Biotech : Communiquer autrement
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Biotech : Communiquer autrement
Dossier Biotech Biotech Communiquer autrement La communication des petites sociétés de biotechnologie possède ses propres codes, répondant à des enjeux différents de ceux des big pharma… jusqu’au jour où elles prennent leur envol. DR 72 PHARMACEUTIQUES - SEPTEMBRE 2009 investisseurs. Avec tout nouveau client en biotechnologie, ALA présente la première phase de travail comme une ANDREW LLYOD (ALA) : sorte « d’audit interne « LES SCIENTIFIQUES au cours duquel il faut DOIVENT SORTIR DE LEUR définir de façon précise LABORATOIRE » le métier spécifique du client, le valoriser de façon crédible en tenant compte de l’évolution probable du marché ». DR A u sein des PME de biotechnologie travaillent essentiellement des chercheurs. Pas l’ombre d’un profil issu du marketing ou de la communication parmi les équipes. Le premier challenge pour leurs partenaires en relations publiques et relations presse : aider ces hommes et ces femmes purement scientifiques à se mettre en mode « communication ». Andrew Lloyd, fondateur du cabinet de relations publiques Andrew Lloyd and Associates (ALA), implanté à Paris et en Angleterre, en a l’expérience : « Les scientifiques doivent sortir de leur laboratoire afin d’obtenir le respect, de leurs pairs bien sûr, mais aussi celui des financiers, des hommes et des femmes politiques, des citoyens et des businessmen de la big pharma. C’est à nous de les convaincre de l’intérêt de cette communication». Le pur scientifique ne sait pas toujours bien exprimer pourquoi son projet est intéressant et porteur ; « nous devons différencier de façon positive l’approche particulière de l’équipe qui lance son projet, expliciter en quoi cette approche-là est prometBRUNO ARABIAN (MILESTONES) : teuse », ajoute Andrew « UNE SOCIÉTÉ DE Lloyd. Et cela sans jamais BIOTECHNOLOGIE, VUE PAR UN perdre de vue que l’on INVESTISSEUR OU UN ANALYSTE s’adresse à des journalisFINANCIER, PEUT À BIEN DES tes mais aussi à des anaÉGARDS APPARAÎTRE COMME lystes financiers et à des HORS NORMES » Sobriété Ici, pas de communication gadget, champagne et canapé : le ton est sobre, à mi-chemin entre science et finance. Il s’agit de rassurer, de donner confiance. Il est vrai que les motivations de la communication des biotechnologies vont de pair avec un style mesuré. Caroline Carmagnol, pdg de l’agence Alize RP, spécialisée en relations publiques pour les biotech, rappelle ces motivations : « Les sociétés de biotechnologies communiquent avant tout pour gagner en visibilité et se faire connaître – certaines très tôt et dans ce cas, elles communiquent plus au plan de la science et de leur technologie (c’est-à-dire pour annoncer des résultats, sous forme de posters, abstracts, publications dans des supports tels que Nature) ; d’autres plus tard pour cibler des partenaires potentiels comme la communauté du capital risque (pour des levées de fonds complémentaires), les pharma ou les grosses sociétés de biotech (et dans ce cas, elles sont proches des phases cliniques ou déjà en phases cliniques) et encore plus tard pour celles qui sont proches d’une sortie (rachat, fusion ou introduction en Bourse – dans ce dernier cas, on parle de communication financière). » A toutes ces étapes de la communication des biotech, il n’y a pas encore de marque produit, donc pas véritablement de marketing, mais toujours des enjeux scientifiques et financiers. Caroline Carmagnol ajoute qu’elle perçoit quelques moments clés de la communication des biotech, comme >>> LAURENCE JACQUILLAT (LJ COM) : « IL FAUT EXPLIQUER POURQUOI CE NOUVEAU TRAITEMENT APPORTE UN PLUS À LA SOCIÉTÉ, QUEL EST SON MÉCANISME D’ACTION, POURQUOI SON COÛT EST ÉLEVÉ » DR la phase d’éducation du marché à la technologie, puis la première levée de fonds, et enfin les salons et congrès qui sont des occasions de rencontrer la presse. Mais elle ajoute: « Une bonne communication est une communication qui se fait dans la durée, selon un programme au long cours, et non par « coups » pour maximiser les retombées d’une société à court terme ». Régularité Bruno Arabian, fondateur de Milestones, agence conseil en stratégies de communication financière et de relations presse, insiste aussi sur l’importance de cette régularité de communication pour les biotech, même si les chiffres ne sont pas encore là. « Une société de biotechnologie, vue par un investisseur ou un analyste financier, peut à bien des égards apparaître comme hors normes, puisque tous les indicateurs de performances économiques classiques – chiffre d’affaires, bénéfice… - sont souvent inexistants pendant plusieurs années. Par ailleurs, l’échelle de temps est différente ; le calendrier boursier est trimestriel quand l’agenda des biotech s’étire sur plusieurs années, soit le temps de développement d’une molécule. De fait, pendant tout ce temps, l’activité de ces sociétés peut être considérée comme immatérielle. Il faut donc susciter de l’intérêt autrement », explique Bruno Arabian. Les sociétés de biotech doivent trouver des occasions positives de faire parler d’elles, à la faveur d’une avancée dans un développement clinique ou d’une signature de partenariat industriel par exemple. Il ajoute qu’ « une bonne nouvelle est toujours mieux accueillie dans un contexte boursier où tous les voyants sont Ipsen, la stratégie biotech DR Le groupe Ipsen a fait le choix stratégique des biotechnologies. Selon Didier Véron, directeur des Affaires Publiques et de la Communication Groupe, la politique de communication a pour objectif de faire connaître la réalité et la stratégie d’Ipsen auprès de publics ciblés, tant en France qu’à l’étranger. DIDIER VÉRON (IPSEN) : « NOTRE COMMUNICATION EST PORTÉE PAR UN FORT CONTENU TECHNOLOGIQUE » Quelles sont les principales actions de communication d’Ipsen aujourd’hui ? ● Tout d’abord, Ipsen est une société cotée en bourse, qui doit par conséquent communiquer sur ses résultats, ses alliances, l’évolution de son pipeline... Nous diffusons donc des communiqués au vert », tandis qu’une annonce moyenne voire mauvaise peut facilement passer inaperçue dans un contexte de crise… Communiquer au bon moment, de façon régulière, souvent en l’absence de résultats réels pour l’investisseur lambda : telles sont les règles de la communication pour les sociétés de biotechnologie aujourd’hui. Mais un vent nouveau souffle et pourrait bien accélérer la communication de ces sociétés d’avenir. « Les big pharma reconnaissent que l’innovation thérapeutique est en grande partie détenue par les biotech. Dans quelques années, les sociétés de biotech devenues matures auront les mêmes préoccupations que les big pharma », analyse Bruno Arabian. Leur mode de communication évoluera donc nécessairement. Nouvelle dimension Une évolution que souligne aussi Laurence Jacquillat, fondatrice de l’agence de relations presse LJ Com, pour qui sociétés de biotechnologie et big pharma font déjà partie du même univers. « Il est difficile de distinguer les biotech de la pharma classique alors que la différence avec l’industrie des génériques est marquée par l’innovation », précise-t-elle. Une fois franchie l’étape de la première AMM, la communication des biotech ne s’adresse plus seulement aux financiers et scientifiques, mais aussi au grand public. « Un médicament issu des biotechnologies mis sur marché doit être accompagné d’une communication vers les patients. Il faut expliquer pourquoi ce nouveau traitement apporte un plus à la société, quel est son mécanisme d’action, pourquoi son coût est élevé », explique Laurence Jacquillat. Les biotech sont désormais intégrées dans la cour des grands et déploient de nouvelles stratégies de communication à la mesure de leurs enjeux. ■ Emilie Soulez Barselo de presse. Par ailleurs, la communication d’Ipsen repose aussi sur la perception du groupe par son environnement institutionnel, scientifique, industriel... Nous organisons par conséquent des évènements, comme par exemple le symposium du 19 janvier dernier réunissant plusieurs prix Nobel et consacré aux défis de la biologie et de la médecine. Enfin, nous réalisons et diffusons les documents institutionnels (rapport annuel, brochures...) et gérons les outils comme le site Internet d’Ipsen, qui véhiculent l’image du groupe auprès de nos partenaires. En quoi la communication d’une société de biotechnologie comme Ipsen diffère-t-elle de celle d’une big pharma ? ● En raison du profil très spécifique et spécialisé d’Ipsen, notre communication est portée par un fort contenu technologique, et cible particulièrement un nombre plus restreint de media et de leaders d’opinion. Enfin et surtout, elle a pour objectif, dans un esprit de transparence et d’ouverture, d’apporter systématiquement un contenu concret et à haute valeur ajoutée. 77 SEPTEMBRE 2009 - PHARMACEUTIQUES