc se prononcer sur le montant et les modalités d'attribution de
l'avantage et l'acter par une délibération à laquelle l'intéressé prend part, le cas échéant.En revanche, si l'avantage
n'est pas la contrepartie de services rendus à l'entreprise ou n'est pas proportionné à ces services, son octroi est
soumis au régime des conventions réglementées (conventions entre une société et son président ou un autre
dirigeant -Com., 10 février 1998, n° 95-22.052 , RJDA 5/98 n° 611). Enfin, si cet avantage constitue une charge
excessive pour l'entreprise, son octroi peut même être contraire à l'intérêt social.* Dans les sociétés dont les titres
sont admis aux négociations sur un marché réglementé , les engagements pris par la société elle-même - ou par
une société contrôlée ou qui la contrôle - correspondant à des avantages dus ou susceptibles d'être dus à raison de
la cessation des fonctions ou postérieurement (avantages de retraite et de prévoyance en matière de décès,
d'incapacité ou frais médicaux) se situent dans le cadre des conventions réglementées, qui exigent une procédure
spécifique ( art. L. 225-38 et s. du code de commerce pour une SA avec conseil d'administration, art. L. 225-86 et
s. du code de commerce pour une SA à directoire et conseil de surveillance, art. L. 226-10 du code de commerce
pour les sociétés en commandite par actions). Cette procédure implique une information préalable du conseil
d'administration (ou de surveillance) qui doit autoriser l'avantage, ainsi qu'une information des commissaires aux
comptes qui établissent un rapport spécial, lequel est présenté à l'assemblée générale, qui doit statuer sur
l'attribution de l'avantage. L'intéressé ne peut prendre part au vote ni à la décision du conseil, ni à la résolution de
l'assemblée.Le défaut d'autorisation préalable du conseil peut entraîner une décision de nullité de l'avantage en cas
de conséquence préjudiciable pour l'entreprise, et l'intéressé peut avoir à indemniser celle-ci du préjudice subi en
lui remboursant les sommes qu'elle a versées. Le défaut d'approbation par l'assemblée générale peut conduire à
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une mise à la charge de l'intéressé et éventuellement des autres membres du conseil d'administration ou du
directoire, selon le cas, des conséquences dommageables.Par ailleurs, lorsqu'il s'agit d'accorder des avantages qui
ne correspondraient pas aux régimes collectifs et obligatoires de retraite et de prévoyance visés à l'article L. 242-1
du code de la Sécurité sociale ou aux caractéristiques des régimes mentionnés à l'articleL. 137-11 de ce même
code, le bénéfice de ces avantages est soumis au respect d'une procédure renforcée.Cette procédure consiste en
une autorisation préalable du conseil incluant la fixation de conditions de performance (à peine de nullité), une
publicité de l'autorisation sur le site internet de la société dans les 5 jours calendaires suivants la date du conseil et
consultable pendant toute la durée des fonctions, un rapport spécial des commissaires aux comptes, une
approbation par l'assemblée aux termes d'une résolution individualisée réitérée à chaque renouvellement de
mandat, la constatation par le conseil du respect des conditions d'attribution (à peine de nullité) et enfin une
publicité de la décision du conseil visées ci-dessus sur le site Internet de la société dans les 5 jours calendaires
suivants la date du conseil, consultable au moins jusqu'à la prochaine assemblée ordinaire des actionnaires (à
peine de nullité - art. L. 225-42-1 et L. 225-90-1 , L. 225-22-1 , L. 225-79-1 , R. 225-34-1 et R. 225-60-1 du code
de commerce).Au cas particulier des avantages de prévoyance en matière de frais médicaux, décès ou d'incapacité,
la condition de performance ne semble pas cohérente avec l'objectif de la couverture et peut être difficile à
satisfaire.Ces avantages font également l'objet de mesures de publicité dans le rapport de gestion à l'assemblée,
dans le rapport du président au titre de la politique de rémunération et, le cas échéant, dans le document de
référence.Enfin, le code de gouvernement d'entreprise des sociétés cotées Afep-Medef révisé en juin 2013 (qui a
fait l'objet d'un guide d'application publié en janvier 2014) formule un certain nombre de recommandations en la
matière qui n'ont aucun caractère obligatoire. Cependant, si l'entreprise se réfère à ce code en matière de
gouvernement d'entreprise et qu'elle n'applique pas certaines de ses recommandations, elle doit s'en justifier dans
le rapport du président .Ce code prévoit que l'approche des rémunérations des dirigeants doit être exhaustive
incluant de ce fait les avantages accordés en matière de retraite et de prévoyance. Il énonce, depuis juin 2013, que
l'ensemble des éléments de rémunération doit faire l'objet d'une présentation à l'assemblée annuelle des
actionnaires et d'un vote consultatif a posteriori (procédure dite de say on pay ). En cas d'avis négatif de
l'assemblée, sur avis du comité des rémunérations, le conseil doit délibérer et publier immédiatement les suites
qu'il entend donner aux attentes exprimées par les actionnaires en assemblée.Ce même code amendé prévoit ainsi
que l'octroi de régimes supplémentaires de retraite respecte certaines conditions afin d'éviter les abus :* l'intéressé
doit avoir la qualité de mandataire ou de salarié lorsqu'il fait valoir ses droits à la retraite ;* l'avantage doit être
pris en compte dans la fixation globale de la rémunération ;* cet avantage doit bénéficier à un groupe
sensiblement plus large que les seuls mandataires sociaux ;* des conditions raisonnables d'ancienneté dans
l'entreprise des bénéficiaires doivent être fixées par le conseil ou le directoire, selon le cas, étant précisé que cette
ancienneté doit être d'au moins deux ans pour bénéficier d'un régime de retraite à prestations définies ;*
l'augmentation des droits potentiels annuels doit être progressive en fonction de l'ancienneté dans le régime et ne
doit représenter, chaque année, qu'un pourcentage limité à 5 % de la rémunération du bénéficiaire ;* les droits
potentiels devraient être plafonnés à 45 % du revenu de référence (rémunérations fixes et variables dues au titre de
la période de référence) ;* la période de référence pour le calcul de l'avantage doit être de plusieurs années et tout
gonflement artificiel de la rémunération sur cette période doit être proscrit ;* les systèmes donnant droit
immédiatement ou au terme d'un petit nombre d'années à un pourcentage élevé de la rémunération totale de fin de
carrière doivent être exclus.Le code de gouvernement d'entreprise pour les valeurs moyennes et petites, établi par
Middlenext (1) en décembre 2009, limite ces recommandations en la matière à une mention dans le rapport aux
actionnaires avec une justification dans une optique de transparence.A défaut de respect des procédures de mise en
place de l'avantage en droit des sociétés, l'avantage pourrait être supprimé voire annulé. Dans une telle situation,
l'intéressé pourrait avoir à rembourser les cotisations supportées par l'entreprise ou le
de la rente si l'ensemble
des conditions ci-dessus n'est pas rempli.Ainsi, en matière de retraite, la Cour de cassation a jugé que la
convention conclue au nom d'une société, par son président, est nulle, pour défaut d'application des procédures de
mise en place de l'avantage en droit des sociétés ( Cass. soc., 12 juillet 1990, n o 80-17.144 ).Les mêmes principes
sont applicables aux régimes de prévoyance ( Cass. com., 15 mars 1994, n o 92-13.047 ).Dans certains cas, la
nullité de l'adhésion au régime de retraite entraîne celle du contrat d'assurance groupe qui en est indissociable, les
deux conventions formant un ensemble contractuel (2) .Que la société soit cotée ou non, dans l'hypothèse
le
coût
où
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mandataire cumulerait valablement son mandat et un contrat de travail, l'octroi d'un avantage de protection sociale
sur le fondement du contrat de travail sera soumis au régime des conventions réglementées, voire de la procédure
renforcée pour les mandataires de sociétés cotées. Sur ce dernier point, le code de gouvernement Afep-Medef
recommande aux sociétés cotées de ne pas permettre de tels cumuls. L'AMF, quant à elle, considère toutefois que
le maintien d'un contrat de travail peut être justifié par l'ancienneté du dirigeant en tant que salarié de la société et
sa situation personnelle.Régime social du financement par l'entreprisePour la direction de la Sécurité sociale
(circulaire du 25 septembre 2013), l'exemption d'assiette sociale dont bénéficie le financement patronal des
garanties de protection sociale complémentaire est réservée par principe aux salariés, anciens salariés et ayants
droit. Elle en déduit que :* les mandataires sociaux titulaires d'un contrat de travail bénéficient des mêmes
garanties que l'ensemble des salariés ou, lorsque les garanties sont réservées à une ou plusieurs catégories établies
dans les conditions rappelées ci-dessus, à raison de leur appartenance ou non, en tant que salariés, à cette ou ces
catégories. En revanche, ils ne peuvent, en tant que tels et à eux seuls, constituer une catégorie objective pour le
bénéfice de l'exemption d'assiette ;* les mandataires sociaux non titulaires d'un contrat de travail , mais assimilés
aux salariés en application de l'article L. 311-3 du code de la Sécurité sociale , peuvent être rattachés au contrat
liant l'entreprise à l'organisme assureur au bénéfice des salariés.Dans une telle hypothèse, l'administration précise
que si le dispositif est réservé à une ou plusieurs catégories de salariés, les mandataires ne peuvent alors être
rattachés au dispositif, pour le bénéfice de l'exemption d'assiette, que s'ils remplissent eux-mêmes le ou les critères
retenus. En pratique, le financement du régime de protection sociale des mandataires non titulaires d'un contrat de
travail mais assimilés salariés pourra bénéficier de l'exonération plafonnée de cotisations de Sécurité sociale s'ils
sont rattachés à la catégorie :* des "cadres relevant de l'article 4 de la convention Agirc" (critère 1 : sens strict) ;*
des "cadres" sans référence à l'article 4 de la convention Agirc (critère 1 : application de la tolérance prévue par la
circulaire du 25 septembre 2013). Sur ce point, il convient de noter que la Cour de cassation, dans un arrêt récent (
Cass. Civ. 2 e , 19 décembre 2013, n° 12-28.429 ), valide ainsi le rattachement d'un mandataire social de SAS à la
catégorie des "cadres et cadres dirigeants" au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail pour le bénéfice d'un
régime de retraite supplémentaire à cotisations définies. Une telle solution pourra également être utile aux
entreprises qui appliquaient les règles d'exonération antérieures au décret du 9 janvier 2012 ;* établie en fonction
de la rémunération (critère 2), ce dernier cas pouvant par ailleurs présenter des difficultés de mise en œuvre.En
revanche, s'ils ne remplissent pas ces critères, l'exemption d'assiette n'est pas appliquée pour la contribution
employeur au titre du mandataire.ConclusionEn résumé, une entreprise qui souhaiterait rattacher des mandataires
au régime de protection sociale complémentaire existant au bénéfice des salariés ou d'une catégorie d'entre eux
doit s'assurer que :* les formalités en droit des sociétés ont été respectées ;* le contrat d'assurance couvre bien les
salariés ou une catégorie d'entre eux et les "salariés assimilés" qui entrent dans cette catégorie. A défaut,
l'organisme assureur pourrait refuser de prendre en charge la couverture du mandataire social même si ce dernier a
acquitté des cotisations ;* le mandataire social entre bien dans la catégorie définie selon les critères 1 et/ou 2
prévues à l'article R. 242-1-1 du code de la Sécurité sociale . A défaut, le financement du régime en sa faveur ne
pourra bénéficier de l'exonération plafonnée de cotisations de Sécurité sociale.(1) Association professionnelle
française indépendante exclusivement représentative des valeurs moyennes cotées.(2) CA Paris, 1 er mars 1996,
Udeco c/ Compagnie Axiva et Misset.
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