la petite bête Le Capricorne

Transcription

la petite bête Le Capricorne
JARDIN
Discrétion, ténacité,
efficacité, invulnérabilité...
tels sont quelques-uns
des qualificatifs (mais non
des qualités !) qui collent
bien au personnage.
Le Capricorne
des maisons
Citoyen du monde...
Un cycle bien opportuniste.
Ce petit Capricorne, redouté
pour ses dégâts dans les
maisons, est connu
depuis plus de trois siècles en Europe : cité
pour la France dès
1762, on en
parle en Norvège, Suède ou
Finlande vers 1774, puis en 1775
en Allemagne. La rumeur le
donne aux Amériques à partir
de 1841, importé, dit-on, avec
des grumes du Vieux Continent.
Cette expansion ne va plus cesser grâce (!) aux échanges commerciaux de plus en plus
nombreux : Asie tropicale, Afrique du Sud, Madagascar,
Amérique du Nord, Australie...
Le développement « normal »
demande trois à cinq ans, ce qui
n’est déjà pas si mal. Lorsque les
conditions deviennent sévères
ou que le bois s’affadit en
vieillissant, la larve ne se pose
guère de questions, elle prolonge d’autant de saisons son grignotage pour arriver à sa taille
définitive, quelque 20 à 25 millimètres de longueur. C’est ainsi
que certains individus creusent
des galeries pendant neuf ou
dix ans, et l’on sait que le record
est de dix-sept années ! Au bout
du compte, émerge entre juin
et août un adulte qui ne vivra
que quelques semaines sans se
nourrir. Chouette, vous direzvous, mais il y a un hic : il passe
ce temps à se reproduire.
De la pinède à la charpente.
D’abord forestier, notre Hylotrupes (du grec « qui perce le
bois ») vivait tranquille dans le
bois mort – mais non pourri – de
divers conifères, qu’ils soient
couchés, en chandelier, avec ou
sans écorce. Bien sûr, on le trouve encore en de telles situations, mais non content de s’y
étendre sur tsugas, thuyas et
autres ornementales, il a surtout choisi la facilité et le
confort du bois d’œuvre :
planches, madriers, meubles et
parquets « rustiques », caisses,
poteaux, poutres, charpentes...
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LES QUATRE SAISONS DU JARDINAGENOV./DÉC. 2000 N0 125
B. CHAUBET
B. CHAUBET
cherchez
la petite bête
Infestation et réinfestation.
Si quelques fous quittent l’auberge les soirs de grosses chaleurs ou les jours d’orages – il
faut bien contaminer les alentours – la plupart des éclos restent sur place, copulent la nuit,
JARDIN
Un jardin
plein de vie
w Hébergez les bourdons
Ce sont les plus actifs et les
plus précoces des pollinisateurs.
Installez-leur un ou plusieurs
abris le long d'un talus bien
exposé, au pied d'une haie
fleurie. Un pot de fleur de
15 à 25 cm de diamètre fera
l'affaire. Enterré à l'envers de
Dégâts et lutte.
On l’a vu, les larves de l’Hylotrupes ne cessent de creuser le
bois durant des années, ce qui
en fait de redoutables ravageurs. Plus inquiétant encore
demeure l’absence d’indices :
peu ou pas de sciure à l’extérieur et une discrétion quasi
absolue des adultes. Lorsque le
bois contaminé cède sous la
pression du doigt... ou s’affaisse
de lui-même, il est trop tard,
d’autant que la lutte curative
reste inefficace.
En prévention, on peut inspecter régulièrement les bois, faire
de la « détection auditive »
(écoute du cheminement des
larves..., mais encore faut-il
tomber au bon moment, être
au plus grand calme et avoir de
l’oreille...) ou compter sur
quelques prédateurs ou parasites !
façon à laisser la base au ras
du sol. Garnissez la moitié du
pot de mousses, d'herbes et
de feuilles sèches et protégez
l'entrée du nid par une large
pierre plate légèrement
surélevée.
Nettoyez-le à chaque fin
d'automne.
w Entretenir la mare
Pour que votre mare reste un
réservoir biologique plein de vie,
ne la laissez pas se faire envahir
par les plantes aquatiques
immergées (élodée du Canada,
Le plus efficace – mais pas forcément le plus écologique (1) –
reste l’emploi de bois spécialement traités, procédé devenu
classique aujourd’hui. D’aucuns
disent qu’il est à l’origine d’une
possible régression du Capricorne des maisons ; à chacun de
choisir sa voie...
Gérard Tiberghien
Gérard Tiberghien est ingénieur INRA
en retraite, entomologiste,
et passionné d’ethnosciences.
1. Pour les alternatives aux
traitements chimiques, voir article
des Quatre Saisons sur les
traitements du bois, n° 112, p. 67.
A. BOSSE-PLATIÈRE
y compris dans les galeries (vous
ne verrez donc que rarement
vos locataires) et pondent : trois
à quatre lots d’une quarantaine
d’œufs chacun, parfois plus (jusqu’à cinq cents au total) s’il y a
réaccouplement. La ponte est
favorisée par la texture externe
du bois et ceux qui portent fissures ou craquelures sont
d’abord choisis ; en outre,
diverses substances attractives,
même celles que dégagent les
excréments des larves, titillent
l’oviscapte de la femelle. Le
reste importe assez peu, si ce
n’est qu’il faut juste un minimum hygrométrique (10 à
12 %) à ce moment-là.
potamots, myriophylles,
renoncules aquatiques, etc.). La
lumière ne pénètre plus et la
mare finira par se combler au
bout de quelques années. C'est
le moment pour la nettoyer,
vous perturberez moins la vie
aquatique. Sur la moitié de la
surface de la mare, retirez les
plantes à la main (les potamots
bien enracinés), au râteau ou à la
fourche (attention à ne pas
percer la bâche !). Et profitez-en
pour enrichir votre compost.
N0 125 NOV./DÉC. 2000 LES QUATRE SAISONS DU JARDINAGE
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