Conclusions des Parties Civiles au Procès Floribert
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Conclusions des Parties Civiles au Procès Floribert
COUR MILITAIRE DE KINSHASA GOMBE R.P : 0066 /2010 M.P et Parties Civiles C/Inspecteur Principal Daniel MUKALAY et Consorts Affaire Floribert CHEBEYA CONCLUSIONS DES PARTIES CIVILES CONCLUSIONS DES PARTIES CIVILES Kinshasa Mai 2011 -1- CONCLUSIONS DES PARTIES CIVILES RP : 066/2010 – COUR MILITAIRE DE KINSHASA/GOMBE POUR : 1. La veuve Madame Annie MANGBENGA NZINGA et les enfants mineurs CHEBEYA, à savoir : BATA CHEBEYA MOLOMA Eric, CHEBEYA MANGBENGA Merdie, CHEBEYA BAHIZIRE Florny, CHEBEYA MUGOLI naomie, CHEBEYA DEMVI MONTANA Fonderine ; 2. Les frères et sœurs du défunt CHEBEYA, à savoir : Mme TSHEBEYA NABINTU, Mme TSHEBEYA TSHIBALONZA, Mr. CHEBEYA NGABOEKOLA Roger, Mme TSHEBEYA NABAMI Adèle, Mr. TSHEBEYA NAMUGWABIZA Fidèle, Mme TSHEBEYA MUKUZO Loraine ; 3. La veuve Marie-jeanne IKOKO NTOMO et ses enfants, à savoir : BAZANA IKOKO, BAZANA MANGWENGA, BAZANA Fidélise, BAZANA AMBA Fidèle, BAZANA LINGANDO, BAZANA EDADI Guylain, BAZANA KIWA Gétou et BAZANA DOSI ; 4. Les frères et sœurs de Fidèle BAZANA EDADI, à savoir : MONGANGO MANZUA, NGONDE Marcel, MAMBANGE Tharsis, MAMBASA Norbert, BAZANA Eugène, LIPEPELE Noël, TEBAPALE Agnès, MANGAI Monique et BABITI Marie Josée ; 5. La Voix des Sans Voix, « VSV », Organisation Gouvernementale des Droits de l’Homme, Non 6. Le RENADHOC, Réseau National des ONGs des Droits de l’Homme de la République Démocratique du Congo, A.S.B.L. ; -2- CONTRE : 1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. Inspecteur principal Daniel MUKALAY wa MATESO ; Inspecteur Georges KITUNGWA AMISI ; Inspecteur Christian NGOY KENGA KENGA ; Inspecteur Paul MWILAMBWE ; Inspecteur-Adjoint François NGOY MULONGOY ; Commissaire Michel MWILA wa KUBAMBO ; Sous-Commissaire Adjoint Blaise MANDIANGU BULERI ; Sous-Commissaire Adjoint Jacques MUGABO, PREVENUS ; Par leurs Conseils respectifs ; EN PRESENCE : 1° DU MINISTERE PUBLIC, représenté par Monsieur l’Auditeur Militaire Supérieur près la Cour Militaire de Kinshasa/Gombe. 2° DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE CONGO, civilement responsable. Par ses Conseils. DU ------------------------------------------------------------------------------------------------------- Vu les décisions de renvoi de l’Auditeur Général des Forces Armées de la République Démocratique du Congo du 13 octobre 2010 déférant les prévenus devant la Haute Cour Militaire (cotes 1 à 18) ; - Vu les décisions de renvoi de l’Auditeur Militaire Supérieur de Kinshasa/Gombe du 13 octobre 2010 les déférant devant la même juridiction ; - Vu les décisions de renvoi de l’Auditeur Militaire Supérieur de Kinshasa/Gombe du 14 octobre 2010 déférant les prévenus devant la Cour de céans ; - Vu l’ordonnance du Premier Président de la Cour Militaire fixant la présente cause à l’audience publique du 12 novembre 2010 ; -3- - Vu les citations à comparaître à l’audience du 12 novembre 2010 et notifiées par exploit d’huissier aux prévenus mieux identifiés cidessus ; - Vu l’instruction de la présente cause ; - Vu les pièces à conviction versées au dossier judiciaire ; - Vu le dépôt au Greffe de la Cour en date du …………………… par le collectif des parties civiles de leurs conclusions préliminaires ; - Vu l’arrêt avant dire droit ; - Vu l’appel des parties civiles contre ledit arrêt sur la compétence et la saisine de la présente Cour de céans ; - Attendu qu’avant de relater les Faits, les Rétroactes et, préalablement à la discussion des infractions en droit, les parties civiles exposeront un avant propos et une introduction pour circonscrire le contexte du procès, présenter les deux victimes et leurs activités ; -4- AVANT PROPOS Messieurs les Composition, Premier Président, Président et Membres de la Les parties civiles commencent leur plaidoirie en présentant à la Cour de céans leurs civilités, leurs sentiments et les défis du procès. 1. Les civilités. Les parties civiles par leurs Conseils tiennent à saluer la Cour de céans et le Ministère Public en sa double présentation (Auditeur Général et Auditeur Supérieur). Ce procès est l’un des plus difficiles de votre carrière, mais vous l’avez conduit jusqu’à ce stade avec courtoisie nonobstant les obstacles conjoncturels auxquels vous êtes astreints. Si par moment le ton était monté du côté des parties civiles, et qu’il était parfois assourdissant, il n’aurait pas causé des dégâts, même pas collatéraux, dans la mesure où le tir de toutes ces balles blanches répondait aux normes requises et aux impératifs de la défense des intérêts des parties civiles. Les armes fourbies par nous n’étaient pas létales mais seulement préventives et leurs impacts extérieurs, parfois incommodants, exprimaient toujours la mesure des attentes de nos clients. En effet à l’occasion de son admission à l’Académie des Sciences Morales, notre brillant Confrère Jacques Vergès s’exprimait en ces termes le 06 février 2006 : « Ayant la passion de défendre, j’interroge naturellement les « affaires qui me sont confiées, et je constate qu’un dossier de « justice est le sommaire d’un roman ou d’une tragédie « inachevée. Du drame qu’il recèle, je suis tour à tour, spectateur, « lecteur de la transcription faite par le juge, enfin coauteur de « l‘épilogue qui lui donne un sens ». Cette passion de défendre reflète d’un côté les chagrins, les angoisses, les découragements et d’un autre les espoirs et les interrogations des parties au procès – En d’autres termes, cette passion d’une part interpelle sur les sentiments des victimes et d’autres part met en relief les défis de l’entreprise judiciaire – Nous allons scruter l’un et l’autre aspect. -5- 2. Les sentiments des parties civiles. La meilleure expression de ces sentiments nous a été révélée lors de la visite que nous avons rendu avec un groupe d’avocats des parties civiles, il y a peu au siège de la Voix de sans Voix où notamment, nous avons eu une séance de travail avec le Directeur Exécutif de la VSV, en présence de la veuve Bazana, du frère de Bazana et d’un enfant du défunt Bazana. Avant de terminer, le Directeur nous a demandé de jeter un coup d’œil au calendrier accroché au mur. Celui-ci renvoyait encore à la position du 1er juin 2010 comme date du jour. Ce geste indique que le compteur est arrêté depuis ce jour-là et Doly a commenté : « C’est Floribert qui avait ajusté le dernier la date… nous la modifierons seulement quand la vérité sera connue, c’est alors que le rythme normal reprendra ! ». C’est à la demande des veuves CHEBEYA et BAZANA que nous avons placé devant vous ces deux chaises vides sur lesquelles sont placées les photos des 2 victimes. Cette présence discrète de CHEBEYA et de BAZANA par le calendrier arrêté et par les deux chaises vides me remet en mémoire un film du temps de ma jeunesse - il y a 40 ans quand je terminais mon doctorat en droit à l’Université de Liège. Le film était intitulé « Z – il est vivant ». Il relatait l’histoire douloureuse de l’enterrement, d’un jeune révolutionnaire grec tombé sous les balles des dictateurs de l’époque. Au moment où tout le monde pleurait pour amener sous terre de dépouille du héros, le jeune frère quitta précipitamment la foule et s’éloigna pour dessiner par terre « Z » l’initiale du nom de son frère et d’entamer la chanson « Il est vivant Z et toute la foule répondit « Z - il est vivant » C’est ce même regain d’énergie qui nous entraîne dans notre choix du ralliement de la défense des parties civiles pour dessiner alternativement par ces plaidoiries « CHE » il est vivant et encore « BA » il est vivant. En effet, CHEBEYA vit, BAZANA vit – Ils vivent à travers le message de démocratie légué aux activistes des droits de l’homme, ils vivent à travers la flamme de leur engagement, ils vivent au travers du -6- modèle de courage, ils vivent, de par le sacrifice suprême qu’ils ont accepté. Ils ont donné leurs vies pour être présentés comme héros aux jeunes congolais et à toutes personnes passionnées des droits humains. L’Ordre National a saisi cette perche de la Société Civile congolaise et c’est dans cet élan que le Bâtonnier National a choisi ma personne pour coordonner ce collectif qui est constitué d’avocats désignés d’office et plaident pro-deo sur désignation des Bâtonniers de Kinshasa-Gombe et de Kinshasa-Matete avec la contribution des ONGDH Congolais. La Société Civile internationale a accompagné la Société Civile congolaise par l’intermédiaire de OSISA (Open Society Initiative for South Africa) Notre conviction, qu’ils sont vivants, sera rendue dans les exposés qui suivent – Mais ils seront réellement vivants et le compteur des jours pourra répartir lorsque votre Cour et la justice fera connaître la VERITE SUR L’ASSASSINAT DE CHEBEYA ET LES CIRCONSTANCES DE LA MORT DE FIDELE BAZANA. C’est là le défi que les parties civiles vont affronter. 3. Le défi. La vérité jaillira-t-elle bientôt ? La réponse nous la trouvons avec un autre célèbre avocat français Maître René Floriot qui a écrit un livre au titre évocateur et intitulé : LA VERITE TIENT A UN FIL ». En résumé : Me Floriot a mis son expérience de grand avocat d'assises au service d'un roman sur la justice à travers l’histoire d’un procès. L'entrepreneur de travaux publics Darteau est assassiné chez lui. L'auteur nous révèle d'emblée qui l'a tué et pourquoi. Or, ce n'est pas sur cet assassin que se portent les soupçons du juge d'instruction et des policiers, mais sur d’autres personnes. Pourquoi ? Parce que des gens, qui détiennent chacun une parcelle de la vérité, se sont tus par crainte, par intérêt ou par indifférence. Avec ce roman Me Floriot démontre brillamment que « la vérité tient à un fil » et que chacun de nous doit être conscient de son obligation d’éclairer la justice. Dois-je en dire plus quand nous avons vécu ensemble le drame -7- de ce procès en ses 25 audiences avec les renseignants qui se dédisent, les témoins manipulés et les prévenus, venant tous d’un même service et décidés à tout faire pour narguer la justice, celle de la Cour Militaire peut-être mais en tous cas, pas la Justice tout court La vérité tient à un fil. C’est pour cela que je m’en vais vous présenter le fil conducteur qui relie comme suit les avocats des parties civiles. -8- 0. INTRODUCTION. A. Les victimes et leur activité. Le devoir de mémoire et de gratitude obligent les parties civiles à faire une rétrospective sur les identités et les activités normales des illustres disparus ; Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA étaient défenseurs de droits humains ; Les droits humains sont garantis par la Constitution de la République Démocratique du Congo ainsi que par le droit international, mais les défendre ainsi que défendre les personnes dont les droits ont été violés peut s’avérer une activité dangereuse notamment en Afrique et en République Démocratique du Congo. Les défenseurs des droits représentent souvent la seule force entre les gens ordinaires et le pouvoir sans frein de l’Etat ; Pourtant ils sont essentiels à la mise en place des processus et d’institutions démocratiques, à la lutte contre l’impunité, à la défense et au respect des droits humains ; Les défenseurs des droits humains sont souvent victimes des harcèlements, des détentions, des tortures, des diffamations, d’entraves à leur liberté de mouvement et d’entraves à la reconnaissance juridique de leurs associations ; En République Démocratique du Congo, ils sont assassinés, enlevés ou portés disparus. C’est ici le lieu de rappeler les dossiers d’autres défenseurs des droits humains, tombés sur le champ de bataille et notamment : - Pascal KABUNGULU, (Président de l’ONG les héritiers de la justice à Bukavu ; - Salvator MUHINDO VUNOKA (Président de l’ONG les bons samaritains à Béni au Nord Kivu) ; - Djimy KASEREKA (COGESKI Rutshuru) -9- Et Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA étaient ceux, d’entre eux que notre pays a connu, ils ont vraiment aimé la République Démocratique du Congo, ils ont combattu le mal, leur lutte était non violente ; Particulièrement en ce qui concerne Floribert CHEBEYA BAHIZIRE, il est né à Bukavu le 13 septembre 1963, marié à Madame MANGBENGA NZINGA Annie, il eut avec cette dernière six enfants dont trois garçons et trois filles ; Floribert CHEBEYA a étudié normalement et fait ses études supérieures à l’Institut Supérieur de Commerce à Kinshasa où il obtint en 1989 son diplôme de graduat en sciences commerciales et financières ; Concomitamment à ses études, il suivit une formation en Droit International Humanitaire en 1983 avec la Croix Rouge du Congo, à l’époque Zaïre, et le bureau du Comité International de la Croix Rouge (CICR) ; Cette formation lui permit d’embrasser aussitôt ses activités de défenseur des droits humains, d’abord comme activiste des droits humains indépendant et ensuite dans le cadre institutionnel des ONGDH, dont il deviendra plus tard Directeur Exécutif de la « VSV » et Secrétaire Exécutif du Réseau national des ONGDH ; En 1993, il reçut le prix REEBOK à Washington aux Etats-Unis d’Amérique. Ce prix est attribué aux activistes des droits de l’homme qui se sont distingués dans leur activité pendant plus ou moins dix ans et qui sont âgés de 30 ans ou plus ; Il commença son action à Kinshasa au début des années 1980, lorsqu’il poursuivait ses études supérieures à l’Institut Supérieur de Commerce de Kinshasa. Il a agi dans la clandestinité sous le régime de la deuxième République, en dénonçant l’absence de liberté politique et la persécution des opposants au régime du Maréchal MOBUTU. Souvent menacé, traqué par les services spéciaux ; il maintenait sa position. Courageux, Floribert ne reculait devant aucun chantage. A peine sorti de la clandestinité le 24 avril 1990, il ne tarda pas à dénoncer les manipulations sur la Conférence Constitutionnelle et prit une part active dans la convocation de la Conférence Nationale Souveraine ; Lorsqu’en 1997 le régime change, CHEBEYA garde sa ligne de défense des droits humains ; - 10 - Il dénonce le phénomène « Enfant Soldat » dans le rang de l’armée venue du Ruanda ; Il manifeste des inquiétudes que lui inspirait le nouveau pouvoir mis en place par des armées étrangères. Ce qui lui a valu une notoriété internationale ; Il prend de plus en plus des positions sur la gestion de l’Etat par le régime en place ; Il dénonce le budget faramineux alloué aux festivités du 30 juin ; Il critique l’opération militaire menée à l’Est du pays contre les rebelles hutus ; Il enquête sur plusieurs dossiers notamment sur l’arrestation et l’exécution de MASASU, sur la mort d’Aimée KABILA, cette jeune femme qui se présentait comme la sœur du Chef de l’Etat ; Il enquêta sur le massacre des adeptes de Bundu Dia Kongo, « BDK » dans lequel il dénonça la cruauté de la Police Nationale Congolaise lors de la répression de ce mouvement ; Avec ses collaborateurs, il s’apprêta à persuader le Roi des belges à ne pas venir en République Démocratique du Congo lors de la célébration des festivités du cinquantenaire de l’Indépendance de la République qui ont eu lieu le 30 juin 2010 ; Ces genres d’intervention singularisent toute l’activité des droits de l’homme pendant toute cette période du Régime MOBUTU et du régime de l’AFDL ; Au cours de l’année 1999, Fidèle BAZANA EDADI rejoignit Floribert CHEBEYA comme chauffeur bénévole et ensuite comme membre de l’ONGDH VSV avant le contrat de travail signé le 05 janvier 2004 avec la VSV ; Pendant les années 2008 et 2009, Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA eurent des grandes activités de défense des droits de l’homme dans le cadre de la VSV et du RENADHOC. Les plus importantes sont les suivantes et auxquelles les victimes prirent une part active : - 11 - En 2008 : - Au mois de janvier, la VSV rappela le dossier de l’assassinat du feu Président Laurent Désiré KABILA, dossier dans lequel les enquêtes ne sont pas clôturées ; - Le RENADHOC organisa et participa à la conférence sous régionale sur les droits de l’homme, conférence à laquelle avaient pris part les sociétés civiles des pays membres à savoir : L’Angola, la République Démocratique du Congo et le Congo Brazzaville ; - Floribert CHEBEYA se rendit tour à tour en Belgique, Suisse et Angleterre dans le cadre des rencontres d’échange d’expériences sur les droits humains ; - La VSV clôtura cette année par un rapport qu’il a dressé sur le dossier Bundu Dia Kongo, « BDK » et les violations des droits Humains perpétrées sur ses adeptes dans la Province du Bas Congo. Ce rapport est versé au dossier judiciaire. Ce rapport épingle plusieurs personnages dont le Général John NUMBI ; En 2009 : - Au mois de janvier, la VSV rappela encore le dossier de l’assassinat de Laurent Désiré KABILA ; - Floribert CHEBEYA participa à Genève au Conseil des Droits Humains, mécanisme qui statue chaque année sur la situation des droits de l’homme dans chaque pays du monde ; - Il participa à Djakarta au forum du Mouvement Mondial pour la Démocratie ; - La VSV adressa à l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise plus ou moins dix-sept lettres sur la violation des droits de l’homme dans l’ensemble et ces lettres sont restées sans aucune suite jusqu’à ce jour ; En 2010 : - La VSV rappela au mois de janvier, le dossier de l’assassinat de Laurent Désiré Kabila ; - La VSV mena une grande activité sur la mobilisation de la société civile congolaise pour une réflexion sur la situation socioéconomique de la République Démocratique du Congo 50 ans après ; - 12 - - Au cours de cette année, le Président de l’UIDH, dont il assumait la Vice Présidence pour l’Afrique Centrale, devait venir en République Démocratique du Congo et Floribert CHEBEYA tenait à lui arracher une audience auprès des autorités du pays, surtout qu’auparavant, ce Président avait été reçu par les Présidents du Togo, Mali et Burkina Faso, quelques membres de cette union devait aussi faire partie de cette tournée ; - Particulièrement le 10 février 2010, Floribert CHEBEYA adressa une lettre à l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise dans laquelle il dénonça les violations des droits de l’homme dans les cachots de la Police. Chose étrange, alors qu’aucune suite n’avait été réservée aux 17 lettres précédentes, l’accusé de réception à cette lettre lui fut déposé à son bureau et en mains propres par le Prévenu MWILA et sur ordre du Prévenu le Colonel MUKALAY à la demande de l’Inspecteur Général John NUMBI. C’est de cette lettre que démarre la tragédie de Fidèle BAZANA et de Floribert CHEBEYA comme nous le montre l’exposé des Faits ci-après : B. LES FAITS Attendu que s’agissant des faits de la cause, il ressort tant de l’instruction préparatoire que juridictionnelle, que le prévenu MUKALAY a eu à exercer le commandement, sans hésiter sur l’ordre de sa hiérarchie, notamment de l’Inspecteur Général John NUMBI au courant du mois de mai et juin 2010 dans le but d’attenter à la vie de CHEBEYA ; Le coup de l’opération contre CHEBEYA est donné par la signature de la lettre du 27 mai 2010, Réf. 00827/PNC/IG/CAB/CJ/2010 (cote 1588) Les autres courriers envoyés par la VSV n’ont jamais fait l’objet de la même attention alors qu’il y avait 17 lettres qui restaient en réserve. Qu’en date du 27 mai 2010, le prévenu MUKALAY, hors le circuit administratif normal, par le biais de son Secrétaire YAV KOT, va récupérer une correspondance de l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise destinée au Directeur Exécutif de l’ONGDH « VSV » pour procéder à l’expédition de ladite correspondance sans passer par les estafettes ; - 13 - Attendu que le lendemain de ladite réception, le prévenu MUKALAY va remettre le courrier sus rappelé à un des sociétaires de l’association des malfaiteurs, qui a joué un rôle déterminant celui d’appât, en l’occurrence le prévenu MWILA wa KUBAMBO ; Qu’arrivé au siège de la VSV vers 10 heures, le prévenu MWILA s’est présenté auprès de Monsieur Olivier KUNGWA comme un policier qui travaille à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise et qu’il a un message particulier à transmettre au feu CHEBEYA ; Qu’étant donné que CHEBEYA était en pleine réunion avec ses collègues, le prévenu MWILA va laisser son numéro de téléphone à Monsieur Olivier de sorte qu’il le fasse signer aussitôt que CHEBEYA aura terminé la réunion. Ce qui fut fait ; Le prévenu MWILA est revenu au siège de la VSV et s’est entretenu personnellement avec CHEBEYA qui lui avait remis sa carte de visite ; Que compte tenu du fait que le prévenu MWILA avait reçu une mission bien déterminée, celle d’attirer le feu CHEBEYA vers l’Inspection Générale de la Police. Ce dernier avec insistance va rappeler Olivier par deux fois au téléphone dans la soirée du 28 mai 2010 pour qu’il demande au feu CHEBEYA d’entrer en contact avec lui car il a un message de la hiérarchie à lui transmettre ; Que comme Olivier KUNGWA s’attardait, le prévenu MWILA, de sa propre initiative, va appeler CHEBEYA pour lui dire que l’autorité va le recevoir ; Attendu que trois jours plus tard, vers 10 heures, le prévenu MUKALAY va appeler le feu CHEBEYA pour lui confirmer le même rendez-vous avec l’Inspecteur Général ; Que dès lors, le prévenu est resté en contact avec le feu CHEBEYA jusqu’il était arrivé à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise avec son Chauffeur, là où le sujet Camerounais résidant à Kinshasa, répondant au nom de Gomer MARTEL les avait vus vers 19 heures dans le bâtiment de l’Inspection Générale de la Police à quelques mètres (4 m) du bureau du prévenu MUKALAY dans une position d’attente ; - 14 - Que contrairement aux allégations du prévenu MUKALAY selon lesquelles il va quitter l’Inspection Générale vers 17 heures 30’, les témoignages de Martel Gomer, du Policier Jonas, de Major Tony (Unité Canine) et l’APP SHAKO suffisent pour que la Cour de céans constate qu’il était bel et bien à l’Inspection Générale après 18 heures ; Le relevé des appels téléphoniques du prévenu MUKALAY révélera que tous ses appels ont été pris en charge par les antennes VODACOM et TIGO proches de l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise jusque 20 heures ; Que ces faits ont été prouvés par les SMS qu’il avait envoyés à une responsable de la MONUSCO, Directeur du BTK et de son épouse d’une part et les relevés téléphoniques d’autre part ; Que le témoignage de ces quatre personnes n’a pas permis au prévenu MUKALAY d’évoluer dans ses mensonges devant la Cour de céans selon lesquels il avait quitté l’Inspection Générale au crépuscule du soir ; Que depuis lors, Messieurs Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA ne sont plus retournés dans leurs domiciles respectifs ; Que curieusement, nous apprenons l’assassinat de CHEBEYA et la disparition de BAZANA par un communiqué de presse fantaisiste du 02 juin 2010 ; tant la presse locale qu’internationale faisant croire que Monsieur CHEBEYA aurait trouvé la mort à la suite d’une aventure amoureuse ; Le mercredi 02 juin 2010, le corps de Floribert CHEBEYA est découvert sans vie à bord de sa voiture de marque Mazda 626 immatriculée KN 0282 BM sur la Route de Matadi au Quartier Mitendi, en face de Joli Site, dans la Commune de Mont Ngafula, allongé sur la banquette arrière. Le pantalon baissé jusqu’aux cuisses, le sexe visible, à côté de son corps s’y trouvait deux faux ongles des femmes. Sur le siège avant droit, il y avait une touffe de mèche et une capote utilisée. Sur le siège du chauffeur, il y avait une boite de capote et une boite de stimulant DAVIGRA et quelques bougies de véhicule éparpillées ; Les habitants du Quartier MITENDI ont expliqué aux enquêteurs que cette voiture a été amenée sur les lieux, escortée par deux jeeps de la Police. Le conducteur de la voiture, après avoir rangé la voiture, a pris place à bord d’une des deux jeeps qui ont foncé en direction de Kinshasa ; - 15 - Après examen par la Police Technique Scientifique, le corps présentait des traces de lésions dans les avant-bras et au niveau des pieds ; il était rigide mais son cou était flexible car il faisait des mouvements irréguliers. La clé de contact se trouvait sur le tableau de bord avec deux trousseaux de clé et un journal contenant différentes cartes de visite placé juste derrière le pare-brise ; Que toutes ces mascarades ont été montées par le prévenu MUKALAY qui, du reste, a empêché la Police Technique Scientifique de bien mener ses enquêtes en lui imposant le timing de travail sous l’œil vigilant du prévenu KITUNGWA Georges, un acteur aussi important de l’association ; Que puisque le criminel laisse toujours les traces et emporte toujours les traces, les prévenus n’arrivent pas jusqu’à ce jour à donner des indications précises sur la disparition de BAZANA à l’Inspection Générale de la Police Nationale ; Cependant les présomptions précises se dégagent de l’introduction tant juridictionnelle que pré juridictionnelle, comme la preuve en sera administrée tout à l’heure ; A titre d’exemple, je citerai le SMS de Christian NGOY à MUKALAY qui demande les instructions pour l’homme des droits et le « challenger » le nom d’une marque de voiture et dans l’espèce l’appellation de code pour le Chauffeur BAZANA ; Que malgré cette obstruction, le rapport présenté par la Police Technique Scientifique avec des photos à l’appui fait état d’un corps ayant des traces de violences visibles et le cou tournant dans tous les sens avec du sang coulant dans sa bouche ; Que pour contourner et désorienter l’enquête, plusieurs stratégies ont été montées entre autres la Commission dite NUMBI et MUKALAY sous la supervision de KITUNGWA Georges ; Que cette commission constituée par NUMBI n’avait pas travaillé parce que celle de MUKALAY, supervisée par KITUNGWA avait la primauté sur la première. Cela se justifie par la présence de KITUNGWA au Camp LUFUNGULA, à l’Inspection Générale et au Labo de la Police Technique Scientifique ; - 16 - Que d’ailleurs, c’est lui qui avait saisi les scellés entre les mains de la Police Technique Scientifique contre le gré de Directeur UNYON qui lui avait ordonné de remettre ces scellés à l’Officier de Police Judiciaire car il n’avait pas le droit de le garder ; Que vu l’implication de la haute hiérarchie de la Police dans l’assassinat et meurtre de CHEBEYA et BAZANA, le Conseil Supérieur de la Défense réuni en session extraordinaire suspend l’Inspecteur Général John NUMBI de ses fonctions et exige qu’une enquête soit menée par le Procureur Général de la République ; C. ANALYSE ET CRITIQUE DES FAITS C.1. CONTEXTE Mr. CHEBEYA est cinquantenaire. assassiné à trente jours des festivités du Vu sa personnalité et son activité, il a toujours présenté un danger pour les institutions. Il a déjà eu maille à partir avec les services de sécurité qui l’ont déjà placé plusieurs fois en détention ; En 2009, il fut arrêté par l’ANR puis acheminé à la DGRS où règne le Colonel MUKALAY ; Le Colonel MUKALAY le connaissant parfaitement bien, devait le mettre en confiance pour l’attirer dans le projet macabre qui était ourdi pour faire taire à jamais Floribert CHEBEYA ; En effet, il fallait chercher une occasion, bien que CHEBEYA était déjà dans le champ visuel de Christian NGOYI KENGA (un des assassins en fuite), qui a aménagé dans un périmètre immédiat de Floribert CHEBEYA ; Le 30 juin approche et les activistes des droits de l’homme s’organisaient pour faire échec à cette manifestation en persuadant le Roi des Belges de ne pas venir au Congo ; Il fallait à tout prix empêcher les activistes des droits de l’homme d’atteindre leur objectif et la personne la plus visée était Monsieur Floribert CHEBEYA. Il fallait le faire taire ; Le projet d’exécution était programmé le 1er juin 2010 soit dans les 48 heures après le dépôt de la lettre ; - 17 - Le Colonel Daniel MUKALAY connaissant l’existence de la lettre écrite à l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise par CHEBEYA allait se servir de la réponse comme appât ; En possession de la lettre du 27 mai, il fait appel à son homme de confiance quoi que étranger au service des courriers de l’Inspection Générale, le Lieutenant MWILA Michel le 28 mai qui était en poste de surveillance dans les environs du siège de VSV à Kintambo pour l’exécution du plan d’appâter Monsieur CHEBEYA par le dépôt de ladite lettre ; C’est ainsi qu’après le dépôt de la lettre, MWILA était chargé de l’attirer vers le Colonel MUKALAY. Finalement MWILA a réussi à mettre CHEBEYA en contact avec le Colonel MUKALAY le 29 mai 2010. A 21 heures 17’, le Colonel MUKALAY appelle CHEBEYA pour lui confirmer le rendez-vous ; Le 31 mai 2010, vers 15 heures, le Colonel MUKALAY se rend à MITENDI, certainement pour inspecter le lieu où la scène de diversion va se passer ; La nuit du 31 mai au 1er juin, le Colonel ne dort pas chez lui à la maison. Il dort à la Gombe aux environs de SOCIMAT, à l’idée d’en finir avec CHEBEYA ; A 09 heures 56’, après avoir eu le programme de l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise, il confirme à CHEBEYA le rendezvous ferme pour 17 heures 30’ ; Il prend soin de faire appel à Christian NGOYI KENGA KENGA et Paul MWILAMBWE, qui à leur tour s’accompagneront de Jacques MUGABO pour éliminer CHEBEYA ; A 20 heures, ils isolent CHEBEYA de tout contact avec tout le monde et passent à l’exécution ; Compte tenu de la personnalité de CHEBEYA, il fallait créer une diversion en prétextant une aventure amoureuse qui a mal tourné d’où la présence des faux ongles, touffe de mèche, capotes, DAVIGRA, le pantalon baissé, le sexé découvert ; - 18 - C.2. DE LA SUSPICION DE MUKALAY Sachant que CHEBEYA était déjà mort la nuit, vers 07 heures du matin le Colonel MUKALAY appelle le Commandant de la Police Technique Scientifique pour descendre sur les lieux dans le seul souci de confirmer la thèse du coït, ne pouvant pas atteindre les lieux faute de carburant, le Colonel MUKALAY s’investit personnellement en achetant le carburant. N’étant toujours pas tranquille, il veut avoir la primeur du constat par l’équipe qui est conduite par NKUNA ; Arrivé au Camp LUFUNGULA où le Colonel Daniel MUKALAY a demandé à NKUNA de le rejoindre, NKUNA ne va pas corroborer la thèse du Coït, il va plutôt soupçonner un meurtre. Le Colonel Daniel MUKALAY a paniqué. C’est ainsi qu’il prit l’option de faire disparaître les traces ; Pour ce faire, il recourt à Georges KITINGWA, à qui il confie la mission de faire disparaître les scellés qui contenaient les indices trouvés sur les lieux de la découverte macabre ; Etant donné que c’est une affaire d’Etat, le Général Jean de Dieu OLEKO, Inspecteur Provincial de la Ville de Kinshasa rend public le décès de CHEBEYA, par un communiqué de presse qui, malveillamment, soutient la thèse du coït en éludant sciemment les traces de violences trouvées sur le corps de CHEBEYA. Alors que le rapport de la Police Technique Scientifique fait état de ces traces de violences ; Ce qui conduit à un examen plus approfondi par l’autopsie ; Il ressort de ce rapport ce qui suit : « Il est vrai que Floribert CHEBEYA était menotté avant sa mort, la piste « de l’asphyxie que l’anatomopathologiste donne semble cohérant « dans le que les lésions trouvées dans les avants bras ne pouvaient « résulter que de la lutte que CHEBEYA était soumis contre la mort suite « à la pression faite au visage par un objet qui ne pouvait pas laisser les « traces notamment un sac plastic car ceci présente un danger « imminent de suffocation lorsque celui-ci est placé par les voies « respiratoires. Etant menotté aux avants bras et pieds, CHEBEYA était « sans défense et à la merci de ses « tortionnaires. » - 19 - D. RETROACTES Bien avant ces faits, lors d’une cérémonie officielle où la Gouverneure Générale du Canada était au pays, Floribert CHEBEYA a manifesté son intention de rencontrer l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise, le Général John NUMBI, pour un entretien ; E. CONCLUSION En date du 10 février 2010, CHEBEYA écrivit à l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise, lui demandant d’humaniser les conditions carcérales des détenus à travers toute la République. Mais curieusement l’Inspecteur Général n’accusera réception de cette lettre que le 27 mai 2010 soit quatre mois plus tard ; Chose curieuse, dès signature de cette lettre, elle tombe entre les mains du Colonel MUKALAY Wa MATESO, sans suivre la procédure normale de transmission de courriers à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, sur ordre du Général John NUMBI ; Le 28 mai 2010, le Colonel MUKALAY fait appel au Lieutenant MWILA wa KUBAMBO Michel pour la déposer en mains propres de CHEBEYA ; Arrivé sur place au bureau de VSV, CHEBEYA était en pleine réunion. Il rencontre à cet effet Monsieur Olivier KUNGWA. Celui-ci se présente en disant qu’il venait de l’Inspection Générale de la Police Nationale. Monsieur Olivier lui fait savoir que CHEBEYA était en réunion. Le Lieutenant MWILA KUBAMBO Michel ne lui présente pas ladite lettre. Aussitôt il laisse son numéro de contact. Pendant la pause, Olivier fait rapport à CHEBEYA du passage de MWILA Michel. CHEBEYA demande à Olivier de le rappeler, ce qui fut fait ; Au retour de MWILA, CHEBEYA se rend compte que cette lettre n’était qu’un accusé de réception et cela ne valait pas la peine qu’il lui soit remis en mains propres. Cependant Floribert formule le vœu de voir les autorités ; MWILA Michel se porte ainsi garant de faire parvenir le message. Au lieu d’intéresser l’autorité attitrée, MWILA Michel va intéresser le Colonel Daniel MUKALAY ; Et Colonel MUKALAY à son tour, va saisir l’Inspecteur Général John NUMBI, qui donnera son accord et demande au Colonel d’organiser cette rencontre en accord avec son service Protocole ; - 20 - Le même 28 mai 2010, MWILA rappelle Olivier vers les heures du soir pour insister sur le rendez-vous en demandant à ce que CHEBEYA l’appelle ; Le 31 mai 2010, le Colonel Daniel MUKALAY appelle Monsieur CHEBEYA à 21 heures 17’ pour lui confirmer le rendez-vous ; Le 1er mai 2010 à 09 heures 56’, le Colonel MUKALAY informe CHEBEYA qu’il sera reçu à 17 heures 30’ par le Général John NUMBI ; A 17 heures 25’, CHEBEYA appelle le Colonel pour lui signifier qu’il était en route mais pris par les embouteillages ; Dans l’entrefaite, Floribert, en bon activiste des droits de l’homme envoie un SMS à son épouse Annie MAGBENGA ZINGA, ainsi qu’au Directeur de Bureau de terrain de Kinshasa chargé des droits humains de la MONUSCO pour leur dire qu’il était au lieu de rendez-vous, dont la teneur dans le SMS du ……….. ; Une transaction téléphonique par SMS s’effectue entre Floribert et son épouse. Les deux derniers SMS ont suscité l’inquiétude de Dame CHEBEYA car non signé par lui. Hélas, c’était le début du chemin de croix de Floribert et de Fidèle BAZANA ; « TOUT ETAIT CONSOMME » ; - 21 - PREMIERE PARTIE : DES FAITS ET RETROACTES LIES AUX INFRACTIONS MISES A CHARGE DES PREVENUS. Attendu qu’en date du 02 juin 2010, fut découvert à Kinshasa sur la colline du quartier Mitendi situé dans la commune de Kinshasa, le corps sans vie de Floribert CHEBEYA BAHIZIRE qui n’était autre que celui du Directeur exécutif de l’O.N.G. des droits de l’homme dénommée « la Voix des Sans Voix », V.S.V. en sigle ; (cotes ….. dossier judiciaire) ; Que la veille de la découverte de son corps, soit le mardi 01 juin 2010, le défunt CHEBEYA avait reçu les appels du prévenu MUKALAY l’informant du fait qu’il serait reçu le même jour par Monsieur l’Inspecteur de la Police nationale, le Général John NUMBI BANZA TAMBO que la victime désirait rencontrer afin d’obtenir par son truchement un rendez-vous auprès du Chef de l’Etat congolais ; Que préalablement à cela, en date du 28 mai 2010 à 10h30’, le prévenu Michel MWILA en tenue civile et agissant en tant qu’émissaire du prévenu MUKALAY, se présenta au siège de la V.S.V. où travaillait le défunt CHEBEYA pour l’y rencontrer et lui déposer par la même occasion la correspondance banale mais signée personnellement de l’Inspecteur général de la police, de retour de mission, pendant que ce sont ses adjoints qui l’avaient apprêtée en son absence ; Que cette lettre faisait suite à la demande de la VSV de février 2010 visant à obtenir l’humanisation des conditions carcérales dans les prisons et différents cachots de la Police nationale et ce, dans le cadre de l’exercice normal des activités de droits de l’homme du défunt CHEBEYA (cotes…… dossier judiciaire) ; Qu’arrivé à la VSV dans le cadre de la mission qui lui avait été confiée, le prévenu MWILA qui se présenta comme étant « Michel, de l’Inspection Générale » alors qu’il était de la Police de Recherche et Investigation (PRI), exigea au réceptionniste de circonstance qu’était Monsieur Olivier KUNGWA, à rencontrer personnellement Monsieur CHEBEYA qu’il ne connaissait pas (voir PV d’audition Olivier KUNGWA) ; - 22 - Qu’ayant été mis au courant de l’indisponibilité de CHEBEYA en ce moment-là pour raison de réunion du comité exécutif de la VSV, le prévenu MWILA prit soin de laisser ses coordonnées téléphoniques à Olivier KUNGWA qui l’appela quelques instants après, pour lui dire que CHEBEYA était à présent disponible et qu’il pouvait revenir comme il tenait à le voir personnellement ; Que quelques minutes seulement après ce coup de fil, alors qu’il était censé, selon ses propres dires, exécuter une mission de renseignement consistant en la filature d’un suspect non autrement identifié, le prévenu MWILA revint précipitamment au siège de la VSV où il fut présenté au défunt CHEBEYA avec lequel il eut un entretien en aparté et auquel il remit en mains propres la correspondance de l’I.G. ; Qu’à cette occasion, CHEBEYA lui remit sa carte de visite, sans trop comprendre la démarche de ce curieux visiteur qui avait tenu à le voir personnellement, alors qu’il ne s’agissait que du dépôt d’un simple courrier du reste adressé à son organisation ; (cotes…… dossier judiciaire) ; Qu’après le dépôt du courrier dans ces conditions, le prévenu MWILA se mit à appeler Monsieur Olivier KUNGWA d’abord pour lui dire que « le message de CHEBEYA était arrivé aux autorités » pendant que CHEBEYA ne l’avait chargé d’aucune mission à ce propos ; ensuite pour demander que CHEBEYA l’appelle afin de connaître la teneur du message dont il était porteur de la part desdites autorités ; Qu’effectivement après la conversation téléphonique entre Olivier KUNGWA et le prévenu MWILA, sur insistance de ce dernier, le défunt CHEBEYA avait fini par l’appeler pour s’entendre dire que MWILA avait transmis son message à l’I.G. qui était disposé à le recevoir ; Que le défunt CHEBEYA n’eut aucun mal à tomber dans le piège qui lui était ainsi tendu, dans la mesure où il avait rencontré Monsieur l’Inspecteur général quelques mois auparavant dans une manifestation au Palais du peuple et qu’il avait obtenu de ce dernier la promesse d’être reçu prochainement à son office et ce, après avoir fait part audit général des difficultés qu’il rencontrait au niveau de son protocole chaque fois qu’il cherchait à le rencontrer ; (cotes…… dossier judiciaire) ; Attendu, en outre et selon les dires du prévenu MUKALAY, qu’au cours du mois de mai 2010, sans préjudice de date certaine, le défunt CHEBEYA l’aurait rencontré à la RAW BANK et lui aurait fait part de ce que nombreuses des correspondances de la VSV étaient en - 23 - souffrance à l’Inspection générale de la police, tout en l’informant de son vœu sus évoqué de rencontrer Monsieur l’Inspecteur général de la police nationale ; Qu’il est apparu au cours de l’instruction de cette affaire qu’avant la rencontre susmentionnée, le prévenu MUKALAY avait déjà, en date du 15 mars 2009, arrêté détenu et menacé d’extermination le défunt CHEBEYA avec d’autres militants des droits de l’homme (cfr dépositions Dolly IBEFO de VSV, Robert ILUNGA NUMBI des Amis de Nelson MANDELA et Christopher NGOY de…..) ; Que, toujours selon les dires du prévenu MUKALAY, il fit part à l’inspecteur général de la police de sa rencontre avec le défunt CHEBEYA et du vœu de celui-ci de le rencontrer, avant que l’inspecteur général ne le charge d’organiser ladite réception en collaboration avec son service de protocole semble-t-il ; Qu’il ya lieu de noter au passage qu’il est étonnant qu’ en sa qualité de Directeur adjoint de la DRGS, le prévenu Daniel MUKALAY n’ait pas occupé le bureau mis à sa disposition aux côtés de son supérieur hiérarchique, lequel local est resté à ce jour inoccupé, préférant être délocalisé à l’I.G où l’Inspecteur général de la police lui avait curieusement attribué un bureau à ses côtés, pour des raisons non élucidées. Que c’est dans ce contexte que le 27 mai 2010, le prévenu MUKALAY fit sortir du circuit de transmission et sur ordre de l’Inspecteur général lui-même, la réponse que celui-ci adressait à la VSV, pour l’expédier un jour plus tard et à dessein, soit le 28 mai 2010, par le prévenu MWILA de la PRI, son ancien collaborateur dans les services spéciaux qui fut plusieurs fois son parsec circonstanciel. (cfr dépositions YAV KOT + TSHAMUANGANA et déclarations de MWILA lui-même) ; Attendu qu’il ressort des déclarations du prévenu MUKALAY ainsi des relevés des appels téléphoniques versés au dossier que ce dernier avait appelé le défunt CHEBEYA, d’une part, en date du 31 mai « pour l’informer sur l’accord de principe de l’Inspecteur Général de le recevoir » et, d’autre part, en date du 1er juin 2010 par deux fois pour lui annoncer que l’inspecteur général le recevrait au soir vers 17 heures ; Qu’avant d’effectuer le déplacement et comme d’habitude pour un activiste des droits de l’homme, le défunt CHEBEYA prit le soin d’en aviser différents collaborateurs de son organisation ainsi que son - 24 - épouse à qui il demanda de bien vouloir suivre la situation comme s’il avait un mauvais pressentiment ; Que chemin faisant, il appela le prévenu MUKALAY ainsi que sa propre épouse pour les informer du fait qu’il était en route; Attendu que c’est peu après 17 heures que feu CHEBEYA, conduit par son Chauffeur BAZANA EDADI, était arrivé dans l’enceinte de l’Inspection générale de la police où il attendait d’être reçu par l’Inspecteur général de la police nationale et d’où il émit ses derniers SMS conformes en direction de sa femme et de la responsable de la section droits de l’homme de la MONUSCO, comme le démontrent les relevés téléphoniques susdits. Que pour contourner cette évidence établie par la technique, le service du protocole de l’Inspection générale a prétendu avoir clôturé ce jour là l’enregistrement des visiteurs à 12h et ce, contrairement aux habitudes selon lesquelles tant que l’Inspecteur général ou l’un de ses adjoints est encore au bureau, ledit service ne peut pas prématurément arrêter le travail. Que cela est d’autant plus intrigant qu’en l’espèce, le général ALONGABONI, Inspecteur général adjoint de la police entendu comme renseignant, était resté à son bureau jusqu’après 16 heures (cfr audition du Général ALONGABONI ) ; Attendu que, par ailleurs, au moment où le défunt CHEBEYA attendait d’être reçu par l’Inspecteur général, il avait été aperçu sur les lieux, en compagnie d’une autre personne non autrement identifiée, par Monsieur GOMER MARTELL, sujet camerounais en détention dans les cachots de la PRI/échangeur sur ordre du prévenu MUKALAY devant lequel il devait instamment comparaître le même jour du 1er juin 2010 aux environs de 19 heures ; Qu’en effet, les relevés téléphoniques démontrent que le téléphone du défunt CHEBEYA était toujours à ces heures là pris en charge par les antennes téléphoniques qui couvrent l’Inspection générale de la police et ce, jusqu’au moment où toutes les tentatives de son épouse de le joindre au téléphone se sont avérées vaines ; Attendu qu’au soir de cette même date du 1er juin 2010, le téléphone du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA, commandant du bataillon Simba, unité de la Police nationale issue de la Force aérienne des - 25 - FARDC et placée sous le seul contrôle de l’Inspecteur général de la police, avait été respectivement pris en charge par les antennes de télécommunication couvrant l’itinéraire allant de l’Inspection Générale de la Police située dans la commune de Lingwala jusqu’ à Mitendi dans la commune de Mont Ngafula où le corps sans vie de CHEBEYA fut abandonné, en passant successivement par les communes de Bandalungwa et Ngaliema ; Qu’en outre, au cours de son macabre itinéraire de cette nuit du 1er au 02 juin 2010 tel que retracé par l’expert de la société Vodacom au cours de l’instruction de la cause, le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA échangea plusieurs communications téléphoniques avec les prévenus MUKALAY et PAUL MWILAMBWE qui, manifestement suivaient pas à pas son périple ; Qu’entretemps, l’instruction de la cause renseigne que dans un temps voisin du crime, le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA avait pris en location une parcelle située sur la même avenue où résidait le défunt CHEBEYA dans la commune de Ngaliema et à quelques maisons du domicile de ce dernier, résidence que le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA partageait avec son ami le prévenu Paul MWILAMBWE, commandant titulaire du service de protocole et sécurité de l’Inspection Générale de la police ; Que, bien plus, lors de la perquisition effectuée par l’Auditorat Général des FARDC dans cette maison, il avait été découvert, notamment, une importante quantité d’armes et munitions de guerre, des préservatifs de marque « prudence », semblables à ceux retrouvés dans la voiture à côté du corps de la victime ainsi qu’un journal ayant à sa une le titre « la mort confirmée de CHEBEYA » ; Qu’après la découverte du corps sans vie de CHEBEYA, les prévenus Christian NGOY KENGA KENGA et Paul MWILAMBWE ont quitté précipitamment la ville de Kinshasa pour se plonger dans la clandestinité jusqu’à ce jour. Attendu qu’à la suite des enquêtes qui ont été menées, la population de Mitendi a rapporté par le truchement de son chef de quartier Monsieur MBALA que la voiture de marque Mazda modèle 626 dans laquelle fut trouvé le corps de CHEBEYA avait été escorté, dans la nuit du 1er au 02 juin 2010, par deux Jeep de la Police avant que son conducteur ne descende pour prendre place à bord d’une desdites Jeeps qui sont ensuite reparties en direction de la ville en abandonnant la Mazda sur place à Mitendi ; - 26 - Qu’or, les mêmes enquêtes ont démontré qu’une Jeep de l’unité canine de la police fut réquisitionnée de force à la même date du 1er juin 2010 par le prévenu MUKALAY qui en confia la conduite à des policiers en civil dont il n’a pas daigné révéler l’identité et ce, après avoir brutalisé l’élément SHAKO de l’unité canine qui en détenait les clés de contact. Que, bien plus, ladite Jeep n’a été restituée à cette unité que trois jours après au motif fallacieux qu’elle était affectée à la mission de traque du fugitif commandant de l’unité canine nommé Jerry qui tentait prétendument d’échapper à une procédure disciplinaire initiée contre sa personne; Que, curieusement, interrogé sur le rapport qui lui fut fait à ce propos par l’équipe à laquelle il avait confié cette importante mission, le prévenu MUKALAY a surpris la Cour et les plaidants en soutenant qu’il ne s’était plus intéressé à cette affaire à cause d’autres charges autrement plus importantes qu’il assumait à cette époque ; Que toujours est-il qu’après la découverte du corps sans vie de Floribert CHEBEYA par la population qui alerta la police la plus proche, l’OPJ Mukendi effectua le déplacement du lieu et procéda au premier constat du corps, avant que n’intervienne la police technique et scientifique ; Attendu qu’ayant été alerté de la découverte du corps sans vie de CHEBEYA par la population l’OPJ MUKENDI fut le premier auxiliaire de justice à se rendre sur le lieu où, après avoir établi son PV de constat, un différend l’opposa aussitôt au Bourgmestre de la commune de Mont Ngafula à propos de l’enlèvement du corps de la victime ; Qu’en effet, le susdit Bourgmestre, Monsieur Olivier SAYA, ordonnait l’enlèvement du corps sur un ordre téléphonique prétendument reçu du Procureur de la République de Kinshasa/Gombe alors que l’OPJ susmentionné soutenait qu’un tel enlèvement ne pouvait être ordonné qu’après un constat formel effectué sur terrain par le Procureur ou son délégué, quod non in specie ; Que, sur ordre téléphonique de l’Administrateur Général de l’ANR transmis à son chef de poste présent sur les lieux, le Bourgmestre a prétendu s’être ravisé et aurait rappelé le Procureur sus évoqué qui promit de déléguer son premier substitut aux fins de procéder au constat d’usage et d’autoriser finalement l’enlèvement du corps ; - 27 - Que pourtant, à l’arrivée dudit substitut, le corps avait déjà été placé dans un véhicule conduit par le commissaire principal NGOLE, Commandant de détachement de la Police Criminelle au Commissariat de la Colline dans la commune de Mont Ngafula, accompagné de l’OPJ MUKENDI, à destination de la morgue de l’Hôpital Général de référence de Kinshasa et ce, sur ordre du Bourgmestre qui lui aurait remis la somme de 20 dollars américains pour l’achat du carburant nécessaire à cet irrégulier transfert ; Qu’interrogé sur les circonstances qui l’avait conduit à prendre le volant dudit véhicule, sieur NGOLE a soutenu qu’il en avait reçu les clés de contact des mains des agents de la Police Technique et scientifique, spécialement du commissaire NKUNA ; Attendu qu’avant cet enlèvement du corps, la police Technique et Scientifique conduite par le commissaire NKUNA, avait également effectué sur la scène du crime, qu’elle dit malheureusement avoir été polluée, des constats importants dont elle prit des images et qu’elle mentionna dans son premier rapport technique selon lequel le sang coulait de la bouche du défunt, son coup était flasque et faisait des mouvements irréguliers dans tous les sens pendant que le reste du corps était déjà rigide, les poignets et les jambes de la victime comportaient des traces de menottes ou d’autres liens similaires; Que, curieusement, les traces de sang constatées sur la commissure gauche des lèvres du défunt semblent avoir été effacées sur le trajet qui conduisit le corps de Mitendi à la morgue de l’Hôpital Général de référence de Kinshasa en passant par une escale au sous commissariat la Colline où l’OPJ MUKENDI MUYEMBI descendit du véhicule pour rédiger une réquisition à médecin qu’il confia à sieur NGOLE à qui il adjoignit un élément de la Police de son sous commissariat non autrement identifié et ce, pour le reste du trajet menant à la morgue susdite. Que le même commissaire principal NGOLE, après avoir déposé le corps à la morgue, achemina la voiture du défunt au camp Lufungula et fut par la suite intégré par le prévenu Daniel MUKALAY dans la commission d’enquête qu’il mettra précipitamment en place après la révélation du crime ; - 28 - Qu’en sus de ce qui précède, le rapport de la PTS releva de curieux indices qui s’avérèrent par la suite être destinés à brouiller les pistes de l’enquête, en l’occurrence une mèche de cheveux, des faux ongles de femme, un préservatif de marque prudence déroulé mais non utilisé ainsi qu’une boîte de préservatifs non encore utilisée, le tout gisant dans le véhicule où était allongé le corps à moitié dénudé de la victime, dont le pantalon avait été baissé laissant entrevoir son organe génital. Attendu que pendant ce temps, le prévenu MUKALAY avait, prorio motu, pris l’initiative de mettre en place une commission d’enquête dans laquelle ont retrouvait ses hommes de confiance, en l’occurrence le prévenu Georges KITUNGWA, son collaborateur immédiat à la DRGS qu’il prétendait au début de l’instruction n’avoir connu que lors de sa récente affectation à Kinshasa en provenance de Mbuji Mayi alors qu’il s’est avéré par la suite que cela était faux ; Que la commission d’enquête ainsi mise en place par le prévenu MUKALAY interrompit la PTS dans la suite de son travail devant consister en l’analyse au laboratoire des divers indices prélevés sur la scène du crime. Qu’en outre, le même prévenu MUKALAY harcela le commissaire NKUNA de ne pas présenter de rapport technique de la scène du crime à qui que ce soit d’autre y compris son supérieur hiérarchique le colonel VAN BILE qui, mis au courant de cet état de choses, conseilla vivement à son collaborateur de ne pas obtempérer à un tel ordre manifestement illégal et d’établir en conséquence le rapport circonstancié ad hoc que l’Auditorat Général a fini par réclamer comme le pressentait justement le colonel VAN BILE ; Qu’en l’espèce, le prévenu MUKALAY, d’une part, arracha les scellés contenant les indices prélevés sur la scène du crime des mains du commissaire NKUNA pour en confier la garde au prévenu Georges KITUNGWA sans motif plausible en droit et, d’autre part, dépêcha plus tard le même prévenu Georges KITUNGWA pour récupérer manu militari entre les mains du commissaire NKUNA les images de la scène du crime sur lesquelles ont pouvait voir les marques des violences subies par la victime ; - 29 - Que sous la surveillance du prévenu KITUNGWA ces images furent effectivement acheminées au bureau du conseiller papa MUKALAY qui n’en a pourtant pas tenu compte dans la mouture du communiqué de presse qu’il était en train de rédiger et ce, malgré les protestations de l’équipe de la PTS qui lui faisait remarquer que les traces de violence sur le corps de la victime étaient patentes (cfr déposition du commissaire NKUNA à l’audience du 20 janvier 2011); Que sur la même lancée, le prévenu MUKALAY interpella vigoureusement le commissaire NKUNA au camp Lufungula pour lui enjoindre de s’abstenir de tout comportement, attitude ou commentaire pouvant mettre en péril les intérêts du Gouvernement, que la Police est censée soutenir sans faille, en cette affaire et ce, dans la mesure où le commissaire NKUNA manifestait des velléités de faire rapport aux autorités judiciaires du travail effectué sur terrain et des conclusions préliminaires auxquelles son équipe descendue sur terrain avait abouti (cfr déposition du commissaire NKUNA à l’audience du 13 janvier 2011) ; Attendu qu’il sied de signaler qu’après le développement des images de la scène du crime, les éléments de la PTS se sont retrouvés au bureau de Monsieur MUKALAY, conseiller de l’Inspecteur Général chargé de la communication, pour une séance de travail au cours de laquelle ils firent remarquer aux personnes présentes que le paragraphe du communiqué de presse ,en cours d’élaboration, faisant allusion à l’absence de traces de violences sur le corps de la victime n’était pas conforme à la réalité telle qu’elle ressortait des photos prises sur la scène du crime ; Attendu que, toujours contre l’avis de la PTS, l’Inspecteur provincial de la Police/ville de Kinshasa, le général Jean de Dieu OLEKO, a rendu public le communiqué de presse faisant état de l’absence de traces de violences sur le corps de la victime, contribuant ainsi à la désinformation visant le brouillage des pistes de l’enquête ; Que lors de son audition à l’audience du 7 février 2011, ledit général avait affirmé assumer entièrement le contenu et la responsabilité découlant de la teneur dudit communiqué qu’il prétendit, par ailleurs, avoir été rédigé par son propre état major, dont certains membres cités par lui-même n’hésitèrent pas à le désavouer publiquement à la barre comme ce fut le cas de l’Inspecteur KILUKU LUBINGA Petit Jean, - 30 - P2 à l’Inspection Provinciale de la police/ville de Kinshasa, qui nia formellement avoir fourni au général les informations mensongères portées par son communiqué relativement à une prétendue absence de traces de violences sur le corps de la victime ; Que, de même, il s’avéra que, face au désaveu sus mentionné, l’autre source alléguée des informations erronées susdites citée par le même général OLEKO, à savoir Monsieur Kajax KABANGU, chef S2 de la Police nationale/District de la Lukunga, dont le rapport ad hoc fut lu à l’audience par la Cour, avait plutôt mentionné dans son susdit rapport que le corps de la victime comportait effectivement des traces de violences, contredisant ainsi de nouveau le renseignant OLEKO dans ses affirmations à la barre ; Qu’il convient aussi de noter que l’instruction de cette cause a mis en évidence le rôle déterminant joué par l’Inspecteur principal Jerry KAHOZI, chef de département en charge des renseignements à la DRGS, dans la détermination du contenu du communiqué de presse décrié ci-dessus qui, de son propre aveu, fut préalablement soumis à sa censure en tant qu’expert en la matière commis au lieu de sa rédaction et qui estima que le projet présenté par le général OLEKO était le plus exhaustif et explicite au regard des règles de l’art en matière communicationnelle, semble t-il ; Attendu que finalement lorsque la veuve CHEBEYA et quelques défenseurs des droits humains amis et collègues du défunt CHEBEYA entreprirent de le rechercher après qu’il ait cessé de donner des signes de vie par son téléphone, la veuve susdite fut, en date du 2 juin 2010, dans l’avant-midi, accueillie au poste d’entrée de l’Inspection Générale de la Police par le prévenu François NGOY MULONGOY, commandant adjoint chargé du protocole et de la sécurité de l’Inspection Générale de la Police nationale (issu de la DRGS où, selon lui, il fut affecté par le prévenu Daniel MUKALAY) qui dissimula l’identité du prévenu Michel MWILA ; Qu’en effet, le prévenu François NGOY MULONGO avait prétendu que le numéro du prévenu Michel MWILA lui remis par la veuve CHEBEYA aux fins d’un contact possible avec lui appartenait plutôt à un certain COACH non autrement identifié dans un premier temps, avant d’être ensuite identifié comme étant un certain MWALIMU, commissaire à la DRGS ; - 31 - Que pourtant, il s’est par la suite avéré que le prévenu François NGOY MULONGOY connaissait parfaitement le prévenu Michel MWILA que recherchait la veuve CHEBEYA comme étant le mystérieux « Michel » qui avait porté le courrier de l’IG à son mari et qui avait eu avec lui une conversation téléphonique au cours de laquelle il lui avait confirmé que les « autorités de la police » étaient disposées à le recevoir conformément au vœu qu’il avait exprimé à ce propos ; lequel « Michel » le prévenu François MULONGOY a présenté à la veuve CHEBEYA comme un inconnu qui s’était permis de déposer au siège de la VSV, sous ce prénom-là, le numéro du prévenu MWILA en prétextant que c’était le sien ; ce faisant, le prévenu François NGOY MULONGOY présentait ainsi à dessein le prévenu MWILA comme étant différent du nommé « Michel » qui déposa la correspondance de l’I.G. à la VSV (cotes 760 à 764 du dossier judiciaire). Que par ailleurs, alors qu’ en sa qualité de chargé de protocole et de la sécurité adjoint de l’Inspection Générale de la Police, il avait toute l’information sur le fait que l’enregistrement des visiteurs avait sciemment été arrêté ce jour-là à 12 h sur ordre de son chef hiérarchique le prévenu Paul MWILAMBWE, le prévenu François NGOY avait fait mine d’en découvrir le contenu en même temps que la veuve CHEBEYA à qui il avait hypocritement suggéré d’y jeter un coup d’œil pour tenter d’y retrouver les traces du passage de son mari et ce, avant de la désorienter complètement en lui suggérant de poursuivre ses investigations en direction de l’ANR (cfr cotes 305 à 310 du dossier judiciaire) ; Attendu que le prévenu Blaise MANDIANGU BULERI, secrétaire du Bataillon Simba arrêté et détenu par l’auditorat général pour avoir été en contact permanent avec le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA pendant la période suspecte et pendant la cavale de celui-ci, adressa secrètement au commandant a.i. de son unité, le commissaire Henri NDATI, une note manuscrite dans laquelle il lui demandait impérativement de brûler toutes ses cartes SIMS sans en indiquer la raison profonde qui peut néanmoins être trouvée dans la volonté d’effacer les traces des communications sus évoquées échangées avec son commandant de bataillon en fuite suite à son implication avérée dans cette affaire ; - 32 - Attendu qu’en ce qui concerne le prévenu Jacques MUGABO en fuite, garde du corps du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA, il faut souligner que le texto envoyé à ce dernier par le prévenu Christian NGOY pendant la période suspecte indique clairement qu’il était aux côtés de celui-ci au moment où il sollicitait des ordres précis auprès du prévenu MUKALAY et d’autres personnes non identifiées, sur ce qu’il convenait de faire du « CHALLENGER », c’est-à-dire l’adversaire CHEBEYA qui était dans leur filet ; Que ceci explique leur cavale depuis la découverte du forfait par eux commis selon l’itinéraire retracé par le relevé téléphonique du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA ; Attendu qu’à la suite de la découverte du corps sans vie de CHEBEYA et de l’implication manifeste des éléments de la police nationale congolaise jusqu’au plus haut sommet, les parties civiles avaient demandé et obtenu du gouvernement congolais l’acceptation du concours d’une expertise médico-légale qui fut menée par l’équipe de médecins néerlandais et congolais sous la conduite des Docteurs Van de Goot et TSHOMBA HONDA dont le rapport rendu public le 08 juillet 2010 a confirmé que la mort de Floribert CHEBEYA a été de toute évidence causée par des actions extérieures ; Que tels sont les faits de la cause dont il convient à présent de tirer les conséquences en droit au vu des préventions mises à charge des différents prévenus par le Ministère Public ; - 33 - DEUXIEME PARTIE : DISCUSSION EN DROIT Attendu qu’outre l’infraction commune d’association des malfaiteurs mise à leur charge, les prévenus susmentionnés sont également poursuivis selon le cas pour assassinat de Messieurs Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA, terrorisme, détention illégale d’armes et munitions de guerre ainsi que la désertion simple ; Que les plaidants, la veuve, les enfants, les frères et sœurs de CHEBEYA étant principalement préjudiciés par l’assassinat de ce dernier par les prévenus dans le cadre de leur association criminelle, il convient en conséquence d’analyser les éléments constitutifs de ces infractions dans le chef desdits prévenus, avant d’aborder éventuellement ceux des autres infractions connexes ; I. DE L’ASSOCIATION DES MALFAITEURS Attendu selon l’article 156 du code pénal congolais livre II, « toute association formée dans le but d’attenter aux personnes ou aux propriétés est une infraction qui existe par le seul fait de l’organisation de la bande » ; Que l’article 157 du même code dispose que « les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui auront exercé un commandement quelconque seront punis de mort » ; Que l’article 158 dudit code dispose enfin que « tous autres individus faisant partie de l’association et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande des armes, munitions, instrument d’infraction seront également punis de mort » ; Attendu que selon la doctrine, cette infraction se reconnaît au triple critère de l’existence d’un groupement, d’une organisation et du but poursuivi ; (G. MINEUR, commentaire du code pénal congolais, 2ième éd. Ferdinand Larcier, Bruxelles, 1953, P. 336) ; Que s’agissant de l’existence d’un groupement, la jurisprudence considère qu’il s’agit d’une entente, même momentanée, entre plusieurs personnes ayant pour but d’attenter aux personnes ou à leurs propriétés, qu’il y ait ou non attentat, CSJ, 1er juillet 1980, RP 319, citée - 34 - par KATUALA KABA KASHALA, Code pénal congolais annoté, Ed. BATENA NTAMBWA, Kin, 2004, P. 99 ; Que l’organisation s’entend par une entente préalable entre les membres de la bande (Mineur, idem) ; Qu’en ce qui est du but poursuivi, la doctrine l’explique par le fait que l’association ait été expressément formée pour cet objet, c’est-à-dire, la commission des infractions visées par ladite association (MINEUR, Op. Cit., P. 337) ; Que les trois critères pré rappelés sont parfaitement applicables à la bande constituée par les prévenus dans la mesure où il est apparu que les prévenus ont œuvré dans une entente préalable à la commission de l’infraction ; Que cette entente ou concert préalable s’est manifesté par le fait que des rôles précis furent assignés à chacun des membres du groupe dont certains étaient chargés d’attirer la victime dans le traquenard, d’autres de lui faire subir des actes de violence déplorés et d’autres enfin pour effacer les traces du crime et assurer l’impunité à ses auteurs matériels ; Que tout cela réalise les conditions de l’article 156 du code pénal livre II sus évoqué qui précise que l’infraction existe bel et bien du seul fait de l’organisation de la bande ; Attendu que par ailleurs et dans le cas d’espèce, cette infraction est indiscutablement établie dans le chef de chacun des prévenus sur pied des articles 157 te 158 du même code, comme il sied de démontrer dans les lignes qui suivent ; 1.a. Cas du prévenu Daniel MUKALAY WA MATESO Attendu que tant à l’issue de l’instruction préparatoire qu’à l’audience publique, il est clairement établi que le prévenu MUKALAY a indiscutablement pris le commandement de la bande dont les membres ont été soigneusement sélectionnés par ses soins exclusifs ; membres dont la plus part sont des éléments des services des renseignements de la police comme lui-même ; - 35 - Que plus précisément, il est apparu qu’après avoir sélectionnés lesdits membres, c’est encore le prévenu Daniel MUKALAY qui avait assigné à chacun d’eux un rôle précis à jouer selon le plan d’exécution de l’attentat projeté sur la personne de CHEBEYA et incidemment sur celle de son chauffeur Fidèle BAZANA ; Que c’est ce qui fait qu’en retour, chacun des intervenants avait l’obligation de rendre compte de l’accomplissement de sa mission au prévenu MUKALAY en sa qualité de commandant de la bande ; Qu’en désignant les membres de l’association qui lui rendent ensuite compte de l’état d’exécution des misions leur assignées, il va sans dire que le prévenu MUKALAY avait la direction effective de l’association criminelle qui a assassiné Floribert CHEBEYA et que donc, l’infraction d’exercice de commandement dans une association des malfaiteurs est amplement établie dans son chef en fait comme en droit ; 1.b. Cas du prévenu Georges KITUNGWA Attendu que l’appartenance du prévenu KITUNGWA à la bande est illustrée par le rôle qu’il a joué dans la commission d’enquête mise en place par le prévenu MUKALAY qui l’y avait incorporé dans le but manifeste de contrôler et surveiller tous les autres services et personnes impliqués dans ladite enquête afin d’en circonscrire les résultats conformément aux intérêts de la bande ; Que c’est ainsi que le prévenu KITUNGWA a eu à se rendre personnellement au laboratoire de la PTS afin de veiller à ce que les photos tirées sur la scène du crime et comportant des traces compromettantes de violence sur le corps de la victime soient remises au prévenu MUKALAY par son entremise, à l’exclusion de toute autre autorité judiciaire ou de la police ; Que c’est dans le même contexte que la garde des scellés comportant les indices récoltés sur la scène du crime lui fut confiée par le prévenu MUKALAY après qu’ils aient été arrachés d’entre les mains du commissaire NKUNA de la Police Technique et Scientifique qui les avait collectés sur terrain et qui comptait, conformément à la loi et à ses devoirs, les expertiser et les mettre à la disposition de l’autorité judiciaire compétente en même temps que son rapport ad hoc ; ce dont il a été ainsi empêché ; - 36 - 1.c. Cas du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA en fuite Attendu qu’aux termes de l’instruction de cette cause, il s’est avéré que le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA a marqué son appartenance dans la bande par le rôle qui lui fut assigné, notamment celui de tuer la victime et d’acheminer son corps du lieu de son assassinat à celui de son abandon selon l’itinéraire renseigné par le rapport ad hoc des experts des sociétés de télécommunication versé au dossier judiciaire ; Qu’il est en ce sens évident que le SMS adressé par lui au prévenu MUKALAY était une demande claire d’instruction en rapport au traitement à réserver à la victime CHEBEYA désignée pour la circonstance par le vocable anglais de « CHALLENGER » ; ce qui signifie en français « opposant » ou « adversaire dans un sport de combat » ; Que par ailleurs, les nombreux appels émis dans la nuit fatidique et tout au long du trajet macabre suivi par le même prévenu Christian NGOY en direction respectivement du commandant de la bande, du prévenu Paul MWILAMBWE et de l’Inspecteur général de la police établissent indiscutablement qu’il rendait constamment compte aux destinataires desdits coups de fil du niveau d’exécution des tâches qui lui avaient été confiées ; Qu’enfin, sa fuite ou mieux sa désertion au lendemain de l’arrestation de certains membres de la bande par l’auditorat général est, si besoin en est encore, un aveu éloquent de son appartenance à la dite bande et de son implication personnelle dans le forfait par elle commis ; 1.d. Cas du prévenu Paul MWILAMBWE Attendu que l’implication du prévenu Paul MWILAMBWE dans la bande se traduit par le fait pour lui d’avoir intimé l’ordre pour que l’enregistrement des visiteurs du 1er juin 2010 dans le registre ad hoc de l’inspection générale de la police soit arrêté à 12 heures et ce, pour que le passage de la victime n’y soit pas signalé ; Que c’est dans ce même contexte que lors de la perquisition qui fut effectuée à son bureau à l’inspection générale de la police par l’auditorat général des FARDC, il y avait été trouvé d’une part le registre d’enregistrement de visiteurs qui devrait normalement se - 37 - trouver à l’entrée de l’inspection générale, et d’autre part le bâtonnet au bout duquel l’on pouvait remarquer la présence d’une tâche de sang ; Que c’est encore lui qui ordonna, en date du 04 juin 2010 à 9 heures, la clôture du registre susdit alors qu’il n’était pas encore complètement rempli, contrairement aux usages en la matière et ce, dans le but d’obstruer la vérité sur le passage de CHEBEYA à l’inspection générale de la police ; 1.e. Cas du prévenu Jacques MUGABO Attendu que le prévenu Jacques MUGABO, garde du corps de son commandant de bataillon, le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA, était aux côtés de ce dernier pendant toute l’opération d’assassinat et d’évacuation et d’abandon du corps de la victime à la localité de Mitendi ; Que le contenu du SMS envoyé dans la nuit fatidique du 1er au 02 juin 2010 par le prévenu Christian NGOY au prévenu Daniel MUKALAY confirme ce qui est dit ci-haut dans la mesure où on peut y lire notamment que « niko apa na petit jacques na CHALLENGER … nasubiri mipango yenu », ce qui signifie « je suis ici avec le petit Jacques … j’attends vos ordres » ; Que l’instruction du dossier indique que ce message a été émis pendant les heures où le trajet macabre suivi par le prévenu Christian KENGA KENGA a été retracé par les différentes antennes qui avaient pris en charge son téléphone ; 1.f. Cas du prévenu François NGOY MULONGOY Attendu que le prévenu François NGOY MULONGOY est le chargé protocole de l’inspection générale et dépend dans ses fonctions directement du prévenu Jacques MUGABO ; Qu’à ce titre, il a également la main mise sur le registre d’enregistrement des visiteurs car ayant son bureau à l’entrée de l’inspection générale ; Que son appartenance à la bande criminelle est établie par le fait pour lui d’avoir d’une part présenté à la veuve CHEBEYA, à la recherche de son mari, le registre dans lequel il savait pertinemment bien que la personne recherchée n’y avait pas été pas enregistrée ; - 38 - Qu’il d’autre part, il avait faire croire en même temps à ladite veuve que tantôt le numéro de téléphone en sa disposition était celui de COACH, tantôt qu’il appartenait au nommé « Michel » qui serait différent du prévenu MWILA, essayant ainsi de protéger un membre de la bande dont l’identification pouvait mettre en péril les intérêts de toute la bande ; 1.g. Cas du prévenu Michel MWILA WA KUBAMBO Attendu que le prévenu Michel MWILA prétendument de la PRI, est un acteur non négligeable de la bande en ce que le rôle par lui joué était pré ordonné par le chef de cette bande qui s’est volontairement abstenu de confier le courrier-appât à toute autre personne y compris son secrétaire YAV KOT ou même aux estafettes ordinairement commis à cet effet, préférant réserver cette mission au prévenu MWILA qui lui était manifestement plus proche au vu de leurs relations antérieures à la DRGS où le dernier fut en son temps le secrétaire particulier du premier ; Que bien plus, le fait que le prévenu MUKALAY avait le numéro du prévenu MWILA bien répertorié dans son téléphone prouve, si besoin en était encore, la complicité et la volonté de pouvoir demeurer en contact à tout moment pour une meilleure exécution de l’activité criminelle organisée, tel que cela ressort de l’analyse des relevés de leurs appels téléphoniques ; Que qui plus est, ses appels incessants en direction de Monsieur Olivier KUNGWA pour demander à CHEBEYA de l’appeler ont trouvé échos auprès du prévenu MUKALAY qui appela de la même manière CHEBEYA pour l’attirer au siège de leur organisation criminelle ; 1.h. Cas du prévenu Blaise MANDIANGU BULERI Attendu qu’à l’instar du prévenu jacques MUGABO, le prévenu Blaise MANDIANGU BULERI est un élément du bataillon Simba issu de la Force aérienne des FARDC et placé sous la prééminente et exclusive autorité de l’IG ; Que contrairement à ses propres déclarations selon lesquelles il serait le secrétaire du bataillon Simba, l’instruction de la cause a révélé que le prévenu MANDIANGU n’a pas la moindre instruction nécessaire pour s’exprimer ou écrire en français, langue de l’administration devant être maîtrisée par tout secrétaire d’un organisme ou d’une entité publique comme la police ; - 39 - Que c’est justement en toute connaissance de cause qu’alors qu’il se savait interpelé et détenu pour assassinat de Floribert CHEBEYA, il avait secrètement envoyé une petite note, en l’absence de son commandant de bataillon en fuite, à son successeur Henry NADTI afin de pouvoir procéder à la destruction de toutes ses cartes SIMS et ce, pour effacer de la sorte les traces de nombreux contacts et conversations téléphoniques sus évoquées ; II. ANALYSE DU DOUBLE ASSASSINAT DE FLORIBERT CHEBEYA ET FIDÈLE BAZANA La présente partie de conclusions des parties civiles porte sur l’infraction d’assassinat suite à la découverte à MITENDI du corps sans vie de Monsieur Floribert CHEBEYA, les enquêtes judiciaires ayant permis de mettre la main sur le prévenu MUKALAYI et quatre de ses sociétaires ; Certains suspects aujourd’hui prévenus en fuite, ont été par la décision de renvoi devant la Cour de céans accusés entre autre de l’assassinat de Monsieur Floribert CHEBEYA, cet illustre défenseur des droits de l’ homme dont le nom avait franchi les frontières de la RDC et de l’Afrique ; Si, au départ, l’enlèvement de Fidèle BAZANA, un autre défenseur des droits humains de longue date, compagnon d’infortune de feu CHEBEYA, était retenu comme infraction contre les prévenus, la Cour a été convaincue de requalifier cette infraction en assassinat ; Tous les prévenus sont donc accusés d’avoir aussi assassiné Fidèle BAZANA ; Les faits et rétroactes de cette cause ayant été exposés avec le plus de détails possible, la présente partie des conclusions examinera, après un prologue, les éléments de ce double assassinat, pour arriver à la conclusion que ces innocents altruistes ont été bel et bien assassinés par des officiers de la Police Nationale Congolaise dont certains sont en fuite. - 40 - 2.1.LA RESPONSABILITE DE L’ETAT : A. ORGANISATION DE CE PROCES : Aux termes de l’article 60 de la constitution, le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales y consacrés s’impose aux pouvoirs publics et à toute personne ; Et l’article 61 de la même constitution poursuit qu’en aucun cas… il ne peut être dérogé aux droits et principes fondamentaux énumérés dont le droit à la vie, l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; Le présent Procès est inhérent à la violation délibérée de ces dispositions par les agents publics de l’Etat en ôtant la vie aux deux défenseurs des droits humains ; En respect aux articles 17 dernier alinéa et 19 alinéas 3 et 4 de cette constitution, les prévenus sont assistés de Conseils devant la Cour de céans, le Congo étant un Etat de droit ; Ainsi est-il enseigné : « Toutes les fois que la défense a été écartée de la barre, le procès est « apparu comme un scandale, la sentence comme une iniquité. « Quelle justice peut être rendue sans débat et quel débat peut y « avoir sans contradiction ? La présence de l’avocat est interprétée, à « juste titre, comme le signe et la caution d’une bonne justice. Et c’est « pourquoi, à tous les niveaux, dans toutes les instances de notre « système judiciaire, l’avocat est présent. » (Dumas Roland, les Avocats, Editions Grasset, Paris 1977, p.54) ; Et Robert BADINTER le rend si bien en ces termes : « Le cœur de justice, c’est l’égalité des chances et la liberté dans le débat contradictoire » (BADINTER Robert, invité de l’Emission 7/7, TF1, Paris, 1er /10/1995) ; L’Etat Congolais assume à travers la présence des Conseils aux cotés des prévenus sa responsabilité de garant d’une justice indépendante à la lumière des articles 149 et 150 de la constitution ; A.1. FLORIBERT CHEBEYA ET FIDELE BAZANA COMME PRIX A PAYER. La République Démocratique du Congo, notre Pays, fait partie des Etats civilisés, membre du système des Nations-Unies ; - 41 - C’est pourquoi l’article 1er de la constitution dispose que la République Démocratique du Congo est un Etat de droit ; Aux termes de l’article 182 de la constitution, la Police Nationale est chargée de la sécurité publique, de la sécurité des personnes et de leurs biens, du maintien et du rétablissement de l’ordre public ainsi que de la protection rapprochée des hautes autorités ; Il en est ainsi de l’article 5 du décret-loi 002/2002 du 26 janvier 2002 portant institution, organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise qui dispose que « la Police nationale est une force chargée de veiller à la sécurité et à la tranquillité publique, de maintenir et de rétablir l’ordre public. Elle protège les personnes et leurs biens. Une surveillance continue constitue l’essence même de sa mission » ; En outre, suivant l’article 1er alinéa 1er paragraphe 14 de la loi nº 017/2002 du 03 octobre 2002 portant code de conduite de l’agent public de l’Etat, les Agents de la Police Congolaise sont agents publics de l’Etat parce qu’ils exercent une activité publique de l’Etat et sont rémunérés par ce dernier ; En l’espèce cependant, les prévenus se sont servis de leur statut d’agents publics de l’Etat pour semer la mort et la désolation en montant une association criminelle qui a pensé, planifié et programmé le double assassinat que nous déplorons aujourd’hui ; Ce crime d’Etat n’est pas le fruit du hasard parce que depuis l’avènement de l’AFDL en 1997, à l’instar de la gestapo, la Police politique véhicule un concept insolite et fasciste le MUDINGA traitant le Congolais de peureux, lâche... qu’on peut tuer sans remord ; Le double assassinat de ces défenseurs des droits humains, pourtant protégés par la Déclaration des Nations-Unies du 09 décembre 1998, procède de cette logique fasciste pour réussir la fête du cinquantenaire, grâce à la présence à Kinshasa d’un aréopage d’invités qui ne pouvaient pas être contrariés par des altercinquantenaires tenant des contre-manifestations ; Le préambule de cette Déclaration reconnait le rôle important que joue la coopération internationale et la précieuse contribution qu’apportent les individus, groupes et associations à l’élimination effective de toutes les violations des droits de l’homme et des libertés fondamentales des peuples et des personnes, notamment des - 42 - violations massives, flagrantes ou systématiques telles que celles qui résultent de l’apartheid, de toutes les formes de discrimination raciale, du colonialisme, de la domination ou de l’occupation étrangère, de l’agression ou des menaces contre la souveraineté nationale, l’unité nationale ou l’intégrité territoriale, ainsi que du refus de reconnaître le droit des peuples à l’autodétermination et le droit de chaque peuple d’exercer sa souveraineté pleine et entière sur ses richesses et ses ressources naturelles ; En foi de quoi, Floribert CHEBEYA et Fidèle BAZANA méritaient non pas la mort, mais la protection de la part des agents publics de l’Etat que sont les prévenus en se fondant sur l’économie des articles 1er à 3 de cette déclaration de Nations-Unies du 09 décembre 1998 en ces termes : Article 1er : Chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international. Article 2 : 1. Chaque État a, au premier chef, la responsabilité et le devoir de protéger, promouvoir et rendre effectifs tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales, notamment en adoptant les mesures nécessaires pour instaurer les conditions sociales, économiques, politiques et autres ainsi que les garanties juridiques voulues pour que toutes les personnes relevant de sa juridiction puissent, individuellement ou en association avec d’autres, jouir en pratique de tous ces droits et de toutes ces libertés. 2. Chaque État adopte les mesures législatives, administratives et autres nécessaires pour assurer la garantie effective des droits et libertés visés par la présente Déclaration. Article 3 : Les dispositions du droit interne qui sont conformes à la Charte des Nations Unies et aux autres obligations internationales de l’État dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales servent - 43 - de cadre juridique pour la mise en œuvre et l’exercice des droits de l’homme et des libertés fondamentales ainsi que pour toutes les activités visées dans la présente Déclaration qui ont pour objet la promotion, la protection et la réalisation effective de ces droits et libertés. Le prévenu MUKALAY Daniel ne s’est même pas gêné de signifier sans ambages à Monsieur NKUNA de la Police Scientifique : « Dans les dossiers pareils, il faut se situer du côté du Pouvoir » ; Tourmenté dans sa conscience par ce double assassinat, le prévenu MUKALAY et sa bande croyaient se tirer à bon compte dans l’impunité en prétendant avoir servi le Pouvoir ; Porteur d’un message libérateur à la chute du régime MOBUTU en 1997, le Pouvoir actuel se trouve trahi par le comportement des prévenus vis-à-vis de ses administrés dont les victimes ; Il n’a donc pas tort l’Algérien Hocine Aït-Ahmed d’écrire : « Les nouveaux maîtres chaussent les bottes de leurs prédécesseurs ; souvent les mêmes villas spécialisées couvrent sans interruption… les cris des suppliciés » (Hocine Aït-Ahmed, L’Afro-fascisme, l’Harmattan, Paris, p. 307) ; Or ce Pouvoir comprend également la Cour de céans conformément à l’article 68 de la constitution pour punir ce crime et faire intérioriser à tous les prévenus, les commanditaires invisibles et l’humanité entière cette pensée d’Antonio Gramsci, un intellectuel Italien non catholique : « Quand il fait mauvais, on a tendance à s’en prendre au baromètre, alors que ce n’est pas en enlevant le baromètre que l’on chassera le mauvais temps. » ; Dans leurs plaidoiries, les prévenus devront dire au public ce que le Pouvoir aura gagné depuis ce double assassinat quand on sait que le Conseil Supérieur de la Défense, s’étant tenu suite à l’onde de choc créée par ledit assassinat à travers le monde entier, a suspendu l’Inspecteur Général en sa qualité de supérieur hiérarchique de la Police Nationale, suivant en cela l’article 28 du statut de Rome auquel la République Démocratique du Congo est partie ; L’absence de l’Inspecteur Général dans le box des prévenus ne l’exonère pas du tout de sa responsabilité pénale dans ce double assassinat ; l’appel des parties civiles devant la Haute Cour Militaire, seule compétente de le juger, le remettra à sa place ; il est - 44 - simplement un prévenu en sursis ; même une grande pirogue peut se renverser c'est-à-dire même le fort est mortel, dit un proverbe Bambara du Mali ; Le Chinois LAO-TSE, martyr des droits humains et libertés fondamentales, avant de se suicider en 1966 suite aux atrocités innommables de la révolution culturelle sous MAO TSE-TOUNG, lâcha : « Paie le mal avec la justice, et la bonté avec la bonté. » ; Donnons donc le temps au temps, comme disait François Mitterrand ; A.2. APPLICATION DE LA DEMOCRATIE DES CO-PROPRIETAIRES. Dans son ouvrage « Pour une histoire conceptuelle du politique », publié à Paris, aux Editions Seuil, en 2003, Pierre Rosan-Vallon, Professeur au grand Collège de France, enseigne que la démocratie des co-propriétaires (Pouvoir yetu) a disparu en Europe à la fin du 18ème siècle ; Tandis que les défenseurs des droits humains et des libertés fondamentales remplissent une mission émancipatrice de l’humanité, dans leur plan macabre de sauvegarder le « Pouvoir yetu », assurés en cela par le bataillon Simba dont l’hygiène de vie consiste à tuer et d’avantage tuer « les Badinga », les prévenus n’ont pas hésité d’inscrire à l’enseigne des Kuluna les défenseurs des droits humains ; L’illustration a été donnée par l’arrestation de Monsieur Robert ILUNGA NUMBI par la Police politique le soumettant à un traitement inhumain cruel et dégradant, pour intimider tous ses collègues défenseurs des droits humains non Balubakat par application de la théorie du traitement infligé au bois vert par rapport au bois sec ; Ce faisant, les prévenus, agents publics de l’Etat en vertu de l’article 1er de la loi n° 017/2002 du 03 octobre 2002 portant code de conduite de l’agent public de l’Etat, ont en même temps manqué au devoir de leur charge édicté à l’article 1er du code de conduite pour les responsables de l’application des lois adopté par l’Assemblée Générale des Nations-Unies le 17 décembre 1979 dans sa résolution 34/169 en ces termes : « Les responsables de l’application des lois doivent s’acquitter en tout temps du devoir que leur impose la loi en servant la collectivité et en protégeant toutes les personnes contre les actes illégaux, conformément au haut degré de responsabilité qu’exige leur profession. » ; - 45 - L’expression « responsables de l’application des lois » englobe tous les représentants de la loi, qu’ils soient désignés ou élus, qui exercent des pouvoirs de police et en particulier des pouvoirs d’arrestation ou de détention ; Les prévenus ont donc commis un crime d’Etat par instinct de conservation irréfléchie du pouvoir ; B. ANALYSE DES ELEMENTS CONSTITUTIFS DE L’ASSASSINAT (ARTICLES 44 - 45 CODE PENAL LIVRE II.) L’assassinat est défini par la loi pénale comme tout meurtre commis avec préméditation ; C'est-à-dire que, pour parler de l’assassinat on doit nécessairement parler du meurtre que la loi définit comme un homicide commis avec l’intention de donner la mort. C’est le meurtre simple ; Ainsi, l’assassinat est un meurtre mais qui se distingue du meurtre simple par l’élément préméditation, de telle sorte que pour analyser ces éléments constitutifs un examen des éléments de meurtre simple que sont les éléments matériel et moral, s’impose obligatoirement ; Aborder l’étude des éléments constitutifs de l’assassinat réquisitionne une attention particulière à l’élément psychologique des délinquants que les Règles de Tokyo adoptées par l’Assemblée générale des Nations-Unies dans sa résolution 45/110 du 14 décembre 1990 définissent comme toutes personnes faisant l’objet de poursuites judiciaires, d’un procès ou de l’exécution d’une sentence, à tous les stades de l’administration de la justice pénale qu’il s’agisse de suspects, d’accusés ou de condamnés ; L’élément psychologique n’est autre que la préméditation qui englobe l’existence de l’intention et de la connaissance du but poursuivi par les prévenus en l’espèce ; B.1. ELEMENT MATERIEL : Il faut rappeler que l’assassinat de CHEBEYA avait été commis non seulement en participation, mais aussi et surtout dans le cadre de l’association des malfaiteurs poursuivant justement ce but ultime ; - 46 - A ce sujet, les articles 5 et 21 respectivement des codes pénaux militaire et ordinaire livre II définissent les co-auteurs d’une infraction comme « ceux qui l’auront exécutée ou qui auront coopéré directement à son exécution ; ceux qui, par un fait quelconque, auront prêté pour l’exécution une aide telle que, sans leur assistance, l’infraction n’eût pu être commise ; ceux qui, par offres, dons, promesses, menaces, abus d’autorité ou de pouvoir, machinations ou artifices coupables, auront directement provoqué cette infraction …» ; B.1.1. CAS DU PREVENU DANIEL MUKALAY Ayant été le chef incontesté de la bande, le prévenu Daniel MUKALAY avait réparti le rôle joué par chacun des sociétaires et participants de l’assassinat, avant de s’occuper personnellement d’attirer la victime vers le siège de leur organisation criminelle, en l’occurrence l’Inspection Générale de la Police pour superviser lui-même les opérations de la mise à mort de Floribert CHEBEYA et de son compagnon d’infortune Fidèle BAZANA ; Concrètement, pour amener la victime vers le lieu de son supplice et ainsi la faire tomber dans le mortel traquenard habilement conçu à ce propos , le prévenu MUKALAY avait, sur ordre de l’Inspecteur Général, retiré du circuit normal de transmission la lettre de cette autorité adressée à la VSV pour la transmettre à la victime par son émissaire préféré et homme de confiance, le prévenu Michel MWILA, à qui il avait donné des instructions précises tendant, d’une part, à la reconnaissance physique de la victime CHEBEYA pour la suite du plan criminel et, d’autre part, à l’obtention de l’assurance provenant de la proie elle-même, qu’elle se rendrait effectivement au rendez-vous fatal ; Bien plus, le prévenu MUKALAY avait appelé plusieurs fois la victime pour l’amener au lieu de son exécution, en la rassurant qu’elle devrait être reçue par l’Inspecteur Général, sachant pertinemment bien que cette entrevue intéressait au plus haut point ladite victime qui entendait, à cette occasion, obtenir dudit Inspecteur Général qu’il intercède auprès de la plus haute autorité du Pays afin qu’elle accepte d’accorder une audience au Président de l’Institut Africain des Droits de l’Homme qui séjournerait bientôt en République Démocratique du Congo ; Ces comportements sont autant d’actes de coopération directe à l’homicide volontaire en examen et partant, de l’implication de leur - 47 - auteur, le prévenu MUKALAY en qualité de co-auteur de l’assassinat commis conformément à l’article 5 du code pénal militaire, par aide et assistance indispensables ; C’est justement pour ce type d’acte de participation que la doctrine retient comme co-auteurs de l’infraction « ceux qui ont prêté pour son exécution une aide telle que, sans leur assistance, l’infraction n’eût pu être commise » ou que « si le crime pouvait être commis sans leur assistance, peut-être avec un peu de difficultés » ; (NYABIRUNGU mwene SONGA, Traité de Droit Pénal Général Congolais, 2ième édition, Ed. Universitaires Africaines, Kinshasa, 2007, P. 265) ; La Cour notera en l’espèce que si le prévenu MUKALAY n’avait pas appelé à plusieurs reprises en dates du 31 mai et du 1er juin 2010 Monsieur CHEBEYA à se rendre à l’inspection générale, aux fins d’y être reçu le 1er juin vers 17 heures par l’Inspecteur Général, il n’aurait pas effectué ce déplacement à l’issue duquel il avait été assassiné sous la supervision directe du prévenu MUKALAY, ou, à tout le moins, son assassinat par la bande ne se serait pas déroulé de la même manière qu’il l’avait été en cette date fatidique ; B.1.2. CAS DU PREVENU GEORGES KITUNGWA Tel que mentionné sur la décision de renvoi, l’instruction de la cause l’a suffisamment démontré, le prévenu KITUNGWA fut, quant à lui, un des planificateurs de l’assassinat de Floribert CHEBEYA ; Son indiscutable participation à ce stade de l’entreprise criminelle est trahie, d’une part, par le fait que l’intéressé fut l’une des toutes premières personnes à se manifester aux côtés du prévenu Daniel MUKALAY pour mettre en place un mécanisme de circonscription de l’inévitable enquête relative à ce crime et, d’autre part, par l’intense activité par lui déployée, après l’exécution du forfait, en prenant une part active dans le contrôle et la surveillance des faits et gestes des enquêteurs, dans l’insolite usurpation des indices prélevés sur la scène du crime et destinés par principe à l’autorité judiciaire, et dans le brouillage des pistes de l’enquête ; le tout en vue de procurer aux membres de la bande, ses complices dans cet assassinat, une impunité assurée ; - 48 - Tous ces comportements prouvent à suffisance l’adhésion du prévenu Georges KITUNGWA et ce, dès sa genèse, au crime commis par la bande sur la personne de feu Floribert CHEBEYA. B.1.3. CAS DU PREVENU CHRISTIAN NGOY KENGA KENGA L’acte matériel et positif du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA dans l’assassinat de CHEBEYA avait été mis en évidence lors de l’instruction de la cause devant la Cour de céans, à travers la reconstitution par les experts des sociétés de télécommunication, de l’itinéraire macabre qu’il avait suivi dans la nuit fatidique pour abandonner le corps de la victime sur la colline de Mitendi ; Le corps sans vie a été trouvé par la Police Technique et Scientifique avec les traces de violences sur les avant-bras (traces de menottes), cou tordu, du sang coulant à la commissure gauche de la bouche, des pressions sur les jambes et d’autres signes de violences découverts par les médecins légistes corroborant l’acte positif d’homicide volontaire ; En effet, lorsque l’on sait que la fiche signalétique dudit prévenu renseigne que, d’une part, il est spécialiste des arts martiaux (maîtrisant donc parfaitement la manière de donner la mort sans laisser de trace) et d’autre part, qu’il a reçu une formation en antiterrorisme, l’on comprend aisément que c’est lui qui avait personnellement exécuté la victime pour ne pas laisser les traces susdites ; Le SMS qu’il avait adressé au prévenu Daniel MUKALAY et par lequel il sollicitait des instructions sur ce qu’il convenait en ce moment-là de faire du « challenger » (c'est-à-dire l’adversaire dans un sport de combat) qui était à sa portée en même temps que le « petit Jacques », suffit en lui-même pour établir le rôle actif de ce prévenu dans l’assassinat de Floribert CHEBEYA ; Partant, sa qualité d’auteur matériel de l’assassinat de la victime au sens de l’article 5 du code pénal militaire, par exécution directe est, on ne peut plus, manifeste ; - 49 - Ainsi est-il enseigné : « est auteur celui qui, par ses propres actes, réalise tous les faits constituant les éléments légaux nécessaires de l’infraction dont il s’agit » (NYABIRUNGU mwene SONGA, Op. Cit., P. 263) ; B.1.4. CAS DU PREVENU JACQUES MUGABO Il faut ici rappeler que le prévenu Jacques MUGABO est le garde du corps du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA aux côtés duquel il se trouvait au moment où celui-ci attendait du chef de la bande, le prévenu MUKALAY, les ordres précis pour exécuter la victime et d’abandonner son corps à un lieu plus « adéquat » pour brouiller l’enquête future ; Il ressort du rapport préliminaire de la police technique et scientifique ainsi que de celui de l’autopsie, que la victime avait des traces des liens aux pieds et sur ses avant-bras ; Ces traces des liens indiquent que la victime avait été menottée quelques minutes avant sa mort et qu’il fallait le concours d’au moins deux personnes pour l’immobiliser, la maîtriser en vue de mieux l’achever ; Or, le SMS émis par le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA à l’intention du prévenu MUKALAY faisait état du fait que le prévenu Jacques MUGABO était à ses côtés dans les minutes qui avaient immédiatement précédé l’exécution de Floribert CHEBEYA. Cela étant, il ne fait l’ombre d’aucun doute que le prévenu Jacques MUGABO était du nombre de ceux qui avaient concouru à maîtriser la victime pour la placer dans les liens sus évoqués ; Ainsi, la participation du prévenu Jacques MUGABO en qualité de coauteur, par acte matériel et positif de coopération, à l’assassinat de Floribert CHEBEYA est-elle établie selon les termes de l’article 5 du code pénal militaire ; B.1.5. CAS DU PREVENU PAUL MWILAMBWE Le prévenu Paul MWILAMBWE était le chef de protocole et sécurité de l’inspection générale de la police sous la direction de qui était placé le prévenu François NGOY MULONGOY ; Dans la répartition des tâches de leur entreprise criminelle, il lui avait été assigné d’intimer l’ordre pour que l’enregistrement des visiteurs de l’Inspecteur Général du 1er juin 2010 soit arrêté bien avant l’heure - 50 - habituelle, pour éviter notamment que la victime ne puisse y être enregistrée comme ayant été reçue au siège de leur association criminelle ; C’est encore lui qui, après la réalisation du forfait par la bande, avait retiré ledit registre pour le cacher ensuite dans son bureau où il y avait été découvert lors de la perquisition; Comme si cela ne suffisait pas, il avait été également trouvé à son bureau, après perquisition y effectuée, une baguette maculée de sang, pour dire combien cette bande était constituée des sanguinaires ; Somme toute, en partageant avec le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA une même et dernière résidence connue sur la même rue qu’habitait la victime qu’ils avaient ainsi prise en charge depuis deux mois environs avant de l’exécuter, le prévenu Paul MWILAMBWE ne devrait pas être étranger au plan macabre de la bande qui avait abouti à l’assassinat de CHEBEYA, dès lors que l’importante quantité d’armes et munitions de guerre trouvées à leur domicile ne fait que conforter cette thèse de sa participation comme co-auteur du drame déploré ; Raison pour laquelle, en se sachant coupable, le prévenu Paul MWILAMBWE s’est enfui avec celui dont il partageait la maison, à savoir le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA et ce, après avoir appris que certains de leurs Co-sociétaires étaient déjà aux arrêts ; B.1.6. CAS DU PREVENU NGOY MULONGOY Il sied de rappeler que le prévenu François NGOY MULONGOY est le chargé de protocole adjoint de l’Inspection Générale de la Police et qu’à ce titre, il avait entre autre attribution de prendre toutes les dispositions pour que le passage de la victime à ce lieu ne soit pas enregistré dans le registre ad hoc et ce, en vue d’assurer l’impunité à toutes les autres personnes impliquées dans ce crime ; Ce comportement tendant à faire croire à l’opinion ou aux enquêteurs que le défunt CHEBEYA ne serait jamais arrivé à l’inspection générale de la police, est manifestement un acte qui trahit une coopération originaire et directe à l’infraction d’assassinat de la victime. Car, après avoir agréé le plan mis en place par le chef de la bande quant à l’assassinat de Floribert CHEBEYA, le prévenu NGOY MULONGOY a démontré qu’il avait bien assimilé le rôle lui - 51 - imparti en ce qui concerne l’effacement des traces de l’infraction, réalisant ainsi les stipulations des articles 5 du code pénal militaire et 21 du code pénal ordinaire ; La doctrine considère que quand bien même le moyen ne serait pas matériellement et effectivement utilisé dans la commission de l’infraction, en l’espèce l’omission d’enregistrer la victime dans le registre, « il doit être considéré comme ayant servi, car il a renforcé la détermination de l’agent, en lui permettant de compter notamment sur ce moyen en cas de besoin, en le mettant ainsi en confiance » ; (NYABIRUNGU mwene SONGA, Op. Cit., P. 275) ; De ce fait, le prévenu François NGOY MULONGOY est impliqué par participation criminelle dans l’infraction d’assassinat de Floribert CHEBEYA. B.1.7. CAS DU PREVENU MICHEL MWILA Il est le confident de longue date du prévenu MUKALAY pour avoir été son secrétaire particulier au point de le charger, alors qu’il n’est pas coursier de l’Inspection Générale, n’y étant même pas affecté, de la transmission de la lettre d’appât à Floribert CHEBEYA avec devoir de la lui remettre en main propre, afin de l’identifier et le mettre en confiance à travers les échanges téléphoniques très cordiaux en l’assurant d’être éligible le lendemain à l’audience auprès de l’Inspecteur Général ; La présentation de la carte de visite CHEBEYA au prévenu MUKALAY par Michel MWILA s’inscrivait dans la ligne droite de l’exécution fidèle de la mission bien remplie telle que lui confiée par son mentor, le prévenu MUKALAY ; B.1.8. CAS DU PREVENU BLAISE MANDIANGU BULERI Le prévenu Blaise MANDIANGU est le secrétaire particulier de son commandant de bataillon, le prévenu Christian NGOY KENGA KENGA dont il maîtrisait l’agenda ; Etant un acteur non négligeable de la bande pour éviter que l’on ne retrouve les traces de sa participation dans l’assassinat commis et pour lequel il était en détention, il avait donné des instructions à son chef intérimaire dans le sens de brûler ses cartes SIM ; - 52 - La Cour comprendra le but de la démarche du prévenu MANDIANGU dans la destruction de ses cartes SIM en remarquant que le téléphone était un instrument de travail indispensable pour la bande dans l’accomplissement de leur plan macabre ; Ainsi, la participation du prévenu Blaise MANDIANGU BULERI en qualité de co-auteur, par coopération directe dans le sens de procurer la tranquillité, mieux l’impunité en brouillant les éventuelles pistes d’enquête, n’est plus à démontrer ; B.2. LA PERSONNALITE HUMAINE DE LA VICTIME L’élément constitutif du meurtre consistant en la personnalité humaine de la victime est établi dans le cas d’espèce par les pièces que les plaidantes ont produites au dossier judiciaire, à savoir notamment les actes de naissance, de décès ainsi que d’inhumation de Monsieur Floribert CHEBEYA d’une part et d’autre part, les différentes images tant de la scène du crime que de l’autopsie pratiquée sur le corps de la victime qui attestent que celle-ci était bel et bien une personne humaine, donc un sujet de droit ; Les éléments moral et matériel de meurtre de CHEBEYA étant réunis dans le chef des prévenus par divers actes de participation propres à chacun d’eux, au vu du fait que la victime avait la personnalité humaine, il convient à présent que la Cour constate également l’établissement de l’élément spécifique de l’assassinat dans le chef desdits prévenus, en l’occurrence la préméditation. B.3. LA PREMEDITATION DANS LE CHEF DES PREVENUS La préméditation, élément moral de l’infraction d’assassinat tel qu’il se dégage de l’article 45 du code pénal ordinaire livre II, se définit sur le plan jurisprudentiel comme étant « le dessein formé avant l’action, de façon réfléchie et de sang froid, c’est-à-dire avec calme, d’attenter à la vie d’une personne ; (Kinshasa, le 1er février 1969, in R.J.C. 1969, P. 33 + Kinshasa 4 février 1974, in R.J.Z. P. 102, cités par LIKULIA BOLONGO, Op. Cit. P. 62) ; La jurisprudence poursuit en relevant que la préméditation suppose « la résolution de donner la mort », c’est-à-dire, « la détermination, la ferme décision que l’on prend pour donner la mort ; qu’elle doit être prise de sang froid et de façon réfléchie et délibérée » ; - 53 - En outre, la jurisprudence ajoute que la préméditation suppose un certain nombre de temps de réflexion entre la résolution assassine et le passage à l’acte proprement-dit ; Dans le cas d’espèce, la résolution criminelle d’assassiner Floribert CHEBEYA avait été arrêtée par les prévenus depuis de longue date ; En effet, en ce qui concerne le prévenu MUKALAY, l’instruction de la cause, notamment par l’audition de Monsieur Dolly IBEFO, a révélé qu’en 2009 déjà, lorsque le défunt CHEBEYA avait été arrêté et détenu par lui, non seulement il avait traité le groupe de « criminels de la démocratie », mais aussi et surtout qu’il avait promis de les « exterminer », en s’adressant particulièrement sur un ton beaucoup plus sec et comminatoire au défunt CHEBEYA ; De 2009 à 2010, le prévenu MUKALAY et sa bande avaient suffisamment pris le temps qu’il leur fallait pour arriver à exécuter leur plan macabre sur CHEBEYA compte tenu de la personnalité de celuici, de moyens à mettre en œuvre pour y arriver sans laisser de trace ; Le recours à Christian NGOY, spécialiste en arts martiaux et en antiterrorisme, commandant du Bataillon SIMBA transfuge des Forces Aériennes des FARDC, n’obéissant qu’à l’Inspecteur Général qui a facilité l’installation du siège de la bande criminelle au bureau du prévenu MUKALAY, achève le processus de la préméditation ; C’est dans le même cadre de leur préméditation que quelques jours avant le passage à l’acte assassin, l’Inspecteur Général de la Police, les prévenus MUKALAY et Michel MWILA, avaient, chacun en ce qui le concerne, signé, retiré et déposé la lettre adressée à la VSV avant d’appeler à plusieurs reprises la victime vers le siège de leur association criminelle pour lui infliger le traitement fatal déploré ; Chacun des prévenus ayant correctement joué le rôle qui était le sien pour atteindre le résultat ultime qu’était l’assassinat de Floribert CHEBEYA, tel que programmé, il va de soi que l’élément moral de la préméditation est bel et bien établi dans leur chef ; - 54 - De la sorte, l’infraction d’assassinat de Floribert CHEBEYA est établie en fait comme en droit dans le chef de tous les prévenus en leurs qualités respectives de co-auteurs de ladite infraction ; La Cour devra en conséquence les condamner, sans égard à la moindre circonstance atténuante que ce soit, à la peine légalement prévue pour cette infraction, en excluant la peine capitale pour qu’ils méditent sur les différents crimes qu’ils ont commis sous le couvert de la Police Nationale et éviter ainsi de salir par leur condamnation à mort la mémoire des illustres immaculés défenseurs des droits humains avec le sang des tueurs à froid, sans foi ni loi ; B.4. ASSASSINAT DE FIDELE BAZANA Il a été jugé : « En matière de préméditation, le laps de temps peut être bref.» (CSJ. ,10 juin 1972, in RJZ de 1972, p.135) ; Dans leur démarche d’effacer les traces de l’assassinat de Monsieur Floribert CHEBEYA, les prévenus ont résolu rapidement de faire disparaître Fidèle BAZANA qui a certainement été témoin gênant de l’abominable assassinat du Directeur Exécutif de la VSV ; De l’aveu judiciaire du prévenu MUKALAY devant la Cour de céans selon lequel il connaissait le domicile, le bureau et la voiture de Floribert CHEBEYA, le guet-apens que la bande avait tendu à ce dernier visait également Fidèle BAZANA, seul à piloter et à conduire la voiture de l’invité Floribert CHEBEYA ; Il est enseigné : « Le guet-apens consiste à attendre dans un lieu un individu pour lui donner la mort ou exercer sur lui des actes de violence. Il suppose donc la préméditation … La différence essentielle entre la préméditation et le guet-apens consisterait en ce que la préméditation est purement intellectuelle, psychologique tandis que le guet-apens, tout en étant intellectuel, doit s’accompagner en outre d’un acte physique, extériorisé » (LIKULIA BOLONGO, Droit Pénal Spécial Zaïrois, Tome I, 2ème Edition LGDJ, Paris, 1985, p.65) ; Le dessein arrêté par la bande criminelle était d’éliminer quiconque accompagnerait la cible principale, désignée sous le nom de code « challenger » par l’assassin Christian NGOY, en l’occurrence Floribert CHEBEYA ; - 55 - Il a été jugé : « La résolution criminelle peut être définitivement arrêtée par l’auteur ou être subordonnée à un événement futur et incertain. Le fait qu’elle est conditionnelle n’empêche pas que le crime soit le résultat d’une résolution antérieure réfléchie et méditée, et ne lui enlève donc pas son caractère d’assassinat » (Elis., 16 févr.1943, in Rev. Jur., p.85, cité par Mineur G., Commentaire du Code Pénal Congolais, Deuxième Edition, Maison F. Larcier, S.A., Bruxelles, 1953, p127) ; Le décès de Fidèle BAZANA comme tout être humain sujet de droit, dans les mêmes circonstances de temps et de lieu que son compagnon d’infortune Floribert CHEBEYA, a été confirmé par une décision judiciaire; A la lumière de l’article 142 du code de la famille, le jugement versé au débat judiciaire déclarant le décès de Fidèle BAZANA vaut preuve de cet élément intellectuel qu’est la préméditation pour que la Cour retienne en conséquence que Fidèle BAZANA a été effectivement assassiné par la même bande criminelle ; Il importe de convier la Cour de céans à une intime conviction dont la meilleure formulation fut donnée à l’article 342 du code napoléonien d’instruction criminelle en ces termes : « La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve, elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes, dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : « Avezvous une intime conviction ? » (Nyabirungu mwene Songa, opcit., p.348) ; C. QUANT A L’INFRACTION DU TERRORISME. C.1. Aperçu historique. Le mot « Terrorisme » est attesté pour la première fois en novembre 1794, il désigne alors « DOCTRINES DES PARTISANS DE LA TERREUR », de ceux qui, quelques temps auparavant, avaient exercé le pouvoir en menant une lutte intense et violente contre les contrerévolutionnaires. - 56 - Au XIXè siècle le mot « Terrorisme » a évolué pour désigner non plus une action de l’Etat mais d’une action contre l’Etat. Son emploi est attesté dans un sens antigouvernemental, comme en espèce, en 1966 pour la Russie (Mouvement Nihiliste), Jugantar en Inde Britannique, dans les Balkans et Empire Ottoman (l’Organisation révolutionnaire Macédonienne, « ORIM », qui pratiquait des prises d’otages d’Européens, et les Comitadjilik arméniens qui fournirent la matière d’un livre, les Comitadjis ou le Terrorisme dans les Balkans à Albert Londres). Présentement le Terrorisme au sens moderne est né avec les médias modernes. Sous sa forme moderne, le Terrorisme se répand au MoyenOrient, avec l’assassinat du Shah Nasir al-Dîn en 1896, dont la responsabilité morale est souvent attribuée, à tort ou à raison, à Jamal al-Dîn al-Afghani. (Ici l’accusation est à l’aise face à MWILAMBWE qui par état, par fonction et par profession avait mission de sécuriser les invités CHEBEYA et BAZANA. Il ne l’a pas fait. Ses coauteurs MUGABO et surtout NGOY KENGA KENGA …) Le Terrorisme a acquis une connotation péjorative et désigne aujourd’hui les actions violentes destinées à répandre la terreur et ainsi faire pression sur un Etat. Ces actions visent souvent les populations civiles, afin de détruire, tuer et de mutiler. Ces attaques ont pour but de promouvoir des messages à caractère idéologique, politique ou religieux par la peur et la publicité médiatique. C.2. Quid de sa définition Le Terrorisme est aujourd’hui très fréquemment employé en Droit International et par les Institutions Internationales, mais il ne donne pas lieu à une définition unique et universelle. Certains éléments semblent faire consensus, le Philosophe Jacques DERRIDA écrit ainsi : « Si on se réfère aux définitions courantes ou explicitement légales du terrorisme, qui y trouve-t-on ? La référence à un crime contre la vie humaine en violation des lois (nationales ou internationales) y impliquant à la fois la distinction entre civile et militaire (les victimes du terrorisme sont supposées être civiles) et une finalité politique (influencer ou changer la politique d’un pays en terrorisant sa population civile).(WIKIPÉDIA, l’encyclopédie libre sur internet, Thème : « Terrorisme ») Plusieurs Etats à travers le monde ont défini le mot « Terrorisme ». - 57 - c.2.1. France. La France, qui appartient à la famille « Romano-germanique » comme la RD Congo, la loi du 09 septembre 1986 renforcée par la loi du 22 juillet 1996, donnent la même définition que l’article 157 du CPM congolais. c.2.2. Aux Etats-Unis. c.2.2.1. Le Ministère de la Défense Américain. Le Terrorisme le recours délibéré à la violence illicite qui est destiné à inspirer la peur pour contraindre ou intimider les pouvoirs publics ou la société, en vue de fins, qui sont généralement d’ordre politique, religieux ou idéologique. (Dictionnaire des expressions militaires et termes connexes préparé par le Minist7re de la Défense, « Washington, DC : United States Department of Defense, 12 avril 2001 amendé le 5 juin 2003, page 531. (http:/www.dtic.mil./doctrine/jel/new_pubs/jp1_02.pdf) c.2.2.2. Le FBI. Entend par Terrorisme tout recours illicite à la force et à la violence dirigé contre des personnes ou des biens aux fins d’intimider ou de contraindre les pouvoirs publics, la population civile ou tout segment de celle-ci, dans la poursuite d’objectifs d’ordre politique ou social. (Counterterrorism Treat Assessment and Warning Unit (division chargée du contre-terrorisme, de l’évaluation de la menace et de l’alerte), Federal Bureau of Investigation (sûreté Fédérale), Terrorism in the United states 1999 : 30 Years of Terrorism (Washington, DC : United States Department of Justice, 1999, page i, [http://www.fbi.gov/publications/terror/terror99.pdf) c.2.2.3. Le Département d’Etat Américain. Le Terrorisme est une violence préméditée, à mobile politique, qui est perpétrée à l’encontre de cibles non combattantes par des groupes internes à un pays ou des agents clandestins dont le but est généralement d’influer sur un public. Le terme « non-combattant » est interprété comme incluant, outre les civils, le personnel militaire qui, au moment de l’incident est sans armes et, ou n’est pas de service. CI,CII,CII,CIV. - 58 - c.2.2.4. En République Démocratique du Congo. Nous faisons nôtre, l’expression qui définit le « Terrorisme » comme suit : « C’est l’ensemble d’infractions limitativement énumérées dans le « code pénal, qualifiées ainsi, lorsqu’elles sont en relation avec une « entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler « gravement l’ordre public par l’intimidation et la terreur… » Le Dictionnaire le ROBERT définit le Terrorisme, ainsi : « Emploi systématique de violence pour atteindre un but ou un « objectif ». Dans le cas d’espèce, la prévention définie ci-dessus est mise à charge des prévenus NGOY KENGA KENGA Christian, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO. Le Législateur congolais s’inscrit dans cette logique en catégorisant les faits et actes terroristes en : a) Faits punissables inspirés du droit interne d’une part, et d’autre part ceux inspirés du Droit International humanitaire. Avant d’énerver les faits dont question ci-dessus, permettez-moi de vous remettre en mémoire les circonstances de l’actuelle escalade de la violence terroriste dont les prévenus NGOY KENGA KENGA Christian, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO se sont rendus coupables. Le prévenu NGOY KENGA KENGA était d’abord domicilié sur Avenue de l’Espoir n°15 à Macampagne, Commune de Ngaliema. Aux fins de réaliser son but, celui de porter des atteintes à la vie de CHEBEYA et, partant de son chauffeur BAZANA, il avait ensuite loué à 550 dollars une maison sur l’Avenue Démocratie n°7, à près de 150 mètres de celle de CHEBEYA pour observer les faits et gestes de celui-ci. Bien plus, parmi les armes et explosifs saisis chez NGOY KENGA KENGA, un certain nombre ne constituent nullement la dotation du prévenu (cote 985). Pour preuve, la déposition du Général KABULO, Chef P4 IG PNC nous rassure quant à ce. - 59 - Notons que le fait d’avoir offert une chambre à MWILAMBWE Paul n’était pas étranger au but qu’il se proposait, celui d’éliminer physiquement CHEBEYA et son beau-frère BAZANA. Ainsi donc, appelé « SIMBA ONE », comme le démontre la disquette versée au dossier, NGOY KENGA KENGA Christian, est un tueur à mains nues. Il en est également de Paul MWILAMBWE, tous deux cohabitaient sans épouse à l’adresse ci-haut citée. En tant que coauteurs, quid de leur mot d’ordre ? Mot d’ordre : La discrétion était le mot d’ordre opérationnel de l’association dont le commandement incombait au prévenu NGOY Christian. Pour mieux saisir notre propos, disons par rapport au passé de notre pays, qu’à l’époque de la conférence nationale souveraine, les dérives autoritaristes se manifestèrent notamment par : b) Les hiboux qui ont terrorisé, intimidé et troublé gravement l’ordre sociétaire et qui, à l’aide d’explosifs ont plastiqué des maisons de presse alors réputées pour des écrits critiques à l’endroit de certaines autorités (cas des journaux ELIMA et POTENTIEL) ; c) Les fouilles et perquisitions, des maisons et Eglises sans mandats des Officiers du Ministère Public en sigle OMP ; d) L’intervention salvatrice de CHEBEYA sans laquelle l’IG PNC John NUMBI n’aurait contacté les siens ; e) Les Abbés et autres Pasteurs ainsi que leurs fidèles qui ont été terrorisé, voire même tué par des militaires cagoulés. Et ceux-ci sont toujours en cabale comme NGOY KENGA KENGA Christian, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO. Faisons à présent la lecture croisée des faits inspirés du Droit International Humanitaire intégré en droit positif de notre pays depuis le 20 février 1961 et la lecture des articles 157 et 158 du Code Pénal Militaire. - 60 - Au regard du D.I.H., l’article 3 commun à ses conventions de Genève du 12 août 1949, précise que « TOUTE MESURE D’I9NTIMIDATION et/ou TERRORISME sont interdites ». CI, II, III, IV. Leurs Protocoles Additionnels du 08 juin 1977, abondent dans le même sens, au point d’assimiler les terroristes à des mercenaires dans un pays. Par ailleurs, l’article 3 ci haut cité prohibe en tout temps et en tout lieu : a) Les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices ; b) Les atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants, (cas CHEBEYA Floribert et BAZANA Fidèle). Au regard de l’article 157 CPM, il est écrit ce qui suit : « Constituent des actes de terrorisme, lorsqu’elles sont en relation « avec une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de « troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur, « les infractions par l’un quelconque des actes sus énumérées à « savoir : 1. Les atteintes volontaires à la vie ou à l’intégrité physique de la personne, l’enlèvement et la séquestration de la personne ainsi que le détournement d’aéronef, de navire ou de tout autre moyen de transport ; 2. Les extorsions, destructions, dégradations et détériorations ; 3. La fabrication, la détention, le stockage, l’acquisition et la cession des machines, engins meurtriers, explosifs ou autres armes biologiques, toxiques ou de guerre. L’article 158 du même Code ajoute : « Le terrorisme est puni de vingt ans de servitude pénale. « Si le terrorisme a entraîné mort d’homme, le coupable est « passible de la peine de mort ». - 61 - Pour la consommation de cette infraction, trois conditions essentielles sont requises : a. Les auteurs des faits punissables. Il n’y a aucune restriction apportée par la loi quant à la catégorie des auteurs de cette infraction, ils peuvent être militaires, policiers (article 156 de la Constitution) ou civils, de nationalité congolaise ou étrangère et agissant individuellement ou en groupe. b. Les faits visés par la loi. Les actes de terrorisme sont des infractions de droit commun ou du droit militaire. c. La responsabilité morale des agents. Cette responsabilité se dégage du but abominable clairement défini et librement poursuivi par les agents, ainsi que de la résolution criminelle généralement préméditée, dans la mesure où ces actes sont sous-tendus par des sentiments d’intense aversion et de vengeance. Dans le cas d’espèce, les trois agents se vengèrent contre CHEBEYA pour les écrits de mars 2008 relatifs BUNDU DIA KONGO. Leur but est celui de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur. C’est le cas des actes téméraires et spectaculaires d’une ampleur telle qu’ils créent un effet psychologique terrifiant, troublant et traumatisant dans l’esprit des témoins proches ou même lointains, littéralement envahis par la peur, la désolation, l’horreur et l’émoi (cas de GOMER MARTEL et celui de l’APP KABONGO qui était de faction avec l’APP SHAKO TUMUNGU à la brigade canine la nuit du 1er au 02 juin 2010. Dans le cas sous examen, en date du 31 mai 2010, les trois fugitifs ont participé aux différentes réunions valant veillées d’armes organisées au bureau du Colonel Daniel MUKALAY et dont l’objectif comme, les Parties Civiles l’ont signalé, fut l’élimination de Floribert CHEBEYA. Ils sont auteurs de cette infraction. - 62 - En effet, le fait pour les trois prévenus susnommés d’avoir exécuté la mission leur confiée par le Colonel MUKALAY « immobilisés, étranglés et tués sieur Floribert CHEBEYA par suffocation sans laisser des traces, et le fait de demander la conduite à tenir après le meurtre de ce dernier à MIKALAY, lequel a mis à leur disposition deux jeeps de marque CHALLANGER pour amener le corps sans vie à MITENDI où CHEBEYA fut exposé à moitié nu au mépris du public », ce but a répandu la peur au sein de la population de Kinshasa. Dès lors, on comprend pourquoi le Législateur Milita ire appuyé en cela par la Doctrine, font obligation à toute personne au courant de la préparation d’un acte de terrorisme de le dénoncer immédiatement auprès des autorités compétentes, sous peine des poursuites judiciaires. Quant au mobile spécifique exigé pour l’application du régime particulier des actes de terrorisme, il est, en l’espèce établi à charge des prévenus NGOY KENGA KENGA Christian, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO. Etant donné qu’il y a eu double assassinat, celui de CHEBEYA et de BAZANA ; la circonstance aggravante de l’article 158 du CPM doit être retenue dans l’application de la peine. - 63 - TROISIEME PARTIE : ADMINISTRATION DE LA PREUVE I. DES PREUVES A CHARGE DES PREVENUS INTRODUCTION Le code de procédure pénale est muet sur les preuves et leur force probante. Ce silence du législateur a justifié la jurisprudence et la doctrine enseignant que : les preuves en matières répressives étant régies par le principe de la liberté de preuve avec son corollaire l’intime conviction du juge ; hors le cas où la loi en dispose autrement les infractions peuvent être établies par tout moyen de droit respectueux du droit de la défense. Ainsi, le droit pénal a prévu comme modes de preuves notamment les constatations matérielles, l’aveu, les indices, les présomptions, le témoignage ou renseignement et les écrits, l’expertise… Dans le cas sous examen, l’instruction tant préparatoire que devant le juge a eu recours aux preuves ci-haut citées dont l’application au cas d’espèce est démontrée infra. Mais, avant de recourir à ces preuves pour établir la véracité des faits infractionnels et l’imputabilité aux prévenus, il convient de fixer d’abord les notions : A. NOTIONS Bien que le code de procédure pénale soit muet sur l’administration et la force probante de preuves, il convient de noter que l’application de la loi pénale exige que soit établie l’existence d’un fait qualifié d’une infraction par la loi pénale. La preuve portera tant sur les éléments objectifs (l’identité et qualité de l’auteur et identité et qualité de la victime) du fait infractionnel, que sur ses éléments subjectifs (caractère intentionnel, doleux ; imputabilité etc.) (Antoine RUBENS, Le Droit judiciaire congolais, tome III, PUC, Kinshasa 2010, page 32, n°16). Ainsi, nous passerons en revue quelques modes de preuves qui trouvent application à l’espèce. - 64 - A.1. CONSTATATIONS MATERIELLES Les constatations matérielles portent soit sur les lieux de l’infraction et les traces qu’elle y a laissées, soit sur l’objet utilisé pour la commettre, soit sur la personne de son auteur ou de sa victime. Dans l’espèce, la Cour a examiné le lieu de la commission de l’infraction et celui où le corps a été déposé, mais en amont, l’instruction préparatoire avait examiné l’utilisation irrégulière et anormale de la jeep de la brigade canine portant le n°238. En outre, la Cour s’est rendu compte de la personne de la victime et des auteurs des infractions. a. Le lieu de l’infraction. Le lieu de l’infraction est celui où l’un des éléments constitutifs de l’infraction a été commis. Dans l’espèce, l’instruction préparatoire comme celle devant le juge a révélé que vivant, CHEBEYA et BAZANA ont été dans l’enceinte de l’Inspection Générale de la Police en date du 01 juin 2010, date à laquelle son téléphone pris en charge par l’antenne centenaire et a eu à correspondre avec notamment sa femme, Madame YANDE de la MONUSCO jusqu'à 21 heures 16’ pour être trouvé mort le 02 juin 2010 à Mitendi. En effet, de toutes les dépositions de prévenus, la Cour a retenu que CHEBEYA et BAZANA devaient se retrouver à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, lieu du rendez-vous qui serait négocié par MUKALAY et MWILA. b. Le lieu où le corps a été trouvé. Le lieu où le corps est trouvé peut ne pas être le lieu de la réalisation de l’infraction, le criminel pouvant toujours en vue de désorienter l’enquête déposer le corps à un endroit autre que celui de la réalisation du crime. Les enquêtes policières, parquetières et juridictionnelles peuvent faire correspondre où pas le lieu où l’infraction a été commise avec celui où le corps a été trouvé. - 65 - Or, il s’est révélé en considération des relevés téléphoniques, qu’en date du 1er juin 2010, Christian NGOY, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO ont conduit le corps de CHEBEYA ainsi que BAZANA vers MITENDI où le corps de CHEBEYA a été trouvé. L’intervention de Daniel MUKALAY dans la Brigade CANINE pour récupérer une Jeep n°238 en vue d’une mission de la police qui consistait à transporter le corps de CHEBEYA et BAZANA vers MITENDI. En outre, les exécutants matériels de CHEBEYA n’avaient-ils pas envoyé un message à la femme de CHEBEYA comme quoi celui-ci, après n’avoir pas été reçu par l’Inspecteur Général John NUMBI, il se rendrait à l’UPN. Dans l’espèce, les enquêtes menées tant par la police, le parquet que la Cour, démontre que le décor qui a entouré le dépôt du corps à Mitendi n’était qu’une mascarade. c. Personne de la victime. La loi pénale réprimant certain comportement vise la protection de l’intégrité physique ou la vie. Il en est ainsi notamment des infractions de coup et blessure, meurtre, empoisonnement, viol. Pour la répression des pareilles infractions, la preuve de l’être humain vivant doit être rapportée. Dans l’espèce, la Cour a eu à se rendre à l’évidence de trace faisant croire que CHEBEYA a bel et bien existé. Ces traces sont : son corps sans vie trouvé à MITENDI, la voiture qui le conduisait. En outre, la preuve de sa vie est rapportée par MWILA qui l’avait rencontré au siège de la Voix Sans Voix, ses communications avec MUKALAY et afin le fait qu’il a été vu par GOMER MARTELL à l’Inspection Générale de la Police Nationale congolaise. d. Des auteurs des infractions. La loi pénale réprime à certains égards, ne vise que les individus en tant que tel comme pouvant être capable de certains agissements culpeux. - 66 - Dans l’espèce, s’agissant de l’association de malfaiteurs, l’assassinat, l’instruction a révélé que ce sont les individus traduis devant la Cour qui sont présumés avoir commis les faits qui leur sont reprochés. B. LES INDICES Un indice est constitué par les traces, empruntes, objet laissé sur le lieu de l’infraction. Dans l’espèce, la Cour a eu à se rendre compte de traces laissées par les exécutants des infractions ici poursuivies. En effet, avec l’apport de relevés téléphoniques, la Cour a constatée que les prévenus notamment MWILAMBWE, Christian NGOY et Jacques MUGABO, après avoir distrait la famille CHEBEYA sur le fait que celui-ci devrait se rendre à l’UPN et le tuer par la suite, ont pris son corps de l’IG jusqu’à MITENDI suivant croquis, en annexe. En outre, les lésions trouvées sur (1) les avant bras et aux pieds constituent sans moindre doute la preuve du ménotage de la victime avant son exécution. C. LES PRESOMPTIONS. Il s’agit là d’un mode de raisonnement qui consiste à partir du fait connu pour découvrir ce qui est caché. Lorsqu’elles sont le fait du juge, elles se nomment présomptions judiciaires. Ce qui est connu : - 1. De déclarations de l’inspecteur principal Alain ILUNGA, de Papa MUKALAY, Maître Corine et NEHEMA, il est constant que ils terminent le service à 16 heures 30’ au plus tard lors que l’Inspecteur Général n’est pas là tandis que los qu’il est là ils restent jusqu’à ce que le Chef quitte le bureau. Et toute fois si le Chef et là, ils vont au-delà jusqu’à ce que le Chef quitte. Or, dans l’espèce, les relevés téléphoniques de l’Inspecteur Principal ILUNGA, du prévenu Paul MWILAMBWE, de Papa MUKALAY renseignent qu’ils sont resté à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise jusqu’ au-delà de 18 heures ce qui confirme que l’Inspecteur Général, le Chef était encore là. La permanence de l’activité criminelle a été rapportée par les dépositions de l’inspecteur principal KANOLD KANAMA, Inspecteur divisionnaire adjoint KABULO, Christian NGOY et Ilunga NUMBI en ce qu’il le concerne montrait la dangerosité et la permanence de la criminalité de la bande à John NUMBI et Daniel MUKALAY. - 67 - En effet, à la question de savoir qui avait doté MUKALAY des armes de guerre qui faisaient sa suite, l’inspecteur divisionnaire adjoint KABULO ainsi que le S4 de la PIR ont dit ne rien savoir. D. LES PROCES VERBAUX a. Procès-verbaux de constat Ce sont les actes dressés par un officier public constatant les faits de sa compétence et de sa qualité. Ici, La Cour a eu à examiner les procès verbaux de constat dressés par la police technique et scientifique tels qu’enrichis à l’audience par la déposition du commissaire François NKUNA. En effet, il ressort de ces procès verbaux que MITENDI n’a pas été le lieu où feu CHEBEYA a été assassiné et qu’il ne pas décédé à la suite d’un coït, que le dépôt du véhicule et du corps à MITENDI ainsi que le décor planté tout au tour n’était que de la mascarade pour désorienter l’enquête. b. Procès- verbaux de saisie Ce sont des actes d’un officier public constatant le fait d’avoir trouvé les objets suspects sur un individu, lesquels peuvent avoir été le fruit d’une infraction, ou avoir aider à la commission de celle-ci. c. Procès- verbaux d’audition Ces P.V. n’ont de force probante que par rapport aux déclarations ou dépositions des personnes interrogées en ce que leurs signatures apposées sur lesdits P.V. certifient de leur authenticité. Dans le cas d’espèce, la Cour fera foi aux P.V. d’auditions dressées par l’auditeur Général de la FARDC en ce qu’aucun grief ne leur est reproché. E. DES ECRITS ANTOINE SOHIER a enseigné que le Tribunal ayant plein liberté d’appréciation des éléments de preuves, peut puiser les - 68 - renseignements dans tout écrit, document pourvu que ces éléments soient communiqués aux prévenus et soumis à la discussion à l’audience. (A. SOHIER, droit de procédure du Congo Belge, n°677) Dans l’espèce, la Cour a eu à examiner en considération de l’évolution technologique des SMS, les relevés téléphoniques et la lettre d’accusé de réception émanant de l’Inspecteur Général. F. DES RELEVES TELEPHONIQUES La science moderne, au moyen de la téléphonie cellulaire a eu à apporter sa contribution à la manifestation de la vérité judiciaire. G. DE L’EXPERTISE MEDICO-LEGALE La médecine légale a été mise en contribution pour notamment déterminer la cause d’un décès non naturel et les circonstances de sa survenance. Toutefois, Antoine RUBBENS dans l’œuvre précitée enseigne que le juge ne doit pas se laisser éblouir par l’appareil des techniques modernes pour accepter hâtivement des conclusions savantes de spécialistes qui ont parfois des œillères. Il a le devoir de s’initier à ces techniques, tant pour pouvoir les critiquer que pour en apprécier l’efficience. (page 146, n°170). Ce sont ces preuves auxquelles on va recourir pour établir les éléments constitutifs, les auteurs et les victimes des infractions. I.1. DE L’ASSASSINAT DE CHEBEYA BAHIZIRE Floribert. Les articles 44 et 45 du code pénal ordinaire tel que modifié au 31 décembre 2009 dispose : « l’homicide commis avec l’intention de donner la mort est qualifié meurtre. Le meurtre commis avec préméditation est qualifié d’assassinat ». Tel que libellé par le législateur, la prévention d’assassinat requiert que les faits présentés au juge renferment les éléments constitutifs dont les preuves incombent à l’organe des poursuites et aux parties civiles. Concourant à l’action du ministère public, les parties civiles apportent des preuves ci-après à l’assassinat de feu Floribert CHEBEYA BAHIZIRE. - 69 - L’assassinat de CHEBEYA étant une œuvre collective des prévenus, la preuve de la participation criminelle s’impose avant celle des éléments constitutifs proprement dits. • PREUVE DE LA CORREITE D’ASSASSINAT. L’assassinat de feu CHEBEYA BAHIZIRE Floribert est l’œuvre commune de John NUMBI, Daniel MUKALAY, Georges KITUNGWA, Christian NGOYI, NGOY MULONGOY, Michel MWILA, Paul MWILAMBWE, Jacques MUGABO et Blaise MANDIANGU, chacun ayant posé des actes bien spécifiques dans la réalisation d’assassinat. En effet, des personnes citées ci-haut, certaines ont eu pour rôle d’attirer la victime sur le lieu de la réalisation du crime, d’autres d’exécuter matériellement, et déplacer le corps vers MITENDI et d’autres en fin d’effacer les traces de l’infraction. L’article 5, trois premiers tirets du code pénal militaire dispose : « Sont considérés comme auteurs d’une infraction : - ceux qui l’auront exécutée ou qui auront coopéré directement à son exécution ; - ceux qui, par un fait quelconque, auront prêté pour l’exécution une aide telle que, sans leur assistance, l’infraction n’eût pu être commise ;» ; La preuve de la corréité d’assassinat est ici rapportée par les aveux, les écrits, les présomptions. De l’article 5 précité, la doctrine enseigne que la Co activité criminelle exige pour son existence, l’exécution matérielle ou la coopération directe, l’aide ou l’assistance indispensable et la provocation privée ou publique. En l’espèce, les prévenus ont participé à l’assassinat de CHEBEYA par l’exécution matérielle ou coopération directe dont les preuves seront rapportées comme ci-dessous : • PREUVES DE L’EXECUTION MATERIELLE OU DE LA COOPERATION DIRECTE La coopération directe entre les agents criminels est prouvée par les écrits et les relevés téléphoniques, les présomptions et aveux circonstanciés. - 70 - DES ECRITS La lettre de l’Inspecteur Général John NUMBI à feu CHEBEYA est une preuve que John NUMBI, Daniel MUKALAY et MWILA ont coopéré dans la réalisation d’assassinat de CHEBEYA En effet, après avoir signé ladite lettre le 26 mai 2010, John NUMBI, suite à l’appel de Daniel MUKALAY à 08 heures …, dira à celui-ci que chercher quelqu’un de confiance qui devait remettre en mains propres de CHEBEYA la lettre destinée intuitu personae à CHEBEYA. Daniel MUKALAY enverra son secrétaire YAY KOT retirer la lettre qui sera remise à Michael MWILA avec instruction de ne la remettre qu’à CHEBEYA personnellement et de bien dévisager celui-ci. C’est à l’occasion du dépôt de cette lettre que MWILA fera la reconnaissance physique de CHEBEYA et qu’ensemble avec John NUMBI et Daniel MUKALAY monteront le guet-apens tendant à voir CHEBEYA arriver à L’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise pour être reçu. LES RELEVES TELEPHONIQUES Les relevés téléphoniques (cotes 1413 à 1440, 1208 à 1193, 1178 à 1182 et 1330 à 1342) renseignent que les prévenus ont eu entre eux des communications inhabituelles. En effet : - En date du 27 mai 2010, John NUMBI avait appelé Général OLEKO à 09 heures 48’ pendant 151 secondes à 11heures 53’ pendant 17 secondes, à 12 heures 29’ 07’’ pendant 10’’, et à 12 heures 51’ 02’’ pendant 16 secondes. - En date du 28 mai 2010 à 23 heures 43’ 58’’ John NUMBI avait appelé Général OLEKO pendant 48 secondes ; - En date du 31 mai 2010 à 16 heures 30’ 07’’, John NUMBI appela Général OLEKO pendant 96 secondes, à 16 heures 38’ 02’’ pendant 21 secondes ; - En date du 02 juin à 07 heures 38’ 43’’, Général OLEKO appela John NUMBI pendant 107 secondes, à 12 heures 56’ 52’’ John NUMBI appela Général OLEKO pendant 01 seconde et à 12 - 71 - heures 57’ 16’’ Général OLEKO rappela pendant 110 secondes, à 13 heures 22’ 58’’ John NUMBI appela Général OLEKO pendant 28 secondes, à 14 heures 38’ 20’’, John NUMBI appela Général OLEKO pendant 140 secondes, à 19 heures 30’19’’, John NUMBI appela Général OLEKO pendant 187 secondes ; - En date du 03 juin 2010, Général OLEKO appela John NUMBI pendant 42 seconde, à 10 heures 10’ ; - En date du 04 juin 2010, Général OLEKO appela John NUMBI 0 13 heures 44’ 12’’ pendant 10 secondes et à 16 heures 34’ 41’’ pendant 10 secondes. - En date du 05 juin 2010, à 08 heures 29’ 46’’, John appela Général OLEKO pendant 40 secondes, à 08 heures 31’ 32’’ Général OLEKO appela John NUMBI pendant 147 secondes, à 09 heures 11’ 32’’ Général OLEKO appela John NUMBI pendant 71 secondes, à 20 heures 28’ 43’’, John NUMBI appela Général OLEKO pendant 33 secondes, à 21 heures 33’ 14’’ John NUMBI appela Général OLEKO pendant 13 secondes. Il en est de même de communication entre John NUMBI et Daniel MUKALAY, entre celui-ci et Christian NGOY et MWILAMBWE et viceversa une sorte de nid à crabe au procès. En outre, les relevés téléphoniques renseignent qu’en date du 31 mai 2010 entre 11 heures 00’ à 14 heures 00’, John NUMBI, Daniel MUKALAY et MWILAMBWE étaient tous à l’Inspection Général de la Police Nationale Congolaise (cotes 1426, 1180, 1181 et 1343). Ce qui contredit les dires de Daniel MUKALAY et de Alaine MWENZE selon lesquels John NUMBI aurait fait trois ou quatre jours avant le 1er juin 2010 sans arriver à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. En conséquence, il est impossible que Daniel MUKALAY soit à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise sans se rendre compte de la présence de John NUMBI, présence signalée pendant plus de deux heures. Cette présence concomitante de ces trois prévenus à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, avait pour but la concertation et la mise à exécution d’assassinat de CHEBEYA. En effet, après cette concertation, Daniel MUKALAY avait reçu l’instruction - 72 - d’aller du coté de MATADI KIBALA pour identifier l’endroit où l’on pourrait déposer le corps de celui qui sera assassiné. Ce que Daniel MUKALAY fit (cotes 1190 et 1491). Ainsi, après avoir tout mis en place, Daniel MUKALAY appellera leur victime CHEBEYA sous prétexte qu’il serait reçu le 1er juin 2010 dans les après-midi par l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise, John NUMBI (cotes 1491). DES PRESOMPTIONS. Des attitudes, faits et gestes des prévenus, on présume que tous les prévenus ont coopéré à l’exécution de l’assassinat de CHEBEYA ; Daniel MUKALAY apporte son expertise dans la faisabilité de l’assassinat de CHEBEYA, Christian NGOY, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO sont chargés d’exécution matérielle sous la supervision de Daniel MUKALAY ; Michael MWILA avait pour mission d’attirer la victime vers le lieu d’assassinat, alors que l’inspecteur Georges KITUNGWA, NGOLE NGOY et les autres personnes non traduites devant la Cour de céans ont pour rôle d’effacer les traces. DES AVEUX CIRCONSTANCIES. Devant l’auditorat comme devant la juridiction de jugement, John NUMBI, Daniel MUKALAY et Michael MWILA ont avoué chacun en ce qui le concerne, avoir signé la lettre du 27 mai 2010 destinée à CHEBEYA de la Voix des Sans voix, l’avoir retirée sans suivre le cheminement administratif régulier et l’avoir déposée en date du 28 mai 2010. (Cotes 724, réponse 4, 725, réponse 8 ; cote 2, réponse 3. P.V d’audition du 19 juillet 2010, réponse 5, 7 et 8, P.V du 05 juillet 2010, réponse 5 ; P.V du 28 juin 2010, réponse 7) ; • ASSASSINAT PROPREMENT DIT. Pour la constitution de l’infraction d’assassinat, le législateur exige qu’il y ait les éléments constitutifs de meurtre aggravés par l’élément préméditation. Nous allons dans les développements qui suivent apporter les preuves desdits élément d’aggravation. - 73 - • PREUVES DE L’ELEMENT MATERIEL D’ASSASSINAT Cet élément de l’infraction est prouvé part les indices, procès-verbaux de constat. 1) INDICES PROUVANT L’ELEMENT MATERIEL D’ASSASSINAT Un indice est constitué des traces, empruntes, objets laissés sur le lieu de l’infraction… Dans le cas d’espèce, la Cour a eu à se rendre compte des traces de minotages dont le feu CHEBEYA BAHIZIRE était l’objet avant sa mort. En effet, les avant-bras du corps de l’assassiné avait relevé des lésions dues au menottage. Ces lésions sont en fait, des traces laissées par l’acte matériel et positif posé par les exécutants de l’assassinat de feu CHEBEYA. 2) EXPERTISE MEDICO-LEGALE PROUVE LA POSSIBILITE D’UTILISATION D’UN ACTE POSITIF D’ELEMENT MATERIEL D’ASSASSINAT. La cote 1104 du dossier sous examen, 5ème paragraphe, l’expert, le médecin anatomopathologiste parlant de la cause de la mort de feu CHEBEYA, pense à une asphyxie par contrainte compressive appliquée au niveau du visage, par empêchement des mouvements respiratoires d’une autre manière ou par des méthodes du même type. En effet, analysant la muqueuse du larynx (cote 1096 ou page 18 du rapport d’autopsie), le cuir chevelu et pie-mère de l’intérieur de la boite crânienne (cote 1097 ou page 17 dudit rapport), les experts ont constaté le début de décomposition avec anomalies en taches au niveau de la muqueuse de larynx, quelques petits épanchements de sang punctiformes, plus particulièrement à la face intérieure du cuir chevelu et accumulation de sang, à la face postérieure de la piemère de l’intérieur de la boite crânienne. Tous ces constats ne sont que le résultat d’un acte positif caractéristique d’acte matériel constitutif d’assassinat. - 74 - 3) PROCES VERBAUX D’AUDITION, POSITIF CONSTITUTIF D’ASSASSINAT PREUVE D’ACTE Entendu à l’auditorat Général, l’inspecteur adjoint IBIBA VAN BILE a dit : « les deux lésions du bras constatées, nous présumons que la victime a été ligotée ou menottée ; s’agissant des mouvements irréguliers du cou, nous présumons que le cou a été tordu… » (Cote 104, réponse 10) ; Menotter la victime et lui tordre le cou, c’est là l’acte matériel posé en vue de donner la mort ; 4) DES RENSEIGNEMENTS. Nous pouvons utilement recourir aux développements qui précèdent et les dépositions de tous ceux qui ont vu le corps de CHEBEYA le matin du 02 juin 2010. 5) DES PRESOMPTIONS Les présomptions constituent un mode de raisonnement qui consiste à partir d’un fait connu pour découvrir ce qui n’est pas révélé. Dans le cas sous examen, les constatations de la police technique et scientifique (cotes 97 à 100, réponse 3, 101 à 104, réponse 5) donnent comme faits connus : lésions corporelles et un cou tordu ; De ces constatations, on peut présumer qu’un acte matériel a été posé contre le feu CHEBEYA et qui a eu pour conséquence, le décès. 6) PREUVES DE L’ELEMENT INTENTIONNEL Le professeur LIKULIA BOLONGO, dans son droit pénal spécial Zaïrois enseigne que l’intention homicide peut résulter soit de l’arme employée soit de l’endroit ou le coup a été porté, soit du degré ou de la gravité de la violence, soit en fin de l’état physique de la victime. En l’espèce, seules les présomptions seront retenues comme mode de preuve de l’intention de donner la mort. Avant de conclure par présomptions, nous donnons d’abord ce qui est connu du moyen de l’aveu, des indices et écrits. - 75 - • AVEU Tant devant l’auditorat Général que la Cour de céans, le prévenu Inspecteur Principal Daniel MUKALAY WA MATESO a avoué sans aucune réserve que le feu CHEBEYA aurait pris rendez-vous avec l’Inspecteur Divisionnaire en Chef John NUMBI pour le mardi 01 juin 2010, à partir de 17 heures, rendez-vous dont lui-même Daniel MUKALAY était le facilitateur. • INDICES Ces indices sont révélés par les relevés téléphoniques qui ont constaté sans nul doute que le feu CHEBEYA était bel et bien arrivé à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. En effet, les relevés téléphoniques ont renseignés que le numéro Airtel de CHEBEYA a été pris en charge par l’antenne palais du peuple de 19 heures 38’ à 19 heures 57’ puis par celle de stadium de 21 heures 11’ à 21 heures 16’. Or, à 17 heures 33’, CHBEYA accompagné de BAZANA étaient déjà pris en charge par l’antenne de BANDAL. Ce qui fait que si on met un maximum de 30 minutes pour arriver à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, c’est qu’à 18 heures 03’, CHEBEYA et BAZANA étaient déjà à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. L’heure fixée pour le soit disant rendez-vous, soit au-delà des heures de service est un indice sérieux que ce n’était pas pour des raisons de service que CHEBEYA était invité, mais plus tôt pour son élimination physique. • ECRITS Les messages trouvés sur le téléphone de Daniel MUKALAY daté du 1er juin 2010 venant du numéro de Christian NGOY dont les teneurs sont : « Bonjour, mon colonel, le nom du monsieur des droits de l’Homme, CHEBEYA Floribert, téléphone 0999939867 Merci », « Mimi Mze niko na petit jacques nasubiri mipango kutoka kuenu, pale Mze ». Ces messages ont été bel et bien reconnus par les relevés téléphoniques. En effet, la cote 1336 renseigne qu’en date du 1er juin - 76 - 2010 à 17 heures 29 minutes 29 secondes, Monsieur Christian NGOY KENGA KENGA pris en charge par l’antenne centenaire avait envoyé un message à Daniel MUKALAY. Or, ces messages certifient sans nul doute que Christian NGOY KENGA KENGA et CHEBEYA étaient à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, pris en charge par les antennes respectives couvrant l’enceinte de l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. • CONSTATATIONS. Les constatations ci-après ont été faites : - La Jeep de brigade CANINE n°238 ravie par Daniel MUKALAY depuis le 1er juin 2010 pour escorter le corps de CHEBEYA jusqu’à MITENDI avait été garée chez Christian NGOY jusqu’au 04 juin 2010 ; - Daniel MUKALAY était rentré chez lui en date du 1er juin 2010 par un véhicule autre que sa Jeep qui était dans l’escorte du corps de CHEBEYA ; - Le 1er juin 2010, Christian NGOY après avoir déposé le corps de CHEBEYA, était allé à 23 heures 32 minutes déposer la Jeep de Daniel MUKALAY (cote 1336) ; - Les 02 et 03 juin 2010, Christian NGOY n’était pas arrivé à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise (cote 1337 à 1339). Il était sorti le 04 juin 2010 pour remettre la Jeep CANINE et après l’avoir remise, il avait appelé le commandant de la Brigade CANINE, à 13 heures 59 minutes et 14 secondes au numéro 0991695820, appel qui avait durée 449 secondes. En ce moment là, Christian NGOY était pris en charge par l’antenne FUNA D3 (cote 1340). • PRESOMPTIONS De toutes les preuves administrées ci-haut, les présomptions d’intention de donner la mort découlent des questions ci-après : o Comment expliquer que la personne pour laquelle on a pris rendez-vous et qu’on devait conduire auprès de l’autorité désirée et qui était effectivement arrivée sur le lieu du rendez-vous se trouve menottée dont les traces étaient restées indélébiles ? - 77 - o A quoi devrait servir la Jeep CANINE n° 238 alors que le commandant TONY BOGOKIA était acheminé au camp LUFUNGULA par la Jeep de Daniel MUKALAY ? o Comment expliquer la crainte qu’avait CHEBEYA quand il se rendait à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, crainte expliquée à travers les SMS envoyés notamment à Madame YANDE de la MONUSCO Division droit de l’Homme : « je me rends à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise pour rencontrer l’Inspecteur Général, prière de suivre » ?? Le message de Christian NGOY à Daniel MUKALAY avait pour finalité d’obtenir de John NUMBI et Daniel MUKALAY les modalités pratiques d’exécution de feu CHEBEYA. En définitive, les traces matérielles de lésions trouvées au niveau des avant-bras et jambes, font présumer une intention de donner la mort. En effet, CHEBEYA s’étant rendu librement à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, son immobilisation au moyen des menottes est une manifestation évidente de l’intention de lui donner la mort. En tout cas, connaissant CHEBEYA et son activisme pour les droits de l’Homme, ceux qui l’avaient menotté n’avaient qu’une intention univoque, celle de le tuer, car lui administrer des coups et blessures, ça allait se savoir et le monde entier allait en parler et le pouvoir en place allait avoir des problèmes sur le plan de sa diplomatie. • PREUVES DU MOBILE D’ASSASSINAT Le mobile du crime est inopérant lorsqu’il est invoqué comme cause d’excuse (voir LIKULIA BOLONGO, op. cit. P.P. 54 à 58), mais le juge peut toujours s’intéresser au mobile dans la recherche de la motivation du crime. En effet, le mobile est l’intérêt ou le sentiment qui a été à l’origine de l’acte criminel. Il est la cause impulsive et déterminante de l’acte criminel et est par essence variable au pré des circonstances et des caprices ou des retentissements psychologiques individuels. (LIKULIA BOLONGO op. cit. P. 54) ; En l’espèce, le mobile est l’intérêt qu’avaient les assassins et notamment John NUMBI, de mettre fin à la carrière de CHEBEYA qui dérangeait trop le pouvoir en place. En effet, les dossiers sur lesquels travaillait CHEBEYA tels que Aff. EME KABILA, Aff. BUNDU DIA KONGO - 78 - et récemment la lettre n° 013/RDC/VSV/CD/2010 du 10 février 2010 demandant l’intervention de l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise pour l’humanisation des conditions carcérales sur toute l’étendue de la République Démocratique du Congo (lire la lettre cote 996). Ainsi, on peut dire que le mobile de l’assassinat est prouvé par les écrits. 1) ECRITS PROUVANT LE MOBILE DU CRIME - RAPPORT SPECIAL MARS 2008 SUR LA REPRESSION SANGLANT ET DISPROPORTIONNEE DES ADEPTES DE BUNDU DIA KONGO (BDK) DANS LA PROVINCE DU BAS-CONGO Ce rapport constitue les cotes 1044 à 1056 du dossier où les noms du Ministre honoraire de l’Intérieur, décentralisation et Sécurité, Monsieur Dénis KALUME NUMBI, les Gouverneurs et vice-gouverneur de la province du Bas-Congo, Messieurs MBATSHI MBATSHA et Déo NKUSU, les Généraux RAÜS CHALWE et John NUMBI sont cités comme pouvant répondre de leurs ordres devant les instances judiciaires (lire cotes 1049, derniers §, et 1050 1er §). - LETTRE DE LA VOIX DES SANS VOIX DU 10 FEVRIER 2010 ADRESSEE L’INSPECTION GENERALE DE LA POLICE NATIONALE CONGOLAISE. Les cotes 996 à 998 du dossier renseignent qu’en date du 10 février 2010, feu CHEBEYA alors Directeur Exécutif de la Voix des Sans Voix avait adressé à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise une lettre dont l’objet était « demande d’intention pour l’humanisation des conditions carcérales sur toute l’entendue de la République Démocratique du Congo. Le contenu de cette lettre renseigne que le feu CHEBEYA dénonçait beaucoup de méfaits retenus à charge des autorités de la police et celles politiques (lire cotes 996 à 998) ; Ces deux correspondances émanant de CHEBEYA avaient fait naître chez John NUMBI et ses complices, l’intérêt, donc le mobile de mettre fin à la carrière de CHEBEYA par l’élimination physique de celui-ci. - 79 - - LETTRE N°00827/PNC/IG/CAB/CJ/2010 DU 27 MAI 2010 ADRESSEE MONSIEUR FLORIBERT CHEBEYA BAZIHIRE La cote 1588 du dossier renseigne l’existence de la lettre précitée dont l’objet était de distraire feu CHEBEYA sur ce qui allait lui arriver à la suite de ses dénonciations. En effet, Monsieur John NUMBI avait écrit : « votre lettre référencée n°013/RDC/VSV/CD/20140 du 10 février 2010, « relative à l’objet repris en rubrique, m’est parvenue depuis le 18 « février courant et, son contenu a retenu toute mon attention. « Cependant, tout en accédant à votre demande, …. » ; • CIRCONSTANCES AGGRAVANT LE MEURTRE Les articles 44 et 45 alinéa 2 du code pénal livre II dispose : le meurtre commis avec préméditation est qualifié d’assassinat » ; Il découle de cette disposition légale que la circonstance qui fait du meurtre, assassinat est la préméditation. La doctrine enseigne que la préméditation est plus que l’élément moral du meurtre simple, c’est le dessein formé avant l’action, de façon réfléchie, délibérée et de sang-froid, c'est-à-dire avec calme, d’attenter à la vie d’une personne (LIKULIA BOLONGO op. cit. P. 62). Elle suppose donc la résolution de donner la mort ; une certaine durée du temps plus au moins longue, en tout cas variable dans chaque cas, entre la conception de l’infraction et son accomplissement ; et une réflexion ou un guet-apens. En l’espèce, cet élément aggravant le meurtre de CHEBEYA BAZIHIRE a bel et bien existé. • PREUVE DE LA PREMEDITATION La préméditation de l’assassinat de CHEBEYA peut être prouvée par les indices, renseignements, les écrits et les présomptions. - INDICES Ces indices sont constitués des traces laissées par les communications téléphoniques. En effet, les cotes 1401 à 1428 renseignent que du 17 - 80 - au 31 mai 2010, John NUMBI et Daniel MUKALAY ne se sont communiqué au téléphone que trois (3) fois, alors que pour la seule journée du 1er juin 2010, ils ont eu entre eux cinq communications téléphoniques dont trois avant l’heure de l’assassinat de CHEBEYA. En outre, les cotes 1171 à 1182 renseignent que John NUMBI et Paul MWILAMBWE ont eu en moyenne deux (2) appels par jour alors qu’en date du 1er juin 2010, ils ont eu au total treize (13) communications dont dix (10) avant 18 heures 05 minutes. En fin, le guet-apens de Daniel MUKALAY contre CHEBEYA est prouvé par l’heure à laquelle celui-ci a toujours quitté son bureau. En effet, avant le jour d’assassinat de CHEBEYA, Daniel MUKALAY a toujours quitté son bureau au plus tard 16 heures 00’ (cotes 1192 à 1213, relevés d’appel Daniel MUKALAY). Pour besoin d’assassiner CHEBEYA, ce jour-là Daniel MUKALAY était resté à son bureau jusqu’à 20 heures 15 minutes au moins. Cet état des choses est confirmé par les dires de Daniel MUKALAY s’adressant aux activistes des droits de l’Homme venus s’enquérir sur le sort de leur collègue. En effet, il avait déclaré qu’il était resté au bureau jusqu’audelà de 20 heures 00’ pour attendre CHEBEYA. Il en est de même de Paul MWILAMBWE qui, contrairement à ses habitudes, avait quitté l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise au-delà de 19 heures 33’ en date du 1er juin 2010 (cotes 1182). - LES RENSEIGNEMENTS De l’audition de Monsieur Olivier KUNGWA, il ressort que la préméditation du meurtre de CHEBEYA peut être constatée à travers l’attitude de Monsieur Michel MWILA, envoyé pour déposer la lettre de l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise avec mission de bien identifier Monsieur CHEBEYA en faisant à tout prix que la lettre lui soit remise en main propre. - LES ECRITS La cote 1588 constituant la Lettre de l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise à CHEBEYA est une preuve de ce que le dessein de tuer CHEBEYA était arrêté par notamment John NUMBI, Daniel MUKALAY, Michel MWILA, Christian NGOY et Paul MWILAMBWE. - 81 - En effet, alors que la lettre du 10 février 2010 est signée pour compte de la Voix de Sans Voix par CHEBEYA agissant es qualité, l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise, répondant à celle-ci, met en vedette la personne de CHEBEYA. Ce qui faisait de cette lettre une correspondance personnelle qui ne pouvait être remise qu’en main propre de CHEBEYA. En outre, par cette correspondance, John NUMBI qui avait déjà, ensemble avec ses complices, le projet de tuer CHEBEYA, va mettre celui-ci en confiance en des termes ci-après : « votre lettre référencée 013/RDC/VSV/CD du 10 février 2010, son contenu a retenu toute mon attention, cependant, tout en accédant à votre demande ; - LETTRE N°013/RDC/VSV/CD/2010 DU 10 FEVRIER 2010 EMANANT DE LA VOIX DE SANS VOIX. Le contenu de cette lettre est troublant au point qu’il ne pouvait laisser les autorités politiques et celles de la police à leur aise (lire cotes 996 à 998). - RAPPORT SPECIAL SUR LES MASSACRES DES BDK Lire le contenu des cotes 1044 à 1056. - LETTRE N°00827/PNC/IG/CAB/CJ/2010 DU 27 MAI 2010 ADRESSEE MONSIEUR FLORIBERT CHEBEYA BAZIHIRE - COMMUNIQUE DE PRESSE DU 02 JUIN 2010 DE L’INSPECTEUR PROVINCIAL DE LA POLICE VILLE DE KINSHASA Lire le contenu de la cote 1592. - PRESOMPTIONS Les présomptions partent de ce que pour les jours ouvrables le registre d’entrée est ouvert et disponible de 08 heures à 16 heures 00’ tant pour l’Inspecteur Général de la Police Nationale Congolaise que pour ses adjoints. - 82 - Cependant, pour la journée du 1er juin 2010, ce registre a été clôturé à 12 heures 00’ empêchant ainsi que lors de son arrivée, CHEBEYA ne soit enregistré et qu’il n’existe en cette date aucune trace de son passage à l’Inspection Générale de la Police Nationale. De cette attitude consistant à ne pas laisser les traces du passage de CHEBEYA à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise, on présume que le dessein de le tuer était déjà arrêté. I.2. ASSASSINAT DE BAZANA EDADI FIDELE L’assassinat de BAZANA EDADI Fidèle étant l’œuvre des mêmes prévenus qui voulaient à tout prix effacer les traces de l’assassinat de CHEBEYA, notamment la disparition des témoins gênants, les éléments constitutifs retenus pour l’assassinat de CHEBEYA sont sensés ici être intégralement reproduits, les preuves supplémentaires seront rapportées par les indices, les écrits, les présomptions et les renseignements. A. PREUVES DE L’ELEMENT MATERIEL 1) Des présomptions Avant de présumer, disons ce qui est connu : - CHEBEYA ne conduisait pas, il était toujours conduit par BAZANA EDADI Fidèle. - Daniel MUKALAY reconnaît que lorsque CHEBEYA l’avait appelé aux environs de 17 heures 00’, il était pris dans un embouteillage, donc, il était à bord de sa propre voiture conduite par BAZANA ; - BAZANA EDADI Fidèle, dans ses habitudes, lorsqu’il était empêché, appelait toujours sa femme pour la prévenir et surtout que même en cas de perte d’appareil, il avait le numéro de téléphone de son épouse et de ses enfants en tête. - BAZANA EDADI Fidèle, était le témoin gênant de tout ce qui était arrivé à CHEBEYA en date du 1er juin 2010 à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. - Le mode opératoire choisi par les assassins était de tuer sans laisser des traces ni témoins. C’est cela qui explique aussi - 83 - l’assassinat de APP KABONGO de la Brigade canine, qui avait observé la scène du 1er juin, lorsqu’il revenait du camp Kokolo. De tous ce qui précède, il est une présomption irréfragable qu’en vue d’effacer toutes les traces, les assassins après avoir réfléchi sur le rôle qu’allait jouer BAZANA EDADI Fidèle en justice, avaient décidé de le tuer aussi. 2) Des aveux Voir développement, assassinat CHEBEYA 3) Des indices Voir développement, assassinat CHEBEYA Le premier indice de l’assassinat de BAZANA EDADI Fidèle est l’endroit où la voiture MAZDA et le corps de CHEBEYA ont été trouvés, à MITENDI, dans la commune de Mont-Ngafula. Or, il est incontestablement établi que feu CHEBEYA ne conduisait jamais et que ladite voiture était conduite par feu BAZANA EDADI qui avait amené feu CHEBEYA à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise en date du 1er juin 2010 ; Donc, le corps de CHEBEYA trouvé mort à MITENDI et le véhicule que conduisait BAZANA sont des indices faisant croire que le sort réservé à feu CHEBEYA, BAZANA en était également victime. 4) Des écrits Le décès de BAZANA EDADI Fidèle est prouvé par le jugement R.C… du Tribunal de Grande Instance de Kinshasa/Gombe, jugement coulé en force des choses jugées. - Le communiqué de presse de l’Inspection Provinciale de la Police Ville de Kinshasa. Le communiqué de l’inspecteur Provinciale de la Police, ville de Kinshasa renseigne bien que la voiture que conduisait BAZANA a été retrouvé à MITENDI avec sur sa banquette arrière, le corps sans vie de Floribert CHEBEYA. - 84 - 5) Des renseignements - Dépositions de monsieur Gomer Martell Entendu tant devant l’auditorat Général que devant la Cour de céans, Monsieur GOMER MARTELL a dit avoir vu en date du 1er juin 2010, feu CHEBEYA accompagné d’une autre personne un peu plus géante que lui. C’était bel et bien BAZANA qui accompagnait CHEBEYA. - Dépositions de messieurs Olivier Kungwa, Doly Ibefo Et madame Marie-Josée Ikoko Des dépositions des précités, la Cour peut retenir que BAZANA, activiste des droits de l’homme, avait choisi pour tache de conduire CHEBEYA partout où celui-ci devrait se rendre dans la ville de Kinshasa et qu’en date du 1er juin 2010, BAZANA était au volant de la voiture MAZDA, conduisant CHEBEYA à l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. II.ASSOCIATION DES MALFAITEURS Les articles 156 à 158 du code pénal livre II, définissent l’association des malfaiteurs et les différentes catégories des membres. Pour l’existence de l’association des malfaiteurs, la loi impose comme éléments constitutifs : l’organisation et les rôles joués par les membres de la bande ainsi que le but poursuivi, celui d’attenter aux personnes ou aux biens. La jurisprudence a ajouté le critère de permanence et le concert préalable. Les preuves de tous ces éléments seront rapportées comme suit : PREUVES DE L’ASSOCIATION DES MALFAITEURS A. PREUVE DE L’ORGANISATION La bande à John NUMBI et Daniel MUKALAY est organisée sur les critères tels que : être policiers, savoir être discret ainsi que se soumettre au Chef de la bande. - 85 - Cette organisation sera prouvée par les constatations matérielles, notamment les auteurs de l’infraction, indices, présomptions, renseignements et les écrits. 1) LES AUTEURS DE L’INFRACTION, MEMBRES DE LA BANDE. Selon le constat fait tant par l’Auditorat que la Cour de céans, les membres de la bande se recrutent parmi les éléments de la Police œuvrant au sein des unités ignorées par l’administration de la police. Il en est ainsi du bataillon SIMBA et de l’unité PRI. En outre, les éléments du Bataillon SIMBA viennent en majorité sinon tous de la force Aérienne des FARDC sous commandement de John NUMBI. Le critère confiance est ainsi établi entre les membres. 2) MOYENS D’ACTION DE LA BANDE En ce qui concerne les moyens humains, il s’agit des gens qui se connaissent et qui se font confiance, et qui viennent tous de la même souche. Les moyens matériels de la bande sont constitués des armes de la Force Aérienne que le provocateur de la bande avait amenées en même temps que les éléments humains. - INDICES Ici, les indices sont des traces laissées par les communications téléphoniques entre les membres de la bande. En effet, l’analyse de relevés téléphoniques (cotes …) révèle que John NUMBI, Daniel MUKALAY, Paul MWILAMBWE, Christian NGOY et Michel MWILA communiquent entre eux plus qu’ils ne communiquent avec les autres éléments ou autorités de la police. A titre illustratif, les cotes … sur les relevés téléphoniques de Daniel MUKALAY renseignent que celui-ci n’a pas de communication avec son chef hiérarchique, le Général UNYON alors qu’il a une communication très abondante avec John NUMBI, Christian NGOY, Paul MWILAMBWE et Michel MWILA ; - 86 - Il en est de même de John NUMBI qui communique fréquemment avec Daniel MUKALAY, Christian NGOY, Paul MWILAMBWE mais ne communique presque pas avec ses proches collaborateurs, notamment le Général BISENGIMANA, ALONGA BONI et UNYON. Par ailleurs, une communication très intéressée a été constatée entre le Général OLEKO et John NUMBI (cotes 1413 à 1440) à lire. - PRESOMPTIONS Il se déduit des faits et attitudes des membres de la bande qu’ils communiquent entre eux, ils se couvrent mutuellement ; En effet, entendus sur la position de Christian NGOY, John NUMBI et Daniel MUKALAY ont dit à la Cour de céans que Christian NGOY était en congé. Mais quand le directeur des ressources humaines de la Police a déposé, elle a déclaré preuve à l’appuie que Christian NGOY, Paul MWILAMBWE et Jacques MUGABO étaient déclarés déserteurs ; De ces constats, on présume bien que les éléments de la bande se protègent mutuellement. 3) PREUVE DU CONCERT PREALABLE. Ici la preuve est rapportée par la répartition des tâches. En effet, John NUMBI est le provocateur de la bande et son pourvoyeur en armes ; et c’est lui qui recrute ou agrée les nouveaux membres ; Daniel MUKALAY exerce le commandement sous le contrôle de John NUMBI, et les autres membres sont des exécutants des rôles qu’on leur confie, notamment celui de déposer les lettres et dévisager les victimes, celui d’effacer les traces et même celui de désorienter les enquêtes... 4) LA PREUVE DE LA PERMANENCE DE LA BANDE La preuve de la permanence de la bande est rapportée par une série d’infraction, dont elle s’est rendue capable et par les armes que la bande détenait. - 87 - B. SERIE D’INFRACTIONS La bande à John NUMBI et Daniel MUKALAY s’est rendue souvent coupable d’une série d’infractions, notamment violation de domicile chez GOMMER MARTELL, extorsion de la Jeep n°238 de la brigade CANINE, détention illégale d’armes de guerre et assassinats de CHEBEYA et BAZANA. 1) P.V. DE SAISIE D’ARMES Les cotes 995 à 1000 du dossier renseignent que la bande à John NUMBI et Daniel MUKALAY détenait une série d’armes de guerre ne faisant pas partie de la dotation de la Police. Ces armes n’étaient pas détenues pour assurer l’ordre public, mais bien pour le troubler par la commission d’infractions. 2) LA PREUVE DU BUT POURSUIVI. L’article 156 du Code pénal livre II ne punit une association que pour autant qu’elle soit formée dans le but d’attenter aux personnes ou à leurs biens. En l’espèce, les prévenus comparaissant, ceux qui sont en liberté et/ou en fuite se sont entendus pour attenter aux biens (jeep de GOMER MARTELL, violation de sa résidence…) et aux personnes (assassinat de CHEBEYA et BAZANA). II. QUANT À L’EXPERTISE MÉDICO-LÉGALE 2.1. Mission assignée aux experts Attendu que suite à la réquisition n° 3137/D.023/20.9856/PGR/TT/2010 du 09 juin 2010, une expertise médicale, c'est-à-dire une autopsie qui se voulait complète en vue de déterminer les causes du décès de Monsieur Floribert CHEBEYA, fut pratiquée sur son corps par les Docteurs TSHOMBA HONDO et Franklin Ragnar William VAN DE GOOT, qui se sont respectivement identifiés comme Médecin Légiste au Département de médecine légale de l’Hôpital Provincial Général de Référence de Kinshasa et Médecin Légiste de l’Université libre d’Amsterdam, CFP/VERILABS, Royaume des Pays-Bas ; Que les devoirs assignés auxdits experts consistaient à : - Soumettre le corps de la victime à l’expertise médicale ou à l’autopsie complète pour déterminer les causes de sa mort, - Faire rapport. - 88 - 2.1.1. Constats avant expertise Attendu que l’instruction de cette cause a permis au Médecin Légiste congolais, seul présent aux audiences, de rappeler ce qui suit : - l’expertise requise fut pratiquée près de onze jours après le décès de la victime quand bien même l’examen externe du corps révéla qu’il était globalement bien conservé ; - les experts Médecins requis ont déploré le fait qu’ils ont certainement perdu beaucoup d’éléments pour n’avoir pas été associés à la descente sur la scène du crime en même temps que l’équipe de la Police Technique et Scientifique qui y fut dépêchée et dont, par ailleurs, ils ignoraient le contenu du rapport dressé à cette occasion ainsi que les constatations cristallisées par les images photographiques prises à l’occasion ; - Avant d’être mis à la disposition desdits experts Médecins, le corps de la victime avait transité entre les mains des éléments de la Police qui l’avaient acheminé de la localité de Mitendi à la Morgue et entre celles des préposés à la morgue qui l’avaient réceptionné en date du 2 juin 2010 alors que l’autopsie proprement dite ne sera pratiquée qu’en la date du 11 juin 2010. 2.1.2. Conclusions de l’autopsie Attendu que sans préjudice des reproches formulés par les parties civiles sur les insuffisances portées par le travail présenté par les experts Médecins requis, les passionnés et houleux débats qui eurent lieu à l’audience autour de leur rapport avaient finalement abouti aux évidences ci-après : - Pour n’avoir pas été sur la scène du crime, les experts Médecins requis ne sont pas en mesure de remettre formellement en cause les constatations y faites par les experts de la Police scientifique commis pour ce faire et ce, en ce qui concerne la trace de sang photographiée sur la commissure gauche des lèvres de la victime (photo que l’Expert Médecin requis a découverte pour la toute première fois à l’audience du 28 février 2011) et s’agissant des mouvements irréguliers du cou de la victime alors que le reste du corps avait déjà acquis une certain degré de rigidité cadavérique ; - Le rapport d’expertise médico-légale présenté ne comporte que des preuves indicielles car elle n’a pas permis de mettre en évidence une cause anatomique certaine expliquant le décès de la victime CHEBEYA (cotes 966 et 1104 du dossier judiciaire relatives respectivement au rapport préliminaire médico-légale d’expertise du 11 juin 2010 et au rapport d’autopsie du 29 juin 2010 ), - Parmi les indices marquants, le rapport a relevé, d’une part, que les ecchymoses en anneau présents autour des poignets sont « compatibles avec des menottes très serrées, à en juger par l’hémorragie sous-cutanée découverte en incisant l’anneau ecchymotique » (cote 965 du dossier judiciaire). - 89 - Ceci confirme évidemment que la victime fut « prise en charge » par des personnes appartenant à un service qui utilise des menottes, en l’occurrence la Police nationale à son Inspection générale où la victime était conviée à rencontrer l’IG et ce, dans un contexte manifestement inamical et c’est le moins que l’on puisse dire au vu des mobiles de ce crime et, d’autre part, que les infiltrations ecchymotiques en nappe présentes sur la face intérieure des jambes « est compatible soit avec des coups soit avec un écrasement … » (cote 965 du dossier judiciaire : rapport préliminaire d’expertise médico-légale du 11 juin 2010), - Un autre indice déterminant est que, tant le rapport préliminaire d’expertise médico-légale susdit que le rapport d’autopsie lui-même, envisagent clairement l’hypothèse de la suffocation par différents moyens (cote 966 du dossier judiciaire pour le rapport préliminaire et cote 1104 pour le rapport d’autopsie). - Que plus concrètement, le rapport d’autopsie mentionne à la cote précitée qu’en l’espèce sous examen l’ « on ne peut pas exclure avec une certitude absolue les hypothèses de mort non naturelles qui ne laissent pas ou pratiquement pas de traces spécifiques, telles que l’asphyxie par contrainte compressive appliquée au niveau du visage, par empêchement des mouvements respiratoires d’une autre manière ou par des méthodes du même type ». - Que le rapport préliminaire d’expertise médico-légale dit, quant à lui, que l’hypothèse d’une strangulation n’est pas à écarter d’emblée, vu la présence de pétéchies au niveau des conjonctives palpébrales et ce, bilatéralement (cote 966 du dossier judiciaire). - Que d’où la conclusion finale du rapport d’autopsie faisant état de la nécessité d’une enquête policière technique et tactique qui permettra éventuellement de fournir des informations supplémentaires sur ce point (cote 1104 du dossier judiciaire). - Qu’interrogé à l’audience du lundi 28 février 2011 sur ces passages spécifiques du rapport préliminaire d’expertise médico-légale et du rapport d’autopsie sus évoqués, l’Expert Médecin requis, le Professeur Docteur TSHOMBA HONDO a clairement déclaré qu’ « il est tout à fait évident que les seules pathologies non apparentes dont souffrait la victime (myocardie lymphocytaire et dysplasie arythmogène) n’ont pas pu entrainer sa mort, laquelle est plutôt le résultat de l’intervention avérée d’acteurs extérieurs qui ont exercé sur la victime - 90 - l’une des formes de violences susdites », que le rapport n’a finalement pas exclu, et ce, dans le but de lui ôter la vie sans laisser de traces physiques. - Que la boucle est ainsi bouclée quand on sait par ailleurs que le prévenu Inspecteur Christian NGOY KENGA KENGA en fuite, d’une part, est renseigné par sa fiche signalétique comme étant un expert de l’anti-terrorisme et des arts martiaux (cote 985 du dossier judiciaire) maîtrisant donc les techniques appropriées pour ce genre d’entreprise criminelle et, d’autre part, est la personne qui s’est « occupée » de la victime entre le moment où celle-ci a séjourné à l’Inspection Générale de la Police et celui où son corps sans vie a été abandonné sur la route à Mitendi. 2.1.3. Convergence avec le rapport de la Police Technique et Scientifique Attendu que, comme dit ci-haut, il ressort du rapport d’autopsie qu’une enquête policière technique et scientifique est un complément nécessaire à l’œuvre des médecins-légistes quant au mode opératoire emprunté par les assassins de Floribert CHEBEYA ; Qu’en l’espèce, le document intitulé « dossier technique de scène d’infraction » datant du 03 juin 2010 versé au dossier judiciaire par la Police Technique et Scientifique, répond de manière satisfaisante à cette recommandation des Experts Médecins-légistes en relevant qu’outre les lésions au niveau des deux bras et des jambes confirmées par le rapport d’autopsie, le constat effectué sur la scène du crime neuf jours avant que l’autopsie ne soit pratiquée révèle que la mort de Floribert est consécutive au fait qu’il a subi une torsion du cou de la part des « agents extérieurs » dont l’intervention a été proclamée indiscutable par le Professeur Docteur TSHOMBA HONGO à l’audience sus évoquée du lundi 28 février 2010, d’où le constat selon lequel le cou effectuait des mouvements irréguliers formellement constatés par les experts de la Police Techniques et Scientifique susdits ; Qu’ainsi, l’infraction d’assassinat de Floribert CHEBEYA par acte matériel et positif trouve ici une confirmation découlant de données et analyses scientifiques fiables ; Qu’il convient à présent d’examiner l’établissement de l’élément matériel (acte positif et matériel) dans le chef de chacun des prévenus mis en cause qui ont commis en participation l’assassinat de Floribert CHEBEYA dans le cadre de l’association des malfaiteurs déjà démontrée ; - 91 - QUATRIEME PARTIE : L’INDEMNISATION DES PARTIES CIVILES A. Parties civiles personnes physiques. A.1. Analyse des préjudices. Dieu en créant l’homme à son image lui a confié une mission importante lors de son pèlerinage terrestre et par ce fait veille à la personne humaine même au niveau de l’embryon, Dieu protège le fœtus. Cette manière de voir les choses a été celle du législateur en général et Congolais en particulier, qui assure la protection humaine conformément aux prescrits des articles 3 de la déclaration universelle des droits de l’homme qui stipule « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sureté de sa personne » ; et 16 de la constitution : « la personne humaine est sacrée, l’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger ». D’où l’Etat puni sévèrement ceux qui prive la vie aux autres. Attendu que pour cette action, les parties civiles sont regroupées en deux catégories ; d’une part il ya les personnes physiques, d’autre part il y a les personnes morales; Attendu que toutes ces personnes se sont régulièrement constituées parties civiles conformément à la loi (les articles 77 alinéa 1 du code judiciaire militaire, 69 et 122 du Code Pénal ordinaire) Que pour les parties civiles personnes physiques, il s’agit de la veuve CHEBEYA, ses enfants et les frères et sœurs du défunt CHEBEYA ; la veuve BAZANA, ses enfants ainsi que les frères et sœurs du défunt BAZANA ; Qu’il est question, ici, respectivement et précisément de : - La veuve CHEBEYA : MANGBENGA NZINGA Annie Enfants : BATA CHEBEYA MOLOMA William, BATA MOLOMA Eric, CHEBEYA MANGBENGA Mérdie, CHEBEYA BAHIZIRE Florny, CHEBEYA MUGOLI Naomi, CHEBEYA DEMVI MONTANA Fonderine: - 92 - Frères et sœurs : Mr CHEBEYA MUGWABIZA, Mme CHEBEYA MUKONZO Loraine, Mr CHEBEYA TSHIBALONZA, Mme CHEBEYA NABAN, Mme CHEBEYA NABINTU, Mr CHEBEYA NGABOEKOLA Roger - La veuve BAZANA : IKOKO NTOMO Marie José, Enfants : Mlle BAZANA Fidéline, BAZANA MANGBENGA, BAZANA LINGANDO, BAZANA Dosi, BAZANA IKOKO, BAZANA Amba Fidele, BAZANA EDADI Guylain et BAZANA KIWA Gétou. Frères et sœurs : Mr MAMBASA Norbert, Mr MONGANGO MANZUA, Mr MABANGE Tharcisse, Mr BAZANA Eugene, Mr NGONDE Marcel, Mme BABITI Marie José, Mme LIPEPELE Noël, Mme ENGAI Monique, Mme TEVAPALE Agnès. Attendu que partant de la présentation des faits de la cause sous examen ainsi que de l’établissement en fait comme en droit des préventions, entre autres, d’association des malfaiteurs et d’assassinat mises à charge de tous les prévenus. Attendu qu’il ressort des dispositions combinées des articles 258 et 260 du CCL III que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu’en même temps, on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde ». Attendu que l’article 75 al1 et 2 du statut de Rome de Cour Pénale Internationale sur la réparation en faveur des victimes stipule : « la Cour établie des principes applicables aux formes de réparation, telle que la restitution, l’indemnisation ou la réhabilitation à accorder aux victimes ou à leurs ayants droit. Sur cette base, la Cour peut, sur demande, ou de son propre chef dans des circonstances exceptionnelles, déterminer dans sa décision l’ampleur du dommage, de la perte ou du préjudice causé aux victimes ou à leurs ayants droit, en indiquant les principes sur lesquelles elle fonde sa décision. La Cour peut rendre contre une personne condamnée une ordonnance indiquant la réparation qu’il convient d’accorder aux victimes ou à - 93 - leurs ayants droit. Cette réparation peut prendre notamment la forme de la restitution, de l’indemnisation ou de la réhabilitation. » Qu’il découle d’une bonne compréhension des articles 258 et 260 que le législateur du code civile Livre III, dans le but de responsabiliser l’auteur d’un acte quelconque qui a causé préjudice à un autre, a élargi les champs des personnes concernées par la réparation selon le principe de la théorie de l’organe. Attendu que pour les cas sous examen, il est à noter que les auteurs de réparation des préjudices ne sont pas des simples prévenus mais aussi des préposés de l’Etat qui ont tous posé leurs actes dans le cadre de leurs fonctions et pendant les heures de service, ce qui a été à la base de la confiance des victimes de se rendre sur lieu du rendez-vous car sûrs de la qualité de leurs hôtes, des officiers ainsi que du lieu, un endroit officiel l’Inspection Générale de la Police Nationale Congolaise. Qu’en outre, le législateur Congolais, en se référant aux instruments juridiques internationaux, portant sur la protection des droits humains, a inséré dans la constitution du 18/2/2006 le caractère sacré de la vie à travers l’article 16 de l’actuelle constitution; il en est ainsi de l’article 3 de la déclaration universelle des droits de l’homme qui insiste sur le droit à la vie la liberté et la sureté de la personne humaine. Que c’est pourquoi la vie étant sacrée, le législateur est rigoureux en ce qui concerne l’auteur de la privation de celle-ci à un homme. D’où, même le fœtus est protégé, l’avortement est strictement interdit sauf le cas légal. D’où la mort d’un membre de la famille, peu importe son sexe et âge, a des conséquences très graves auprès des survivants. Qu’il ressort « des dispositions des articles 77 alinéa 1 du code judiciaire militaire, 69 et 122 du code de procédure pénale ordinaire que l’action pour la réparation du dommage causé par une infraction relevant de la compétence de la Juridiction militaire peut être poursuivie par la partie lésée en se constituant partie civile en même temps et devant le même juge que l’action publique. Que la doctrine quant à elle, renseigne que la qualité de la personne qui peut prétendre au droit à la réparation d’un dommage n’est pas déterminée de façon formelle. En effet, l’action civile en réparation du - 94 - dommage causé par une infraction est accordée à tous ceux qui ont souffert du dommage directement causé par elle (Alex WEIL et François TERRE, précis DALOS, droit civil, des obligations 1986 PAGE 620 n° 603) Cité par le Colonel MUTANZANI MUKIMAPA, dans l’affaire RP N°001/2004 arrêt de la Cour Militaire dans l’affaire Colonel ALAMBA Page 164 ». Attendu qu’à coté de la victime principale du dommage, il peut exister d’autres victimes plus éloignées qui souffrent matériellement ou moralement du dommage survenu à celle là. De sorte que, même une concubine peut obtenir réparation du préjudice résultant pour elle de la mort de son concubin (KATUALA KASHALA, Code Civil Zaïrois annoté Ed BATENA TAMBWA, Kinshasa, 1995, p.151, n°28) Attendu que dans l’espèce sous examen, outre l’Etat Congolais dont la loi Pénale a été violée et l’ordre publique gravement troublé, plusieurs personnes physiques et morales s’en sont également victimes, d’où tout le sens de leur action en dommages intérêts. Attendu que dans le cas d’espèce, les parties civiles sont composées des personnes physiques et morales. Attendu qu’il s’en suit la qualité du demandeur en réparation ne tient pas à son statut civil mais à la réalité du préjudice qu’il a subi ; laquelle amène à considérer trois critères de la réparation du dommage à savoir : - L’existence d’un fait générateur de responsabilité ; - L’existence d’un dommage ; - Le rattachement du dommage au fait générateur de responsabilité par un lien de cause à effet. Qu’il faudra donc que le fait générateur ait été la cause efficiente du dommage fait sans lequel le dommage ne se serait pas produit (voir arrêt rendu par la haute Cour Militaire invoqué ci-haut page 165. Que la confrontation de ces critères aux espèces de la cause a démontré que la mort de ces vaillants activistes des droits humains est le fait principal générateur de responsabilité, la cause efficiente du dommage subi par les deux familles. Attendu que la mort de ces deux activistes des droits humains résultant de l’entreprise criminelle des prévenus a causé d’énormes préjudices tant moral, matériel, affectif que financier aux parties civiles préqualifiées. - 95 - Pour la veuve CHEBEYA, son identification douloureuse et définitive comme la femme dont le mari a été tué et présenté comme un expert en sexe et dont le corps a été retrouvé à MITENDI entouré du caractère injurieux c'est-à-dire le sexe, pénis, a été exposé aux yeux et aux vues de tout le monde (préjudice moral). La bible nous dit dans Matthieu 19 :6 « Ainsi ils ne sont plus deux, mais ils sont devenu une seule chair. Que l’homme ne sépare donc pas ce que Dieu a joint ». Mais nous rendons compte que les prévenus ont brisé la loi de Dieu en séparant cette femme de son marie, la privant de l’affection de son époux, celui qui l’a délivrée du célibat, l’empêchant de consommer cette nuit, elle qui avait habillé son marie en sous vêtement et singlet blancs, signe de pureté comme pour dire « Je t’attends ce soir pour une nouvelle nuit de noce avant ton voyage pour MBANDAKA ». Elle tenait à s’occuper de son époux qui devrait voyager le lendemain c'est-à-dire le 02 juin 2010 le jour de la découverte macabre de son corps sans vie vers MITENDI. Quel changement brutale de l’état de mariée de la veuve. Au moins la femme du prévenu Daniel MUKALAYI à chaque audience elle est présente dans la salle pour consoler son époux, prononçant des douces paroles comme « chéri ça arrive, je prie Dieu ça va passer » vous n’avez qu’à observer comment et à quel endroit elle se met, non loin de son mari pour lui assurer son amour et son soutien. Cette femme (veuve CHEBEYA) est privée du droit de consommer le mariage tel que prévu par le législateur du code de la famille Quelle humiliation pour la femme, les enfants ainsi que les membres de la famille (préjudice moral) ; - Pour la veuve BAZANA son identification douloureuse et définitive comme une femme maudite qui n’a pas vu le corps de l’homme de sa vie, situation qui risque de créer un dégout de se remarier. (préjudice moral) - Cette femme qui risque d’être pointée non du doit mais de lèvre comme porte malheur, n’a pas enterré son mari qu’elle pleure et dont elle de mande même les os, qu’on lui montre l’endroit où logent les restes du corps de son mari, de celui qu’elle a aimée et qu’elle continue à aimer. Qu’elle rupture brutale et cruelle - 96 - - - - - d’affection ? la femme du chrétien Daniel, que ressent t- elle dans son cœur quand cette pauvre femme, chaque qu’elle se tient debout devant la barre, pleure, refuse de se venger et demande à ce que justice soit faite. Elle (veuve BAZANA) qui ne s’en remet qu’à la vengeance divine demande à ce qu’on lui rende même les os de son mari. Qu’a-t-il fait le pauvre fidele pour subir un tel sort, celui de manquer de sépulcre ? son crime est d’être défenseur de droit des autres ? Je me souviens des paroles de mes enfants de 9 et 6 ans qui me disaient il y a quelques années que « l’homme est l’animal le plus méchant de la planète car il s’attaque à la nature, aux autres espèces et même à l’homme son semblable». Pour les enfants de CHEBEYA et BAZANA, la perte d’un être cher, leurs tendres pères donc, la privation de leur soutien matériel, financier et de leur source de revenu (préjudice moral, matériel, financier et affectif) ; La présence des deux parents apporte du réconfort aux enfants. Comme chef de famille, les deux victimes constituaient l’appui financier pour les enfants, pour preuve l’enfant de CHEBEYA attendait que son lui apporte la charcuterie tandis que celui de BAZANA avait été accompagné ce matin du 1er juin 2010 à l’école par son père Pour les frères et sœurs de CHEBEYA et BAZANA le fait d’avoir arraché à leur affection de façon sauvage, humiliante leur frère ainsi que la perte du bras et du soutien matériel et financier de toute la famille (préjudice moral, matériel, affectif et financier ; Attendu que la perte d’un être cher ne peut pas être évaluée en argent mais à titre de consolation, toutes les parties civiles préqualifiées, ayant engagé des dépenses pour la découverte de la vérité, pour les présentes poursuites notamment le payement des honoraires à leurs conseils, organisés dans un collectif de 30 avocats Attendu que telle est la démonstration des préjudices subis par les personnes physiques pré-qualifiées ; - 97 - Que la Cour de Céans, sans aucune peine, constatera qu’il s’agit dans le cas sous examen des préjudices matériel, moral, affectif et financier qui sont subis par les personnes physiques. A.2. EVALUATION DES DOMMAGES Pour les personnes physiques ; Attendu que la perte d’un être cher ne peut pas être évaluée en argent mais à titre de consolation, toutes les parties civiles préqualifiées, ayant engagé des dépenses pour la découverte de la vérité, pour les présentes poursuites notamment le payement des honoraires à leurs conseils, organisés dans un collectif de 30 avocats ; sollicitent de la Cour de Céans, la condamnation de tous les prévenus solidairement avec la République Démocratique du Congo au payement de la somme équivalente en dollars payée en franc Congolais au meilleur taux du jour : Que pour ; Veuve CHEBEYA : 30.000.000$ USD Les enfants CHEBEYA : - BATA CHEBEYA MOLOMA William - BATA MOLOMA Eric - CHEBEYA MANGBENGA Merdie - CHEBEYA BAHIZIRE Florny - CHEBEYA MUGOZI Naomi - CHEBEYA DEMYI MONTANA FONDERIE 25.000.000$ US à chacun d’eux Famille CHEBEYA : - Mr CHEBEYA MAMUGWABIZA - Mme CHEBEYA MUKOZO Loraine - Mr CHEBEYA TSHIBALONZA - Mme CHEBEYA NABAN - Mme CHEBEYA NABINTU 20.000.000$ US à chacun d’eux - 98 - Veuve BAZANA : 30.000.000$ US Les enfants BAZANA : - Mademoiselle BAZANA Fideline - BAZANA MANGWENZA - BAZANA DOSI - BAZANA EKOKO - BAZANA AMBA Fidele - BAZANA EDADI GUYLAIN - BAZANA KIWA GETOU 25.000.000$ US à chacun d’eux Famille BAZANA : - Mr MAMBA Norbert - Mr MONGANDO MANZUA - Mr MABANGE Tharcisse - Mr BAZANA Eugene - Me NGONDE Marcel - Madame BABITI Marie José - Madame LIPEPELE Noel - Madame ENGAI Monique - Madame TEYAPALE Agnès 20.000.000$ US à chacun d’eux B. Parties civiles personnes morales I. Contexte historique et juridique de la création des personnes morales victimes des infractions d’assassinat et d’association des malfaiteurs (VSV et RENADHOC) 1. Instruments Juridiques Internationaux L’existence de ces deux ASBL (Associations Sans But Lucratif) procède de la manifestation de l’exercice de la liberté d’association. Cette liberté est affirmée par la déclaration universelle des droits de l’homme du 10/12/1948 qui dispose en son article 20 ce qui suit : « Toute personne a droit à la liberté de réunion et d’association pacifique. Nul ne peut être obligé de faire partie d’une association ». - 99 - Dans le même esprit, l’article 22 du pacte international relatif aux droits civils et politiques reconnait à toute personne le droit de s’associer librement avec d’autres. (P.I.D.C.P, adopté 16/12/1966). Ces deux instruments Juridiques Internationaux ont été librement ratifiés par la R.D. Congo. Voila pourquoi, la constitution de la RD. Congo réaffirme cette liberté 2. CONSTITUTION En son article 37, il est clairement stipulé que l’Etat garantit la liberté d’association. Toutefois les modalités pratiques de l’exercice de cette liberté sont fixées par la loi ; 3. LOI Dans ce contexte il s’agit de la loi n°004/2001 du 20 juillet 2001 portant dispositions générales applicables aux associations Sans But Lucratif et aux établissements d’utilité publique et conformément à cette loi, ces deux personnes morales : la VSV et le RENADHOC, ont été régulièrement constituées en ce qu’elles détiennent chacune en ce qui la concerne : - Des statuts notariés, - Un règlement d’ordre intérieur fixant les règles d’organisation et de fonctionnement, - Un arrêté de personnalité juridique. Il est important voire impérieux de préciser que ces deux ASBL (Associations Sans But Lucratif) œuvrent dans le secteur de la promotion et défense des droits humains Pour la VSV, les objectifs poursuivis et fixés à l’article 2 de leurs statuts se résument en promotion et défense de droits humains - 100 - Pour le RENADHOC; il convient de noter qu’ici, il s’agit d’un réseau renfermant en son sein toutes les ONGDH de la République Démocratique du Congo. Il a été crée pour servir de cadre de concertation, d’échange d’informations, d’expérience et d’appui visant le renforcement des capacités d’intervention et des moyens d’actions des structures provinciales locales et des bases (art 4 de leurs statuts). Créées dans le contexte du droit international, constitutionnel et légal, Ces deux ASBL sont des sujets des droits et en cette qualité elles peuvent ester en justice pour demander le respect de leurs droits juridiquement protégés. Dans le cas d’espèce, étant victimes des infractions commises par les prévenus, elles se sont régulièrement constitués parties civiles devant la Cour de Céans conforment à l’article 77 alinéa 1er du C.J.M qui dispose : L’action pour la réparation du dommage causé par une infraction relevant de la compétence de la juridiction militaire peut être poursuivie par la partie lésée en se constituant partie civile en même temps et devant le même juge que l’action publique. Pour ce faire, elles ont déposé dans leur dossier des pièces : • • • • leurs preuves de consignations Leurs statuts notariés Leurs arrêtés de personnalité juridique Et les procurations spéciales établies à leurs conseils pour leur représentation Cette constitution étant régulière il convient à présent de démontrer les préjudices subis par les DEUX ASBL - 101 - Attendu qu’il a été enseigné et jugé que l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction est accordée à tous ceux qui ont souffert du dommage directement causé par elle Arrêt ALAMBA, R.P. n°001/2004; (Alex WEIL et François TERRE, Précis Dalloz, Droit Civil, les obligations 1986, page 620 n° 603; ALAIN BENABENT, Montchrestien, Droit civil, les obligations, 2005, page 466, n°677) Qu’il ressort clairement des pièces déposées au dossier et de l’instruction de la présente cause que les infractions d’association des malfaiteurs et d’assassinat sont à la base des dommages subis par les deux ASBL pré-qualifiées ; Attendu que ces dommages se résument principalement en la perte de deux membres de leurs associations II. PREJUDICES La mort de ces deux hommes a occasionné Pour la VSV En ce qui concerne CHEBEYA - La perte de son fondateur et pionnier en RDC dans ce domaine de Stratégies et défense des droits humains (préjudice moral) - La perte d’un expert avéré dans les Stratégies et défense des droits humains et qui avait une expérience de ± 30 ans. (moral) - La perte d’un activiste de droit de l’homme en qui beaucoup des moyens avaient été investi pour sa formation et son recyclage (préjudice. Matérielle) - La perte d’un formateur et une référence en matière de Stratégies et défense des droits humains (moral) - La perte d’une source de financement (matériel) - La perte d’un stratège en matière de l’élaboration et défense de projets relatifs à la défense des droits humains - 102 - En ce qui concerne BAZANA - La perte d’un membre très actif et mobile, dévoué et déterminé pour défendre les autres (moral) La perte d’un employé en qui beaucoup des moyens avaient également été investi pour sa formation et recyclage (moral) La perte d’un membre d’une expérience de ±21ans (préjudice moral) POUR LE RENADHOC - La perte de son père fondateur (initiateur) (26/08/2000) (moral) - La perte d’un formateur en matière de création d’organisation et de fonctionnement des ONGDH (moral) - La perte d’une expertise de ±30 ans en ce domaine - La perte d’une source de financement (matériel) - La perte d’un stratège en matière de l’élaboration et défense de projets relatifs à la défense des droits humains Dans les deux cas de la VSV et de RENADHOC, chaque, année, pour le devoir de mémoire, les deux organisations seront désormais obligées de commémorer la disparition de ces vaillants activistes de droit de l’homme ce qui occasionnent des moyens importants. Attendu qu’étant donné que tous ces criminels sont des éléments de la Police Nationale Congolaise, donc, les agents de l’Etat Congolais en fonction, il est tout à fait justifié que la responsabilité civile de l’Etat soit engagée en vertu de l’article 260 du CCL III Tous ces préjudices nécessitent une réparation de la part du civilement responsable qu’est l’Etat Congolais dont la responsabilité est engagée dans les cas d’espèce. Qu’ainsi donc, qu’en considération des arguments ci-haut avancés, la Cour de Céans condamnera l’Etat Congolais à payer aux parties civiles les sommes ci-après en fonction des dommages subis du fait de la commission de ces infractions. - 103 - III. Evaluation des préjudices. Attendu que pour tous les préjudices tant moral, matériel que financier ci-haut avancés, la Cour de Céans condamnera l’Etat Congolais à payer à chacune de ces ASBL l’équivalent en Franc Congolais de la somme de 11.000.000 de dollars Américains à titre de dommages intérêts. - 104 - CINQUIEME PARTIE : LA RESPONSABILITÉ DE L’ETAT CONGOLAIS A. La responsabilité objective de l’Etat congolais Attendu qu’au terme des articles 16 et 34 combinés de la constitution de la République, il pèse sur l’Etat l’obligation générale consistant à assurer la protection des personnes vivant sur son territoire ainsi que de leurs biens, Qu’en l’espèce, l’Etat a manifestement failli à son obligation du fait de l’assassinat commis sur la personne de l’un de ses citoyens, en l’occurrence Monsieur Floribert CHEBEYA, Que bien plus, l’instruction de cette affaire a révélé que le crime déploré a été commis par des officiers et des éléments de la Police nationale en plein exercice de leurs fonctions dont ils ont abusé et avec les moyens logistiques de ce corps de l’Etat ; Qu’or, il est établi que la Police et l’Armée sont des organes de l’Etat étant des entités mandatées et pourvues des pouvoirs pour engager l’Etat auquel ils s’identifient, au point que les actes accomplis par ces organes sont réputés accomplis par l’Etat lui-même ; Que cela ressort clairement de l’article 5 du décret-loi 002/2002 du 26 janvier 2002 portant institution, organisation et fonctionnement de la police nationale congolaise qui dispose que « la Police nationale est une force chargée de veiller à la sécurité et à la tranquillité publique, de maintenir et de rétablir l’ordre public. Elle protège les personnes et leurs biens. Une surveillance continue constitue l’essence même de sa mission » Que le policier et le militaire ont chacun le pouvoir d’agir au nom et pour le compte de l’Etat et sont bien des organes de l’Etat et peuvent, dès lors, engager la responsabilité directe de l’administration ou des pouvoirs publics (en ce sens Leo. 14 mars 1950, J.T.O.M., 1950-1951, p.171 citée par Vincent KANGULUMBA MBAMBI, réparation des dommages causés par les troubles en droit congolais : responsabilité civile des pouvoirs publics et assurance des risques sociaux(émeutes, pillages, grèves et attroupements), éditions RDJA, Bruxelles, 2000, p.79) ; - 105 - Qu’en l’espèce, toutes les personnes impliquées dans cette affaire ont usé de leur qualité officielle de responsables ou de membres de la police nationale, d’une part, pour amener la victime à répondre au rendez-vous fatal et à séjourner au lieu du crime et, d’autre part, pour tenter d’effacer le traces du forfait et de dérouter l’enquête subséquente ; Qu’en vertu de la théorie de l’organe susdite, l’Etat congolais sera considéré comme étant personnellement fautif, et condamné à la réparation de la faute pénale ainsi commise par ses organes, sa responsabilité civile étant objectivement engagée. Que c’est dans ce sens que la Cour Suprême de Justice avait déjà d’abord relevé que « la responsabilité civile du civilement responsable n’exige pas, pour être engagée que l’acte fautif imputable au prévenu rentre dans les fonctions lui dévolues ; il suffit qu’il ait été commis pendant la durée du service et qu’il soit en relation avec celui-ci même indirectement et occasionnellement »,; avant de conclure ensuite qu’ « il est donc irrelevant pour l’employeur qui ne prouve pas avoir suffisamment surveillé ses agents pour les empêcher de commettre les actes déplorés, de prétendre que ses employés n’étaient pas chargés de taper ou de torturer la victime », (arrêt R.P. 123 in Bulletin des arrêts de la CSJ, années 1985 à 1989, Ed. Service des Documentation et d’Etudes du Ministère de la Justice et Garde des Sceaux, P. 254 à P.262). B. L’Etat congolais civilement responsable Attendu que si, par des moyens et arguments de droit, la Cour parvient à écarter la responsabilité objective de l’Etat telle que démontrée ci-haut, elle ne manquera pas alors de constater que la responsabilité civile de l’Etat est, à tout le moins, fondée sur l’article 260 du code civile livre III qui dispose que « on est responsable non seulement du dommage que l’on cause par son propre fait, mais aussi de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l’on a sous sa garde… Les maîtres et les commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les professions auxquelles ils les ont employés » ; Qu’en tant que policiers, les prévenus sont indiscutablement des préposés de l’Etat congolais et par conséquent, ce dernier doit répondre de leur fait en tant que civilement responsable sur pied de l’article 260 précité ; - 106 - Qu’en considération de cette disposition légale et de la jurisprudence de la Cour Suprême sus évoquée, la cour devra condamner l’Etat congolais à réparer, solidairement avec les prévenus ou seul, en cas de leur insolvabilité, le préjudice subi par les plaidants ; Attendu que la réparation de ce préjudice devra s’effectuer intégralement en application de l’article 47 du code civil livre III qui dispose que « les dommages-intérêts dus au créancier sont, en général, de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé,… » ainsi que des dispositions pertinentes de la résolution n°60/147 du 16 décembre 2005 de l’Assemblée Générale des Nations Unies, dont la RDC est partie signataire, portant « principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire », sus évoquée ; Qu’en effet, l’assassinat de Floribert CHEBEYA par les prévenus est une violation flagrante d’un droit international des droits de l’homme, à savoir le droit à la vie tel que consacré par plusieurs instruments juridiques internationaux ratifiés par la RDC dont, notamment, la charte internationale des droits de l’homme et la charte africaine des droits de l’homme et des peuples ; C. Bref aperçu des présomptions basées sur constatations, écrits et des indices concordants et graves devant fonder l’intime conviction de la cour Attendu que nonobstant la suffisance de la démonstration ci-haut de l’implication des prévenus dans l’association des malfaiteurs mise en place et ayant abouti à l’assassinat de Floribert CHEBEYA, il importe de relever et de mettre comme tels en évidence les divers indices concordants sur auxquels la cour aura égard pour fonder son intime conviction ; ladite intime conviction étant le socle même du principe de la « liberté de preuves » qui gouverne le raisonnement du juge pénal congolais ; Qu’en effet, en matière pénale, la preuve se définit comme « tout moyen permettant d’affirmer l’existence d’une infraction ou son absence, la culpabilité ou l’innocence du prévenu » ; - 107 - Que suite à son rôle actif, la loi laisse au juge pénal l’entière liberté d’appréciation des preuves, comme illustré par le code napoléon cité par NYABIRUNGU à la page 463 de son ouvrage sus évoqué : « la loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve, elle leur prescrit de s’interroger eux-mêmes, dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : avezvous une intime conviction ? » ; Que l’auteur précité poursuit en citant J.J. ROUSSEAU dans son ouvrage « la profession de foi du Vicaire Savoyard » en ces termes : « rentrons en nous-mêmes, ô mon jeune ami! … car il est au fond des âmes un principe inné de justice et de vertu. Le meilleur de tous les casuistes est la conscience ; et ce n’est que quand on marchande avec elle qu’on a recours à des subtilités du raisonnement… trop souvent la raison nous trompe… mais la conscience ne trompe jamais ; elle est le vrai guide de l’homme » ; Que c’est toujours dans ce même contexte qu’un éminent penseur du nom de François Rabelais affirme que « science sans conscience n’est que ruine de l’âme » ; Que pour sa part, la jurisprudence a maintes fois et davantage réaffirmé ce principe de la liberté de la preuve en jugeant notamment que : - le juge de fond apprécie les moyens de fond souverainement (et non pas arbitrairement) ; - en matière répressive, le juge doit tirer son intime conviction sur la responsabilité pénale du prévenu de l’ensemble des éléments du dossier, cela de manière libre, et il n’est donc pas obligé de tenir compte uniquement des éléments de défense présentés par le prévenu, … Que dans le dossier soumis à l’examen de la cour, il est un faisceau d’indices, d’écrits et des faits ou constations matérielles graves et concordants faisant présumer l’implication directe des prévenus dans les infractions mises à leur charge ; - 108 - C.1. Des constations matérielles : Attendu que les constations matérielles de l’assassinat de CHEBEYA sont constituées par les différents photos de la scène du crime qui indiquent les signes de violence exercée sur la victime, à savoir : - les traces de sang coulant de sa bouche ; - les traces des menottes dans lesquelles elle était maintenue avant sa mort ; - l’abandon de son corps à Mitendi par une jeep de la police, suivant le témoignage concordant de la population recueillie par le chef de quartier ; - la reconnaissance par le rapport de l’expertise médico-légale, des facteurs ou forces extérieures dans la mort de la victime ; … C.2. Des indices graves et concordants Attendu que par indices, il faut entendre « tout fait ou circonstance pouvant conduire à la vérité dans le procès pénal qui nous concerne, autrement dit des faits ou des circonstances qu’on suppose établis et dont il s’agit de dégager le rapport avec le fait recherché » ; Qu’in specie, ces indices relevés sont les suivants : - la réquisition par le prévenu MUKALAY, en date du 1er juin 2010 (date de l’assassinat de la victime), d’une jeep de la police canine prétendument pour traquer un élément en fuite, à mettre en exergue avec le témoignage de la population de Mitendi par rapport à la jeep de la police ayant abandonné la voiture et le corps de CHEBEYA à Mitendi ; - le prétexte d’ignorance par le prévenu MUKALAY des policiers à qui il aurait confié ladite jeep pour la fameuse mission ; - les multiples et incessants appels des prévenus MUKALAY et Michel MWILA pour attirer la victime vers l’inspection générale de la police le jour de son assassinat ; - omission d’enregistrement de la victime dans le registre des visiteurs de l’inspection générale de la police en date du 1er juin 2010 ; - la prise en charge du téléphone de la victime et ceux des prévenus MUKALAY et Christian NGOY KENGA KENGA, en date du 1er juin 2010 aux environs de 19 heures, par les mêmes antennes de téléphonie cellulaire couvrant la zone de l’inspection générale de la police ; - 109 - - la prise en charge du téléphone du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA le même soir de l’assassinat et abandon du corps de la victime à Mitendi, par l’antenne de téléphonie cellulaire couvrant la colline de Mitendi aux alentours de 22 heures ; - les appels téléphoniques et SMS échangés entre les prévenus Daniel MUKALAY, Christian NGOY KENGA KENGA et Paul MWILAMBWE pendant les heures suspectes le 1er juin 2010 ; - la dangerosité du prévenu MUKALAY soulignée par son supérieur hiérarchique, le général UNYON qui lui avait interdit d’entrer dans son bureau en arme ; - dans le même ordre d’idée de cette dangerosité, le prévenu MUKALY avait déjà programmé l’élimination systématique des autorités de la police de la province de l’équateur, tel que rapporté par le colonel Kanold KAMANA, président de la commission de discipline l’ayant sanctionné après découverte de son plan macabre ; - l’importante quantité d’armes et munitions de guerre trouvées au domicile des prévenus Daniel MUKALAY, Christian NGOY et Paul MWILAMBWE dont la détention n’est justifiée par aucun document officiel de la police ; - l’e seul et unique journal écrit trouvé dans la chambre du prévenu Paul MWILAMBWE ayant à sa une le titre « la mort confirmé de CHEBEYA » ; - la quantité de préservatifs trouvés au domicile de Christian NGOY et Paul MWILAMBWE de marque « prudence » semblables à ceux trouvés sur la scène du crime ; - l’assassinat de Monsieur BAZANA EDADI, chauffeur et accompagnateur de la victime lors du déplacement fatal à l’inspection générale le 1er juin 2010, dans le cadre de l’effacement des traces de l’assassinat de CHEBEYA, car il fallait faire taire ce témoin gênant ; … C.3. Des documents écrits Attendu que dans le lot d’indices de présomptions de culpabilité des prévenus, il faut signaler également quelques documents écrits dont certains établis suivant des procédés modernes de communication téléphoniques (SMS) ; Que ces écrits sont constitués de : - 110 - - la lettre manuscrite du prévenu MANDIANGU demandant à son commandant de procéder à la destruction de toutes ses cartes SIMS ; - le SMS du prévenu Christian NGOY envoyé dans la nuit fatidique du 1re juin 201au prévenu MUKALAY pour savoir ce qu’il doit faire de l’adversaire ; - le SMS fait du prévenu Christian NGOY KENGA KENGA adressé à l’inspecteur général, Monsieur John NUMBI, dans la même nuit du 1er juin 2010 ; Attendu qu’au regard de toutes ces situations et outre la démonstration de la commission par les prévenus des infractions mises à leur charge, la cour se convaincra davantage de leur culpabilité en fondant également son intime conviction sur les présomptions ; Que c’est justement dans ce sens que la doctrine dominante retient que « le juge pénal, sans plus de précision, pouvait fonder son intime conviction à partir d’un ensemble d’éléments convergents, même si pris isolément ne fournissent pas une certitude suffisante » (NYABIRUNGU, Op. Cit., P. 475) ; Qu’en effet, il est reconnu au juge pénal cette « prérogative … de tirer d‘un ensemble de vraisemblances une certitude de culpabilité », en condamnant notamment les prévenus des infractions d’association de malfaiteurs et d’assassinat de Floribert CHEBEYA mises à juste titre à leur charge ; D. MODES COMPLEMENTAIRES DE REPARATION D.1. La satisfaction Attendu que la résolution n°60/147 du 16 décembre 2005 de l’Assemblée Générale des Nations Unies en son annexe portant les principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à la réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l’homme et de violations graves du droit international humanitaire recommande la satisfaction en tant qu’une des modalités de réparation du préjudice subi par les parties lésées en ce qu’elle fait obligation aux instances compétentes, en l’occurrence les organes judiciaires, de vérifier les faits qui leur sont soumis et de faire une divulgation complète et publique de la vérité et ce, de manière à rétablir la victime et les personnes qui ont un lien étroit avec elle dans leur dignité, leur réputation et leurs droits (point IX,22). - 111 - Qu’en l’espèce, le fait pour la Cour de donner dans sa décision la pleine lumière, d’une part, sur les circonstances ainsi que les commanditaires et autres exécutants de l’assassinat de Floribert CHEBEYA et, d’autre part, sur le caractère injustement infâmant du montage de la scène du crime qui a foulé aux pieds la dignité de la victime et de sa famille, sera donc une forme de réparation vivement souhaitée pour contribuer à réparer tant soit peu le préjudice moral subi par les parties civiles précitées ; D.2. Les garanties de non répétition Attendu que la résolution de l’Assemblée Générale des Nations unies susdite prévoit une autre modalité de réparation du préjudice subi qui consiste en la garantie de non répétition (point IX,23) dont l’une des mesures consiste à formuler clairement une recommandation aux pouvoirs publics pour que soient prises des mesures efficaces de contrôle des forces armées et des forces de sécurité destinées à corriger tous les cas de dysfonctionnement desdits services qui ont été relevés au cours de cette malheureuse affaire ; Qu’outre la garantie qui serait ainsi offerte aux parties lésées qu’un tel crime ne pourra plus à l’avenir être commis sur leur propre personne ou sur celles de leurs autres proches, une telle recommandation faite par la Cour aux pouvoirs publics permettrait, de manière plus spécifique, d’assurer une protection plus efficiente aux défenseurs des droits humains et aux membres d’autres professions exposées aux mêmes risques que la victime ; Que les dysfonctionnements les plus flagrants notés au cours des différents stades de ce dossier et qui méritent d’être corrigés ont trait au fait que : • Certains officiers de la Police Nationale, tel que le prévenu Daniel MUKALAY ne sont pas soumis à leur supérieur hiérarchique à cause du traitement de faveur dont ils jouissent de la part du plus haut responsable de cet important corps de l’Etat, • Certains officiers des services spéciaux de la Police Nationale, à l’instar des prévenus Daniel MUKALAY, Georges KITUNGWA et du renseignant Jerry KAHOZI peuvent de manière autonome et sans en informer le premier responsable de leur service ou même contre l’avis de celui-ci, s’engager dans des enquêtes officieuses et illicites destinées à entraver et à brouiller les pistes de l’enquête judiciaire indiquée pour la circonstance, - 112 - • La plus haute autorité de la Police nationale encourage l’insubordination de certains officiers de la Police nationale tel que le prévenu Daniel MUKALAY en leur attribuant des bureaux à ses côtés contre l’avis de leur supérieur hiérarchique qui tient vainement à leur disposition un autre local à leur lieu ordinaire de travail, • La plus haute autorité de la Police nationale transmet des ordres à des responsables de grandes directions nationales de ce corps via leurs subalternes dont il conforte ainsi l’insoumission à leur hiérarchie directe, • L’incorporation d’une unité entière des Forces armées aériennes dans la Police nationale avec des armes et munitions inappropriées à la mission traditionnelle de ce corps s’est faite selon des procédures non connues des autres hauts responsables de la Police qui ont avoué à la barre, d’une part, ne rien connaître du fonctionnement de l’unité composée par les éléments ainsi transférés et, d’autre part, ne disposer d’aucun contrôle sur le dépôt particulier où sont logées les armes ainsi transférées, dont une partie a été retrouvée dans la résidence privée ainsi que dans un véhicule de certains officiers de la Police nationale impliqués dans cette affaire, • Un des responsables d’une des unités de la police (la DRGS), en l’occurrence le prévenu Daniel MUKALAY se permet de réquisitionner de force et contre l’avis des responsables d’une autre unité (l’unité canine) des véhicules envoyés dans des missions ignorées par ces derniers et sans qu’à l’issue desdites opérations une remise et reprise formelle desdits véhicules ne soit effectuée, Les attributions des différents services (secrétariat de l’IG) et unités (Police techniques et scientifique) ne sont pas respectées par certains Officiers de la police nationale tel que le prévenu Daniel MUKALAY dont les propres attributions ne sont pas clairement circonscrites. - 113 - SIXIEME PARTIE : VIOLATION DES INSTRUMENTS JURIDIQUES PROTECTION DES DROITS DE L’HOMME INTERNATIONAUX DE La RDC, notre pays, est membre de plusieurs organisations tant régionales qu’internationales, notamment l’Organisations des Nations-Unies, l’Union africaine, la CEEAC, la SADC, etc. A ce titre, l’Etat congolais est astreint au respect strict des engagements pris en termes de conventions et traités régulièrement signés et ratifiés par lui ainsi que de résolutions et déclarations qui s’imposent à lui comme membre de ces diverses organisations ; Pour l’ applicabilité de ces instruments juridiques internationaux, il sied de noter que pour les conventions, les traités et les protocoles, le juge set tenu à vérifier la signature et la ratification par l’Etat, tandis que pour la résolution et la déclaration c’est le seul fait que l’Etat soit membre de l’organisation internationale qui les a adoptées qui rend obligatoire leur application ; L’article 215 de la constitution congolaise en vigueur dispose, à ce sujet, que « les traités et accords internationaux régulièrement conclus ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve pour chaque traité ou accord, de son application par l’autre partie » ; Dans le cas sous examen, s’agissant de l’observation par l’Etat congolais des dispositions des instruments juridiques internationaux par rapport à la protection de ses propres citoyens, en occurrence Floribert Chebeya et Fidel Bazana, le principe de la réciprocité ne pourra pas être évoqué, car il ne s’agit pas d’un cas qui oppose la RDC à un autre Etat ; Il vous souviendra qu’en 1948, suite aux graves violations des droits humains pendant les deux guerres mondiales, les Nations – Unies ont adopté la déclarations universelle des droits de l’homme, qui est devenue aujourd’hui la norme de base en matière de respect et de défense des droits de l’homme ; - 114 - Aux termes des articles 2, 9, 14 et 15 de ladite déclaration « l’Etat est le premier responsable de la protection des droits de citoyens dont les défenseurs de droits humains » ; L’article 12 de ladite déclaration précise que « l’Etat doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne individuellement ou en association avec d’autres, contre la violence, la menace, représailles, etc. » Comme vous pouvez bien le remarquer, les premiers articles évoqués (articles 2, 9,14 et 15) posent le principe de la responsabilité internationale de l’Etat par rapport à la protection des droits de citoyen, tandis que l’article 12 apporte des éclaircissements sur ce que doit faire l’Etat pour bien protéger les droits de citoyen. Dans le cas sous examen, celui des assassinats de Floribert Chebeya et Fidel Bazana, il se dégage que non seulement la Police Nationale Congolaise (PNC), institution publique de l’Etat est activement impliquée, mais ce sont surtout en majorité les officiers de ladite police qui sont au cœur de ces actes ignobles que nous déplorons aujourd’hui ; Dans un Etat de droit, quelle est l’institution qui peut mieux protéger la population si ce n’est la police nationale ? Que la police s’adonne à des actes criminels comme c’est le cas, c’est plus que déplorable. La police fait partie des attributs de souveraineté qui font la fierté de l’Etat, malheureusement ce n’est pas le cas pour la RDC où la police fait la honte ; Ceci est d’autant plus vrai que le Dialogue inter – congolais (DIC) de Sun city avait décidé, dans le cadre de la mise sur pied d’un nouvel ordre politique, que soit procédé à la reforme du secteur de la sécurité, particulièrement la police ; L’objectif de cette reforme est non seulement de débarrasser la police des antis valeurs en la dotant des institutions démocratiques conformément aux standards internationaux en la matière, mais également de n’y laisser que des personnes intègres, respectueuses des valeurs démocratiques et mettent l’homme au centre de leur activité ; - 115 - Malheureusement tel n’est pas le cas avec la présence de gens comme John Numbi, Daniel Mukalay et leurs adeptes au sein de la police ; En outre, la RDC a signé et ratifié la Charte africaine des droits de l’homme et du peuple, le pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que la Convention internationale contre la torture ; Aux termes de l’article 4 de la Charte « la personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et de l’intégrité physique et morale de sa personne. Nul ne peut être privé arbitrairement de sa vie » ; Quant à l’article 6, alinéa 1 du pacte « le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut être arbitrairement privé de la vie » ; Au regard de cette exigence de la Charte, pourquoi Floribert Chebeya et Fidel Bazana sont – ils aujourd’hui réduits au silence et privés éternellement de leur vie ? Quel péché avaient - ils commis pour mérité une telle sentence ? Il s’agit plutôt d’acte arbitre commis par les ennemis de la démocratie. Quant à la convention internationale contre la torture, son article 1èr dispose que « aux fin de la présente convention, le terme torture désigne tout acte par lequel une douleur ou une souffrance aigue, physique ou morale, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tièrce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tièrce personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, lorsqu’une telle douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant à titre officiel ou à son investigation ou avec son consentement exprès ou tacite. Etc. » Il ressort de cet article qu’il y a 4 éléments qui fondent la torture, il s’agit d’une douleur ou souffrance aigue, personne humaine (victime), l’intention de l’auteur (punir, faire pression, etc.) et la qualité de l’auteur (agent de la fonction publique, etc.) ; - 116 - Dans le cas d’espèce, l’équipe de John Numbi et de Daniel Mukalayi avait soumis Floribert Chebeya et Fidel Bazana (victimes) des souffrances les plus atroces ayant pour effet la suppression de leurs vies. Cette souffrance a été infligé dans le but de les punir parce qu’en tant que défenseurs des droits humains ils dérangeaient le régime en place. Les auteurs de ladite souffrance sont des policiers qui selon la loi de 2002 et l’option de la reforme actuelle sont des agents de la fonction publique ; L’alinéa 1èr de l’article 2 de la même convention dispose que « Tout Etat partie prend des mesures législatives, administratives, judiciaires et autres mesures efficaces pour empêcher que des actes de torture soient commis dans tout territoire sous sa juridiction » ; L’alinéa 1èr de l’article 4 renchérit en disant que « Tout Etat partie veille à ce que tous les actes de torture constituent des infractions au regard de son droit pénal… » Ces deux articles insistent sur l’obligation d’ériger la torture en infraction autonome dans la législation nationale de chaque Etat partie. Ce n’est pas le cas en RDC où malgré le plaidoyer des organisations de droits de l’homme pour pousser l’Etat congolais à pénaliser la torture, celui s’est obstiné à ne pas le faire afin d’assurer l’impunité aux auteurs notamment l’équipe de John Numbi et Daniel Mukalayi sans oublier leurs autres coéquipiers ; A ce sujet, la jurisprudence du Comité contre la torture dispose que « l’absence de législation interdisant la torture ou la non application de la législation à cet effet revient à un consentement tacite à la perpétration des actes de torture par les agents de l’Etat » (voir les observations finales sur le Cameroun (2004)UN.doc.CAT.CR/31/6, §7) ; Forts de cette garantie d’impunité, les auteurs des assassinats de Floribert Chebeya et Fidel Bazana, n’ont pas hésité à le faire ; - 117 - C’est ce que traduit la déposition du Commissaire Shako, lors de l’instruction de la présente cause devant la Cour, lorsqu’il dit que « le prévenu Daniel Mukalayi lui avait dit pendant qu’il examinait les photos du corps de Floribert Chebeya que même s’il arrivait un problème politique, social ou économique, vous vous êtes agent de l’Etat vous devez toujours être du coté de l’Etat » ; Plus encore, l’impunité dont bénéficie à ce jour John Numbi malgré la plainte de la veuve Chebeya renforce la thèse de la couverture et de l’implication de l’Etat dans la commission de ces assassinats ; Alors que l’auditorat militaire a été saisi et a entendu la veuve et l’inculpé John Numbi, la plaignante n’a jamais été fixée sur la suite réservée à son action ; Aussi, l’attitude de la République pendant l’instruction par la Cour de la présente cause tendant à prendre fait et cause à la place des prévenus corrobore davantage cette thèse de la légèreté et léthargie de l’Etat; De ce qui précède, Monsieur le Premier président, Messieurs de la Cour, Honorables membres du siège ; Sur le plan international, un Etat qui attente à la vie de ses citoyens et qui refuse délibérément d’ériger en infraction autonome dans sa législation les actes de torture en assurant l’impunité aux auteurs est un Etat voyou, qui mérité d’être condamné ; La RDC remplit pleinement ce critère d’Etat voyou et doit condamné quant à ce; Par ces motifs, Sous toutes réserves Sans reconnaissance préjudiciable - 118 - être PLAISE A LA COUR MILITAIRE - Recevoir les constitutions des parties civiles reprises en exergue ; - Condamner les prévenus aux peines réclamer par le MP ; - EN REPARATION DU PREJUDICE SUBI PAR LES PARTIES CIVILES ; Ordonner à titre de garantie de non répétition ; 1. La dissolution du Bataillon SIMBA, auteur du terrorisme 2. La suppression de la DRGS Condamner pour assurer la satisfaction des parties civiles les sommes ci-après : - - 1. La VOIX DE SANS VOIX, VSV Le remplacement de la voiture de marque Mazda 626 Allouer une indemnité compensatoire pour la non utilisation du véhicule à raison de 100 $US/jour à partir du 2 juin 2010 jusqu’à la date de la remise effective de la voiture Indemnité de 10 millions de dollars pour le préjudice subi par la disparition du formateur CHEBEYA Indemnité de 1 million de dollars par province de la RDC soit 11 millions de dollars 2. Le RENADHOC - Indemnité de 1 million de dollars par province de la RDC soit 11 millions de dollars 3. La veuve CHEBEYA - 30 millions de dollars américains 4. la veuve BAZANA - 30 millions de dollars américains 5. Enfants CHEBEYA - 25 millions de dollars américains par enfant 6. enfants BAZANA - 25 millions de dollars américains par enfant 7. Frères et Sœurs CHEBEYA - 20 millions de dollars américains par personne 8. Frères et Sœurs BAZANA - 20 millions de dollars américains par personne ET VOUS FEREZ JUSTICE. Fait à Kinshasa, le 02 mai 2011 - 119 - Pour les concluants, N° 01. 02. 03. 04. 05. NOMS Barreau Bât. MUKENDI wa MULUMBA Jean-Joseph Doyen CO BCSJ Bât. NTOTO ALEY ANGU Membre du CO BCSJ BCSJ Me FULA MATINGU Membre du CNO BRKG Me LUHAKA EKESSA Marie-jeanne Doyenne au BRKG et Membre du CNO Me SESEP MUKANSIEN Régine Me Richard BONDO 16/02/1971 BCSJ 16/09/1971 15/08/1984 Doyenne du CO BRKG V/Doyen du CO BRKG BRKG 06. Me MUILA KAYEMBE 07. 08. Me Irène DIATA ESAMBO Barreau de Kga et de Matete Barreau Kananga 10. Me KABENGELA ILUNGA Membre du CO BKM Me Jean KEBA (ASHADO) Me Claude KANIEKETE BOBA BKM 11. Me MALERE MUDEKEREZA Guillain BKM Me NSELE Alain BKM 09. 12. 13. 14. 15. NGOMBA Me TUZOLANA ye NTUDIKILA Membre du CO BKM Me Simon-Pierre ENDJONGA EALE Me BUHENDWA Fraterne 16. Date prestation Serment 16/07/1982 09/12/1987 24/04/1988 Haut Congo n° 5335 C/Gombe 1998 23 D, LINGWALA BOYATA, 24/06/1999 10ème étage, Immeuble Flamboyant, App. 10F 22/03/2000 N°1, Av. LIKASI, Crois. avec Av. du Plateau 29/12/2000 Av. Equateur n° 36 C/GOMBE 10/02/2001 Cab. KALONGO MBIKAYI, 14ème niveau, Appt 14B, Nlles Galeries Plles Cab. TSHIBANGU MUZAMBA 10/02/2001 Cab. TUZOLANA, 12, Av. Kwango 10/02/2001 BKM Barreau de Mbandaka BRKG Blg du 30 juin Bel Etage, Entrée D, C/Gombe Nlles Gal. Présidentielles 1er Niv. Local 1M10, C/Gombe 195, Av. de l’enseignement face Stade des Martyrs, C/Kasa-Vubu 288, Rue Ngele, Commune de Lingwala Croisement des Av. Pumbu et les Bâtonniers, C/Gombe 8 ème Etage, Immeuble Botour 16/11/1994 BKM Barreau de Matadi ADRESSE CABINET 14/04/2001 25/06/2002 - 120 - Cab. KAYEMBE, Imm. BOTOUR, 2ème Niveau, Local 4, C/GOMBE Cab. KAHASHA SIGNATURE 17. Me NGOMO MILAMBO BRKG Me MBIKAYI MUAMBA BKM 18. 09/09/2002 Me MAZAMBI BANAMWEZI J.M. BRKG 19. Me Yvette MUANJELU BKM 20. 21. MUKENDI 09/05/2003 Me MUANDA Staguy NZAU BKM 09/05/2003 Me OSAKANU OMOLE Yves BKM BKM 23. Me MADJADJO NDONGO 24/12/2004 Delphin KOYAMBO GESSARA 26. Me TSHIBOLA MADIYA Diane 27. Me Willy (VSV) BRKG 30/08/2005 BAKUIKILA Me Alex MUTOMBO Barreau de BDD Me Serge MASSAKA 30. Me Nadine KAMWANYA MAYAMBA Patricia Me Bénédicte BOBA MATABISI 14ème App. 14D, Nlles galeries présidentielles/Gombe Im. Botour, 2ème niveau local 4 Kin/Gombe Cab. BOLEBE & Co, Local B8, 8ème étage, Anc. Galerie Présidentielle Cab. MUKENDI MULUMBA 15/09/2006 73, croisement DjoluAssossa, C/Kasa-Vubu 29/12/2006 5353, Av. Haut-Congo, Kinshasa/Gombe 03/08/2007 Local 4, 2è niveau, Imm. Botour, C/Gombe 09/08/2009 14è App. 14D, Nlles Galeries Prés. /Gombe 29/09/2009 Av. Lokole n°5, Imm. Kisombe, C/Gombe BKM BKM BKM BRKG 31. Me Rachel BIBI Bâtonnier 02/06/2006 BKM 28. 29. Cab. KHONDE wa Cab. Bât. KHONDE BKM 24. 25. Cab. MUKENDI MULUMBA 09/01/2004 10/09/2004 Me Jacob BALUISHI 1er niveau Imm. Shakupewa, 7, croisement des Av. Tombalbaye et Hôpital général Cab. WASENDA 28/01/2003 22. 32. 30/07/2002 07, Av. Hôp. Gén. Imm. SHAKUPEWA BRKM 10/09/2010 - 121 - wa 10ème étage, Imm. Flamboyant Appt 10 F, C/Gombe Avec la collaboration de : 33. Maître François CANTIER, Président Avocats Sans Frontières/France et Avocat au Barreau de Toulouse, au nom du Réseau Avocats Sans Frontières. - 122 - TABLE DES MATIERES PREAMBULE ---------------------------------------------------------- 1- 3 AVANT PROPOS ---------------------------------------------------------- 4- 6 1. Civilité 2. Les sentiments des Parties Civiles 3. Défis INTRODUCTION ---------------------------------------------------- 7-19 A. Les victimes et leur activité B. Les faits C. Analyse et critique des faits c.1. Contexte c.2. De la suspicion de MUKALAY D. Rétroactes E. Conclusion PREMIERE PARTIE : --------------------------------------------------- 20 - 31 Des faits et rétroactes liés aux infractions mises à charge des prévenus DEUXIEME PARTIE : Discussion en Droit ------------------------------ 32 - 61 I. De l’association des malfaiteurs II. Analyse du double assassinat de CHEBEYA et BAZANA 2.1. La responsabilité de l’Etat A. Organisation de ce procès A.1. Flo. CHEBEYA & Fid. BAZANA comme prix à payer A.2. Application de la démocratie des co-propriétaires B. Analyse des éléments constitutifs de l’assassinat B.1. Elément matériel B.2. La personnalité humaine de la victime B.3. La préméditation dans le chef des prévenus B.4. Assassinat de Fidèle BAZANA C. Quant à l’infraction du terrorisme c.1. Aperçu historique c.2. Quid de sa définition - 123 - TROISIEME PARTIE : Administration de la preuve ----------- 62 – 90 I. Des preuves à charge des prévenus Introduction A. Notions Constatations matérielles B. Les indices C. Les présomptions D. Les procès verbaux E. Des écrits F. Des relevés téléphoniques G. De l’expertise médico-légale I.1. De l’assassinat de CHEBEYA BAHIZIRE Floribert I.2. Assassinat de BAZANA EDADI Fidèle A. Preuves de l’élément matériel I.3. Association des malfaiteurs A. Preuve de l’organisation B. Série d’infractions 1. Quant à l’expertise médico-légale 1.3. Mission assignée aux experts QUATRIEME PARTIE : L’indemnisation des parties civiles ------ 91 – 102 A. Parties civiles personnes physiques A.1. Analyse des préjudices A.2. Evaluation des dommages B. Parties civiles personnes morales I. Contexte historique et juridique de la création des personnes morales victimes des infractions d’assassinat et d’association des malfaiteurs (VSV & RENADHOC) 1. Instruments juridiques internationaux 2. Constitution 3. Loi II. Préjudices III. Evaluation des préjudices - 124 - CINQUIEME PARTIE : LA RESPONSABILITE DE L’ETAT CONGOLAIS --- 103-111 A. La responsabilité objective de l’Etat Congolais B. L’Etat congolais civilement responsable C. Bref aperçu des présomptions basées sur constatations, écrits et des indices concordants et graves devant fonder l’intime conviction de la Cour. c.1. Des constatations matérielles c.2. Des indices graves et concordants c.3. Des documents écrits D. Modes complémentaires de réparation d.1. La satisfaction d.2. Les garanties de non répétition SIXIEME PARTIE : --------------------------------------------------- 112 -116 Violation des instruments juridiques internationaux de protection des Droits de l’Homme DISPOSITIF : --------------------------------------------------------- 117 - 118 - 125 -