DESCRIPTIF du FORUM INTERNATIONAL de PHILOSOPHIE
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DESCRIPTIF du FORUM INTERNATIONAL de PHILOSOPHIE
DESCRIPTIF du FORUM INTERNATIONAL de PHILOSOPHIE POLITIQUE et SOCIALE Le Forum International de Philosophie Politique et Sociale » a pour objectif l’organisation d'une rencontre entre les acteurs de différentes équipes universitaires européennes de recherche en philosophie sociale et politique (françaises, belges et italienne). Elle naît de la volonté des jeunes chercheurs affiliés à ces équipes de confronter leurs recherches, leurs approches théoriques et leurs démarches méthodologies respectives, dans une exigence et un désir communs de mieux cerner ensemble les enjeux actuels de la construction d’un espace européen de recherche en philosophie politique et sociale. Cette aspiration a bénéficié ces dernières années du soutien des programmes financés à l'Université de Toulouse le Mirail par l'Agence Nationale de la Recherche et le programme d'excellence du master erasmus mundus EuroPhilosophie de la commission européenne piloté par l'Université de Toulouse. L'ambition des équipes fédérées par l'Université de Toulouse depuis 3 ans autour de ce projet de recherche est non plus seulement l’organisation de colloques internationaux autour de certaines thématiques regroupant des chercheurs de différents pays invités à présenter les résultats des recherches menées isolément les unes des autres, mais de construire des formes de collaboration qui peuvent et doivent être vues comme l’embryon, sur le site régional toulousain, d’un réel espace public européen de réflexion, de production de savoirs, et de publication. L’ambition du Forum International de Philosophie Politique et Sociale (FIPS) est d’ouvrir un questionnement commun, et destiné à s’approfondir dans la durée d’une collaboration continue, sur la façon dont l’espace européen dans lequel la philosophie politique et sociale sera amenée à se développer, peut simultanément entrer comme objet de son questionnement. Assumer cette tâche signifie pour les chercheurs en philosophie sociale et politique associés dans ce projet, réfléchir simultanément sur l’avenir de leur propre discipline comme formation de savoirs spécifiques au sein d’un espace de recherche élargi et diversifié, et sur le rôle spécifique de cette discipline dans le processus de construction de l’Europe sociale et politique. Depuis trois ans le FIPS consiste dans un programme inter-universitaire associant l’ERRAPHIS à la Cellule philosophie du « Centre de Philosophie du droit » (Université Catholique de Louvain), au « Centre International d’Etudes de la Philosophie Française Contemporaine » de l’ENS-Paris (Groupe de Recherches Matérialistes), au « Centro Interuniversitario di ricerca sul lessico politico e giuridico europeo » (Université de Padoue), au programme « Governare la Paura » (Université de Bologne), à l’Institut de Philosophie et de Théorie Sociale (Université de Belgrade) et à l’ « Unité de Recherche en Philosophie Politique et Philosophie Critique des Normes » (Université de Liège), le Département de Philosophie de l'Université de Sao Paulo et associe des philosophes, des psychanalystes, des psychiatres, des sociologues, anthropologues, des membres d'associations européennes et non-européennes travaillant dans l'éducation, dans le social (Pédagogie Nomade, Association des ex prisonniers politiques chiliens en France, HIJOS, Association de l'Amicale europhilosophique, Périferia...), des revues (Le Cahiers du GRM, Dissidences, Offensive, Actuel Marx, Global...) et des syndicats (Mouvement Ouvrier Catholique). Il se structure dans un séminaire itinérant sur les divers sites des équipes associées et leur environnement scientifique et social, et dans un Forum stricto sensu à Toulouse d'une dizaine de jours en juillet ouvert aux étudiants et citoyens. La troisième édition du Forum à Toulouse vise à développer des rencontres avec des chercheurs d'autres disciplines et laboratoires toulousains et non-toulousains, en particulier en sciences sciences humaines et sociales (Anthropologie sociale, Géographie, Sociologie, Politologie, Histoire sociale, Psychanalyse...). Ces rencontres (sous la forme des journées d'études, tables rondes, ateliers, projections de documentaires et films, discussions etc.) seront axées sur des pratiques de transversalités aussi bien entre disciplines qu'entre théorie et pratiques. Le but de cette démarche est non seulement de s'adresser à un public élargi (nonuniversitaire) dans une entreprise de soi-disant vulgarisation des contenus scientifiques, mais également de mettre en confrontation les résultats de la recherche académique avec des pratiques et l'actualité, et de questionner cette dernière à partir du point de vue des praticiens. En outre le Forum se déroulera de façon itinérante entre l'Université (la Maison de la Recherche de l'UTM, la Fabrique, l'Arche) et la Ville (dans les salles mises à disposition par les relations internationales de la ville de Toulouse à l'Espace Duranti, dans des librairies (Terra nova) et des salles de projection (Esav). L'ambition du FIPS est de créer une manifestation culturelle de transversalité philosophique organisée par l'association (loi 1901) Europhilosophie créée par les enseignants-chercheurs du Consortium international de l'Erasmus Mundus Europhilosophie – url. www.europhilosophie.eu/mundus) – afin d'inciter et de soutenir de nouvelles initiatives de recherche innovante en matière de philosophie contemporaine, susceptibles d'avoir un impact dans le champ social et culturel extra-académique. Le consortium EuroPhilosophie, piloté à Toulouse, rassemble 12 universités (9 universités européennes et 3 universités appartenant à des pays non UE) : l’Université de Toulouse II - Le Mirail, l’Université Catholique de Louvain-la-Neuve, l’Université de Bologne, l’Université de Coimbra, l’Université de Luxembourg, la Ruhr-Universität Bochum, la Ludwig-Maximilians Universität München, l’Univerzita Karlova v Praze, l’Université de Hosei (Japon), l’université de Memphis (USA), l’Université Fédérale de Sao Carlos (Brésil). La formation Erasmus Mundus EuroPhilosophie délivre à chaque étudiant un diplôme conjoint de master dans les champs de recherche suivant : 1) Philosophie allemande classique ; 2) Phénoménologies allemande et française ; 3) Philosophie française contemporaine. En deux ans, l’étudiant étudie sur le site de trois universités différentes. La formation à la recherche a lieu par la recherche : des activités de recherches sont organisées et conduites tant par les enseignants du consortium que par les étudiants (sous l’égide de l’Amicale des Etudiants et Diplômés EuroPhilosophie, subventionnée sur fonds propres à hauteur de 15 000 euros annuels), sous forme de séminaires itinérants, de journées d’études ou de colloques internationaux (Toulouse, Prague, Munich, Wuppertal). Les meilleurs travaux des étudiants de master EuroPhilosophie sont publiés sur la plateforme EuroPhilosophie/Recherches, dans la revue « Interpretationes » spécialement créée à l’Université de Prague (revue dirigée par un comité éditorial formé d’étudiants et diplômés EuroPhilosophie. Les universitaires forment le Comité scientifique de la revue. Chaque texte est soumis à une double expertise) ou dans la collection « Libri viredes » aux éditions Bautz (DE). l’Université Catholique de Louvain, a créé un Centre de Recherches spécifique en soutien au master Erasmus Mundus : le Centre de recherches sur la Phénoménologie du Sujet et la théorie de l’Action (CPSA). Tous les ans, l’ERRAPHIS-Toulouse organise deux rencontres des étudiants et chercheurs impliqués dans le programme EuroPhilosophie autour des axes de recherche de l’équipe toulousaine : à l’automne, quinze jours à l’Université de Toulouse avec des chercheurs italiens ; au printemps, dix jours à l’Ecole Normale Supérieure de Paris dans le cadre d’une convention de coopération avec le Centre International d’Etude de la Philosophie Française Contemporaine. L’ERRAPHIS accueille tous les ans deux à trois universitaires/chercheurs non européens boursiers du programme EuroPhilosophie pour un séjour de recherche et d’enseignement de plusieurs mois. Selon le rapport AERES (http://www.aeres-evaluation.fr/Etablissements/UNIVERSITETOULOUSE-2-LE-MIRAIL): « L’intense activité de recherche de l’ERRAPHIS est allée de pair avec l’adoption d’une stratégie scientifique en rupture avec le mythe du penseur solitaire et impliquant une plus grande implication des jeunes chercheurs, le privilège accordé à l’entreprise collective sur l’entreprise individuelle, l’internationalisation systématique de la recherche, l’usage de l’instrument informatique pour la formation à la recherche, l’annonce des activités et la publication gratuite et universelle des résultats sur la plateforme web créée à cet effet à l’adresse : www.europhilosophie.eu » ; « la quantité et la qualité (pour autant qu’on puisse en juger sur la base d’une connaissance forcément partielle) des réalisations de l’ERRAPHIS est digne d’éloge » ; « On compte ( ..) 27 congrès internationaux, colloques, journées, séminaires, stages intensifs. Pour ces dernières opérations, globalement, un nombre très considérable d’institutions françaises, étrangères ou internationales sont impliquées à titre de partenaires » ; la capacité à recruter est importante » : « la stratégie, la gouvernance de l’ERRAPHIS sont admirables, et la vie de cette petite équipe est intense ». Entre 2006 et 2010 l’ERRAPHIS a coordonné un programme Blanc de l’Agence Nationale de la Recherche sous l’intitulé « Subjectivité et aliénation. Métaphysique de la subjectivité et philosophie sociale » (PhiloSubsSoc) placé sous la responsabilité de JC Goddard, directeur de l’ERRAPHIS.. Ll’ERRAPHIS, principal acteur du projet disposait d’un financement de 120 000 euros ; les Archives Husserl de l’ENS-Paris, partenaire 1 du projet, d’un financement de 65 000 euros, le PHIER de l’Université de Clermont-Ferrand de 45 000 euros. Page Web du projet PhiloSubSoc : http://www.europhilosophie.eu/recherche/spip.php?rubrique138. L’objectif scientifique du projet était 1) de produire de nouvelles analyses du concept philosophique et critique de subjectivité en confrontant les perspectives transcendantalistes et naturalistes, classiques et contemporaines et en mobilisant les champs de la philosophie sociale et de la psychopathologie, 2) de théoriser les processus de subjectivation des normes en vue de proposer aux acteurs sociaux un modèle de réflexivité et d’action transformatrice de la réalité sociale. Le résultat le plus pertinent (en termes de recherches et de formation) est la création à l’initiative d'Erraphis du Forum de Philosophie Politique et Sociale comme réseau interuniversitaire permanent (http://www.europhilosophie.eu/recherche/spip.php?rubrique185). Depuis la deuxième édition le Forum s'est ouvert à des collaborations avec des associations et vise cette année un élargissement ultérieur en particulier sur le site de Toulouse. Les thématiques traités dans la troisième édition du FIPS seront : les décolonisations de la pensée, les hétérotopies urbaines et les pratiques de transversalités. Ces axes permettent, d'un côté, de créer une convergence entre les recherches menées par plusieurs équipes, en particulier Erraphis et le CPDR (Louvain – BE), dans le cadre du programme de Master Mundus Europhilosophie, qui réunit des étudiants du monde entier, de l'autre côté, d'élargir le réseau à des chercheurs d'autres disciplines et d'impliquer des associations (nombreuses dans la région) engagées dans le soutien des luttes indigènes ou travaillant sur les Amériques, afin de créer de synergies et de collaborations pour l'avenir, et ancrer dans la réalité sociale toulousaine l'association Europhilosophie porteuse de l'initiative et créée afin de développer les initiatives du consortium (voire statuts en annexe). Les chercheurs des équipes associées ont travaillé tout au long de cette année la problématique de la décolonisation de la pensée à partir de deux auteurs majeurs dans ce champ : Walter Mignolo et Viveiros de Castro qui ont accepté de participer à la manifestation. Selon Mignolo (actuellement professeur invité à Louvain-La Neuve dans le cadre du programme Master Mundus Europhilosophie) il ne suffit pas d’attaquer tout simplement le capitalisme et de se concentrer sur les inégalités de classe. Il est important de le considérer comme un système historiquement spécifique des relations sociales, une forme sociale avec sa propre logique et ses propres lois de mouvement … les impératifs de la concurrence, la maximisation du profit, la productivité, la croissance et la flexibilité, avec toutes leurs conséquences sociales et idéologiques. Colonialités: ce qui est en cause, ce n'est pas seulement les transactions économiques, la production, la distribution et la consommation, mais aussi la vision de la société et de la vie, c’est-à-dire toute la sphère des relations sociales. Ce qu’aussi bien les libéraux que les marxistes ont conceptualisé comme le capitalisme, toujours du point de vue de l’histoire européenne et de l’histoire économique, est la sphère économique de la matrice coloniale du pouvoir, elle-même conceptualisée depuis la perspective des histoires coloniales. La matrice coloniale esquisse en outre un système complexe de relations économiques, sociales, politiques et épistémiques, ancré dans un idéal de l’humanité qui sert de point de référence pour classer et hiérarchiser l'humanité à travers des caractéristiques ethno-raciales, des distinctions de genre et des préférences sexuelles. La thèse basique est que la modernité n'est qu'une fabulation européenne qui possède une facette occulte et sombre: la colonialité. Dit autrement, la colonialité est partie intégrante de la modernité. Modernité et colonialité ne sont que deux faces d'un seul et même processus. Par conséquent, l'expression courante « modernités globales » renvoie à des « colonisations globales » et à une matrice coloniale du pouvoir, qui peut être définie comme « colonialité », et qui fait actuellement l'objet d'une lutte acharnée. Si la modernité ne peut pas exister sans la colonialité, il va de soi que les modernités globales impliquent nécessairement des « colonialités globales ». Le prisme de la matrice coloniale du pouvoir donne ainsi une clef féconde pour lire le monde d'aujourd'hui. La modalité du « penser décolonialisé » naît pourtant à partir du XVI siècle comme réponse aux tendances oppressives et impérialistes des idéaux européens modernes projetés dans le monde non-européen. La matrice coloniale du pouvoir/colonialité travaille sur deux niveaux sémiotiques, celui de l'énonciation et celui de l'énoncé. Dans ce dernier, la matrice coloniale se produit sur 4 dimensions corrélées : 1) la gestion et le contrôle des subjectivités (par les biais de la religion, des musées et des universités, des moyens de communication etc). 2) la gestion et le contrôle de l'autorité (les institutions coloniales) 3) la gestion et le contrôle de l'économie (p.ex. Le réinvestissement des bénéfices obtenus par l'appropriation massive de terre et des matières premières en Amérique et en Afrique par les multinationales, leur exploitation de la main d'œuvre, le commerce des esclaves, les dettes gérées par les institutions économiques comme le FMI) 4) la gestion et le contrôle de la connaissance (par la théologie ou l'invention du droit international qui définit un ordre juridique international, la délégitimation de tout savoir noneuropéen). Prenant conscience de l’asymétrie installée par la voie de la colonisation, les sujets mis en position d’infériorité (les damnés de Frantz Fanon) sont en mesure de se procurer les outils pertinents à la décolonisation. En l’occurrence, ce processus ne peut pas être pris en charge par les catégories, ni par la rhétorique, ni par la logique qui ont généré cet état de précarité qui s'installe également dans l'espace du monde occidental. Au contraire, le détachement vis-à-vis de la rhétorique de la modernité et la logique de la colonialité s'avère indispensable afin de démonter « La Matrice coloniale du pouvoir ». Il ne s’agit pas simplement de nier la modernité, mais plutôt de réviser et dé-construire les dispositifs modernes soutenant à la fois des agencements autres et des contre-dispositifs pour se réapproprier et ré-agencer autrement ce que la « machine du pouvoir colonial » capture, organise et exploite. En partant de la contestation de ces dispositifs, l’ouverture consisterait, dans les slogans altermondialistes, à rendre possible « un monde où plusieurs mondes soient possibles ». Cela ouvre au perspectivisme prôné par Viveiros de Castro auteur de Metaphysiques Cannibales (récemment publié en France par les PUF). Son œuvre constitue une réflexion sur le savoir anthropologique autant que contribution à une métaphysique des devenirs qui doit autant à Deleuze et Lévi-Strauss qu’aux Indiens Tupi du Brésil, ce livre entend participer à un effort plus que jamais nécessaire de décolonisation de la pensée qui libère la métaphysique du ressassement narcissique de notre propre tradition. Quoi de plus contraire, en apparence, qu’anthropologie et métaphysique ? L’anthropologie ne se doitelle pas de ranger les croyances métaphysiques dans le mobilier d’une « culture » et s’en tenir là ? Selon Viveiros de Castro ce serait ignorer les transformations profondes qu’a connues cette discipline dans les dernières décennies. Au lieu de partir de l’idée préconçue qu’elle doit reconstituer aussi « objectivement » que possible les cultures des peuples étrangers, sa partie la plus vivante s’attache à mettre en évidence des cosmologies qui excluent précisément le partage de la nature et de la culture héritée et préformée par le savoir eurocentriste. L’anthropologue n’est plus en position de surplomb par rapport à un « objet », mais fait de son terrain le lieu d’une expérience de pensée radicale qui ne recule devant la remise en question d’aucun fondement. L’anthropologie devient une métaphysique qui ne se distingue de la traditionnelle que par un trait, certes essentiel : elle fait plus confiance en la vertu du plus étranger pour « penser autrement » que dans le génie isolé du penseur de cabinet, ressassant interminablement une tradition narcissique. S’en dégage une métaphysique des devenirs autant qu’une épistémologie des savoirs anthropologiques, qui doit à Deleuze et Lévi-Strauss aussi bien qu’aux Indiens Tupis du Brésil, et qui ne distingue jamais le travail du concept d’un effort pour décoloniser la pensée. Emblématique de cette démarche est l’évocation par Viveiros du cas du cannibalisme guerrier des Tupinambà qui habitaient la côte brésilienne au 16.ème siècle. Les premiers anthropologues avaient interprété la mise à mort et la dévoration du captif comme un sacrifice destiné aux esprits des morts du groupe, à les venger en quelque sorte. L’auteur conteste l’idée selon laquelle des entités surnaturelles, nullement attestées par les sources, seraient impliquées et que leur propitiation serait la raison du rite. La longue période durant laquelle le captif partage la vie des Tupinambà avant la mise à mort, la relation de proximité qui s’établit avec l’exécuteur le conduisent à une autre interprétation : le corps étant partagé entre de si nombreux consommateurs ne pouvait être la raison du rite mais seulement un signe. Ce qu’on mangeait, c’était sa relation d’ennemi à ses dévoreurs, son altérité par un mouvement paradoxal d’autodétermination réciproque par le point de vue de l’ennemi. L’axe du débat est celui d’une décolonisation de la pensée de l’anthropologue, le refus de traduire une culture autre, de la réduire dans les termes de la sienne propre. Il ne s’agit plus de penser sur l’autre mais d’essayer de penser avec lui, d’expérimenter d’autres savoirs. Dans cela Viveiros se veut l'héritier de la tradition du mouvement antropophage, du modernisme de Manuel de Andrade dans les années '20. Les démarches de Viveiros de Castro et Mignolo rejoint celle de Dussel autre argentin exilé à l'époque de la dictature militaire en Argentine, et s'opposent à l'hégémonie (au sens de Gramsci) du savoir/pouvoir colonial. Elles ouvrent également des nouvelles perspectives de l'étude de langues amérindiennes et du problème de la réduction conceptuelle imposée par leur traduction dans les langues européennes. Dans cette perspective il s'agit de restituer aux concepts amérindiens tout leur signification qui échappe aux grilles de concepts traditionnels au fur et à mesure que ces derniers figent UNE SEULE réalité. Cette restitution ouvre à un type de constructionisme conceptuel dans lequel Deleuze saisissait le geste philosophique, à savoir elle peut permettre de s'approprier et introduire d'autres perspectives, concepts et pratiques qui peuvent nous aider à « penser autrement » notre rapport à nous mêmes et aux mondes que nous habitons. En même temps l'Amérique latine est aujourd'hui aussi traversée par des mouvements politiques de décolonisations par les communautés indigènes comme les Mapuches et le mouvement de sem terra au Brésil. Comme le témoignent plusieurs travaux et documentaires présentés aussi dans le dernier Festival du cinéma latino-américain (par exemple l'excellent Newen Mapuche d'Elena Varela), les Mapuches au Chili et en Argentine sont mobilisés dans une lutte farouche contre le pouvoirs publics et les multinationales pour la récupération et réappropriation effectives de leurs terres « ancestrales ». Ils ne se contentent pas d'habiter des réserves assignées par décret mais ils luttent contre l'exploitation du territoire qui leur rendent impossible d'habiter ces terres. Dans cela leur lutte pose le problème de la reconstitution d'un environnement soutenable et extirpation des implantations nocives à l'écosystème.. L'application contre eux par l'appareil policier des lois contreterroristes promulgués pendant la dictature de Pinochet n'est que l'aspect plus emblématique de la résurgence et la ré-actualisation par cette lutte du socialisme latino-américain prôné par l'Unité populaire d'Allende (pensons aux nationalisations contre l'exploitation des matières premières de la part de multinationales et leurs effets sur l'environnement) qui a fait l'objet de deux journées d'étude pendant les éditions précédentes du FIPS. Cette lutte contient pourtant des implications politiques, juridiques et écologiques encore à étudier en profondeur et demeure en grand partie méconnue dans l'espace européen. Tout comme la création en Colombie de Communautés de paix qui essaient de se soustraire à la capture des deux entités en conflit l'Etat colombien et les paramilitaires et la guérrilla de FARC. Elles se revendiquent comme espace autre protégé seulement par des ONG occidentales, et elles sont souvent l'objet de la répression des deux combattants qui s'allient dans la volonté de polariser toute force sociale afin de la soumettre à la logique du conflit En outre ces thématiques permettront de collaborer avec ATRIA association qui réunit plusieurs jeunes chercheurs travaillant sur les Amériques à Toulouse, qui organise cette année une série de rencontres problématisant le rapport entre recherche académique et production audiovisuelle (SCRIPT). En même temps comme le suggérait Guy Debord en 1956« Il ne s’agit plus de délimiter précisément des continents durables, mais de changer l’architecture et l’urbanisme. » Sans se limiter à la psycho-géographie des situationnistes il s'agira aussi de comprendre les hétérotopies plus proches et dans cela de saisir surtout l'apport possible de la psychanalyse à la compréhension d’une dimension de l’espace urbain qui échappe, en dernière analyse, aux savoirs qui s’occupent de la ville. Qu’il s’agisse de savoirs massivement présents dans le débat public et la formation de l’opinion (comme la sociologie urbaine, l’urbanisme, les politiques d’aménagement), ou qu’il s’agisse de savoirs plus restreints et spécifiques (tels la cartographie, la toponymie, l’archéologie ou la sémiologie urbaine), toutes ces disciplines, dont il faudra à chaque fois reconstruire et résumer l’origine et la logique, laissent un reste, ouvrent sur un impensé : celui de la question des effets subjectifs inconscients produits par l’espace urbain. Ce versant se trouve par contre exploré par la littérature, le discours et les pratiques artistiques investissant l’espace public, ainsi que par certaines formes pathologiques d’être-dans-la ville, comme le montrent de façon saisissante certains délires ‘à ciel ouvert’, la construction de déambulations et de trajets à travers la ville associés à des crises psychopathologiques, et d’autres productions de symptômes faisant de l’espace urbain leur territoire de prédilection. Notre recherche sur l’ « envers de l’urbain » se propose ainsi d’explorer la dimension inconsciente de la ville sur ce double axe : envers des discours institués sur la ville ; introduction à ce même envers inconscient à partir de cas cliniques, d'œuvres artistiques et de situations historiques singulières. Il s'agit donc de penser d'interroger la ville et la vie urbaine à partir de certains espaces hétéro-topiques que Foucault appelle « de déviation ». il s'agit des lieux où «on place les individus dont le comportement est déviant par rapport à la moyenne ou à la norme exigée. Ce sont les maisons de repos, les cliniques psychiatriques. Il s'agira d'étudier ce type d'espace et les interrogations qui posent au fonctionnement normalisant et au discours dominant de notre société avec la participation des cliniciens travaillant aux Cliniques de la Borde et de la Porte Ouverte (Belgique) qui essaient de ré-mobiliser dans le champs psychiatrique les fondements de psychothérapie institutionnelle d'Oury et Guattari. Mais Foucault n'aurait aucun problème à citer comme exemples d'autres hétérotopies déviantes aussi les espaces institutionnels tels les écoles et universités nomades comme la pédagogie nomade et l'universidade nomada qui essaient d'opérer une transversalité et transformation institutionnelle de déconstruction in actu de la visant la ré-définition des critères de formation. Ces expériences seront confrontés aux expériences d'éducation populaire réalisées en Europe et Amérique Latine. C'est à Guattari qu'on doit la définition plus conséquent de pratique transversale dans les champs des institutions que le Forum ambitionne de créer et susciter. Dans psychanalyse et transversalité Guattari oppose la transversalité à la fois à une verticalité hiérarchique correspondant à l'organigramme d'une structure pyramidale, qu'à une horizontalité entendue comme « un état de fait où les choses et les gens s'arrangent comme ils peuvent de la situation dans laquelle ils se trouvent ». La transversalité se laisse saisir comme une pratique oblique qui fonctionne par des coefficients de résistance et opposition à un certain aveuglement propre aux fonctions attribués par a société, aux dynamiques de collaboration ou fonctionnement des groupes institutionnels ou même auto-gérés dans la mesure où ils réconstituent une verticalité rigide. On pourrait dire que dans l'université ce dégrée d'aveuglement est déterminé par des effets mimétiques qui visent la reproduction de l'existant et qui empêchent même aux nouvelles générations de refonder ou rectifier certaines pratiques sclérotiques propres à la production d'un savoir qui doit être validé par les autorités de la discipline et qui très souvent empêche une communication et un enrichissement avec d'autres problématiques, positions du problème et façons de l'affronter. Le Forum essaie de produire ce type de transversalité aussi bien entre disciplines et pratiques de recherche qu'avec la société et la vie associatif et militant.